Les lois restrictives imposées aux associations de la société civile doivent être abolies, préconise un rapporteur spécial
Le Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association qui, a, aujourd’hui, devant la Troisième Commission, dénoncé un environnement favorable aux entreprises commerciales créé par les États, alors que les organisations de la société civile sont soumises à de nombreuses limitations dans les domaines de l’exercice des droits de réunion pacifique et de la liberté d’association, a lancé un appel à l’abrogation de ces lois restrictives.
Dans son rapport qu’il a présenté devant la Commission chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, M. Maina Kai a souligné l’importance de comprendre le fait que les entreprises et les associations ont, certes, des objectifs qui diffèrent mais restent des secteurs ayant des similitudes car pourvoyeurs d’emplois, de biens et de services.
Il a donc qualifié d’inopportunes toutes ces mesures contribuant à favoriser l’enregistrement en quelques heures d’une entreprise, alors que de nouvelles associations de la société civile sont obligées d’attendre plusieurs mois avant d’être autorisées à fonctionner.
Le Rapporteur spécial, qui a fait état d’une politique de deux poids, deux mesures a mis l’accent sur les restrictions qui touchent davantage les rassemblements de la société civile qui osent défier le pouvoir mais qui protègent les manifestations menées par les personnes morales. À cet égard, il a rappelé les mesures de sécurité mises en place lors des Jeux européens de 2015 en Azerbaïdjan, ainsi que les événements tragiques de Marikana, en Afrique du Sud, en 2012, où 30 mineurs qui manifestaient pour de meilleures conditions salariales, avaient été tués par la police.
Il a ainsi marqué son indignation face à l’attitude d’États qui justifient ces restrictions en suggérant que les associations sont plus enclines à financer le terrorisme ou l’extrémisme que les entreprises commerciales, déplorant par exemple que le Kazakhstan, le Pakistan, les États-Unis ou le Kosovo aient décidé de sanctionner durement des associations soupçonnées d’avoir commis de tels crimes, sur la base d’allégations qui sont soit avérées, soit erronées.
M. Kai appelle donc les États à adopter une approche basée sur l’équité sectorielle, avec comme principes directeurs l’impartialité, ainsi qu’une réglementation se fondant sur les textes et accords internationaux et non sur des critères subjectifs.
La Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats, a également été entendue dans ce débat sur la situation des droits de l’homme à la Troisième Commission.
Nommée en août dernier, Mme Monica Pinto, a présenté à la Commission le rapport annuel préparé par son prédécesseur, Mme Gabriela Knaul, dans lequel elle fait clairement ressortir le fait que l’indépendance des juges, des avocats et des procureurs n’est pas totale dans de nombreuses parties du monde.
La Rapporteuse spéciale qui est d’avis que le contexte propice à leur indépendance est la démocratie, en tant que garante de la séparation des pouvoirs, a souligné que l’accès à la justice devait constituer un élément central du Programme de développement durable à l’horizon 2030, dont l’objectif 16 prévoit de « donner à tous accès à la justice dans des conditions d’égalité ».
La Présidente du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises a expliqué que le rapport qu’elle présentait abordait la question de la mise en œuvre des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme.
Mme Margaret Jungk a indiqué que depuis l’établissement du Groupe de travail, il y a quatre ans, plus de 24 pays ont adopté, ou sont sur le point de le faire, des plans d’action nationaux sur les entreprises et les droits de l’homme. De la même façon, des institutions nationales des droits de l’homme s’intéressent de plus en plus à cette problématique, tandis que les associations commerciales fournissent également des orientations à leurs membres.
Pour sa part, la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées, Mme Catalina Devandas-Aguilar, dont le mandat a été créé il y a un an, a souhaité fournir aux États une feuille de route sur la manière de transformer et de mettre en place des systèmes de protection sociale incluant le handicap, qui soient conformes aux dispositions de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.
Dans son rapport, Mme Devandas-Aguilar souligne que l’inclusion du handicap est un élément indispensable pour l’universalisation de la protection sociale, ajoutant que les États gagneraient à s’écarter des approches traditionnelles et à faire preuve de davantage d’innovation en basant leurs systèmes de protection sociale respectifs sur les droits figurant dans la Convention, laquelle valorise la participation, la non-discrimination et l’inclusion.
La Présidente du Comité des droits des personnes handicapées, Mme María Soledad Cisternas Reyes, a constaté avec plaisir que les objectifs 4, 8, 10, 11 et 17 du Programme de développement durable à l’horizon 2030 concernaient directement les personnes handicapées.
L’Experte indépendante sur les droits de l’homme et la solidarité internationale, a fait valoir que bien que les États soient individuellement responsables de la mise en œuvre nationale de leurs obligations en matière de droits de l’homme, aucun pays, pauvre ou riche, ne peut surmonter seul les défis en matière de droits de l’homme et sans assistance de la communauté internationale, a-t-elle déclaré.
Selon Mme Virginia Dandan, la réalité a clairement démontré que la valeur préventive de la solidarité internationale à travers la coopération internationale est essentielle, obligatoire, en particulier en ce qui concerne la capacité des États à se soumettre à leurs obligations fondamentales en vertu du droit international humanitaire.
La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 28 octobre, à partir de 10 heures.
PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME
b) Questions relatives aux droits de l’homme, y compris les divers moyens de mieux assurer l’exercice effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales
c) Situations relatives aux droits de l’homme et rapports des rapporteurs et représentants spéciaux
Déclaration liminaire
Mme MARGARET JUNGK, Présidente du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, a expliqué que le rapport (A/70/216) qu’elle présentait abordait la question de la mise en œuvre des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme. Ces Principes ont été adoptés en 2011 par le Conseil des droits de l’homme et ont reçu un fort appui des organisations de la société civile et la communauté mondiale des affaires, a-t-elle commenté, ajoutant que ces Principes clarifiaient les rôles et responsabilités des entreprises et des États pour ce qui avait trait aux activités préjudiciables.
Dans les pays où elles opèrent, les entreprises peuvent avoir des incidences négatives sur une série de droits. Toutefois, il n’existe pas de données concrètes sur la portée et l’ampleur de telles incidences, ni sur les actions de la part des États ou des entreprises elles-mêmes.
