Troisième Commission: l’Afghanistan, la Géorgie et l’Ukraine attirent l’attention sur la situation de leurs réfugiés et déplacés
La Troisième Commission a achevé, cet après-midi, son débat sur les réfugiés, l’occasion pour les délégations d’écouter leurs homologues de l’Afghanistan, de la Géorgie et de l’Ukraine faire le point sur la situation des personnes réfugiées et déplacées originaires de leurs pays respectifs.
Le représentant de Fidji est également intervenu pour attirer l’attention sur l’ampleur des déplacements climatiques. Il a notamment averti que 22 millions de personnes avaient été déplacées en 2013 à cause de catastrophes naturelles et que ce chiffre ne ferait qu’augmenter d’année en année.
Le représentant de l’Afghanistan a, pour sa part, souligné que plus de trois millions d’Afghans avaient un statut de réfugiés ou de déplacés, ce qui fait de la population de déplacés afghans l’une des plus élevées au monde, une « charge gigantesque » principalement assumée, a–t-il reconnu, par le Pakistan et la République islamique d’Iran.
Le délégué afghan a assuré que son gouvernement était attaché à mettre en œuvre des solutions durables en vue du rapatriement de réfugiés encore en exil. Ainsi, dans son discours d’investiture, le nouveau Président afghan a invité les réfugiés à retourner en Afghanistan en vue de « reconstruire la nation ».
Selon le représentant, 5,8 millions de réfugiés afghans sont retournés volontairement dans leur pays depuis 2002, et il y a eu plus de 10 000 autres rapatriés volontaires en 2014.
À son tour, le représentant de la Géorgie a souligné que près de 10 % de la population de son pays avait été déplacée des « régions occupées d’Abkhazie et de Tskhinvali » et que ce nombre ne faisait qu’augmenter en raison de la pose de fils barbelés et d’autres obstacles le long de la ligne d’occupation dans ces régions.
Il a également souligné que la population d’origine géorgienne du district de Gali, en Abkhazie, faisait face à une menace imminente d’expulsion en raison de mesures restrictives adoptées par les nouvelles autorités locales.
Enfin, le représentant de l’Ukraine a fait savoir que son pays comptait à présent 275 489 personnes déplacées. Ce dernier a également affirmé douter des chiffres avancés par la Fédération de Russie selon laquelle il y aurait actuellement 830 000 réfugiés ukrainiens sur le territoire russe, arguant de leur manque de fiabilité en raison de l’absence de confirmation par des sources indépendantes.
La représentante de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a par ailleurs relevé que l’Europe était la destination la plus dangereuse pour la migration irrégulière, ce voyage ayant coûté la vie à plus de 4 000 personnes en 2013 et à plus de 22 000 migrants depuis l’an 2000, principalement en mer Méditerranée.
Suite à ce débat, les délégations ont écouté les présentations de plusieurs projets de résolution. La représentante de la République islamique d’Iran et son homologue de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) ont alors vivement dénoncé, dans le cadre de l’exercice de leur droit de réponse, les textes portant sur la situation des droits de l’homme dans leurs pays respectifs.
« Si l’Union européenne et le Japon essaient de faire adopter des projets de résolution, cela ne conduira qu’à des résultats imprévisibles et ces parties n’auront qu’à en assumer toutes les conséquences », a notamment déclaré le représentant de la RPDC.
La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, poursuivra ses travaux mardi 11 novembre, à partir de 10 heures.
RAPPORT DU HAUT-COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES POUR LES RÉFUGIÉS, QUESTIONS RELATIVES AUX RÉFUGIÉS, AUX RAPATRIÉS ET AUX DÉPLACÉS ET QUESTIONS HUMANITAIRES (A/69/12, A/69/12/Add.1 et A/69/339) [point 61]
Suite et fin du débat général
M. PETER THOMSON (Fidji) s’est inquiété de l’augmentation alarmante du nombre de réfugiés dans le monde, plus de six millions en seulement un an. Il a affirmé que de nombreuses personnes avaient été déplacées par des catastrophes environnementales. Vingt-deux millions de personnes ont été déplacées en 2013 à la suite de catastrophes naturelles et ce chiffre ne fera qu’augmenter d’année en année, a-t-il notamment dit.
