Le Haut-Commissaire aux droits de l’homme prône une approche globale efficace fondée sur les droits pour gérer la crise des migrants
« Nous faisons face à une crise globale de la gestion de la migration », a déclaré le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, M. Zeid Ra’ad Al-Hussein, qui présentait aujourd’hui, à la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, son premier rapport depuis sa prise de fonctions en septembre 2014.
La matinée a été consacrée au dialogue interactif de la Commission avec le Haut-Commissaire aux droits de l’homme.
Au cours de l’année passée, les crises humanitaires et les conflits ont généré les pires déplacements de personnes depuis la Seconde Guerre mondiale, a constaté le Haut-Commissaire.
M. Al-Hussein a estimé qu’il fallait adopter d’urgence une approche globale plus efficace, fondée sur les droits de l’homme des personnes concernées.
À ce sujet, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a publié ses « Principes et Directives recommandés sur les droits de l’homme aux frontières internationales », qui traduisent le cadre international des droits de l’homme en mesures pratiques pour une meilleure gestion des frontières.
Par ailleurs, le Haut-Commissariat a continué de surveiller la situation des droits de l’homme et d’enquêter sur les violations de droits de l’homme, « dans des conditions souvent dangereuses et difficiles », dans de nombreuses régions du monde, a expliqué le Haut-Commissaire.
Des équipes d’enquête ont ainsi été déployées en Iraq et en Libye pour rendre compte de la situation des droits de l’homme dans ces pays.
Le Haut-Commissaire a ensuite défendu le rôle de la société civile, qui est, selon lui, « le meilleur et le plus durable des antidotes à l’extrémisme violent ».
En outre, M. Al-Hussein a insisté sur la nécessité de placer tous les droits de l’homme, y compris le droit au développement, au centre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il a dénoncé les inégalités extrêmes, dont la mortalité infantile.
Enfin, a-t-il annoncé, la décision a été prise de changer en profondeur la structure du Haut-Commissariat.
La Troisième Commission a aussi entendu cet après-midi les déclarations de quatre experts, dont le Secrétaire adjoint aux droits de l’homme, M. Ivan Šimonović, qui a présenté plus d’une quinzaine de rapports du Secrétaire général sur divers sujets ayant trait aux droits de l’homme.
À l’approche des élections, qu’il considère comme un test ultime pour la démocratisation du Myanmar, le Conseiller spécial du Secrétaire général sur le Myanmar, M. Vijay Nambiar, a jugé encourageants les travaux de la Commission électorale qui a accepté l’aide internationale.
En présentant son rapport sur la situation dans ce pays, il est revenu sur le cas de la communauté musulmane des Rohingya, qui est toujours la cible de graves violations des droits de l’homme.
À son tour, le Président du Comité sur les disparitions forcées, M. Emmanuel Decaux, a présenté le rapport annuel de cet organe, qui veille à l’application de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.
Dans le cadre de la procédure de requêtes d’appels urgents prévue par l’article 30 de la Convention, son rapport fait état de 51 nouvelles demandes jugées recevables concernant le Mexique, l’Iraq, la Colombie, le Cambodge et le Brésil. Parmi ces cas, figure celui des 43 étudiants d’Iguala au Mexique, sur lesquels M. Decaux a insisté.
« Il est inconcevable qu’en 2015 nous recevions de nouveaux cas de disparitions forcées au quotidien », a renchéri le Vice-Président du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, M. Bernard Duhaime. « Si l’on considère que ces cas ne représentent que la partie émergée de l’iceberg, cela montre très clairement à quel point la situation est sombre », a-t-il ajouté.
Le prochain rapport thématique du Groupe de travail se concentrera sur la question de la migration et des disparitions forcées, a annoncé le Vice-Président, car il s’agit là d’un problème transnational complexe qui s’intensifie du fait de l’implication de groupes criminels organisés et d’acteurs non étatiques.
La Troisième Commission poursuivra demain ses travaux, à partir de 10 heures.
PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME: APPLICATION DES INSTRUMENTS RELATIFS AUX DROITS DE L’HOMME
b) Questions relatives aux droits de l’homme, y compris les divers moyens de mieux assurer l’exercice effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales
c) Situations relatives aux droits de l’homme et rapports des rapporteurs et représentants spéciaux
Déclaration liminaire
Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, M. ZEID RA’AD AL-HUSSEIN, a présenté son premier rapport* depuis sa prise de fonctions en septembre 2014. Celui-ci donne un aperçu des activités menées au siège et sur le terrain par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme d’août 2014 à juillet 2015.
« Ce rapport montre l’urgence de mieux protéger les droits de l’homme dans tous les domaines de l’entreprise humaine », a déclaré M. Hussein. Les droits de chaque être humain sont au cœur du développement et de la paix.
Le Haut-Commissariat a identifié des domaines prioritaires qui requièrent une action urgente dans chaque État, dans le monde entier, a-t-il dit. Il a choisi de mettre l’accent sur la gestion des crises de la migration, le renforcement de la société civile et les inégalités dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Au cours de l’année passée, les crises humanitaires et les conflits ont généré les pires déplacements de personnes depuis la Seconde Guerre mondiale. « Nous faisons face à une crise globale de la gestion de la migration », a constaté le Haut-Commissaire. Il faut d’urgence adopter des approches plus efficaces, basées sur les droits de l’homme des personnes concernées. À cet égard, les « Principes et Directives recommandés sur les droits de l’homme aux frontières internationales » publiés cette année par le Haut-Commissariat offrent des critères détaillés pour une meilleure gestion des frontières.
Depuis qu’il est devenu Haut-Commissaire, M. Al-Hussein s’est efforcé d’attirer l’attention sur les droits des migrants, qu’il s’agisse de leur droit à la vie et à la sécurité de la personne, de leurs droits à la santé et à l’éducation, ou de l’intolérance et de la xénophobie.
Les bureaux régionaux du Haut-Commissariat en Asie et dans le Pacifique ont suivi les conditions d’arrivée par bateau des migrants et les mécanismes de trafic et de détention obligatoire pour les demandeurs d’asile. À travers le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture, le Haut-Commissariat a fourni une assistance d’urgence à 5 000 victimes et à leurs familles ayant fui les conflits en Syrie et en Iraq, a-t-il précisé.
Le Haut-Commissaire a ensuite dit combien la participation de la société civile, des femmes, des minorités, de la jeunesse et de la presse indépendante, était importante. « Un espace sain pour la société civile est le meilleur et le plus durable des antidotes à l’extrémisme violent », a-t-il affirmé.
M. Al-Hussein a insisté sur la nécessité de placer tous les droits de l’homme, y compris le droit au développement, au centre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Aujourd’hui, a-t-il rappelé, 11 enfants meurent chaque minute de causes qui peuvent être évitées et une femme meurt toutes les deux minutes de causes liées à la grossesse ou à l’accouchement. Pour lui, « de telles inégalités extrêmes sont injustes, sources de dissensions et socialement corrosives ». Il a exhorté les États à mettre au point des indicateurs spécifiques pour mesurer les progrès dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable.
L’année prochaine, a-t-il annoncé, le Haut-Commissariat présentera des recommandations au Conseil des droits de l’homme sur la façon dont les États peuvent améliorer leurs systèmes juridiques pour renforcer la responsabilisation des entreprises et améliorer l’accès aux recours en cas d’implication d’une entreprise dans des violations graves des droits de l’homme.