La Présidente du Groupe de travail a affirmé que ce thème, prioritaire pour les membres du Groupe, serait au cœur du Forum des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l’homme, prévu du 16 au 18 novembre prochain à Genève. De l’avis du Groupe de travail, les initiatives tendant à mesurer l’application effective des Principes directeurs devrait prendre en compte les répercussions des politiques et des processus des États et des entreprises sur le terrain et ne pas se fonder uniquement sur les bonnes intentions. Sous l’égide du Groupe de travail, ce Forum annuel est devenu l’un des événements phares des Nations Unies, attirant environ 2 000 participants des différentes parties prenantes.
Mme Jungk a ensuite indiqué que depuis l’établissement du Groupe de travail, il y a quatre ans, des progrès avaient été observés: plus de 24 pays ont en effet adopté, ou sont sur le point de le faire, des plans d’action nationaux sur les entreprises et les droits de l’homme. De la même façon, des institutions nationales des droits de l’homme s’intéressent de plus en plus à cette problématique, tandis que les associations commerciales fournissent également des orientations à leurs membres.
Ce sont là des signes positifs qui prouvent que l’on passe progressivement des engagements en général à une mise en œuvre concrète, a-t-elle encore noté. Toutefois, le manque de données pose un problème car, sans des données systématiques et détaillées, il est impossible de savoir où l’on en est et d’identifier les défis qu’il reste à relever. Mme Jungk a observé que le pilier des Principes directeurs relatif à l’accès aux réparations ne faisait pas l’objet d’initiatives de mesures.
Le Groupe encourage à prendre en considération les Principes directeurs dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030 en tant que référence pour les efforts nationaux et internationaux visant à la réalisation des 17 objectifs. Le Groupe de travail a en outre invité les États à élaborer des rapports améliorés sur les droits de l’homme, avec à la fois des incitations et l’obligation pour les entreprises de soumettre des rapports en vue de l’amélioration de leurs pratiques.
Mme Jungk a appelé la société civile à jouer son rôle de suivi et à continuer à préparer des outils de mesure. Elle a insisté sur l’absence de données sur les dommages occasionnés par les entreprises et sur les mesures prises pour les prévenir ou y remédier. En particulier, il existe peu de données sur la situation des défenseurs des droits de l’homme impliqués dans ce domaine, ou sur les communautés touchées.
Du côté des entreprises, Mme Jungk a également mis en exergue le rôle des associations professionnelles, des fédérations et autres associations commerciales, bien placées, selon le Groupe de travail, pour se mobiliser en faveur de l’adoption et de l’application concrète des Principes directeurs parmi leurs membres, en coopération avec les autres parties prenantes. Elle a, enfin, exhorté les cabinets d’audit à prendre en compte et à sensibiliser sur l’application des Principes directeurs.
Dialogue interactif
Le Maroc a souligné que les Principes directeurs, malgré leur caractère non contraignant, constituent une avancée non négligeable d’où la nécessité de mettre l’accent sur les voies et moyens de leur mise en œuvre. Comment l’ONU peut-elle encourager les États à effectuer les analyses nécessaires et à améliorer la collecte de données? Plusieurs pays, en particulier ceux en développement, ne disposent pas des capacités nécessaires à l’élaboration de tels plans d’action.
La Suisse a déclaré que toutes les parties prenantes intéressées: États, sociétés civiles et entreprises, pouvaient contribuer à rendre mesurable l’impact de l’application des normes et standards visant à l’amélioration du respect des droits de l’homme dans le cadre des activités du secteur privé. Elle a demandé au Groupe de travail s’il prévoyait, dans une prochaine étape de son travail, d’étudier la façon de mesurer l’impact sur le terrain des nombreuses initiatives multipartites sur la base du volontariat dans le domaine des entreprises et droits de l’homme.
Le Mexique a mis l’accent sur la question de la reddition de comptes et des dédommagements. Le pays a mis sur pied un groupe de travail visant à la concrétisation de tous ses engagements internationaux, constitué de plusieurs forces vives de la société mexicaine. Quels seraient les mécanismes idéaux de reddition de comptes dans le contexte de la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030?
La Colombie a souligné le rôle des plans d’action nationaux qui mettent en exergue la responsabilité dans les trois piliers décrits dans les Principes directeurs. Le processus de consolidation de la paix est crucial et la Colombie a inventé un processus participatif, avec des réunions techniques tendant à l’enrichissement du plan d’action national de mise en œuvre des Principes directeurs, notamment sur la responsabilité sociale des entreprises. La Colombie envisage en outre un mécanisme de suivi et soutient des initiatives qui permettront d’avoir une idée précise de la mise en œuvre.
Les bonnes pratiques, les mesures et la sensibilisation aux risques sont autant d’éléments clefs, a affirmé l’Union européenne, qui a voulu savoir comment assurer un équilibre entre l’approche quantitative et qualitative. Quelles sont les lacunes qu’il faut résoudre en priorité, en particulier dans la perspective de la réalisation des 17 objectifs de développement durable? La déléguée a, enfin, évoqué l’initiative de l’Union européenne sur les entreprises et la démocratie.
La République tchèque a dit attendre avec impatience de participer au Forum sur les entreprises et les droits de l’homme, et a encouragé à un consensus entre les régions et les États. Que peuvent faire les gouvernements afin d’aider d’autres parties prenantes à prendre part à ce travail?
L’objectif majeur des Principes directeurs est d’arriver à un mécanisme robuste, a souligné la Norvège, qui a invité à la traduction de ces principes dans les langues des pays concernés. La Norvège a appuyé le projet du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur les dédommagements.
Les plans d’action nationaux permettent d’entamer un dialogue fructueux avec les entreprises sur les incidences de leurs activités, a affirmé le Chili, qui a espéré que l’étude du Groupe de travail offrirait une vision mondiale détaillée de l’application des Principes directeurs. Le Chili a appelé à éviter les chevauchements en ce qui concerne l’application du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Il faut épauler les entreprises dans leurs efforts de clarté sur leurs activités, ont conseillé pour leur part les États-Unis, qui ont aussi noté un fort appui du public aux fins de mesurer les effets des activités des entreprises. Comment améliorer les initiatives de mesure actuelles par le secteur public des État? s’est interrogée la déléguée.
