Troisième Commission: les délégations voient dans la médecine légale un « outil précieux » pour lutter contre la torture
La Troisième Commission, chargée des questions sociales, culturelles et humanitaires, a entamé, aujourd’hui, son débat sur les droits de l’homme, l’occasion pour les États Membres de débattre avec nombre d’experts du rôle de la médecine légale, « outil précieux pour parvenir à la vérité », comme moyen de lutter contre l’impunité dont bénéficie la torture. Nombre de délégations ont également salué la création de mandats de rapporteurs spéciaux sur les représailles.
Dans un premier temps, le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants, M. Juan Méndez, a souligné que la tâche du médecin légiste était essentielle à la lutte contre l’impunité dont peuvent bénéficier les auteurs de torture, car, s’est-il expliqué, l’avis d’un expert sert de base aux poursuites judiciaires engagées en cas d’allégations de torture.
Préoccupé du fait que nombre d’États rechignent à conduire des enquêtes sur des allégations de torture, M. Méndez a précisé que les dossiers médicaux étaient susceptibles de contribuer, « de façon déterminante », à surmonter l’absence d’autres preuves objectives à laquelle se heurtent couramment les victimes de torture, les actes de torture étant souvent infligés en l’absence de témoins.
« Les cas convenablement étayés par des rapports médico-légaux de bonne qualité sont en train de révolutionner l’enquête sur la torture et d’en améliorer les résultats », s’est notamment félicité M. Méndez qui a réfuté d’un revers de main les arguments de certains États qui prétendent que les instruments sophistiqués médico-légaux sont financièrement hors de leur portée.
« Le diagnostic d’un acte de torture n’exige pas de méthodes « high tech » ou un équipement coûteux, a argué M. Méndez, qui a, au contraire, insisté sur l’obligation des États de solliciter une assistance et de partager les bonnes pratiques.
Sa proposition d’instaurer un examen médical obligatoire et indépendant des détenus a également été accueillie favorablement par une large majorité de délégations, notamment celles du Brésil et de la Suisse, qui y ont vu un instrument de prévention efficace de la torture.
Au cours de cette journée de débat, les délégations se sont également inquiétées des représailles dont sont l’objet certaines personnes ou entités qui viennent témoigner devant les organes de traités de droits de l’homme de l’ONU et ont salué, à cet égard, les décisions du Comité des droits de l’homme et du Comité contre la torture de créer des mandats de rapporteur spécial sur ce phénomène.
« L’intimidation et les attaques physiques contre des journalistes, des organisations non gouvernementales, et d’autres membres de la société civile ayant coopéré avec le Comité des droits de l’homme sont inexcusables », a notamment dénoncé son Président, M. Nigel Rodley, tandis que la déléguée de l’Union européenne a dénoncé tout effort tendant à limiter le débat.
« Le Conseil des droits de l’homme doit demeurer un lieu sûr pour les représentants de la société civile », a notamment souligné la délégation.
De son côté, le Président du Sous-Comité de la prévention de la torture, M. Malcolm Evans, a appelé les États Membres à remédier d’urgence aux contraintes en financement et en personnel du Sous-Comité, notant qu’au rythme actuel il avait un planning sur 25 ans de visites entières, outre des retards accumulés qui prendraient 15 ans à résorber.
De même, alors qu’une soixantaine de pays ont établi des mécanismes nationaux de prévention de la torture, « ce qui est en soi impressionnant », certains « ne semblent pas avoir pleinement saisi ce que signifie en pratique une approche préventive ».
M. Evans a par ailleurs regretté que pour la première fois dans l’histoire du Sous-Comité, ses membres avaient jugé nécessaire de suspendre une de leurs visites, en Azerbaïdjan, en raison de problèmes récurrents pour obtenir des accès immédiats et sans restriction dans des lieux de détention.
Le représentant de l’Azerbaïdjan a, pour sa part, exprimé le désir de son gouvernement de « coopérer constructivement » avec ses membres.
La Troisième Commission poursuivra son débat sur les droits de l’homme demain, mercredi 22 octobre, à partir de 10 heures.
PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME (A/69/383–S/2014/668) [point 68]
-- Application des instruments relatifs aux droits de l’homme (A/69/40 (Vol. I), A/69/40 (Vol. II, Part One), A/69/40 (Vol. II, Part Two), A/69/44, A/69/48, A/69/284, A/69/285, A/69/289, A/69/290, A/69/296 et A/69/387)
-- Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne
(A/69/36)
Déclarations liminaires suivies d’une séance de questions
Venu présenter quatre rapports relatifs aux droits de l’homme, M. IVAN ŠIMONOVIĆ, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, a tout d’abord affirmé que celui du Secrétaire général sur le « Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour la lutte contre les formes contemporaines d’esclavage » (A/69/290) observe qu’en dépit d’un apport limité de 409 000 dollars, le Fonds était parvenu à appuyer les travaux de 35 organisations dans le monde.
Il a précisé que les projets financés portaient sur la réhabilitation des victimes de la traite, les mariages précoces et forcés, les pires formes de travail d’enfants, l’esclavage domestique et le travail forcé ainsi que l’exploitation sexuelle, entre autres.
M. Šimonović s’est ensuite penché sur le rapport du Secrétaire général sur le « Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture » (A/69/296), indiquant que ce Fonds avait connu une baisse continue de contributions depuis 2011. Pour faire face à cette situation, le Conseil d’administration a défini une vision plus claire et de nouveaux objectifs qui seront introduits à partir de 2015. D’ici à 2017, a précisé M. Šimonović, le portefeuille du Fonds devrait être mieux équilibré géographiquement et le Fonds devrait être mieux à même de pouvoir réagir aux situations d’urgence et émergentes.
Passant à la note du Secrétaire général transmettant le rapport des présidents des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme sur les travaux de leur vingt-sixième réunion qui s’est tenue à Genève du 23 au 27 juin 2014 (A/69/285), M. Šimonović a précisé que cette réunion portait sur le suivi des organes de traités, ainsi que sur l’harmonisation de leurs méthodes de travail.
Les présidents des organes ont notamment recommandé que chaque organe de traité diffuse les procédures simplifiées pour la présentation des rapports périodiques à compter du 1er janvier 2015. Ces derniers ont également recommandé la nomination d’un rapporteur sur les représailles et décidé d’inclure un point relatif à la question des représailles au programme de leur réunion annuelle.
