L’interdiction de la torture ne saurait être territorialement limitée, affirme le Rapporteur spécial sur la torture devant la Troisième Commission
Les actes de torture hors des frontières et la complicité exterritoriaux dans ces actes sont contraires à la Convention contre la torture, a déclaré, aujourd’hui, le Rapporteur spécial sur la torture et autres traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants, M. Juan Méndez, en présentant son rapport, au premier jour de l’examen, par la Troisième Commission, des questions relatives à la promotion et à la protection des droits de l’homme.
La Commission a également dialogué avec le Président du Comité contre la torture, M. Claudio Grossman, le Président du Sous-Comité sur la prévention de la torture, M. Malcolm Evans, son homologue du Comité des droits de l’homme, M. Fabian Omar Salvioli, et le Vice-Président du Comité sur les droits économiques, sociaux et culturels, M. Mikel Mancisisdor de la Fuente. Le Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, M. Ivan Šimonović, a, lui, introduit plusieurs rapports.
De l’avis de M. Méndez, les actes extraterritoriaux, licites ou illicites des États, « ont indubitablement un effet significatif » sur les droits fondamentaux d’individus se trouvant hors de leurs frontières, et risquent de conduire à des tortures ou mauvais traitements. À ce titre, il a encouragé les États à prendre « des mesures de sauvegarde de toute personne sous leur juridiction ».
Il a également exhorté à reconnaître l’importance de la complicité exterritoriale, étant donné l’existence de programmes de remises extrajudiciaires et de détentions secrètes.
M. Méndez a exhorté en particulier à respecter « l’interdiction absolue du refoulement, qui doit s’appliquer en permanence, même lorsque les États mènent des opérations ou détiennent des individus hors de leur territoire, y compris dans le cadre des opérations de contrôle aux frontières en pleine mer.
« La torture n’est jamais autorisée ni même justifiée, que ce soit en temps de guerre ou dans la lutte contre le terrorisme », a renchéri M. Grossman, Président du Comité contre la torture, gardien de la Convention de 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, aujourd’hui ratifiée par 158 États.
« La pertinence de ce traité est indéniable, j’en veux pour preuve les vagues de migrations massives dans le monde entier », a-t-il commenté, soulignant, à l’instar du Rapporteur spécial, l’importance de l’interdiction du refoulement définit dans la Convention, comme le fait de renvoyer dans leur pays les victimes de la torture.
« Vous, les États, êtes responsables devant votre population », a lancé avec force le Président du Comité des droits de l’homme, M. Fabian Omar Salvioli, dont les experts sont chargés de veiller à l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et aux Protocoles facultatifs s’y rapportant. Le Comité prépare actuellement un projet d’observation générale sur le droit à la vie, en vertu de l’article 6 du Pacte.
Dès lors, M. Salvioli a invité à « récupérer l’ordre du jour des droits de l’homme de tous les acteurs impliqués dans le drame actuel de la migration », unique remède, à son avis, contre cette « maladie mondiale » qui est le reflet de la déshumanisation du monde actuel. Le Comité peut y aider en orientant les États dans l’interprétation des dispositions du Pacte, a-t-il assuré.
Le Vice-Président du Comité des droits économiques, sociaux et culturels a espéré, quant à lui, que les droits inscrits dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels figurant dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030 soient effectivement réalisés, compte tenu de l’impact de la crise économique et financière, et des effets préjudiciables des conflits internes et internationaux.
La Commission, qui a tenu son débat général lundi sur les droits des peuples autochtones, a également entendu un exposé de la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, Mme Victoria Tauli-Corpuz, sur les incidences des investissements internationaux et du libre-échange sur ces droits, sujet de son dernier rapport.
Le nombre d’États de plus en plus mécontents face aux injustices inhérentes aux régimes de libre-échange et d’investissement est aujourd’hui en augmentation, a indiqué la Rapporteuse spéciale qui a réclamé une réforme immédiate des accords d’investissement et de libre-échange aux incidences négatives sur ces peuples. Elle a demandé en outre que toutes les structures de gouvernement autonomes autochtones devraient être incluses de manière formelle dans le processus de prise de décisions en matière d’accords internationaux d’investissement.
Les dialogues avec les intervenants ont été l’occasion pour certains pays, notamment du Groupe des États d’Afrique, par la voix de la Sierra Leone, de critiquer, parfois avec virulence, l’adoption en juin dernier à San José, Costa Rica, par les présidents des organes conventionnels, des Lignes directrices sur l’intimidation et les représailles à l’encontre d’individus ou groupes qui coopèrent avec les organes des Nations Unies.
Certains comme le Nigéria et le Bélarus, ont estimé que ces organes avaient outrepassé leur mandat, et que les Lignes directrices n’avaient pas fait l’objet d’un processus de consultations intergouvernementales préalables.
La Troisième Commission reprendra ses travaux mercredi, 21 octobre, à 10 heures.
PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME: APPLICATION DES INSTRUMENTS RELATIFS AUX DROITS DE L’HOMME
a) Application des instruments relatifs aux droits de l’homme
d) Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne (A/70/36)
Déclarations liminaires
M. IVAN ŠIMONOVIĆ, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, a présenté plusieurs rapports.
Le Rapport du Secrétaire général sur le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture (A/70/223) fournit un aperçu de l’atelier d’experts sur l’indemnisation et la réadaptation des victimes de la torture en situation d’urgence et l’assistance à leur apporter pour répondre à leurs besoins à long terme.
Selon M. Šimonović, la complexité des contextes et des crises actuelles a entraîné, ces dernières années, un accroissement de cette pratique et du nombre des victimes et il est plus urgent que jamais de répondre aux besoins en matière d’indemnisation et de réadaptation. Le Fonds aura besoin de 20 millions de dollars annuels, a-t-il dit, en invitant à une augmentation des contributions à l’occasion du trente-cinquième anniversaire du Fonds en 2016.
La note du Secrétaire général sur le Fonds sur les formes contemporaines d’esclavage contient des recommandations sur les subventions adoptées par le Conseil d’administration du Fonds à sa dernière session en novembre 2014. En 2015, le Fonds a appuyé des projets médicaux et sociaux au profit des victimes de l’esclavage moderne. Il n’a pu recommander que 44 subventions et le Conseil d’administration est préoccupé par le peu de contributions qui ne couvrent qu’un tiers de ses objectifs.
Un autre rapport, présenté dans une note du Secrétaire général (A/70/273) fournit des renseignements sur les activités du Fonds spécial créé par le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le Fonds a appuyé 21 projets dans six régions en vue de la prévention de la torture. Ce Fonds se trouve aussi dans une situation financière critique, ce qui entrave le travail du Sous-comité pour la prévention de la torture, a souligné M. Šimonović, qui a ensuite encouragé au versement de contributions pour pérenniser le travail du Sous-Comité.
La note du Secrétaire général présente le rapport de la vingt-septième réunion annuelle des présidents des organes conventionnels des droits de l’homme (A/70/302), qui a eu lieu du 22 au 26 juin 2015 à San José, au Costa Rica, avec la participation d’une large gamme de partenaires. La réunion se tenait dans le cadre de la mise en œuvre de la A/RES/57/202 de l’Assemblée générale de ces organes conventionnels.
Dialogue interactif
La République tchèque a félicité le Soudan du Sud et le Viet Nam, devenus parties à la Convention des Nations Unies contre la torture. Il a aussi salué les cinq nouveaux membres du Comité contre la torture.
La République islamique d’Iran a pris note du rapport des présidents des organes conventionnels et s’est dissocié, en appelant à la transparence, du paragraphe 41, qui traite des Lignes directrices de San José relatives à l’intimidation et aux représailles contre les personnes ayant coopéré avec les organes des droits de l’homme, précisant qu’aucun processus de consultations intergouvernementales n’a eu lieu à ce propos.
