Assemblée générale: la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales doit s’appuyer sur la complémentarité et les avantages comparatifs
L’Assemblée générale a tenu aujourd’hui son débat de haut niveau sur le renforcement de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales au cours duquel la complémentarité et les avantages comparatifs ont été présentés par les participants, dont le Président de l’Ouganda, comme les ingrédients d’une bonne coopération.
Compte tenu de la connaissance approfondie qu’elles ont de leur région, les organisations régionales et sous-régionales, a argué le Président de l’Assemblée générale, M. Sam Kutesa, sont positionnées, « de manière unique », pour comprendre les dynamiques locales et les causes sous-jacentes des défis qu’il s’agisse de ceux liés à la paix et à la sécurité ou au développement. Il m’arrive de vous demander des ressources, une action diplomatique ou collective, ou encore votre solidarité pour faire avancer nos valeurs communes, a reconnu le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, qui vient d’organiser le week-end dernier une retraite avec certains chefs d’organisations régionales et sous-régionales. Nous avons, a-t-il confié, analysé sans concession les défis auxquels nous sommes confrontés et renouvelé notre détermination à trouver des solutions ensemble, a dit M. Ban qui s’est réjoui des lignes de communication ouvertes, des stratégies communes, des programmes conjoints, de la nouvelle dimension des relations et de la capacité renforcée de servir les peuples du monde.
Il faut faire plus, a estimé le Président de l’Ouganda, M. Yoweri Museveni, dont le pays préside cette session de l’Assemblée générale. Le point de départ d’une bonne coopération entre l’ONU et les organisations régionales, a-t-il argué, est la confirmation du principe de complémentarité contenu dans le Chapitre VIII de la Charte. La complémentarité, a-t-il expliqué, signifie que l’ONU et les organisations régionales, qui ont leurs forces et leurs faiblesses, se complètent. Il faut que l’ONU, a renchéri le Secrétaire général de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), M. Iyade Ameen Madani, ne soit plus considérée comme « une star » autour de laquelle les autres planètes gravitent mais comme le fil qui doit se joindre aux autres pour tisser « le tapis de notre communauté mondiale ». Mais, a-t-il mis en garde, ce fil qu’est l’ONU, cette arène importante, ne doit plus s’appuyer sur une classe privilégiée de pays élus, « le club des aristocrates ». Il faut un mécanisme où le collectif surmonte l’unilatéral.
L’ONU devrait saluer le fait que le XXIe siècle donne naissance à des institutions régionales plus fortes et plus responsables, consolidant ainsi un monde multipolaire où le dialogue et la paix sont de plus en plus urgents, a commenté, à son tour, le représentant du Système d’intégration d’Amérique centrale (SICA). Le Vice-Président de la Commission de l’Union africaine, M. Erastus Mwencha, a jugé urgent de développer une vision stratégique commune soutenue par une compréhension commune pour renforcer et mieux coordonner les actions de prévention des conflits. La Commission de consolidation de la paix devrait devenir un véritable partenaire stratégique de l’Union africaine et des commissions économiques régionales, a-t-il suggéré.
La complémentarité, a expliqué le Président ougandais, requiert un processus consultatif de prise de décisions, le partage du fardeau de la paix et de la sécurité internationales, une division du travail fondée sur les avantages comparatifs et le respect des processus régionaux. Le Président a insisté sur ce respect: si les membres du Conseil de sécurité, qui ont décidé d’une action militaire contre la Libye, avaient écouté la voix de l’Afrique, le chaos actuel dans ce pays mais aussi au Nigéria, au Mali et dans la Méditerranée aurait pu être évité.
À propos du « chaos » dans la Méditerranée, le Secrétaire général du Service d’action extérieure de l’Union européenne a rappelé que depuis l’incident dramatique du 17 avril dernier, les chefs d’État et de gouvernement européens ont adopté un plan et des mesures substantielles qui devraient faire immédiatement la différence dans le problème de la traite des personnes. C’est l’intérêt commun de tous les pays de la Méditerranée, du Sahel et de l’Afrique de l’Est. C’est un problème humanitaire, mais aussi un problème sécuritaire et politique qui demande des efforts conjoints avec nos partenaires de l’Union africaine et de la Ligue des États arabes, a-t-il dit.
La consolidation de la coopération entre les organisations régionales et sous-régionales elles-mêmes a été également soutenue par le Ministre délégué aux affaires étrangères, de la Francophonie et de l’intégration régionale du Gabon, M. Dieudonné Nzengue. Les partenariats interrégionaux comme celui entre l’Union africaine et l’Union européenne pourraient favoriser l’allègement des tâches confiées à l’ONU, a-t-il estimé, en se félicitant de la volonté des Communautés économiques des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et d’Afrique centrale (CEEAC) de conjuguer leurs efforts pour lutter contre Boko Haram et en souhaitant la multiplication de tels partenariats. L’OCI vient d’ailleurs de signer un Mémorandum d’accord avec l’Union africaine sur la mise en œuvre de projets contre le terrorisme et l’extrémisme grâce à un don saoudien de 10 millions de dollars, a annoncé son Secrétaire général.
Ce qu’il nous faut, a dit le Président de l’Ouganda, c’est en effet l’appui financier et logistique de la communauté internationale. L’ONU a le devoir d’appuyer les organisations régionales, conformément à la Charte. Il a soutenu l’idée de ponctionner le budget de l’ONU pour financer les opérations de maintien de la paix régionales, estimant que les fonds d’affectation spéciale sont peu fiables et imprévisibles compte tenu de leurs contributions volontaires.
