En cours au Siège de l'ONU

Soixante-dixième session
71e séance – matin
AG/11738

Assemblée générale: face aux besoins sans précédent, les délégations comptent sur le Sommet mondial d’Istanbul pour « ranimer la flamme de l’action humanitaire »

Avec 125 millions de personnes dont 60 millions de déplacés en besoin d’assistance dans le monde et la multiplication des crises liées aux conflits armés et aux catastrophes naturelles, l’Assemblée générale a appelé, aujourd’hui, à renforcer l’architecture humanitaire des Nations Unies, les délégations comptant sur le premier Sommet humanitaire mondial, en mai à Istanbul, pour « ranimer la flamme de l’action humanitaire », comme l’a traduit le représentant du Canada.

L’Assemblée a adopté par consensus une résolution* sur le renforcement de la coordination humanitaire d’urgence fournie par les organisations des Nations Unies qui « réaffirme le rôle de chef de file de l’ONU dans la réponse aux besoins humanitaires et réitère la légitimité de son action », a noté le représentant de la Suède en la présentant.  Il a appelé à « faire plus et mieux » avec des ressources qui, quoiqu’ayant atteint un niveau record de 10 milliards de dollars, ne représentent que la moitié du financement requis en 2015, a fait remarquer le représentant de l’Union européenne. 

Son homologue suédois a expliqué que, cette année dans la résolution, l’approche sur le financement de l’action humanitaire a été renforcée car l’écart entre « ce qu’il faut et ce qu’on a » ne cesse de se creuser.  Il a aussi indiqué que le rôle des femmes dans l’action humanitaire a été souligné encore plus  et qu’un nouveau paragraphe parle spécifiquement de la nécessité de renforcer les services d’appui aux enfants dans les crises humanitaires.  La résolution contient un libellé « nouveau et plus fort » sur d’autres questions importantes dont la protection des réfugiés et des déplacés, la redevabilité dans la réponse aux besoins des populations affectées, la réduction des risques de catastrophe et la réponse humanitaire dans le contexte des crises sanitaires mondiales comme celle d’Ebola.

Les délégations ont dit compter sur le Sommet humanitaire mondial à Istanbul, en mai 2016, pour approfondir ces questions, après les réunions prévues par le Secrétaire général en février et mars 2016 sur le financement des réponses à la crise syrienne et avant une réunion de haut niveau qui sera convoquée en septembre, avant le débat général, car « davantage de crises affectent davantage de gens plus longtemps », a insisté le représentant de l’Italie en appelant à placer les besoins humanitaires au cœur de l’agenda international.

Son homologue de la Fédération de Russie s’est montré dubitatif: quel est l’ordre du jour du Sommet?  Dans quel format participeront les chefs d’État et de gouvernement?  Quelles sont les décisions attendues?  Auront-elles un caractère contraignant? a demandé le représentant.  Le délégué du Japon a lui aussi demandé au Secrétariat de « clarifier ce qui est attendu du Sommet » d’Istanbul, une première « historique » a souligné son homologue de la République de Corée, qui doit contribuer à « ré-inspirer et revigorer l’humanitarisme mondial » ou à « ranimer la flamme de l’action humanitaire », comme l’a dit le représentant du Canada.  Pour le représentant de la Turquie, le Sommet doit identifier des solutions à la question des réfugiés, y compris la situation des pays d’accueil.  Son homologue de la Syrie a dit ne pas comprendre pourquoi le Secrétaire général a confié l’organisation du Sommet à un pays qui facilite l’entrée des terroristes en Syrie et le trafic des biens culturels. 

L’Assemblée générale a également adopté par consensus une résolution** sur l’assistance au peuple palestinien ».  Comme l’a rappelé la représentante de l’Union européenne, qui a présenté le texte, la résolution appelle à la concrétisation des engagements pris au Caire pour la reconstruction de Gaza.  Elle a appelé les États à ouvrir leurs marchés aux exportations des produits palestiniens dans les conditions les plus favorables.  L’Observatrice de la Palestine, qui est intervenue après que le représentant d’Israël a affirmé la détermination de son pays de poursuivre l’aide humanitaire aux Palestiniens, a renouvelé son appel à l’ONU pour qu’elle maintienne sa présence tant que les droits inaliénables du peuple palestinien, y compris son droit à l’autodétermination, seront niés et que des défis humanitaires et de développement graves lui seront imposés. 

Dans la résolution*** consacrée à la sûreté et la sécurité du personnel humanitaire des Nations Unies, les délégations se félicitent du changement de paradigme du système des Nations Unies, de « quand partir » à « comment rester », a expliqué la représentante de l’Union européenne qui l’a présentée.  Le texte**** sur la coopération internationale en matière d’aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles contient, comme l’a dit le représentant de l’Afrique du Sud, des éléments nouveaux fondés sur les recommandations du rapport du Secrétaire général et la Déclaration et le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030.

L’Assemblée générale a aussi adopté un texte***** sur un monde contre la violence et l’extrémisme violent, présenté par l’Iran.  Le problème n’est pas le message mais le messager car l’Iran qui demande qu’on mette un terme à la violence, c’est « comme si un ventriloque demandait à sa marionnette de se taire », a commenté le représentant d’Israël, sans que l’Iran n’exerce son droit de réponse.

Un dernier texte****** a été adopté pour marquer le vingtième anniversaire de la participation des « Casques blancs », aux opérations de secours humanitaires de l’ONU.  L’Assemblée générale a, par ailleurs, élu sans vote l’Iraq au Comité du programme et de la coordination pour un mandat commençant à la date de l’élection et prenant fin le 31 décembre 2017. 

L’Assemblée générale poursuivra ses travaux demain, vendredi 11 décembre, à partir de 10 heures.

*A/70/L.29

**A/70/L.18

***A/70/L.25

****A/70/L.30

*****A/70/L.21

******A/70/L.27

RENFORCEMENT DE LA COORDINATION DE L’AIDE HUMANITAIRE ET DES SECOURS EN CAS DE CATASTROPHE FOURNIS PAR LES ORGANISMES DES NATIONS UNIES, Y COMPRIS L’ASSISTANCE ÉCONOMIQUE SPÉCIALE (A/70/383)

Déclarations

M. MOGENS LYKKETOFT, Président de la soixante-dixième session de l’Assemblée générale, a déclaré que le rapport du Secrétaire général montre les défis auxquels est confrontée la communauté internationale au moment où des besoins humanitaires sans précédent naissent dans plusieurs parties du monde.  Parmi les défis, le Président a cité le fait que le monde compte aujourd’hui 60 millions de personnes déplacées dont la moitié est composée d’enfants.  Ces quatre dernières années, la communauté internationale a répondu à ces défis en augmentant constamment son assistance humanitaire.  Les pays voisins des « épicentres humanitaires » ont géré « admirablement » les millions de personnes fuyant conflits et instabilité.  D’autres pays dans le monde ont également accueilli les réfugiés, a rappelé le Président.

