7311e séance – après-midi
CS/11645

Ukraine: l’application des Accords de Minsk toujours dans l’impasse, affirment le Secrétariat de l’ONU et la Mission de l’OSCE devant un Conseil de sécurité divisé

Trois semaines après la dernière réunion en date du Conseil de sécurité sur la situation en Ukraine, le Sous-Secrétaire général par intérim aux affaires politiques, M. Jens Anders Toyberg-Frandzen, a présenté au Conseil de sécurité les derniers développements dans ce pays, dominés par la tenue de deux élections et l’insécurité.

Des élections parlementaires ont eu lieu le 26 octobre.  « Si elles n’ont pu se tenir dans la Crimée annexée, ni dans les parties du Donbass sous contrôle des rebelles », elles ont été considérées comme étant démocratiques par la Mission spéciale de surveillance de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a-t-il déclaré.

« Des négociations sont en cours pour former le nouveau gouvernement, et la capacité de la coalition arrivée en tête à travailler de manière constructive avec le Bloc d’opposition sera essentielle pour l’unité et la stabilité du pays », a noté M. Toyberg-Frandzen, qui a dit espérer voir rapidement démarrer un dialogue national afin de rétablir la cohésion nationale et de résoudre les questions critiques en suspens.

Le 2 novembre dernier, a poursuivi le Sous-Secrétaire général par intérim, les rebelles des oblasts de Donetsk et Lougansk avaient organisé « de prétendues élections », rejetées par le Gouvernement ukrainien, une bonne partie de la communauté internationale et la plupart des 15 membres du Conseil de sécurité, à l’exception notable de la Fédération de Russie.  S’exprimant par visioconférence depuis Kiev, la Représentante de la présidence en exercice de l’OSCE, Mme Heidi Tagliavini, s’est ralliée à cette condamnation.

Face à la rhétorique « incendiaire » et « sécessionniste » des rebelles à la suite de l’annonce des résultats de ce scrutin, le Président ukrainien, M. Petro Porochenko, a proposé au Parlement de révoquer la loi, adoptée le 16 septembre dernier, qui a accordé un statut spécial d’autonomie élargie pendant trois ans aux territoires concernés de l’est de l’Ukraine, a rappelé le Sous-Secrétaire général par intérim.

Le représentant de l’Ukraine, M. Yuriy Sergeyev, a précisé à l’attention du Conseil que cette loi, prévue par les Accords de Minsk signés par l’Ukraine, la Fédération de Russie et l’OSCE, prévoyait des élections sur la « gouvernance autonome locale légitime » le 7 décembre prochain.  Agissant au mépris de cette échéance, les « terroristes appuyés par les Russes » ont préféré organiser des « élections » illégales de « prétendus présidents et parlements » de certaines entités illégitimes autoproclamées, a-t-il dénoncé vigoureusement.

Le Chef de la Mission spéciale de surveillance de l’OSCE en Ukraine, M. Ertuğrul Apakan, s’est dit alarmé, quant à lui, de l’intensification des violences ces dernières semaines dans le Donbass, où des mouvements de chars opérés par les forces séparatistes ont été observés.  M. Toyberg-Frandzen a fait remarquer que l’on était proche du niveau des violences que connaissait le pays avant le 5 septembre, date de la signature du Protocole de Minsk, qui prévoyait pourtant un cessez-le-feu.

En outre, s’est inquiété M. Apakan, une centaine de kilomètres de la frontière orientale de l’Ukraine n’est toujours pas contrôlée par les forces gouvernementales et les drones de surveillance déployés par l’OSCE pour pallier ce problème sont « régulièrement pris pour cible ». 

« Les espoirs de renouveau incarnés par les récentes élections parlementaires risquent donc d’être éclipsés par l’aggravation de cette situation », a averti M. Toyberg-Frandzen, qui n’a pas exclu la possibilité d’une reprise des combats à grande échelle, ni celle d’un « gel » du conflit pouvant s’éterniser pendant des années, « voire des décennies ».

Le représentant de la Fédération de Russie a catégoriquement rejeté les accusations visant son pays, demandant à ses collègues du Conseil de sécurité de ne pas transformer cette réunion en « farce hystérique ».  Pour lui, l’invitation faite aux représentants de l’OSCE de s’exprimer dans ce cadre « les écarte de leur rôle principal et conduit à une regrettable et dangereuse politisation des débats du Conseil ». 

La Mission de l’OSCE n’a pas pour mandat de chercher une solution à la crise et les déclarations que ses analyses inspirent relèvent de la « propagande », notamment les allégations d’influx d’armes et de troupes russes en Ukraine, a-t-il tenu à rappeler.  La situation dans l’est de l’Ukraine est incontestablement complexe, même si, de l’avis de sa délégation, la « concentration de troupes ukrainiennes » le long de la ligne de front est à blâmer, obligeant les rebelles à se défendre.

Le représentant de la France, M. François Delattre, a jugé au contraire particulièrement inquiétante « l’annonce de la création d’une armée du Donbass et d’une mobilisation générale ».  Pour la France, les accords des 5 et 19 septembre derniers restent les meilleurs instruments d’une sortie de crise qui repose sur trois axes: « le respect du cessez-le-feu, la surveillance de la frontière et des négociations politiques afin de trouver une solution pérenne ».

