Conseil de sécurité: le Président de l’OSCE appelle les signataires de l’Accord de Minsk II à mettre en œuvre les mesures préconisées pour un règlement de la crise en Ukraine
L’Europe vit actuellement la pire crise sécuritaire qu’elle aura connue depuis la fin de la guerre froide, a déclaré ce matin, devant le Conseil de sécurité, M. Ivica Dacić, Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Serbie.
L’escalade de la crise et des violences en Ukraine domine les préoccupations sécuritaires en Europe, et l’OSCE, qui est la seule organisation présente sur le terrain, se trouve confrontée dans les efforts qu’elle mène pour aider à trouver une solution à la crise, à une aggravation des divisions institutionnelles et à des points de vue mutuellement exclusifs, a indiqué M. Dacić. À ce jour, la crise ukrainienne est responsable de plus d’un million de personnes déplacées, de plus de 5 000 morts, et d’environ 12 000 blessés. Il est par conséquent urgent que la paix puisse prévaloir, a souligné M. Dacić en espérant pouvoir compter sur la volonté politique des signataires des mesures agréées dans le cadre de l’adoption, le 12 février, de l’Accord de Minsk II.
En ce qui la concerne, l’OSCE ne ménage aucun effort pour que soit trouvée de manière impartiale et transparente une solution diplomatique à la crise. La situation en Ukraine aura mis en exergue la force de l’OSCE en tant que mécanisme sécuritaire le mieux placé pour jeter des ponts entre parties et faciliter des solutions coopératives aux crises et conflits, a estimé son Président en exercice. M. Dacić, qui a pris ses fonctions en janvier 2015, succédant à une présidence suisse, a déclaré que la réponse de l’OSCE à la crise ukrainienne atteste du bien-fondé et de la pertinence de cette organisation pour la sécurité européenne. L’OSCE a su s’engager en Ukraine en y déployant deux missions: la Mission spéciale d’observation en Ukraine (SMM) et la Mission d’observation aux points de passage russes de Gukovo et Donetsk, a dit M. Dacić.
Il a émis l’espoir que les mesures de Minsk II pourront être renforcées dans les semaines et mois à venir et a souligné que, sous sa présidence, l’OSCE ne ménagera aucun effort allant dans ce sens. Le Président de l’OSCE a, à cet égard, tenu à signaler que si en ce moment l’accent est surtout mis sur la nécessité de mettre en œuvre les aspects militaires des termes de l’Accord de Minsk II, il ne faut pas en perdre de vue les aspects non militaires que sont la relance socioéconomique, les élections locales et la réforme constitutionnelle à mener en Ukraine.
Après l’exposé de M. Dacić, la plupart des membres du Conseil de sécurité ont salué et exprimé leur appui au rôle joué par l’OSCE pour assurer la bonne mise en œuvre des accords de cessez-le-feu de Minsk; faire respecter les termes du protocole et du mémorandum conclus en septembre dernier par les parties, et assurer que l’ensemble des mesures de mise en œuvre des accords, qui ont été agréées il y a deux semaines soient appliquées. L’appui du Conseil de sécurité à ce processus a été exprimé par les membres du Conseil quand ils ont procédé le 15 février à l’adoption de la résolution 2202.
Cependant, mettant en doute la sincérité de certaines parties au conflit, la représentante de la Lituanie s’est offusquée que « l’encre de la résolution 2202 était encore fraîche quand les militants, appuyés par la Russie ont bombardé Debaltseve, Gorlivka et Pervomaysak ». Prenant la parole, le représentant du Royaume-Uni a quant à lui dénoncé « la présence continue de l’armée russe, de lance-roquettes et de chars de combat autour de Debaltseve », ce qui montre, a-t-il estimé, « que les engagements qui ont été pris concernant un retrait des armes lourdes et des troupes ont été délibérément ignorés ». Il a demandé à la Fédération de Russie « de faire en sorte que les séparatistes respectent le cessez-le-feu et que la Russie elle-même retire ses armes et ses troupes du territoire ukrainien ».
Réagissant à ces allégations, le représentant de la Fédération de Russie a estimé que son homologue britannique n’avait pas une vue globale de la situation et que cela montrait combien le Royaume-Uni perd du terrain sur le plan international, y compris en Europe. La Fédération de Russie « apprécie les termes de l’Accord de Minsk II », trouvé par les parties le 12 février pour soutenir la mise en œuvre des accords de Minsk et des résolutions du Conseil de sécurité, a dit le représentant russe en demandant toutefois aux autres États d’éviter d’exercer toute forme de pression sur la mission d’observation de l’OSCE, qui est sur le terrain.