Pourtant aujourd’hui, a-t-il poursuivi, au 30 novembre, les Plans de réponse humanitaire de l’ONU n’étaient financés qu’à hauteur de 49%, alors que les études montrent que les besoins augmenteront encore en 2016.  Il faut donc « une réponse plus adéquate, plus globale et plus cohérente » à la crise humanitaire et des réfugiés.  C’était là, a dit le Président, l’objet d’une réunion informelle que l’Assemblée générale a tenu le 19 novembre dernier et de la réunion plénière du 20 novembre sur les demandeurs d’asile syriens.

Ces réunions ont montré qu’il faut « plus de leadership, plus d’actions et plus de ressources », a martelé le Président, rappelant que le Secrétaire général a présenté une feuille de route comprenant des réunions, en février et en mars 2016, sur le financement des besoins des réfugiés syriens et leur réinstallation.  La feuille de route comprend aussi le Sommet humanitaire mondial de mai qui sera l’occasion pour la communauté internationale de se réunir autour « d’un new deal » de l’action humanitaire.  Le Secrétaire général a également annoncé la tenue d’une Réunion de haut niveau en septembre 2016, sur les grands mouvements des réfugiés et des migrants pour lequel il présentera un rapport préparatoire.  À cet égard, le Président de l’Assemblée a annoncé qu’il soumettra prochainement un projet de décision sur cette Réunion de haut niveau.

Avant de conclure, il a rappelé qu’hier le monde a commémoré pour la première fois la « Journée internationale de commémoration des victimes du crime de génocide, d’affirmation de leur dignité et de prévention de ce crime », qui touche une dimension importante du génocide, à savoir l’aide aux survivants, en particulier les orphelins, les veuves et les victimes de violence sexuelle. 

Présentant le projet de résolution sur le « vingtième anniversaire de la participation de volontaires, les « Casques blancs », aux opérations de secours humanitaires et aux activités de relèvement et de coopération technique pour le développement entreprises par les organismes des Nations Unies, M. CARLOS ZABALLA (Argentine) a salué le travail des Casques bleus, « outils de solidarité ».  Il a souligné qu’en Amérique latine, ils ont joué un rôle essentiel dans le renforcement des organismes régionaux de gestion des risques de catastrophe.  À une époque où les catastrophes sont de moins en moins naturelles et de plus en plus dévastatrices, les efforts des pays en développement en la matière méritent une attention particulière, a estimé le représentant en encourageant le consensus autour du projet de résolution.

Au nom de l’Union européenne, Mme SYLVIE LUCAS (Luxembourg) a présenté les projets de résolution relatifs à la sécurité et la sûreté du personnel humanitaire et la protection du personnel des Nations Unies » et sur « l’assistance au peuple palestinien ».  Elle a rappelé qu’en 2014, 121 agents humanitaires ont été tués, 88 blessés et 120 enlevés dans l’exercice de leur mission.  L’environnement opérationnel de ce personnel est devenu nettement plus dangereux, comme en témoigne l’augmentation des attaques directes contre les locaux et les véhicules des Nations Unies.  L’impact heureusement limité de ces attaques illustre également l’importance des mesures efficaces d’atténuation des risques, s’est réjouie la représentante.  De plus en plus, a-t-elle dit, nous attendons des Nations Unies « to stay and deliver », qu’elles restent sur place et exécutent les programmes les plus essentiels, y compris l’assistance humanitaire vitale, et ce même dans des environnements dangereux.  La résolution se félicite du changement de paradigme du système des Nations Unies, de « quand partir » à « comment rester ». 

L’Union européenne, a insisté la représentante, souligne qu’il est de « notre devoir » de reconnaître l’engagement des agents humanitaires du personnel de l’ONU et du personnel associé, de soutenir leur travail et de faire tout ce qui est en « notre pouvoir » pour renforcer encore leur sûreté et leur sécurité.  Le projet de résolution démontre que cette préoccupation est partagée par toutes les délégations, le texte « ambitieux » de cette année ayant été agréé à l’unanimité pendant les consultations informelles. 

La représentante a ensuite parlé de l’assistance au peuple palestinien, en indiquant que le projet de résolution souligne en particulier l’importance du travail des Nations Unies et de ses agences.  Afin d’assurer que l’aide puisse être fournie de manière efficace, il importe, a souligné la représentante, que les engagements pris au Caire pour la reconstruction de Gaza se concrétisent en temps utile et que les États ouvrent leurs marchés aux exportations des produits palestiniens dans les conditions les plus favorables. 

M. OLOF SKOOG (Suède) a présenté le projet de la résolution omnibus sur « le renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies » qui réaffirme le rôle de chef de file de l’ONU dans la réponse aux besoins humanitaires et réitère la légitimité de son action.  Cette année, de nouveaux éléments y ont été introduits, a dit le représentant, et plusieurs autres ont été renforcés, faisant du texte une plateforme encore plus solide de l’action humanitaire.  L’approche sur le financement de l’action humanitaire a été renforcée car l’écart entre « ce qu’il faut et ce qu’on a » ne cesse de se creuser.  Il faut faire plus et mieux, a estimé le représentant, en soulignant d’emblée l’importance du rapport du Groupe de travail de haut niveau du Secrétaire général sur le financement de l’action humanitaire. 

Le représentant a aussi indiqué que le rôle des femmes dans l’action humanitaire a été souligné encore plus dans le projet de résolution qui comprend de « nouveaux éléments forts » sur la nécessité de les impliquer dans tous les processus de prise de décisions à tous les niveaux et de renforcer les efforts pour prévenir, réagir et poursuivre les actes de violence sexuelle et fondés sur le sexe dans les urgences humanitaires.  Enfin, le représentant a attiré l’attention sur un nouveau paragraphe qui parle spécifiquement de la nécessité de renforcer les services d’appui aux enfants dans les crises humanitaires. 

Le projet de résolution, a-t-il résumé, contient un libellé « nouveau et plus fort » sur d’autres questions importantes dont la protection des réfugiés et des déplacés, la responsabilité dans la réponse aux besoins des populations affectées, la réduction des risques de catastrophe et la réponse humanitaire dans le contexte des crises sanitaires mondiales comme celle d’Ebola.

Le représentant a enchainé dans une déclaration conjointe avec l’Inde, insistant sur le fait que le système humanitaire doit être renforcé.  Les besoins sont plus grands que jamais comme en témoigne le fait que 120 millions de personnes dans le monde sont en demande d’assistance dont 60 millions de réfugiés et déplacés.  Le représentant a réclamé un nouveau partenariat pour l’aide humanitaire réunissant l’ensemble de la communauté internationale.  « L’aide humanitaire peut transcender les frontières et les divergences. »

Il s’est dit attaché aux principes d’humanité, d’impartialité et d’indépendance qui sous-tendent l’aide humanitaire, plaidant pour que les populations dans le besoin restent au cœur de la réponse humanitaire.  Il faut travailler avec elles et avec leurs autorités locales.  Il faut aussi que les acteurs du développement interviennent plus vite et de manière plus affirmée dans les États fragiles et travaillent avec les partenaires nationaux.  Le représentant a vigoureusement dénoncé les attaques contre le personnel humanitaire, appelant à la fin de l’impunité.

