Conseil de sécurité: une MINUL forte doit être maintenue dans le contexte de crise sanitaire que traverse le Libéria, déclare M. Hervé Ladsous
Le Conseil de sécurité a examiné, ce matin, la situation au Libéria, l’un des trois pays d’Afrique de l’Ouest les plus touchés par l’épidémie d’Ebola avec la Guinée et la Sierra-Leone.
Les membres du Conseil ont ainsi entendu un exposé du Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Hervé Ladsous, qui s’est attardé sur les conséquences politiques de la crise sanitaire. À cet égard, il s’est réjoui que la situation en matière de sécurité ait cessé de se détériorer, autorisant les autorités libériennes à accélérer la décentralisation de la fourniture de services publics. M. Ladsous a également indiqué qu’hier, l’état d’urgence de 90 jours avait été levé et que les élections sénatoriales, qui étaient prévues pour le 14 octobre dernier, ont été reportées au 16 décembre prochain. Le Secrétaire général adjoint a surtout insisté sur la nécessité d’envisager, dès maintenant, la nature de l’aide internationale dans le contexte de reconstruction post-Ebola. À ce propos, il a prôné la prorogation pour une période d’un an du mandat de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), qui expire le 31 décembre.
La représentante du Libéria, Mme Marjon V. Kamara, a confirmé que les élections sénatoriales se tiendraient le 16 décembre 2014, dans des conditions propices, a-t-elle espéré, à la conduite « souple » du processus électoral. Elle a aussi estimé qu’il était indispensable, à ce stade, de maintenir la présence dans son pays d’une MINUL renforcée sur les plans matériel et humain et qui agit de concert avec la Mission des Nations Unies pour l’action d’urgence contre l’Ebola (MINUAUCE).
Le représentant de la Suède, M. Per Thoresson, dont le pays préside la configuration « Libéria » de la Commission de consolidation de la paix (CCP), a également plaidé pour le maintien d’une « présence internationale forte au Libéria ». « En raison des risques d’instabilité que fait peser Ebola, la décision de reconduire le mandat de la MINUL serait bienvenue », a-t-il déclaré.
Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix a d’abord expliqué que la crise sanitaire au Libéria avait eu pour effet délétère d’aggraver les différends politiques et les divisions sociales. « Les institutions nationales sont affaiblies et la survie des plus vulnérables économiquement est aujourd’hui en jeu », a-t-il constaté. « La possibilité de toucher et de réconforter les malades a été détruite par le virus », a encore déploré M. Ladsous. Se voulant ensuite optimiste à l’heure « où le Libéria vit une tragédie nationale », il a déclaré que la crise actuelle était une occasion à saisir pour accélérer la transformation politique du pays. Il s’est ainsi félicité de ce que les autorités libériennes aient su profiter de la baisse des violences pour intensifier la décentralisation de la fourniture des services publics, et du fait que la Commission nationale des droits de l’homme ait demandé un renforcement du contrôle « démocratique » des Forces libériennes de sécurité.
« Nous devons encourager le peuple et le Gouvernement du Libéria non seulement à répondre à la crise sanitaire mais aussi à préparer la reconstruction post-Ebola du pays », a-t-il par ailleurs souligné, en rendant un hommage appuyé à la résilience dont ont fait preuve les Libériennes et les Libériens. Pour le Chef des opérations de maintien de la paix, la situation actuelle exige que la MINUL soit maintenue et que son volet politique soit renforcé. Il a également estimé que le retrait d’une partie des contingents de troupes et de police de la Mission, que le Secrétaire général a recommandé dans un rapport, devrait être réexaminé une fois que les autorités compétentes de santé auront officiellement déclaré la fin de la crise sanitaire dans le pays et la région.
« Sans sous-estimer la résilience du peuple libérien face à la pandémie, il nous faut reconnaître que l’assistance internationale a été indispensable pour contenir la propagation de la maladie à travers le pays », a réagi la représentante du Libéria, Mme Marjon Kamara. Notant que la levée, hier, de l’état d’urgence entrainerait la restauration de certaines libertés, y compris de mouvement, elle a assuré le Conseil de sécurité que le Gouvernement libérien maintiendrait une vigilance de tous les instants, à travers notamment une coopération accrue avec les autres pays touchés. Après avoir confirmé que les élections sénatoriales prévues pour le 14 octobre dernier auront lieu le 16 décembre prochain, Mme Kamara a estimé, qu’à ce stade, le retrait des Casques bleus de la MINUL aurait de graves conséquences sur le moral des populations.
Pour elle, ce retrait enverrait un message erroné selon lequel « la communauté internationale isole un pays et non pas une maladie ». « Une forte présence internationale dans le pays était et demeure toujours importante en tant que facteur de stabilisation, dans une situation où l’environnement social, politique et économique est particulièrement fragile », a-t-elle ainsi fait remarquer. C’est pourquoi, la représentante a demandé le maintien de la présence d’une MINUL renforcée sur les plans matériel et humain, agissant aux côtés de la Mission des Nations Unies pour l’action d’urgence contre l’Ebola (UNMEER) et de ses partenaires régionaux et internationaux.
M. Thoresson a expliqué que la Commission s’efforçait de répondre aux besoins en matière de sécurité et de gouvernance des trois pays touchés par Ebola. « Au Libéria, nous mettons l’accent sur le renforcement des capacités de mouvement et d’action de la Police nationale libérienne et de l’état de droit ». « La Commission propose également aux parties des mesures de confiance afin d’empêcher tous troubles sociaux supplémentaires qui viendraient compromettre ou ralentir la réponse internationale d’urgence à Ebola », a-t-il détaillé.
M. Thoresson a recommandé à tous les acteurs concernés à préparer dès à présent le troisième temps de la réponse d’urgence, à savoir la reconstruction post-Ebola. Il a annoncé que la Commission demanderait en ce sens au Secrétaire général une évaluation complète des répercussions de la pandémie sur les priorités libériennes en matière de consolidation de la paix. « Cette évaluation devra comporter des recommandations sur la fourniture d’un appui international efficace, en particulier économique », a-t-il précisé. M. Thoresson a appuyé les propos de M. Ladsous et de la délégation du Libéria, en soulignant qu’en raison des risques d’instabilité liés à Ebola et du besoin continue d’assistance sanitaire, « la décision de reconduire le mandat de la MINUL serait bienvenue ».