En venant enfin au rapport du Secrétaire général sur le « Fonds spécial créé par le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » (A/69/289), M. Šimonović a précisé que depuis sa création en 2012, le Fonds avait appuyé 22 projets avec un budget de 600 000 dollars et que le rapport engage les États Membres à y contribuer sur une base volontaire.
M.CLAUDIO GROSSMAN, Président du Comité contre la torture, a présenté le rapport du Comité (A/69/44) concernant ses cinquante-et-unième session (28 octobre-22 novembre 2013) et cinquante-deuxième session (28 avril-23 mai 2014), qu’il a tenues depuis la présentation de son dernier rapport annuel. Á ce jour, 156 États sont parties à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée le 10 décembre 1984, et entrée en vigueur le 26 juin 1987. Le 25 septembre 2014, a compté le dernier signataire au nom de l’Érythrée.
À la même date, les États parties au Protocole facultatif se rapportant à la Convention étaient au nombre de 72. En outre, le Comité a reçu au total 370 rapports et en a examiné 343 (la situation en Guinée a été examinée en l’absence de rapport); 27 rapports initiaux et 44 rapports périodiques étaient en retard. Il a souligné que le Comité avait un arriéré dans l’examen de 151 plaintes individuelles et en a reçu 627 concernant 34 États, alors que 238 violations ont été effectivement trouvées dans 88 plaintes. Depuis 2010, le Comité a aussi reçu 175 requêtes pour des mesures provisoires et en a accordé 128. Le Comité poursuit son dialogue de suivi avec les États parties et attire leur attention sur l’application de la Convention.
M. Grossman a encouragé les États à partager les bonnes pratiques afin d’atteindre une ratification universelle puis une mise en œuvre totale. L’engagement doit être pris au sérieux, a-t-il dit, en déclarant: « Nous voulons un monde exempt de torture. »
Il a aussi souligné que le Comité avait développé une riche jurisprudence sur un éventail de questions comme la nature absolue de l’interdiction de la torture, l’importance de l’intégration de la définition de la torture dans les législations nationales, l’identification des pratiques qui constitue une torture, l’interdiction de l’utilisation de preuves obtenues sous la torture, et le fait que la déportation dans un État où le plaignant risque de subir une violence sexuelle équivaudrait à une violation de l’obligation de non-refoulement en vertu de l’article 3 de la Convention. Il a aussi mis l’accent sur la nécessité de redressement et de réparations, conformément à l’article 14.
Aux cours des deux sessions mentionnées, le Comité a examiné les rapports soumis par 16 États parties en vertu du paragraphe 1 de l’article 19 de la Convention, procédé à l’examen, en l’absence de rapport, des mesures prises par la Guinée pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention sur son territoire, et adopté des observations finales concernant 17 États parties.
Il se félicite que 86 États parties aient accepté la procédure facultative pour l’établissement des rapports, qui consiste à élaborer et adopter une liste de points (liste préalable de points à traiter) et à la transmettre aux États parties avant que ceux-ci ne soumettent le rapport périodique attendu.
Le Comité a aussi adopté une déclaration concernant la question des représailles dans laquelle le Comité a réaffirmé le rôle essentiel des particuliers, des groupes et des institutions qui lui fournissent des informations. M. Grossman a invité à prendre cette question très au sérieux car le Comité continue d’être saisi d’allégations à ce propos. Il a d’ailleurs nommé deux rapporteurs pour examiner cette question à la lumière des articles 19, 20 et 22 de la Convention. Il a en outre créé une page Internet dans laquelle il manifeste publiquement cette inquiétude et la nécessité de transparence au sujet des cas de représailles, ainsi que la considération par les États parties concernés. Il a espéré que ses initiatives favoriseraient la prévention de cette pratique envers laquelle il cautionne une « tolérance zéro ».
Le Comité a également débattu de la procédure simplifiée pour l’établissement des rapports (voir le paragraphe 38) dans l’optique de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale sur le renforcement et l’amélioration du fonctionnement de l’ensemble des organes conventionnels des droits de l’homme. Quoique facilitant la tâche des États parties, le Comité tient à souligner que cette nouvelle procédure a considérablement accru sa charge de travail car l’élaboration des listes préalables demande davantage de travail que celle des listes « traditionnelles », établies après la soumission des rapports périodiques. Les conséquences sont d’autant plus lourdes que le Comité compte peu de membres.
À sa cinquante-deuxième session, le Comité a décidé d’organiser une célébration d’une demi-journée du trentième anniversaire de la Convention à sa prochaine session, en novembre, et d’associer cette célébration à la récente initiative en faveur de la ratification et l’application universelles de la Convention. Il a enfin décidé d’organiser deux journées de retraite pour une réflexion à sa cinquante-troisième session, en novembre, sur ses méthodes de travail, qu’il a le souci constant d’améliorer.
M. Grossman a conclu qu’il n’existait aucun vide normatif en ce qui concerne la torture grâce justement à l’adoption de la Convention il y a trente ans et qu’il suffit maintenant de s’engager en vue de la pleine application de ses obligations.
Débat avec les délégations
La représentante de la Suisse a affirmé que son gouvernement avait proposé la création d’une plate-forme sur les organes de traité afin de faciliter les consultations avec ces derniers et a fait savoir qu’un essai pilote est en cours pour en déterminer la valeur ajoutée. S’inquiétant ensuite des actes d’intimidation et de représailles dont sont victimes certaines personnes qui portent des informations à l’attention des organes de traités, la représentante a salué la nomination de deux rapporteurs sur les représailles et voulu savoir si d’autres mesures sont envisagées pour lutter contre ce phénomène.
La déléguée de l’Union européenne s’est de son côté interrogée sur l’efficacité des mesures prises par le Comité pour lutter contre le problème des représailles.
À son tour, le représentant du Royaume-Uni s’est interrogé sur les stratégies à adopter pour assurer l’universalisation de la Convention et sa mise en œuvre effective. Par ailleurs, comment le Comité pourrait-il affiner ses mesures de suivi afin d’accroître son efficacité?