Par ailleurs, le Haut-Commissariat a continué de surveiller la situation des droits de l’homme et d’enquêter sur les violations de droits de l’homme, « dans des conditions souvent dangereuses et difficiles », dans de nombreuses régions du monde, a expliqué le Haut-Commissaire. Une équipe d’enquête a ainsi été déployée en Iraq pour rendre compte de la situation des droits de l’homme dans le pays à la lumière des violations commises par l’organisation dite État islamique d’Iraq et du Levant (EILL) et des groupes associés.
Le Haut-Commissariat a également déployé une équipe chargée d’enquêter sur les violations du droit international des droits de l’homme et les atteintes à ces droits commises en Libye depuis le début de 2014. De plus, il étudie les violations des droits de la minorité musulmane rohingya au Myanmar, les situations au Soudan du Sud, en Syrie, en Érythrée, en République centrafricaine, au Sri Lanka, à Gaza, ou en Ukraine.
M. Al-Hussein a indiqué que le Haut-Commissariat continuait d’être engagé dans les opérations de paix de l’ONU et dans le contexte des crises humanitaires, et qu’il avait fait plusieurs exposés au Conseil de sécurité.
Enfin, avec l’appui du Haut-Commissariat, le Conseil des droits de l’homme a continué d’intervenir activement dans les situations urgentes et chroniques en matière de droits de l’homme. Pendant la période considérée dans son rapport, trois nouveaux mandats au titre des procédures spéciales ont été créés sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales, sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme et sur le droit à la vie privée.
En mars dernier, a rappelé M. Al-Hussein, il a annoncé sa décision de lancer une initiative visant à changer en profondeur la structure du Haut-Commissariat, pour en faire une organisation flexible et en adéquation avec ses objectifs. La première étape de ce changement organisationnel portera sur la décentralisation de certaines ressources du siège et la consolidation de huit pôles régionaux. « Nous réaliserons cette vision dans le cadre des ressources existantes », a-t-il assuré. « Nous renforcerons notre travail à New York, pour mieux intégrer les droits de l’homme dans les programmes de développement et de paix et de sécurité. »
Dialogue interactif
Le Costa Rica, appuyé notamment par le Brésil et la Suisse, a invité à lancer un message clair: il faut augmenter les ressources du Haut-Commissariat. « Il faut reconnaître la nécessité d’allouer une partie plus substantielle du budget de l’ONU » si l’on veut véritablement faire face aux flux de réfugiés, a plaidé le Brésil.
La Suisse s’est inquiétée du sous-financement chronique des activités du Haut-Commissariat et s’est dite d’avis que le budget régulier de l’ONU devrait, au minimum, couvrir toutes les activités du Haut-Commissariat mandatées par les États membres du Conseil des droits de l’homme. Idéalement, le pilier « droits de l’homme » devrait faire l’objet d’une augmentation conséquente du budget ordinaire, a-t-elle affirmé, en se déclarant favorable au renforcement institutionnel du Haut-Commissariat.
Le représentant du Brésil a rappelé une allocution faite par le Haut-Commissaire il y a trois jours à Hunter College, mettant l’accent sur le problème croissant des conflits armés. Il a dénoncé l’extrémisme violent qui dénie à la population civile ses droits les plus fondamentaux. Les interventions militaires sont à l’origine de l’afflux des réfugiés, du jamais vu depuis la Seconde Guerre mondiale.
Il a prié le Haut-Commissaire de fournir des informations sur ce qui pourrait être fait lorsque beaucoup de réfugiés recherchent un toit et la sécurité dans une même région.
Sur ce même sujet, le Maroc a mis l’accent sur la migration, qui ne saurait être résolue sans le respect de l’état de droit. Il a voulu savoir comment mieux coordonner les travaux de tous les organes traitant de la migration. Il a rendu hommage à la vision de M. Al-Hussein pour assouplir la manière de travailler de son Bureau dans un souci d’efficacité dans la réponse aux urgences. Il a cependant mis en garde contre toute politisation.
La Suisse a soutenu les efforts du Haut-Commissaire pour intégrer la question des droits de l’homme dans la politique et les travaux des Nations Unies relatifs à la paix, au développement durable et aux affaires humanitaires. Elle a loué « l’Initiative changement », sous l’impulsion du Haut-Commissaire, visant à la restructuration pour augmenter à la fois son efficacité et impact. Elle a enfin demandé quels ont été les principaux défis durant la première année d’interaction de M. Al-Hussein avec le Conseil des droits de l’homme.
Le Costa Rica a rappelé la vingt-septième réunion annuelle des présidents des organes conventionnels et a voulu savoir comment ceux-ci entendaient faire appliquer les Lignes directrices sur l’intimidation et les représailles contre les personnes qui coopèrent avec les Nations Unies.
La Colombie a souligné, à cet égard, qu’il importait de protéger et respecter les défenseurs des droits de l’homme. La paix doit se produire dans un contexte de restitution des droits de l’homme, a déclaré la déléguée, qui a souhaité connaître l’opinion de M. Al Hussein sur les garanties de non-répétition.
Le Chili s’est élevé contre les violations des droits de l’homme et les atrocités commises par l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL). Le délégué a appelé à un renforcement des bureaux régionaux du Haut-Commissariat, partant de l’expérience d’appui du Bureau du Haut-Commissariat au renforcement de la démocratie au Chili.
L’Autriche a appuyé l’intention du Haut-Commissaire d’investir davantage dans les partenariats stratégiques et les priorités thématiques. Le représentant s’est inquiété contre l’intolérance croissante à l’égard des homosexuels et des minorités ethniques et religieuses dans plusieurs régions. Les Nations Unies ont un rôle de premier plan à jouer dans la réponse globale au flux de migration, a-t-il affirmé, en demandant comment améliorer cette réponse à toutes les étapes de la migration.
L’Irlande a défendu l’indépendance et l’impartialité du Haut-Commissariat et a demandé comment coordonner le travail entre Genève et New York, notamment entre le Conseil des droits de l’homme et l’Assemblée générale. Elle s’est enquise en outre des moyens visant à développer davantage la participation de la société civile aux travaux de l’Assemblée à New York.
La République islamique d’Iran s’est alarmée des « objectifs étriqués » de certains États qui continuent à insister sur l’adoption de mesures unilatérales coercitives contre d’autres nations. Le représentant a appelé le Haut-Commissaire à agir plus vigoureusement contre « le génocide contre les Palestiniens ». Il a fustigé le plaidoyer à la haine religieuse, notamment contre les Yazédis, les chrétiens et autres minorités au Moyen-Orient. Il a estimé que la lutte contre les cartels de la drogue n’était pas assez solide.
L’Inde a salué l’assistance technique aux pays à leur requête mais a déploré certains obstacles administratifs dont souffre le Haut-Commissariat. Il a insisté, néanmoins, sur l’obligation de reddition de compte de son personnel. Il a appelé à l’impartialité, à la non-sélectivité et à l’indépendance du Conseil des droits de l’homme, jugeant que le mécanisme de l’examen périodique universel avait de bonnes leçons à donner à ce sujet. L’Inde a affirmé que les changements prévus d’ici à 2030 ne sauraient être atteints sans un respect scrupuleux des droits de l’homme.
Le Mexique a insisté sur l’indépendance du Haut-Commissariat et sur l’octroi de ressources suffisantes. Le Mexique a maintenu ses contributions non étiquetées, a déclaré le représentant, invitant les autres États à en faire de même. Il a déclaré que la visite officielle du Haut-Commissaire dans son pays avait permis un échange précieux d’informations et de présenter une image fidèle des efforts et difficultés du Mexique en matière de droits de l’homme. Le délégué a formé le vœu que son pays réussisse dans ses initiatives tendant à aider les groupes les plus vulnérables de la société. Il a enfin estimé que l’approche du Haut-Commissaire en matière de migration était extrêmement importante.
