Mme Valerie Amos brosse, devant le Conseil de sécurité, un tableau accablant de la situation humanitaire en Syrie
La résolution 2165 (2014) a permis aux Nations Unies de surmonter les obstacles qui entravent la distribution de l’aide humanitaire à des centaines de milliers de personnes en détresse en Syrie, a affirmé, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, la Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires et Coordonnatrice des secours d’urgence, Mme Valerie Amos, qui a toutefois reconnu la persistance de défis considérables.
En adoptant cette résolution le 14 juillet 2014, le Conseil de sécurité avait ouvert quatre postes frontières en Syrie et créé un mécanisme de surveillance pour superviser le chargement, dans les installations de l’ONU concernées, de tous les envois de secours humanitaires des organismes humanitaires des Nations Unies et de leurs partenaires, afin d’assurer leur entrée dans le pays.
Mme Amos a cependant rappelé les défis considérables dans la mise en œuvre de ce texte, ainsi que dans celle de la résolution 2139, adoptée en février dernier, pour répondre aux besoins humanitaires des populations syriennes en détresse piégées par les combats entre forces gouvernementales et groupes de l’opposition.
« Le personnel humanitaire n’a pas pu atteindre plus de deux localités assiégées depuis l’adoption de la résolution 2165 (2014) et la distribution de l’aide n’a pu se faire que dans l’une d’elles au cours de ces deux derniers mois », a déploré la Secrétaire générale adjointe.
Le conflit en Syrie, a rappelé la Secrétaire générale adjointe, touche tous les Syriens, a-t-elle rappelé. « L’économie syrienne a subi des pertes de 40% depuis 2011 et le taux de chômage est aujourd’hui de 54%, tandis que les trois quarts de la population vivent désormais dans la pauvreté. Le taux de scolarisation a chuté de plus de 50% et les jeunes ont peu de perspectives d’avenir », a précisé Mme Amos.
« Nous avons évoqué avec regret la possibilité de voir une génération d’enfants syriens disparaître, c’est maintenant une réalité », a-t-elle lancé.
La violence a contraint près de la moitié des Syriens à fuir leurs foyers, la plupart d’entre eux à plusieurs reprises. Il y a environ 7,6 millions de personnes déplacées à l’intérieur de la Syrie et plus de 3,2 millions en dehors, ce qui fait peser un immense fardeau sur les pays d’accueil.
« Il s’agit du nombre le plus important de personnes déplacées par un conflit dans le monde », a précisé Mme Amos. En dépit des appels répétés du Conseil à mettre fin aux affrontements et de rapports accablants de la Commission d’enquête indépendante sur les violations des droits de l’homme, des civils continuent d’être tués et blessés chaque jour.
Le dernier rapport publié par la Commission documente ainsi les brutalités commises par l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL), notamment ses actes barbares à l’encontre des femmes et des enfants et l’usage systématique de la torture, du meurtre, et de l’esclavage, a poursuivi la Coordonnatrice. Les groupes d’opposition, dont certains considérés comme terroristes, ont infligé des représailles brutales et s’en sont pris à des cibles civiles, a-t-elle ajouté.
Les organisations des Nations Unies et leurs partenaires continuent de travailler dans des conditions extrêmement périlleuses, a souligné la Secrétaire générale adjointe. « Soixante-neuf travailleurs humanitaires ont été tués depuis le début du conflit », a-t-elle regretté, en mettant l’accent sur la nécessité de mettre à la disposition du personnel humanitaire les moyens nécessaires pour parvenir auprès des nécessiteux, aussi bien à l’intérieur du pays qu’en dehors.
Mme Amos a demandé aux États Membres de continuer d’user de leur influence auprès des parties au conflit pour qu’elles respectent leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et des droits de l’homme. Elle a aussi prié le Conseil de sécurité d’exiger à nouveau que tous les obstacles bureaucratiques qui empêchent l’acheminement d’une aide soient levés.
Le Conseil devrait aussi faire pression pour que des fournitures médicales puissent faire partie de l’aide livrée à la population civile, a demandé la Secrétaire générale adjointe. En outre, le Conseil de sécurité doit appeler à la levée des blocus, qui affectent 212 000 personnes, dont 185 500 dans les zones assiégées par les forces gouvernementales ou les forces d’opposition.
Le Conseil doit aussi insister, a-t-elle plaidé, pour qu’il soit mis fin aux « violences « qui détruisent le peuple syrien et leur pays et qui engendrent des conséquences déstabilisatrices sur la région ».
Avant de conclure, la Coordonnatrice des affaires humanitaires a fait observer que l’appel humanitaire pour la Syrie avait recueilli à peine 50% des fonds. Les donateurs doivent faire preuve de générosité, a-t-elle insisté, tout en plaidant pour qu’une solution politique soit trouvée à la crise le plus rapidement possible.