« Nous accueillons nombre de sociétés internationales dans l’industrie d’extraction », a dit l’Indonésie, qui a appuyé le Forum sur les entreprises et les droits de l’homme. Les plans d’action nationaux et le respect des trois piliers constituent une clef de voûte, a souligné le représentant, qui a mis l’accent sur le rôle dynamique des organisations de la société civile en Indonésie.
Un atelier a été organisé cette année pour mettre en conformité différentes réglementations des entreprises sur la base des Principes directeurs. Quelles sont les priorités à inclure s’agissant des droits de l’homme?
L’Afrique du Sud a regretté que les Principes directeurs n’aient pas été négociées à un niveau intergouvernemental, qu’ils ne soient pas adoptés par l’Assemblée. Elle a en conséquence signifié qu’ils ne sauraient être considérés comme des principes qui font partie des normes et règles internationales. Il aurait été plus normal d’envisager un traité contraignant à cet égard, a insisté le délégué.
L’Afrique du Sud appuie la mise en œuvre de la résolution 26/9 du Conseil des droits de l’homme. L’Assemblée générale devrait fournir des indications claires pour que les processus de Genève soient mobilisés, a-t-il encore déclaré. Il a dit attendre l’avis du Groupe de travail à ce sujet.
Une convention contraignante n’est pas nécessaire en l’espèce a répliqué le Chili qui a considéré que, parfois, il y a des sources du droit coutumier et que les Principes pourraient donner des obligations finales.
La Présidente du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, répondant aux délégations, a déclaré que les Principes directeurs reposaient sur le droit existant et les obligations des États de protéger.
Ainsi, elle a expliqué que les plans d’action nationaux aidaient les États à mettre en œuvre les Principes directeurs et leur permettaient de faire face aux problèmes de cohérence à travers leurs différents ministères, lesquels doivent régulièrement se réunir pour mettre en œuvre ces Principes.
Toutefois, elle a reconnu que la mise en place de plans d’action nationaux n’était pas toujours simple. Aussi, son rapport a dressé une cartographie des plans d’action élaborés par certains pays, lesquels peuvent servir en termes de bonnes pratiques.
Sur la question relative à la manière dont les objectifs de développement durable pourraient aider à améliorer et à promouvoir la situation des entreprises dans le domaine des droits de l’homme, Mme Jungk a déclaré que des cadres sectoriels, nationaux, régionaux et internationaux existaient déjà en ce qui concerne le rôle et les responsabilités des entreprises. En conséquence, elle a estimé que les objectifs de développement durable étaient le cadre idéal pour de vastes consultations sur la question.
Mme Jungk a en outre déclaré que lorsqu’une entreprise était consciente de ses responsabilités vis-à-vis de la société, elle avait de grandes chances de progresser si elle appliquait les Principes directeurs.
Déclaration liminaire
M. MAINA KIAI, Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association, a mis en évidence, dans son rapport, la disparité des environnements crées par les États quand il est question des entreprises commerciales et des associations. M. Kai estime que les entreprises commerciales bénéficient généralement d’un meilleur environnement au détriment de la société civile. En conséquence, il a exhorté les États à promouvoir et à protéger davantage les droits relatifs à la liberté de réunion pacifique et d’association car les deux secteurs sont égaux et méritent un traitement identique, a-t-il précisé.
Le Rapporteur spécial a fait valoir que les organisations de la société civile, telles que les organisations non gouvernementales ou les organisations caritatives, étaient généralement soumises à des restrictions, notamment dans le domaine des lois foncières au Nicaragua, à Oman et en Éthiopie. Pourtant, dans ces mêmes pays, les entreprises commerciales ont davantage de marge de manœuvre, a noté M. Kiai, qui a dénoncé une approche de deux poids, deux mesures qui crée un environnement hostile à la société civile.
Selon lui, il est nécessaire de comprendre qu’en dépit de leurs objectifs qui diffèrent, ces deux secteurs créent des emplois, fournissent des biens et services, et attirent les investissements tout en influençant l’adoption de politiques. Pour lui, il est inconcevable qu’une entreprise commerciale puisse se faire enregistrer au Rwanda en seulement quelques heures, alors que ce processus prendrait des mois lorsqu’il s’agit d’une nouvelle association.
À cet égard, le Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association a souligné la nécessité de créer un environnement favorisant un meilleur traitement des deux secteurs, notamment les procédures d’entrée et de dissolution, la réglementation des opérations, l’accès aux ressources, la tenue de réunions pacifiques.
Chacun de ces éléments clefs constitue une composante de l’exercice des droits de réunion pacifique et de la liberté d’association, a-t-il souligné. En conséquence, toutes les limitations dans ces domaines doivent être abrogées par la loi. Le Rapporteur spécial a expliqué, qu’au Rwanda, des associations se voyaient imposer une limite de 20% sur les frais de fonctionnement. En Malaisie, d’autres peuvent être dissoutes sur ordre du tribunal. Une société prospère a besoin d’une société civile robuste.
Les entreprises et la société civile ont une responsabilité de respecter les lois dans leur rapports financiers, mais il est évident qu’il n’y a aucune justification pour les besoins d’audit plus complexes, onéreuses et intrusives pour les associations, a–t-il dit. De même, il n’existe pas de données qui suggèrent que les associations sont plus enclines à financer le terrorisme ou l’extrémisme que les entreprises commerciales, a affirmé le Rapporteur spécial. Cela, a-t-il déploré, n’a pas empêché le Kazakhstan, le Pakistan, les États-Unis ou le Kosovo de cibler et de sanctionner durement des associations pour avoir commis de tels crimes, sur une base avérée ou erronée.
Certains pays, a-t-il dit, sont de connivence avec des entreprises pour limiter l’influence de la société civile, en particulier lorsque les activités commerciales lucratives sont en jeu. Par ailleurs, dans des pays comme la République démocratique populaire lao ou les Philippines, les groupes ou individus qui manifestent contre les intérêts des grandes entreprises sont interdits de se rassembler, voire sont menacés, agressés ou harcelés, poursuivis ou quelques fois tués.