L’Indonésie a mis en exergue les principes d’objectivité, d’impartialité, de non-sélectivité et d’indépendance. La promotion et la protection des droits de l’homme est un processus évolutif, a déclaré le délégué, qui a ensuite fait une brève présentation des initiatives indonésiennes dans le domaine des droits de l’homme.
Le Haut–Commissariat ne doit pas se considérer comme un procureur ou un juge s’agissant de la situation des droits de l’homme dans les pays, a prévenu le représentant de la Chine, qui a formé le vœu que le Haut-Commissaire aidera au maintien des principes intergouvernementaux du Conseil des droits de l’homme et respectera les principes d’impartialité et d’objectivité.
La Fédération de Russie a encouragé à des consultations plus régulières avec les États Membres, s’agissant du Plan stratégique 2020. La représentante a prié le Haut-Commissariat de ne pas outrepasser son mandat et de se contenter d’apporter un appui technique.
L’Union européenne s’est félicitée des priorités thématiques qui insistent sur la lutte contre toutes les formes de discrimination. L’Europe est confrontée à une crise sans précédent de migrants et de réfugiés. Elle a prié le Haut-Commissaire de dire comment il envisageait son rôle dans la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Elle a salué la présence du Haut-Commissaire dans les médias sociaux en s’interrogeant sur l’utilisation qui peut en être faite par les médias pour les enquêtes.
La Lettonie a noté que le vingtième anniversaire du Programme d’action de Beijing ne figurait pas parmi les priorités thématiques. Comment améliorer les missions de suivi en Ukraine, a-t-elle demandé.
« Votre indépendance est essentielle pour la réalisation des droits de l’homme de tous », a affirmé le Royaume-Uni à l’adresse de M. Al-Hussein. Le Royaume-Uni a donné un million de livres sterling pour aider les réfugiés syriens et le pays a mis en place un cadre juridique en vue de combattre toute forme de haine. L’indépendance de la presse est aussi très importante. Comment le Haut-Commissariat peut participer à la mise en œuvre du programme de développement durable?
Les États-Unis ont appelé à une vigilance continue, avant d’attirer l’attention sur les droits de l’homme en Syrie ou en République populaire démocratique de Corée (RPDC). En 2015, le Conseil des droits de l’homme a mis en place plusieurs commissions d’enquêtes pour faire la lumière sur des situations des droits de l’homme dans plusieurs pays. Quelles sont les menaces institutionnelles à l’indépendance du Haut-Commissariat et pour limiter la prolifération des lois limitant l’action des organisations de la société civile?
Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, s’attaquant à la question cruciale des migrations, a rappelé qu’il existe un régime de protection des réfugiés et que « nous devons veiller à fournir un appui constant à la mise en œuvre de la Convention de 1951 ». Il faut aborder la discussion du point de vue de la structure de la gouvernance mondiale en la matière, avant de l’améliorer le cas échéant.
Il s’est inquiété des centres d’enregistrement et de traitement des réfugiés « qui peuvent être des lieux de violation des droits », même non intentionnellement, mais du fait de la bureaucratie existante.
En outre, a-t-il précisé, « un quartet » regroupe le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), le Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général sur la question des migrants et le Conseil des droits de l’homme, et travaille aussi avec l’Organisation internationale du Travail (OIT) pour comprendre la dynamique du marché du travail. Il faut « une vigilance constante » et une bonne coordination pour adopter une stratégie migratoire qui réponde aussi aux besoins des pays.
M. Al-Hussein a rappelé que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme coprésidait le Groupe de travail sur les migrations.
Préoccupé par les représailles et l’intimidation à l’encontre des personnes qui coopèrent avec l’ONU, il a insisté sur l’importance de mener un débat participatif avec la société civile, qui « représente souvent les groupes les plus marginalisés et discriminés ».
Dans le cadre du droit au développement, le Haut-Commissaire a dit qu’il était « frappé par le fait que six millions d’enfants par an meurent de causes évitables ». « Si Daech tuait autant d’enfants, nous ne pourrions pas parler d’autre chose », a-t-il fait remarquer. Les décès liés aux violences impressionnent davantage que les décès dus à un manque de soins de santé: « quelque chose ne tourne pas rond », a-t-il déploré.
Sur la question de savoir comment garantir que les processus défendant les droits de l’homme permettent la non-répétition des conflits et des souffrances infligées aux victimes, il a évoqué les exemples d’une « réflexion créative » à Sri Lanka et en Colombie.
« Si nous souhaitons nous inscrire dans le droit fil de l’examen périodique universel, nous devons être présents partout dans le monde, pas seulement dans certains pays et pas d’autres », a fait valoir M. Al-Hussein en parlant de la gestion du changement structurel au Haut-Commissariat aux droits de l’homme. Il faut aller de l’avant avec les titulaires de mandats. Rappelant que le Haut-Commissariat compte 64 bureaux sur le terrain, il a dit: « nous n’imposons notre présence à aucun État Membre ».
Ensuite, il a plaidé en faveur d’une attention accrue pour les minorités religieuses persécutées, notamment au Moyen-Orient. Mentionnant le Plan d’action de Rabat sur l’interdiction de l’appel à la haine nationale, raciale ou religieuse et la liberté d’expression, il a dit que la frontière délicate entre ces deux points était débattue dans des ateliers « aux quatre coins de monde ».
Revenant sur l’élargissement de l’espace démocratique, le Haut-Commissaire a reconnu que le rôle de la société civile se heurtait à des mesures mises en place pour lutter contre l’extrémisme violent. « La marge de manœuvre de la société civile est en train de se rétrécir, ce qui ne fait que servir les idéologies extrêmes », a-t-il constaté, en prônant un équilibre entre la protection des États et une société civile rigoureuse.
Il faut mettre en place des indicateurs pour vérifier que personne n’est laissé pour compte dans la réalisation des objectifs de développement durable, a-t-il ajouté, en disant que la société civile avait son rôle à jouer à cet égard. Il a encore souligné « la nécessité impérieuse d’examiner les politiques sécuritaires mises en place par un grand nombre de gouvernements ».
Quant au troisième cycle de l’examen périodique universel, « nous pensons que c’est aux États Membres de prendre les rênes du cadre normatif », a estimé M. Al-Hussein.
« Nous avons un mandat de parler haut et fort au nom des plus vulnérables », a-t-il affirmé, avant d’encourager tous les États à s’acquitter de leurs obligations en vertu des traités sur les migrants, sans discriminer qui que ce soit selon leur statut migratoire.
À propos du changement organisationnel, le Haut-Commissaire a répondu s’être intéressé aux lieux où les Nations Unies sont déjà bien implantées pour mettre en place les pôles régionaux.
« Le Comité des droits de l’homme fonctionne très bien et peut parler d’une seule voix sur des sujets sur lesquels les avis divergeaient, même si certaines questions thématiques divisent toujours », s’est félicité le Haut-Commissaire. D’après lui, le fait que l’on demande au Haut-Commissariat aux droits de l’homme de mener des enquêtes témoigne de l’actualité du monde mais aussi de l’importance qui lui est accordée.
Il a souligné ensuite le fait que Genève et New York avaient des compétences et un rôle très distincts à jouer et qu’il fallait assurer l’harmonie entre les deux sièges.
« Le monde est en pleine mutation et nous essayons de nous y adapter », a continué M. Al-Hussein en parlant des médias sociaux. Les informations utilisées par les commissions d’enquête doivent toujours être vérifiées et avérées, a-t-il souligné. Face à la tournure nouvelle que prennent les conflits, il faut développer les compétences pour établir l’authenticité des images et des documents reçus.
