Des États Membres mettent en garde devant la Troisième Commission contre une politisation du Conseil des droits de l’homme
Venu présenter le dernier rapport annuel du Conseil des droits de l’homme*, le Président de cet organe, M. Baudelaire Ndong Ella (Gabon), a émis le vœu, cet après-midi devant la Troisième Commission, que la présente session de l’Assemblée générale puisse favoriser la sortie de l’impasse autour de la mise en œuvre de la résolution 24/24 du Conseil sur la coopération avec l’ONU, ses représentants et ses mécanismes dans le domaine des droits de l’homme.
« Il nous faut consolider la crédibilité et la notoriété actuelles du Conseil et toujours garder à l’esprit les raisons qui ont entraîné la disparition de la Commission des droits de l’homme », a-t-il affirmé devant la Commission chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles.
La Commission des droits de l’homme a été remplacée en 2006 par le Conseil des droits de l’homme en raison de fortes critiques sur la présence de nombreux pays en son sein accusés de violer les droits de l’homme.
Depuis sa création, le Conseil a mis en place plusieurs mécanismes favorisant l’examen de la situation des droits de l’homme de tous les États Membres sur un pied d’égalité, par le truchement de l’examen périodique universel, mais aussi le dialogue avec les représentants de la société civile.
Dans la résolution 24/24, qui avait été adoptée à l’issue d’un vote le 27 septembre 2013, le Conseil demandait au Secrétaire général, en coopération avec la Haut‑Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, « de désigner, au sein des structures existantes et pour l’ensemble du système, un point focal principal dont la mission sera de mobiliser toutes les parties prenantes, en particulier les États Membres, aux fins d’encourager la prévention des actes de représailles et d’intimidation auxquels expose la coopération ».
M. Ndong Ella s’est réjoui d’apprendre que des consultations informelles entre les différents groupes et pays avaient eu lieu sous les auspices du Président de la soixante-neuvième session de l’Assemblée générale, M. Sam Kutesa.
« Il serait souhaitable que cette résolution, adoptée par le Conseil des droits de l’homme, puisse trouver une issue durant la présente session de l’Assemblée générale », a-t-il déclaré. « Maintenant plus que jamais, nous avons besoin d’institutions fortes tel que le Conseil, pour la promotion et la protection des droits de l’homme partout dans le monde », a conclu M. Ndong.
S’agissant des ressources budgétaires, le Président du Conseil a proposé que l’ONU assure le financement « au lieu de s’en remettre aux contributions volontaires », en particulier pour ce qui est de l’augmentation prévue de 3 % à 5 % du budget.
Les délégations ont par ailleurs orienté le débat d’aujourd’hui sur la réforme en cours des méthodes de travail du Conseil, des pays comme le Bélarus ou l’Érythrée, qui font l’objet de rapports spécifiques, ont énergiquement mis en garde contre le risque qu’en devenant excessivement politisé, le Conseil emprunte la même voie que la Commission des droits de l’homme.
Les États-Unis, de leur côté, ont déclaré que l’approche relative à Israël « pêche par sa myopie », et ont proposé au Conseil d’examiner la question des territoires palestiniens « autrement que d’une manière spécifique ».
Le Pakistan a salué l’adoption d’une résolution du Conseil sur les drones armés et a évoqué l’impact négatif de « ces armes meurtrières » sur la population, l’environnement et les droits de l’homme.
La Troisième Commission poursuivra, mardi 18 novembre à 10 heures, son débat sur le rapport du Conseil des droits de l’homme.
* A/69/53 et A/69/53/Add.1
RAPPORT DU CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME (A/69/53 ET A/69/53/Add.1)
Déclaration liminaire, suivie d’un dialogue interactif
M. BAUDELAIRE NDONG ELLA (Gabon), Président du Conseil des droits de l’homme, a rappelé qu’il avait rendu compte à deux reprises, cette année, des travaux du Conseil à l’occasion des exposés conjoints de la Troisième et de la Cinquième Commissions sur les vingt-cinquième et vingt-sixième sessions du Conseil organisées lors de ses visites des mois d’avril et juillet de cette année dans le cadre du renforcement des relations institutionnelles entre Genève et New York. Il a également salué le capital de confiance que la Troisième Commission accorde au Conseil en vue de « promouvoir le respect et la défense de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales, pour tous, sans distinction aucune de façon juste et équitable ».