Dans l’optique de la mise en œuvre du programme de développement pour l’après-2015, la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales devrait aussi impliquer la société civile, a estimé le Sous-Secrétaire général de l’Organisation des États américains (OEA), M. Albert Ramdin. Peut-être pourra-t-on ainsi éviter le « paradoxe du cappuccino » concernant les trois piliers du développement durable? Le Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) a décrit ce paradoxe comme celui dans lequel l’économie est l’élément le plus important (le café), le social venant ensuite (le lait), saupoudré d’environnemental (le chocolat).
Dans sa déclaration de clôture, le Président de l’Assemblée générale a annoncé que le fruit de cette journée sera une « déclaration politique » qui devrait être adoptée demain, mardi 5 mai, par l’Assemblée générale.
DÉBAT THÉMATIQUE DE HAUT NIVEAU SUR LE RENFORCEMENT DE LA COOPÉRATION ENTRE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES ET LES ORGANISATIONS RÉGIONALES ET SOUS-RÉGIONALES
Déclarations
En ouvrant le débat thématique de haut niveau, M. SAM KUTESA, Président de l’Assemblée générale de l’ONU, a salué le fait que 25 organisations régionales et sous-régionales aient désormais établi des relations officielles avec l’ONU. Il leur a demandé comment renforcer ces partenariats stratégiques importants. Que faut-il faire pour renforcer leurs capacités dans les domaines de la prévention et du règlement des conflits, du maintien et de la consolidation de la paix, et de la promotion de l’état de droit, des droits de l’homme et du développement. Comment faire pour que ces organisations jouent effectivement un rôle dans la mise en œuvre du programme de développement pour l’après-2015?
Compte tenu de la connaissance approfondie qu’elles ont de leur région, ces organisations, a poursuivi le Président, sont positionnées, de manière unique, pour comprendre les dynamiques locales et les causes sous-jacentes des défis. Après avoir donné plusieurs exemples d’une coopération réussie entre l’ONU et des organisations, le Président a reconnu qu’il faut faire beaucoup plus pour renforcer ladite coopération, en tirant les enseignements de l’expérience pour créer des arrangements plus novateurs et plus souples. Certaines de ces organisations, a–t-il souligné, continuent de souffrir d’un manque de ressources financières et logistiques et il nous revient de trouver les moyens de leur assurer un financement prévisible et durable, en particulier quand elles mènent des opérations de maintien de la paix sous le mandat de l’ONU, a tranché le Président.
M. BAN KI-MOON, Secrétaire général de l’ONU, a indiqué que ce week-end même, il a organisé une retraite avec les chefs d’un certain nombre d’organisations régionales et sous-régionales pour renforcer la coopération dans les domaines de la paix et de la sécurité. Nous avons analysé sans concession les défis auxquels nous sommes confrontés et nous avons renouvelé notre détermination à trouver des solutions ensemble, a-t-il révélé. 2015, a rappelé le Secrétaire général, est une étape importante, avec la fin des Objectifs du Millénaire pour le développement, l’adoption du programme de développement durable et la conclusion d’un accord neuf et universel sur le climat.
Les partenaires régionaux, a estimé le Secrétaire général, ont déjà amélioré notre efficacité mais nous devons faire plus pour répondre aux cris des millions de personnes qui méritent dignité et équité. M. Ban a reconnu que très souvent, en temps de crise, il fait appel aux chefs des organisations régionales. Il m’arrive, s’est-il expliqué, de vous demander des ressources, une action diplomatique ou collective, ou encore votre solidarité pour faire avancer nos valeurs communes. Avec votre engagement, nous avons atteint de réels résultats et la collaboration entre l’ONU et ses partenaires régionaux est plus riche et plus diverse que jamais auparavant.
Le Secrétaire général a attiré l’attention sur les lignes de communication qui ont été établies, les stratégies communes, les programmes conjoints, la nouvelle dimension des relations et la capacité renforcée de servir les peuples du monde. Dans la prévention des conflits et la médiation, a-t-il poursuivi, nous avons montré comment le travail commun augmente notre pouvoir de persuasion pour obtenir des parties qu’elles fassent la paix. Notre partenariat dans le maintien de la paix a renforcé l’appui des Nations Unies, en particulier aux opérations conduites par l’Afrique sur le terrain.
Les organisations régionales, a conclu le Secrétaire général, contribuent à donner forme au programme de développement pour l’après-2015 et il faut compter sur elles pour aider le monde à réaliser les objectifs de développement durable. Notre partenariat a aussi renforcé les efforts collectifs en faveur des droits de l’homme et des valeurs de la Charte de l’ONU. Les citoyens du monde sont mieux connectés et mieux informés. Nous leur devons d’être à la hauteur des défis avec une ligne de communication ouverte, une force de concentration et un engagement collectif en faveur des droits de l’homme, du progrès et d’une paix durable, a encore dit le Secrétaire général.
Alors que la Charte consacre la coopération entre l’ONU et les organisations régionales, a déclaré M. YOWERI MUSEVENI, Président de l’Ouganda, elle réserve au seul Conseil de sécurité le droit d’autoriser le recours à la force. En réalité, a dénoncé le Président, les décisions ne sont vraiment prises que par ceux qui sont dotés du droit de veto et c’est là une erreur qui a déjà causé beaucoup de mal à l’Afrique. Il a cité l’exemple de la Libye où la voix de l’Afrique a été ignorée, conduisant à « une hémorragie massive ». Si les membres du Conseil de sécurité, qui ont décidé d’une action militaire contre la Libye, avaient écouté la voix de l’Afrique, le chaos actuel dans ce pays mais aussi au Nigéria, au Mali et dans la Méditerranée aurait pu être évité. Après tout Kadhafi recrutait beaucoup de main-d’œuvre africaine, a argué le Président qui a jugé « présomptueux » pour les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de se dire responsables de la sécurité mondiale, alors qu’ils ne représentent que 1,9 milliard des 7 milliards d’habitants de la planète.