« Recevoir l’aide humanitaire est un droit, la fournir reste un devoir. »  Ce n’est pas seulement une exigence morale mais aussi une exigence de paix et de stabilité alors que des flots croissants de déplacés fuient une violence croissante.  Nous avons tous la responsabilité de réagir aux crises où qu’elles se produisent.  Nous devons tous contribuer d’une façon ou d’une autre à la hauteur de nos moyens, apporter une réponse rapide et ciblée et garantir aux agents humanitaires l’accès aux populations vulnérables.  La Suède et l’Inde sont de fervents soutiens du Fonds central pour les interventions d’urgence, a conclu le représentant, en appelant tous les États à mettre en place des partenariats similaires pour que tous les enjeux sans précédent d’aujourd’hui soient relevés.

Présentant le projet de résolution sur « la coopération internationale en matière d’aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles: de la phase des secours à celle de l’aide au développement », M. KINGSLEY MAMABOLO (Afrique du Sud) a dit que le texte de cette année contient des éléments nouveaux fondés sur les recommandations du rapport du Secrétaire général et la Déclaration et le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030.   

Nous vivons dans un monde où les moyens actuellement mis à notre disposition, qu’ils soient financiers ou institutionnels ne suffisent clairement pas pour faire face aux besoins humanitaires, a déclaré M. JOAO VALE DE ALMEIDA, Union européenne.  Si, a-t-il souligné, le financement humanitaire a atteint des niveaux record, presque 10 milliards de dollars, cette année, cette somme ne représente que la moitié du financement nécessaire pour 2015.  Des problèmes subsistent aussi dans la capacité globale de réponse du système.  Alors que nous préparons le Sommet humanitaire mondial à Istanbul, nous ne pouvons plus nous satisfaire d’une approche « comme à l’accoutumée ».  Le Conseil européen a d’ailleurs adopté les « Conclusions sur le Sommet » qui doivent insister sur le respect du droit international humanitaire, y compris le maintien de l’accès humanitaire et la lutte contre l’impunité.  Le Sommet doit aussi lancer des réformes pour rendre l’aide plus efficace et plus comptable de ses actes vis-à-vis de la population visée.  L’aide doit en effet prendre systématiquement en compte les besoins et les capacités des femmes, des filles, des hommes et des garçons; les femmes et les filles devant avoir des possibilités égales de jouer un rôle de chef de file dans l’action humanitaire.  Les besoins et les capacités des personnes handicapées doivent également être systématiquement inclus dans l’action humanitaire.  La cohérence entre les programmes humanitaire et de développement et leur financement doit être réalisée et le renforcement de la résilience doit être la clef, comme le disent le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et les engagements de Sendai.

L’aide humanitaire et tout le système en général, doit être plus efficace, a insisté le représentant.  Il faut des réformes « plus ambitieuses » et trouver les moyens de faire en sorte que cette aide se fonde véritablement sur les besoins et les vulnérabilités plutôt que sur le statut, le secteur ou la démographie.  Le système devrait être renforcé par l’évaluation commune des besoins, les plans de réponse humanitaire hiérarchisés par agence et domaine d’action, une coordination plus étroite avec les acteurs de développement et un plus grand leadership sur le terrain.

Au nom du Groupe des États arabes, M. ALYA AHMED AL-THANI (Qatar) a appelé à l’augmentation des ressources.  Il a indiqué que son Groupe a activement participé aux travaux préparatoires du Sommet humanitaire d’Istanbul et espère des résultats concrets.  Il a demandé au Secrétaire général de poursuivre ses consultations pour que tous les pays puissent faire leurs contributions.  La situation en Palestine occupée, a-t-il poursuivi, est rendue difficile par le maintien du blocus « inhumain » de Gaza.  Le représentant a rendu hommage aux agences de l’ONU mais a souligné que la priorité doit surtout être de mettre fin à l’occupation, de revenir aux frontières de 1967 et d’aider les Palestiniens à créer leur propre État.  En attendant, le Groupe des États arabes est prêt à travailler avec les agences de l’ONU et le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) pour apporter une réponse aux crises humanitaires.

Au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), M. DIEGO MOREJON-PAZMINO (Équateur) s’est dit préoccupé par la constante érosion continue, dans de nombreux cas, du respect des principes et des règles du droit international, en particulier le droit international humanitaire.  Les efforts internationaux d’aide humanitaire doivent respecter la souveraineté des États, leurs cadres juridiques, leur intégrité territoriale et leur unité nationale.  Le représentant a exhorté les acteurs humanitaires à s’acquitter de leurs mandats conformément aux lignes directrices établies par les gouvernements.  Il les a exhortés à améliorer la transparence et la redevabilité.  À ces acteurs et aux gouvernements, il a demandé de faire des efforts pour renforcer les capacités locales, nationales, sous régionales et régionales de comprendre les vulnérabilités et leurs causes, de les réduire, de gérer les risques de catastrophe et de renforcer la résilience des communautés. 

Il est tout aussi important d’améliorer et de renforcer la coopération internationale dans toutes ses formes, spécialement dans le transfert des ressources, de technologies et de connaissances.  Le représentant a exhorté le système des Nations Unies à harmoniser ses mécanismes de reddition de comptes et de transparence et à promouvoir la participation des pays en développement à leurs organes de gestion et de contrôle.  Rappelant la tenue, à Quito en octobre 2016, de la troisième Conférence des Nations Unies sur les établissements humains (Habitat III), le représentant a jugé important de traiter, dans le cadre de ce nouvel agenda urbain, des politiques visant des interventions de secours plus efficaces en milieu urbain.  Le Sommet humanitaire d’Istanbul sera l’occasion de repenser les choses, a conclu le représentant, jugeant également important de traiter des causes sous-jacentes des catastrophes et des conflits.  À cet égard, il a attiré l’attention sur le « Plan 2015 pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle » de la CELAC.