Son homologue des États-Unis, Mme Samantha Power, a souligné, de son côté, qu’il était « impossible » d’empêcher un nouveau conflit « tant que des signataires du Protocole de Minsk le foulent au pied de manière répétée ».  « Ce que nous devons faire, c’est continuer d’exercer une pression jusqu’à ce que la Fédération de Russie choisisse la désescalade », a-t-elle estimé.

* CS/11614

LETTRE DATÉE DU 28 FÉVRIER 2014, ADRESSÉE À LA PRÉSIDENTE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’UKRAINE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2014/136)

Déclarations

M. JENS ANDERS TOYBERG-FRANDZEN, Sous-Secrétaire général par intérim aux affaires politiques, a rappelé que les élections parlementaires ukrainiennes du 26 octobre, si elles n’ont pu se tenir dans la Crimée annexée ni dans les parties du Donbass sous contrôle des rebelles, ont été jugées conformes au critère démocratique par la Mission de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).  Des négociations sont en cours pour former le nouveau gouvernement, et la capacité de la coalition arrivée en tête à travailler de manière constructive avec le Bloc d’opposition sera essentielle pour l’unité et la stabilité du pays.  M. Toyberg-Frandzen a dit espérer voir rapidement démarrer un dialogue national afin de rétablir la cohésion nationale en Ukraine et de traiter les questions critiques en suspens.

Parallèlement, a déclaré M. Toyberg-Frandzen, les rebelles de Donetsk et Lougansk ont tenu « de prétendues élections », défiant ainsi le Gouvernement ukrainien qui a condamné ces scrutins, tout comme l’a fait une bonne partie de la communauté internationale.  Les rebelles ont ensuite adopté une rhétorique enflammée, se déclarant de facto indépendants de l’Ukraine et menaçant d’étendre leur contrôle à d’autres territoires.  En réponse, le Président Porochenko a proposé au Parlement de révoquer la loi accordant pour trois ans un statut spécial de plus grande autonomie aux territoires concernés.

Le Sous-Secrétaire général a rappelé que, depuis le 3 novembre, les hostilités avaient repris dans l’est de l’Ukraine avec une intensité proche de celle d’avant le cessez-le-feu du 5 septembre.  L’OSCE signale régulièrement l’arrivée d’importants convois chargés d’armes lourdes et de chars de combat dans les zones rebelles.  Alors que la situation humanitaire se dégrade dans plusieurs parties du Donbass, il est clair que le cessez-le-feu est mis en péril et que, si les hostilités se poursuivent, ce sont les Accords de Minsk qui seront menacés.  En même temps, a rappelé M. Toyberg-Frandzen, il est important de noter qu’aucune des parties n’a unilatéralement abrogé ces Accords.  Le Sous-Secrétaire général a rappelé que tous les acteurs concernés doivent s’acquitter de leurs responsabilités et se consacrer à la pleine mise en œuvre des Accords de Minsk.  La communauté internationale a la responsabilité de les y aider, a-t-il noté.

Pendant ce temps, la mission d’évaluation des droits de l’homme en Ukraine dépêchée par les Nations Unies continue de rendre compte de la situation des droits de l’homme dans le pays, a déclaré M. Toyberg-Frandzen, qui a précisé que son prochain rapport mensuel serait publié le 20 novembre.  La mission considère une prorogation de sa présence dans le pays au-delà du 15 décembre, a-t-il indiqué.  Par ailleurs, les agences humanitaires des Nations Unies renforcent leur présence pour pouvoir venir en aide à plus d’un million de personnes déplacées dans le pays ou à l’extérieur, et les Nations Unies mènent actuellement une évaluation de grande ampleur en prévision de la reconstruction, a dit le Sous-Secrétaire général.  Enfin, le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, Jeffrey Feltman, doit retourner prochainement en Ukraine, a-t-il dit.

Les espoirs de renouveau incarnés par les récentes élections parlementaires risquent d’être éclipsés par l’aggravation de la situation dans l’est du pays, a averti M. Toyberg-Frandzen, qui s’est dit très préoccupé par la possibilité d’une reprise des combats sur une grande échelle.  Il a jugé tout aussi catastrophique la possibilité que le conflit continue de bouillonner pendant des mois, avec des combats sporadiques de faible intensité alternant avec des périodes d’hostilités plus marquées.  Il a en outre évoqué la possibilité d’un « gel » du conflit pouvant durer des années, voire des décennies.  Il est de notre responsabilité de s’assurer qu’aucun de ces scénarios ne se réalise, a déclaré le Sous-Secrétaire général.  La seule alternative aux combats est, pour les Ukrainiens, de reconstruire ensemble un pays sable et sûr, dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, a estimé le Sous-Secrétaire général.  Toutes les parties doivent respecter les Accords de Minsk, et les Nations Unies sont disposées à les y aider quand les parties le jugeront approprié, a conclu M. Toyberg-Frandzen.

S’exprimant par visioconférence, M. ERTUĞRUL APAKAN, Chef de la Mission spéciale de surveillance en Ukraine de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a déclaré que son équipe était déployée depuis avril dernier en Ukraine, où elle s’acquitte de diverses tâches d’observation, notamment dans les domaines électoral et des droits de l’homme, et ce, dans un environnement en constante évolution.  L’escalade des violences dont le Donbass est le théâtre, notamment dans les villes de Donetsk et de Louhansk, est très préoccupante, a-t-il affirmé, faisant état de mouvement de chars opérés par les forces séparatistes.  La Mission de l’OSCE est compliquée par le fait qu’en lieu et place des 500 observateurs dont elle était supposée être dotée, « nous n’en disposons que de 266 », a déploré M. Apakan.  Après avoir assuré que la Mission est en liaison permanente avec le Groupe de contact trilatéral et l’ensemble des parties prenantes, M. Apakan a rappelé que le Mémorandum d’Accord de Minsk contient une feuille de route très claire, même s’il est regrettable de ne pas avoir pu la mettre en œuvre jusqu’à présent.