La Fédération de Russie a évoqué les enlèvements dans les États tiers et s’est demandé comment appliquer les principes décrits par le Rapporteur spécial contre la torture sur l’exterritorialité.
Le Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme a rappelé la A/RES/68/268 de l’Assemblée générale sur le renforcement des organes conventionnels (paragraphe 8) qui condamne vivement tout acte d’intimidation et de représailles et incite tous les États à prendre les mesures appropriés à ce sujet. À la lumière de l’accroissement des actes de représailles, les organes de traités ont adopté les Lignes directrices.
M. Šimonović a laissé au Rapporteur spécial concerné le soin de répondre à la Fédération de Russie.
Déclaration liminaire
M. CLAUDIO GROSSMAN, Président du Comité contre la torture, a présenté son rapport (A/70/44) à la Commission. Les principes contenus dans la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants restent hautement pertinents aujourd’hui. « La torture est un crime », a-t-il affirmé.
« La torture n’est jamais autorisée ni même justifiée, que ce soit en temps de guerre ou dans la lutte contre le terrorisme », a poursuivi M. Grossman. Ceux qui commettent le crime de la torture seront tenus pour responsables, où que ce soit, et les victimes de la torture ont droit à la réhabilitation et au recours.
Il a rappelé que la Convention énonce clairement les différentes mesures que les États doivent prendre pour combattre et prévenir la torture. Ainsi, les États doivent-ils intégrer la définition de la torture dans leur législation. Ils doivent aussi interdire le refoulement, c’est-à-dire le fait de renvoyer dans leur pays les victimes de la torture.
« La pertinence de ce traité est indéniable, j’en veux pour preuve les vagues de migrations massives dans le monde entier », a insisté M. Grossman.
Aujourd’hui 158 États ont ratifié la Convention et 384 rapports ont été présentés, dont 362 ont été examinés, a précisé le Président du Comité.
Toutefois, 28 États ayant ratifié la Convention n’ont jamais présenté de rapports au Comité en violation de leurs obligations, a-t-il souligné. De plus, huit États n’ont pas présenté de rapports depuis plus d’une décennie.
Depuis 1988, le Comité a enregistré 699 plaintes individuelles concernant 35 États parties; 197 d’entre elles ont été abandonnées, 70 jugées irrecevables et des décisions ont été formulées pour 72 d’entre elles.
Malheureusement, il n’y a que 66 États parties qui donnent aux individus la possibilité de soumettre des plaintes au Comité, a regretté M. Grossman. En outre, 89 États ayant ratifié la Convention n’ont pas encore fait de déclaration reconnaissant la compétence du Comité. Il a également enjoint tous les États parties à participer à la procédure confidentielle.
En ce qui concerne les travaux, le Comité est à l’avant-garde de la simplification de la présentation des rapports, s’est félicité M. Grossman. Cette procédure facultative consiste à élaborer une liste préalable de points à traiter et à la transmettre aux États parties avant que ceux-ci ne soumettent le rapport périodique attendu.
Si le Comité a pris certains retards, c’est qu’il manque de ressources, a noté ensuite son Président.
La mise en œuvre de la Convention doit s’accompagner de la volonté des États parties de l’appliquer sur le terrain, a-t-il conclu.
Dialogue interactif
La Colombie, qui a présenté son cinquième rapport au Comité en mai dernier, a assuré le Président du Comité que le Gouvernement avait déjà lancé l’application des recommandations formulées à son intention et pris en compte le problème de la surpopulation carcérale.
L’Union européenne a salué l’augmentation du nombre d’États qui ratifient la Convention. Elle a souhaité en savoir plus sur la façon dont les États parties pourraient participer à la rationalisation des procédures au sein du Comité.
Le Royaume-Uni a demandé « quels sont les principaux obstacles pour parvenir à l’universalisation de la Convention ».
Le Liechtenstein, préoccupé par la brutalité imputable aux forces de police et la prévalence de l’impunité, a demandé à l’expert s’il avait constaté des améliorations dans les enquêtes et si les victimes avaient davantage accès à des réparations.
L’Iraq a indiqué qu’il était « en train d’étayer la documentation sur tous les cas de torture pour retrouver les criminels et les traîner devant la justice » et qu’il s’efforçait d’aider les victimes. Il a demandé l’aide du Comité du fait de la situation d’urgence dans laquelle se trouve le pays.
Le Danemark s’est interrogé sur ce que peuvent faire les États Membres face aux nombreux cas de représailles contre les citoyens ou les groupes qui entrent en contact avec l’ONU.
L’Azerbaïdjan, qui a présenté quatre rapports périodiques au titre de la Convention, a compté sur des discussions constructives.
Le Président du Comité contre la torture a indiqué que son Comité avait été « le premier à utiliser la procédure simplifiée d’établissement de rapports pour réduire les dépenses et mener des dialogues plus ciblés ». Près de 90% des États parties ont accepté cette procédure facultative, a-t-il précisé.
Lors de sa dernière session, le Comité a adopté des lignes directrices sur les représailles contre les personnes qui le contactent, a ajouté M. Grossman. « Nous ne voulons pas que les personnes qui dénoncent la torture ou les mauvais traitements subissent des représailles ».
Le Comité a également adopté des lignes directrices sur le suivi des observations finales. Il a consacré une heure de plus aux États Membres pour qu’ils puissent répondre aux questions lors des dialogues.
S’agissant de la coopération des États Membres, « l’établissement de rapports doit se faire à temps », a rappelé M. Grossman. Il est rare que des États disent qu’ils pratiquent la torture pour obtenir des aveux, a-t-il reconnu. « Nous ne sommes pas des juges, mais l’objectif est de voir ce qui se passe dans la pratique grâce à des données ventilées » qui permettent au Comité de remplir son mandat.
L’intervenant a souligné l’importance du renforcement des capacités, indépendamment de la volonté politique. « L’interdiction de la torture ne découle pas seulement de la ratification de la Convention. C’est un principe général de droit coutumier », a-t-il rappelé.
D’après lui, les États peuvent partager de bonnes pratiques et « aider le Comité dans cette tâche difficile qu’est l’édification d’un monde sans torture ». Ils peuvent aussi lui apporter des ressources supplémentaires.
Le rôle préventif et la formation des forces de police sont essentiels, a-t-il ajouté. Des caméras doivent être installées dans lieux de détention pour éviter les fausses accusations.
M. Grossman a indiqué que le Comité pouvait offrir à l’Iraq une assistance « pour autant qu’il notifie toutes les violations » de la Convention.
Appelant les États « à enrichir la définition des représailles » et à réagir, il a constaté que « le silence peut empirer la situation ».
Dialogue avec le Président du Sous-Comité pour la prévention de la torture
La Suisse a estimé que le Sous-Comité était un organe unique en ce qui a trait à l’interdiction absolue de la torture. Elle a ainsi appelé les États à ratifier, dans les meilleurs délais, le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et à le mettre pleinement en œuvre. La Suisse a aussi estimé que l’adoption de la version révisée de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Mandela) ouvrait de nouvelles perspectives pour une meilleure prévention et a appelé tous les États à les mettre en œuvre. La Suisse a demandé comment les Règles Mandela influenceront-elles l’exécution du mandat du Sous-Comité.
La République tchèque a insisté sur le fait que la prévention était le meilleur moyen de lutter contre la torture, raison pour laquelle ce pays apporte des contributions au Fonds pour les victimes de la torture.