Se déclarant septique en ce qui concerne la mise en œuvre de l’Accord, le représentant des États-Unis a fait observer qu’à ce jour les observateurs de l’OSCE « n’ont toujours pas obtenu un libre accès aux zones contrôlées par les rebelles séparatistes, et que ces derniers n’ont toujours pas autorisé la mission de l’OSCE à se rendre dans la ville de Debaltseve ». Les États-Unis estiment que « tout doit commencer par-là » et que des mesures doivent être prises « pour que tous les acteurs acceptent la neutralité de l’OSCE et de ses observateurs ».
Le Président en exercice de l’OSCE s’est cependant déclaré optimiste, indiquant qu’à ses yeux il ne fait pas de doute que le partenariat entre l’ONU et l’OSCE est essentiel pour relever les défis sécuritaires qui se posent dans l’espace euro-atlantique et eurasien. Ce point de vue a été largement partagé par la plupart des intervenants au débat tenu ce matin par le Conseil de sécurité sur l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.
EXPOSÉ DE LA PRÉSIDENCE EN EXERCICE DE L’ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE
M. IVICA DACIĆ, Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Serbie, a rappelé que l’OSCE était le plus grand arrangement sécuritaire créé dans le monde sous le Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies. Depuis notre prise de fonctions en 2015, l’Europe vit sa pire crise sécuritaire depuis la fin de la guerre froide, a dit M. Dacić. Manque de confiance mutuelle, divisions, et politiques différentes sapent l’approche coopérative de la sécurité qui est au cœur de l’OSCE. La crise en Ukraine domine les préoccupations sécuritaires, et l’OSCE se trouve confrontée à une aggravation des divisions institutionnelles et à des points de vue mutuellement exclusifs. Toutefois cette crise a également mis en exergue la force de l’organisation en tant que mécanisme le mieux placé pour jeter des ponts entre les parties et faciliter des solutions coopératives. La réponse de l’OSCE à la crise ukrainienne atteste de sa pertinence pour la sécurité européenne. Elle a su s’engager par le déploiement de deux missions: la Mission spéciale d’observation en Ukraine (SMM) et la Mission d’observation aux points de passage russes de Gukovo et Donetsk. L’OSCE n’a cessé de rechercher une solution diplomatique de manière impartiale et transparente, a dit M. Dacić. La présidence serbe cherche avant tout à préserver la nature coopérative et inclusive de l’OSCE, a-t-il souligné. Elle est consciente que l’OSCE et la sécurité européenne sont à la croisée des chemins et que l’OSCE est déterminée à travailler avec les principales parties prenantes pour restaurer la paix et la stabilité en Ukraine, a assuré M. Dacić.
Depuis notre arrivée à la présidence de l’OSCE au début de cette année 2015, l’ordre du jour de l’Organisation a été dominé par l’escalade de la crise et des violences en Ukraine, a indiqué M. Dacić. La crise est responsable de plus d’un million de personnes déplacées, de plus de 5 000 morts, et d’environ 12 000 blessés. Par conséquent, il est urgent que la paix puisse prévaloir, et pour cela, nous espérons pouvoir compter sur la volonté politique des signataires des mesures de l’Accord de Minsk II, en date du 12 février. L’Ukraine vit des heures critiques et le respect complet du cessez-le-feu est indispensable pour pouvoir mettre en œuvre les autres aspects de l’accord, a souligné M. Dacić, qui a assuré que la Mission de l’OSCE (SMM) est prête à faciliter, suivre et superviser les activités concernant le retrait, par les parties, de leurs armes lourdes, en coopération avec le Groupe de contact trilatéral.
Le Président de l’OSCE a également souligné que si l’accent est actuellement mis sur la mise en œuvre des aspects militaires de l’Accord de Minsk II, il ne faut pas perdre de vue les aspects non militaires de cet agrément, comme la relance socio-économique, la tenue des élections locales et la réforme constitutionnelle. S’agissant de la crise humanitaire, il a expliqué que si la mission de surveillance de l’OSCE n’est pas en soi une mission humanitaire, elle peut néanmoins identifier les zones ayant un besoin urgent de secours et d’aide humanitaire et assurer le suivi de la situation humanitaire sur place, en étroite collaboration avec l’ONU. M. Dacić a espéré que les mesures de Minsk II pourront être renforcées dans les semaines et mois à venir et a indiqué que l’OSCE, sous sa présidence, ne ménagera aucun effort en ce sens.