Mme FEDA ABDELHAD-NASSER, Observatrice de l’État de Palestine, a déclaré que 2015 a été une autre année de troubles affectant gravement le peuple palestinien, dans le Territoire occupé, y compris à Jérusalem-Est.  Tant qu’une paix juste et durable ne sera pas réalisée, l’assistance du système de l’ONU demeurera « critique », a acquiescé l’Observatrice, en détaillant l’aide apportée par les divers agences, fonds et programmes de l’ONU.  Une action politique « immédiate et sérieuse » est nécessaire pour sauver la solution à deux États fondée sur les frontières d’avant 1967 conformément aux résolutions pertinentes de l’ONU, des Principes de Madrid et de l’Initiative de paix arabe.  « Les mots et les déclarations de bonnes intentions seuls ne feront pas de ces textes une réalité. »

Confirmant les informations contenues dans le rapport du Secrétaire général, l’Observatrice a souligné que maintenant que la communauté internationale s’embarque dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 lequel reconnaît les défis particuliers des peuples vivant sous occupation étrangère et domination coloniale, le peuple palestinien ne saurait être laissé sur le côté.  Ce peuple renouvèle donc son appel à la poursuite de l’aide humanitaire, aussi longtemps que ses droits inaliénables, y compris son droit à l’autodétermination, seront niés et que des défis humanitaires et de développement graves lui seront imposés.  Avec l’appui de la communauté internationale et sa résilience, le peuple palestinien s’efforcera de réaliser ses aspirations, d’exercer ses droits et de surmonter tous ces défis dans un État indépendant et souverain, avec Jérusalem pour capitale, côte à côte avec Israël et tous ses voisins, dans des frontières reconnues et dans la paix, la sécurité et la prospérité.  Malgré les obstacles, c’est un objectif que ce peuple veut voir réalisé et il exhorte la communauté internationale à n’épargner aucun effort pour y parvenir.

M. GILLIAN BIRD (Australie) a souligné que les crises actuelles étaient caractérisées par une violence endémique contre les civils, y compris les agents humanitaires.  Il a jugé particulièrement « odieuse » la violence sexuelle utilisée comme arme de guerre.  Sur une note plus optimiste, il a estimé que le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe et le Programme de développement durable à l’horizon 2030 permettaient d’œuvrer de concert pour la durabilité, l’inclusion et la prospérité.  L’absence de solutions politiques aux crises prolongées a créé un nombre record de réfugiés et de déplacés, a constaté le représentant.  D’après lui, « les acteurs humanitaires ne peuvent pas être les fournisseurs par défaut des services de base », et les partenaires du développement et les donateurs doivent s’engager davantage.  L’Australie reconnaît l’importance de l’aide rapide au relèvement pour appuyer la transition vers le développement, notamment dans la région indo-pacifique.  Initiatrice du « Défi humanitaire du Pacifique », elle salue également le rôle que peut jouer le secteur privé pour apporter de nouveaux talents, idées et ressources.

M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a reconnu que les besoins humanitaires et les demandes d’aide humanitaire ne feront que croître dans le futur.  Il a donc rappelé les principes d’impartialité, de neutralité et d’indépendance et a insisté sur le maintien des dispositions de la résolution 46/182 du 19 décembre 1991.  L’approche la plus efficace face aux crises consiste à y apporter des solutions politiques.  Il a donc espéré que le Sommet humanitaire mondial de 2016 donnera un élan supplémentaire pour résoudre les conflits par des solutions politiques. 

Le représentant s’est d’ailleurs dit inquiet du processus préparatoire de ce Sommet.  Quel en est l’ordre du jour?  Comment l’étoffer?  Dans quel format les chefs d’État et de gouvernement y participeront-ils?  Quelles sont les décisions attendues?  Auront-elles un caractère contraignant? a-t-il demandé. 

Le représentant a dit attendre des propositions pragmatiques de la part du Comité préparatoire et « une esquisse des décisions à prendre » de la part du Secrétaire général.  Il s’est d’emblée opposé à l’idée d’introduire un chapitre « aide humanitaire » dans le budget ordinaire de l’Organisation.  Ce qu’il nous faut, a-t-il dit, ce sont des nouveaux donateurs.  Le représentant a rappelé que son pays a financé ou fourni une aide à plus de 110 États.  Quant à la situation dans le sud-est de l’Ukraine, il a affirmé que son pays a pris toutes les mesures nécessaires pour faire face « au chantage » de l’Ukraine s’agissant de l’accès à l’énergie.  Il a conclu en évoquant le trentième anniversaire en 2016 de « l’accident d’origine technique de Tchernobyl » qui devrait être l’occasion de tirer plus précisément les leçons de cette catastrophe. 

M. VIRASHI PLASAI (Thaïlande) a souhaité que la volonté et l’engagement politiques « se traduisent en actions concrètes » aux niveaux national, régional et mondial, afin de garantir la viabilité des opérations humanitaires.  Pour sa part, la Thaïlande a adopté, cette année, un nouveau plan de prévention et de réduction des risques de catastrophe qui incorpore le Cadre de Sendai.  Elle a accueilli en septembre dernier, à Bangkok, le Symposium de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) sur la résilience en cas de catastrophe.  S’agissant du renforcement de l’aide humanitaire, a poursuivi M. Plasai, la Thaïlande est d’avis qu’il faut recourir davantage au développement et aux mesures de prévention pour pallier au déficit croissant de ressources et qu’il faut mieux partager le fardeau de l’aide, tout en engageant le secteur privé et la société civile.  De plus, il faut examiner les causes profondes des conflits, élaborer de nouvelles approches pour lier l’aide humanitaire et l’aide au développement, et équilibrer les réponses d’urgence et les solutions à long terme.  Ensuite, les opérations de maintien de la paix de l’ONU ont un rôle important à jouer pour restaurer un environnement sécuritaire favorable au succès des opérations humanitaires.

Mme STEFANIE AMADEO (États-Unis) a souligné que 2016 sera l’occasion de faire des progrès tangibles sur la réponse humanitaire apportée aux crises qui perdurent.  Elle a assuré que son pays participera à un haut niveau à la Conférence des donateurs sur la Syrie en février prochain car il fait de cette crise une priorité.  Elle a exhorté les États à contribuer aux appels humanitaires des agences de l’ONU et des autres organisations pour que leur travail « important » puisse continuer.  Elle s’est félicitée de la manifestation de haut niveau prévu en février à Genève en faveur des réfugiés afin de favoriser les options de retour et des voies plus sûres pour les migrants qui ont besoin de protection.  Elle a rappelé que cet événement sera suivi en mai du Sommet humanitaire mondial qui doit être, pour elle, l’occasion de renforcer l’architecture humanitaire de l’ONU et son financement, améliorer la cohérence entre assistance humanitaire et développement lorsque les situations perdurent, renforcer la protection des enfants, femmes et filles et élargir les partenariats civils.  La manifestation de haut niveau annoncée par le Secrétaire général à la soixante-onzième session de l’Assemblée générale sera aussi l’occasion de faire avancer le dossier humanitaire des migrants.  Les conflits, a-t-elle rappelé, contribuent à hauteur de 80% aux situations appelant une réaction humanitaire.

La représentante a promis de veiller avec ses partenaires à ce que les ressources des agences humanitaires soient garanties.  Mais trop de parties aux conflits armés font fi de leurs responsabilités humanitaires et montrent même « un certain mépris » pour la vie.  « Nous continuerons d’étudier les moyens de renforcer le respect du droit international humanitaire », a-t-elle insisté.  Pour conclure, elle a insisté sur le fait que l’attention mondiale se porte actuellement sur la Syrie et ses effets en Europe mais que les États-Unis continuent de répondre aux situations tout aussi dramatiques au Soudan, au Yémen ou en Iraq, sans oublier que la crise des migrants est elle aussi d’ordre mondial.

