ECOSOC/6618

Le « sommet » du Conseil économique et social réfléchit aux moyens de parvenir à une urbanisation durable et prospère

28/5/2014
Conseil économique et socialECOSOC/6618
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil économique et social                              

Session de 2014                                            

16e & 17e séances – matin & après-midi                      


LE « SOMMET » DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL RÉFLÉCHIT AUX MOYENS DE PARVENIR À UNE URBANISATION DURABLE ET PROSPÈRE


Invités à réfléchir aux moyens de faire de l’urbanisation un synonyme de prospérité, les participants au deuxième jour du « sommet » du Conseil économique et social (ECOSOC) consacré aux questions d’intégration ont plaidé, aujourd’hui, en faveur de politiques de développement urbain favorisant l’inclusion sociale, le rôle moteur des communautés locales et les partenariats entre le secteur public et le secteur privé, afin de contrecarrer la tendance croissante des inégalités dans les villes.  Ils se sont ensuite penchés, au cours d’une deuxième table ronde, sur le thème de « l’urbanisation durable en Afrique », le continent où le taux d’urbanisation sera le plus élevé au cours des prochaines décennies.


Pour expliquer la nécessité impérieuse de réduire les inégalités urbaines, thème de la table ronde du matin, le Vice-Président de l’ECOSOC, M. Vladimir Drobnjak, a rappelé que la population urbaine augmentera de près de 73 millions de nouveaux citadins entre 2014 et 2020, dont 92% dans les pays en développement.  D’ici à 2050, 70% de la population mondiale vivront dans les villes, a ajouté le représentant de la Bolivie, au nom du Groupe des 77 et de la Chine.


La Directrice exécutive adjointe du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), Mme Aisa Kirabo Kacyira, qui animait la discussion, a recommandé à tous les acteurs urbains de renforcer les partenariats, pour que le développement bénéficie à tous.


Il faudrait lutter en priorité contre les inégalités les plus flagrantes entre habitants des villes, celles qui sont liées à l’accès à l’eau, aux services de santé et à l’emploi, ont souligné les intervenants.  De l’avis de l’experte de la Banque mondiale, il appartient au secteur public de subventionner l’accès à ces services, tout en s’appuyant sur les partenariats entre le secteur public et le secteur privé.  La représentante de la France a parlé, à cet égard, du Partenariat français pour la ville et les territoires, une plateforme qui regroupe l’ensemble des acteurs publics et privés intervenant dans le domaine urbain.


Le maire de Johannesburg, intervenant par liaison vidéo, a donné les grandes lignes de la stratégie de développement de cette ville et parlé de l’initiative « corridors de la liberté » lancée par la ville de Johannesburg pour relier les différentes zones de la ville qui étaient jusque-là cloisonnées, grâce notamment à un système de transport rapide par bus.


La question des transports urbains a été évoquée à plusieurs reprises en mentionnant différentes mesures prises pour garantir ces services aux habitants et leur faciliter l’accès à un emploi.  La ville de Rio de Janeiro, par exemple, a instauré un tarif unique pour les transports publics, tandis que Johannesburg a entrepris de fabriquer 150 bus alimentés en biocarburants.


Par ailleurs, plusieurs intervenants, le Préfet d’Azuay (Équateur) en tête, ont recommandé de donner aux autorités et communautés locales les pouvoirs et les moyens d’assurer les services de base selon les modalités qui leur conviennent le mieux.  Il faudrait également permettre aux citoyens de s’organiser pour participer à la gestion des villes, ont-ils ajouté.  La Directrice exécutive du Centre de développement et de ressources à la construction de Kingston, en Jamaïque, a mis l’accent sur une initiative nationale qui a permis à une communauté de gérer au mieux les lopins de terre disponibles et de refaire les routes.


M. Paul Romer, Professeur d’économie à la Stern School of Business et Directeur du Projet d’urbanisation de New York University, a présenté, quant à lui, le modèle new-yorkais, en expliquant que des marges de manœuvre avaient été prévues, au cours de la période de construction de la ville, pour anticiper sa croissance démographique et laisser la place aux progrès.