Il a affirmé que ce huitième cycle des travaux du Conseil s’était déroulé dans un contexte international difficile marqué par de nombreuses crises et conflits à répétition impliquant parfois des acteurs non étatiques. Ainsi, il a tenu ses trois sessions ordinaires, examiné 215 rapports et organisé 57 dialogues interactifs avec les titulaires de mandats des procédures spéciales aussi bien sur des questions thématiques que sur des situations et pays. Il a en outre organisé trois sessions extraordinaires pour apporter une réponse urgente à certaines situations de graves violations des droits de l’homme et du droit humanitaire.
À la demande de l’Éthiopie, et au nom du Groupe des États d’Afrique, le Conseil s’est réuni le 14 janvier 2014 en vue d’examiner les graves violations des droits de l’homme en République centrafricaine liées à la situation de guerre civile et des violences intercommunautaires dans ce pays. À la suite de cette session, le Conseil a nommé une Experte indépendante, Mme Marie-Thérèse Keita Bocoum, pour suivre la situation et appuyer les efforts de stabilisation et de pacification des autorités de transition de la République centrafricaine.
Le 23 juillet de cette année, le Conseil s’est réuni à la demande du Pakistan, au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) et du Groupe des États arabes, sur la situation des violations des droits de l’homme et des violences dans les Territoires palestiniens occupés depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, notamment à Gaza. Le Conseil a ensuite décidé de nommer une Commission d’enquête chargée de mener des investigations sur les allégations de graves violations des droits de l’homme et du droit humanitaire international commises par toutes les parties dans les Territoires palestiniens occupés y compris Jérusalem-Est et à Gaza.
M. Ndong Ella a souligné qu’en dépit des difficultés, il avait pu nommer les membres de cette commission qui a commencé ses investigations préliminaires. Ces membres sont venus il y a quelques jours faire une première mise à jour orale de leur mission au Président du Conseil.
Le Conseil a également tenu une session extraordinaire le 1er septembre dernier sur la situation des droits de l’homme en Iraq, marquée par les exactions et abus commis par le groupe de l’État islamique d’Iraq et du Levant ». M. Ndong Ella a déclaré, à cet égard, que le Conseil avait eu à « faire face à une problématique d’un type tant spécial que nouveau qui concerne les violences, les crimes et les graves violations des droits de l’homme perpétrés par un acteur non étatique ».
Il a aussi décidé d’envoyer, d’urgence, une mission d’enquête du Haut-Commissariat aux droits de l’homme pour faire la lumière sur cette situation au nord de l’Iraq. Le Conseil a également donné mandat pour le déploiement d’une équipe du Haut-Commissariat en vue d’enquêter sur cette question, et a créé une structure du Haut-Commissariat pour faire le suivi de la situation des droits de l’homme en République populaire et démocratique de Corée ainsi qu’au Sri Lanka.
D’autre part, le Conseil a procédé à la nomination et au renouvellement de 31 titulaires de mandats sur les 53 existants et de nouveaux mandats sur les droits des personnes handicapées et sur l’impact des mesures coercitives unilatérales sur la jouissance des droits de l’homme ont été créés.
Aujourd’hui plus que jamais, il faut des institutions intergouvernementales fortes pour répondre aux situations des droits de l’homme partout dans le monde, a-t-il dit.
En outre, dans le cadre du mécanisme de l’examen périodique universel, 57 pays ont été traités au cours de cette année par le Groupe de travail, la participation étant de 100 %.
Concernant les 114 textes adoptés, dont 106 résolutions, 35 % l’ont été à l’issue d’un vote, a-t-il dit, en relevant des thématiques d’actualité, comme l’utilisation d’aéronefs téléguidés et de drones armés dans le cadre des opérations de lutte contre le terrorisme; la protection des défenseurs des droits de l’homme dans le cadre des manifestations pacifiques; la promotion du droit à la vie privée dans l’ère numérique; la protection de la famille; la création d’un groupe de travail intergouvernemental chargé d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant pour les sociétés transnationales; la violence et la discrimination à l’égard de l’orientation sexuelle ou d’identité de genre et l’abolition de la peine de mort.
Le Président du Conseil a en particulier attiré l’attention sur les recommandations spécifiques à l’Assemblée générale comme celle contenue dans la résolution 27/18 qui propose à l’Assemblée d’étudier la possibilité de permettre aux institutions nationales de défense des droits de l’homme conformes aux Principes de Paris de participer à ses travaux sur la base des pratiques et dispositions convenues avec leur interaction au Conseil.