Enfin, s’agissant de l’indépendance du Haut-Commissariat, M. Al-Hussein a noté que « les allocations budgétaires très basses font que le Bureau est tributaire des contributions volontaires », et que cela peut donner l’impression qu’il dépend d’un petit groupe de pays. Or, il fait en sorte que cette conception ne devienne pas la réalité.
À l’occasion d’une deuxième série de questions au Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, les délégations ont mis en exergue la nécessité de la non-politisation et du traitement sur un pied d’égalité de tous les États. Elles ont demandé des informations sur le plan d’action du Haut-Commissariat pour faciliter la réalisation du Programme de développement à l’horizon 2030 sous l’angle des droits de l’homme.
Des orateurs ont mis l’accent sur les rapports entre les États et la société civile, en rappelant l’importance la résolution 24/24 du Conseil des droits de l’homme sur la coopération avec l’ONU, ses représentants et ses mécanismes dans le domaine des droits de l’homme.
Le Bélarus s’est félicité de la visite de M. Al-Hussein dans le pays en septembre et a demandé au Haut-Commissariat d’aider à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Le Bélarus est un fervent partisan de la coopération internationale, a dit la délégation. Elle a fait état d’une série de séminaires, à Minsk, sur la traite des enfants et d’autres thèmes liés aux droits de l’homme. Elle a aussi salué les échanges avec des agences et fonds de l’ONU, précisant qu’un nombre croissant d’invitations avaient été envoyées à des titulaires de mandats.
Le Liechtenstein a déploré le retard pris dans l’application de la résolution 24/24 du Conseil des droits de l’homme, invitant le Secrétaire général à nommer un point focal sur la coopération avec la société civile. Il a aussi prié le Haut-Commissaire de faire le bilan de la situation financière de son Bureau.
La Norvège a défendu l’indépendance du Haut-Commissariat qui doit se prémunir contre toute ingérence politique. Le rapport de la Cinquième Commission dans ce contexte soulève des préoccupations, notamment la section relative à l’examen de la gouvernance, qui risque d’affecter l’indépendance du mandat indépendant du Haut-Commissaire.
L’État de Palestine a demandé ce qu’il fallait faire contre l’escalade de la violence dans les territoires arabes occupés par Israël. Des colons israéliens détruisent les biens des Palestiniens. L’observatrice, qui a dénoncé l’impunité dont jouissait Israël, s’est félicitée néanmoins de la résolution sur les violations des droits de l’homme dans le conflit de 2014 à Gaza, suite à la mission d’établissement des faits à Gaza. La déléguée a demandé si un mécanisme de prévention aurait pu éviter ces violences.
L’Espagne a invité à éviter la bureaucratie de Genève. Elle a salué le travail sur l’orientation et l’identité sexuelle. Pour l’Espagne, le programme de développement durable est une occasion unique pour mettre au point des indicateurs d’évaluation des progrès en termes de droits de l’homme.
Cuba a sollicité des précisions sur le renforcement de la présence du Bureau du Haut-Commissariat, en consultation étroite avec les États membres.
L’Iraq a dénoncé le terrorisme qui a détruit la région et se convertit en « plaie qui fait fi du temps et de l’espace ». La population de l’Iraq, toutes religions et origine confondues, a décidé de rester debout contre cet ennemi. Il a apprécié l’assistance technique du Haut-Commissariat et l’insistance de M. Al-Hussein à défendre les populations contre les actes criminels des terroristes.
La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a dit entretenir de bonnes relations de coopération et de dialogue avec le Haut-Commissaire. Concernant les bureaux sur le terrain, dont celui de Séoul, ouvert en juin 2015, le représentant a rappelé que son pays avait catégoriquement rejeté la résolution du Conseil des droits de l’homme sur la situation de ces droits en RPDC en vertu de laquelle ce bureau avait été ouvert. Il a aussi rejeté toute tentative de recours à des dialogues interactifs comme celui-ci pour jeter l’opprobre sur des pays comme le sien.
Le Yémen s’est intéressé aux équipes d’enquête dans certaines nations en conflit, avant de demander s’il y avait des ressources adéquates, par exemple en ce qui le concerne.
La Libye a vivement salué l’assistance technique offerte par le Haut-Commissariat ainsi que la mission d’enquête sur les violations des droits de l’homme sur son territoire.
Le Soudan a pris la décision de consolider les droits de l’homme, notamment par la promulgation d’une loi sur la traite des personnes et la convocation d’une conférence régionale sur ce trafic et la criminalité transfrontalière. Il a espéré que le Haut-Commissariat offrirait une assistance technique en matière d’assistance à l’administration de la justice.
L’Arménie s’est dite prête à travailler avec toutes les parties prenantes pour faire progresser les droits de l’homme. Dans ce cadre, elle agit de concert avec la société civile. Elle a regretté la situation dans son « voisinage » immédiat où les représentants de la société civile sont intimidés et réprimés, surtout ceux qui participent à des activités pour la paix et la stabilité régionales.
La Sierra Leone, au nom du Groupe des États d’Afrique, a souligné la nécessité de respecter l’appropriation nationale et de s’abstenir d’imposer des concepts étrangers au niveau national. Il a mis en garde contre toute tentative d’extrapolation de certains concepts et principes. Il a réitéré la position exprimée hier au nom du Groupe africain sur les Lignes directrices sur les représailles.
L’Organisation de la coopération islamique (OCI) a partagé les vues de M. Al-Hussein sur la situation en Palestine et la crise des migrants. Au sujet de la minorité musulmane rohingya, elle a voulu savoir ce qu’il pensait des élections prévues sous peu et qui sont source de préoccupation pour les membres de l’OCI. Deux activités conjointes ont été menées avec le Haut-Commissariat, a rappelé la représentante.
La République arabe syrienne a dénoncé les accusations proférées par le Royaume-Uni en le renvoyant à la lecture de la longue histoire de son propre pays, truffée de violations des droits de l’homme des individus et des peuples. Le délégué a ensuite sollicité la position du Haut-Commissariat sur les mesures et sanctions contre les peuples. Il l’a appelé à vérifier les faits dans les camps de réfugiés syriens.
L’Égypte a exhorté à éviter la pratique du « deux poids deux mesures » et l’imposition de normes culturelles étroites. Il importe de combler les profondes inégalités qui existent dans le monde pour contrecarrer l’avancée des groupes terroristes dans plusieurs régions. Le représentant s’est dit persuadé que le Haut-Commissaire est capable de rapprocher les points de vue des différents États.
La Turquie a voulu savoir comment le Haut-Commissaire pourrait mobiliser plus d’appui en faveur des contributions financières. Il a plaidé en faveur du partage du fardeau de la migration entre les pays d’origine, de transit et d’accueil et à l’élaboration d’une démarche fondée sur les droits de l’homme face à cette crise.
Incontestablement, le terrorisme a pris une ampleur mondiale et le Nigéria n’a pas été épargné, a déclaré le représentant de ce pays, qui a énergiquement condamné les agissements de Boko Haram. Notre pays reste fort cependant et les enfants, y compris les filles, continuent à fréquenter l’école. Il a fustigé les passeurs et exigé que tous les États garantissent un traitement humain et digne à tous les migrants. Il a recommandé au Haut-Commissaire de s’abstenir de se prononcer sur des questions qui divisent les États Membres.