M. Dacić a ensuite passé en revue les autres questions inscrites à l’ordre du jour de l’OSCE, comme les conflits en Moldavie et dans le Caucase du Sud. Il faut redoubler d’efforts pour renforcer la sécurité dans l’ensemble de la région d’opération de l’OSCE et défendre les valeurs communes consacrées dans l’acte final d’Helsinki, a-t-il préconisé. L’OSCE doit jouer un rôle crucial dans l’architecture sécuritaire de l’Europe, notamment en jetant des ponts entre l’est et l’ouest, en rétablissant la confiance mutuelle, et en renforçant le dialogue. À cet égard, il s’est félicité de la mise en place du Groupe d’experts de haut niveau sur la sécurité européenne, qui est un projet commun lancé en décembre 2014 à Bâle. Il a indiqué qu’il attendait de ce Groupe d’experts des idées innovantes susceptibles d’imprimer un nouvel élan à l’esprit d’Helsinki, notamment des recommandations pour remplacer la culture actuelle de confrontation par une alternative de coopération et d’actions communes.
L’OSCE est préoccupée par les récents développements de la situation dans le Nagorno-Karabakh et souhaite étudier avec les parties toutes les possibilités pour parvenir à un règlement pacifique de ce différend. La présidence serbe continue d’appuyer la collaboration étroite entamée sur ce dossier avec les Nations Unies et l’Union européenne en assurant la coprésidence des discussions de Genève, a indiqué M. Dacić.
S’agissant de la situation en République de Moldova, le Président de l’OSCE a dit qu’il espère que le nouveau Gouvernement du pays contribuera positivement au règlement du conflit gelé de la Transnistrie. Nous envisageons la reprise du dialogue « 5 + 2 » à son rythme régulier au cours de réunions prévues cette année et appelons de nos vœux les parties à faire preuve de la volonté politique nécessaire à l’accomplissement de progrès tangibles qui profiteraient aux populations habitant des deux côtés de la rivière Dniestr/Nistru, a dit M. Dacić.
La présidence serbe poursuivra les efforts lancés par la présidence suisse en 2014 pour opérationnaliser davantage le rôle de l’OSCE dans le cadre des arrangements régionaux pris sous le Chapitre VIII de la Charte de l’ONU, a dit le Président Dacić en soulignant la contribution substantielle des organisations régionales aux efforts de maintien de la paix et de lutte contre le terrorisme dans le monde. Il a rappelé que l’OSCE collaborait étroitement avec l’équipe spéciale de lutte contre le terrorisme de l’ONU. Grace à son approche globale de la sécurité, l’OSCE joue à la fois un rôle important dans la lutte contre le terrorisme et dans la lutte contre la radicalisation et les divisions au sein des sociétés. L’OSCE est bien placée pour promouvoir les approches communautaires sur ces questions, a précisé son Président. En conclusion, M. Dacić a réaffirmé que le partenariat entre l’ONU et l’OSCE est une nécessité essentielle pour que l’on puisse relever les défis sécuritaires dans l’espace euro-atlantique et eurasien.
Déclarations
M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a salué la coopération mise en place entre l’ONU et l’OSCE en matière de sécurité ainsi que pour des actions multidimensionnelles. Il a dit que la Fédération de Russie voulait coopérer de manière constructive avec le Président en exercice de l’OSCE. Il convient de soutenir le processus d’Helsinki + 40, que nous avons appuyé dès le départ, a dit M. Churkin, souhaitant qu’il permette de trouver une solution à la crise de l’Ukraine et à la question de la sécurité en Europe. Passant à la question du terrorisme international, il a indiqué que sa délégation appréciait les efforts déployés pour lutter contre le phénomène des combattants étrangers qui se rendent dans les zones de conflit et en reviennent prêts à commettre des actes de violence dans leurs pays d’origine. La Fédération de Russie se félicite également des mesures prises contre la menace posée par le trafic de narcotiques provenant de l’Afghanistan. M. Churkin a ensuite estimé que le conflit ukrainien a confirmé que l’OSCE conserve son utilité en Europe. Il faut, a-t-il recommandé, saisir l’occasion de son quarantième anniversaire pour réexaminer le cadre et le processus qui pourraient garantir la sécurité de tous en Europe.