Plus récemment, le Kenya a mis en place des mécanismes en vue de promouvoir la croissance économique et le développement durable, a indiqué la représentante de ce pays au cours du débat général qui a suivi la table ronde.  Pour sa part, son homologue du Zimbabwe a évoqué plusieurs politiques d’urbanisation lancées dans son pays, tandis que le représentant du Kazakhstan a cité en exemple le « Plan stratégique pour le développement durable d’Astana 2030 ».


Le Ghana, a expliqué son Ministre de la gouvernance locale et du développement rural, lors du débat de l’après-midi, a adopté des politiques axées sur la décentralisation et la gouvernance locale, avec la création d’un plan d’action national et d’un forum sur l’urbanisation ouverts aux acteurs étatiques et non étatiques.


Le maire de Victoria, capitale des Seychelles, a expliqué que l’innovation et la croissance avaient donné au continent de l’Afrique la possibilité d’assumer un leadership dans le développement de sociétés urbaines plus viables.  Celui de Morogoro (République-Unie de Tanzanie) a estimé que les villes africaines doivent se doter des politiques intégrées en mesure de relier les zones rurales et les zones urbaines.


Au Maroc, a indiqué le Directeur général pour l’urbanisation, l’architecture et la planification de ce pays, les pouvoirs publics ont mis en place des stratégies pour tirer le meilleur parti des effets de l’urbanisation.  Les villes, a-t-il précisé, sont devenues des centres de création des richesses.


L’ECOSOC devrait achever son débat consacré aux questions d’intégration demain, jeudi 29 mai, à partir de 10 heures.


DÉBAT CONSACRÉ AUX QUESTIONS D’INTÉGRATION

Dialogue sur le thème « Prospérité urbaine et inégalités urbaines »


Mme AISA KIRABO KACYIRA, Directrice exécutive adjointe du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), qui animait cette table ronde, a invité les participants à réfléchir aux moyens de faire de l’urbanisation un synonyme de prospérité.  Les rapports mondiaux sur les établissements humains d’ONU-Habitat, a-t-elle rappelé, ont montré qu’alors que l’urbanisation s’accélère, notamment dans les pays en développement, elle s’accompagne d’inégalités croissantes.  Elle a souhaité que les citoyens restent au cœur du processus d’urbanisation, en recommandant à tous les acteurs de travailler ensemble et de renforcer les partenariats pour veiller à ce que le processus de développement soit aussi inclusif que possible.  Les actions prises doivent être respectueuses de l’environnement, a-t-elle ajouté.


M. MPHO PARKS TAU, Maire de Johannesburg (Afrique du Sud), qui intervenait par liaison vidéo, a expliqué que cette ville avait mis en œuvre en 2011 une stratégie de développement pour trois décennies, axée sur la durabilité et la résilience.  Des institutions mieux adaptées, des établissements humains durables et des initiatives en faveur d’une économie verte constituent les priorités de cette stratégie.  Il faudrait aussi assurer la durabilité financière, a-t-il estimé, en précisant que Johannesburg avait été amené à explorer de nouveaux moyens pour renflouer les caisses de la ville après la coupe du monde de 2010.  « Nous avons ainsi augmenté nos programmes d’investissements. »  Pour assurer des établissements humains durables, la mairie de Johannesburg a lancé l’initiative « Corridors de la liberté », visant à intégrer les différentes zones de la ville qui étaient jusque-là cloisonnées, en développant notamment des services de transport par bus rapides.  En matière de services, a-t-il aussi indiqué, des efforts sont entrepris pour mieux diversifier les sources d’énergie.  Pour ce qui est des transports publics, il a signalé que 150 bus alimentés en biocarburants étaient en cours de fabrication.


M. PAUL CARRASCO, Préfet d’Azuay (Équateur), représentant des Cités et Gouvernements Locaux Unis, a plaidé en faveur de la décentralisation des services dans les villes.  Il a indiqué que, dans beaucoup de pays d’Amérique latine, la législation centrale interventionniste sapait les interventions des communautés locales qui sont pourtant plus proches des populations.  C’est pourquoi il a recommandé d’adopter une politique globale qui vise à promouvoir la participation des citoyens.  C’est le citoyen qui doit assumer la conception et l’application des politiques sociales dans les villes, afin de reconstruire le tissu social, a-t-il estimé.  Pour parvenir à cette inclusion, il a préconisé de mettre en place des assemblées et des parlements au niveau local pour permettre aux citoyens de s’organiser.  Il faudrait que ceux-ci puissent comprendre ce qui se passe dans leurs villes et y prendre part.  M. Carrasco a aussi conseillé de mettre en place une chaîne de production urbaine qui inclue les masses de la population urbaine.