En outre, a poursuivi le Chef de la Mission de l’OSCE, une centaine de kilomètres de la frontière n’est toujours pas contrôlée par les forces gouvernementales ukrainiennes.  S’il a été possible d’utiliser des drones de surveillance pour pallier ce problème, M. Apakan a assuré qu’ils sont régulièrement pris pour cible.  Par ailleurs, les personnes déplacées sont de plus en plus nombreuses, ce qui est une tendance très préoccupante à l’approche de l’hiver, a-t-il noté.  Toutefois, les élections législatives du 26 octobre dernier ont créé, a-t-il estimé, une nouvelle atmosphère dans le pays, et l’OSCE s’efforcera de son côté de promouvoir le dialogue sur le terrain en vue d’améliorer la situation.  Mais la liberté de mouvement et d’accès de la Mission de l’OSCE continue d’être mise à mal, a reconnu le Chef de la Mission, alors que ni le Protocole de Minsk, ni le Mémorandum d’Accord qui a suivi ne prévoient de limites aux déplacements des observateurs, qui dépendent donc du bon vouloir des forces en présence.  Selon M. Apakan, un cessez-le-feu durable ne sera possible qu’avec la coopération de tous.  Il a donc demandé en conclusion aux parties de respecter les documents de Minsk pour rétablir la paix et la sécurité dans le pays.

Mme HEIDI TAGLIAVINI, Représentante de la présidence en exercice de l’OSCE, a rappelé qu’à l’heure où elle s’exprime, les combats se poursuivent dans l’est de l’Ukraine.  Le Protocole de Minsk du 5 septembre et le Mémorandum d’Accord visant à en faciliter la mise en œuvre conservent pourtant toute leur pertinence.  Même si la violence a momentanément reculé, le cessez-le-feu n’est toujours pas respecté, a-t-elle relevé, affirmant que des heurts continuent de se produire dans le Donbass, notamment des combats à l’arme lourde, dans lesquels des chars d’assaut auraient été utilisés, faisant des victimes aussi bien parmi les civils que les militaires.  Elle a donc appelé les parties prenantes à respecter la ligne de séparation des forces en présence, avant de rappeler que les parties aux documents de Minsk se sont engagées à retirer mercenaires et éléments étrangers des zones de conflit.

Quant aux « prétendues » élections organisées le 2 novembre dernier à Donetsk et Louhansk, elles ont été jugées inacceptables par une large partie de la communauté internationale, a rappelé Mme Tagliavini.  « Le processus de mise en œuvre du document de Minsk est donc à la croisée des chemins »: d’un côté, le cessez-le-feu a été partiellement respecté dans une grande partie du pays et une centaine d’otages libérés; de l’autre, nombre d’engagements pris à Minsk sont restés lettre morte.  La Représentante a donc encouragé à l’ouverture d’un dialogue politique entre toutes les parties prenantes, soulignant aussi l’importance de lancer un programme de relèvement économique et une assistance humanitaire dans les zones de conflit.  « Enfin, et surtout, il sera impossible de parvenir à un cessez-le-feu en l’absence d’un contrôle de la frontière orientale de l’Ukraine », a assuré Mme Tagliavini, qui s’est dite convaincue que le conflit ne serait réglé que de manière pacifique et négociée, avec les documents de Minsk comme « repères ».

Mme SAMANTHA POWER (États-Unis) a souligné le rôle crucial joué par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur le terrain.  « La situation évolue mais les problèmes restent les mêmes », a-t-elle ajouté, estimant qu’ils ne découlaient de rien d’autre que de la violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine par la Fédération de Russie. 

« Les Russes et les séparatistes ne respectent pas la parole donnée, profitant notamment de pauses dans les combats pour étendre leur avancée », a condamné Mme Power, citant par exemple l’intensification des attaques menées près de l’aéroport de Donetsk par les séparatistes ukrainiens.  Les attaques ont aussi pris pour cible des drones de l’OSCE, touchés par des armes fournies par la Fédération de Russie, lesquelles attaques violent l’espace aérien de l’Ukraine. 

La représentante a par ailleurs déploré la détention de 500 personnes par les séparatistes, « dont des artistes et des défenseurs des droits de l’homme ».  Après avoir regretté l’envoi de forces et d’équipements de l’autre côté de la frontière par la Fédération de Russie, Mme Power a répété que « les Russes ont négocié un plan de paix pour le fouler à chaque étape de sa mise en œuvre ». 