Le représentant a ensuite parlé de la vulnérabilité des pays comme le sien face aux effets des changements climatiques, précisant que deux villages fidjiens avaient déjà dû être déplacés de manière permanente. Il a invité la communauté internationale à consolider les capacités mondiales pour faire face aux « immenses crises » du XXIe siècle.
M. ZAHIR TANIN (Afghanistan) a déclaré que près de 40 ans de guerre et de crise avaient forcé des millions d’Afghans à rechercher sûreté et sécurité loin de leurs foyers, dans des bidonvilles inhospitaliers, des villes et des villages éloignés de leur pays, et des générations entières sont nées et ont grandi en tant que réfugiés. De nouvelles hostilités et des problèmes de sécurité ont rendu cette année particulièrement difficile pour les personnes déplacées à l’intérieur, les réfugiés et les rapatriés en Afghanistan.
À présent, plus de trois millions d’Afghans ont un statut de réfugié ou de déplacé, ce qui fait que la population des déplacés afghans est l’une des plus élevée au monde. Cette année, 124 000 personnes ont été déplacées, portant à 700 000 le nombre cumulatif global des déplacés. Il a assuré de l’engagement de son gouvernement à instaurer la paix et la stabilité à long terme et au retour volontaire et à l’intégration en tant que composantes clefs de cette politique.
Dans le cadre des réformes, le nouveau Président a invité, dans son discours d’investiture, les réfugiés à retourner en Afghanistan aux fins de « reconstruire la nation ». D’autre part, le Gouvernement est attaché à mettre en œuvre des solutions durables en vue du rapatriement de réfugiés encore en exil et le Ministère des réfugiés et rapatriés est chargé des opérations d’appui au rapatriement par des programmes d’aide en espèces, des services de santé de base, de sensibilisation aux mines antipersonnel et des points d’information sur la manière d’inscrire les enfants à l’école et sur l’accès à l’assistance juridique.
Le délégué afghan a ensuite rappelé que son pays comptait 5,8 millions de réfugiés qui sont retournés volontairement depuis 2002, ce qui a accru la population de 25 %. En 2014, il y a eu plus de 10 000 autres rapatriés volontaires, a-t-il ajouté, précisant que les autorités nationales coopéraient avec le HCR afin de poursuivre la promotion du rapatriement à travers la Stratégie de solutions pour les réfugiés afghans qui constitue un cadre de facilitation du retour volontaire et de réintégration durable.
En outre, il a mis l’accent sur les défis extraordinaires auxquels se heurtent les personnes déplacées à l’intérieur de l’Afghanistan et ailleurs dans le monde et a réitéré l’obligation des pays d’accueil de garantir leur protection et le principe de l’accès humanitaire sans entraves.
Il a enfin dit sa conviction que l’amélioration de la situation de la sécurité dans son pays réduira le nombre des réfugiés et déplacés à l’intérieur, ce qui ne manquera pas de les persuader de retourner dans leur pays. Il a reconnu également la charge gigantesque que le Pakistan et la République islamique d’Iran ont en ce qui concerne les réfugiés afghans.
Mme CÉCILE MBALLA EYENGA (Cameroun) a mis l’accent sur la nécessité de tous agir face à la dégradation de la situation des réfugiés et des personnes déplacées à travers le monde, disant toute sa reconnaissance au Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés qui, malgré les nombreux écueils et difficultés, maintient son engagement en faveur de l’amélioration de la gestion des personnes relevant de son mandat, y compris par la poursuite de l’assistance aux populations se trouvant dans des lieux dangereux et difficiles d’accès.
Ces activités se font au prix de lourds sacrifices, d’énormes efforts et non sans des coûts considérables en matière de sécurité et parfois au péril de la vie des personnels du Haut-Commissariat.
Le Cameroun a pris note des initiatives visant à améliorer les services et l’assistance aux personnes déplacées concernées, des quatre nouvelles stratégies pour orienter les programmes du HCR et qui mettent l’accent sur la nécessité du caractère durable des interventions.
Elle a appelé par ailleurs à la générosité renforcée et à un accroissement de l’aide financière des donateurs et bailleurs de fonds, et a recommandé de déployer des efforts pour promouvoir des solutions durables dans des situations prolongées et de mettre au point des stratégies globales de recherche de solutions. Elle a précisé dans ce contexte que la phase de secours d’urgence ne devrait pas occulter totalement les activités de développement et appuyé l’appel du Haut-Commissaire, M. António Guterres, afin que l’aide humanitaire soit accompagnée d’une aide au développement structurel en vue de soutenir tant les populations touchées que les communautés d’accueil.