L’Union européenne a salué l’accroissement du nombre d’États parties à la Convention et des mécanismes nationaux d’application. La déléguée a encouragé au bon fonctionnement de tels mécanismes et s’est félicitée du dialogue engagé entre les membres du Sous-Comité et les États parties.
Le Royaume-Uni a indiqué que de nombreux États n’avaient pas encore ratifié le Protocole facultatif et s’est demandé comment changer cette situation.
L’Azerbaïdjan a dit attendre avec intérêt le rapport du Sous-Comité sur sa visite en Azerbaïdjan et pouvoir poursuivre sa coopération avec les experts.
Le Danemark a voulu avoir plus d’informations sur les lignes directrices sur les représailles adoptées par les présidents des organes conventionnels. Le Chili a salué le travail du Sous-Comité.
L’Arménie a invité la communauté internationale à une tolérance zéro contre la torture, notamment par le renforcement des mécanismes de prévention au niveau national. Le représentant a dit sa surprise qu’un Arménien soit mort en détention en Azerbaïdjan et a fait état de plusieurs cas de mauvais traitements et de torture sur des prisonniers arméniens par les forces de l’Azerbaïdjan.
L’Azerbaïdjan a répliqué que l’Arménien qui avait été capturé était membre des services d’espionnage de l’Arménie. Il portait une arme et l’analyse de son téléphone mobile a montré qu’il n’était pas juste un simple citoyen. En revanche, à l’heure actuelle, deux citoyens de l’Azerbaïdjan sont en détention en Arménie alors qu’ils se trouvaient légalement à la frontière de l’Azerbaïdjan.
Le Président du Sous-Comité pour la prévention de la torture s’est réjoui de l’appel des États à la ratification du Protocole facultatif à la Convention. Les Règles sur le traitement des détenus étaient devenues obsolètes et exigeaient une révision avec de nouvelles approches sur le travail et le comportement du personnel dans les centres de détention et l’importance d’un contrôle extérieur indépendant. Il a prié les États de respecter et d’appliquer les Règles Mandela, offrant l’appui du Sous-Comité pour faciliter les inspections des centres de détention, entre autres.
Répondant à la République tchèque, il a remercié ce pays de contribuer de longue date au Fonds spécial pour que le travail vital du Comité puisse se poursuivre. Selon la Convention, les mécanismes nationaux de prévention doivent être mis sur pied un an après la date de la ratification. Il a recommandé d’avoir aussi recours à des mécanismes déjà en place dans la région.
M. Evans a remarqué que la volonté des États ne suffisait pas. Il a affirmé, à l’adresse du Royaume-Uni, qu’il était nécessaire d’expliquer aux États leurs obligations ainsi que le fonctionnement correct d’un mécanisme de prévention. L’objectif dorénavant est d’aller de l’avant tout en maintenant le dialogue.
Il a prié les États de communiquer avec les membres du Sous-Comité « au-delà du simple échange d’informations ». Un article du Protocole facultatif traite spécifiquement des représailles, a-t-il rappelé aux détracteurs des lignes directrices sur cette question. Depuis longtemps, il existe un point focal pour chaque visite qui procède à une évaluation préalable des risques mais aussi après le départ de la délégation à l’issue de la visite. Les représailles, a-t-il noté, ne proviennent pas uniquement des autorités mais aussi d’autres prisonniers ou de groupes.
Concernant l’Arménie, le Président du Sous-Comité a rappelé que ses membres travaillaient dans la confidentialité mais a espéré que le rapport serait publié en temps voulu. Il a encouragé à la coopération avec les États parties.
Déclaration liminaire
M. JUAN ERNESTO MÉNDEZ, Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, a abordé dans son dernier rapport intérimaire thématique, la problématique de l’application exterritoriale de l’interdiction de la torture et des autres mauvais traitements et des obligations qu’impose le droit international à cet égard, en particulier la Convention contre la torture.
Après avoir mis le doigt sur « la nature chaque fois plus transnationale des actions des États », M. Méndez a expliqué que les actes exterritoriaux, licites ou illicites des États, « ont indubitablement un effet significatif » sur les droits fondamentaux d’individus se trouvant hors de leurs frontières, et engagent la responsabilité des États au regard du droit international des droits de l’homme.
Parmi ces actions et pratiques qui ont des effets exterritoriaux: des opérations militaires transfrontières, le recours à la force hors des frontières nationales, l’occupation de territoires étrangers, des opérations de lutte contre les migrations et la piraterie, des opérations de maintien de la paix, de police ou clandestines menées en territoire étranger, la détention de personnes à l’étranger, les extraditions, les remises à la justice et remises extrajudiciaires et l’exercice d’un contrôle ou d’une influence de facto sur des acteurs non étatiques opérant en territoire étranger.
Toutes peuvent conduire à des cas de torture ou de mauvais traitements tels que définis par la Convention contre la torture, a ajouté M. Méndez, qui a affirmé qu’il est de l’obligation des États de respecter les droits de l’homme et de garantir le droit qu’a toute personne de ne pas être soumise à la torture. Les tentatives des États de se soustraire à leurs obligations à ce titre sont une atteinte au droit coutumier et conventionnel. Cela constitue en soi une infraction grave au droit international.
Il a attiré l’attention sur les articles 2 et 16 de la Convention et encouragé les États à prendre des mesures de sauvegarde de toute personne sous leur juridiction. Par extension, M. Méndez a aussi traité des questions relatives à la complicité exterritoriale, très importantes étant donné le programme de remises extrajudiciaires et de détentions secrètes.
Il a rejeté les garanties diplomatiques, peu fiables à ses yeux, pour éviter de se soustraire à une obligation redditionnelle. Les actes illicites de torture doivent être punis, où qu’ils se produisent afin d’empêcher l’impunité, a-t-il encore insisté.
Le Rapporteur spécial sur la torture a ensuite mis l’accent sur l’interdiction absolue du refoulement, qui doit s’appliquer en permanence, même lorsque les États mènent des opérations ou détiennent des individus hors de leur territoire, y compris dans le cadre des opérations de contrôle aux frontières en pleine mer.
M. Mendéz a affirmé que la clause d’exclusion, qui interdit aux États d’invoquer comme preuve en justice des déclarations soutirées par la torture, « n’est pas limitée territorialement, englobe toutes les formes de mauvais traitements et est applicable où que l’infraction ait été commise ». Le Rapporteur spécial demande aux États de s’assurer que les déclarations admises comme preuves dans toute procédure relevant de leur compétence, y compris les procédures d’extradition, n’ont pas été obtenues par la torture ou d’autres formes de mauvais traitements.
Présentant ses conclusions à l’issue de sa visite, en mars dernier, en Géorgie, il a remarqué que depuis les élections parlementaires d’octobre 2012, ce pays avait consenti de grands efforts de réforme en termes de prévention et de pénalisation. Il a jugé que la Géorgie était désormais confrontée à la nécessité de consolider cette réforme et de développer les mécanismes pertinents.
Lors de sa visite au Brésil, il a relevé la persistance de la surpopulation carcérale et des situations de mauvais traitements. Il a encouragé le Gouvernement brésilien à garantir la prévention de mauvais traitements. À l’occasion de sa visite de suivi au Ghana, il a déclaré que la surpopulation carcérale et l’insuffisance alimentaire avaient été les questions qui avaient le plus attiré son attention.
Il a adressé des demandes de visites aux pays suivants: Albanie, Argentine, Cuba, Égypte, Éthiopie, Indonésie, Kenya, Pakistan, Sri Lanka, Émirats arabes unis et Zimbabwe.