M. Churkin s’est dit favorable à la création d’un « groupe des sages » pour relancer et renouveler les discussions à l’OSCE sur les questions de sécurité de manière élargie. S’agissant de la crise ukrainienne, il a dit que la Fédération de Russie apprécie les termes de l’accord trouvé le 12 février pour soutenir la mise en œuvre des accords de Minsk et des résolutions du Conseil de sécurité. Il a lancé un appel aux autres États, leur demandant d’éviter d’exercer toute forme de pression sur la mission d’observation de l’OSCE, qui est sur le terrain. Nous appuyons la mission sur les plans financier, matériel et humain, et nous continuons à envoyer des spécialistes, a assuré le représentant de la Fédération de Russie. M. Churkin a dit que sa délégation plaçait ses espoirs dans la future mission d’observation des élections dans le Donbass et dans le suivi du processus politique qui suivra.
M. JUAN MANUEL GONZÁLEZ DE LINARES PALOU (Espagne) a estimé qu’il existe une grande marge de manœuvre pour l’action et la coopération entre l’ONU et l’OSCE, en particulier en ce qui concerne la recherche d’une solution au conflit ukrainien et la fourniture d’une assistance humanitaire à la population déplacée par les combats où vivant dans les zones atteintes par le conflit. Il a salué le travail accompli par le Président de l’OSCE dans cette crise, et s’est dit convaincu de l’importance de l’accord conclu à Minsk le 12 février, qui réserve un rôle important à l’OSCE, ouvrant ainsi une voie à la résolution pacifique du différend. L’Espagne participe à la mission d’observation de l’OSCE, a précisé le représentant. Passant à la lutte contre le terrorisme menée par l’OSCE, le représentant a assuré l’organisation de l’appui de son pays, notamment en ce qui concerne la lutte contre le cyberterrorisme et la prolifération des armes de destruction massive. L’Espagne a aussi une longue tradition de pratique de la médiation et de promotion du dialogue, a-t-il ajouté, souhaitant mettre à la disposition de l’OSCE l’expérience espagnole dans ce domaine. Concernant la sécurité sous son angle militaire, il a plaidé en faveur de la transparence entre les États membres de l’OSCE.
M. OSKARAS JUSYS (Lituanie) a estimé que la Charte de l’ONU et les accords d’Helsinki ont été « violés par l’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine et par l’occupation de la Crimée ». Il a ajouté que « l’encre de la résolution 2202 du Conseil de sécurité était encore fraîche quand les militants, appuyés par la Russie ont bombardé Debaltseve, Gorlivka et Pervomaysak ».
Le représentant a estimé que l’OSCE joue un rôle clef dans la mise en œuvre de tous les accords de Minsk. Mais « le défi, c’est le refus opposé à l’OSCE en matière d’accès », a-t-il insisté. La mission spéciale d’observation en Ukraine de l’OSCE doit pouvoir remplir pleinement ses fonctions et, notamment, contrôler la frontière russo-ukrainienne, a estimé le représentant.
Il s’est par ailleurs dit préoccupé par la violence dans la région du Haut-Karabagh, disputée par l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Il a ensuite reproché à la Fédération de Russie de tout faire « pour entraver le processus d’intégration européen de la Moldavie ». La Lituanie pense que « les pourparlers 5+2 ont été pris en otage par la région séparatiste de Transnistrie ». De même, les « accords signés entre la Fédération de Russie et les régions géorgiennes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud » sont « une annexion masquée, un manquement flagrant aux principes du droit international et aux engagements qu’avait pris le Président russe Medvedev en 2008 », a estimé le représentant.
M. Jusys a ensuite indiqué que son pays souhaitait une « modernisation du Document de Vienne ». Elle a poursuivi son intervention en saluant les mesures de renforcement de la confiance prises par l’OSCE pour réduire les risques de conflit liés à l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Il a conclu sa déclaration en annonçant que son pays accueillerait à Vilnius, en avril prochain, un séminaire régional sur les femmes, la paix et la sécurité.
M. CARLOS OLGUÍN CIGARROA (Chili) a souligné l’importance du Chapitre VIII de la Charte de l’ONU, dont les termes sont consacrés aux accords passés aux niveaux régionaux pour faire face aux menaces traditionnelles et émergentes qui se posent en matière de paix et de sécurité. Les buts et principes de l’ONU, dont le respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté territoriale des États, guident les relations entre États, a rappelé le représentant. Il a noté que l’OSCE avait contribué au règlement des conflits et à la stabilité en Europe et qu’elle œuvrait à la consolidation de la confiance et de la sécurité. Il a également salué la façon dont l’OSCE appuie la démocratie, l’état de droit et les droits de l’homme, à travers ses mécanismes et les opérations qu’elle mène sur le terrain sur des questions et des thèmes inscrits à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.
Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande) a indiqué que son pays appuyait les efforts du Conseil de sécurité et de l’OSCE pour trouver des solutions aux crises et aux conflits. Elle a félicité l’OSCE de s’être impliquée dans la situation en Ukraine, au moment où le Conseil de sécurité continue de jouer son rôle en faisant pression sur les parties au conflit, afin que celles-ci respectent les accords pris à Minsk. Elle a regretté que l’OSCE et sa mission d’observation spéciale ne puissent avoir un accès libre et sûr au terrain, conformément à ce qui est pourtant prévu dans les accords de Minsk. Elle a réitéré l’appel lancé par son pays à la Fédération de Russie pour qu’elle convainque les séparatistes d’accorder à l’OSCE un accès aux zones affectées par les combats.
M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a estimé que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) doit continuer de jouer son rôle en assurant la bonne mise en œuvre des accords de cessez-le-feu de Minsk, ainsi que le protocole et le mémorandum conclus en septembre dernier et l’ensemble des mesures de mise en œuvre de ces accords qui ont été agréés il y a deux semaines, et font désormais partie d’une résolution du Conseil de sécurité. Hier, a souligné le représentant, l’OSCE a été destinataire du document arrêté par les Ukrainiens et les séparatistes, dans lequel sont exposés en détail les termes du retrait des armes lourdes. Cet accord doit être mis en œuvre immédiatement, et la mission d’observation en Ukraine de l’OSCE doit être pleinement impliquée, a souligné le représentant.
De l’Asie centrale à la Bosnie en passant par la Géorgie et le Kosovo, a-t-il rappelé, « l’OSCE et l’ONU ont démontré leur capacité à travailler ensemble ». Dans le Caucase, l’OSCE travaille à la promotion du dialogue et à la restauration de la confiance. La France est particulièrement engagée, au titre de sa coprésidence du Groupe de Minsk, avec les États-Unis et la Russie, à aider l’Arménie et l’Azerbaïdjan à trouver un règlement pacifique au conflit du Haut-Karabagh. De même, « nous réaffirmons notre soutien à l’intégrité territoriale de la Géorgie et rejetons les accords de rapprochement signés avec les régions séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud », a déclaré le représentant. Il a exhorté les parties « à ne pas remettre en cause par leurs actes et leurs paroles le format de dialogue établi ».
Il s’est, d’autre part, félicité de l’ambition affichée par la Serbie de tirer pleinement profit des missions de terrain de l’OSCE pour qu’une assistance adaptée aux besoins des pays hôtes leur soit apportée en matière économique et environnementale. Il a salué la volonté exprimée par la présidence serbe, à la suite de la Suisse, de moderniser le Document de Vienne de 2011, qui est relatif aux mesures de confiance et de renforcement de la sécurité. Il a également salué l’intention de la Serbie d’encourager la mise en œuvre du code de conduite de l’OSCE relatif aux aspects politico-militaires, ce qui est « essentiel pour assurer le contrôle démocratique des forces armées et de sécurité ».
M. MARK LYALL GRANT (Royaume-Uni) a salué le travail mené par l’OSCE dans le contexte de la crise en Ukraine, et a estimé que son rôle devrait être considérablement renforcé. Depuis la signature de l’accord de Minsk, le 12 février, la mission d’observation de l’OSCE a constaté des violations de cessez-le-feu, a regretté M. Lyall Grant. La présence de l’armée russe, de lance-roquettes et de chars de combat autour de Debaltseve montre que les engagements qui ont été pris concernant un retrait des armes lourdes et des troupes ont été ignorés, a-t-il aussi déploré. Le représentant a également dénoncé les menaces proférées à l’encontre des membres de la mission de l’OSCE. Les séparatistes ont déjà sapé les accords de Minsk du mois de septembre, et le pilonnage aveugle de zones habitées par des civils s’est étendu jusqu’à la ville de Marioupol, a-t-il noté. Il a demandé à la Fédération de Russie de faire en sorte que les séparatistes respectent le cessez-le-feu. « Il faut aussi que la Russie retire ses armes et ses troupes du territoire ukrainien », a dit le représentant. Près d’une année après ce qu’il a qualifié « d’annexion illégale de la Crimée », le représentant britannique a dit que son pays avait des craintes pour la stabilité de la région et pour la crédibilité du Conseil de sécurité. Il a indiqué que le Royaume-Uni voulait travailler avec ses partenaires de l’Union européenne « jusqu’à ce que la Fédération de Russie donne la preuve qu’elle est prête à tenir ses engagements ».