Israël a renvoyé pour sa part la Syrie à ses responsabilités, et prié son représentant de s’abstenir de faire diversion sur ces propres crimes en s’attaquant à Israël. Les autorités palestiniennes, quant à elles, feraient mieux de cesser d’inciter ses jeunes et sa population contre Israël. « Cessez de blâmer autrui pour ce qui vous arrive et prenez enfin vos responsabilités », a conclu le délégué.
Le Myanmar, réagissant à une question posée sur son pays sans le nommer, a tenu à apporter quelques précisions. Les critères d’éligibilité au Myanmar sont recensés dans la loi électorale, l’un d’eux stipulant que pour être éligible, il faut d’abord être citoyen. De nombreux candidats, dont ceux de confession bouddhiste, peuvent se présenter.
L’Érythrée a indiqué que la coopération internationale devait se faire sur la base de la transparence et de la non-sélectivité. Tous les États doivent être constructifs pour renforcer la coopération internationale dans le domaine des droits de l’homme.
Le Haut-Commissaire aux droits de l’homme a répondu, au sujet de la résolution 24/24 du Conseil des droits de l’homme sur la coopération avec les Nations, que c’est aux États Membres de décider. Il a néanmoins appuyé l’accès sans entraves à la société civile et à ses représentants.
Il s’est très surpris des discussions entre les représentants de la société civile et les États dans les réunions auxquelles il lui a été donné d’assister.
Le Haut-Commissaire attend le même niveau de contributions volontaires que l’année dernière mais a déclaré que le personnel, qui est hautement dévoué, est très inquiet au sujet de cette question.
La situation est très préoccupante dans les territoires palestiniens occupés et le Secrétaire général s’est rendu en mission urgente dans la région pour faire cesser cette effusion de sang car il n’est pas possible d’avoir une autre crise régionale de longue durée. Le Conseil des droits de l’homme a d’ailleurs adressé une invitation au Président de l’Autorité palestinienne, M. Mahmoud Abbas, pour qu’il s’exprime devant lui.
Sur la question des objectifs de développement durable et la conception d’indicateurs en matière de droits de l’homme, le processus en est à ses balbutiements, a reconnu le Haut-Commissaire, mais « nous comprenons leur importance afin que personne ne soit laissé pour compte ».
Au sujet des réformes prévues, il y a de très hautes attentes, a-t-il dit. Pour ce qui est de l’emplacement des centres régionaux, il n’a pas vu de contradiction avec la nature du travail du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. « L’expertise doit être proche des pays qui en ont besoin afin qu’ils puissent s’en prévaloir. »
Le Haut-Commissariat est bien présent au Yémen, mais il n’a pas pu vérifier toutes les allégations de violations des droits de l’homme. À ce sujet, il a espéré que les enquêtes prévues par les autorités bénéficieront du soutien que le Haut-Commissariat va leur fournir.
M. Al-Hussein a assuré le représentant du Soudan que l’assistance technique n’avait « pas d’effet politique ».
Évoquant la situation au Myanmar, il a estimé que les élections à venir constitueront un tournant et il s’est félicité des assurances fournies par le Président de la Commission électorale sur la transparence et la liberté du processus. Il s’est dit préoccupé par la condamnation des militants qui critiqueraient le Gouvernement et a dit qu’il fallait remédier aux discriminations contre les Rohingya et les autres minorités.
Le Haut-Commissaire a répondu au représentant de la Syrie qu’il y a bien une équipe du Haut-Commissariat qui suit les violations commises contre les Syriens réfugiés dans les pays voisins et contre les Syriens déplacés dans leur propre pays.
Concernant la situation financière, il n’a pas souhaité rentrer dans les détails. Le Budget 2015 est de 120 millions de dollars; il a enregistré une réduction de 30% par rapport à l’année précédente.
Enfin, il a abordé une dernière fois la question des migrations pour indiquer que son Bureau avait préparé un programme de formation sur les migrations et les droits de l’homme qui a déjà bénéficié à la mission de l’ONU sur la traite des migrants.
Déclaration liminaire
M. VIJAY NAMBIAR, Conseiller spécial du Secrétaire général pour le Myanmar, qui présentait le rapport sur la situation dans le pays qui couvre la période du 7 août 2014 au 6 août 2015, a déclaré s’y être rendu à sept reprises; la plus récente visite remontant à la semaine dernière. Il a souligné le caractère historique des prochaines élections qui doivent se tenir en novembre, lesquelles pourraient ouvrir une nouvelle ère pour l’instauration de la démocratie.
Le Myanmar, a-t-il dit, a parcouru un long chemin mais depuis 2011, le Gouvernement n’a eu cesse de faire des efforts pour montrer sa volonté d’accompagner le changement. Ainsi, l’on a pu constater que le Parlement fonctionne, même s’il doit encore faire des progrès en vue notamment d’amender les dispositions de la Constitution.
La Rapporteuse spéciale sur le Myanmar, Mme Yanghee Lee, s’est rendue à deux reprises dans le pays, l’année dernière. L’occasion de réaliser que la situation des droits de l’homme reste encore préoccupante. S’il est vrai que l’on a assisté à la libération de prisonniers politiques, il est important de préciser que les cas d’arrêts et de détentions arbitraires de manifestants pacifiques et de personnes ordinaires se poursuivent, a déclaré M. Nambiar.
Il s’est attardé sur les manifestations d’étudiants en février et mars derniers contre la loi nationale sur l’éducation, à la suite de laquelle 127 étudiants ont été arrêtés de manière arbitraire, a déploré le Conseiller du Secrétaire général. Par ailleurs, il est revenu sur le cas de la communauté des Rohingya, laquelle est toujours la cible de graves violations des droits de l’homme.
En outre, la situation des communautés musulmanes dont près de 125 000 sont concentrés dans des camps et vivent dans des conditions sanitaires déplorables. Après les évènements de 2012, les communautés sont marginalisées et leurs conditions de vie restent précaires, a affirmé M. Nambiar. Parallèlement, il est revenu sur la proposition du Secrétaire général d’établir un bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme au Myanmar; un dossier qui n’a pas beaucoup évolué, a-t-il admis.
À l’approche des élections, qu’il considère comme un test ultime pour la démocratisation du Myanmar, le Conseiller du Secrétaire général a jugé encourageants les travaux de la Commission électorale qui a accepté l’aide internationale. Une attitude qui aura pour effet d’accroître la confiance dans l’issue de ce scrutin, a-t-il assuré.
De son côté, l’ONU va fournir du matériel pour assister le pays, avec près de 500 observateurs internationaux qui seront sur le terrain. Toutefois, des questions persistent notamment sur la fiabilité des listes électorales en raison notamment des inondations récentes dans certaines régions, a précisé M. Nambiar. Il a également exprimé des inquiétudes concernant le déni du droit de vote à certains groupes religieux, ainsi que la révocation de cartes d’identité, et la disqualification de certains candidats notamment des musulmans. Il a également fait état des discours de haine dans le pays, des menaces à l’égard de la Rapporteuse spéciale sur le Myanmar, autant d’actes décriés par la communauté internationale et lesquels peuvent avoir un impact négatif et saper la tenue de ce scrutin.
Il est également revenu sur le sort des Rohingya, la flambée des actes de violence, les discours de haine antimusulmans qui risquent de faire basculer ces élections dans la violence.
Le Conseiller spécial du Secrétaire général sur le Myanmar a mis en avant le mandat de bons offices qui, selon lui, reste un instrument important pour communiquer avec les autorités du pays. À cet égard, il a invité les États Membres à le réviser en réduisant son mandat d’ici à la fin de l’année prochaine, tout en réfléchissant à la forme qu’elle prendra à l’avenir.