En outre, M. Méndez a été invité en Mauritanie, au Maroc et au Mexique. Par ailleurs, il a envoyé des rappels de visite au Bahreïn, à la Thaïlande et aux États-Unis. Au sujet de ce dernier pays, il a déclaré qu’il dialoguait toujours avec le Gouvernement pour garantir un accès sans entraves aux centres de détention tant des États que fédéraux. Il a regretté que dans beaucoup d’autres cas, ses demandes d’invitation fussent restées sans réponse.
Dialogue interactif
Le Danemark a demandé au Rapporteur spécial ce qu’il avait observé en matière de représailles et d’intimidation contre les individus qui entrent en contact avec des mécanismes des Nations Unies.
Les États-Unis ont appuyé le principe selon lequel « la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants sont inacceptables et prohibés en tout temps et en tout lieu ». Les États-Unis ont ratifié la Convention contre la torture et font partie du Groupe d’amis contre la torture, qui n’est pas simplement une enceinte pour l’universalisation de la Convention mais l’occasion d’échanger des vues sur les approches pratiques.
Ainsi les États-Unis s’intéressent-ils au recours aux caméras, aux programmes de prévention, à l’appui à la société civile, à la sensibilisation du public, ou encore à l’amélioration des contrôles pendant les premières heures de la détention. Que pense le Rapporteur spécial de la façon de protéger les groupes vulnérables, notamment les lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT), contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants?
Le Liechtenstein a souhaité savoir si la situation avait évolué par rapport à la peine de mort considérée comme un traitement cruel.
Les Fidji se sont dites préoccupées par le fait que « certains États essaient d’éviter leurs obligations » de non-refoulement, notamment en ce qui concerne les demandeurs d’asile et les réfugiés.
L’Union européenne a évoqué le lien entre l’aspect extraterritorial et la règle d’exclusion.
La Géorgie s’est félicitée des progrès réalisés dans ce pays, notamment en ce qui concerne le traitement des prisonniers et a annoncé l’élaboration d’un nouveau plan d’action contre la torture. Elle a demandé à M. Mendez comment il réagissait au fait qu’il n’avait pas pu avoir accès « aux régions occupées » d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud où il n’y a pas de mécanismes de surveillance des droits de l’homme.
La Suisse a appuyé l’appel visant à mettre fin à l’impunité d’agents de la sécurité pour mettre fin à la torture et autres peines inhumaines. Elle a demandé quelles sont les obligations des États non abolitionnistes en ce qui concerne l’interdiction du refoulement.
La Norvège a estimé qu’« il n’est pas acceptable que les organes conventionnels de l’ONU ne puissent s’acquitter de leur mandat en raison de contraintes financières ». Elle a préconisé de « lutter contre les causes profondes de la torture ».
Le Royaume Uni a indiqué avoir lancé « une annexe au manuel sur la torture », une ressource accessible à tous les défenseurs des droits de l’homme qui souhaitent étayer la documentation sur les cas de torture.
La République tchèque a souhaité en savoir plus sur la visite reportée de M. Méndez à Bahreïn.
Le Brésil, rappelant qu’il ne faut pas de vide en matière de protection des droits de l’homme », a évoqué la crise des réfugiés et appelé les États à ne pas les refouler et à ne pas les soumettre à des risques de torture ou de mauvais traitements. Comment les conclusions du rapport pourraient-elles contribuer à l’application exterritoriale des droits de l’homme?
La Fédération de Russie a attiré l’attention du Rapporteur spécial sur les conflits nationaux et régionaux au cours desquels on a recours à la torture.
L’Azerbaïdjan a estimé que la détention illégale exterritoriale était « une question brûlante dans le cas de l’occupation étrangère », en évoquant le cas de deux citoyens azerbaidjanais détenus en Arménie.
L’Arménie a récusé toutes les accusations contre son pays de la part de la délégation de l’Azerbaïdjan « qui détourne le débat », et a affirmé que « le Haut-Karabakh est libre et indépendant ».
L’Azerbaïdjan a tenu à rappeler que le Haut-Karabakh faisait partie intégrante de son pays.
Le Rapporteur spécial sur la torture a encouragé à inclure, dans un projet de résolution sur la torture lors de la présente session de la Troisième Commission, une mention de l’interdiction de la Commission exterritoriale d’actes de torture ou de mauvais traitements. Il a reconnu que, parfois, il n’est pas mis au courant de certains cas particuliers de représailles mais qu’il faisait son possible en rappelant régulièrement aux États leurs devoirs. Le Rapporteur spécial a répété que des acteurs autres que les États pouvaient aussi commettre des actes de représailles.
Il a pris note de la position des États-Unis sur l’exterritorialité et s’est félicité des différentes formes de coopération mises en place par le Groupe d’amis de la Convention contre la torture. Comment protéger les membres de groupes vulnérables comme les lesbiennes et transsexuelles? Il a répondu qu’il avait été saisi de plusieurs cas de détention de personnes vulnérables ainsi que dans le cadre de détention des migrants.
Il a proposé au Sous-Comité pour la prévention de la torture d’aider les États dans ces deux contextes. Il a rappelé que son rapport de 2012 avait traité de la peine capitale, et du couloir de la mort qui viole les dispositions de la Convention. Que les États maintiennent ou non la peine capitale, ils ont l’obligation de ne pas infliger de traitements inhumains aux condamnés, a encore déclaré le Rapporteur spécial. Il a relevé que les États utilisaient des renseignements obtenus par coercition, ce qui est contraire à la Convention. Il a dit avoir tenté d’aller dans les deux zones de la Géorgie sous occupation étrangère mais que les autorités concernées n’avaient pas répondu ou ne lui avaient pas accordé l’accès.
Le Rapporteur spécial a déclaré à la Norvège qu’il importait de garder à l’esprit que c’est le contrôle efficace qui primait. Il incombe à l’État d’empêcher le recours à la torture et si l’agent sur place n’a pas pu le faire, il est tenu de rendre des comptes sur les raisons qui l’ont poussé à ne pas le faire.
Le Bahreïn a annulé à deux reprises, à la dernière minute, la visite du Rapporteur spécial.
S’agissant de la crise des réfugiés, il a insisté que le non-refoulement dans la Convention contre la torture est différent de celui qui figure dans la Convention sur le statut des réfugiés. Même les personnes qui ne répondent pas aux critères de réfugiés ont le droit de ne pas être renvoyés dans leur pays. Elles ont le droit de présenter des arguments faisant valoir qu’elles ne sauraient retourner dans un endroit où elles courent un risque de persécution.
Réagissant à l’intervention, dans la matinée, du Rapporteur spécial contre la torture, M. Juan Méndez, le Bahreïn a constaté qu’il avait omis de signaler que, lors des réunions bilatérales en marge des travaux du Conseil des droits de l’homme, il avait fait état d’efforts de réconciliation nationale. La déléguée a déclaré que la visite du Rapporteur spécial sur la torture n’aurait pas été appropriée à ce moment-là.
Déclaration liminaire
M. FABIAN OMAR SALVIOLI, Président du Comité des droits de l’homme, chargé du suivi de l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, a présenté le rapport annuel du Comité pour la période allant de juillet 2014 à avril 2015 (A/70/40) en déclarant que le document contenait beaucoup de sujets de grande préoccupation comme la persistance de la torture et des mauvais traitements, la discrimination pour des raisons multiples, la violence contre les femmes ou les restrictions injustifiées aux droits invoquant des raisons sécuritaires.
M. Salvioli, qui intervenait pour la première fois devant la Commission, a ajouté que le drame actuel de la migration que connaissait le monde entier, et l’absence de solutions fondées sur les droits de l’homme, attestaient de la déshumanisation du monde dans lequel nous vivions. Qui pourrait ne pas se sentir affecté par ces horribles images et histoires désolantes de personnes qui, par désespoir, cherchent à fuir un conflit, et par les discours de haine ou de xénophobie face à la migration, a demandé M. Salvioli.