Le représentant du Chili a soulevé la question de la justice de transition et des réparations. Il a aussi fait savoir que la nouvelle Constitution du Chili consacrera l’importance du droit à vie et à l’intégrité physique et morale. Aucune personne ne pourra être victime de torture ou de traitement inhumain ou dégradant, a-t-il affirmé.
Répondant à ce groupe de question, le Président du Comité contre la torture a reconnu la nécessité d’éviter les doubles emplois et d’assurer la légitimité des organes. Il a fait observer que plusieurs organes avaient des dispositions portant sur la torture, et a insisté sur l’importance de l’harmonisation, tout en précisant que le comité n’avait pas tenu de réunion spéciale portant sur la question de l’harmonisation.
M. Grossman a mis l’accent sur l’importance d’assurer l’indépendance et l’autonomie des membres des Comités. Les traités des droits de l’homme doivent être considérés comme des instruments à visée humanitaire qui portent, avant tout, attention à la victime, a-t-il par ailleurs souligné.
M. Grossman a affirmé que l’élaboration d’une convention de lutte contre les représailles pourrait être envisagée, soulignant que les représailles dont sont victimes les personnes ou entités qui viennent porter des informations à l’attention du Comité représentent une forme de violation des droits de l’homme. Il a également fait observer que les États avaient eux aussi la possibilité de présenter leurs propres commentaires au Comité et a ajouté qu’outre la réunion spéciale prévue sur le problème des représailles, les membres du Comité envisageaient par ailleurs d’effectuer des visites sur le terrain. Les représailles créent un fossé entre les États et la population, et il faut dispenser d’une tolérance zéro à leur égard, a-t-il déclaré.
En venant à la question de la ratification universelle de la Convention, M. Grossman a déclaré qu’aucun État ne pouvait arguer que la lutte contre la torture était un droit relatif. Il recommandé aux États Membres de tenir des réunions régionales pour échanger les meilleures pratiques, et a ajouté que les États qui n’avaient pas les moyens institutionnels de ratifier la Convention pouvaient obtenir l’aide du Comité.
M. Grossman a par ailleurs fait savoir que le Comité avait affiné ses méthodes de suivi et prenait part à un dialogue continu avec les États Membres au lieu de se limiter à discuter avec eux uniquement lors de la présentation des rapports périodiques.
Déclarations liminaires, suivies d’un dialogue interactif
M. MALCOLM EVANS, Président du Sous-Comité de la prévention de la torture , a regretté qu’en dépit de besoins constants ou en augmentation pour prévenir des incidents de torture et de mauvais traitements, les moyens limités du Sous-comité n’aient permis de réaliser que six visites en 2013: trois visites complètes en Nouvelle-Zélande, au Pérou et au Gabon, deux visites de conseil sur les mécanismes nationaux de prévention en Allemagne et en Arménie, et une visite de suivi au Cambodge en application de l’article 13 (4) du Protocole. Une visite prévue au Togo a été repoussée et devrait avoir lieu cette année. « Franchement, ce nombre de mesures est très insuffisant pour permettre au Sous-comité d’exercer correctement son mandat aux termes de la Convention », a déploré M. Evans.
En 2014, le nombre de visites a été porté à huit, mais une nouvelle fois le manque de moyens n’a permis la réalisation que de sept d’entre elles, et l’une, organisée au Nigéria, n’a duré que trois jours. Des visites ont également eu lieu au Nicaragua, en Équateur, à Malte et en Azerbaïdjan, et deux autres sont encore prévues. En bref, les capacités opérationnelles n’ont presque pas changé en dépit de l’augmentation du nombre d’États parties, qui atteint maintenant 74, y compris la Finlande depuis la semaine dernière.
M. Evans a appelé à remédier d’urgence aux contraintes en financement et en personnel du Sous-Comité, notant qu’au rythme actuel il avait un planning sur 25 ans de visites entières, outre des retards accumulés qui prendraient 15 ans à résorber.
Il a fait valoir que les mécanismes nationaux de prévention de la torture, lorsqu’ils étaient établis conformément aux critères du Protocole, avaient une réelle valeur reconnue à la fois par les personnels de surveillance et par les détenus – ce qui explique que le Sous-Comité continue à se concentrer sur ces mécanismes et à y consacrer des visites de courte durée.
Une soixantaine de pays en ont établi, ce qui est en soi impressionnant, mais, a relativisé M. Evans, « beaucoup manquent de ressources, et d’autres, il faut le dire, ne semblent pas avoir pleinement saisi ce que signifie en pratique une approche préventive ».
M. Evans a par ailleurs déploré des entraves posées au travail du Sous-comité par certains États parties. « Pour la première fois nous avons jugé nécessaire de suspendre une de nos visites, en Azerbaïdjan, en raison de problèmes récurrents pour obtenir des accès immédiats et sans restriction dans des lieux de détention », a-t-il dit, en précisant toutefois qu’il semblait, suite à de nouvelles discussions avec les autorités, que cette visite pourrait finalement avoir lieu.
Enfin M. Evans a regretté un manque de suivi et d’information sur la mise en œuvre des recommandations du Sous-comité. « Il se peut très bien que beaucoup de nos recommandations et de celles des mécanismes nationaux de prévention soient mises en œuvre. La difficulté est que nous ne le savons pas », a-t-il dit, en expliquant qu’il tentait d’y remédier par correspondance ou avec de rapides visites de suivi comme celle réalisée au Cambodge en 2013.
Il a conclu en appelant à la mise en œuvre de la Résolution 68/268 sur le renforcement du Traité, dont il escompte un plus grand soutien au travail du Sous-Comité. Il a noté que c’était d’autant plus nécessaire que le Sous-Comité était arrivé à un point où il a accumulé une véritable connaissance sur la réalité de la torture , de sa prévention, et de ce qui peut être fait.
« C’est peut-être la raison pour laquelle nous trouvons un peu plus difficile de faire notre travail, peut-être que nous pénétrons plus profondément dans les problèmes et posons des questions plus difficiles – si c’est le cas, tant pis. Un exemple se trouve dans notre septième rapport qui pour la première fois soulève un lien direct entre la torture, les mauvais traitements et la corruption », a déclaré M. Evans.
Dialogue
Engageant un dialogue avec le Président du Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels ou dégradants, les délégations se sont principalement intéressées à la coopération des membres de cet organe avec les organisations régionales, à l’établissement de mécanismes nationaux de prévention de la torture et à la question des représailles à l’encontre des personnes coopérant avec le Sous-Comité ou, de manière générale, avec les organes conventionnels des Nations Unies chargés des droits de l’homme.