S’agissant des élections du 2 novembre, elle a considéré qu’elles constituaient une violation du point 9 du Protocole de Minsk.  « Il s’agit d’une tentative éhontée d’utiliser la force au profit de l’instauration d’une démocratie qui ne trompe personne », a-t-elle encore souligné.  « M. (Sergey) Lavrov a dit que les élections faisaient partie du Protocole.  C’est faux, et elles n’ont rien à voir avec l’amélioration de la situation humanitaire dans le Donbass. » 

« Les Ukrainiens ont choisi des dirigeants qui recherchent la diffusion des tensions, pas de les attiser », a déclaré la représentante des États-Unis.  Selon elle, « il n’existe pas de solution militaire à cette crise, comme l’a souligné aujourd’hui l’OSCE et comme le dit depuis le début l’ONU ».  « Mais la partie russe et les séparatistes qu’elle appuie ne tiennent pas leurs engagements. »

Mme Power a jugé qu’il était impossible d’empêcher un nouveau conflit tant que des signataires du Protocole de Minsk le foulent au pied de manière répétitive.  « Ce que nous devons faire, c’est continuer à exercer une pression jusqu’à ce que la Fédération de Russie choisisse la désescalade », a-t-elle conclu.

M. OLIVIER NDUHUNGIREHE (Rwanda) a déclaré que depuis la dernière réunion du Conseil de sécurité sur le sujet, la situation sécuritaire en Ukraine avait continué de se détériorer.  « À chaque avancée, les parties anéantissent les progrès aux dépens de la population, et ce, alors que l’hiver approche. »

« Elles ne sont pas prêtes à mettre pleinement en œuvre le Protocole de Minsk, comme en témoigne le non-respect du cessez-le-feu le long de la frontière orientale de l’Ukraine », a-t-il ajouté avant de juger inconstitutionnelles les élections du 2 novembre, lesquelles, a-t-il dit, sapent de fait la validité du Protocole de Minsk.  « Il est temps que tous les signataires se réengagent à l’égard de cet Accord, sinon notre effort collectif ne suffira pas, et la situation risquera de dégénérer en une guerre sur le continent européen », a averti le représentant.

M. BANTE MANGARAL (Tchad) s’est déclaré préoccupé par l’intensification des combats dans l’est de l’Ukraine, notamment à Donetsk et à Louhansk, où les forces gouvernementales et séparatistes se livrent d’âpres combats.  Appelant les parties à respecter les Accords de Minsk, à commencer par le cessez-le-feu qu’il prévoit, le représentant s’est dit ému du nombre de victimes civiles faites jusqu’à présent, plus de 4 000, auxquelles s’ajoutent plus de 100 000 personnes déplacées, « un chiffre particulièrement inquiétant à l’approche de l’hiver », a dit le représentant.  Il a en conclusion encouragé les parties à mettre fin aux hostilités.

M. KAYODE LARO (Nigéria) s’est dit alarmé de la détérioration de la situation dans le Donbass, affirmant que les élections organisées le 2 novembre dernier à Donetsk et à Louhansk allaient à l’encontre du Protocole de Minsk.  Le représentant a donc demandé aux nations exerçant une influence sur les parties au conflit de le faire pour parvenir à une solution négociée.

M. EIHAB OMAISH (Jordanie) a considéré que les renforts militaires et l’afflux illégal d’armes dans les régions ukrainiennes, tels qu’ils sont décrits dans le rapport de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, constituent une violation grave du Protocole de Minsk.  « Attiser les tensions, c’est faire fi des efforts de la communauté internationale pour rétablir le calme sur tout le territoire de l’Ukraine et résoudre la crise humanitaire, qui menace de s’aggraver à l’approche de l’hiver », a souligné le délégué jordanien.

Il a exhorté les Ukrainiens de tous bords à s’unir pour remettre le pays sur la voie des réformes politiques, de la réconciliation nationale et du développement.  « La Jordanie continuera de soutenir le Protocole de Minsk, dont la mise en œuvre rapide des dispositions relatives au cessez-le-feu nécessite la pleine coopération de toutes les parties », a-t-il conclu.

M. MARIO OYARZÁBAL (Argentine) a estimé que les Accords de Minsk constituaient une feuille de route tout à fait pertinente pour parvenir à un règlement pacifique et négocié du conflit dans l’est de l’Ukraine.  Malheureusement, a-t-il dit, les mesures unilatérales prises par les parties au conflit et le regain de violences constatées à Donetsk et à Louhansk bloquent pour l’heure leur mise en œuvre. 

Le représentant a ensuite salué les mesures prises par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), soulignant la « responsabilité politique et institutionnelle » du Conseil de sécurité face à cette situation.  L’Argentine a donc regretté qu’il n’eût pas été en mesure de jouer un « rôle positif » dans ce dossier et qu’il fût miné par les « divisions ». 

Parallèlement aux efforts déployés pour résoudre la crise par des voies diplomatiques, la délégation a salué le travail effectué par les organisations humanitaires, « parfois au péril de leur vie ».  Elle a, pour finir, insisté sur la nécessité d’ouvrir des enquêtes indépendantes crédibles sur toutes les violations des droits de l’homme commises dans le cadre de conflit, pour que leurs auteurs soient poursuivis en justice et empêcher que ne s’installe une culture d’impunité.

Mme SYLVIE LUCAS (Luxembourg) s’est dite préoccupée par la grave détérioration de la situation dans l’est de l’Ukraine depuis le 2 novembre 2014, jour où les séparatistes ont tenu des élections illégales dans les régions de Donetsk et de Louhansk.  Alors que le Protocole et le Mémorandum de Minsk, signés les 5 et 19 septembre 2014, ont tracé la voie d’un règlement pacifique du conflit, le non-respect des dispositions clefs des Accords conclus à Minsk a contribué à une nouvelle escalade des tensions et à l’intensification des combats dans plusieurs régions de l’est de l’Ukraine, a ajouté Mme Lucas. 