M. Ndong Ella a souligné, par ailleurs, que les 114 textes adoptés par le Conseil faisaient l’objet d’une incidence financière d’un montant d’environ 30 millions de dollars, ce qui représente un dépassement de 60 à 75 % par rapport au budget des années précédentes. Il a aussi rappelé que deux tiers du budget du Haut-Commissariat aux droits de l’homme proviennent des cotisations volontaires et que « cette institution se trouve aujourd’hui en difficulté et n’est plus en mesure d’assurer un certain nombre d’activités ».
Au sujet de la résolution 24/24 sur la coopération avec l’ONU, ses représentants et ses mécanismes dans le domaine des droits de l’homme, dont l’adoption a été différée lors de la présentation du rapport de son prédécesseur, M. Ndong Ella s’est réjoui d’apprendre que des consultations informelles entre les différents groupes et pays avaient eu lieu sous les auspices du Président de l’Assemblée générale, M. Sam Kutesa.
Il serait souhaitable que cette résolution, adoptée par le Conseil des droits de l’homme, puisse trouver une issue durant la présente session de l’Assemblée générale, a-t-il déclaré. « Il nous faut consolider la crédibilité et la notoriété actuelles du Conseil et toujours garder à l’esprit les raisons qui ont entraîné la disparition de la Commission des droits de l’homme », a-t-il conclu, en affirmant que son mandat l’avait conforté dans sa conviction selon laquelle « nous avons besoin d’institutions fortes tel que le Conseil, pour la promotion et la protection des droits de l’homme partout dans le monde ».
Dialogue interactif
La représentante de la Suisse a plaidé pour une amélioration des méthodes de travail du Conseil. Elle a demandé comment encourager la participation de la société civile au Conseil, notamment à la lumière de l’augmentation des intimidations et représailles visant les représentants de la société civile qui coopèrent avec le Conseil.
Le représentant du Liechtenstein a demandé à M. Ndong Ella s’il avait des propositions concrètes pour rectifier la situation financière actuelle du Conseil, selon lui « intenable ».
La représentante du Portugal a jugé que le processus des examens périodiques universels était essentiel, mais elle a souligné l’importance des défis à attendre, et elle a demandé comment renforcer l’efficacité des examens périodiques universels. Elle a ajouté que le Portugal souhaitait avoir un rôle plus actif au Conseil.
Le représentant du Maroc a demandé comment renforcer la visibilité du travail accompli par le Conseil des droits de l’homme. Il s’est aussi demandé si le Conseil ne fonctionnait pas avec un nombre excessif de panels.
La déléguée de l’Union européenne a demandé comment assurer un suivi qui renforce la procédure d’examen périodique universel. Par ailleurs, vu le renouvellement attendu du Conseil, elle a demandé comment renforcer les moyens de lutter contre l’intimidation des membres de la société civile.
La représentante du Cameroun a demandé comment améliorer la coordination entre les instances des droits de l’homme à Genève et à New York.
La représentante des États-Unis a salué le travail accompli durant l’année par le Conseil, avec notamment un nombre de résolutions sans précédent – mais elle a demandé comment limiter la prolifération de ces résolutions, afin que tous les membres du CDH puissent participer aux travaux, et comment améliorer sa capacité à mieux faire face aux crises, où qu’elles interviennent.
Le représentant de l’Irlande a demandé comment encourager, de nouveau, la participation de la société civile.
M. BAUDELAIRE NDONG ELLA, Président du Conseil des droits de l’homme, a répondu que, pour ce qui est des méthodes de travail, un pays avait à lui seul reçu 300 recommandations, ce qui rendait leur mise en œuvre difficile. Il a également fait état d’un agenda surchargé, mais il a souligné que seuls les États Membres pouvaient impulser une révision des méthodes de travail, souhaitant qu’une révision intervienne en 2016, cinq ans après la précédente.
Pour la participation de la société civile, il a assuré qu’il était décidé à la garantir. Il est certes vrai que, parce que certains ont coopéré avec les procédures spéciales ou autres, ils sont souvent visés par des représailles, a-t-il toutefois regretté.
Quant à l’aspect financier de son travail, il a déclaré ne pas avoir de recette miracle, mais il a noté que les contributions volontaires sont parfois aléatoires, laissant prise à des polémiques sur les motivations des donateurs. Il est mieux pour garder l’indépendance et la crédibilité du Conseil, que l’ONU puisse assurer le financement du Conseil au lieu de s’en remettre aux contributions volontaires, en particulier pour ce qui est de l’augmentation prévue de 3 % à 5 % du budget.
La représentante du Panama a relevé l’obligation juridique des États membres d’appliquer les recommandations de l’examen périodique universel, et elle a salué les progrès de la participation de la société civile.