Il a appelé les États à « récupérer l’ordre du jour des droits de l’homme de tous les acteurs impliqués dans ce drame », unique remède, selon le Président du Comité des droits de l’homme, contre cette « maladie mondiale ».
Le Pacte peut précisément être pertinent dans une crise d’une grande ampleur comme celle des migrants, a-t-il assuré, avant de proposer aux États parties de le faire par un renforcement des dialogues et des procédures de dénonciation pour que les experts du Comité puissent les guider dans l’interprétation et l’application des droits contenus dans le Pacte.
« Vous, les États, êtes responsables devant votre population », a-t-il rappelé, avant de louer les pays ayant mis en œuvre certaines recommandations du Comité et versé des indemnisations aux victimes des droits civils et politiques décrits dans le Pacte. Il a instamment invité les pays à l’établissement des mécanismes internes efficaces d’application et de suivi des recommandations.
Concernant les modalités de fonctionnement du Comité, il a reconnu que les défis étaient nombreux, notamment la nécessité de rattraper les arriérés dans l’examen des rapports périodiques des États parties. Il a déploré que le temps supplémentaire imparti n’ait pas été accompagné de ressources additionnelles, ce qui a eu un impact négatif sur les rapports en souffrance pour le Protocole facultatif.
À cet égard, il a encouragé les États parties à adopter la procédure simplifiée d’élaboration des rapports. La possibilité d’utiliser la procédure simplifiée de présentation de rapports devrait, en principe, être offerte à tous les États parties, et non plus seulement à un groupe restreint d’États parties, à savoir ceux dont le rapport est en retard de 10 ans ou plus.
M. Salvioli a exprimé son optimisme car la nouvelle équipe du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme chargée du renforcement des capacités des organes conventionnels, créé en vertu de la A/RES/68/268, pourra aider au renforcement des capacités du Comité.
Par ailleurs, il a qualifié d’inacceptables les représailles et les agressions, en particulier contre les défenseurs les droits de l’homme et des journalistes. Il a mis en relief le travail du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que la coopération avec celui qu’il préside. Au cours de sa présente session, le Comité des droits de l’homme va examiner le projet d’observation générale en vertu de l’article 6 du Pacte, relatif au droit à la vie.
En conclusion, il s’est déclaré convaincu que l’Assemblée générale aidera à célébrer, comme il se doit l’anniversaire du Pacte. « Nous visons un objectif commun: la défense et la protection des droits de l’homme partout dans le monde », a conclu M. Salvioli.
Dialogue interactif
L’Argentine a salué le travail cohérent et continu du Comité. Elle a félicité M. Salvioli pour son élection à la tête du Comité en mars dernier. Elle a rappelé qu’il était un juriste de grande pointure et un fervent défenseur des droits de l’homme non seulement en Argentine, son pays, mais dans le monde entier. Il est d’une probité et d’une compétence remarquable dans ce domaine, a souligné la représentante, qui a mis en avant la tâche fondamentale du Comité.
Elle a expliqué que l’Argentine avait décidé de prendre pleinement en compte toutes les recommandations des organes conventionnels. Les problèmes du Comité, d’ordre administratif ou financier, doivent être résolus, a-t-elle affirmé, appelant les États Membres à assumer leur responsabilité à ce propos. Elle a accueilli avec satisfaction la signature du Pacte par l’État de Palestine.
Abordant la question des représailles, elle a mis l’accent sur la lutte contre les attaques contre les journalistes pour diffamation. La déléguée argentine a aussi regretté le manque de ressources de personnel de traduction pour le Comité et s’est interrogée sur les conséquences sur le travail de cet organe.
S’agissant des migrants, elle a rappelé que l’Argentine avait adopté une loi spécifique sur leurs droits et voulu savoir ce que le Comité faisait sur le droit des migrants.
L’Union européenne a partagé l’inquiétude du Comité sur le retard dans l’examen des rapports périodiques. Elle a demandé quelle était la conséquence de la procédure simplifiée sur le travail du Comité.
La Suisse a estimé que la peine capitale était incompatible avec les droits de l’homme et s’est réjouie du fait que le droit à la vie fasse l’objet d’un travail approfondi de la part du Comité. Quelles sont les vues du Comité entre les questions des droits de l’homme et des sujets autres que le droit à la vie?
La procédure simplifiée s’inscrit parfaitement dans l’esprit et la lettre de la A/RES/68/268 de l’Assemblée générale sur le renforcement des organes conventionnels. Quels sont les bénéfices que les États parties peuvent attendre?
Le Bélarus a regretté qu’en dépit des efforts des organes conventionnels, il existait toujours un arriéré. Si l’on respecte scrupuleusement le Pacte s’agissant des procédures de réception des communications, celles provenant de personnes tierces ne devraient pas être recevables.
Elle a déploré que cette règle soit régulièrement violée. Toute décision du Comité a moins d’importance que le Pacte lui-même, a estimé la déléguée, qui a mis l’accent sur la nécessité de coopérer comme il se doit avec les États Membres. Parfois, les réactions aux rapports des pays sont méprisantes et on leur prête des intentions qu’ils n’avaient pas.
Plaidant pour une meilleure répartition géographique des experts des comités conventionnels, elle a remarqué qu’ils étaient souvent composés, en majorité, d’experts d’États occidentaux. Comment améliorer la coopération entre le Comité des droits de l’homme et les États parties au Pacte? a-t-elle demandé.
Le Royaume-Uni a exhorté tous les États à soumettre des rapports et a salué l’octroi d’un temps supplémentaire pour les réunions du Comité. Il a réaffirmé son appui de longue date en faveur de la participation de la société civile aux travaux des organes conventionnels et s’est demandé comment améliorer ses contributions sans crainte de représailles.
Cuba s’est intéressée pour sa part à la procédure simplifiée de présentation des rapports en se demandant si celle-ci pourrait permettre aux États parties de répondre aux préoccupations réelles des membres du Comité. Qu’est-il prévu pour que la discussion se concentre sur les obligations contractées par les États et pas sur d’autres questions pertinentes certes mais qui n’entrent pas dans les obligations des parties au Pacte.
La Sierra Leone, au nom du Groupe des États d’Afrique, a exprimé sa préoccupation sur l’adoption des Lignes directrices par les présidents des organes conventionnels à San José. Le représentant a souligné que l’Assemblée générale condamnait tout acte d’intimidation et de représailles contre les individus et les groupes qui coopèrent avec les organes des droits de l’homme des Nations Unies.
Il a ajouté que le paragraphe 9 du dispositif de la A/RES/68/268 demande aux organes conventionnels de bien respecter leurs méthodes de travail. Toutefois, les Lignes directrices semblent imposer aux États Membres bon nombre d’obligations sans les avoir préalablement consultés, a-t-il fait remarquer. Il a encouragé à un dialogue intergouvernemental à Genève et à New York, conformément à la résolution.
Par l’adoption de ces Lignes directrices, les présidents des organes conventionnels ont outrepassé leur mandat, a-t-il dit. Il est indispensable qu’ils respectent leurs mandats et s’abstiennent de procéder à des interprétations vagues de certains concepts.
L’Islande, cofacilitatrice de la A/RES/68/268, avec le Mexique et l’Indonésie, a voulu savoir comment le Comité fonctionnerait en deux chambres séparées pour rattraper le retard dans l’examen des rapports.