Dialogue interactif
Le représentant du Myanmar, M. U KYAW TIN, a déclaré que son gouvernement avait fait des changements remarquables et rapides en très peu d’années. Il y a à peine quatre années, le pays était sous un régime militaire et c’est aujourd’hui une démocratie. Des élections inclusives vont avoir lieu dans quelques jours, a-t-il indiqué, en mettant l’accent sur la tenue de grands rassemblements et le respect du droit d’assemblée et d’association. Les négociations avec les groupes armés ont eu lieu sous observation internationale, en vue d’arriver à un accord.
Le Myanmar a aussi rejoint un certain nombre d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, notamment le Protocole facultatif sur l’implication d’enfants dans les conflits armés. Des observateurs locaux et internationaux ont d’ores et déjà dépêché leurs équipes pour veiller à la bonne conduite des élections. Un total de 6 074 candidats vont prendre part aux élections, a-t-il signalé, ajoutant que les cartes d’électeurs permettaient de vérifier, entre autres, que les électeurs sont bien des citoyens. Ce n’est pas une mesure extraordinaire puisque tous les pays le font, a justifié le représentant.
Le représentant a ajouté que la campagne électorale ne devrait pas inciter à la haine contre qui que ce soit. Il a déploré le fait que le rapport ne parle pas d’autres États que celui d’Arakan et s’est particulièrement élevé contre l’expression « discrimination institutionnalisée » pour décrire la situation actuelle au Myanmar.
Il a aussi fait valoir qu’il était très difficile de régler d’un coup des hostilités intercommunautaires. Il a souligné que les Rohingya n’avaient jamais fait partie de la population du pays. Il ne faut pas privilégier une communauté et diaboliser une autre, a ajouté le représentant, qui a appelé à mettre fin à la cause profonde des hostilités: la pauvreté.
L’octroi de chances d’emploi va certainement apaiser les tensions entre les deux communautés, a-t-il espéré. Il a aussi souligné que 700 000 personnes avaient été renvoyées dans leur pays d’origine et que la cause des problèmes des voyageurs par bateaux était la dure situation économique et la présence de trafiquants de personnes.
Il ne faut pas avoir des attentes irréalistes et prétendre que le Myanmar va devenir 100% démocratique en un rien de temps, a-t-il dit. Il a plaidé pour davantage de temps et demandé que son pays ne fasse plus l’objet d’une procédure spéciale.
Le Royaume-Uni a salué les bons offices du Secrétaire général. Pour la première fois depuis longtemps, les électeurs au Myanmar se rendront aux urnes dans deux semaines. La déléguée a noté que les réformes n’étaient pas achevées car il faut finaliser l’accord de paix avec les groupes armés, régler la situation des Rohingya et suivre la réalité sur le terrain.
La Malaisie a traité de la situation dans l’État d’Arakan, l’accord de cessez-le-feu entre le Gouvernement et les groupes armés, et les élections. Elle a mis l’accent sur la marginalisation de la minorité rohingya. Que pense le Conseiller spécial de la manière dont l’ONU va coopérer avec le futur gouvernement?
L’Égypte au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) à New York, a noté que l’espace démocratique se rétrécissait au Myanmar. Il a noté que les cartes d’identité étaient assujetties à la loi sur la religion car les Rohingya ne peuvent déclarer leur religion. Quelle est la perspective d’inclusion de cette minorité après la promulgation de lois discriminatoires? Il a demandé comment le Gouvernement entendait réagir aux groupes violents qui sévissent encore.
Il a fait état de la disqualification de facto de plusieurs partis politiques ou de candidats car leurs parents ne seraient pas originaires du Myanmar. La situation des Rohingya qui se trouvent dans des camps à la frontière est indescriptible car ils ne peuvent en sortir et sont souvent assujettis à la violence. L’OCI compte rester mobilisée, en particulier sur le plan humanitaire en faveur des Rohingya.
L’Union européenne s’est félicitée des progrès récents vers une paix durable avec la signature, en octobre, d’un accord de paix. Les élections seront un tournant décisif pour le pays. Il a prié M. Nambiar d’apporter des précisions sur les défis à la mise en œuvre d’un accord national de cessez-le-feu.
Le Conseiller spécial du Secrétaire général pour le Myanmar a expliqué qu’il fallait évaluer la situation en toute objectivité et que dans ce sens, malgré d’énormes progrès, des écueils subsistaient, ce que les Nations Unies ont le devoir de mentionner. Alors que le Myanmar sera jugé à l’aune des normes internationales auxquelles il souscrit, il convient que la communauté internationale comprenne pleinement l’ampleur des difficultés auxquelles le Gouvernement est confronté. Il a ajouté qu’il s’agissait aussi d’une question d’appropriation nationale.
Au sujet de la marginalisation de la communauté musulmane, notamment les Rohingya, il a signalé qu’ils avaient participé aux élections législatives. Les nouvelles lois les en empêchent et cela mérite d’être signalé. Le Conseiller spécial a aussi déploré qu’une loi nie des droits génésiques des femmes, ce qui risque aussi d’être utilisé au détriment de certaines minorités.
Certes, il n’y a pas eu de nouvelles vagues de violence mais la situation actuelle fait que certaines minorités fuient le pays. Le Secrétaire général insiste pour que les dirigeants et les partis politiques se prononcent à haute voix contre le discours de haine et tendent la main aux communautés et afin d’établir le dialogue avec les minorités, surtout dans l’État d'Arakan.
Il a applaudi l’initiative du centre de l’harmonie, qui contribue à favoriser le dialogue. Grâce aux changements, le Coordonnateur résident et l’Équipe de pays s’emploient au développement de toute la population, y compris des communautés minoritaires, ce qui aidera à remédier aux problèmes de polarisation entre deux communautés.
Les Nations Unies ont un programme modeste de formation et de consultation avec la Commission électorale du Myanmar mais les Nations Unies ne font pas partie des observateurs. Les observateurs du Centre Carter et de l’Union européenne seront sur place. Tout incident violent est à éviter et les élections doivent se dérouler d’une manière transparente et pacifique.
Dans une grande mesure, le Secrétaire général attend que le Myanmar poursuive la mise en œuvre des engagements pris avec les élections. Il ne sera pas aisé de faire amender la loi sur la nationalité, mais il faudra certainement le faire avec le futur gouvernement qui sera constitué à l’issue du scrutin.
M. Nambiar a répondu à l’Union européenne que les Nations Unies avaient joué un rôle de médiateur qui ne peut être considéré comme une intrusion, le processus de démocratisation devant être piloté au niveau national. L’appui a surtout servi aux négociations en vue du cessez-le-feu avec les groupes ethniques armés pour le renforcement de la confiance entre les parties.
Les communautés réfugiées qui retourneront dans leurs foyers se verront garantir des conditions de vie dignes. Il a encouragé la société civile et la communauté internationale à avancer dans cette voie. Il faut en particulier que les tensions ne soient plus ravivées, a-t-il recommandé.