La Suisse s’est dite reconnaissante de l’engagement des membres du Sous-Comité qui offre, selon elle, un « instrument unique » en vue de contribuer à une mise en œuvre effective des obligations des États par rapport à l’interdiction absolue de la torture. Sa représentante a appelé les États à la ratification, dans les meilleurs délais, du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Au vu de la persistance des cas de torture, elle a rappelé que M. Evans était un partisan reconnu de la nécessité d’intensifier la collaboration entre les acteurs impliqués dans la prévention de la torture aux niveaux local, régional et global, voire de définir de nouvelles approches. La Suisse a fait de la prévention de la torture l’une des priorités de sa présidence 2014 de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) afin de développer les réponses de cette organisation dans ce domaine, mais aussi de renforcer la collaboration entre l’OSCE et l’ONU.
L’exigence d’indépendance des mécanismes de prévention nationaux, ainsi que le rôle essentiel de la société civile dans la prévention de la torture figurent également au centre des préoccupations suisses. Elle a posé des questions sur la coopération envisageable avec les organisations régionales comme l’OSCE, sur les activités à intensifier, ou adapter en priorité, en vue d’une meilleure prévention de la torture et sur les mesures à prendre pour le renforcement de l’indépendance des mécanismes de prévention nationaux.
La République tchèque a félicité l’Érythrée et l’État de Palestine pour être les derniers États parties à avoir ratifié la Convention. Elle a regretté la non-coopération de Bahreïn avec les organes de traités sur la torture en dépit des assurances données par le Gouvernement de ce pays. Elle a demandé que des soins soient dispensés à plusieurs personnes détenues à Bahreïn. Elle a encouragé à faire en sorte à disposer de mécanismes nationaux robustes de prévention et de lutte contre la torture. Quels sont les critères nécessaires pour la création de tels mécanismes?
L’Union européenne s’est félicitée de l’augmentation des États parties, tant à la Convention qu’au Protocole facultatif, mais a cependant partagé l’inquiétude de M. Evans quant au nombre d’États parties n’ayant pas encore établi un mécanisme de prévention de la torture. La déléguée a fortement appuyé le travail du Comité sur la politique sur les représailles contre des personnes qui coopèrent avec lui.
Le Royaume-Uni a salué, de son côté, le peaufinage des méthodes de travail du Sous-Comité et s’est demandé quels étaient les résultats du processus de renforcement des organes conventionnels.
L’Azerbaïdjan a regretté que la visite du Sous-Comité dans ce pays se soit terminée de manière prématurée, et a exprimé le désir de son gouvernement de « coopérer constructivement » avec ses membres.
Réponse
M. MALCOLM EVANS, Président du Sous-Comité sur la torture, a ajouté sa voix à celle de la Suisse pour remercier tous les États parties qui sont l’objet d’une pression constante des organes de traités, ainsi que pour l’appel à une ratification universelle d’un instrument qui, somme toute, est relativement jeune.
Concernant les relations avec les organisations régionales, il affirmé que l’un des jalons de la tâche du Sous-Comité est justement la coopération à tous les niveaux. L’un des domaines les plus importants réside dans la manière d’appuyer les mécanismes nationaux de prévention afin qu’ils puissent s’entraider dans leurs activités respectives.
Des organisations telles que l’OSCE peuvent jouer un rôle indispensable dans la création de ces mécanismes et les assister. Les recommandations et avis donnés doivent veiller à éviter les doublons, a-t-il dit.
Il s’est déclaré insatisfait du rythme actuel de coopération avec les États parties qui viennent de le devenir. Il a émis le désir que des membres du Sous-Comité puissent effectuer une visite dans les deux mois suivant l’adhésion mais constaté que les ressources financières rendaient ces visites difficiles, ce qu’il a jugé déplorable.
Il faut des capacités et des ressources accrues pour assister les États Membres, a déclaré M. Evans. Il a souhaité que les mécanismes nationaux soient rapidement créés après la ratification du Protocole facultatif, avec l’aide du Sous-Comité, et a insisté sur le fait qu’il n’existait pas une façon unique de créer ce mécanisme ce qui signifie que chaque Etat aura une approche différente.
Il a en outre remarqué une tendance croissante des États qui prévoient de devenir partie et cherchent des recommandations sur ce que serait concrètement un mécanisme de prévention. C’est un travail ciblé et important qu’il convient d’encourager et d’accompagner, a estimé M. Evans.
Le Sous-Comité passe au crible 70 États par an en ce qui concerne leurs mécanismes nationaux, avec peu de ressources, a rappelé le Président du Sous-Comité, en signalant que ses membres ne disposaient que d’un « soutien ponctuel ». Le problème clef reste intact: les membres ne sont toujours pas en mesure de faire des visites optimales dans les délais rapides que certaines situations imposent. Il a suggéré l’organisation de tables rondes avec les États parties pour assoir un partenariat avec eux car il ne suffit pas de présenter et d’examiner des rapports, a-t-il dit.
M. JUAN MÉNDEZ, Rapporteur spécial sur la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants, a commenté son rapport intérimaire (A/69/387) dans lequel il examine le rôle essentiel que joue la criminalistique vis-à-vis de l’obligation des États d’ouvrir effectivement une enquête et d’engager des poursuites sur les allégations de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Pour le Rapporteur spécial, tous les États ont l’obligation d’enquêter sur les actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (autres mauvais traitements). Cette obligation, qui s’inscrit dans le cadre juridique beaucoup plus large de la lutte contre la torture, englobe la prévention, la répression et la réparation.
M. Méndez a précisé que le rapport traitait en profondeur des preuves scientifiques dans les poursuites judiciaires et sur les moyens de promouvoir la documentation médicale de la torture et autres mauvais traitements et l’application du Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, dit Protocole d’Istanbul de 1999, devenu un outil essentiel et une importante source d’allégations de torture.
Il a observé durant ses missions d’établissement des faits, que les États rechignaient à conduire des enquêtes sur des allégations de tortures. Cette absence d’enquête, ainsi que le manque de reddition de compte, perpétue la pratique de la torture et autres mauvais traitements, qui sont absolument interdits au regard du droit international et du droit international relatif aux droits de l’homme. Il a insisté sur le fait qu’une enquête était obligatoire, que la victime portât des signes visibles de torture ou non.