Dans ce contexte, elle s’est déclarée très préoccupée par les nouvelles concentrations de troupes russes à la frontière ukrainienne et les mouvements accrus de convois militaires dans les zones contrôlées par les séparatistes et qui se dirigent vers les positions de l’armée ukrainienne.  Elle a précisé que la Mission d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) avait fait ces derniers jours état d’importants convois de camions militaires sans plaques d’immatriculation, transportant des troupes et armes lourdes.  « Un convoi de 9 chars, 4 chars T-72 et 5 chars T-64 a été observé le 8 novembre se dirigeant vers l’ouest », a précisé la représentante du Luxembourg.

Par ailleurs, elle a condamné le simulacre d’élections qui se sont tenues le 2 novembre dans les régions de l’est de l’Ukraine contrôlées par les séparatistes.  Elle a précisé que ces élections constituaient une violation flagrante des engagements que la Russie et les représentants des groupes armés illégaux ont pris en signant le Protocole de Minsk. 

Elle a salué les mesures concrètes prises par l’Ukraine pour respecter ses engagements au titre des Accords de Minsk, notamment l’adoption des lois prévoyant une amnistie et un statut temporaire d’autonomie locale.  Elle a jugé crucial que la Mission d’observation des postes frontière de Goukovo et Donetsk soit étendue dans les meilleurs délais à d’autres postes frontière.  Elle a dit l’urgence de mettre fin à un conflit qui a déjà fait 4 000 victimes depuis avril 2014 en expliquant que le chemin pour sortir du conflit passait par l’application de bonne foi du Protocole de Minsk et du Mémorandum de Minsk. 

M. OH JOON (République de Corée) s’est dit préoccupé par les violations flagrantes par les séparatistes des Accords de Minsk signalées dans le rapport de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).  « Nous engageons les parties à éviter toute provocation qui pourrait faire dérailler le Protocole, et toutes les interventions extérieures doivent cesser immédiatement », a-t-il demandé, en soulignant que la solution politique fondée sur les engagements de Minsk devait être reconnue et relancée sans délai. 

M. MARK LYALL GRANT (Royaume-Uni) a insisté sur le fait que la situation en Ukraine représentait une menace croissante à la paix et sécurité internationales.  « Une seule raison à cela: le comportement russe qui fait fi de la Charte des Nations Unies depuis le début de la crise », a-t-il tranché.  Pour le représentant, « la violation des Accords de Minsk est une étape de plus vers le pire ».  « La fourniture d’armes et de contingents aux rebelles dans les zones séparatistes foule au pied le Protocole de Minsk. » 

« Ce que la Mission de l’OSCE observe ne trompe plus personne, et les tentatives de tromperie de la Fédération de Russie afin de cacher l’envoi de colonnes vers l’Ukraine pour appuyer les opérations des séparatistes deviennent une farce », a encore affirmé le représentant.  « Si la Fédération de Russie ne fournit pas une aide aux séparatistes, pourquoi bloque-t-elle les activités des observateurs internationaux, et pourquoi brouille-t-elle l’espace aérien ukrainien pour parasiter les vols de drones de l’OSCE autour de Donetsk », a-t-il demandé.

« Ceux qui contrôlent ces territoires ne veulent pas coopérer », a-t-il assuré, qualifiant en outre d’illégales et de provocation les élections du 2 novembre.  « Il n’y a que la Fédération de Russie pour ne pas reconnaître cette illégalité. »  Le représentant britannique a par ailleurs demandé que ne soit pas oubliée la crise humanitaire dans l’est du pays, en particulier dans la péninsule de Crimée « où les missions de l’OSCE ne peuvent toujours pas se rendre ».  

« En Crimée, les autorités de facto tentent de retirer à la région et à ses habitants leur identité ukrainienne, notamment en s’en prenant brutalement aux Tatares. »  Enfin, il a souligné la nécessité de juger la Fédération de Russie à l’aune de ses actes et non de ses paroles, insistant sur le fait que la désescalade « passe par un vrai engagement de la partie russe, qui doit cesser d’appliquer de manière aussi sélective le Protocole de Minsk ».

M. WANG MIN (Chine) a regretté les hostilités observées récemment dans l’est de l’Ukraine.  Il s’est toutefois félicité des accords récemment conclus sur le gaz entre Kiev et Moscou.  Le représentant a ensuite encouragé toutes les parties prenantes à mettre en œuvre les Accords de Minsk, afin de parvenir à un cessez-le-feu et à une amélioration de la situation humanitaire.  

Selon lui, une solution à la crise dans la région exige de prendre en compte les aspirations de toutes les populations ukrainiennes.  Rappelant qu’elle avait toujours respecté les principes de souveraineté territoriale et de non-ingérence, la Chine a assuré qu’elle continuerait de participer aux efforts visant à trouver une solution à la crise actuelle.

M. FRANCOIS DELATTRE (France) a déclaré que l’agitation de séparatistes aidés de l’extérieur s’était répandue dans l’est du pays, suscitant troubles, violations des droits de l’homme et une situation humanitaire grave.  Il a condamné avec la plus grande fermeté cette ingérence dans les affaires intérieures ukrainiennes, au mépris de sa souveraineté et de son intégrité territoriale.