Le Président ougandais a estimé que le point de départ de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales doit être la confirmation du principe de complémentarité contenu dans le Chapitre VIII de la Charte, comme étant la base. Les Nations Unies doivent respecter les processus engagés par les organisations régionales en matière de règlement des conflits. L’approche qui consiste « par tradition et superficialité » à mettre l’accent sur la justice au détriment d’une paix durable porte en elle les germes de l’échec, a estimé le Président. L’ONU ne devrait pas suivre « aveuglément » l’option des sanctions et de la saisine de la Cour pénale internationale (CPI), sans consulter les régions concernées, étant donné que cette option compromet bien souvent le processus même de règlement du conflit.
Nous devons, a estimé le Président, parvenir à une acception commune du concept de complémentarité. Pour les Africains, il signifie que l’ONU et les organisations régionales, qui ont leurs forces et leurs faiblesses, doivent se compléter. La complémentarité requiert le partage du fardeau de la paix et de la sécurité internationales, un processus consultatif de prises de décisions, le respect des processus régionaux et une division du travail fondée sur les avantages comparatifs.
« Des solutions africaines aux problèmes africains », a insisté le Président, fustigeant la lenteur des processus à l’ONU. La crise au Soudan du Sud a commencé en 2013 et le Conseil de sécurité en discute toujours. Si les pays de la région n’avaient pas agi, nous aurions un autre génocide comme celui que la région aurait pu stopper en 1994, si la communauté internationale ne lui avait pas mis des bâtons dans les roues, a affirmé le Président. Ce qu’il nous faut, a-t-il dit, c’est l’appui financier et logistique de la communauté internationale. Face à une crise, il faut laisser faire les nationaux, puis en cas de difficulté, les régionaux, et en tout dernier recours les internationaux, a argué le Président, en illustrant sa stratégie par le succès, « dans une certaine mesure », de la Brigade d’intervention en RDC.
L’ONU, a insisté le Président, a le devoir d’appuyer les organisations régionales, conformément à la Charte. Il a soutenu l’idée de ponctionner le budget de l’ONU pour financer les opérations de maintien de la paix régionales, estimant que les fonds d’affectation spéciale sont peu fiables et imprévisibles compte tenu de leurs contributions volontaires.
Le Président a conclu sur deux points et d’abord « la désorientation idéologique » qui s’illustre par le sectarisme et le chauvinisme contre lesquels la communauté internationale doit lutter comme elle l’a fait contre l’antisémitisme. Il a enfin appelé à « l’orientation idéologique » soit la discipline des forces locales, régionales et internationales que le système de l’ONU utilise pour maintenir ou rétablir la paix. Si la question de la discipline n’est pas prise au sérieux, nous risquons de devenir une partie du problème plutôt que de la solution, a mis en garde le Président ougandais.
M. FREDERICK A. MITCHELL, Ministre des affaires étrangères et de l’immigration des Bahamas, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a, à la vielle de la troisième Conférence internationale sur le financement du développement, estimé que de nouvelles approches sont devenues nécessaires. Il a expliqué que les pays de la CARICOM sont particulièrement affectés par leur nouveau statut de pays à revenu intermédiaire, basé sur le revenu par habitant. Or, ce statut bloque l’accès aux dons et aux financements concessionnels, alors que les effets de la crise financière et économique mondiale résonnent toujours dans la région et que les pays sont piégés par un fardeau de la dette particulièrement lourd. Il ne fait aucun doute, a argué le Ministre, que le revenu par habitant seul est une mesure « inadéquate » du niveau de développement, surtout dans une région vulnérable aux catastrophes naturelles et au changement climatique, y compris l’élévation du niveau de la mer.
Nous l’avons répété et nous ne le soulignerons jamais assez: lutter contre le changement climatique et l’élévation du niveau de la mer est unequestion de priorité et une question de survie pour les pays de la CARICOM. Le Ministre a dit attendre beaucoup de la onzième Conférence des États parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques prévue à Paris au mois de septembre et qui, a-t-il dit, doit trouver un accord contraignant sur la stabilisation de la température moyenne terrestre bien en-deçà de 1,5 degré Celsius.
Le Ministre a appuyé la position des petits États insulaires en développement qui réclament un programme de développement pour l’après-2015 comprenant des mesures globales pour affiner le revenu par habitant comme indicateur de développement. La coopération technique pour renforcer les capacités dans la collecte des données et l’analyse statistique sera essentielle à la mise en œuvre du programme de développement pour l’après-2015, a prévenu le Ministre.
M. GEORGES REBELO PINTO CHIKOTI, Ministre des relations extérieures de l’Angola, au nom de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL), a rappelé que la Conférence a créé un cadre de coopération avec les Nations Unies et d’autres partenaires concernés dans les domaines de la paix et de la sécurité, de la prévention des conflits et du génocide, de la lutte contre la violence sexuelle et l’exploitation illégale des ressources naturelles, des droits de l’homme et du développement. Ce cadre a donné des résultats concrets, a estimé le Ministre qui a cité le Cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région des Grands Lacs, lequel a donné naissance au Mécanisme régional de surveillance. Le Ministre n’a pas caché sa préoccupation face à la situation actuelle au Burundi et a rappelé aux parties que tout différend relatif au processus électoral doit se régler auprès des instances juridiques existantes dans le pays. Le Ministre a en revanche décelé des signes d’espoir en République centrafricaine, avec le Forum de Bangui pour l’organisation duquel l’Angola a débloqué une somme de 4 millions de dollars.