D’autre part, les dossiers médicaux sont susceptibles de contribuer, de façon déterminante, à surmonter l’absence d’autres preuves objectives à laquelle se heurtent couramment les victimes de torture, étant donné que les actes de torture sont le plus souvent infligés en l’absence de témoins. La tâche du médecin légiste est essentielle à la lutte contre l’impunité dont bénéficie la torture, car l’avis d’un expert sert de base aux poursuites judiciaires engagées en cas d’allégations de torture.
D’autre part, une preuve scientifique peut contribuer à déterminer si les déclarations incriminantes ont été arrachées sous la torture et devraient donc être exclues du procès et aider les États à remplir leurs obligations de non-refoulement, réparations et réhabilitation. À l’occasion de ses missions d’enquête, M. Méndez a constaté que la criminalistique englobe d’autres disciplines, techniques et méthodes, comme la balistique, la graphologie et les investigations sur les lieux du crime.
Il a réfuté, par ailleurs les arguments de certains États qui prétendent que les instruments sophistiqués médico-légaux sont hors de leur portée, financièrement parlant. Il a répliqué que le diagnostic d’un acte de torture n’exigeait pas des méthodes « high tech » ou un équipement coûteux. Il a mis l’accent, à cet égard, sur l’obligation des États de solliciter une assistance et de partager les bonnes pratiques. Les cas convenablement étayés par des rapports médico-légaux de bonne qualité sont en train de révolutionner l’enquête sur la torture et d’en améliorer les résultats.
Le Rapporteur spécial a relevé un besoin pressant de renforcer la participation de la science médico-légale dans tous les secteurs de la justice criminelle et dans les cas où des personnes sont particulièrement exposées à des risques, notamment lorsqu’elles sont gardées en détention administrative ou préventive, lorsque des mineurs sont maintenus en détention ou encore, dans des établissements psychiatriques.
De l’avis de M. Méndez, l’impact de la science médico-légale souffre du manque d’indépendance institutionnelle et de rigueur dans son utilisation et d’une insuffisance de formation. Dans bien des cas, les professionnels de la santé des établissements.
S’agissant des visites de pays, M. Méndez en a effectué une au Mexique du 21 avril au 2 mai 2014, pays traversant un changement constitutionnel, législatif et institutionnel majeur. Tout en observant des progrès dans certains domaines, notamment dans le respect de l’obligation de prévenir la torture, M. Méndez a constaté que cette pratique demeurait largement répandue et renforcée par plusieurs facteurs, y compris l’absence d’une définition unique de la torture qui refléterait la définition internationale, le manque d’enquête sur des allégations de torture et l’absence de poursuites et de pénalisation des auteurs, de compensation et de réparations aux victimes.
En juin 2014, M. Méndez a effectué une visite de suivi en Tunisie et a salué l’ouverture de ses interlocuteurs concernant le suivi de ses recommandations, et a souhaité une évaluation de cette mise en œuvre. Il s’est félicité du fait que l’esprit de réforme et en faveur des droits de l’homme soit forte en Tunisie et s’est dit encouragé par les jalons importants posés, comme l’intégration dans la nouvelle Constitution de l’interdiction de la torture et l’inapplicabilité du statut de limitations.
Il a particulièrement apprécié l’adoption d’une nouvelle législation sur la justice transitionnelle et l’établissement de la Commission Vérité et dignité, ainsi que la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention, de même que l’établissement d’un Mécanisme national de prévention de la torture, avec de larges pouvoirs de suivi dans les lieux de détention.
Il a en revanche noté que la torture et les mauvais traitements étaient encore présents lors des interrogatoires et de la mise en détention et estimé qu’il fallait des changements substantiels pour appliquer concrètement les mesures et réformes juridiques récemment adoptées pour briser le cycle de l’impunité et prévenir et éliminer la torture et les mauvais traitements en Tunisie.
Il a regretté, par ailleurs, que la visite prévue pour la Gambie en août dernier eût été brusquement reportée par le Gouvernement, mais s’est réjoui que de nouvelles dates eussent été suggérées pour début novembre. M. Méndez attend aussi une réponse de Bahreïn et de la Thaïlande à l’issue de deux reports de visite.
M. Méndez s’est félicité également de l’invitation et de la confirmation données par le Brésil et la Géorgie, et a insisté pour que l’invitation des États-Unis à visiter le centre de détention de Guantanamo Bay à Cuba soit assortie de conditions qu’il juge acceptables.
Dialogue
La représentante de l’Argentine a affirmé que la médecine légale était un outil précieux pour parvenir à la vérité et s’est interrogée sur le meilleur moyen de renforcer son utilité.
Le représentant du Danemark a demandé à connaître des exemples sur les meilleures pratiques en matière de formation d’experts médico-légaux, tandis que la représentante des États-Unis a voulu savoir comment mettre les rapports des médecins légistes à disposition des victimes de la torture. Cette dernière a par ailleurs souligné que la Constitution de son pays stipulait que les preuves obtenues sous la torture ne pouvaient être utilisées au cours de procès.
La représentante du Liechtenstein a, quant à elle, soulevé le problème des abus dont sont victimes certaines personnes souffrant de troubles psychologiques dans des instituts médicaux.
À son tour, la représentante de la Suisse s’est inquiétée des graves manquements dans le recours à la médecine légale, notamment en matière d’établissements des faits et de lutte contre l’impunité. À l’instar de la représentante du Brésil, elle a également appuyé la proposition d’instaurer un examen médical obligatoire et indépendant des détenus, y voyant un instrument de prévention efficace. Elle a souhaité savoir si le Rapporteur avait l’intention d’intégrer systématiquement cette proposition dans ses prochaines visites de pays.
En la matière, la déléguée de l’Union européenne s’est inquiétée du fait que le Rapporteur spécial avait été contraint d’annuler des visites sur le terrain, ainsi que des demandes de visite qui demeurent en suspens, notamment en Gambie, en Thaïlande et au Bahreïn.
Lui emboîtant le pas, la représentante du Bahreïn a souhaité que les discussions relatives aux visites sur le terrain se fassent par le biais de mécanismes bilatéraux. Répondant également aux préoccupations de la République tchèque, elle a assuré que différentes mesures de protection avaient été instaurées pour garantir les droits des détenus.