Mme MADELEINE ANDEBENG LABEU ALINGUE (Tchad) a souligné l’importance de la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales, conformément aux termes du Chapitre VIII de la Charte, et a, à cet égard, évoqué la coopération entre l’ONU et l’OSCE. Elle a félicité l’OSCE pour les efforts qu’elle a menés afin de minimiser l’impact de la crise en Ukraine. Face à la résurgence des combats après l’adoption de la résolution portant sur les mesures de Minsk, le Tchad encourage l’OSCE à redoubler d’efforts pour parvenir à faire respecter un cessez le feu global en Ukraine, ceci, de manière à ce que puissent être mises en œuvre les autres mesures prévues par cet accord.
En dehors de ce qu’elle fait en l’Ukraine, le Tchad salue le rôle joué par l’OSCE pour maintenir l’esprit de dialogue et de coopération dans la région des Balkans, notamment au nord du Kosovo, ainsi qu’en Asie centrale entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. La représentante a également félicité le rôle humanitaire assumé par l’OSCE lors des inondations graves qui ont frappé la région en 2014. Le Tchad soutient l’action de l’OSCE dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et l’invite à porter une attention particulière au recrutement de combattants terroristes, a ajouté la représentante. Il ne fait pas de doute que l’OSCE est un allié clef des Nations Unies, et que son expertise régionale consolide l’action collective pour la paix et la sécurité dans cette région, a-t-elle conclu.
M. KAYODE LARO (Nigéria) a estimé que l’OSCE est un élément clef de l’architecture sécuritaire européenne. Il a salué les progrès notables réalisés par l’OSCE, en tant qu’organisation régionale, en matière de prévention et de gestion des conflits régionaux. En Ukraine, le Nigéria insiste sur la nécessité de pleinement mettre en œuvre le cessez-le-feu conclu par les accords de Minsk, et estime que cela peut être renforcé grâce à la contribution de l’OSCE. Le Nigéria souhaiterait que la crise ukrainienne puisse être réglée par le dialogue et de manière pacifique. C’est la raison pour laquelle nous exhortons l’OSCE à redoubler d’efforts, en collaboration avec l’ONU, pour mettre un terme aux conflits armés dans sa région, a dit le représentant. L’approche communautaire de l’OSCE est vitale dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, a-t-il noté.
M. EIHAB OMAISH (Jordanie) a salué le rôle que pourrait jouer l’OSCE pour résoudre les conflits en Asie centrale et en Europe. Depuis sa création, cette organisation s’est efforcée de trouver des solutions à des conflits qui, sans son intervention, se seraient intensifiés et prolongés, a dit le représentant. Il a espéré que les efforts déployés pour résoudre le conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie pourraient porter leurs fruits grâce aux efforts déployés par l’OSCE, dans le cadre du Groupe de Minsk. Soulignant aussi l’importance de la promotion des droits de l’homme et de l’état de droit dans les pays sortant de conflit, il a estimé que l’OSCE avait un rôle à jouer à cet égard. L’OSCE doit aussi contribuer à la lutte contre le terrorisme afin de soutenir et appuyer les efforts communs dans ce domaine, a préconisé le représentant de la Jordanie.
M. JULIO HELDER MOURA LUCAS (Angola) a rappelé que le Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies est le cadre qui favorise la coopération de l’ONU avec les organisations régionales. Il a dit que l’Angola appréciait les efforts de coordination et de promotion du dialogue entre les communautés. Le représentant a exprimé l’appréciation de sa délégation envers ce que fait l’OSCE pour trouver une solution au conflit du Haut-Karabakh opposant l’Arménie à l’Azerbaïdjan, et au conflit qui perdure en Ukraine. Il a dit que l’Angola soutient l’appel lancé pour que les parties au conflit ukrainien respectent la sécurité de la mission d’observation de l’OSCE. Se félicitant des priorités énoncées par la Serbie pour sa présidence de l’OSCE, il a plaidé en faveur d’un partage des responsabilités pour pouvoir mieux lutter contre le terrorisme, la criminalité transnationale organisée, et le trafic de drogues, d’armes et la radicalisation.