Le Ministre a ensuite fait quelques suggestions et a d’abord demandé une coordination plus efficace au premier stade des crises. Plus tôt nous parviendrons à une compréhension commune de la situation, meilleurs seront les résultats. Il faut donc des échanges d’information plus systématiques, des visites d’évaluation conjointes et des mécanismes souples réunissant les acteurs de la prévention des conflits et de la médiation. Il a aussi souligné que le règlement pacifique des conflits doit rester la norme même s’il a reconnu le succès de la Brigade d’intervention en RDC et la possibilité de répéter l’expérience ailleurs. Le Ministre a également mis l’accent sur la nécessité de renforcer la mobilisation des ressources pour mettre en œuvre les actions agréées. Les organisations régionales et sous-régionales devraient pouvoir, a-t-il poursuivi, pendre la tête des efforts, compte tenu de leur expertise et de leur meilleure compréhension des défis et des dynamiques de leur région. La formation et le renforcement des capacités sont essentiels, a-t-il aussi souligné, en parlant des institutions régionales. Il a enfin appelé les participants à reconnaître que l’absence d’opportunités économiques et l’échec des États à assurer les services essentiels sont les ingrédients de base de l’instabilité politique partout dans le monde.
Mme ANNIKA SODER, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Suède, a estimé que la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales doit être basée sur la confiance et le respect. L’efficacité de cette coopération dépend de la clarification des rôles des uns et des autres et de l’assignation à chaque partie des objectifs. Le Conseil de sécurité se doit de consulter davantage les acteurs régionaux, a reconnu Mme Soder qui a aussi plaidé pour un bon financement des organisations régionales et sous-régionales pour qu’elles puissent jouer leur rôle efficacement. Elle a établi le lien entre paix, sécurité et développement, et a invité la communauté internationale à promouvoir la participation de tous les acteurs de la société, y compris les femmes qui ont un rôle important à jouer en matière de règlement des conflits, a-t-elle affirmé.
M. DIEUDONNÉ NZENGUE, Ministre délégué aux affaires étrangères, de la Francophonie et de l’intégration régionale du Gabon, a, à son tour, estimé que le partenariat entre l’ONU et les organisations régionales doit s’appuyer sur la complémentarité et les avantages comparatifs. Toutefois, pour tirer un meilleur parti des mécanismes régionaux, il faut les accompagner de ressources financières et techniques stables et prévisibles. Le renforcement des capacités est essentiel, en particulier pour des opérations effectuées sous mandat de l’ONU. La coopération doit, a poursuivi le Ministre, s’appuyer une meilleure coordination et communication. Il faut aussi, a-t-il argué, établir des mécanismes conjoints de médiation, de gestion et de règlement des crises cohérents avec des tâches et responsabilités clairement définies. Cette démarche pourrait permettre l’élaboration de politiques convenues entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales et faire face de manière adéquate aux situations de crise. Ces mécanismes conjoints pourraient également permettre la pleine mise en œuvre des politiques régionales mises en place par les Nations Unies.
Le Ministre a aussi milité pour la consolidation de la coopération entre les organisations régionales et sous-régionales elles-mêmes. Les partenariats interrégionaux comme celui entre l’Union africaine et l’Union européenne pourraient favoriser l’allègement des tâches confiées à l’ONU. Le Ministre s’est félicité de la volonté des Communautés économiques des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et d’Afrique centrale (CEEAC) de conjuguer leurs efforts pour lutter contre Boko Haram et a souhaité que de tels partenariats se multiplient.
Mme CARMEN LILIANA BURLACU, Secrétaire d’État aux affaires étrangères de la Roumanie, a déclaré que la participation active de son pays aux activités des organisations régionales et sous-régionales en Europe et en Europe du Sud-Est a représenté et continue de représenter une priorité de la politique extérieure de son gouvernement. Nous considérons que l’Union européenne, l’OTAN, l’OSCE, l’Organisation de la coopération économique à la mer Noire et le Processus de coopération dans l’Europe du Sud-Est ont une contribution majeure à la paix, la sécurité et au développement en Europe. Elle a ajouté que la création d’un cadre pour assurer la complémentarité et la subsidiarité entre les actions des Nations Unies et celles des organisations régionales pourrait contribuer à leur renforcement mutuel, par la mise en commun des ressources à même de réagir vite et avec efficacité en cas de tension ou de conflit. C’était à partir de ces arguments que la Roumanie avait proposé en 2005 un projet de résolution sur ce thème qui a été adopté par consensus par le Conseil de sécurité le 17 octobre 2005 qui dans les 10 années depuis son adoption, a confirmé sa validité.
M. NABIL EL ARABY, Secrétaire général de la Ligue des États arabes, a relevé que la coopération entre la Ligue et l’ONU date des années 1950 et qu’elle couvre aujourd’hui plusieurs domaines. Il a cité en exemple le programme « Building Resources in Democracy, Governance and Elections », plus connu sous son acronyme anglais BRIDGE, et qui est un exemple de coopération entre le Département des affaires politiques de l’ONU, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et les États arabes. Il a ensuite noté que de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité portent sur les questions liées au Moyen-Orient. Il a également fait part de l’engagement de la Ligue des États arabes en faveur du désarmement, appelant de fait au démantèlement de toutes les armes de destruction massive au Moyen-Orient.
Le Secrétaire général a par ailleurs indiqué que la coopération entre son organisation et l’ONU porte aussi sur la protection et l’essor de la femme arabe. Il a appelé à lutter contre le fondamentalisme, ajoutant que la Ligue va organiser, en juin prochain à New York, en coopération avec l’ONU, une conférence sur le rôle des médias dans la lutte contre le terrorisme. Il a en outre souhaité que l’ONU organise et préside régulièrement des réunions avec les organisations régionales et sous-régionales, dans le but de prévenir les conflits et maintenir la paix internationale. Il a enfin rappelé que le 29 mars dernier, la Ligue a décidé de créer une force d’intervention pour le maintien de la paix et de la sécurité.