Le Bélarus a vigoureusement critiqué la politisation des travaux du Conseil des droits de l’homme, qui ne répond pas aujourd’hui aux espoirs placés en lui lors de sa création il y a huit années. Il est victime de la politisation et non pas de son succès comme le prétend son président, a déclaré le représentant. « Le Conseil doit être impartial et le comportement de son président, sans faille, objectif et conséquent dans la conduite des travaux », a-t-il poursuivi, en espérant que le prochain président prendrait en compte ces questions.
M. BAUDELAIRE NDONG ELLA, Président du Conseil des droits de l’homme, réagissant aux interventions du Panama et du Bélarus, a souligné que le Conseil et ses mécanismes ont une crédibilité et une importance certaine dans le fonctionnement de l’ONU.
En tant qu’États membres, il faut consolider cet organe, a-t-il dit, tout en reconnaissant la difficulté qui surgit lorsque des pays ne veulent pas coopérer avec certains de ses mécanismes. Il a mis en relief le fait que les droits de l’homme sont une question transversale au sein des sociétés, qui parfois touchent les personnes dans « leur propre chair ». Il a cité à cet égard la situation des défenseurs/défenseuses des droits de l’homme.
Débat général
M. VLADIMIR DROBNJAK (Croatie), s’exprimant également au nom de l’Autriche et de la Slovénie, a souligné que le vingt-cinquième anniversaire de la Convention relative aux droits de l’enfant était l’occasion d’appeler à sa ratification universelle et à sa pleine mise en œuvre.
« Vu que les enfants sont exposés de façon alarmante à la violation de leurs droits de l’homme dans les conflits armés, particulièrement en République centrafricaine, en République démocratique du Congo (RDC) et en Syrie, il est essentiel que le Conseil adopte une position décisive sur le sujet », a dit M. Drobnjak, évoquant également les allégations récentes de viols collectifs au Darfour, dont des jeunes filles auraient figuré parmi les victimes.
Il s’est également exprimé en faveur des femmes et de leur autonomisation, ainsi qu’au respect des droits de la population lesbienne, gays bisexuels, et transgenres.
Il a souligné par ailleurs que les gouvernements avaient l’obligation d’encourager le travail des militants des droits de l’homme, et de leur assurer un environnement de travail sûr, tandis que de leur côté les acteurs de la société civile doivent voir garantis tous leurs droits de l’homme, y compris la liberté d’assemblée, d’association et d’expression.
Enfin, à propos de la procédure d’examen périodique universel, il a souligné qu’elle devait assurer un suivi et une mise en œuvre des recommandations formulées, et dans ce cadre il a plaidé en faveur de rapports de mi-mandat.
Il a conclu en soulignant la nécessité de renforcer le rôle du Conseil des droits de l’homme pour réagir à l’escalade de conflits, à des crises humanitaires et à des violations massives des droits de l’homme.
Mme JILL DERDERIAN (États-Unis) a affirmé que ces cinq dernières années, le Conseil s’est concentré sur les questions les plus brûlantes de l’actualité mais que l’approche relative à Israël « pêche par sa myopie ». La représentante s’est félicitée, en revanche, de la résolution relative à la protection des personnes pour leur orientation et identité sexuelle.
Elle a aussi proposé de mettre en œuvre la résolution 24/24 du Conseil et de désigner un point focal au sein de l’ONU dans les meilleurs délais. Force est de rappeler, a-t-elle souligné, que la coopération avec les États est capitale, avec l’Ukraine en particulier.
Revenant sur la question des territoires palestiniens, elle a mis en avant la nécessité d’examiner cette question autrement que d’une manière spécifique. Enfin, la question des sanctions relève du mandat du Conseil de sécurité plutôt que de celui du Conseil des droits de l’homme, a conclu la représentante.
M. SHAOJUN YAO (Chine) a noté que ces dernières années, le Conseil s’était attaché à protéger les droits des groupes vulnérables, et il a salué ces efforts. En même temps le développement du Conseil est aussi synonyme de difficultés, avec de moins en moins de temps disponible pour que les différents États membres puissent discuter des points abordés, a regretté le représentant chinois.
Il a également mentionné pour -la déplorer- la politisation selon lui croissante des activités du Conseil avec une attitude du deux poids, deux mesures de certains États. Il a regretté que certains États privilégient les droits civils et politiques plutôt que les droits sociaux et économiques, sans égard pour la Charte des Nations Unies. Il a souhaité que le Conseil veille à maintenir sa crédibilité et à respecter les principes d’objectivité et de non sélectivité, et en accordant la même importance à toutes les catégories de droits de l’homme.