La déléguée a relevé avec regret la crise en République centrafricaine et les « interventions néfastes du mouvement terroriste Boko Haram », qui ont conduit à une arrivée massive de réfugiés en territoire camerounais, occasionnant de ce fait de lourdes répercussions sur le pays. Elle a sollicité un engagement accru de la part de la communauté internationale et des pays amis pour répondre efficacement aux demandes faites par la République centrafricaine et les pays voisins.
Elle a cependant réaffirmé la volonté du Cameroun d’apporter sa contribution aux fins du partage des responsabilités et la solidarité en faveur de la gestion des réfugiés.
Mme ELSA HAILE (Érythrée) a dénoncé les attaques dont sont victimes certains réfugiés dans le monde. Elle a souligné qu’aucune personne armée ne devait pouvoir entrer dans des camps de réfugiés, et que ceux-ci ne devaient pas non plus servir de base pour le recrutement dans des groupes armés. Elle a appelé le HCR à maintenir le plein contrôle des camps qu’il administre.
La représentante s’est opposée au retour forcé des réfugiés. Elle a affirmé que l’attitude de son gouvernement était exemplaire en matière de traitement des réfugiés, précisant que celui-ci appuyait la réintégration sociale de ces derniers, une fois de retour en Érythrée. Elle a avancé que certaines circonstances avaient poussé certains réfugiés originaires d’autres pays à se présenter comme étant des Érythréens.
M. VAKHTANG MAKHAROBLISHVILI (Géorgie) a affirmé que des réfugiés ukrainiens se rendaient dans son pays en nombre de plus en plus élevé. Il a ajouté que la Géorgie avait ratifié, en 2011, la Convention de 1954 relative au statut des apatrides. Plus de 600 réfugiés ont pu obtenir la citoyenneté géorgienne depuis 2009, une loi sur le statut juridique des étrangers et des apatrides a été adoptée en mars 2014 et le Centre pour les demandeurs d’asile, qui a été ouvert en 2010, doit être élargi.
Le représentant a souligné que près de 10 % de la population de son pays avait été déplacée de la région de « Tskhinvali/Ossétie du Sud » au début des années 1990 puis en 2008. Il a dénoncé le fait que les nombreuses résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale, réitérant le droit fondamental au retour, n’aient pas été mises en œuvre, ainsi que l’impasse dans laquelle se trouvent les pourparlers internationaux de Genève.
Il a accusé la Fédération de Russie d’ignorer les principes agréés au niveau international. On cherche de toute évidence à retirer la question des personnes déplacées du programme de travail des pourparlers, a dénoncé M. Makharoblishvili, qui y a vu une tentative d’instrumentalisation d’une question « purement humanitaire ».
Le représentant de la Géorgie a expliqué que le nombre de personnes déplacées ne faisait qu’augmenter en raison de la pose de fils barbelés et d’autres obstacles le long de la ligne d’occupation dans les régions d’Abkhazie et Tskhinvali. En outre, s’est-il inquiété, la population d’ethnicité géorgienne du district de Gali, en Abkhazie, fait face à une menace imminente d’expulsion en raison de mesures restrictives adoptées par les nouvelles autorités locales. Le représentant a également dénoncé le fait que l’ancienne Haut-Commissaire aux droits de l’homme et le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays aient vu nier leur accès aux « régions occupées d’Abkhazie et Tskhinvali ».
M. Makharoblishvili a fait savoir qu’une nouvelle loi sur les personnes déplacées des territoires occupés de la Géorgie était entrée en vigueur le 1er mars 2014, se félicitant que celle-ci ait pu contribuer à améliorer les conditions de vie de ces personnes en leur octroyant notamment une aide financière et l’accès aux services de santé et d’éducation ainsi qu’à l’emploi.
Un programme novateur permet par ailleurs aux familles déplacées d’élire, moyennant un financement de l’État, le domicile de leur choix dans une zone rurale sélectionnée en fonction de la correspondance entre les aptitudes des membres de la famille et les perspectives existantes sur le terrain.