M. LAMBERTO ZANNIER, Secrétaire général de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a, lui aussi, proposé la création de mécanismes de coordination au niveau du Secrétariat de l’ONU pour rendre plus pragmatique et plus orientée vers les résultats la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales. Il a souhaité que les retraites comme celle que vient d’organiser le Secrétaire général de l’ONU durant ce week-end, se fassent plus régulièrement et que leurs résultats soient opérationnalisés par un suivi systématique. Illustrant la coopération entre l’OSCE et l’ONU par les interventions en Ukraine, mais aussi par les partenariats avec les agences de l’ONU, dans le domaine du terrorisme, entre autres, le Secrétaire général a espéré que le lien entre développement et sécurité aura la place qu’il mérite dans le programme de développement pour l’après-2015. L’OSCE, avec son approche globale de la question de la sécurité et ses nombreuses activités trans-sectorielles, est disposée à continuer de servir de plateforme pour offrir une contribution concrète, sous l’angle de la sécurité, à la mise en œuvre du programme de développement pour l’après-2015, a conclu le Secrétaire général.
Pour que la coopération et les organisations régionales et sous-régionales fonctionnent, a estimé M. IYAD AMEEN MADANI, Secrétaire général de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), il faut que l’ONU ne soit plus considérée comme « une star » autour de laquelle les autres planètes gravitent mais comme le fil qui doit se joindre aux autres fils pour tisser « le tapis de notre communauté mondiale ». Mais ce fil qu’est l’ONU, cette arène importante, ne doit plus s’appuyer sur cette classe privilégiée de pays élus, « le club des aristocrates ». Personne n’ignore la réalité du pouvoir et le poids des affluences et des influences mais la communauté internationale ne saurait se laisser lier par les intérêts, la vision et l’échelle des valeurs d’une seule nation, quel que soit son pouvoir et quelle que soit sa richesse. Il faut un mécanisme où le collectif surmonte l’unilatéral.
Le Secrétaire général a ensuite expliqué comment de telles modalités peuvent fonctionner face aux défis de la paix, de la sécurité et le règlement des conflits et comment l’OIC a approché ces défis, avec quels outils et quels réseaux. L’OCI est consciente, a-t-il dit, que la résolution des conflits ne commence pas avec la médiation. Aucune médiation ne pourrait produire de résultats probants si elle n’est pas appuyée par des grandes puissances qui s’intéressent au conflit. Dans le cas de la Palestine, les efforts de négociation et de médiation ont lieu depuis plus de 20 ans sans progrès clair. Il en va de même pour la Syrie où l’absence d’un engagement politique commun et fort de la part des grandes puissances a permis la poursuite du conflit.
M. Madani a salué l’accent que met la « Déclaration politique » sur le renforcement de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent. Il a aussi salué l’initiative du Secrétaire général de l’ONU de réunir les dirigeants religieux aux Nations Unies et son intention de développer un plan d’action global pour la prévention de l’extrémisme violent qui sera présenté à la soixante-dixième session de l’Assemblée générale. Le Secrétaire général a indiqué que l’OCI et la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme organiseront aussi en juin une conférence sur les pratiques nationales contre l’incitation à l’extrémisme violent, conformément aux résolutions 1624 (2005) et 2178 (2014) du Conseil de sécurité.
L’OCI vient de signer un Mémorandum d’accord avec l’Union africaine sur la mise en œuvre de projets contre le terrorisme et l’extrémisme grâce à un don saoudien de 10 millions de dollars. L’OCI entend aussi organiser la cinquième réunion sur le Processus d’Istanbul les 3 et 4 juin 2015 à Djeddah. Nous estimons, a dit le Secrétaire général, que la résolution 16/18 du Bureau du Haut-Commissaire aux droits de l’homme donne des lignes directrices concrètes sur la façon d’aborder et de diminuer les causes de la radicalisation et de l’extrémisme. M. Madani a aussi parlé de la coopération entre son Organisation avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA).
M. ERASTUS MWENCHA, Vice-Président de la Commission de l’Union africaine, a déclaré qu’une étroite coopération avec les Nations Unies est une nécessité stratégique mais qu’il faut plus d’efforts pour trouver des moyens créatifs et novateurs de soutenir les opérations africaines de maintien de la paix. Il a salué la « Déclaration politique », déplorant en effet que la coopération entre l’Union africaine et les Nations Unies dans la prévention des crises et la médiation porte trop largement sur « les unes du jour ». Il est urgent de développer une vision stratégique commune soutenue par une compréhension commune pour renforcer et mieux coordonner les actions de prévention des conflits. La Commission de consolidation de la paix devrait devenir un véritable partenaire stratégique de l’Union africaine et des commissions économiques régionales. En dehors de la coopération dans le domaine de la paix et de la sécurité, il reste encore à améliorer les choses dans d’autres domaines repris d’ailleurs dans la « Position commune africaine sur les opérations de paix » élaborée en tirant les enseignements de la collaboration étroite avec l’ONU dans la médiation, les situations postconflit, et le maintien et la consolidation de la paix.
La Position s’appuie aussi sur le fait que 70% des missions politiques spéciales et des opérations de maintien de la paix de l’ONU sont déployées en Afrique et sur le fait que le continent est devenu le plus grand contributeur régional à ces opérations; près de 45% du personnel en uniforme étant africains. Le Vice-Président a espéré que le Cadre pour un partenariat renouvelé entre l’ONU et l’Union africaine sur l’intégration de l’Afrique et l’agenda du développement (PAIDA) pour la période 2017-2027 aura le soutien de l’Assemblée générale. Le projet de résolution, qui sera présenté à cette fin, cherche à assurer des ressources prévisibles, compte tenu de l’expérience dans la mise en œuvre du Programme décennal pour le renforcement des capacités qui prend fin cette année.