Après avoir constaté qu’il y a de plus en plus de personnes touchées par les crises et les conflits et que les réfugiés dans le monde comptent plus de 60 millions de personnes, M. JURG LAUBER (Suisse) a averti que l’action humanitaire ne doit pas être politisée.  Il a noté que les cinq grandes crises humanitaires de 2015 étaient toutes liées à des conflits et souligné que la gestion des risques et la réduction de la vulnérabilité coûtent toujours moins chères qu’une crise humanitaire.  Prouvant par-là l’importance qu’il y a à traiter des causes profondes des conflits, le représentant a ajouté que le Cadre de Sendai a fourni de nouvelles preuves de la nécessité de combattre les facteurs sous-jacents des catastrophes.  Pour lui, le Sommet humanitaire mondial devra offrir l’occasion « exceptionnelle » d’examiner le système humanitaire et d’identifier les meilleurs moyens de répondre véritablement aux besoins des personnes vulnérables.  Les États doivent s’engager à travailler plus étroitement avec les agences humanitaires, sachant que les défis sont tous liés et qu’ils ne peuvent être traités individuellement.  Il est important de coordonner les efforts et de partager une vision commune, a conclu le représentant.

M. WANG MIN (Chine) a souligné que l’aide internationale humanitaire devait être conforme aux principes d’égalité souveraine, de non-ingérence dans les affaires intérieures et de règlement pacifique des différends consacrés par la Charte des Nations Unies, de même qu’aux principes de neutralité et d’impartialité établis par la résolution 46/182 de l’Assemblée générale.  Ensuite, a-t-il fait valoir, « la véritable réponse aux crises humanitaires mondiales réside dans la poursuite de la paix et la réalisation du développement commun ».  Citant le Programme de développement durable à l’horizon 2030, M. Wang a dit qu’il fallait pleinement tenir compte des besoins et des défis spécifiques des pays en développement et mettre l’accent sur des questions de subsistance, telles que l’élimination de la pauvreté et de la faim, et l’amélioration de la santé.  La communauté internationale doit aider ces pays à renforcer leurs capacités en matière de gestion des risques.  La Chine, qui appuie le rôle central de l’ONU en matière d’aide humanitaire, encourage le système à renforcer son efficacité et sa transparence et les donateurs à se montrer plus généreux.  

M. SABAH AL-SABAH (Koweït) a dit que la situation actuelle appelle à la multiplication des efforts pour augmenter les capacités de l’ONU à répondre aux crises humanitaires.  Le Koweït a doublé ses contributions au système de l’ONU et attend avec intérêt la réflexion qui s’engagera au Sommet humanitaire mondial d’Istanbul.  Le représentant a attiré l’attention sur la situation du peuple palestinien, avant de s’attarder sur le Fonds koweïtien pour le développement qui a bénéficié à 108 pays avec une somme de 18 milliards de dollars.  En outre, le Koweït a octroyé une somme d’1,3 milliard de dollars pour l’aide humanitaire en Syrie.

M. PHILLIP TAULA (Nouvelle-Zélande) a prévenu qu’on ne saurait attendre de l’assistance humanitaire que, pendant des années voire des décennies, elle se substitue aux vrais responsables de la fourniture des services sociaux.  Il faut faire plus pour trouver des solutions politiques aux conflits.  Depuis son entrée au Conseil de sécurité, a insisté le représentant, la Nouvelle-Zélande n’a cessé de plaider pour que le Conseil et le système de l’ONU accordent une plus grande attention aux crises émergentes et à la prévention des conflits.  Nous sommes parvenus à un carrefour où nous devons décider de la manière de travailler ensemble pour prévenir les conflits et répondre aux crises humanitaires, a jugé le représentant, en estimant qu’à cet égard, le Sommet d’Istanbul est une occasion « critique » d’apporter de vrais changements positifs, en n’oubliant pas de reconnaître les vulnérabilités et les forces « uniques » des petits États insulaires du Pacifique et d’ailleurs.

Nous devons commencer, a estimé M. INIGO LAMBERTINI (Italie), par aider les plus vulnérables, en plaçant les besoins humanitaires au centre de l’agenda international et de notre action.  L’Italie l’a fait face à la crise des réfugiés, en faisant du sauvetage de la vie en mer sa priorité.  Elle continuera à le faire dans chaque aspect de son engagement international.  Placer les besoins humanitaires au centre de l’agenda international, s’est expliqué le représentant, veut dire que s’assurer que le droit international humanitaire est respecté, que la coopération et l’assistance avancent de pair et que l’aide est taillée sur le contexte local dans une approche inclusive, que les femmes, les enfants et les handicapés sont mieux protégés et que la fragilité est remplacée par la résilience.  À cette fin, le représentant a dit attendre beaucoup du Sommet d’Istanbul.  Il est clair, a-t-il conclu, que des efforts doivent aussi être déployés pour traiter des causes profondes de ces crises humanitaires trop souvent déclenchées par les conflits armés et la violence humaine.  Ce qui doit nous conduire à privilégier des solutions durables et pour le long terme, sachant que le coût de l’inaction est tout simplement plus élevé: d’autres gens affectés par les crises, plus souvent et plus longtemps.

M. YAROSLAV GOLITSYN (Ukraine) a souligné que son pays est devenue récipiendaire de l’aide humanitaire après l’occupation de la péninsule de la Crimée par la Fédération de Russie et son agression militaire dans les régions de l’est.  L’Ukraine fait tout pour venir en aide aux populations affectées dont 1,5 million de déplacés dans la région du Donbass.  Le représentant a rappelé les Accords de Minsk, en particulier l’article 7 sur l’accès humanitaire, qui n’ont jamais été mis en œuvre ni par la Fédération de Russie ni par les « LNR » et les « DNR ».  D’août 2014 à novembre 2015, la Fédération de Russie a envoyé 46 « prétendus » convois humanitaires sans le consentement des autorités ukrainiennes et sans une coordination avec le Comité international de la Croix Rouge.  Le représentant a aussi jugé « inacceptables » les récentes tentatives des groupes armés illégaux de refuser l’accès humanitaire dans certaines régions d’Ukraine qui échappent au contrôle du Gouvernement.

L’Ukraine, a rappelé le représentant, commémorera le trentième anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl en 2016.  Avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), de sérieux efforts ont été faits pour rétablir l’autosuffisance des communautés affectées, en se fondant sur « l’approche développement ».  Le rapport pertinent du Secrétaire général dit d’ailleurs, s’est enorgueilli le représentant, que cette approche pourrait servir de guide dans d’autres situations d’urgence similaires.  Le représentant s’est dit convaincu que la convocation d’une réunion thématique de l’Assemblée générale sur ce trentième anniversaire pourrait faire avancer les choses dans ce sens.  Il a donc réitéré la demande de son pays pour qu’une telle réunion se tienne.