Il a précisé que le fait que des États accordent des facilités, comme l’exemption des impôts aux associations, ne les autorise pas à exercer un contrôle excessif sur la société civile. Au contraire, a-t-il dit, ces mesures devraient être simples, transparentes et impartiales.
Les restrictions touchent davantage les réunions organisées par la société civile qui défient le pouvoir mais protègeront celles menées par les personnes morales, comme ce fut le cas lors des Jeux européens de 2015, en Azerbaïdjan. Il a également rappelé les événements de Marikana, en Afrique du Sud, en 2012, où 30 mineurs ont été tués par la police.
Le Rapporteur spécial appelle donc les États à adopter une approche basée sur l’équité sectorielle, avec comme principe directeur l’impartialité, ainsi qu’une réglementation se fondant sur les textes et accords internationaux et non sur des critères subjectifs.
Une société prospère a besoin d’une société civile forte grâce à laquelle des dividendes économiques et sociaux sont générés. Mais pour parvenir à la mise en place d’un tel plan, il faut juste une volonté politique, a conclu le Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association.
Dialogue interactif
Les organisations de la société civile et les entreprises ont un rôle unique à jouer, ont affirmé les États-Unis, qui ont soutenu l’appel du Rapporteur spécial aux États qui tentent d’entraver ou d’empêcher l’accès de représentants de la société civile aux Nations Unies. Quelles sont les tendances, notamment constatées en Inde, qui montrent l’utilité d’une société civile plus libre?
Le Maroc a souligné la nécessité pour les États de mettre en place un système favorable à la participation des associations. Le représentant a aussi abondé dans le sens du Rapporteur spécial sur les incidences négatives sur les associations des mesures antiterroristes. Il a cependant fait remarquer que les groupes terroristes passaient par les associations et les entreprises pour leur financement et autres activités.
La République islamique d’Iran a signalé que le paragraphe 21 du rapport soulignait la nécessité pour les États de promouvoir la participation tout en protégeant la morale et l’ouverture d’esprit. Il a estimé que les associations et les entreprises étaient des entités différentes avec des objectifs distincts, lucratifs et non lucratifs. Même s’il s’agit d’acteurs non étatiques, elles nécessitent un traitement différent.
L’Irlande a encouragé à la mise en place d’un système de participation efficace des associations, notamment le lobbying, dans la transparence. Elle a demandé des exemples de l’intégration des Principes directeurs sur les entreprises et les droits de l’homme.
L’Union européenne a noté que les États imposaient davantage de normes et de restrictions aux associations qu’aux entreprises. Comment faire face à ce problème et aider les États à créer un climat propice pour les associations de la société civile? Quel type de dialogue régulier pourrait-on envisager?
La Fédération de Russie a jugé que les activités des entreprises ne s’inscrivaient pas dans le cadre du mandat du Rapporteur spécial et s’est même demandé s’il ne fallait pas tout simplement supprimer ce mandat. Il faut en fait encourager les organisations de la société civile, et la Russie a des expériences significatives à partager à cet égard. La déléguée a rappelé que l’accès aux ressources étrangères n’était pas interdit dans son pays et qu’il existait un prix qui récompensait les organisations de la société civile.
La République tchèque s’est, en revanche, dite vivement intéressée par la comparaison choisie par le Rapporteur spécial. Le droit de réunion pacifique devrait être inclus dans les traités bilatéraux et multilatéraux internationaux, a-t-elle dit, en voulant savoir comment cela pourrait être concrétisé.
La Suisse a aussi déclaré que le Rapporteur spécial avait choisi un angle intéressant pour considérer la situation des associations dans son rapport car celles-ci, qui sont des entreprises sociales, sont dans beaucoup de cas défavorisées vis-à-vis les entreprises commerciales. Comment l’intérêt des entreprises commerciales peut-il être éveillé et comment peuvent-elles être encouragées à soutenir davantage les associations de la société civile ?
La Malaisie a assuré qu’elle respectait les organisations de la société civile et a regretté que le rapport ne soit pas plus précis ni correct sur la question de la loi malaisienne sur les citoyens. Cette loi permet de protéger les idéaux les plus importants pour une Malaisie plus harmonieuse. Le délégué a déploré que le Rapporteur spécial ne comprenne pas assez la culture malaisienne.
Le Royaume-Uni a souligné que les progrès en matière de développement durable étaient tributaires de nombreuses questions liées à la société civile qui est actuellement la cible d’attaques sectaires. La société civile a également un rôle déterminant à jouer pour plaider en faveur de changements. Les réglementations et la bureaucratie doivent être limitées pour lutter contre des problèmes réels et non des choses fantaisistes qui ne voient jamais le jour.
La Norvège a plaidé en faveur de la protection de la société civile et de ses représentants. La représentante s’est inquiétée du rétrécissement de l’espace laissé à la société civile et a demandé au Rapporteur spécial ce que l’ONU devrait faire pour la protection des droits fondamentaux.
Les États et les organisations multilatérales accordent plus de faveurs aux entreprises commerciales, a fait remarquer la Pologne, qui a noté que les États encourageaient l’investissement privé mais pas systématiquement les associations des citoyens. Elle a plaidé pour un traitement pour ces associations identique à celui des entreprises. Quelles sont les meilleures pratiques pour lutter contre les restrictions aux activités de la société civile?
Le Kazakhstan, où le Rapporteur spécial s’est rendu en début d’année, a continué d’appuyer le droit international et la coopération avec les mécanismes des droits de l’homme en vue de la mise en œuvre des normes, a déclaré son représentant. Le délégué a fait état de la stratégie nationale en vue d’une série de réformes aspirant à modifier le système judiciaire et d’autres institutions étatiques.
La Colombie a mis sur pied la commission des droits de l’homme des travailleurs, un système de réparations aux victimes et pris des initiatives d’appui aux syndicats avec 888 négociations collectives ce qui est le double par rapport au passé. La représentante a en outre évoqué la formation offerte aux prud’hommes en matière de dialogue social et de travail avec les représentants des syndicats, avec la présence du Ministère de l’emploi. Cette réforme a aussi favorisé la création de syndicats et la prévention d’erreurs du passé.