Le représentant du Maroc a ensuite affirmé que son gouvernement avait établi un dialogue continu avec le Rapporteur spécial pour assurer un meilleur suivi des recommandations formulées par ce dernier. Le représentant du Mexique a quant à lui formé l’espoir que, suite à sa récente visite sur le terrain, le rapport du Rapporteur spécial rendra enfin compte de la véritable situation qui prévaut sur le terrain.
La représentante de la Norvège a jugé nécessaire de répondre sur les raisons structurelles du recours à la torture, tandis que son homologue du Royaume-Uni s’est interrogé sur les meilleurs moyens d’encourager les États à ratifier la Convention.
En la matière, le représentant du Maroc a souligné que son gouvernement envisageait d’organiser un forum régional pour aider les pays qui n’ont pas encore ratifié la Convention à le faire.
Comment l’exécutif peut-il veiller à ce que des principes essentiels de lutte contre la torture soient assurés lorsqu’il y a une véritable séparation des branches du pouvoir, a lancé de son côté la représentante des Maldives.
Répondant à ce groupe de questions, le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants, a souligné la nécessité d’exclure les preuves obtenues sous l’effet de la torture, mais également lorsqu’il y a eu risque de coercition. Il a estimé que l’application qui en est faite aux États-Unis illustrait l’esprit de la Convention. Il a insisté sur l’importance de la coopération technique entre les États, pour ensuite se féliciter de l’appui des États Membres à sa proposition de rendre l’examen médical des détenus obligatoire.
Il a déclaré que les annulations de dernière minute avaient un impact négatif sur la capacité de son Bureau à effectuer ses travaux, puis a insisté sur l’importance pour son équipe de pouvoir se rendre dans les lieux de détentions librement, à la date et l’heure choisie et sans devoir craindre des représailles.
Il a fait savoir qu’il envisageait de se rendre prochainement au Maroc et au Sahara occidental pour assurer le suivi de ses recommandations. Il a parlé de la visibilité que ses visites place sur le problème de la torture dans un pays.
S’agissant des meilleures pratiques dans le domaine médico-légal, M. Méndez s’est félicité du fait que le Protocole d’Istanbul était connu de chacun au Mexique, ce qui n’est pas le cas ailleurs. Voilà une bonne pratique à favoriser, a-t-il lancé.
Sur la question concernant la séparation des pouvoirs, M. Méndez a affirmé que si les interrogateurs faisaient partie de la branche exécutive du Gouvernement, il incombait à celle-ci de pénaliser les interrogateurs qui auraient eu recours à la torture et de leur faire savoir que les preuves ainsi recueillies sont perdues.
À son tour, le Président du Comité contre la torture a déclaré qu’il y avait trop de chevauchements dans la rédaction des rapports ou qu’une fois le dialogue interactif prévu avec l’État concerné, son rapport périodique était déjà périmé. Les deux semaines et demi de plus accordées à la tenue des travaux du Comité sont donc très importantes. L’examen des pétitions a également pâti d’un arriéré notable, et la pénurie de ressources pose par ailleurs un problème, a-t-il dit.
Le Président du Sous-Comité de la prévention contre la torture a jugé nécessaire de renforcer les réunions des présidents d’organes de traités. Il a souligné que l’organe qu’il présidait devrait à présent envisager la tenue simultanée de 30 dialogues en plus d’interactions continues avec 14 États Membres. Il a regretté que le temps de réunion accordé au Sous-Comité restât inchangé, d’où l’accent placé sur l’importance de l’assistance technique.
Reprenant la parole, M. Méndez a déploré le fait que certains médecins n’effectuent pas les examens nécessaires pour déterminer si un avortement a été effectué sous la contrainte ou à une date avancée de la grossesse. Il a également soulevé la question de savoir si les traitements psychiatriques non consensuels représentaient une forme de traitement dégradant.
Le Rapporteur spécial a par ailleurs regretté le fait que les médecins ne sont plus formés pour détecter le passage de l’électricité dans un corps humain, notamment dans les pays où l’utilisation de l’électricité comme forme de torture est répandue.
Débat général
Mme FREDERIKE TSCHAMPA (Union européenne) a réaffirmé le caractère universel, indivisible et interdépendant de tous les droits de l’homme et appuyé le système multilatéral des droits de l’homme au cœur duquel se trouve l’ONU. La déléguée a encouragé à la ratification de tous les instruments relatifs à ces droits et aux Protocoles s’y rapportant. Les organes conventionnels de suivi sont indispensables pour traduire les dispositions de ces conventions sur le terrain. Elle a appuyé l’efficacité de ces organes et la résolution 68/268 de l’Assemblée générale sur leur renforcement, d’une part, et l’assistance technique, l’échange de pratiques optimales, et le travail du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme dans la promotion de la réalisation pratique de tous les droits de l’homme pour tous, ainsi que tous ses mécanismes et procédures spéciales. Elle a particulièrement salué le travail de la mission de suivi des droits de l’homme en Ukraine et souligné la nécessité que celle-ci continue de recevoir des informations objectives et en temps voulu depuis le terrain. L’intervenante a assuré que l’Union européenne continuera de plaider pour l’indépendance, l’impartialité et la non-sélectivité du Haut-Commissariat et appelé les États Membres à lui fournir les ressources indispensables à son mandat.
À cet égard, la déléguée a estimé que le Haut-Commissariat ne doit pas principalement compter sur les contributions volontaires. Elle a chaleureusement accueilli le nouveau Haut-Commissaire aux droits de l’homme, M. Zeid Ra’ad Al Hussein, et s’est dite impatiente d’avoir un échange avec lui à l’occasion du premier dialogue interactif au sein de la Troisième Commission dans les prochains jours. L’Union européenne a aussi appuyé l’accent mis par le nouveau Commissaire sur la situation des défenseurs des droits de l’homme et sur la nécessité de reddition de compte, son engagement en faveur des droits de l’enfant et de la lutte contre toutes les formes de discrimination. Elle a salué par ailleurs le rôle de la société civile et regretté que, dans beaucoup de pays, ses représentants et organisations se heurtent encore à des restrictions, à l’accès aux ressources, et sont l’objet d’intimidation, de harcèlement et d’agressions violentes. Elle a insisté pour que le Conseil des droits de l’homme demeure un lieu sûr pour les représentants de la société civile et réaffirmé que l’Union européenne s’opposera énergiquement à tous les efforts tendant à limiter le débat. Enfin, la représentante a défendu l’intégration de la perspective des droits de l’homme dans toutes les activités de l’ONU, y compris et en particulier dans le programme de développement pour l’après-2015.