M. OLEKSIY SHAPOVAL (Ukraine) a affirmé que son pays accordait une grande importance à sa coopération avec outre le Bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA), d’autres agences internationales en vue de répondre aux besoins des personnes déplacées à l’intérieur de l’Ukraine. Il a répété que le déplacement forcé dans son pays était la conséquence directe de l’agression étrangère et des activités illégales des groupes armés qui terrorisent la population ukrainienne dans l’est du pays, avec l’appui du pays voisin: la Fédération de Russie.
Selon les dernières statistiques officielles, le nombre de personnes déplacées a atteint 275 489 et la situation humanitaire est gérée comme il se doit par le Gouvernement ukrainien, en coordination avec d’autres partenaires internationaux, ayant à leur tête, les Nations Unies. Il s’est déclaré encouragé par l’évaluation positive de ces efforts par le Secrétaire général notamment.
L’Ukraine a également facilité les activités du Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays, M. Chaloka Beyani, lors de sa récente visite.
Il a fait état d’une loi nationale sur les déplacées, adoptée le 20 octobre dernier, qui vise à garantir les droits et libertés fondamentales de ces personnes, ainsi qu’aux mesures prises pour renforcer les capacités des communautés à absorber le flux de personnes déplacées. Il a souligné à cet égard que les « soi-disant convois humanitaires en provenance de la Russie » constituaient une violation flagrante de la Charte des Nations Unies et des lois nationales.
Il a précisé que ces convois ne sont pas inspectés par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ni ne bénéficient de l’autorisation du Gouvernement de l’Ukraine. Le représentant a également tenu à corriger les chiffres avancés par la Fédération de Russie selon laquelle il y aurait actuellement 830 000 réfugiés ukrainiens sur le territoire russe. Il a déclaré que ce chiffre n’était pas fiable car il n’avait pas été confirmé par des sources indépendantes.
Mme MICHELE KLEIN SOLOMON (Organisation internationale pour les migrations (OIM) a relevé que l’Europe était la destination la plus dangereuse pour la migration irrégulière, ce voyage ayant couté la vie à plus de 4 000 personnes en 2013 et à plus de 22 000 migrants depuis l’an 2000, principalement en mer Méditerranée.
Elle a affirmé que l’OIM et le Haut-Commissariat pour les réfugiés codirigeaient le groupe de gestion et de coordination mondiale des camps, précisant que le HCR s’occupait plus particulièrement des populations touchées par les conflits, tandis que l’OIM prenait en charge les personnes déplacées suite à une catastrophe naturelle.
La représentante a affirmé que le HCR et l’OIM devaient s’adapter aux nouvelles formes de mobilité humaine, notamment aux flux migratoires mixtes. Elle a estimé que les solutions unidimensionnelles n’auraient pas un impact durable. Mme Solomon a aussi expliqué que le HCR et l’OIM avaient souvent mis leurs ressources en commun pour faire face aux crises de niveau 3.
Elle a également précisé que le HCR était chargé d’identifier et de diriger les réfugiés vers des pays d’accueil, tandis que l’OIM aide les pays hôtes en préparant et en gérant le transport des réfugiés identifiés.
Droit de réponse
La République islamique d’Iran s’est étonnée que le représentant du Canada soit tellement préoccupé du bien-être du peuple de l’Iran car il oublie en revanche les violations des droits de l’homme sur le continent américain. Selon la représentante iranienne, le Canada n’a pas tenu compte des réformes structurelles et institutionnelles entreprises par l’Iran. La déléguée a exhorté tous les États Membres à rejeter le projet de résolution A/C.3/69/L.33 sur la situation des droits de l’homme en Iran.
De la même façon, le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a déclaré que le projet de résolution relatif à la situation des droits de l’homme dans son pays (A/C.3/69/L.28), présenté cet après-midi, était politisé et l’a donc rejeté. Il a remis en cause les informations contenues dans ce texte et s’est offusqué de l’approche de confrontation choisi par ses auteurs.
Il a dit la volonté sincère de son gouvernement qui a proposé un dialogue avec l’Union européenne et sollicité une assistance technique du Haut-Commissariat aux droits de l’homme. Malgré ces efforts de coopération, l’Union européenne a quand même opté pour l’affrontement et c’est une occasion manquée du point de vue de la RPDC.
Si l’Union européenne et le Japon essaient de faire adopter ce projet de résolution, cela ne conduira qu’à des résultats imprévisibles et ces parties n’auront qu’à en assumer toutes les conséquences, a dit la délégation.