Mme ZOUBIDA ALLAOUA, Vice-Présidente et responsable par intérim du Réseau pour le développement durable de la Banque mondiale, a recommandé de mettre en œuvre des politiques facilitant l’accès à la terre pour que les entreprises puissent venir s’installer en ville, ainsi que l’accès au logement et aux services pour la population urbaine.  Elle a plaidé en faveur de la scolarisation des filles pour que les femmes aient un meilleur accès au marché de l’emploi.  En ce qui concerne les services, elle a souligné qu’il était important d’améliorer les transports publics.  La ville de Rio de Janeiro, par exemple, a mis en place un tarif intégré qui permet d’utiliser ces transports à un prix fixe, ce qui a eu des conséquences positives sur l’accès à l’emploi.  Il faudrait aussi, a-t-elle ajouté, que les maires et les fonctionnaires des villes rendent plus de comptes pour améliorer la rentabilité des villes.  Par ailleurs, elle a estimé qu’il faudrait recueillir davantage de données pour prendre les bonnes décisions en matière d’urbanisation durable.  Enfin, elle a jugé utile de recourir à des partenariats pour mieux répondre aux défis en matière d’urbanisation, en faisant remarquer que personne ne pouvait, seule, régler de tels problèmes.


Au nom du grand groupe des femmes, Mme CARMEN GRIFFITHS, Directrice exécutive du Centre de développement et de Ressources à la construction de Kingston (Jamaïque), a indiqué que son réseau travaillait auprès des femmes urbaines dans des pays comme la Jamaïque, le Pérou et les Philippines, notamment pour les aider à acquérir des biens fonciers.  Le réseau œuvre aussi pour améliorer l’assainissement et les autres services de base comme l’eau et l’électricité.  Elle a estimé que les femmes devaient être organisées pour travailler avec les partenaires et relever les différents défis, tout en plaidant pour le renforcement de leur leadership.  « Nous avons incité les femmes à recueillir des informations et données sur la criminalité, afin de conduire les autorités municipales à y répondre », a-t-elle indiqué.  Le réseau qu’elle représente, a-t-elle dit, met en contact les femmes et les gouvernements locaux pour résoudre les problèmes.  Mme Griffiths a aussi souligné l’importance de la transparence et de la reddition de comptes.


M. MICHAL MLYNÁR, Représentant permanent de la Slovaquie auprès des organismes des Nations Unies à Nairobi et Président du Comité des représentants permanents auprès d’ONU-Habitat, a invité à renforcer les liens entre les processus de Nairobi (ONU-Habitat et Programme des Nations Unies pour l’environnement - PNUE) et les processus en cours à New York, notamment le programme de développement pour l’après-2015.  Concernant la tendance croissante des inégalités urbaines, il a regretté le fossé qui se creuse entre les plus pauvres et les plus riches, même dans les sociétés égalitaires.  Ces inégalités sont les plus flagrantes en matière d’accès à l’eau, aux services de santé et à l’emploi.  Ces inégalités peuvent conduire à une frustration et à plus d’inégalité et d’insécurité, a-t-il mis en garde.  M. Mlynár a recommandé de mieux établir le lien entre développement et inégalités.  Le Forum urbain, lors de sa septième session à Medellin (Colombie), avait adopté une déclaration réaffirmant que l’équité devrait être un élément important des programmes urbains.  S’agissant de la criminalité, il a rappelé que les inégalités sociales en sont les causes profondes, ce qui nécessite des politiques pour garantir l’équité sur le long terme.


Il faudrait vraiment faire le point sur les priorités nécessaires pour l’après-2015, a conclu la Directrice exécutive adjointe d’ONU-Habitat, en soulignant aussi l’importance de la coordination des efforts de chacun. 