Le Nigéria a repris à son compte la déclaration de la Sierra Leone, et jugé que les actes de représailles contre les défenseurs des droits de l’homme allaient à l’encontre des normes relatives des droits de l’homme. Il a affirmé que la proposition des Lignes directrices ne comportait pas de solutions pratiques comme des lancements d’alerte ou autres, et empiétait sur le mandat d’autres mécanismes qui examinaient les obligations des États Membres en vertu des traités internationaux.
Les organes ne peuvent que formuler des recommandations aux États parties et non pas les obliger à les appliquer. Qui définit l’intimidation et quelle en est la définition? a-t-il demandé. Les Lignes directrices de San José risquent aussi d’être utilisées à des fins politiques, a-t-il mis en garde, renvoyant à la note du Secrétaire général sur les mesures prises avant leur adoption.
Il a en particulier dit ne pas voir le lien entre la santé reproductive et les droits sexuels et procréatifs ou les droits des migrants, ou encore la légitimité des mariages homosexuels. Il a insisté sur le fait que son pays n’accepterait pas qu’on lui impose certains concepts.
L’Égypte a abondé dans le même sens tout en se satisfaisant de la réponse du Président du Comité des droits de l’homme. Elle a rappelé que la responsabilité de l’application de la A/RES/68/268, en particulier le paragraphe 8, incombait au premier chef aux États. Toute évolution normative relative aux droits de l’homme doit se faire dans le cadre de consultations intergouvernementales, a insisté le délégué.
Le Président du Comité des droits de l’homme a constaté avec plaisir que des États qui ne sont pas parties au Pacte ont pris la parole pendant la discussion.
« Le manque de ressources a des conséquences majeures sur notre travail, a-t-il reconnu. Pour pouvoir maintenir un dialogue sérieux avec tous les États, il est indispensable que chaque expert sache exactement de quoi il retourne et, à cet égard, la traduction est essentielle.
Le Comité aborde la question des migrants au titre de son mandat, a-t-il précisé.
Les conséquences de la nouvelle procédure simplifiée pour la présentation des rapports sont des plus positives, s’est félicité M. Salvioli, même s’il reste préoccupé par les retards.
S’agissant de l’article 6 du Pacte concernant le droit à la vie en relation avec la peine capitale, le Comité a reçu plus de 100 contributions de la société civile, ce qui atteste de l’intérêt pour cette question.
Le Comité souhaite maintenir un dialogue interactif avec les États, a assuré M. Salvioli. « Le Comité n’est pas là pour juger », a-t-il expliqué, mais il aide les États à mieux s’acquitter de leurs obligations en matière de droits de l’homme.
Ensuite, il s’est dit « satisfait de l’engagement et du professionnalisme dont font montre les membres du Comité ».
Évoquant les Lignes directrices de San José, qui sont adoptées par l’ensemble des présidents des organes conventionnels, il a indiqué que « l’idée n’est pas de créer des obligations supplémentaires mais plutôt de réagir face aux préoccupations avancées par les États et par le Secrétaire général ».
M. MIKEL MANCISIDOR DE LA FUENTE, Vice-Président du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, a présenté les travaux du Comité au nom de son Président, M. Waleed Sadi.
M. de la Fuente a fait remarquer que, lors de ses dialogues avec les États parties, le Comité a constamment été confronté à l’impact de la crise économique et financière sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels. En 2012, a-t-il rappelé, le Comité a envoyé une lettre à tous les États parties sur le fait que les mesures d’austérité devaient rester conformes au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Ensuite, les conséquences directes et indirectes des conflits internes et internationaux sur la jouissance de ces droits ont été particulièrement marquantes pendant l’examen des rapports des États parties, a poursuivi le Vice-Président. Il a estimé que cette question méritait une étude approfondie et qu’elle devait être « mieux contextualisée » compte tenu de l’accès à l’eau, à l’alimentation, à la santé ou au patrimoine culturel. En plus, a-t-il souligné, les flux migratoires récents surgissent dans un contexte de privation des droits économiques, sociaux et culturels.
Le Comité espère que ces droits seront au cœur de la stratégie de mise en œuvre des objectifs de développement durable, a ajouté M. de la Fuente, en mettant l’accent sur le droit au développement.
Le Vice-Président a évoqué les mesures prises pour améliorer les méthodes de travail du Comité, conformément à la A/RES/68/268 de l’Assemblée générale. Si le Comité a pu résorber en partie les arriérés dans l’examen des rapports, il note que « près de 30 États parties ne sont jamais apparus devant le Comité ». À cet égard, il a invité l’Assemblée générale à prendre des mesures pour promouvoir le respect de leurs obligations par les États parties.
M. de la Fuente a invité tous les États parties au Pacte à ratifier « le plus rapidement possible » le Protocole facultatif s’y rapportant. Le Comité a décidé de porter à six membres la composition du Groupe de travail sur les communications.
En décembre prochain, la communauté internationale célébrera le cinquantième anniversaire de l’adoption des deux Pactes internationaux sur les droits de l’homme, a conclu le Vice-Président. Il a espéré que ce sera l’occasion d’aborder la question des défis auxquels les droits protégés par ces instruments font face.
Dialogue interactif
Le Portugal, intervenant an nom du Groupe des amis du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, composé de 16 États, a fait valoir que « le Protocole a corrigé un déséquilibre de longue date en permettant d’étayer cette affirmation selon laquelle tous les droits de l’homme doivent se voir traités sur un pied d’égalité ».
Comment promouvoir les procédures de communication individuelles au niveau national pour renforcer la jurisprudence et attirer l’attention du Comité? De quelle façon le Comité pourrait-il renforcer sa collaboration avec la société civile et protéger les plus vulnérables?
La Pologne a demandé quelles mesures supplémentaires pourraient être envisagées par le Comité pour aider les États dans l’application du droit à des conditions de travail justes et favorables. L’une des priorités demeure la mise en œuvre pleine et entière des conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) dans le monde.
L’Union européenne a souhaité connaître la position du Comité sur la mise en œuvre de systèmes de protection sociale appropriés et demandé quels outils existaient pour faire face aux problèmes de réduction des budgets. Quelles difficultés sont rencontrées pour répondre aux communications individuelles et quels obstacles existent dans la mise en œuvre des recommandations du Comité par les États parties et de la résolution sur le renforcement du fonctionnement des organes conventionnels?
L’Espagne a demandé quel rôle devrait jouer le Comité pour améliorer la promotion du Protocole. Elle a souhaité obtenir des renseignements supplémentaires sur le travail du Comité relatif aux droits à l’eau et à l’assainissement et sur la santé sexuelle et génésique.
Le Nigéria a estimé que « ce Comité est de loin le plus important pour les populations en ce qui concerne la protection de leurs moyens de subsistance ». Il a souhaité une redéfinition de l’approche des organes conventionnels en ce qui concerne la priorité accordée aux droits économiques, sociaux et culturels au sein du corpus des droits de l’homme. « Le moment est venu d’y intégrer le droit au développement, en tant que droit de la personne humaine ». De plus, le Nigéria considère que les capacités des États à fournir des services et des biens sont menacées par la corruption et le flux illicite de capitaux.
L’Afrique du Sud a indiqué que le Protocole était entré en vigueur en avril dernier. Elle a proposé de revoir le chapitre IV du Pacte qui est « obsolète » et qui a dissocié les droits de l’homme du travail du Conseil économique et social (ECOSOC).
Le Vice-Président du Comité sur les droits économiques, sociaux et culturels a fait remarquer, qu’il y a 15 ou 20 ans, ces droits n’étaient pas « justifiables », or il est important de pouvoir les invoquer en justice. Il a souhaité travailler avec tous les acteurs compétents.