Mme SHOKO HARUKI (Japon) s’est félicitée de la réaction prompte du Conseil face aux situations qui appellent une attention urgente de sa part. Le Japon a lancé une invitation à toutes les procédures spéciales, a-t-elle indiqué, en appelant à un dialogue afin de faciliter la résolution de toutes les situations des droits de l’homme dans le monde.
Au sujet de la résolution 24/24 et du rôle de la société civile, elle a dit que son pays était disposé à poursuivre les discussions pour arriver à une participation inclusive des représentants de la société civile. Il faut aussi faire en sorte que le Conseil dispose de ressources suffisantes pour que ses procédures s’acquittent dûment de leur mandat respectif, et prévenir tout doublon des mandats.
M. PARINTHORN APIMYANUNT (Thaïlande) a souligné que les droits de l’homme devaient aller de pair avec le développement. Il a noté que, cette année, la résolution sur le Conseil des droits de l’homme appelait ce dernier à tenir, lors de sa vingt-huitième session, une table ronde sur la coopération technique afin d’appuyer un développement inclusif et participatif au niveau national.
Le représentant a ensuite parlé des efforts déployés par la Thaïlande pour protéger et promouvoir les droits des personnes vulnérables, évoquant notamment la tenue, dans le cadre de la vingt-septième session du Conseil, d’une table ronde sur la protection des droits de l’homme dans les situations précédant et suivant une catastrophe naturelle.
Le représentant s’est ensuite inquiété du faible taux de participation aux travaux des deux dernières sessions du Conseil et a recommandé de rationaliser davantage son programme de travail afin de disposer de plus de temps pour débattre des questions clefs.
M. GUILHERME DE AGUIAR PATRIOTA (Brésil) s’est étonné de ce que, chaque année, la résolution sur le droit au développement fait l’objet d’un vote, et a rappelé que le nouveau Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme avait exprimé sa préoccupation face « à la polarisation et à l’incompréhension entre les groupes politiques et régionaux sur le droit au développement ». Et d’ajouter qu’un échec quant à atteindre un consensus risque de devenir un obstacle dans l’application du mandat du Haut-Commissariat.
Le Brésil a participé, en septembre, aux négociations à Genève sur la résolution de l’Assemblée générale sur les « fonds vautours » et considère que la communauté internationale doit sérieusement se pencher sur cette question et sur les mécanismes de remboursement de la dette souveraine dans l’objectif d’une réduction du fardeau de la dette et de la réalisation des conditions nécessaires à la réalisation des droits de l’homme.
L’intervenant a en outre mis l’accent sur la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine et son programme d’activités, qui sera fondamental pour la prise de conscience et la lutte contre les stéréotypes, l’intolérance et le racisme. Il a souligné, à cet égard, que le projet de résolution qui sera examiné demain par la Troisième Commission sera le point culminant de plus d’une année de négociations au sein du Conseil et de l’Assemblée générale.
Mme NDEYE OUMY GUEYE (Sénégal) a plaidé pour un renforcement de la coopération internationale en vue d’aboutir à la pleine réalisation des droits de l’homme.
Elle a souligné l’importance de la question du financement du Haut-Commissariat aux droits de l’homme. Elle a jugé fondamental d’éviter de recourir à l’arbitrage budgétaire, vu le rôle que joue le Haut-Commissariat pour consolider les acquis obtenus grâce à la procédure de l’examen périodique universel – une procédure, a-t-elle noté, dont les travaux, en respectant les principes d’universalité et de non-sélectivité, préservent l’égalité de traitement entre les États Membres. À cet égard, elle a noté en particulier les échanges fructueux des autorités sénégalaises avec l’équipe de l’examen périodique universel.
Au titre des questions thématiques, elle a plaidé en faveur d’un renforcement de la protection de la famille, vue comme un levier pour l’amélioration de la santé et de l’éducation des enfants, ainsi que de l’autonomisation des femmes.
Par ailleurs, alors que l’Assemblée générale doit lancer le mois prochain la Décennie des personnes d’ascendance africaine, elle a estimé que celle-ci devait être l’occasion pour la communauté internationale de favoriser leur accès à la justice, à la santé et aux processus de prise de décisions.
Enfin, elle a conclu en affirmant que l’examen du rapport du Conseil des droits de l’homme rappelait la nécessité urgente de renforcer le plaidoyer en faveur des droits économiques sociaux et culturels, parallèlement aux droits civils et politiques.