Le Pakistan s’est montré dubitatif sur l’étude comparative de M. Kiai, et mis en garde contre les opérations de blanchiment d’argent et autres mauvaises utilisations des associations de la société civile. De ce fait, pour le Pakistan, il serait difficile de leur appliquer les mêmes règles qu’aux entreprises commerciales.
Le Gouvernement de la République démocratique populaire lao est attaché aux droits de réunion pacifique et de liberté d’association et a promulgué des décrets sur les associations et les fondations. Le pays s’est aussi doté de lignes directrices pour les 147 associations et fondations enregistrées, qui peuvent en outre se plaindre à l’Assemblée nationale.
Le Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association a lancé un appel à faire le distinguo entre les associations de la société civile et les entreprises commerciales. La liberté d’association est neutre, et c’est un droit qui revêt plusieurs formes, a-t-il expliqué. Il a également observé qu’au fil du temps, il était apparu légitime et raisonnable aux États de mettre tout en œuvre pour faire prospérer les entreprises.
En revanche, toutes les questions liées à la lutte pour le respect des droits de l’homme, ainsi que la démocratie, semblent poser des problèmes aux États, a-t-il déclaré. Il a précisé que son rapport cherchait à ouvrir l’espace réservé aux entreprises mais également aux organisations de la société civile.
Selon M. Kai, la question de l’équité sectorielle vise à avoir un point de vue large et à souligner la nécessité d’appliquer de façon équitable le droit pénal. Ainsi, il n’est point besoin d’exercer des charges supplémentaires sur les associations de la société civile si elles sont confrontées à des cas de blanchiment d’argent ou d’activités terroristes, a-t-il expliqué.
Sur la question de savoir comment combattre le terrorisme, il a estimé que les organisations de la société civile étaient ciblées, surtout lorsqu’elles souhaitent que l’État rende des comptes. Il a affirmé qu’il n’était pas interdit de pointer les erreurs de l’État, qui peut en commettre en grand nombre. Il faut juste chercher à savoir comment les souligner et chercher des voies de recours en vue d’y apporter des réponses.
Cibler les organisations de la société civile au pénal s’avère dangereux et signifie la fermeture de l’espace réservé à la société civile pour s’exprimer, a affirmé M. Kai. « Si l’on étouffe les citoyens, et qu’ils ne peuvent plus agir, ils auront d’autres voies de recours non pacifiques », a-t-il prévenu.
Il a également exhorté les entreprises à travailler étroitement avec la société civile sur ces questions, déplorant que lors du Forum économique mondial, les entreprises viennent parader, alors que l’apport de la société civile est ridicule, celles-ci ne manifestant qu’à l’extérieur de ces assises.
Par ailleurs, il s’est dit surpris de voir qu’une quarantaine de chefs d’État participaient au Forum économique de Davos, alors que quelques-uns seulement sont présents au Forum social mondial.
Déclaration liminaire
La Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats, Mme MONICA PINTO, nommée en août dernier, a présenté à la Commission le rapport annuel préparé par son prédécesseur, Mme Gabriela Knaul.
Dans ce rapport, Mme Knaul passe en revue ses six années en exercice et les principaux thèmes qu’elle a abordés: éducation, formation et renforcement des capacités des juges, des avocats et des procureurs; accès à la justice et à l’aide juridictionnelle; difficultés concernant l’indépendance et l’impartialité des juges; protection de l’indépendance des avocats; garantie de l’indépendance et de l’impartialité des procureurs et de l’autonomie du parquet; égalité devant les tribunaux et garanties d’un procès équitable; impunité en matière de violations des droits de l’homme.
Comme Mme Knaul, Mme Pinto a été d’avis que l’accès à la justice devait constituer un élément central du Programme de développement durable à l’horizon 2030. L’objectif 16 du Programme prévoit ainsi de « donner à tous l’accès à la justice dans des conditions d’égalité ».
Se tournant vers le futur, Mme Pinto a reconnu qu’aujourd’hui l’indépendance judiciaire n’était plus « strictement associée aux questions de justice pénale ». L’indépendance judiciaire est vue comme faisant partie intégrale de la protection et de la promotion des droits de l’homme et de l’état de droit; « c’est un droit de l’homme en soi », a-t-elle souligné.
En dépit d’engagements importants, l’indépendance des juges, des avocats et des procureurs est encore absente dans de nombreuses parties du monde, a constaté la Rapporteuse spéciale.
À cet égard, « le meilleur contexte » pour leur indépendance est la démocratie, qui garantit la séparation des pouvoirs. Toutefois, la démocratie n’est pas statique, elle évolue avec nos sociétés et présente des caractéristiques différentes selon les sociétés. Néanmoins, a-t-elle insisté, aucune de ces caractéristiques ne devrait altérer la valeur fondamentale de l’indépendance des juges, des avocats et des procureurs.
Bien entendu, ceux-ci doivent s’engager à faire preuve d’intégrité et d’impartialité. L’indépendance n’est pas une prérogative des juges, c’est leur devoir, a rappelé Mme Pinto. De même, « être avocat n’est pas un business, mais une profession ».
« Un discours politique hostile à l’indépendance judiciaire contribue à délégitimer la justice et à sous-estimer le mécanisme le plus important qui soit à la disposition des sociétés démocratiques pour le règlement pacifique des différends », a-t-elle ajouté.
S’il existe aujourd’hui un ensemble solide de règles juridiques, de normes et de principes internationaux relatifs à l’indépendance et à l’intégrité judiciaire, il ne faut toutefois pas les prendre pour acquis, a averti Mme Pinto.
Dialogue interactif
Le Qatar a rappelé que depuis la visite, en 2014, de l’ancienne titulaire de ce mandat, Mme Gabriela Knol, il s’était employé à amender sa législation pour la rendre conforme à toutes les règles liées à l’indépendance et à l’intégrité du système judiciaire national.
L’Union européenne a regretté que les droits des juges et avocats soient encore violés, partout dans le monde. La séparation des pouvoirs est essentielle dans ce contexte, a affirmé la déléguée, qui a rappelé que le dernier rapport au Conseil des droits de l’homme examinait la question du droit des enfants à la justice.