Déclaration liminaire
Le Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme de l’ONU, M. IVAN ŠIMONOVIĆ, a présenté à la Commission une quinzaine de rapports relatifs aux droits de l’homme: Rapport du Secrétaire général sur la mondialisation et ses effets sur la pleine jouissance de tous les droits de l’homme (A/70/154); Rapport du Secrétaire général sur les droits de l’homme et la diversité culturelle (A/70/167); Rapport du Secrétaire général sur le droit au développement (A/70/111); Rapport du Secrétaire général sur le renforcement de l’action de l’ONU dans le domaine des droits de l’homme par la promotion de la coopération internationale et l’importance de la non-sélectivité, de l’impartialité et de l’objectivité (A/70/258); Rapport du Secrétaire général sur la lutte contre l’intolérance, les stéréotypes négatifs, la stigmatisation, la discrimination, l’incitation à la violence et la violence fondés sur la religion ou la conviction (A/70/415); Rapport du Secrétaire général sur la promotion effective de la Déclaration sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques (A/70/255); Rapport du Secrétaire général sur la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste (A/70/271); Rapport du Secrétaire général sur la sécurité des journalistes et la question de l’impunité (A/70/290); Rapport du Secrétaire général sur la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (A/70/261); Rapport du Secrétaire général sur la promotion et la protection des droits de l’homme, y compris les moyens de promouvoir les droits de l’homme des migrants (A/70/259); Rapport du Secrétaire général sur la suite donnée à l’Année internationale de l’apprentissage des droits de l’homme (A/70/166); Rapport du Secrétaire général sur les institutions nationales chargées de la promotion et de la protection des droits de l’homme (A/70/347); Rapport du Secrétaire général sur la promotion d’une répartition géographique équitable dans la composition des organes conventionnels des droits de l’homme (A/70/257); Rapport du Secrétaire général sur le Centre de formation et de documentation des Nations Unies sur les droits de l’homme pour l’Asie du Sud-Ouest et la région arabe (A/70/414); Rapport du Secrétaire général sur le Centre sous-régional des droits de l’homme et de la démocratie en Afrique centrale (A/70/405).
M. Šimonović a également présenté les rapports du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (A/70/362) et dans la République islamique d’Iran (A/70/352).
Dialogue interactif
Le représentant de la République islamique d’Iran a déclaré que le rapport du Secrétaire général contenait des lacunes du point de vue méthodologique car il ne tenait pas compte des observations de son gouvernement, préférant accorder du crédit à des sources peu fiables.
Pour le délégué, il existe des mécanismes pertinents comme l’organe des traités qui doivent être mis en avant dans ce processus. Toutefois, il a relevé que le Secrétaire général s’était félicité de la coopération de son pays avec les mécanismes internationaux en matière de droits de l’homme, notamment l’examen périodique universel, ainsi que des réalisations du pays dans les domaines de la santé et des droits des femmes.
Le délégué a insisté sur le fait qu’en dépit des lacunes dans le rapport du Secrétaire général, son pays ferait les efforts nécessaires pour protéger les droits de l’homme de ses citoyens.
Déclaration liminaire
M. EMMANUEL DECAUX, Président du Comité sur les disparitions forcées, a présenté le rapport annuel de cet organe, qui veille à l’application de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, couvrant la période allant de septembre 2014 à février 2015. Le nombre de ratifications a continué de progresser de manière très significative pour atteindre le chiffre de 51 États parties, à la suite de la récente ratification de la Grèce, du Niger, du Belize, de l’Ukraine et de l’Italie. Cette dynamique est très encourageante, cinq ans après l’entrée en vigueur de la Convention, le 23 décembre 2010, s’est réjoui M. Decaux.
« La Convention est un traité universel qui concerne tous les continents, tous les pays, ne serait-ce qu’au titre des mesures préventives et des garanties juridiques qu’elle comporte », a affirmé M. Decaux, qui a lancé un appel à tous les États parties pour qu’ils acceptent la procédure de communication prévue par les articles 31 et 32 de la Convention. Le Comité, qui a déjà adopté 16 rapports périodiques, veille à ne pas accuser de retard dans son examen.
Le Comité a pleinement appliqué les paramètres de la résolution 68/268, a ajouté M. Decaux, soulignant cependant qu’il faudra augmenter les moyens du Comité pour qu’il soit à même de remplir, effectivement et dans les meilleurs délais, son mandat, ce qui implique un renforcement du secrétariat en ressources humaines.
Dans le cadre de la procédure de requêtes d’appels urgents prévue par l’article 30 de la Convention, le rapport annuel fait état de 51 nouvelles demandes jugées recevables concernant le Mexique, l’Iraq, la Colombie, le Cambodge et le Brésil. Parmi ces cas, figure celui des 43 étudiants d’Iguala au Mexique, enregistré et transmis à l’État dès le 10 octobre 2014. Depuis lors, le nombre des requêtes d’appels urgents n’a cessé de croître pour atteindre le nombre de 253. Plus de 200 cas individuels concernent le Mexique, et une quarantaine, l’Iraq.
Le Président du Comité a avoué ne pas pouvoir cacher la préoccupation de ses experts au sujet de la situation au Mexique, ce qui fait que ceux-ci ont travaillé avec le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires et ont rencontré des membres du Groupe interdisciplinaire d’experts indépendants, mis en place dans le cadre d’un accord ad hoc entre la Commission interaméricaine des droits de l’homme et le Gouvernement mexicain.
Le Comité a aussi rencontré une délégation de haut niveau du Mexique, qui a présenté les réformes engagées et des enquêtes en cours. M. Decaux a rappelé l’analyse juridique du Comité de la situation dans ce pays qu’il a décrite comme un contexte « de disparitions généralisées dans une grande partie du territoire, disparitions dont beaucoup pourraient être qualifiées de disparitions forcées et dont certaines ont débuté après l’entrée en vigueur de la Convention ».
Il a déclaré qu’il appartenait au Mexique de protéger sa population, mais aussi les migrants et d’enquêter sur tous les cas signalés afin de respecter ses obligations internationales. M. Decaux s’est ensuite réjoui de la réforme de la justice militaire qui vient d’être mise en œuvre au Mexique.
Le Comité a d’ailleurs réaffirmé le fait que la juridiction militaire devait être exclue dans les cas de violations massives des droits de l’homme, ce qui rejoint parfaitement les positions de principes du Groupe de travail sur la base de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, et la jurisprudence du Comité des droits de l’homme.
En tant que Président de la vingt-septième réunion des présidents des organes conventionnels, M. Decaux a conclu que cette réunion avait marqué une étape décisive dans la synergie entre les dix organes de traités ».
« Non seulement nous avons avancé dans la mise en œuvre de la résolution 68/268 en visant à simplifier et harmoniser les procédures, mais nous avons renforcé la cohérence du système dans son ensemble, avec une déclaration substantielle sur les objectifs du développement durable. » Il a estimé que l’approbation des « Principes directeurs de San José » contre l’intimidation et les représailles des personnes et des groupes qui coopèrent avec les organes de traités n’était qu’une première pour remplir le plus efficacement possible la mission première de protection à l’égard des victimes. « L’impératif de rationalisation est, à nos yeux, inséparable d’un objectif d’efficacité et d’effectivité », a conclu M. Decaux.
Dialogue interactif
Le Mexique a fait valoir sa récente législation sur les personnes disparues, promulguée après des consultations avec la société civile. Le Gouvernement s’est aussi efforcé d’épurer le registre des disparitions forcées et présumées et des personnes non localisées.
La Conférence nationale d’aide à la justice a approuvé un document sur ce sujet et le Bureau des personnes disparues a été mis sur pied pour aider à l’identification médicolégale. S’agissant de la disparition des 43 étudiants de l’École normale d’Iguala, il a indiqué que le rapport d’enquête était à l’examen et que le mandat de la mission chargée de l’enquête avait été prolongé de six mois.
Le Maroc a jugé que le chiffre de 51 États n’était pas assez important et qu’il faudrait voir quelles actions seraient envisageables pour que le nombre de ratifications augmente. Il s’est aussi enquis du rôle des institutions nationales des droits de l’homme.
L’Union européenne a demandé comment sensibiliser au problème des représailles contre des personnes qui coopèrent avec l’ONU.