M. KHIANE PHANSOURIVONG (République démocratique populaire lao) a affirmé que son gouvernement appuyait 71 des recommandations formulées lors de son examen périodique universel de 2010. Pour veiller à leur mise en œuvre, a-t-il expliqué, le Gouvernement a chargé les ministères ainsi que les agences pertinents d’intégrer les recommandations qui les concernent. Le représentant a aussi souligné que son pays avait ratifié la Convention contre la torture en 2012.
M. Phansourivong a ensuite fait savoir que la République démocratique populaire lao préparait actuellement son deuxième cycle d’examen périodique universel lequel doit se tenir en janvier-février 2015. Son rapport national a d’ailleurs été transmis le 27 octobre au Groupe de travail sur l’examen périodique universel.
Mme TSHOLOFELO TSHEOLE (Afrique du Sud) a mis l’accent sur l’impartialité et la non-sélectivité dans l’examen des situations des droits de l’homme et sur la prolifération des mandats et groupes qui dépassent largement les ressources disponibles, ce qui a un impact négatif sur la qualité du dialogue.
Le Conseil s’appuie de plus en plus sur des ressources extrabudgétaires, ce qui est inquiétant puisque le Haut-Commissariat risque de devenir un bureau visant à faire avancer les intérêts propres des uns et des autres, a-t-elle prévenu.
La représentante a souligné que le rapport soumis par le Conseil des droits de l’homme aujourd’hui comprenait plusieurs résolutions lesquelles incluent des notions qui ne sont pas agrées au niveau international. Elle a dit ne pas soutenir l’approche fondée sur les droits de l’homme qui sape le mandat du Groupe de travail sur le développement.
Elle a estimé que la résolution 24/24 donnait, au Conseil, des prérogatives qui outrepassent son mandat. Elle a encouragé à un dialogue soutenu et à de nouvelles consultations pour discuter des représailles subies au quotidien par les personnes qui coopèrent avec les organes et institutions des Nations Unies en matière des droits de l’homme. Elle a réitéré son soutien au Président de l’Assemblée générale afin que ces consultations commencent au plus tôt.
M. OSCAR LEÓN GONZÁLEZ (Cuba) a souligné que le Conseil avait été créé pour éviter la manipulation politique, mais il a regretté que, plutôt que de consolider le mécanisme d’examen périodique universel, il privilégie la confrontation et prenne des sanctions contre des États souverains sur la base d’allégations non confirmées sur le terrain. Il est inacceptable qu’une des résolutions du Conseil avalise des sanctions et punitions en ayant recours au Conseil de sécurité et à la Cour pénale internationale, a-t-il dit.
Les auteurs de propositions en ce sens bénéficient de toute impunité, a regretté le représentant, mais Cuba s’oppose à ce type de précédent grave qui va à l’encontre du droit à l’autodétermination, à la paix et au développement de pays du sud, et ce pays continuera à promouvoir le dialogue constructif et le principe de non-sélectivité, appelant à veiller à ce que le Conseil ne devienne pas un nouvel instrument de manipulation politique.
M. MASOOD KHAN (Pakistan) a rappelé les principes qui sous-tendent le travail du Conseil des droits de l’homme et s’est prononcé en faveur d’une approche intégrée et équilibrée qui accorderait la même priorité tant aux droits civils et politiques, qu’aux droits économiques, sociaux et culturels. La lutte contre la pauvreté et l’autonomisation de tous les groupes de la société est en conséquence primordiale.
Il a espéré que le Conseil œuvrera également à la réalisation du droit au développement. Citant la résolution 25/22 du Conseil sur les drones armés, il a énuméré l’impact négatif de leur utilisation sur la population, l’environnement et les droits de l’homme. Les attaques menées par ces engins armés doivent être contrôlées, en particulier dans les territoires tribaux du Pakistan et ne sont pas justifiées. Le représentant a appelé à la cessation immédiate de l’utilisation des drones armés.
Le Conseil doit aussi renforcer sa coordination avec les pays régionaux pour mettre fin aux attaques de l’État islamique d’Iraq et du Levant. Il doit aussi assurer le suivi relatif à la protection des Palestiniens dans les territoires arabes occupés et la Commission sur les violations commises lors du conflit de Gaza doit pouvoir finir son enquête et faire son rapport.
M. EMAD MORCOS MATTAR (Égypte) a souligné que le Conseil avait pour rôle d’appuyer les efforts des États Membres pour respecter tous les droits de l’homme.