Il a dit que les élections organisées le 2 novembre par les séparatistes dans la partie du Donbass qu’ils occupaient contrevenaient au texte et à l’esprit du Protocole de Minsk qui prévoit des élections locales en conformité avec la loi ukrainienne. 

Il a dit que les Accords du 5 et 19 septembre restaient une bonne base pour envisager une sortie de crise qui repose sur trois axes: le respect du cessez-le-feu, la surveillance de la frontière orientale de l’Ukraine et des discussions politiques afin de trouver une solution pérenne.  « Notre objectif est de ramener Ukrainiens, séparatistes et Russes autour de la table des négociations, pour mettre fin à l’escalade », a-t-il insisté.

Il a jugé très préoccupants les mouvements militaires de la fin de semaine à la frontière russo-ukrainienne, confirmés par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), en notant que plusieurs dizaines de véhicules militaires dont des chars étaient entrés en Ukraine ces derniers jours. 

Il a dit que le renforcement du dispositif militaire du côté séparatiste et la multiplication des mouvements de troupes faisaient craindre une reprise des combats sur une plus grande échelle.  L’annonce de la création d’une armée du Donbass et d’une mobilisation générale est particulièrement inquiétante, a-t-il ajouté, en souhaitant que les séparatistes et leurs soutiens prouvent qu’ils sont prêts au dialogue et à la recherche de la paix. 

Le représentant de la France a appelé à nouveau la Russie à empêcher le transfert d’armements et d’hommes à travers sa frontière et à faire usage de toute son influence sur les séparatistes pour que soit pleinement respecté le cessez-le-feu.  Il a dit que la question de la surveillance de la frontière russo-ukrainienne restait un point central pour l’obtention d’une solution politique à la crise. 

Il a estimé que le mandat de la Mission de l’OSCE en territoire russe devait être renforcé et élargi le plus rapidement possible à d’autres postes frontière en précisant que les sanctions ne visaient pas à punir mais à inciter au dialogue.  Il a estimé que la conclusion des négociations sur le gaz, il y a une dizaine de jours, était un signe que certaines avancées pouvaient être obtenues par le dialogue. 

« L’Europe a donné une alternative claire entre un alourdissement des sanctions ou un réexamen si la situation sur le terrain témoigne d’une mise en œuvre réelle des Accords du 5 septembre », a-t-il dit, avant d’appeler à une mobilisation en faveur de la désescalade et du rétablissement de relations de bon voisinage entre États indépendants et souverains.

M. CARLOS OLGUÍN CIGARROA (Chili) s’est dit préoccupé par l’escalade de la crise dans l’est et le sud de l’Ukraine.  Il est urgent de respecter à la lettre le cessez-le-feu, a-t-il dit, engageant toutes les parties à respecter les Accords de Minsk, qui sont les meilleurs instruments pour parvenir au rétablissement de la paix et de la sécurité dans le Donbass.  

Il est tout aussi urgent de répondre aux besoins humanitaires qui se posent dans la région, en particulier parmi les nombreuses personnes déplacées, a poursuivi le représentant.  La délégation a souligné elle aussi l’importance de renforcer l’état de droit et de respecter l’intégrité territoriale de l’Ukraine et le principe de non-ingérence dans les affaires internes des États, comme le prévoit la Charte des Nations Unies. 

Le Chili a affirmé en conclusion qu’il continuerait d’appuyer toutes les démarches susceptibles de rétablir la stabilité dans le pays.

Mme RAIMONDA MURMOKAITĖ (Lituanie) a dit que le conflit en Ukraine n’était pas une guerre civile, mais une guerre menée par la Russie contre l’Ukraine parce qu’elle a choisi la voie de l’Europe.  Elle a précisé que la Russie s’opposait à l’élargissement de la Mission d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui ne contrôle que deux kilomètres parmi les 400 kilomètres de frontière commune entre la Russie et l’Ukraine. 

Elle a affirmé que les élections organisées le 2 novembre par les séparatistes dans la partie du Donbass qu’ils occupaient contrevenaient au Protocole de Minsk.  Elle a noté que parmi les observateurs électoraux de ces élections illégales avaient figuré des extrémistes nationalistes, des sympathisants nazis et des antisémites de plusieurs pays européens.  Elle s’est étonnée du fait que Moscou prétende combattre le fascisme en Ukraine aux côtés de telles personnalités. 

Elle a souligné que la Russie se préparait à envoyer son septième convoi vers l’Ukraine en expliquant que les séparatistes gagnaient du terrain après chaque convoi.  Elle a précisé que l’agression russe en Ukraine avait déjà fait 400 000 déplacés, 4 035 morts et 9 336 blessés alors que 5,2 millions de personnes vivaient désormais dans la zone affectée par le conflit. 

Elle a déclaré que seul un retour durable au cessez-le-feu permettrait d’atténuer la tension, avant de souligner que l’Ukraine avait apporté sa part.  Elle a demandé à la Russie de cesser de menacer ses voisins et d’accepter l’esprit et la lettre des Accords de Minsk en permettant une surveillance internationale illimitée de la frontière russo-ukrainienne. 

Elle a estimé que la Russie portait la responsabilité d’une nouvelle escalade de la situation.  Elle a dit que toute tentative visant à redessiner la carte de l’Europe 25 ans après la chute du Mur de Berlin était criminelle et sapait les fondations mêmes des Nations Unies. 