Débat interactif


La Directrice exécutive du Centre de développement et de Ressources à la construction de Kingston a parlé d’une initiative sur le terrain qui avait permis à une communauté d’organiser au mieux les lopins de terre disponibles et de refaire les routes, notamment grâce à l’aide d’experts en technologie.  Dans ce domaine, la responsable par intérim du Réseau pour le développement durable de la Banque mondiale a plaidé en faveur d’une utilisation mixte des terres, tout en maintenant les prix à un niveau acceptable.  Les villes continueront à attirer, notamment dans le domaine de l’emploi, mais si les terres ne sont pas suffisamment disponibles, les nouveaux arrivants seront contraints de s’installer dans des taudis, a-t-elle averti.  Elle a donc demandé de réfléchir aux moyens dont disposent les autorités locales pour améliorer l’accès à un logement abordable.  Concernant le partenariat entre le secteur public et le secteur privé, elle a rappelé qu’il appartenait donc au secteur public de subventionner l’accès à l’eau et aux services car l’objectif du secteur privé était tout d’abord de réaliser des profits.  La Banque mondiale travaille actuellement à la mise en place d’un fonds mondial pour les infrastructures, a-t-elle indiqué à cet égard.


Tout processus passe par la gestion territoriale, a redit pour sa part le Préfet d’Azuay avant de donner des exemples de ce que réalisent les assemblées communautaires.  Certaines, comme dans son pays -l’Équateur-, travaillent sur l’eau et, en particulier, la protection des sources hydriques.  Il a aussi parlé de groupes de femmes qui offrent des thérapies par la danse.  Les organisations sociales de femmes travaillent aussi à l’amélioration de la sécurité, a-t-il ajouté.  Le préfet d’Azuay a donc invité à concevoir des politiques en fonction des priorités locales et non pas de celles des technocrates.


En Europe, les partenariats entre le secteur public et le secteur privé n’ont pas toujours été couronnés de succès, a remarqué le représentant du Conseil des communes et régions d’Europe.  Rejoignant l’idée du Préfet d’Azuay, il a conseillé de renforcer les autorités locales et régionales en leur donnant les moyens d’assurer les services de base selon les modalités qui leur conviennent le mieux.  Il a en même temps reconnu qu’il faudrait s’appuyer sur un partenariat avec le secteur privé.  À cet égard, la représentante de la France a parlé d’un dispositif de partenariat dans son pays qui fédère les intervenants dans le domaine urbain, comme des chercheurs et des ONG, pour répondre aux demandes des villes partenaires.


Pour ce qui est de l’Afrique du Sud, son représentant a vanté les mérites de son système très participatif pour les autorités locales, qui fonctionne très bien, a-t-il précisé.  Le maire de Johannesburg a indiqué que 10% des dépenses consacrées aux contrats et 5% du budget d’entretien étaient alloués aux communautés locales afin qu’elles se chargent de ces fonctions.  Mais il faudrait que les citadins s’engagent à payer les services qu’ils reçoivent en ville, a-t-il précisé.


La parole a ensuite été donnée à une représentante d’une organisation non gouvernementale, New Future Foundation, basée à Harlem, qui a demandé de répondre aux problèmes des sans-abris et des expulsions à New York.  Une autre représentante de la société civile, d’Association of Third World Studies, a plaidé en faveur de l’amélioration du recueil des données.  À cet égard, la représentante de la Banque mondiale a estimé qu’il faudrait trouver un moyen d’évaluer la réduction des inégalités et la réduction de la pauvreté. 


Discours liminaire sur le thème « L’urbanisation, une opportunité »


M. PAUL ROMER, Professeur d’économie à la Stern School of Business et Directeur du Projet d’urbanisation de l’Université de New York (NYU), a rappelé l’historique des perspectives des migrants qui arrivaient à New York, en précisant qu’ils recherchaient un changement tout en étant prêts à faire des sacrifices.  Il n’a pas été facile pour les dirigeants, a-t-il dit, de trouver les moyens d’assurer un progrès équitable.  Le professeur de NYU a estimé que l’urbanisation devrait offrir une inclusion, des opportunités, la dignité, la responsabilité des fonctionnaires et permettre d’être à l’abri du besoin.  Il a indiqué qu’au terme de sa recherche, il avait mis en évidence les mesures qui devraient être prises pour garantir les progrès. 