M. CEYUN ERCIYES (Turquie) a appuyé l’idée selon laquelle le système international humanitaire actuel ne peut plus faire face à des crises de plus en plus multidimensionnelles et complexes, leur grande majorité étant liée à des conflits.  Comme l’a montré le dernier exode tragique des réfugiés et des migrants, les crises dépassent de plus en plus les frontières.  Avec ses 3,5 milliards de dollars d’aide publique au développement (APD) et ses 1,6 milliard d’assistance humanitaire, la Turquie a porté un « fardeau formidable » dans cette responsabilité commune.  Il faut, a insisté le représentant, que les donateurs émergents entrent dans la danse et que les donateurs traditionnels se montrent plus généreux.  Le Sommet d’Istanbul arrive donc à point nommé, s’est réjoui le représentant.

Pour la Turquie, le Sommet doit, compte tenu de la complexité des crises, renforcer le nexus « aide humanitaire et développement ».  Le Sommet doit aussi donner lieu à des modèles et modalités bien définis pour faciliter la coordination des agences de l’ONU sur le terrain mais aussi entre elles et les autres parties prenantes.  À la veille du Sommet, il faut se focaliser sur de nouveaux modes de financement au niveau mondial.  Le Sommet doit enfin identifier des mesures sur la question des réfugiés, y compris la situation des pays d’accueil. 

Mme SADIA FAIZUNNESA (Bangladesh) a jugé, à son tour, que le « domaine humanitaire » doit examiner les causes profondes qui ont eu un impact négatif sur l’efficacité de l’aide humanitaire.  Le développement est le meilleur remède aux crises, y compris les déplacements de population.  La pauvreté, le sous-développement et les inégalités doivent être traités de manière holistique afin de renforcer la résilience et réduire la dépendance à l’aide humanitaire.  Il est impératif que le système des Nations Unies et la communauté internationale travaillent avec les États Membres pour renforcer davantage la coopération et la coordination parmi tous les acteurs humanitaires pour que leur réponse soit neutre, plus rapide, opportune, plus efficace et plus ciblée.  La représentante a prévenu que réaffecter des fonds « essentiels » qui étaient destinés à l’aide au développement pourrait perpétuer les défis que la communauté internationale s’est engagée à relever dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  La représentante a donc fermement appuyé l’appel du Secrétaire général pour que la communauté relève les défis humanitaires sans pour autant renoncer à son engagement en faveur d’une APD « vitale ».  Les ressources pour un secteur ne sauraient être mobilisées au détriment d’un autre secteur.  « Aider les gens devrait être un jeu à somme nulle », a insisté la représentante. 

Il nous faut 20,1 milliards de dollars, a rappelé M. MICHAEL GRANT (Canada).  Plus de 87 millions de personnes ont besoin d’aide et nous sommes aux prises avec une crise du déplacement de population d’une ampleur « exceptionnelle ».  Si, les 10 dernières années nous ont habitués à des records sinistres, les défis humanitaires de l’heure sont tout simplement « stupéfiants », a commenté le représentant.  Si l’on espère atténuer un jour les souffrances dans le monde, il faut mettre fin aux conflits, a-t-il dit.  Les États Membres, réunis dans cette salle, ont le pouvoir d’exiger des solutions politiques, le respect des règles et la reddition de comptes.  Ils peuvent user de leur pouvoir de négociation pour mettre fin aux conflits.  Mais le monde est aussi en proie aux phénomènes météorologiques, a poursuivi le représentant et, face à ces situations, les États qui espèrent avoir une influence dans le monde doivent augmenter leur apport, car pour être satisfaits, les besoins humanitaires nécessitent une participation accrue et généralisée.  Le représentant s’est félicité des résolutions de cette année mais il s’est dit « consterné » de voir que de nombreux États semblent peu disposés à s’attaquer aux difficultés les plus pressantes, à savoir les entraves à l’accès humanitaire et le non-respect généralisé du droit international humanitaire.  Il s’est donc réjoui du Sommet d’Istanbul pour « ranimer la flamme de l’action humanitaire ». 

M. SUH SANGPYO (République de Corée) a souligné les points importants pour son gouvernement et d’abord l’importance qu’il y a à faire des populations les plus vulnérables, comme les femmes, les enfants et les réfugiés, une priorité.  L’initiative « Better Life for Girls » qui vient d’être annoncée par la Présidente de la République de Corée est un effort « remarquable » à cet égard.  La République de Corée pense aussi que l’utilisation des nouvelles technologies et de l’innovation est « essentielle » pour fournir une éducation de qualité aux filles et garçons dans les urgences humanitaires.  Le Gouvernement coréen veut aussi un meilleur alignement entre l’aide humanitaire et l’aide au développement, ce qui est impératif pour éviter les crises récurrentes grâce au renforcement de la résilience aux niveaux national et local.  Les approches à long terme, y compris les programmes d’aide humanitaire et de développement complémentaires contribueront à une transition sans heurt de la phase des secours au développement et à une utilisation efficace des ressources limitées. 

Concernant le Sommet d’Istanbul, la République de Corée demande au système humanitaire de l’ONU à s’engager davantage avec les États Membres et les autres parties prenantes pour que ce Sommet « historique » soit une véritable étape pour « re-inspirer et revigorer l’humanitarisme mondial ». 

Mme JEANNE D’ARC BYAJE (Rwanda) a concentré son intervention sur l’assistance aux survivants du génocide de 1994.  Chaque année la communauté internationale se joint au Rwanda pour commémorer les victimes de ce terrible génocide du XXe siècle.  Au cours de ces 20 dernières années les survivants ont fait des progrès remarquables pour reconstruire leur vie.  Cependant, se relever de ce traumatisme est un processus au long cours et malgré l’affectation de 5% du budget national, le Fonds de soutien fait face à de graves difficultés.  Alors que ce génocide s’éloigne dans le passé, il devient plus difficile de répondre aux besoins car la population pense avoir surmonté l’horreur.  Le défi pour les jeunes est de trouver un emploi durable car ils sont dans leur majorité les chefs de famille.  La représentante a fait part des efforts déployés pour l’accès au microcrédit, par exemple.  Elle a demandé aux États Membres et à la communauté internationale de s’engager de nouveau dans « le plus jamais ça ».

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a jugé que l’action humanitaire était des plus nobles à condition qu’elle ne soit motivée que par des préoccupations humanitaires et qu’elle reste conforme aux lignes directrices dont le respect de la souveraineté nationale de l’État concerné et l’absence de toute politisation.  La voie pour résoudre ces crises humanitaires réside dans la résolution des conflits.  Il s’agit de les résoudre et non de les manipuler pour les prolonger et exercer des pressions politiques sur les gouvernements, et les contraindre à des concessions au profit du plus fort.  Le représentant a affirmé que la raison principale de la crise en Syrie et son aggravation tient aux actes terroristes des groupes armés.  La Syrie regrette donc que la résolution ne fasse aucune référence au terrorisme malgré ses demandes répétées. 