M. ALEXANDER A. PANKIN (Fédération de Russie) a demandé à ses collègues de ne pas transformer une réunion du Conseil de sécurité « en une farce hystérique ».  « L’analyse de ceux qui travaillent sur place et œuvrent à la résolution des problèmes dans le sud-est du pays est a priori utile.  Mais les inviter ici les écarte de leur rôle principal et conduit à une regrettable et dangereuse politisation des débats », a jugé le représentant. 

Selon lui, la Mission de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe n’a pas pour mandat de chercher une solution à la crise, et les déclarations que ses analyses inspirent relèvent de la propagande.  « La situation est difficile, c’est indéniable, caractérisée par une concentration de troupes ukrainiennes le long de la ligne de front, ce qui oblige les rebelles à se défendre, en particulier près du Donbass. »

« Chaque jour des civils meurent, et les bombardements ukrainiens sont systématiques », a ajouté le délégué.  Il a ensuite affirmé que « de vérité, il n’y en a qu’une », livrée selon lui de manière tronquée par l’OSCE.  S’agissant des allégations de transferts d’armes et de convois russes vers l’Ukraine, il les a qualifiées de mensonges et de déclarations de propagande.  « La frontière orientale fait l’objet d’une surveillance très attentive, en premier lieu de l’espace aérien.  « Nous déplorons l’absence totale de réaction de l’OSCE quant au redéploiement massif des forces ukrainiennes. »  La Mission ne donne en effet aucune information sur ces mouvements, « son tableau de la situation est par conséquent incomplet, inexact et provocateur ».  

Assurant que son pays respectait pleinement les termes du Protocole de Minsk, il a accusé Kiev de ne pas s’intéresser aux dispositions relatives à son volet humanitaire.  Sur ce point, il a qualifié d’immorales les accusations portant sur la nature de l’aide humanitaire fournie par la Fédération de Russie aux populations du sud-est de l’Ukraine. 

Pour ce qui est des élections du 2 novembre, il a affirmé qu’elles s’étaient déroulées dans le calme et avaient été marquées par une importante participation.  « Des mesures ont été prises pour garantir un retour à la normale dans la région », a-t-il en outre noté, soulignant en conclusion que ces élections formaient la base « d’un dialogue sérieux entre les représentants du Donbass et le pouvoir central ». 

M. GARY QUINLAN (Australie) a déclaré que le rapport présenté il y a deux semaines par le Sous-Secrétaire général aux affaires politique était déjà inquiétant, et que la situation dans l’est de l’Ukraine s’était encore détériorée depuis lors.  L’Australie est très préoccupée par la situation actuelle, « et notamment par les violations par la Russie des annexes aux Accords de Minsk », du fait qu’elle ne retire pas son personnel d’Ukraine.  Le représentant a dénoncé comme une autre violation de l’Accord le fait que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a été empêchée de surveiller correctement la frontière entre l’Ukraine et la Russie.  Il a également condamné les « prétendues élections » organisées par les rebelles dans les zones de l’est de l’Ukraine sous leur contrôle.

L’Australie se félicite des élections parlementaires ukrainiennes du 26 octobre, a déclaré M. Quinlan, qui a jugé encourageant le rapport de l’OSCE sur les conditions de leur tenue.  Tout en regrettant que la population de la Crimée et de plusieurs parties de l’est de l’Ukraine contrôlées par les rebelles n’aient pu s’exprimer, le représentant a salué les efforts des autorités ukrainiennes pour assurer le droit de vote du plus grand nombre.

M. Quinlan a rappelé la volonté de son pays de poursuivre les responsables de la destruction du vol MH17 de la Malaysia Airlines.  Il a dit apprécier la confirmation donnée hier par le Président russe Vladimir Poutine au Premier Ministre australien Tony Abbott de son soutien à la pleine mise en œuvre de la résolution 2166 (2014) et à une commission internationale d’enquête indépendante sur les causes de la catastrophe.

Toutefois, a déclaré le représentant, un retour sur le site ne sera possible que lorsque les séparatistes soutenus par la Russie respecteront le cessez-le-feu.

Plus généralement, le respect du cessez-le-feu et des engagements pris en vertu des Accords de Minsk est essentiel pour parvenir à une paix durable en Ukraine, laquelle devra reposer sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, a déclaré M. Quinlan, pour qui ce ne sera possible que si la Russie s’engage réellement. 

Le représentant a dénoncé la « campagne persistante de déstabilisation délibérée » menée par la Russie, qu’il a accusée d’alimenter les troubles et de saper l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine.  Le chemin pour mettre fin à la violence dans l’est de l’Ukraine est simple, a poursuivi M. Quinlan: « C’est l’arrêt du soutien de la Russie aux séparatistes, le retrait de ses troupes et moyens en Ukraine et son engagement dans un réel dialogue avec l’Ukraine ».

L’OSCE doit aussi être autorisée à jouer son rôle de surveillance de la frontière.  Le refus de la Russie de répondre à l’appel de la communauté internationale en faveur de la désescalade ne peut qu’isoler davantage la Russie, a  conclu M. Quinlan.

M. YURIY SERGEYEV (Ukraine) a rappelé qu’avec l’assistance du Conseil de sécurité et des États membres de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), un groupe de contact trilatéral réunissant l’Ukraine, la Fédération de Russie et l’OSCE elle-même avait été formé avec pour objectif de parvenir à un règlement pacifique de la crise dans l’est de l’Ukraine. 