À New York, le processus a commencé en 1811 lorsque les dirigeants de l’époque avaient décidé que les terres inoccupées de Manhattan devaient être utilisées pour créer des espaces publics.  Cela a pris 100 ans pour construire toutes ces rues, mais on a prévu des marges pour développer davantage la ville, en mettant ainsi en place les conditions nécessaires aux progrès.  Rappelant que près de 5 milliards de personnes allaient vivre dans les villes au cours des 100 prochaines années, tout en précisant que l’évolution de l’urbanisation s’arrêtera pendant cette même période, il a appelé à réfléchir aujourd’hui aux possibilités d’y faire face afin de parvenir à un développement urbain durable.


Débat général


S’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, le représentant de la Bolivie a estimé que le programme de développement pour l’après-2015 devrait tenir compte du fait que 70% de la population mondiale vivraient dans des villes d’ici à 2050, une tendance particulièrement marquée dans les pays en développement, où des défis colossaux se poseront au niveau urbain.  Aussi, a-t-il plaidé pour une approche holistique qui intègre de manière équitable les dimensions sociale, environnementale et économique du développement durable, en y associant toutes les parties prenantes.


La délégation de l’Organisation internationale du Travail (OIT) a estimé, de son côté, que l’un des défis les plus importants à relever était d’intégrer 404 millions de nouveaux arrivants sur le marché du travail au cours de la prochaine décennie, tout en « absorbant » 202 millions de personnes sans emploi.  Cette problématique, a-t-elle fait observer, se pose tout particulièrement en milieu urbain.


Plusieurs pays ont présenté les initiatives qu’ils ont lancées au niveau national.  Son homologue du Kazakhstan a cité en exemple, à l’échelle locale, le « Plan stratégique pour le développement durable d’Astana 2030 », qui se base sur une analyse objective à long terme des forces et faiblesses de l’économie de la capitale et sur ses systèmes social, environnemental et administratif.  L’objectif de ce Plan est d’améliorer la qualité de vie de ses habitants et d’en faire un « modèle d’urbanisme » pour le reste du pays, a expliqué le délégué.


Le représentant de l’Afrique du Sud a, quant à lui, fait part de l’expérience de son pays en matière d’urbanisation durable, qui s’applique aussi bien en matière de logement décent qu’en matière d’établissements humains.  Ainsi, le Gouvernement a approuvé un Plan global pour le développement de l’habitat, qui vise à promouvoir une société non discriminatoire à travers un logement de qualité pour tous, a-t-il indiqué.  Sa collègue du Kenya a, de son côté, présenté une initiative similaire intitulée « Politique nationale de développement urbain », qui constitue une véritable charte de la gouvernance urbaine et met l’accent sur la création de mécanismes de croissance économique et de développement durable dans les villes kényanes.  Quant au Zimbabwe, il a évoqué plusieurs politiques d’urbanisation, dont une axée sur le logement, lancée le 22 juin 2013.


Pour sa part, le représentant du Brésil a expliqué que son gouvernement privilégiait une approche participative et multisectorielle, consacrée par le lancement, en 2011, de la seconde phase du Programme d’accélération de croissance, qui envisage les questions d’urbanisme sous deux aspects: d’un côté, l’amélioration des infrastructures et de l’autre, l’accès à un logement décent. 


Son homologue de la France, enfin, a défendu l’idée d’une « ville équitable », qui doit intégrer au moins quatre grandes dimensions: la lutte contre les inégalités de tous ordres; la transition écologique et, en particulier, la lutte contre la « précarité énergétique »; la promotion du « vivre ensemble » et la participation de tous à la vie de la cité et à ses richesses; et le respect de l’histoire et de la culture, éléments clefs pour la cohésion sociale mais aussi l’attractivité d’un territoire.  « C’est cette approche large, transversale et intégratrice, qui inspire le Gouvernement français tant au plan national, dans sa relation avec les collectivités locales et les autres acteurs des secteurs public et privé, qu’au plan international, dans le cadre de sa politique de coopération et d’aide au développement, notamment au sein du Partenariat français pour la ville et les territoires, une plateforme qui fédère l’ensemble des acteurs des secteurs public et privé intervenant dans le domaine urbain au niveau international », a expliqué le représentant.