L’Argentine, pays qui a souffert sous un régime autoritaire ayant recouru à la disparition forcée, a exhorté à la ratification de la Convention. Dans quelle mesure les compressions budgétaires ont-elles eu un impact négatif sur le travail du Comité? a voulu savoir le représentant.
La France a fait remarquer que la Convention était un instrument encore jeune, entré en vigueur en 2010, et qu’il fallait continuer sa ratification. Son sujet n’est pas un combat d’arrière-garde car le phénomène des disparitions forcées existe encore. Quelles sont les priorités du Président du Comité pour son second mandat et comment sensibiliser les États à sa ratification?
Le Japon a espéré que le Comité poursuivrait ses travaux relatifs à la prévention du crime de disparitions forcées. Il a encouragé les activités du Groupe de travail dans le domaine de l’identification des disparus et exhorté à la coordination entre les deux organes.
L’Arménie a rappelé que son pays avait soumis au Comité son rapport initial et avait répondu à ses questions sur le maintien d’un registre sur les disparitions forcées. Comment le Comité coopère-t-il avec les États qui ne sont pas parties à la Convention?
La Colombie a défendu la création de registres de disparus et de recensement des cas. La déléguée a affirmé que dans l’accord conclu en octobre avec la Forces armées révolutionnaires colombiennes (FARC), une clause prévoyait la création d’une unité spéciale de recherche des personnes disparues.
Le Président du Comité sur les disparitions forcées a expliqué au représentant du Maroc qu’un document sur la coopération avec les institutions internationales avait été adopté et mis en pratique avec une contribution non négligeable des ombudsmans.
Il s’est félicité du fait que 51 pays ont ratifié la Convention sur les disparitions forcées, soulignant que cela représentait un quart des pays de la planète. Selon M. Decaux, ce résultat est encourageant car les pactes en la matière ont mis 10 ans avant d’entrer en vigueur. Cet anniversaire, a-t-il recommandé, doit permettre de sensibiliser les États et la société civile car l’assistance technique joue un rôle très utile.
Sur la question des moyens mis en avant par l’Argentine, il a fait savoir que le Comité se réunissait lors de deux sessions annuelles qui se déroulent pendant 10 jours. Il faudrait donc disposer d’un temps supplémentaire et d’un grand secrétariat pour être plus productif, a-t-il dit, reconnaissant que les moyens pour conduire à bien la mission du Comité étaient limités.
Déclaration liminaire
Le Vice-Président du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, M. BERNARD DUHAIME, a excusé l’absence de la Présidente du Groupe, Mme Houria Es-Slami, première femme à occuper ce poste depuis 35 ans.
Au cours de l’année passée, a rapporté M. Duhaime, le Groupe de travail n’a pu clarifier que 65 cas de disparitions forcées. Plus de 43 000 cas ne sont toujours pas éclaircis, dont une grande partie depuis des décennies. Il a blâmé le manque de volonté des États, et de capacités et/ou d’efforts pour retrouver la trace des personnes disparues.
Sur une note positive, il a toutefois relevé des réponses plus détaillées et plus substantielles de la part des États.
« Les disparitions forcées ne sont pas seulement un crime du passé; elles continuent d’être utilisées dans le monde entier avec la conviction fausse et pernicieuse qu’elles sont un outil utile pour préserver la sécurité nationale et combattre le terrorisme et le crime organisé », a déploré le Vice-Président.
Pendant l’année écoulée, le Groupe de travail a transmis 384 nouveaux cas de disparitions à 33 États.
« Il est inconcevable qu’en 2015 nous recevions de nouveaux cas de disparitions forcées au quotidien », a déclaré M. Duhaime. « Si l’on considère que ces cas ne représentent que la partie émergée de l’iceberg, cela montre très clairement à quel point la situation est sombre. »
Le Groupe de travail est également préoccupé par la pratique des disparitions forcées « à court terme » qu’il a observée dans un certain nombre de pays.
Le Vice-Président a dénoncé les représailles et l’intimidation à l’encontre des familles, des témoins, des défenseurs des droits de l’homme, des organisations non gouvernementales et des avocats qui recherchent la vérité et la justice. Il a réitéré son appui à la création d’un point focal de haut niveau à l’échelle du système des Nations Unies pour lutter contre ce problème.
M. Duhaime a précisé que depuis sa création, en 1980, le Groupe de travail a conduit 28 visites de pays, dont 7 en Europe, 11 en Amérique latine, 7 en Asie et 3 en Afrique.
Par ailleurs, le Groupe mène des réflexions thématiques sur certains aspects de son mandat qui n’ont pas encore été suffisamment explorés. Par exemple, il a récemment présenté un rapport sur les disparitions forcées et les droits économiques, sociaux et culturels, qui a suscité un grand intérêt pendant le débat du Conseil des droits de l’homme.
Son prochain rapport thématique se concentrera sur la question de la migration et des disparitions forcées, a annoncé le Vice-Président. Il s’agit là d’un problème transnational complexe qui s’intensifie du fait de l’implication de groupes criminels organisés et d’acteurs non étatiques.
Dialogue interactif
L’Argentine a loué le fait que pour la première fois depuis l’existence du Groupe de travail, une femme vient d’être élue à sa présidence. Le représentant a rappelé qu’en mars 2015, son pays a accueilli la vingt-cinquième session du Groupe de travail. Il a voulu savoir ce que le Groupe de travail fait sur la question de la disparition des migrants, une question très sensible.
Le Maroc a affirmé que le Groupe de travail traite de milliers de cas de disparitions mais n’a pourtant pas bénéficié de ressources supplémentaires. Il a demandé ce qu’il fallait faire pour surmonter cet obstacle.
L’Union européenne a aussi assuré de son plein soutien à cet organe, créé par la Commission des droits de l’homme, qui célèbre cette année son trente-cinquième anniversaire et se penche à présent sur plus de 43 000 affaires.
La France a souligné que le nombre de cas soumis montre à quel point ce travail est attendu par les familles. La représentante a rappelé que les disparitions forcées frappaient indistinctement les hommes, les femmes et les enfants. Elle a indiqué que, selon les estimations, il existerait des milliers de cas de disparus en Syrie aujourd’hui. La représentante a demandé quelle réponse pouvait être envisagée contre les groupes non étatiques armés qui procèdent à des enlèvements.
Les États-Unis ont dit leur préoccupation face aux 400 cas traités en une seule session par le Groupe de travail et aux allégations de disparitions forcées en Crimée.
Le Vice-Président du Groupe de travail sur les disparitions forcées, a expliqué au représentant de l’Argentine qu’une étude thématique aborderait la question des migrations étant données la diversité des acteurs impliquées et la nature transnationale du phénomène. Par ailleurs, il a souligné que serait étudiée la thématique du degré de coopération des États qui laissent des groupes non étatiques procéder à des disparitions forcées.
Au représentant du Maroc qui suggérait que la prochaine session du Groupe de travail sur les disparitions forcées se déroule à l’extérieur du siège du Conseil des droits de l’homme, M. Duhaime a fait savoir que cette approche est partagée par le Groupe qui y voit le moyen de se rapprocher des gens et des organisations.
Concernant la participation des États aux actions du Groupe de travail, il a dit, répondant à la France et l’Union européenne, que la question restait d’actualité car il existe une préoccupation sur la difficulté de contacter des personnes capables de servir de trait d’union entre le Groupe et les personnes disparues.
Sur les disparitions en Crimée dont ont fait part les États-Unis, il a précisé qu’il était difficile d’aborder des questions sur des cas précis. En revanche, il a déclaré que le Groupe de travail discute avec toutes les parties utiles pouvant faire avancer le travail de terrain.