Quant aux mesures d’austérité, il a renvoyé les délégations au courrier adressé aux États par le Président du Comité en 2012 et qui reste d’actualité. Il y est dit que le droit international ne peut pas imposer des limitations aux mesures d’austérité que les États peuvent estimer nécessaires, mais que ces mesures doivent respecter certains critères et être conformes aux obligations faites aux États en vertu du Pacte.
M. de la Fuente a précisé que le Comité travaillait sur les normes de l’Organisation internationale du Travail qui doivent être prises en compte dans l’observation générale relative à l’article 7 du Pacte. Le Comité doit encore approuver cinq observations générales, dont deux sont prioritaires, a-t-il reconnu. Celle relative à la santé sexuelle et génésique, en particulier, a du mal à avancer. Une autre concerne le droit à jouir du progrès scientifique et de ses applications.
Le Comité a traité des négociations de l’Union européenne sur des programmes d’aide directement dans le cadre des dialogues avec ses États membres.
En outre, a poursuivi le Vice-Président, le Comité est bien conscient de la nécessité de trouver un équilibre délicat entre les ambitions et un travail rigoureux.
Le Comité est composé de plusieurs membres qui peuvent accepter des invitations de la part d’États Membres à travailler sur les conséquences d’une ratification éventuelle du Protocole facultatif, a-t-il expliqué.
Le seul objectif du Comité est de promouvoir et de protéger les droits économiques, sociaux et culturels, a affirmé l’intervenant. Les États Membres s’engagent de la même façon et partagent la même démarche par principe, donc l’application de ses recommandations ne devrait pas poser de problème particulier, a-t-il conclu.
Les droits de l’homme sont indivisibles, a reconnu M. de la Fuente. L’écart a été réduit ces dernières années entre les droits civils et politiques et les droits économiques, sociaux et culturels, d’autant plus que le Protocole permet de présenter des communications individuelles. Il a ensuite souligné la pertinence des droits énoncés dans le Pacte en matière d’environnement.
Enfin, il a reconnu que la corruption est « une question épineuse » qui est abordée dans de nombreux dialogues avec les États dans la mesure où elle a des effets sur la coopération internationale.
DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES (A/70/84–E/2015/76 ET A/70/301)
a) Droits des peuples autochtones
b) Suite donnée au document final de la réunion plénière de haut niveau de l’Assemblée générale, dite Conférence mondiale sur les peuples autochtones
Déclaration liminaire
Mme VICTORIA TAULI CORPUZ, Rapporteuse spéciale du Conseil des droits de l’homme sur les droits des peuples autochtones, a présenté son dernier rapport centré sur les incidences des investissements internationaux et du libre-échange sur les droits de l’homme des peuples autochtones.
Selon elle, les clauses relatives à l’investissement contenues dans les accords de libre-échange et les traités d’investissement bilatéraux et multilatéraux, tels qu’elles sont actuellement conçues et appliquées, ont des incidences négatives, avérées ou potentielles, sur les droits des peuples autochtones, en particulier sur leurs droits à l’autodétermination, aux terres, aux territoires et aux ressources, à la participation et au consentement préalable, libre et éclairé. Ces accords ont pour objectif de protéger les investisseurs étrangers et leurs intérêts dans les pays accueillant des projets d’investissement.
Les implications des accords internationaux d’investissement en matière de droits de l’homme et des peuples autochtones sont une question complexe et aux facettes multiples qui exige une attention maintenue et multilatérale de la part des États Membres des Nations Unies, en étroite collaboration avec les peuples autochtones et leurs représentants formels.
Notant que ce type d’accords n’est pas forcément négatif, elle a annoncé que ses prochaines études traiteront des moyens de les rendre bénéfiques, tant pour les peuples autochtones que pour les investisseurs. Dans le contexte du Programme de développement durable à l’horizon 2030, elle invite à repenser les paradigmes de développement qui ne conduisent pas à un développement durable et inclusif et à une réduction de la pauvreté parmi tous les groupes, y compris les peuples autochtones.
Elle recommande aux États de participer activement au Groupe de travail intergouvernemental à composition non limitée sur les sociétés transnationales et autres entreprises et les droits de l’homme du Conseil des droits de l’homme, afin d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant et de développer des moyens de renforcer les recours et les mécanismes de responsabilité juridiques en cas de violations des droits de l’homme par des entreprises privées
À la fin 2014, les États les plus souvent poursuivis devant un tribunal pour le règlement d’un différend avec des investisseurs étaient: l’Argentine, la République bolivarienne du Venezuela, la République tchèque, l’Égypte, le Canada, le Mexique, l’Équateur, l’Inde, l’Ukraine, la Pologne et les États-Unis, a-t-elle expliqué, ajoutant que les actions des tribunaux n’ont pas les mêmes incidences selon les pays. En effet, les États-Unis, qui ne lésinent pas pour contester ces actions, n’ont jamais eu à indemniser un investisseur.
Mme Tauli-Corpuz a également fait une synthèse de ses activités depuis la dernière session de l’Assemblée générale. Elle a notamment visité le Paraguay en novembre 2014.
En septembre 2015, elle a présenté au Conseil des droits de l’homme un rapport thématique sur les droits des femmes et des filles autochtones, qui répertorie une large gamme de violations de leurs droits collectifs, politiques et civils, économiques, sociaux et culturels. De l’avis de la Rapporteuse spéciale, un changement de paradigme et une approche multidimensionnelle seraient nécessaires pour améliorer leur situation.
À cet égard, la Rapporteuse spéciale juge nécessaire une réforme fondamentale et systémique de la gestion internationale des investissements et du libre-échange. Mme Tauli-Corpuz soutient que la situation actuelle, qui permet aux entreprises et aux investisseurs de jouir de droits et de recours exceptionnellement puissants, ne saurait être pérennisée.
La Rapporteuse qui relève que le nombre d’États de plus en plus mécontents face aux injustices inhérentes aux régimes de libre-échange et d’investissement est aujourd’hui en hausse, a préconisé aux États de prendre individuellement et dès maintenant des mesures afin de mieux protéger les droits des peuples autochtones.
Concernant la réforme des pratiques relatives à l’investissement et au libre-échange, la Rapporteuse spéciale recommande que sur la base du principe de consentement préalable, libre et éclairé tel qu’il est établi par la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et par la Convention no 169 de l’Organisation internationale du Travail (OIT), les États Membres devraient étudier, en concertation avec les peuples autochtones affectés, les possibilités de mettre en place des mécanismes participatifs leur permettant d’être impliqués, ou au moins d’avoir leur mot à dire, dans la négociation et l’élaboration de tous les accords d’investissement et de libre-échange concernés.
Dans la même veine, tout en plaidant pour une amélioration du dialogue social, elle propose que la négociation et la rédaction des accords internationaux d’investissement soient soumises à un contrôle parlementaire et à des consultations avec tous les niveaux de gouvernement, avec une inclusion de toutes les structures de gouvernement autonomes autochtones de manière formelle, dans le processus de prise de décisions en matière d’accords internationaux d’investissement.
La Rapporteuse spéciale a également recommandé aux États Membres de s’assurer que tous les accords internationaux d’investissement, nouvellement signés ou renégociés, prennent en compte les devoirs à la fois des gouvernements et des entreprises en matière de respect des droits de l’homme.
S’agissant de règlement des différends entre investisseurs et États devant les tribunaux compétents, elle suggère également aux États Membres de s’assurer automatiquement que le droit international relatif aux droits de l’homme, y compris toutes les dispositions particulières relatives aux peuples autochtones, sert de source de droit dans l’arbitrage des différends. En conséquence, elle les invite à publier toutes les décisions d’arbitrage prises dans les affaires de règlement de différends entre investisseurs et États, y compris les informations sur des aspects spécifiquement liés aux droits des peuples autochtones.