Table ronde sur le thème « L’urbanisation durable en Afrique »


Quelles sont les défis spécifiques de l’urbanisation en Afrique?  Comment l’urbanisation durable peut-elle combler le fossé rural-urbain?  Voilà deux des questions auxquelles les panélistes suivants ont tenté de répondre au cours d’une table ronde modérée par le Secrétaire général adjoint et Conseiller spécial pour l’Afrique, M. Maged Abdelaziz.


Déclarations liminaires


M. AKWASI OPONG-FOSU, Ministre de la gouvernance locale et du développement rural du Ghana, a déclaré que la mondialisation et l’urbanisation dynamiques avaient mis le rôle des villes et le développement durable en évidence.  Les villes ne sont pas seulement en pleine expansion, elles produisent de plus en plus souvent l’essentiel des richesses du monde.  Elles deviennent de plus en plus vastes, diversifiées, complexes, fluides et moins gérables que par le passé, a encore noté le Ministre. 


Les villes traditionnelles que l’on connaissait dans le passé n’existent plus et les villes modernes sont confrontées à des défis d’adaptation graves.  Les villes qui pourraient effectivement s’adapter sont celles qui tirent le plus parti des opportunités de l’urbanisation.  Pour sa part, le Ghana, a expliqué M. Opong-Fosu, a répondu aux défis de l’urbanisation par la mise en œuvre des politiques axées sur la décentralisation et la gouvernance locale, la création d’un plan d’action national et d’un forum où les acteurs étatiques et non étatiques peuvent se réunir pour discuter de questions d’urbanisation.


Mme JACQUELINE MOUSTACHE-BELLE, Maire de Victoria (Seychelles) et Coprésidente de Cités et Gouvernements Locaux Unis, a déclaré que si l’Afrique était encore un continent rural, elle est aussi l’espace où le taux d’urbanisation sera le plus élevé au cours des prochaines décennies.  Cette urbanisation a été portée par les attentes et les rêves de ceux et celles qui arrivaient de villages, a-t-elle souligné.  L’urbanisation a représenté un défi pour des infrastructures souvent vétustes et l’amélioration des services fournis dans les zones rurales n’est pas la seule réponse, a estimé Mme Moustache-Belle. 


La solution serait de combiner des services de meilleure qualité et une plus grande mobilité.  Ainsi, les villes doivent d’un côté offrir des services de qualité toujours supérieure et, parallèlement, préparer la population à la menace posée par les catastrophes naturelles et à la pollution, souvent d’origine anthropique.  L’innovation et la croissance ont donné au continent de l’Afrique la possibilité d’assumer un leadership dans le développement de sociétés urbaines plus viables, a affirmé le maire de Victoria.  « Les dirigeants africains pourraient s’inspirer des succès rencontrés ailleurs et créer de nouveaux modèles de leadership à plusieurs niveaux », a-t-elle suggéré.  Mme Moustache-Belle a demandé à ce que les besoins particuliers des petits États insulaires soient représentés de manière adéquate dans le programme de développement pour l’après-2015.


M. AMIRI NONDO, Maire de Morogoro (République-Unie de Tanzanie), a axé son intervention sur l’Afrique, où l’urbanisation durable est confrontée au défi de l’afflux incessant de populations rurales vers les agglomérations.  Les villes africaines doivent se doter des politiques intégrées en mesure de relier zones rurales et zones urbaines, a-t-il affirmé, en soutenant la campagne en faveur d’un objectif d’urbanisation viable dans le programme de développement pour l’après-2015.  Pour lui, la décentralisation et l’amélioration de la gouvernance locale seraient des éléments indispensables pour attirer les investissements directs étrangers.  Le maire de Morogoro a donc encouragé l’Afrique à redoubler d’efforts pour y parvenir et s’est également déclaré favorable à une organisation stratégique à long terme afin d’empêcher l’« installation informelle » des établissements humains.


