En cours au Siège de l'ONU

7460e séance – matin
CS/11924

Le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix appelle à une relance des négociations directes au Darfour

Le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, M. Edmond Mulet, qui a fait état d’une situation sécuritaire « très grave » au Darfour, a estimé que la « relance des négociations directes et du dialogue national doit demeurer la priorité ».  Le représentant du Soudan, M. Hassan Hamid Hassan, a dénoncé une « mauvaise présentation de la réalité ».

« La résolution du conflit au Darfour nécessite plus que jamais les efforts conjoints du Conseil de sécurité, de l’Union africaine et de l’ensemble de la communauté internationale en vue d’amener les parties belligérantes à comprendre qu’il ne saurait y avoir une solution militaire », a déclaré M. Mulet, qui présentait le rapport* du Secrétaire général sur l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD).

M. Mulet, qui a insisté sur l’importance de « continuer la coopération sur la base d’une confiance mutuelle », a exprimé la recommandation du Secrétaire général, M. Ban Ki-moon, en commun accord avec le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, de prolonger le mandat de la MINUAD pour une année supplémentaire jusqu’au mois de juin 2016.

Le rapport du Secrétaire général décrit une situation sécuritaire « très grave » et souligne la « nécessité de maintenir une aide humanitaire substantielle au Darfour » et le « peu de progrès dans le processus de paix ».  En outre, il fait état d’une augmentation « profondément préoccupante des attaques violentes par des assaillants armés contre la MINUAD et le personnel humanitaire ».

« Le plus inquiétant est l’impact dévastateur que la situation sécuritaire a sur des civils innocents, et les obstacles qu’elle a créés pour leur protection et pour les opérations humanitaires », a déclaré M. Mulet.

Le Secrétaire général, dans ce rapport, qui porte sur la période entre le 26 février 2015 et le 15 mai 2015, présente un état actualisé et une analyse du conflit et de la situation politique et opérationnelle au Darfour.  Il fait état des résultats obtenus par la MINUAD, approuvés par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2148 (2014), ainsi que des progrès accomplis dans la levée des obstacles qui entravent la bonne exécution du mandat de la Mission.

Enfin, il fait le point de la situation et formule des recommandations au sujet du transfert à l’équipe de pays des Nations Unies au Soudan de certaines tâches confiées à la MINUAD et de l’élaboration d’une stratégie de sortie pour la Mission.

La période considérée a été marquée par l’escalade des hostilités entre les forces gouvernementales et les factions rebelles, à savoir la faction Abdel Wahid Mohammed Ahmed Nour de l’Armée de libération du Soudan (SLA/AW), la faction Minni Minawi de l’Armée de libération du Soudan (SLA/MM) et la faction Gibril Ibrahim du Mouvement pour la justice et l’égalité (JEM/Gibril).

Le Gouvernement, a expliqué M. Mulet, a intensifié ses opérations contre-insurrectionnelles avec le lancement de la deuxième phase de l’opération « Été décisif » des Forces d’appui rapide, qui a entraîné de nouveaux déplacements de populations civiles.  Selon les organisations humanitaires, au moins 78 000 personnes ont été déplacées par le conflit au Darfour cette année.

De même, a ajouté le Sous-Secrétaire général, les violences ont été exacerbées par des querelles intestines au sujet des terres, de l’accès aux ressources et des migrations et par des rivalités tribales.  La prolifération des armes légères et la déliquescence de l’État ont également entraîné une montée de la criminalité et du banditisme dirigés contre les populations locales.

Dans le cadre de la poursuite de la mise en œuvre de l’examen stratégique de la MINUAD en 2014, « le Secrétariat des Nations Unies continue de travailler avec la direction de la Mission, de l’Union africaine et d’autres partenaires pour s’assurer que les soldats de la paix au Darfour sont en mesure de mener à bien leur mandat de manière efficace », a par ailleurs déclaré M. Mulet.

Sur le plan civil, l’attention reste portée sur la rationalisation du personnel et le processus de transfert d’une partie des tâches prescrites de la MINUAD à l’équipe de pays des Nations Unies.  Une analyse a été menée afin d’identifier lesquelles de ces tâches pourraient être réalisées par la MINUAD ou lesquelles devraient être mises en œuvre conjointement avec l’équipe de pays.

Le plan opérationnel pour la mise en œuvre de ce processus est développé conjointement par la MINUAD et l’équipe de pays et reposera sur des critères spécifiques, en tenant compte de certaines conditions préalables, y compris la mobilisation de ressources financières adéquates et le soutien nécessaire du Gouvernement du Soudan.

Le Sous-Secrétaire général a également affirmé que la MINUAD avait continué à mettre en œuvre efficacement son mandat de protection des civils à travers la fourniture d’une protection physique, le soutien logistique et sécuritaire aux opérations humanitaires, la promotion d’un environnement protecteur et à la médiation des conflits locaux.  Dans ce contexte, a-t-il dit, la Mission a révisé sa stratégie de protection des civils, dont les composantes pertinentes sont actuellement mises en œuvre.