Dans ce contexte la Rapporteuse spéciale a demandé aux Nations Unies et aux organisations associées de fournir toute assistance technique nécessaire aux États Membres engagés dans une réforme immédiate des accords d’investissement et de libre-échange ou dans toute réforme systémique, en garantissant l’intégration des normes en matière de droits de l’homme, y compris celles relatives aux peuples autochtones, dans toutes les agences des Nations Unies, travaillant sur les questions relatives aux accords d’investissement et de libre-échange, notamment la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et la Banque mondiale.
Dialogue interactif
L’Australie a pris des mesures pour faire face aux problèmes auxquels les autochtones sont confrontés. Elle a invité à mettre l’accent sur l’application de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones.
L’Union européenne a trouvé que le commerce et l’investissement pouvaient être « dopants pour le développement » car ils ont eu des effets positifs sur certains pays. La déléguée a encouragé à appréhender la question des investissements étrangers et les accords de libre-échange à partir d’une approche holistique.
Comment renforcer la coopération entre le mandat de la Rapporteuse et le groupe de travail de l’Union européennes sur les entreprises privées? a-t-elle demandé. La Norvège s’est inquiétée des conclusions de la Rapporteuse dans son rapport sur la situation des femmes et des filles autochtones. La représentante a demandé comment mettre en œuvre les recommandations de Mme Tauli-Corpuz contenu dans le rapport. Elle a encouragé la promotion d’institutions comme le Parlement sami dans d’autres pays.
Le Mexique a fourni des informations sur les nouvelles formules mexicaines de dialogue et de consultations avec les peuples autochtones. Ainsi, des consultations ont été tenues à Oaxaca auquel un expert observateur a été invité à apporter son analyse et ses connaissances en la matière, particulièrement sur la base du principe de consentement libre et éclairé. Dans ce sens, il importe que les peuples autochtones participent aux négociations d’accords de libre-échange.
Les États-Unis ont salué les efforts tendant à recueillir les pratiques optimales dans le travail avec les peuples autochtones, ainsi que du guide de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur l’extraction minière. Ces orientations de l’OCDE pourraient aider à avancer sur cette question. Elle s’est demandée si les directives des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l’homme sont particulièrement pertinentes à cet égard?
Le Panama a insisté sur la nécessité de respecter les coutumes et traditions des peuples autochtones. Le Gouvernement a délimité les territoires ancestraux et un ministère a été créé en vue d’élaborer une vision intégrale respectant les droits économiques, sociaux et culturels de ces peuples.
La semaine dernière, le Président a accordé une indemnisation de 5 millions de dollars à des autochtones affectés par la construction d’un parc. Cette indemnisation a été versée pour « dommages matériels subis », et pour respecter les droits de l’homme de tous les Panaméens.
Le Cameroun a signalé les « effets paralysants de certains accords d’investissements et de libre-échange sur des pays à l’économie faible », auxquels la Rapporteuse spéciale fait référence dans son rapport. La représentante a appuyé les recommandations de la Rapporteuse spéciale, qu’elle a encouragée à œuvrer de concert avec les titulaires de mandats sur l’incidence de ces investissements. Elle a invité les défenseurs des droits de l’homme, les États et la société civile à lire le document et a espéré que la Rapporteuse spéciale se fasse entendre sur cette question qui ne touche pas uniquement les peuples autochtones.
La représentante du Congo a indiqué que son pays avait organisé un atelier sur le suivi du Document final de la Conférence mondiale, ce qui atteste de l’intérêt qu’il lui accorde.
Le Nigéria a aussi estimé que le rapport recense des questions de la plus haute importance pour les pays s’agissant des activités des entreprises et de leur empiètement sur la jouissance des droits de l’homme. Il a demandé si la Rapporteuse spéciale s’était doté de mécanismes pour analyser et se prémunir contre les méfaits des activités des entreprises privées étrangères. Il a émis le vœu qu’elle mette davantage l’accent sur la prospérité et le bien-être des personnes d’ascendance africaine.
La Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones a reconnu la nécessité d’améliorer le mécanisme d’experts et d’approfondir le débat quant au rôle qu’il peut jouer avec un mandat renforcé.
Mme Tauli-Corpuz a salué le plan d’action de l’Union européenne sur la démocratie et les droits de l’homme et sa proposition de traiter les droits de l’homme et les droits économiques, sociaux et culturels de façon globale.
Soulignant l’importance pour les États d’appliquer les principes directeurs sur les entreprises et les droits de l’homme, elle a ajouté qu’il fallait « s’assurer que le consentement préalable, libre et éclairé des peuples autochtones est obtenu ».
Mme Tauli-Corpuz a indiqué qu’elle serait présente à la Conférence de Paris sur les changements climatiques. Elle a insisté sur une démarche fondée sur les droits des peuples autochtones dans ce contexte.
Elle a ensuite appelé la Commission de la condition de la femme à formuler une recommandation générale sur les femmes et les filles autochtones.
Elle a proposé d’impliquer les peuples autochtones dans l’élaboration des protocoles et reconnu que l’élaboration d’un traité juridiquement contraignant était un travail de longue haleine.
Les États peuvent reconnaître les incidences délétères de certaines activités, même des années plus tard, régler ces questions et verser des indemnisations aux personnes touchées, s’est-elle félicitée en citant l’exemple du barrage construit au Panama.
En outre, elle a dit ne pas souhaiter que les accords d’investissements sapent le respect des normes environnementales et des droits de l’homme.
Le Document final de la Conférence mondiale précise que des plans d’action nationaux doivent être élaborés par les États pour sa mise en œuvre, a-t-elle rappelé en concluant.
Droits de réponse
La Fédération de Russie a déploré le fait que l’Ukraine ait « exploité le débat pour faire des déclarations politiques ». La Russie a respecté ses obligations en matière de droits de l’homme, y compris en Crimée et à Sébastopol. L’Ukraine n’agit pas de la sorte par rapport à ses populations autochtones; les Tatars de Crimée sont ignorés depuis des années par Kiev.
L’Ukraine a dit que la Russie avait annexé illégalement la République autonome de Crimée, qui est un territoire ukrainien, et a évoqué des activités illégales au Parlement de la Crimée.
La Fédération de la Russie a demandé à l’Ukraine de traiter du point à l’ordre du jour.
L’Ukraine a rappelé que les Tatars de Crimée relèvent du sujet qui occupe aujourd’hui la Commission.
PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME: APPLICATION DES INSTRUMENTS RELATIFS AUX DROITS DE L’HOMME
Débat général
M. GERARD VAN BOHEMEN (Nouvelle-Zélande), s’exprimant au nom de l’Australie, de l’Islande, du Liechtenstein, de la Norvège et de la Suisse, a concentré son intervention sur l’application de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, qui est ratifiée aujourd’hui par 159 pays. À cet égard, il a salué la nomination de Mme Catalina Devandas Aguilar, première Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées, dont le mandat rappelle « l’universalité, l’indivisibilité et l’interdépendance de tous les droits de l’homme et des libertés fondamentales », y compris ceux des personnes handicapées.
M. Van Bohemen a appuyé la conclusion de son rapport, à savoir que les États doivent dépasser l’approche traditionnelle fondée sur la protection des personnes handicapées et se tourner vers la promotion de leurs droits. Les États doivent développer des indicateurs spécifiques, ventilés en fonction du handicap et du sexe, pour mieux pouvoir évaluer l’impact des programmes sociaux. Il a également souhaité que les personnes handicapées soient incluses dans toutes les phases du développement durable.