M. RAFAEL DARIO RAMÍREZ CARREÑO (Venezuela) a déclaré que le Venezuela soutient le principe de règlement pacifique des différends lorsque les négociations directes entre les parties représentent le moyen le plus approprié pour faire avancer le processus. Le Venezuela accorde donc beaucoup d’importance au rôle que jouent les organismes régionaux dans la promotion de solutions négociées pour mettre fin à des conflits qui affectent les pays d’une région. Nous soutenons les efforts menés en ce sens par l’OSCE, a dit M. Ramirez. L’action et la coopération menées par l’OSCE en faveur de la sécurité internationale doit respecter pleinement les buts et principes de la Charte des Nations Unies, a ensuite demandé le représentant, en insistant en particulier sur le respect des principes de non-ingérence dans les affaires intérieures des États, sur celui de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des pays. Le représentant a aussi salué le rôle joué par l’OSCE dans le renforcement des relations entre ses membres par le biais du dialogue. En ce qui concerne la crise en Ukraine, il a plaidé en faveur du déploiement d’efforts communs pour lui trouver une solution juste et durable.
M. DAVID PRESSMAN (États-Unis) a souligné l’importance du partenariat ONU-OSCE. Face aux responsabilités très lourdes qu’assume l’OSCE en Ukraine, il a félicité cette organisation pour les efforts inlassables qu’elle mène en vue de parvenir à un règlement pacifique de la crise. Les États-Unis sont toutefois conscients que la participation de l’OSCE à la recherche d’une solution au conflit ne peut suffire à elle seule à faire respecter les accords de Minsk, mais elle peut y contribuer, a dit le représentant. Nous dénonçons le fait qu’outre l’absence de retrait des forces et des armes lourdes, qui n’a pas encore eu lieu en Ukraine, les observateurs de l’OSCE n’ont pas pu avoir un accès libre à toutes les zones qui sont sous le contrôle des séparatistes pour y surveiller la mise en œuvre du cessez-le-feu et des autres mesures de l’accord de Minsk, a ajouté le représentant. Il a rappelé qu’aux termes du protocole de Minsk les observateurs de l’OSCE sont autorisés à assurer des tâches de contrôle et de surveillance dans l’est de l’Ukraine. Mais à ce jour, les observateurs de l’OSCE n’ont toujours pas encore eu plein accès aux zones contrôlées par les rebelles, et les séparatistes n’ont toujours pas autorisé la mission de l’OSCE dans la ville de Debaltseve, a regretté le représentant. Or, tout doit commencer par là et il faut prendre les mesures nécessaires pour que tous les acteurs acceptent la neutralité de l’OSCE et de ses observateurs qui ont été et restent une source importante d’information de la situation sur le terrain, a-t-il estimé. « Vous avez le plein appui des États-Unis et du Conseil de sécurité pour mener à bien cette mission », a lancé le représentant au Président en exercice de l’OSCE.
Les États-Unis appuient en outre les efforts que fait de l’OSCE pour poursuivre les missions qu’elle mène sur le terrain pour lutter contre le terrorisme et l’extrémisme violent dans le Caucase et les Balkans, et ils l’encouragent aussi à agir résolument face à la vague d’antisémitisme qui a frappé l’Europe ces derniers mois.
Mme SITI HAJJAR ADNIN (Malaisie) a souligné l’importance de l’OSCE en rappelant que cette organisation réunit 57 pays de plusieurs continents. Elle a jugé opportun le slogan choisi par la présidence serbe de l’OSCE, à savoir « rétablir la confiance en vue de l’avenir ». Elle a aussi exprimé la gratitude de la Malaisie à l’OSCE pour avoir facilité le rapatriement des dépouilles des personnes décédées lors du crash du vol MH017 de la compagnie Malaysian Airlines en Ukraine. Nous espérons un règlement pacifique du conflit en Ukraine, fondé sur les principes de la Charte, a-t-elle poursuivi. À ce propos, nous sommes préoccupés que l’OSCE se soit vue refuser l’accès aux zones de conflit en Ukraine, a-t-elle ajouté. Nous notons par ailleurs que les Balkans occidentaux sont une des priorités de la présidence serbe de l’OSCE et nous appuyons son action en ce qui concerne la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo afin d’y soutenir les processus en cours. Concernant d’autres conflits, en Asie centrale et dans le Caucase méridional notamment, la représentante a espéré que l’OSCE donnerait une impulsion aux efforts menés pour les régler. Elle a également plaidé en faveur d’une action renforcée dans la lutte contre le terrorisme et contre toute forme de discrimination, y compris celle qui s’exprime à travers l’islamophobie.