M. LAZAROUS KAPAMBWE, Conseiller spécial sur les affaires économiques auprès du Président de la Commission de l’Union africaine, a rappelé qu’en l’espace de 14 ans, la population urbaine en Afrique avait augmenté de 146,7 millions de personnes.  À peine deux générations ont suffi pour que le continent s’urbanise, alors qu’il a fallu un siècle à l’Europe.  Cela n’est pas allé sans conséquences pour l’environnement.  L’urbanisation peut toutefois être durable, à condition d’être planifiée, a affirmé M. Kapambwe. 


Faut-il privilégier un seul modèle d’urbanisation pour toute l’Afrique?  Ou doit-il être adapté à chaque région?  Un modèle, celui « dit de la dichotomie », distingue zones rurales et zones urbaines.  Quelle architecture allons-nous choisir pour l’avenir de nos espaces urbains?  Quelle que soient les réponses à ces questions, elles devront, a estimé le Conseiller spécial, intégrer trois éléments fondamentaux: « comprendre la géographie, le climat et l’intégrer dans l’architecture des villes; comprendre la culture et la population, et ensuite comprendre l’histoire de l’environnement ».


M. ABOUHANI MOULAY ABDELGHANI, Directeur général de l’urbanisation, Architecture et planification au Gouvernement du Maroc, a rappelé que les villes étaient des moteurs de développement et de croissance.  L’urbanisation du continent africain n’a pas épargné le Maroc, où la population urbaine est passée de 500 000 habitants à plus de 17 millions en l’espace d’un siècle.  Cette croissance urbaine exponentielle s’est accompagnée d’une série de déséquilibres, a-t-il relevé: « Le déficit en logements est de près de 800 000 unités par an, le foncier se raréfie et la spéculation sur les terrains est en hausse, comme l’habitat clandestin ». 


Cette urbanisation présente aussi des risques pour l’environnement, avec des perturbations des écosystèmes du littoral, a poursuivi M. Abdelghani, qui a également noté que l’expansion des villages exerçait une pression sur l’irrigation locale.  Le Ministère marocain de l’agriculture a ainsi tiré la sonnette d’alarme.  L’urbanisation, a-t-il dit, est un phénomène irréversible.  Dans la mesure où les villes sont devenues les principales créatrices de richesses au Maroc –elles représentent 75%–, les pouvoirs publics ont donc mis en place des stratégies d’accompagnement pour tirer le meilleur parti des effets de l’urbanisation et la mettre au service du développement dans le respect de l’environnement, a ajouté M. Abdelghani.


Dialogue interactif


La représentante de la Chine a déclaré que son gouvernement attachait une grande importance à l’urbanisation durable, comme en témoigne le plan, adopté le mois dernier, visant à promouvoir « l’intégration urbaine-rurale ».  La Chine participe activement à la coopération internationale en matière d’urbanisation harmonieuse, notamment en Afrique, où les accords bilatéraux sont très nombreux.


Le Conseiller spécial sur les affaires économiques auprès du Président de la Commission de l’Union africaine, a précisé que l’Union africaine élaborait actuellement une « vision continentale » du développement durable, qui fait ressortir plusieurs choses et, en particulier, le fait que les citoyens africains veulent une croissance sans exclusive qui soit en même temps respectueuse de l’environnement.  L’urbanisation, a-t-il fait remarquer, est citée parmi les 10 moyens d’y parvenir.  C’est pourquoi, l’Union africaine réfléchit aux moyens de réduire autant que possible l’impact de l’urbanisation en Afrique en envisageant d’adopter des approches intégrées.


La représentante du Botswana s’est dite, elle aussi, favorable à une approche holistique multipartite pour permettre à l’Afrique de créer les villes d’avenir dont elle a besoin pour parvenir à des gains dans les domaines du développement durable.  À cette fin, son collègue de l’Afrique du Sud a jugé indispensable la question des partenariats, qui suppose d’investir massivement dans les capacités africaines.


Dans ce contexte, la représentante de la France a rappelé le soutien de son gouvernement au développement urbain de l’Afrique, où des projets bilatéraux sont en cours depuis 15 ans en matière de renforcement des capacités et de la gouvernance locale.  Le Ministre français des affaires étrangères appuie ainsi Cités et Gouvernement Locaux Unis dans ses efforts de décentralisation et pour donner un élan aux collectivités locales dans le cadre du processus de développement urbain, a indiqué la déléguée.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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