Le représentant a jugé « paradoxal » que certains coauteurs, qui prétendent lutter contre le terrorisme, soient précisément ceux qui ont refusé cette référence.  Ignorer le terrorisme et la nécessité de le combattre ont encouragé son expansion « hystérique » comme la Syrie l’a toujours dit.  C’est ce qui a conduit à l’explosion de l’avion russe au-dessus du Sinaï et ce qui a conduit aux autres attentats.  Le règlement de la crise en Syrie nécessite les efforts de tous les États de la région et du monde.  Il exige que l’on tienne pour responsables ceux qui financent, forment et abritent les groupes terroristes.  Le représentant a montré du doigt les pays qui participent à l’effusion de sang en Syrie tout en prétendant participer aux efforts humanitaires.  Il a cité Israël, qui occupe le Golan et finance, selon lui, le Front el-Nosra.  Le représentant a aussi regretté que la résolution ne mentionne pas le fait que les sanctions unilatérales, sans précédent, ont aggravé la situation dans son pays.

Le Gouvernement syrien attend beaucoup du premier Sommet mondial sur l’action humanitaire, mais il faut que ce Sommet traite des causes sous-jacentes des crises et de leur aggravation.  Ce Sommet doit aussi traiter de la distribution de l’aide humanitaire qui se fait à travers les frontières sans tenir compte des autorités nationales et le plus souvent au profit des groupes terroristes.  Le Sommet doit être un « espace transparent » et non un podium pour défendre des agendas politiques.  Le représentant a regretté le choix d’Istanbul pour tenir le Sommet alors que la Turquie facilite l’entrée des terroristes en Syrie et autorise le trafic des biens culturels.  Comment peut-on charger le Gouvernement turc d’accueillir ce premier Sommet alors qu’il participe à l’effusion de sang en Syrie? s’est énervé le représentant qui n’a pas manqué non plus de dénoncer l’Arabie saoudite et le Qatar.

Non seulement les ressources humanitaires ne croissent pas au même rythme que les besoins, mais, de plus, il nous faut renforcer l’aide au développement pour réaliser les objectifs de développement durable et augmenter le financement pour combattre les changements climatiques, a constaté M. HIROSHI MINAMI (Japon).  À cette fin, il a préconisé de nouvelles approches, comme élargir la base des donateurs ou recourir à des fonds nationaux.  En outre, il faut se pencher sur les causes profondes des crises humanitaires et trouver des solutions politiques aux crises liées à des conflits prolongés.  Le Conseil de sécurité n’a pas été en mesure de trouver les solutions voulues, a regretté M. Minami, rappelant que son pays sera membre non permanent de cet organe à compter de 2016.  La troisième Conférence mondiale des Nations Unies sur la réduction des risques de catastrophe, qui a eu lieu à Sendai en mars dernier, a mis l’accent sur la préparation aux situations d’urgence, a-t-il rappelé.  Par ailleurs, il a souhaité que le Secrétariat continue de « clarifier ce qui est attendu du Sommet humanitaire mondial », qui se tiendra à Istanbul en mai 2016.

M. DAVID ROET (Israël) a souligné que l’aide humanitaire d’Israël ne porte pas seulement sur les pays éloignés.  Malgré la menace constante des tirs à la roquette à partir de Gaza, contrôlé par le Hamas, Israël fait tout son possible pour aider à la reconstruction de Gaza.  Le pays travaille étroitement avec les Nations Unies pour faciliter le Mécanisme de reconstruction de Gaza.  À ce jour, 267 des 471 projets ont été approuvés et 2 832 maisons ont été reconstruites.  Israël a renforcé la capacité des points de passage de Kerem Shalom et d’Erez, ce qui fait qu’aujourd’hui 850 camions peuvent passer par jour.  Quelque 2,6 millions de tonnes de matériaux ont été transférés à Gaza.  Malgré tout cela, la pleine reconstruction n’interviendra que lorsque l’Autorité palestinienne aura assumé un rôle plus substantiel à Gaza, a estimé le représentant. 

Nous avons entendu dans cette salle, a-t-il poursuivi, des délégations blâmer Israël et douter de ses actions mais nous n’avons pas entendu une seule fois de réponse à la question de savoir pourquoi l’Autorité palestinienne continue de fuir ses responsabilités et d’éviter de reprendre la gouvernance de Gaza.  Ces trois derniers mois, des Israéliens ont été poignardés dans les rues, ciblés par des balles en rendant au travail et attaqués par des voitures aux arrêts de bus.  Malgré ces actes quotidiens d’horreur et les incitations de l’Autorité palestinienne, Israël poursuit son assistance humanitaire au peuple palestinien et continue à travailler à des institutions palestiniennes plus fortes et à une économie dynamique.  L’aide humanitaire n’apportera ni la paix ni la prospérité aux Israéliens et aux Palestiniens.  Nous appelons, a conclu le représentant, l’Autorité palestinienne à reprendre les négociations directes, la seule voie vers une solution durable au conflit.

M. AJAY MADIWALE, Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, a jugé que les arrangements et les modèles actuels ne sont pas suffisants pour répondre aux besoins humanitaires.  Il est indispensable de prendre en compte les besoins de développement pour accroître la résilience des populations comme l’ont soutenu plusieurs accords-cadres cette année à Sendai, à Addis-Abeba ou même dans les négociations de la Conférence de Paris sur le climat qui se tient en ce moment.  Le principe de ne laisser personne derrière est fermement consacré dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030 mais il ne concerne pas les personnes déjà piégées par les conflits.  On a besoin d’un engagement plus fort de la communauté mondiale pour assister les pays d’accueil.  Le Liban, la Jordanie et la Turquie devraient avoir accès aux fonds d’investissements et autres instruments financiers pour obtenir des prêts préférentiels.  Par ailleurs, s’ils ne sont pas pris en compte, les changements climatiques deviendront le plus grand pourvoyeur de personnes en besoin d’aide humanitaire.  Si nous sommes tous d’accord que la prévention est préférable à la cure, le financement de la réduction des risques de catastrophe n’est pas pour autant adéquat.  Aujourd’hui la Fédération, le Comité international de la Croix-Rouge et leurs partenaires sont réunis à Genève pour des discussions qui auront un impact sur l’assistance humanitaire.  La Fédération va ainsi y annoncer le versement d’une somme d’un milliard de dollars pour la résilience de communautés. 