La République islamique d’Iran a insisté sur le droit à bénéficier d’un avocat et d’un juge juste, surtout s’agissant de groupes vulnérables particulier comme les enfants migrants ou les enfants soldats.
Les États-Unis ont noté que la Rapporteuse spéciale, même si elle a entamé son mandat il y a juste deux mois, avait déjà fait beaucoup, notamment en Tunisie. Ils ont voulu des informations sur ses activités à venir.
La Fédération de Russie a estimé qu’il fallait aussi garantir le respect des normes judiciaires et permettre aux organes pénaux de bénéficier de systèmes et moyens efficaces et modernes. Elle a invité la Rapporteuse spéciale à poursuivre son travail en mettant l’accent sur la justice et sur les principes de compétence, d’indépendance et d’impartialité du système judiciaire, dans le respect des normes relatives au droit à un procès équitable, y compris devant les tribunaux militaires. La Russie a également appuyé le droit d’interjeter appel devant les tribunaux et de respecter les opinions de la défense.
Le Maroc a également mis en avant toutes les questions traitées par la Russie, y ajoutant la lutte contre l’impunité et la garantie de l’indépendance des avocats. Le délégué a prié la Rapporteuse d’examiner la question de l’assistance à la justice.
La Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats, Mme Monica Pinto, a souligné que la démocratie était le meilleur scénario pour l’indépendance des juges et des avocats. Elle a précisé que lorsque surviennent des changements ou des évolutions dans le processus démocratique, il est nécessaire de réaffirmer le rôle du pouvoir judiciaire, et de rappeler que l’indépendance des acteurs judiciaires repose sur la primauté du droit.
Concernant l’accès à la justice, elle a estimé que la question ramenait également à l’accès territorial aux avocats, aux juges et aux tribunaux. Ainsi, elle a fait remarquer qu’a la campagne ou dans les villages, il n’existe pas de tribunaux; une situation difficile qui coûte à la fois du temps et de l’argent aux personnes dans le besoin, a-t-elle déclaré.
Il faudrait également que la problématique de l’accès touche à la formation, qui reste essentielle pour les juges. Il ne s’agit pas forcement de diplômes en droit, mais de l’apprentissage permanent, notamment en matière de droit international humanitaire et sur tous les sujets qui touchent à la femme.
Se penchant sur les tribunaux militaires, Mme Monica Pinto a affirmé que leurs compétences doivent être limitées aux juridictions militaires qui doivent prévoir des possibilités d’appels pour que la justice soit rendue conformément au droit international.
Déclaration liminaire
La Présidente du Comité des droits des personnes handicapées, Mme MARÍA SOLEDAD CISTERNAS REYES, a constaté avec plaisir que les objectifs 4, 8, 10, 11 et 17 du Programme de développement durable à l’horizon 2030 concernaient directement les personnes handicapées.
La définition d’indicateurs devra prendre en compte les droits des personnes handicapées. « On ne peut pas se fonder uniquement sur le produit intérieur brut (PIB) pour mesurer le progrès social », a-t-elle dit. L’égalité, la non-discrimination, le bien-être humain, la justice, la lutte contre la corruption et la flexibilité des régimes mondiaux de la propriété intellectuelle sont des indicateurs importants. De même, la reddition de comptes de la part des secteurs public et privé doit être garantie.
Par ailleurs, a expliqué Mme Cisternas Reyes, le Comité des droits des personnes handicapées s’est engagé dans le processus de renforcement des organes conventionnels et de ses méthodes de travail. À ce jour, la Convention relative aux droits des personnes handicapées a été ratifiée par 157 États, et le Protocole facultatif s’y rapportant par 87 États. Le Comité a reçu 84 rapports initiaux d’États parties, et produit un total de 33 observations finales.
La Présidente a souligné les liens étroits qui unissent le Comité à la Conférence des États parties. Le Comité fait en sorte que la perspective des personnes handicapées soit abordée de façon transversale dans les conférences internationales, dont le sommet humanitaire qui se tiendra en 2016.
En outre, le Comité livre son point de vue dans divers documents comme le projet d’observation générale sur la santé sexuelle et reproductive du Comité des droits économiques, sociaux et culturels; le projet de principes et de directives sur le droit d’introduire un recours devant la Cour pour le Groupe de travail sur la détention arbitraire; les commentaires sur le projet de règles minima pour le traitement des détenus.
Mme Cisternas Reyes a également souligné la coopération avec le mandat de l’Envoyé spécial du Secrétaire général sur le handicap et l’accessibilité et avec la Rapporteuse spéciale sur le handicap du Conseil des droits de l’homme.
Enfin, elle a souligné l’importance de nommer des experts handicapés, de respecter l’égalité des sexes et une représentation géographique équitable.
Dialogue interactif
Au cours du dialogue avec la Présidente du Comité des droits des personnes handicapées, traduit en langage des signes et sous-titré en anglais, le Mexique a dit avoir soumis son rapport initial au Comité, dont les méthodes de travail ont permis de mener à bien l’exercice d’élaboration et de présentation du rapport.
Le Gouvernement a enclenché une révision des textes normatifs nationaux pour les mettre en conformité avec les recommandations formulées par le Comité. Quelles sont les principales actions qui doivent être menées à bien pour surmonter certains obstacles auxquels se heurtent les personnes handicapées et les organisations qui les représentent?
La Présidente du Comité a rappelé que le Mexique avait été un des pionniers de la Convention et indiqué que l’observation générale relative à son article 1er mentionne les obstacles et que le Comité désirait mettre au point une banque de données sur les bonnes pratiques. À cet égard, elle a fait référence au Costa Rica et à la Suède.
Israël a affirmé que des mesures sont prévues pour faciliter l’accès des handicapés aux lieux publics, aux écoles et aux transports. La Présidente a dit attendre avec impatience le rapport initial d’Israël.
La Norvège et le Danemark contribuent à la mise en œuvre nationale et internationale de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées. Le principe d’autodétermination doit être pris en considération par rapport à d’autres droits de l’homme comme celui à la vie, ont déclaré ces deux pays, par référence à l’observation générale no.12 du Comité.
Mme Cisneros Reyes a invoqué les dialogues interactifs avec les États parties pour évaluer certains changements juridiques proposés. Elle a suggéré une session plénière du Comité pour discuter de cette question.