Mme VIRGINIA BRAS GOMES, Rapporteuse du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, au nom du Président du Comité Zdzislaw Kedzia, s’est félicitée des mesures prises pour lui permettre d’examiner dans les délais impartis les rapports fournis par les États parties et commencer à résorber les retards accumulés, grâce en particulier à l’augmentation de son temps de session.
Mme Bras Gomes a également remercié les États pour leur coopération avec le travail du Comité, ainsi que les organisations non gouvernementales.
Elle a toutefois souligné l’importance de renforcer les capacités du Comité au niveau des pays, afin de renforcer la coopération entre les organismes du Traité et les États parties.
Mme Bras Gomes a salué l’augmentation du nombre de signataires du Protocole se rapportant au Pacte international relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels, qui atteint désormais 16 répartis dans toutes les régions du monde, mais elle a appelé à une accélération de ces adhésions, nécessaire à son efficacité.
Enfin, elle a souligné la nécessité de placer les droits de l’homme, et en particulier les droits économiques, sociaux et culturels au cœur du programme de développement pour l’après-2015, avec notamment l’inclusion d’indicateurs sur l’absence de discriminations, l’égalité entre hommes et femmes, la participation, la transparence et la responsabilité.
Dialogue interactif
La représentante de la Suisse a mentionné que Genève se proposait d’accueillir une plateforme des organes de Traités à Genève, afin d’assister leur travail, et qu’un essai pilote était déjà en cours. Elle a également indiqué que la Suisse encourageait la création d’un poste de rapporteur sur les actes d’intimidation et de représailles visant les personnes et organisation qui participent aux organes de Traités.
La représentante du Bélarus a répété que son pays voulait poursuivre un dialogue fructueux avec la Commission.
La déléguée de l’Union européenne a noté que malgré ses arriérés le Comité avait fait un effort pour examiner les rapports périodiques sans trop de retard, ce qui est essentiel. Mais elle a noté que certains rapports attendent depuis plus de 10 ans: quelles mesures sont prévues pour encourager la présentation des rapports qui se font attendre? a-t-elle demandé? D’autre part, quelle serait la norme minimale pour avoir une approche basée sur les droits de l’homme en temps de crise économique et financière?
Le représentant de l’Argentine, au nom du Groupe des amis du Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels a noté qu’il était important que le Protocole facultatif soit ratifié par autant d’États que possible, afin de le renforcer.
Il a ajouté que la protection des droits sociaux, économiques et culturels devait commencer au niveau national, et que la subsidiarité était un élément important. Il a également évoqué le rôle essentiel de la société civile dans le soutien des droits de l’homme et l’aide aux victimes. Enfin il a souligné que les droits économiques et sociaux seront renforcés dans la mesure où les droits civils et politiques que suppose le protocole facultatif sont garantis et appliqués, et à l’inverse que des garanties économiques et sociales minimales sont nécessaires pour les droits civils et politiques.
Le représentant du Costa-Rica, rappelant que son pays avait garanti le droit à l’éducation dès le XIXe siècle, et que la suppression de son armée en 1949 lui avait laissé la possibilité d’investir dans l’accès à la santé, a noté que le Costa Rica « recherche les droits de l’homme en tous lieux et toutes circonstances. Il a également fait valoir qu’il n’est pas juste de dire que les droits civils relèvent de l’État alors que les droits économiques sociaux et culturels relèveraient des autres acteurs.
La représentante de l’Afrique du Sud a noté que son pays adhérait au Pacte et parachève la modification de sa législation pour en terminer la ratification.
La représentante de Cuba a salué le travail du Comité et demandé que l’on détaille un peu plus les plans du Comité dans le contexte de la préparation du programme de développement pour l’après-2015.
Réponses
Mme Bras Gomes a noté que l’Assemblée générale avait fourni un grand soutien à ses organes conventionnels et que des efforts d’amélioration des processus de travail étaient déjà engagés. Elle a ajouté que le Comité était prêt à étudier la proposition suisse ce que pouvait ajouter une plateforme des organes de traités. Quant à la question des représailles et actes d’intimidation, elle a indiqué qu’il y avait dans certains pays des questions liées aux droits de l’homme, et que cela figure dans les conclusions du Comité.
Mme Bras Gomes a remercié le Bélarus d’avoir répondu aux questions complémentaires posées par le Comité, saluant « une très bonne façon d’agir ».
Enfin, répondant à l’Union européenne, elle a rappelé que les deux semaines de session supplémentaires accordées au Comité avaient permis que le travail en retard cesse de s’accumuler. « Nous avons également une approche plus cohérente, plus resserrée avec des jalons, et nous étudions comment les États s’adaptent aux indicateurs des droits de l’homme », a-t-elle dit, notant que, pour l’heure, « ces indicateurs figurent dans les recommandations et conclusions ».
Le processus de rapport permet aux États d’évaluer leur politique publique, et c’est aussi une occasion de dialogue avec la société civile, a-t-elle ajouté. Quant aux rapports encore attendus, ils correspondent aux 10% qui n’ont encore jamais présenté de rapport et auront besoin d’une solution sur mesure.
Évoquant la coordination avec les institutions internationales spécialisées, elle a noté qu’à la suite d’une réorganisation elles ne participaient plus directement aux sessions du Comité, ce qui n’empêche pas de suivre leurs travaux, par exemple l’OIT, dont nous regardons les travaux sur la protection du droit au travail.
Mme Bras Gomes a conclu en évoquant la lettre écrite par le président du Comité aux États parties en 2012 pour leur rappeler leurs obligations, y compris en période de difficultés budgétaires et de faible croissance. Il faut respecter les droits sociaux politiques et culturels, en accordant une attention particulière aux groupes défavorisés, et il faut des mesures spéciales pour remédier aux inégalités qui augmentent en temps de crise, a-t-elle dit. En outre l’article 2-1 du Pacte sur l’assistance stipule que la coopération et l’aide internationales sont très importantes pour les États qui ne peuvent pas fournir ces droits au niveau national.