M. PHILLIP SPOERRI, Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a rappelé qu’une grande partie des souffrances qu’endurent les populations résultent du non-respect flagrant du droit international humanitaire par les parties étatiques et non étatiques aux conflits armés.  Il leur incombe de protéger les civils qui se trouvent sous leur contrôle et de veiller à répondre à leurs besoins essentiels.  Il faut de toute urgence que les autres États insistent individuellement et collectivement auprès des parties aux conflits sur la nécessité pour elles de respecter leurs obligations juridiques, notamment celles qui régissent l’accès des organisations humanitaires impartiales.

Le représentant a ajouté qu’il faut des efforts supplémentaires pour renforcer l’efficacité de l’action humanitaire.  En dépit des initiatives importantes qu’a prises la communauté humanitaire ces dernières années dans le domaine de la coordination, le manque d’accès et de sécurité reste un obstacle majeur à la fourniture efficace d’une assistance et d’une protection humanitaires.  Il a indiqué que la question de savoir comment mieux intégrer et promouvoir les initiatives locales dans l’action humanitaire mériterait d’être examinée et cernée de près.  À cet effet, le CICR a adopté une approche qui consiste à renforcer les capacités des Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, à soutenir les services médicaux locaux et à former les forces armées au droit international humanitaire. 

L’action humanitaire doit être planifiée et financée en corrélation plus étroite avec la planification et le financement en faveur du développement, a plaidé le représentant.  Le CICR et d’autres organisations humanitaires mènent toujours plus fréquemment des activités liées au développement en apportant un appui aux services de base.  Les moyens consacrés au développement étant insuffisants, les personnes qui dépendent de ces organisations pour survivre se comptent en millions.  Le représentant a également déclaré que les organisations humanitaires et les organisations de développement doivent apprendre à travailler ensemble d’une façon qui permette de mieux répondre aux besoins de leurs bénéficiaires. 

Il est en outre essentiel de reconnaître que le système international humanitaire repose sur trois piliers distincts, à savoir les organismes des Nations Unies, le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et les ONG, et que chacun de ces piliers a ses propres forces et faiblesses.  Il conviendrait non pas d’apparenter ces piliers les uns aux autres, en les encourageant à travailler de la même manière et dans les mêmes domaines, mais de mettre à profit leurs forces respectives.  Le CICR espère que le résultat des délibérations en cours et le Sommet humanitaire mondial à venir permettront d’apporter des améliorations concrètes dans le quotidien des millions de personnes qui sont victimes de conflits armés chaque année.  

Droit de réponse

Le représentant de la Turquie a rejeté les accusations de la Syrie dont le représentant a, selon lui, perdu toute légitimité.  La Turquie œuvre à des fins humanitaires et continuera de se tenir au côté du peuple syrien, a-t-il assuré.

Présentant le projet de résolution sur « un monde contre la violence et l’extrémisme violent » A/70/L.21, M. G. KHOSHROO (Iran) a expliqué que ce texte est le suivi et la mise à jour d’une résolution que l’Iran a eu « la fierté » de présenter en 2013, avant son adoption par consensus.  Le dialogue, la modération, la tolérance et les droits de l’homme sont les antidotes les plus efficaces contre l’extrémisme violent qui essaye de déformer les religions et de pervertir l’esprit humain pour l’amener à la mort et à la destruction.  Parmi ces éléments nouveaux, le projet de résolution rappelle et réaffirme les mesures prises aux niveaux national et multilatéral.   

Explications de position

Après l’adoption de la résolution, le représentant d’Israël a dit soutenir l’idéal et la teneur louable de cette résolution.  Le problème n’est pas le message mais le messager car pour l’Iran qui demande qu’on mette un terme à la violence, c’est « comme si un ventriloque demandait à sa marionnette de se taire ».  Il y a un mot pour ça, « l’hypocrisie ».  Le représentant a dénoncé l’audace de l’Iran qui pend les homosexuels, punit les femmes, et emprisonne les journalistes.  La résolution va plus loin et souligne l’importance vitale du respect de la vie.  Or, a encore commenté le représentant, l’Iran a exécuté plus de 700 de ses citoyens rien qu’au premier semestre de 2015 dont au moins deux enfants, soit deux exécutions par jour, une hausse par rapport à 2014.

La résolution affirme la promotion et le respect des droits de l’homme et condamne les violences à l’encontre des femmes, mais en Iran, elles sont contraintes de porter le hidjab en public et peuvent être arrêtées par la police des moeurs.  Le Forum économique mondial a placé l’Iran au 141e rang pour la protection de la femme, soit le pire score.  La résolution souligne le droit d’utiliser les réseaux sociaux et les nouveaux moyens de communication alors qu’en Iran, les bloggeurs sont condamnés et leurs sites bloqués, sans compter la fermeture de Twitter, Youtube et Facebook.

Le fait que « toute honte bue », l’Iran présente cette résolution ne peut masquer que ce pays représente le contraire de ce qu’il prétend défendre dans cette résolution.  Sa main déstabilisatrice peut être retrouvée dans toute la région.  Ses gardes révolutionnaires soutiennent le régime d’Assad.  L’Iran sème les graines de la terreur et entend détourner l’attention de l’Assemblée générale.

Le représentant du Canada a exhorté tous les États, en particulier l’auteur de la résolution, à respecter leurs obligations internationales et les objectifs de la résolution, y compris les droits de la femme, des minorités ethniques et de toutes les communautés religieuses.

Son homologue des États-Unis a dit appuyer toute initiative visant à lutter contre l’extrémisme violent.  Mais la lutte contre l’État islamique ne se fait pas seulement sur le plan militaire, il faut aussi des mesures économiques et sociales car les groupes extrémistes exploitent ces problèmes pour recruter leurs membres.  Nous sommes inquiets que certains gouvernements s’opposent à la démocratie, à la liberté d’expression et aux droits de l’homme car c’est ce que les citoyens peuvent en jouir pour se prémunir de l’extrémisme violent, a déclaré la représentante.

Droits de réponse

Le représentant de l’Iran a répondu à son homologue d’Israël pour dénoncer « des allégations infondées, une série de mensonges ».  Il a stigmatisé « la colère de ce régime » et « un discours de haine » de la part d’un régime qui impose des pratiques très dures et qui a été condamné à maintes reprises pour cela.  Un régime, a poursuivi le représentant, qui mène une politique extrémiste violant les normes et principes du droit international.  Il ne fait aucun doute que l’occupation, les souffrances, les humiliations endurées par le peuple israélien depuis si longtemps et les atrocités commises par les Israéliens sont une source d’amertume que les extrémistes ont toujours exploités.

Le représentant de la République arabe syrienne a aussi répondu à son homologue d’Israël, en particulier sur les accusations de coopération de l’Iran avec la Syrie.  Il l’a renvoyé à ses pratiques dans le Golan occupé et le territoire palestinien, raisons principales, selon lui, du terrorisme et de l’extrémisme dans la région.  Il lui a conseillé d’appliquer les résolutions du Conseil de sécurité l’appelant à mettre fin à l’occupation du Golan syrien.  

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