M. ALBERT RAMDIN, Sous-Secrétaire général de l'Organisation des États américains (OEA), a rappelé que le Secrétaire général de l’ONU était parmi les invités de haut rang du dernier Sommet des Amériques le mois dernier au Panama. Il a appelé au renforcement du dialogue entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales, notamment dans la promotion de la culture de la paix. Il faut renforcer les capacités institutionnelles de l’ONU et des organisations régionales et sous-régionales, a indiqué M. Ramdin qui a aussi plaidé pour que cette coopération soit mieux structurée et qu’elle s’inscrive dans un cadre plus synergique qui évite des doublons. Il a proposé que des consultations annuelles soient organisées entre l’ONU et ces organisations, proposant aussi que les bureaux régionaux de l’Organisation renforcent leur coopération avec les organisations de leur zone de d’intervention. Dans l’optique de la mise en œuvre du programme de développement pour l’après-2015, cette coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales devrait aussi impliquer la société civile.
M. ALAIN LE ROY, Secrétaire général du Service d’action extérieure de l’Union européenne, a souligné que bien que l’Union européenne ne soit pas une organisation régionale classique, elle coopère très étroitement avec l’ONU au niveau stratégique et essaye, quand c’est possible, de faire en sorte que les deux organisations aient des mécanismes consultatifs et des arrangements pour une compatibilité opérationnelle. Il a rappelé que l’Union est, et pour longtemps encore, le principal donateur d’aide humanitaire et au développement. Nous sommes aussi les champions du monde de la lutte contre le changement climatique et espérons que les autres, y compris les pays émergents, viendront jouer un rôle positif et conforme à leurs ambitions politiques et économiques. Sur le plan des droits de l’homme, l’Union européenne a noué depuis de nombreuses années un partenariat étroit avec les Nations Unies.
S’agissant de la situation dramatique en Méditerranée, M. Le Roy a dit qu’ensemble, il faut faire plus pour traiter des causes de cette migration clandestine, en coopération avec les pays d’origine et de transit, et les organisations régionales pertinentes. Nous devons protéger les droits des réfugiés. Depuis l’incident dramatique du 17 avril, a-t-il indiqué, les chefs d’État et de gouvernement européens ont adopté un plan avec des mesures substantielles qui devraient faire immédiatement la différence dans le problème de la traite des personnes. C’est l’intérêt commun de tous les pays de la Méditerranée, du Sahel et d’Afrique de l’Est. C’est un problème humanitaire, mais aussi un problème sécuritaire et politique qui demande des efforts conjoints avec nos partenaires de l’Union africaine et de la Ligue des États arabes. « Nous avons plus que jamais besoin de coopération car le nouvel ordre mondial sera multilatéral ou ne sera pas », a conclu le Vice-Président en paraphrasant la Haut-Représentante de l’Union européenne, Mme Federica Mogherini.
Le représentant du Guatemala, au nom du Système d’intégration de l’Amérique centrale (SICA), a encouragé le Secrétariat de l’ONU à élargir sa coopération avec le SICA qui s’engage à faire en sorte que l’ONU reste le forum universel pour trouver des réponses à nos défis. Ce qui est clair, a-t-il argué, c’est que la route loin des conflits et près de la paix durable exige un effort conjoint dans les domaines de la sécurité, de la justice, des droits de l’homme et du développement durable. Dans chacun de ces domaines, il y a des forces diverses qui font que la complémentarité entre l’ONU et les organisations régionales crée un espace distinct et fructueux au niveau multilatéral. L’ONU devrait saluer le fait que le XXIe siècle donne naissance à des institutions régionales plus fortes et plus responsables, consolidant ainsi un monde multipolaire où le dialogue et la paix sont de plus en plus urgents pour la protection de la planète et de la vie, le développement humain et le triomphe sur la pauvreté.
Le représentant de l’Équateur, au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a souligné que les chefs d’État et de gouvernement de la CELAC, qui se sont réunis à Belen, au Costa Rica, pour leur troisième Sommet les 28 et 29 janvier dernier, sur le thème « Construire ensemble », se sont engagés à mettre en place un développement durable équitable, à participer à la construction des priorités de l’agenda de développement mondial, à faire face au changement climatique, à renforcer la paix au nom du développement durable ainsi que les liens avec des parties extrarégionales. Dans la lecture qu’il a faite des décisions prises, le représentant n’a pas oublié de mentionner que les chefs d’État et de gouvernement ont reconnu que l’appui des commissions régionales de l’ONU sera particulièrement important dans le processus actuel d’élaboration du programme de développement pour l’après-215 et celui de la troisième Conférence sur le financement du développement.
Le représentant de la Malaisie, au nom de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (ASEAN), a estimé qu’il faut explorer d’autres domaines de coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales. L’ASEAN est convaincue qu’elle peut faire des contributions substantielles en partageant ses meilleures pratiques et son expérience dans la prévention des conflits, et le rétablissement et la consolidation de la paix. La tolérance, la compréhension mutuelle et le respect prônés par l’ASEAN pourraient servir de modèle à la communauté internationale. Le représentant a attiré l’attention sur le Plan ONU-ASEAN de 2015 et la résolution biennale de l’Assemblée générale sur la coopération entre les deux organisations. Une forte coopération entre l’ASEAN et l’ONU peut largement contribuer à la paix et à la sécurité internationales, au développement et à une croissance économique équitable, sans oublier la protection des droits de l’homme et l’édification de sociétés centrées sur l’être humain. Ce n’est qu’en renforçant une telle coopération que l’on pourra tirer le meilleur parti des opportunités actuelles et futures et répondre efficacement aux défis régionaux et internationaux, a conclu le représentant.