L’Union européenne a réitéré son attachement à l’égalité des chances pour toutes les personnes handicapées et a voulu savoir quel rôle le Comité entendait jouer dans la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Comment les États parties à la Convention peuvent-ils assurer des normes minimales d’accès dans le secteur public en prenant en compte les circonstances de chaque pays. La Présidente du Comité a affirmé que l’accessibilité était liée aux droits civils et politiques et devait, en conséquence, être mise en œuvre d’une manière immédiate. L’observation générale no.2 insiste sur le fait que l’accessibilité est progressive et constante.
La Suisse a salué l’élaboration en cours d’observations générales et la collaboration du Comité avec d’autres organes de l’ONU. Elle a souhaité connaître l’importance du travail de collaboration entre lesdits comités en cas de discriminations multiples, notamment à l’encontre des femmes et des filles handicapées. Mme Cisneros Reyes a réaffirmé l’approche multidirectionnelle du Comité, qui aborde les questions sous une optique transversale.
Favoriser l’autonomie et l’inclusion des personnes handicapées est un devoir pour les États parties, a déclaré le Maroc, qui s’est félicité du rythme très positif des ratifications. La déléguée a rappelé la proportion importante de ces personnes dans les pays en développement.
L’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) a rendu compte de la mise en œuvre du Traité de Marrakech, a-t-elle rappelé, en invitant le Comité à procéder à une évaluation à ce propos. Dans beaucoup de recommandations, le Comité mentionne le Traité de Marrakech, a répondu Mme Cisneros Reyes, qui a noté que ces questions avaient le vent en poupe, et qu’il fallait promouvoir la ratification du Traité.
La Colombie a fait état de ses réformes normatives pour garantir le plein respect de tous les droits de l’homme. Un conseil national des personnes handicapées participatif a été mis sur pied, de conserve avec la société civile, ce qui a permis d’inclure la problématique dans les politiques sociales d’une façon transversale.
Le Costa Rica et le Chili ont réitéré leur appui au Comité, à l’application de la Convention et à l’accessibilité des personnes handicapées. Le Costa Rica a notamment révisé sa loi sur le logement dans cet objectif. Que pourrait faire l’ONU afin de garantir le respect de la Convention pour que ces personnes soient effectivement intégrées et se sentent respectées au sein de la société?
Le renforcement des capacités est une question clef, a répondu la Présidente du Comité, qui a mis en exergue le rôle de chef de file historiquement joué par le Costa Rica dans la défense de tous les droits de l’homme.
Déclaration liminaire
Mme CATALINA DEVANDAS-AGUILAR, Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées, dont le mandat a été créé il y a un an, a souhaité fournir aux États une feuille de route sur la manière de transformer et de mettre en place des systèmes de protection sociale incluant le handicap, qui soient conformes aux dispositions de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.
Elle a souligné que l’objectif central du mandat consistait à appuyer les États avec des recommandations concrètes, et à modifier l’approche du « modèle médical » de la protection sociale qui assimilait le handicap à « une incapacité ».
Dans son rapport (A/70/297), la nouvelle titulaire de mandat offre un aperçu des tendances mondiales de la protection sociale des personnes handicapées, condition essentielle du développement économique et social pour tous. L’inclusion du handicap est un élément indispensable pour l’universalisation de la protection sociale, a-t-elle estimé, ajoutant que pour ce faire, les États gagneraient à s’écarter des approches traditionnelles et à faire preuve de davantage d’innovation en basant leurs systèmes de protection sociale respectifs sur les droits figurant dans la Convention, laquelle valorise la participation, la non-discrimination et l’inclusion.
Mme Devandas-Aguilar a fait observer que l’exclusion des personnes handicapées du marché de l’emploi expliquait sans doute le fait qu’elles soient frappées par la pauvreté de façon disproportionnée. En outre, les préjugés et les inégalités des chances, qui s’ajoutent aux handicaps physiques et mentaux, ainsi qu’aux dépenses médicales, aux accessoires adaptés et à l’aide animalière ou technologique fonctionnelle expliquent l’exclusion sociale et la pauvreté.
Elle a rappelé que toutes ces dépenses, supplémentaires par rapport à celles d’autres personnes, étaient liées à un manque d’accessibilité et étaient susceptibles d’atteindre plus de 50% du revenu d’un individu. La Rapporteuse spéciale a prié les États d’inclure le droit des personnes handicapées à la protection sociale dans leur législation et de prévoir des prestations destinées à la promotion de l’autonomie et l’inclusion.
Les États devraient, en outre, affirmer le principe de non-discrimination dans tous leurs programmes et interventions et garantir des prestations qui correspondent aux besoins réels des personnes handicapées, notamment l’accès physique et celui à l’information et à la communication.
La Rapporteuse spéciale a affirmé que la protection sociale constituait un outil essentiel dans la future réalisation des objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et du Programme d’action d’Addis-Abeba. Elle a appelé de ses vœux un « nouveau contrat social pour une protection sociale universelle et inclusive des personnes handicapées », qui promeuve leur citoyenneté active.
Dialogue interactif
Le Mexique a demandé à la Rapporteuse spéciale son avis sur la méthodologie à suivre pour intégrer la perspective des personnes handicapées à l’ensemble des programmes d’éradication de la pauvreté. Elle a en outre souhaité connaître ses expériences en matière de coopération internationale.
Le Qatar a indiqué qu’il continuerait de prendre des mesures qui mèneront à l’application de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.
L’Indonésie, devenue en 2011 État partie à la Convention, a affirmé qu’un plan d’action national servirait de cadre pour les politiques en faveur des personnes handicapées. Des pays ayant des capacités et des ressources limitées, comment un cadre international de coopération peut-il être élaboré pour aider les États à mettre sur pied des systèmes de protection sociale inclusifs?
L’Espagne, souhaitant que l’on parle du « travail quotidien des administrations », a demandé, comme les Maldives, des exemples de bonnes pratiques.
L’Union européenne a souhaité savoir « comment concilier les besoins très divers en termes d’âge et de sexe » et quelles sont les grandes difficultés qui se présentent dans la conception de systèmes de protection sociale aujourd’hui.