Une série de réunions, auxquelles ont été invités les dirigeants des groupes séparatistes, a permis de déboucher sur la signature par tous les participants, à Minsk, les 5 et 19 septembre, respectivement, du Protocole et du Mémorandum d’Accord dits de Minsk.  Aussi, a-t-il regretté les « violations grossières » de ces Accords par la Fédération de Russie et le « prétendu leadership » des militants séparatistes, à commencer par le non-respect du cessez-le-feu bilatéral et le maintien de groupes armés illégaux, d’équipements militaires et de combattants et mercenaires.

« Depuis le 5 septembre, les forces ukrainiennes et les civils ont été pilonnés plus de 2 700 fois, 129 militaires ont été tués, 650 autres ont été blessés, et au moins 65 victimes sont à déplorer parmi les civils », a affirmé le représentant.

En outre, depuis le 4 novembre dernier, les militants et leurs soutiens russes ont multiplié les manœuvres militaires dans les secteurs de Donetsk et de Louhansk, a poursuivi M. Sergeyev, pour qui ces mouvements de troupes et d’armement augurent d’une offensive imminente dans différentes localités situées le long de la ligne de contact.

« Nous ne pouvons pas exclure une tentative de créer un corridor terrestre depuis la Russie vers la Crimée momentanément occupée », a-t-il dit.  Une des autres violations flagrantes des Accords de Minsk est, selon le représentant, l’afflux illicite, de Russie vers l’Ukraine, d’armements militaires lourds et d’équipements, ainsi que de personnels et de carburant, ininterrompu depuis le 5 septembre, et sans que la moindre explication ne soit donnée à l’OSCE, au Conseil de sécurité ou au Gouvernement ukrainien.  « S’agit-il de préparatifs à une invasion armée plus poussée en Ukraine », s’est-il alarmé devant le Conseil.

Contrairement à ce qu’affirme la « propagande russe », a dit le représentant, les forces ukrainiennes respectent le cessez-le-feu, en faisant de leur mieux pour éviter les opérations militaires de grande envergure et n’usent de leurs armes qu’en cas de légitime défense lors d’attaques commises par des militants. 

« Disons-le clairement: la seule raison pour laquelle une guerre ouverte n’a pas encore éclaté dans l’est de l’Ukraine, c’est la retenue de notre pays, toujours engagé en faveur d’un règlement pacifique de la crise et de l’application des Accords de Minsk », a tranché M. Sergeyev. 

Il a accusé les militants soutenus par la Russie de ne pas garantir la sécurité des membres de la Mission spéciale de surveillance de l’OSCE dans les zones sous leur contrôle et, occasionnellement, de les empêcher de s’acquitter de leur mandat, soulignant qu’avec l’aide de la technologie de pointe russe, ils parvenaient à brouiller les communications avec les drones de l’OSCE, compliquant les efforts de surveillance dans la région.

La délégation a rappelé que la loi sur le statut spécial des oblasts de Donetsk et de Louhansk avait été adoptée le 16 septembre dernier par le Parlement ukrainien, comme le demandaient les Accords de Minsk.  Dans ce contexte, des élections sur la « gouvernance autonome locale légitime » étaient prévues le 7 décembre prochain. 

Sans en tenir compte, les « terroristes appuyés par les Russes » ont organisé le 2 novembre des « élections » illégales de « prétendus présidents et parlements » de certaines entités illégitimes autoproclamées, s’est élevé M. Sergeyev, qui s’est dit très préoccupé par la manière dont la Fédération de Russie manipule les droits des peuples à l’autodétermination.

Reprenant la parole, le représentant de la Fédération de Russie a reconnu que la normalisation de la situation était bien la tâche la plus importante, « mais encore faut-il y croire, encore faut-il faire confiance aux autorités de Kiev, qui ne semblent pas attachées à un règlement diplomatique du conflit ». 

Citant à maintes reprises le Président ukrainien Petro Porochenko, il a assuré que tout arrêt des hostilités « ne servirait qu’à un redéploiement de ses troupes ».  « Dans ses propos, pas un mot sur l’application du Protocole de Minsk, mais des allusions répétées à une victoire sur le champ de bataille », a-t-il dit. 

S’adressant directement à son homologue ukrainien, il lui a demandé pourquoi la question de la démarcation avait disparu du débat.  « Vous refusez d’en parler, mais vous m’avez demandé pourquoi des centaines d’unités russes sont concentrées le long de la frontière avec l’Ukraine.  D’où sortez-vous ces informations qui m’impressionnent beaucoup?  Si troupes russes il y a, elles sont déployées sur le sol de mon pays, et elles circulent à travers mon pays », a-t-il dit.  Il a conclu en estimant qu’annoncer « l’imminence d’un déploiement en Ukraine » n’aidait en rien à atténuer les tensions.

Le représentant de l’Ukraine a cité, en russe, l’auteur russe Ivan Tourgueniev: « Chacun a sa propre vérité, mais la sincérité est unique ».  « Votre Président, a-t-il lancé à l’adresse de son collègue russe, avait promis à la communauté internationale de retirer ses troupes et ses armes du territoire ukrainien.  Pourquoi, en dépit des promesses faites, des centaines d’hommes russes se trouvent encore en Ukraine », a-t-il dit, faisant état de chiffres issus de différentes sources à ce sujet et soulignant que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) continuait de demander le respect des accords auxquels vous êtes parties sur le terrain. 

 

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