Il a noté que le rapport du Conseil réaffirmait son rôle important dans la protection des droits du peuple palestinien, et dans la lutte contre le racisme, l’intolérance et la xénophobie. Mais il a regretté la politisation des travaux du Conseil, et l’adoption de notions controversées dans des domaines où il n’y a pas de consensus international, par exemple sur le sujet de l’homosexualité. « De telles difficultés nous éloignent de la coopération et nous entraînent vers la confrontation », a-t-il déploré.
Il ne faut pas imposer des notions controversées au mépris des diversités culturelles, sociales et religieuses des États Membres, a encore souligné le représentant égyptien, demandant d’encourager au contraire l’interaction de tous les États et d’établir un dialogue sur la base de la considération mutuelle.
M ERLING HOEM (Norvège) a affirmé que le mandat du Conseil demeurait pertinent et que son pays avait activement participé à plusieurs négociations, notamment sur la participation de la société civile et sur la question des représailles contre les défenseurs des droits de l’homme qui coopèrent avec les mécanismes onusiens.
Il a demandé la mise en œuvre immédiate de la résolution 24/24 sur la question des représailles. Le représentant s’est réjoui du fait que l’examen périodique universel ait à nouveau affiché un parcours sans faute avec 100 % de participation, y compris de la Norvège.
La réputation du Conseil en tant que promoteur des droits de l’homme s’accroît, a-t-il constaté, en déclarant que la situation du Haut-Commissariat était devenue intenable car il en est arrivé au point de ne plus pouvoir s’acquitter de son mandat faute de ressources.
M. MOHAMED ZAKARIA (Soudan) a souligné que le Soudan était fier de sa coopération avec tous les organismes du mécanisme des droits de l’homme, en particulier le Conseil. Les experts indépendants des droits de l’homme s’en sont félicités à Genève, a-t-il noté.
Il a assuré que le Soudan avait mis en place tous les cadres nécessaires afin de renforcer la protection des droits de l’homme, évoquant notamment un tribunal sur le Darfour, et une législation qui interdit aussi bien le recrutement d’enfants dans des forces armées que la traite des êtres humains. Tous les segments de la société ont travaillé sans relâche pour ce dialogue national, et afin de préserver l’indépendance et l’intégrité territoriale du pays, a-t-il ajouté.
Plus généralement le représentant soudanais a demandé que tous les droits soient considérés sur un pied d’égalité, estimant que les droits économiques, sociaux et culturels doivent bénéficier de la même attention que les droits civils et politiques. La délégation soudanaise revendique une approche de coopération qui tienne compte de l’allègement de la dette et la suppression de sanctions unilatérales, elle appelle également à protéger les droits des Palestiniens, a déclaré le représentant soudanais.
Par ailleurs le Soudan, « convaincu de l’importance de la famille, noyau de la société », s’oppose à la tentative d’introduire de nouveaux concepts sexuels, a-t-il dit.
Enfin, notant qu’aucun pays n’est à l’abri de défis pour les droits de l’homme, le représentant soudanais a souligné que certains pays ne devaient pas s’ériger en juges de la situation des droits de l’homme, et qu’une coopération positive devait s’instaurer afin de s’abstenir de politiser les droits de l’homme.
M. MOHSEN EMADI (République islamique d’Iran) a affirmé que depuis la soumission, il y a quatre ans, de son premier rapport périodique universel, son pays avait lancé de nombreuses activités pour intégrer la question des droits de l’homme aux programmes des écoles publiques et dispenser des cours de formation à l’intention des juges et du personnel judiciaire et pénitentiaire, entre autres.
Il a regretté que « certains pays » cherchent à politiser la question des droits de l’homme en présentant des résolutions qui ciblent des pays précis et s’est dissocié de la partie du rapport du Conseil qui traite de la « soi-disant résolution sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran ».
M. Emadi a aussi appelé le Conseil à respecter les principes d’équité, de non-sélectivité et de respect mutuel et de s’abstenir « d’imposer un style de vie particulier et des concepts non-consensuels ». À ce titre, a-t-il ajouté, la République islamique d’Iran ne peut pas accepter le projet de résolution portant sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre.
Le représentant a en revanche salué la tenue des vingt-et-unième et vingt-deuxième sessions spéciales du Conseil organisées, respectivement, suite aux « atrocités » perpétrées à Gaza par la Puissance occupante et aux actes d’ « extrémisme violent » commis par l’État islamique d’Iraq et du Levant.