Concernant l’élaboration d’une stratégie de sortie pour la MINUAD, en février 2015, a-t-il souligné, un groupe de travail conjoint a été créé entre les Nations Unies, l’Union africaine et le Gouvernement du Soudan pour répondre à la demande du Conseil de sécurité dans sa résolution 2173 (2014).

Comme l’indique le Secrétaire général dans son rapport, suite à une visite sur le terrain et deux séries de discussions, le Groupe de travail n’a pas encore produit une conclusion et les consultations reprendront dans les prochaines semaines.  Cependant, pendant les réunions, l’équipe conjointe de l’Union africaine et de l’ONU a exploré l’idée d’une approche à deux volets avec le Gouvernement, a précisé M. Mulet.

D’abord, la stratégie de sortie proposée de la MINUAD se fonde sur la réalisation des critères de référence de la Mission, approuvés par le Conseil de sécurité l’an dernier, et sur une solution politique au conflit sur la base des pourparlers directs entre les parties, à commencer par une cessation des hostilités.

La stratégie de sortie est également basée sur le retrait graduel et progressif de la force de la MINUAD de l’ouest du Darfour, où il n’y a pas eu de grandes activités par des groupes armés ou des affrontements intercommunautaires au cours des deux dernières années.  La réduction progressive de la présence de la MINUAD au Darfour-Ouest serait complétée par un transfert progressif de ses tâches au Gouvernement et à l’équipe de pays des Nations Unies, dès lors que les conditions nécessaires pour une consolidation de la sécurité dans l’état sont créées par les autorités nationales, a expliqué M. Mulet.

L’élaboration d’une stratégie de retrait pour la MINUAD doit être liée, selon lui, aux résultats obtenus par rapport à l’objectif de la relance des négociations directes et du dialogue national et à l’amélioration concrète de la situation sur le terrain.  « Lorsque nos efforts dans ce sens auront porté leur fruit, lorsque la population sera libérée de la peur et des violences, alors il sera temps de nous désengager. »

Le représentant du Soudan, M. Hassan Hamid Hassan, a dénoncé la « mauvaise présentation de la réalité » faite selon lui dans la première partie du rapport du Secrétaire général où il est décrit une situation dangereuse au Darfour. 

Le délégué a demandé que l’on « ne mélange pas la violence tribale et les incidents entre les groupes rebelles et le Gouvernement soudanais ».  Il a reconnu que des violences tribales « ont lieu depuis longtemps en raison de la prolifération des armes légères et de petit calibre ». 

M. Hassan a assuré qu’il n’y avait « plus de conflit ouvert avec les groupes rebelles, à l’exception de certains incidents », comme celui intervenu le 26 avril lorsque les Forces d’appui rapide ont pris en embuscade, dans la zone de Nikhara près de Toulous (Darfour méridional), un convoi de véhicules du Front révolutionnaire soudanais provenant du Soudan du Sud et composé de forces des factions Gibril Ibrahim du Mouvement pour la justice et l’égalité (JEM/Gibril) et Minni Minawi de l’Armée de libération du Soudan (SLA/MM).

« Le Soudan est à la veille d’une période prometteuse et pleine d’espoir », a estimé M. Hassan, faisant référence à la réélection en avril du Président Omar al-Bashir avec 94,5% des voix.

« Le nouveau Gouvernement du Soudan va, avec beaucoup plus de détermination, réactiver le processus de dialogue national qui n’exclut personne », a-t-il dit.  Il est déterminé en outre « à renforcer la coopération et la coordination avec les Nations Unies en vue de compléter le processus de construction et de reconstruction au Darfour et de mettre fin aux conflits tribaux », a ajouté le représentant soudanais.

M. Hassan a également dit espérer que le projet de résolution du Conseil de sécurité renouvelant le mandat de la MINUAD contienne des « dispositions claires concernant les priorités stratégiques ».  Le Soudan, a-t-il souligné, est favorable à une stratégie de sortie « graduelle en coopération avec l’Union africaine et les Nations Unies » et « en réduisant sa composante militaire dans l’est du Darfour et trois régions du centre où la sécurité est assurée ». 

« Les institutions soudanaises sont prêtes à mener les opérations de sécurisation » nécessaires, a-t-il affirmé, appelant l’ONU à renforcer les capacités de son équipe de pays.  « Entamer la stratégie de sortie enverra un message clair à ceux qui refusent le processus politique issu de Doha », a-t-il insisté.

Enfin, selon la délégation soudanaise, la question des déplacés doit être abordée dans le contexte du développement social et économique du Soudan, « en levant les sanctions » et en « allégeant » sa dette.

 

 

*     S/2015/378

 

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