M. LIU JIEYI (Chine), parlant en sa qualité de représentant national de son pays, a souligné l’importance de la collaboration entre le Conseil de sécurité et les organisations régionales, comme l’OSCE. Concernant l’Ukraine, il a rappelé que le Conseil de sécurité avait marqué son appui en faveur des efforts diplomatiques des dirigeants russe, ukrainien, allemand et français en adoptant la résolution 2202, qui soutient l’application de l’ensemble des mesures agréées à Minsk par les dirigeants de la Russie, de l’Ukraine, de l’Allemagne et de la France en vue d’un règlement pacifique de la crise. Il a insisté sur le fait qu’il fallait tenir compte des aspirations de toutes les parties concernées et de tous les groupes ethniques en vue de trouver une solution politique durable.
Reprenant la parole, le représentant de la Fédération de Russie a estimé que certaines délégations avaient abusé de ce débat, qui devait être consacré à l’OSCE, pour parler de la crise en Ukraine. Concernant la situation en Ukraine, le tableau présenté par ces délégations est complètement faux, délibérément déformé, partial et unilatéral, a-t-il déploré. Il a notamment accusé son homologue du Royaume-Uni de ne pas avoir une vue globale de la situation. Cela montre que le Royaume-Uni perd du terrain sur le plan international, y compris en Europe, a-t-il dit. En ce qui concerne le représentant des États-Unis, il lui a reproché d’être intervenu pour abonder dans le même sens que son homologue britannique, « alors que les États-Unis ont joué un rôle destructeur qui est à l’origine du conflit en Ukraine ». Il a espéré qu’à l’avenir les États-Unis ne mettraient pas des bâtons dans les roues au « Format Normandie ». Il a aussi critiqué les « arguments à caractère psychologique » présentés par certaines délégations qui parlent « de la plus grave crise en Europe depuis la Deuxième guerre mondiale », et il leur a rappelé qu’il y avait eu une autre crise très grave dans les Balkans, causée par les bombardements de l’OTAN sur la Serbie. Les effets de ces crises ont été à l’origine de celle en Ukraine, a-t-il souligné. Il a regretté qu’il n’ait pas été possible de mettre en place un ordre international harmonieux après la fin de la guerre froide.
Réagissant à cette intervention, le représentant du Royaume-Uni a dénoncé les actions de la Russie, qui viennent appuyer les séparatistes en Ukraine. Nos appels –concernant le respect des accords de cessez-le-feu de Minsk- ont toujours été clairs, a-t-il assuré, et ce depuis le mois de septembre, et y compris en février dernier. Nous constatons les violations commises par les parties, a-t-il ajouté, en parlant de « l’assaut final des séparatistes, soutenus par la Russie, sur la ville de Debaltseve ». Il a de nouveau lancé des appels aux parties, ainsi qu’à la Fédération de Russie, pour qu’elles mettent en œuvre ces accords de Minsk.
Reprenant la parole en fin de séance, le Président en exercice de l’OSCE a remercié les États Membres du Conseil de sécurité pour l’appui exprimé aux travaux et aux efforts de l’OSCE. Il a mis un accent particulier sur la volonté de l’OSCE à prendre part activement aux travaux des Nations Unies dans le cadre d’un partenariat renforcé avec l’ONU. À ce titre, il a rappelé que l’OSCE est la seule organisation actuellement présente en Ukraine, et que c’est pour cela que l’appui que lui apporte l’ONU revêt de la plus haute importance. M. Dacić a fait part de son intention de se rendre sur le terrain pour visiter les différentes missions de l’OSCE en vue de se familiariser avec tous les problèmes et différends qui touchent la région placée sous les compétences et l’autorité de l’OSCE en matière de sécurité et de coopération.
Lors des discussions que nous avons eues hier avec les Ministres des affaires étrangères de la Russie et de l’Ukraine, a dit M. Dacić, nous avons pu aborder des questions relatives à la fin du mandat de la Mission d’observation en Ukraine de l’OSCE, qui s’achèvera en mars, et de la possibilité de proroger ce mandat de six mois. Nous avons également envisagé la possibilité d’augmenter le nombre d’observateurs déployés par l’OSCE en Ukraine et avons discuté des équipements dont ils disposent. La question de la portée du mandat a également été abordée. Sur tous ces aspects, il est d’autant plus important et crucial que nous puissions pouvoir compter sur l’appui de l’ONU, a-t-il précisé.