M. CHARLES NTWAAGAE (Botswana) a fait part de son appréciation pour l’appui dont son pays avait bénéficié lors de sa candidature à la réélection au Conseil des droits de l’homme pendant la période 2015-2017. Il a affirmé que suite aux recommandations de l’examen périodique universel, le Botswana effectuait des amendements législatifs dans le but de promouvoir le respect des droits de l’homme dans le pays. Il a toutefois souligné que comme de nombreux autres pays en développement, le Botswana avait besoin d’assistance technique afin de satisfaire ses obligations dans le domaine des droits de l’homme.
M. Ntwaagae s’est ensuite inquiété des contraintes budgétaires que connaît le Conseil et a estimé que ses activités devraient être financées par le budget ordinaire. Il a également constaté que certaines résolutions appelaient à la création de nouveaux mandats « qui ne sont en aucun cas nécessaires » au vu du fait qu’il existe déjà des mécanismes traitant de questions identiques. Il a averti que l’efficacité des procédures spéciales et des mandataires du Conseil était mise à mal en raison de l’absence de portefeuilles et de mandats clairement définis.
M. JANIS MAŽEIKS (Lettonie) a déclaré que son pays était impatient de participer aux travaux du Conseil des droits de l’homme. Il a salué le mécanisme des procédures spéciales.
L’indépendance, garantie d’efficacité, est essentielle, et il a noté que la Lettonie avait invité le titulaire de mandat à venir en visite. Il a noté que la Lettonie se préparait à la deuxième édition du processus de mécanisme d’examen périodique universel.
La Lettonie est cependant convaincue que les procédures du travail du Conseil pouvaient être améliorées, et appelé à dégager certaines priorités – en particulier le principe de l’universalité des droits de l’homme. Il s’est dit particulièrement inquiet des représailles et intimidations visant ceux qui coopèrent avec les mécanismes des droits de l’homme de l’ONU.
M. WI SEOKYOON (République de Corée) a noté qu’en dépit de l’élargissement du domaine de ses travaux, le Conseil devait continuer à prêter attention à des soucis essentiels de respect des droits de l’homme et à reconnaître leur extrême urgence.
Il a salué le rôle important joué par le Conseil face à la mauvaise situation des droits de l’homme en Syrie et en République populaire démocratique de Corée (RPDC) à travers le travail de commissions d’enquête, dont il a noté l’impartialité et l’objectivité. « Ma délégation espère sincèrement que les recommandations de la commission d’enquête sur la situation des droits de l’homme en RPDC seront mises en œuvre de bonne foi », a-t-il dit.
Le représentant coréen a également souligné que la procédure d’examen périodique universel était un élément crucial encourageant tous les pays à respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales de tous – mais il a noté que les États devaient impérativement traduire, en mesures concrètes, les recommandations issues de ce mécanisme.
M. GIRMA ASMEROM TESFAY (Érythrée) a dit vouloir tirer parti de la présence du Président du Conseil des droits de l’homme pour répéter que l’examen périodique universel demeure le mécanisme par excellence pour étudier la situation des droits de l’homme dans tous les pays, riches ou pauvres, petits ou grands. Il a regretté la création d’un mandat sur la situation des droits de l’homme en Érythrée, une perte de temps, selon lui, au lieu d’avoir des discussions approfondies sur le travail du Conseil et éviter une politisation à outrance du Conseil.
Le principe d’innocence jusqu’à preuve de la culpabilité doit aussi être respecté, a-t-il souligné, en fustigeant la « logique absurde » derrière les rapports ciblant des pays spécifiques.
L’Érythrée est un pays stable et le rapport attaque la stratégie de développement économique nationale fondée sur l’autosuffisance et non sur l’aide publique au développement. Il a déclaré que les pays en développement doivent sortir de la dépendance de l’aide publique au développement.
La mobilisation générale et l’armement des Érythréens pour protéger la souveraineté de leur pays est un droit également, a-t-il dit, ajoutant que son pays se dissociait du rapport du Conseil des droits de l’homme.
Mme ELVIRA AZIMOVA (Kazakhstan) a souligné la coopération du Kazakhstan avec les procédures spéciales du Conseil, et l’invitation faite aux titulaires de mandats spéciaux et aux rapporteurs spéciaux. Elle a également noté que le pays avait adopté une très grande partie des recommandations formulées au terme de l’examen périodique universel le concernant.
Elle a souligné que le Kazakhstan reconnaissait la priorité stratégique du Conseil en évitant la politisation de la problématique des droits de l’homme. L’amélioration de l’ordre du jour du Conseil semble une possibilité pertinente pour éviter que ses résolutions fassent double emploi avec les résolutions de l’Assemblée générale, a ajouté la représentante.