La République islamique d’Iran a soulevé la question des effets négatifs des sanctions et des mesures coercitives unilatérales sur les droits des personnes handicapées.
« Quelles sont les convergences entre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la Convention relative aux droits des personnes handicapées et comment le deuxième instrument pourrait-il aider à mettre en œuvre le premier »? a demandé le Brésil.
Les États-Unis ont demandé s’il était possible de concevoir une protection sociale qui améliorerait l’accès des femmes et des filles aux services de santé.
Le Maroc, notant que la Rapporteuse spéciale avait souligné dans son rapport la nécessité d’interagir avec un grand nombre de parties prenantes, lui a demandé quels besoins elle souhaitait partager avec les États Membres pour exécuter son nouveau mandat.
Le Soudan a évoqué les progrès dans son pays.
La Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées a dit qu’elle avait essayé de mettre en avant les principaux messages contenus dans le rapport. Elle a dit avoir reçu quantité de réponses dans le cadre des consultations menées pour le rédiger.
Quant à la portée de la coopération internationale en matière de protection sociale, elle a noté que cette question était abordée par de nombreuses agences, dont l’Organisation internationale du Travail (OIT) et la Banque mondiale, ou le « Social Protection Interagency Board ». Il faut mettre des outils à la disposition des États dans l’évaluation des besoins. « Le soutien politique des États est fondamental », a-t-elle dit.
Il y a de plus en plus d’initiatives concrètes dont l’objectif est d’améliorer la situation des personnes handicapées, a reconnu Mme Devandas-Aguilar. Il faut des programmes qui promeuvent véritablement leur participation et leur indépendance.
D’après elle, « il faut rompre le cercle vicieux entre protection sociale et inactivité ». Il est fondamental que les personnes handicapées soient prises en compte dans les programmes généraux de protection sociale, et pas seulement dans des programmes spécifiques.
La question du cycle de vie est également très importante, car il y a souvent une déconnexion totale du système selon l’âge, a-t-elle constaté. Par ailleurs, elle s’est dite consciente des défis à relever pour les femmes et les enfants handicapés.
Quant à la collaboration avec les autres rapporteurs spéciaux sur des groupes vulnérables, elle est « non seulement possible, mais elle est presque obligatoire pour progresser vers une protection sociale universelle et inclusive ».
Enfin, a conclu l’intervenante, il faut apporter davantage d’assistance directe technique. « Les investissements sociaux ne doivent pas laisser en marge les personnes handicapées. »
Déclaration liminaire
Mme VIRGINIA DANDAN, Experte indépendante sur les droits de l’homme et la solidarité internationale, a dit accorder une attention particulière à la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, ainsi qu’aux négociations sur les changements climatiques lors de la prochaine réunion à Paris.
La solidarité internationale est fréquemment mise en avant lors de catastrophes naturelles ou humanitaires, d’épidémies, d’actes terroristes et d’autres crises comme celle des migrants en Europe, a affirmé Mme Dandan. Lorsque se produit ce type d’événements, le besoin de la solidarité internationale est amplifié, a-t-elle précisé, en soulignant que la solidarité préventive internationale est la garantie des libertés et des droits codifiés dans les traités internationaux des droits de l’homme, lesquels constituent des droits notamment économiques, sociaux et culturels.
Bien que les États soient individuellement responsables de la mise en œuvre nationale de leurs obligations en matière de droits de l’homme, aucun pays, pauvre ou riche, ne peut surmonter seul, les défis en matière de droits de l’homme et sans assistance de la communauté internationale, a-t-elle déclaré.
La réalité a clairement démontré que la valeur préventive de la solidarité internationale à travers la coopération internationale était essentielle, obligatoire, en particulier en ce qui concerne la capacité des États à se soumettre à leurs obligations fondamentales en vertu du droit international humanitaire, a affirmé la Rapporteuse spéciale.
Elle a également lancé un appel à la mise en place d’une justice climatique. Ainsi, elle a demandé à la société civile de l’accompagner sur les problématiques en matière de coopération internationale et de solidarité, à savoir le développement durable, la protection de l’environnement, ainsi que la prévention des crises humanitaires et des catastrophes naturelles.
Dialogue interactif
Les Philippines ont appuyé l’idée d’étudier de près l’avant-projet de Déclaration sur le droit à la solidarité internationale et ont invité la communauté internationale à unir ses points de vue. Quelles sont les prochaines étapes après les consultations régionales sur le projet de déclaration ? a voulu savoir la déléguée.
Le Brésil s’est interrogé sur la manière dont la solidarité internationale pourrait être incluse dans le système des Nations Unies.
Le Maroc a estimé qu’il s’agissait d’un principe moral et que la tendance mondiale devrait progresser de sorte à mieux refléter les vues des pays en développement. Le Maroc agit en faveur d’une coopération Sud-Sud et triangulaire en vue d’un développement humain pérenne et de relations équilibrées reposant sur l’égalité souveraine des États. Elle a demandé des exemples de bonnes pratiques de solidarité humanitaire.
L’Experte indépendante sur les droits de l’homme et la solidarité internationale a répondu que son mandat était difficile et qu’elle s’était heurtée à des réticences. Le mandat est surtout défendu par les nations en développement. Elle a rappelé que rien n’avait été fait, mis à part quelques beaux discours pour la réalisation de l’objectif 8 du Millénaire pour le développement, remplacé par l’objectif 17 du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Elle a annoncé qu’elle modifierait la proposition d’avant-projet de déclaration, qu’elle avait rédigé sur la base de ses consultations avec les États et pour laquelle elle n’avait reçu aucune réaction de leur part. Faisant part de son isolement dans l’exercice de sa fonction, elle a invité les États à réagir en passant cette fois non pas par les voies diplomatiques mais par celles sur le terrain.
Elle entend soumettre le projet final au Conseil des droits de l’homme, tout en se demandant ce que celui-ci en fera. « L’ONU, c’est de la solidarité internationale », a-t-elle lancé, ajoutant que l’adoption des objectifs du développement était encore un bel exemple d’une telle solidarité, tout comme la Conférence des États Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques de Paris, qui doit faire quelque chose pour les futures générations.