Le représentant de Tadjikistan, s’exprimant au nom de l’Organisation du Traité de sécurité collective (OSTC), a souhaité que l’ONU renforce son rôle dans la lutte contre les stupéfiants en Asie centrale, notamment en Afghanistan. Il a également appelé au renforcement de la coopération entre l’ONU et l’OSTC dans la lutte contre les nouvelles menaces à la paix et la sécurité internationales.
Table ronde 1: « Renforcer la coopération stratégique entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales sur les trois piliers du système de l’ONU - paix et sécurité, droits de l’homme et développement »
Animé par le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, M. JEFFREY FELTMAN, qui appelait à s’appuyer sur la sagesse des organisations régionales et sous-régionales, ce débat a mis en évidence l’importance de la cohérence et de l’unité entre les actions des différentes organisations.
M. ERASTUS MWENCHA, Vice-Président de la Commission de l’Union africaine, a conseillé à l’ONU de travailler « de manière horizontale » avec les organisations régionales car une bonne coopération permet une bonne cohérence entre les actions menées à tous les niveaux. Le mécanisme de coopération établi entre le Département des affaires politiques des Nations Unies et le Secrétariat de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) a été salué par son Conseiller sur la paix et la sécurité, M. DANILE YIFRU. La coopération, a-t-il dit, est d’autant plus importante que la complexité des questions de paix et de sécurité augmente. Il a tout de même souligné l’importance d’une coopération structurée à l’abri des procédures juridiques trop complexes. C’est la coopération entre l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et l’Organisation pour la démocratie et le développement économique-GUAM dans la lutte contre les opiacées et le blanchiment d’argent qui a été particulièrement saluée par le représentant de l’Ukraine qui a exprimé l’intention de renforcer la coopération avec la Communauté économique pour l’Europe (CEE) et la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED).
La coopération avec l’ONU est la clef, a renchéri le représentant du Zimbabwe, au nom de la Communauté de développement des États d’Afrique australe (SADC). Les organisations régionales seront particulièrement nécessaires à la mise en œuvre des objectifs 7 et 9 sur les infrastructures du programme de développement pour l’après-2015. Les pays de la SADC, qui viennent d’adopter une Stratégie d’industrialisation et de feuille de route ancrée dans la concurrence et l’intégration régionale, espèrent que leurs aspirations seront intégrées dans le programme post-2015. Il est important que ce programme crée des synergies entre tous les processus et renforce l’intégration des dimensions économique, sociale et environnementale du développement durable, et ce, d’une manière équilibrée, a commenté la représentante de l’Uruguay, au nom de l’Union des nations d’Amérique du Sud (UNASUR). La représentante du Timor-Leste, parlant au nom de neufs pays de la Communauté des pays lusophones, a confirmé la détermination de sa Commission à resserrer son partenariat avec les Nations Unies, en se recentrant sur les objectifs communs.
L’ONU devrait améliorer les réseaux des organisations qui ont un statut consultatif auprès de ses organes, a estimé M. MOLEFI KETE ASANTE, Professeur chargé des études afro-américaines à Temple University, qui a par ailleurs jugé que le fait de ne pas se pencher sur l’histoire de l’Afrique a fait manquer beaucoup d’occasions de maintenir la paix sur le continent. Au nom d’une cinquantaine de réseaux régionaux, M. PETER VAN TUIJL, Directeur exécutif du Global Partnership for the Prevention of Armed Conflict, a donné l’exemple du Forum biennal avec la société civile, organisé par le Forum des îles du Pacifique, sur les questions de sécurité et qui permet à la société civile d’entrer en contact avec les décideurs. Il a insisté sur l’importance du lien entre organisations régionales et société civile. Il a voulu que cette coopération soit structurée et régulière, mener à la confiance nécessaire au dialogue. L’échange d’information doit se faire facilement, a-t-il dit, prônant des synergies à tous les niveaux: entre l’ONU et les organisations régionales; entre celles-ci et la société civile. Le fonctionnement du Forum d’Asie centrale pour les personnes handicapées, regroupant une trentaine d’organisations, a été expliqué Mme LYAZZAT KALTAYEVA, Présidente de l’Association des femmes handicapées. Le réseau, a-t-elle dit, a travaillé avec la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), ce qui a entrainé la création d’un groupe de travail et l’instauration d’une Décennie pour les personnes handicapées en Asie centrale. Les cinq pays de cette région ont une histoire commune et des cultures très similaires, d’où l’intérêt de travailler ensemble pour mettre en commun les expériences, a-t-elle expliqué. Mais les stratégies régionales ne sont pas toujours efficaces sans l’appui des Nations Unies, a-t-elle noté.
Table ronde 2: « Stimuler le soutien des organisations régionales et sous-régionales en vue de mettre en place un programme de développement pour l’après-2015 porteur de changements »
Le modérateur de la table ronde, le Président du Centre des relations internationales et du développement durable, M. VUK JEREMIĆ, qui a précédemment occupé le siège de Président de l’Assemblée générale, a estimé que l’ONU devait « tendre la main vers l’extérieur pour tirer parti de l’expertise et de l’expérience des organisations régionales ».
L’Amérique latine est sortie de la pauvreté entre 2012 et 2014, s’est félicitée Mme ALICIA BARCENA IBARRA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CELAC), avant de préciser qu’il ne fallait pas pour autant interrompre les efforts parce que la région regroupe des économies à revenu intermédiaire. Pour arriver à éliminer la pauvreté extrême d’ici à 2030, ainsi que toutes les inégalités, y compris entre hommes et femmes, elle a prôné « une nouvelle équation entre l’État, les marchés et la société ». Les fonds illicites qui sont sortis de la région représentent 150 000 millions de dollars, a-t-elle indiqué, soit 15 fois de plus que l’aide publique au développement (APD). Elle s’est également plainte de l’évasion fiscale dont profitent beaucoup d’entreprises commerciales implantées dans la région, une question qui doit être abordée par les différents acteurs à la prochaine Conférence sur le financement du développement, prévue en juillet à Addis-Abeba. Elle a aussi proposé de créer un mécanisme d’aménagement de la dette souveraine pour les petits pays des Caraïbes. La CELAC travaille de plus en plus avec l’Europe ou la Chine, a-t-elle ensuite indiqué, avant de plaider en faveur du commerce intra-régional qu’il faut développer davantage. Il faut mobiliser les structures régionales pour assurer le suivi de l’après-2015, a-t-elle ajouté.
M. CARLOS LOPES, Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a conseillé de lancer une « riposte novatrice » pour répondre aux nouveaux défis en Afrique, ce qui passe, à son avis, par une coopération au niveau régional. Les crises financières ont mis en évidence la nécessité de collaborer, a-t-il tout d’abord remarqué. Un autre problème qui remet en question le système actuel est celui du changement climatique: il a donc conseillé d’agir à tous les niveaux pour arriver à une transformation des mentalités et des attitudes. Sur le plan de la sécurité, il a constaté qu’il ne suffisait plus d’amener deux pays à faire la paix mais qu’il fallait développer toute une gamme d’activités pour garantir le maintien de la paix. Il a aussi parlé des actions à mener ensemble pour faire face à une augmentation sans précédent de la population urbaine. Quant à la hausse de l’utilisation des technologies de l’information et de la communication, M. Lopes a souhaité que l’on réfléchisse ensemble aux moyens de les utiliser au mieux. Il a conclu sur la nécessité d’élaborer un cadre commun pour relever ces différents défis en Afrique, grâce à un cadre de développement africain. Il a aussi donné des pistes pour éviter le « paradoxe du cappuccino » concernant les trois piliers du développement durable. Alors que Rio+20 avait décidé de donner un poids égal aux trois piliers, il a en effet remarqué que, bien souvent, l’économie était l’élément le plus important des mesures prises (le café), tandis que le pilier social était moindre (le lait), le tout saupoudré d’environnemental (le chocolat). Il faut se rendre compte que c’est l’économie qui doit changer pour être plus respectueuse de l’environnement et renforcer le pilier social, a-t-il recommandé.
C’est une « montagne colossale » que nous avons décidé de gravir ensemble, a reconnu M. DAVID STEVEN, Directeur adjoint du Centre de la coopération internationale, en évoquant les futurs objectifs de développement durable pour l’après-2015. Il a prédit qu’aucun pays ou institution ne pourrait se prévaloir, le 1er janvier 2016, de lancer les initiatives nécessaires pour les atteindre, mais il a conseillé à chaque partie prenante de se fixer des priorités pour les cinq premières années du futur programme. Il a aussi recommandé de penser aux menaces transfrontalières qui exigent une réponse collective. À son avis, les organisations régionales auront un grand rôle à jouer pour la mise en œuvre des objectifs de développement durable, avec l’adoption de feuilles de route pour des périodes allant de 2 à 3 ans. Il faudra, a-t-il ajouté que chaque organisation régionale définisse ses propres priorités et soit prête à rendre des comptes sur la mise en œuvre.
M. ALI SHAHBAZ, de l’Institut de politiques sur le développement durable, a souligné que l’expertise des organisations régionales sur certaines questions devrait inciter les Nations Unies à travailler avec elles. Il a recommandé de coopérer avec des groupes de la société civile en vue également de les autonomiser. Les acteurs tels que les femmes ne sont pas seulement l’objet des objectifs de développement durable, mais aussi des moteurs de changement, a-t-il ajouté. Il a voulu une stratégie de mise en œuvre pour garantir la réalisation des objectifs. M. Shahbaz a posé les questions suivantes: quelles sont les priorités qui nous permettront de trouver les points communs à toutes les régions? Quelle est l’organisation la plus importante dans ce processus? Pour y répondre, il a estimé que le programme de l’après-2015 concernait tout le monde.
Au cours du débat qui a suivi avec les délégations, les délégations, comme le représentant de la Chine, ont appelé à approfondir la coopération entre l’ONU et les organisations régionales. Celles-ci devraient être encouragées à régler les différends à l’intérieur de leur région par la médiation et les bons offices, en respectant la souveraineté et l’intégrité territoriale des pays, a estimé le délégué chinois. À son avis, les organisations régionales ont un rôle important à jouer du fait de leur expérience particulière. De même, le représentant de la Fédération de Russie a invité à tirer parti des connaissances spéciales des organisations régionales et sous-régionales, grâce à une « coopération mutuellement enrichissante ».
De l’avis du représentant de l’Inde, la coopération avec les organisations régionales implique l’examen du fonctionnement de l’ONU. Faisant remarquer que le tiers des travaux du Conseil de sécurité concernait l’Afrique, il a estimé que l’efficacité de ces travaux était sapée par le fait qu’aucun membre permanent ne représente ce continent. Il a donc invité à corriger cette injustice historique.
Le représentant du Brésil a prévenu qu’il fallait tenir compte des divergences qui existent parfois entre des États d’une même région, ou des cas dans lesquels des pays appartiennent à plusieurs régions à la fois. En Libye, par exemple, la coopération internationale n’a pas donné lieu à la meilleure stratégie possible, a-t-il estimé. Il a par ailleurs plaidé en faveur d’un forum pour le développement durable de sa région.
Il ne faut pas réduire le débat sur la coopération à une question d’argent, a demandé pour sa part le représentant des États-Unis après avoir mentionné l’aide de son pays à la Mission de l’Union africaine en Somalie (500 millions de dollars) et à la Mission au Mali (180 millions de dollars). La contribution financière ne suffit pas, a-t-il en effet estimé, en mettant l’accent sur l’appui politique, militaire ou autre forme de coopération.
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