Elle est revenue sur la question des peuples autochtones qui subissent des discriminations chroniques pour signaler que les projets hydroélectriques demeuraient un sujet de profonde préoccupation en termes de droits économiques, sociaux et culturels.
M. NIGEL RODLEY, Président du Comité des droits de l’homme, a présenté le rapport annuel du Comité en notant qu’il était publié sur fond d’une « escalade de la violence dans certaines régions du monde, une période qui nous rend témoins d’un niveau de cruauté se glorifiant de l’infliction de la douleur et de la mort, particulièrement contre des innocents et des philanthropes, et se moque des normes universelles de la décence ».
« Malheureusement le manque de promotion et de protection des droits de l’homme, y compris des droits civils et politiques, participe des causes profondes d’un tel conflit », a-t-il dit.
Il a noté que, à chacune de ses sessions, le Comité constatait des progrès dans la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. « Cependant nous devons aussi mentionner des problèmes dans sa mise en œuvre: discrimination, attaques contre des acteurs indépendants de la société civile, manque d’un processus participatif largement inclusif, et systèmes politiques corrompus, pour ne mentionner que quelques-uns des obstacles aux droits de l’homme et à leur sécurité. Nous savons que notre travail peut contribuer à un changement positif et à mettre fin aux cycles de la violence, mais pour cela votre aide est nécessaire », a-t-il précisé.
Il a, à ce propos, salué l’augmentation des ressources et du temps de session alloué au Comité, ayant permis d’augmenter le nombre de ses communications et d’accélérer l’examen des rapports soumis par les États.
Il a toutefois encouragé les 24 États ayant accumulé un retard de cinq ans ou plus dans la soumission de rapports à respecter leurs obligations, le cas échéant en bénéficiant de la coopération technique proposée par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.
M. Rodley a indiqué par ailleurs que le Comité avait nommé un Rapporteur sur les représailles, chargé de prévenir, d’enquêter et de faire rendre compte de tous actes d’intimidation ou de représailles visant ceux qui collaborent avec lui. « L’intimidation et les attaques physiques contre des journalistes, des organisations non gouvernementales, et d’autres membres de la société civile ayant coopéré avec le Comité sont inexcusables », a-t-il dit, invitant tous les États à participer au travail du Rapporteur.
Il a précisé que le Comité espérait, durant sa session en cours, adopter son Commentaire général sur l’article 9 relatif au droit à la liberté et à la sécurité des personnes.
Enfin il a noté que cette année marquait le vingt-cinquième anniversaire du Deuxième Protocole facultatif sur l’abolition de la peine de mort. Il a salué les ratifications du Protocole intervenues récemment et appelé les États ne l’ayant pas encore ratifié à le faire.
Dialogue interactif
Lors d’un échange de vue avec le Président du Comité des droits de l’homme, M. Nigel Rodley, l’Union européenne a déclaré être consciente des défis qui accompagnent la croissance des organes conventionnels et attend une coopération fructueuse entre tous les protagonistes du processus intergouvernemental sur le renforcement de ces organes. Elle a prié le Comité de faire une évaluation préliminaire de la nouvelle procédure simplifiée de présentation des rapports.
Moins conciliant, le Bélarus a évoqué, pour sa part, la réunion des 10 présidents des organes de traités mais estimé que leur rapport était « déséquilibré en faveur de la société civile ». Les organes de traités ne peuvent créer de nouvelles obligations pour les États, a souligné la représentante, qui a vivement invité le Comité des droits de l’homme à ne pas outrepasser ses prérogatives au titre de son mandat.
D’autre part, les communications ne concernent pas directement la mise en œuvre des instruments relatifs aux droits de l’homme, a-t-elle poursuivi, avant d’inviter le Comité de cesser de rédiger des observations générales. Elle a, en revanche, demandé au Comité de préparer un rapport sur les méthodes de travail du Comité relatives au suivi du Protocole facultatif.
La Suisse a salué en particulier l’adoption prochaine d’une observation générale concernant l’article 9 du Pacte. Saluant l’adoption de la résolution 68/268, elle a considéré qu’il était de la responsabilité des organes de traités de mettre en place des méthodes de travail efficaces. Il est tout aussi essentiel que les États parties soumettent leurs rapports dans les délais impartis, et améliorent leur efficacité et leur collaboration avec les organes conventionnels.
Évoquant l’idée avancée par son pays d’une plate-forme consacrée aux organes de traités à Genève, la représentante a affirmé que celle-ci faciliterait les contacts et la coopération au sein même des organes ainsi qu’avec d’autres mécanismes des droits de l’homme, des experts, le monde universitaire et les États parties.
La représentante a aussi salué l’engagement pris par les présidents des organes conventionnels visant à la mise au point d’une politique commune pour traiter des actes d’intimidation et de représailles à l’encontre de personnes qui coopèrent avec eux.
La Norvège a jugé que le processus de renforcement des organes de traités était une base solide pour consolider le système des droits de l’homme. Le représentant a aussi mis l’accent sur la question des représailles et s’est demandé quel est le rôle des droits politiques et civils pour l’après-2015.
Réponses
M. NIGEL RODLEY a répondu qu’il serait difficile de faire une évaluation rapide de la procédure simplifiée mais, qu’intuitivement, pour les membres du Comité, cela serait tout à fait productif. Il a renvoyé au problème de traduction qui est moins épineux désormais avec la simplification de la procédure de présentation des rapports.
Au Bélarus, il a jugé laborieux de chercher à répondre à la polémique, mais a renvoyé au pouvoir du Comité de décider de ses méthodes de travail et de son règlement intérieur, qui, du reste, n’est pas remis en question par la plupart des États parties. Il a insisté sur le fait que le Comité ne saurait faire d’exception pour aucun État.
Dans sa réponse à la Suisse, M. Rodley a reconnu ne pas être familiarisé avec l’idée d’une plate-forme mais a souligné que les réunions annuelles des organes de traités ne suffisaient pas pour coordonner et coopérer comme il se doit avec les autres comités et partenaires. Une séance officieuse des présidents de ces organes pourrait avoir lieu en janvier prochain à Londres, a-t-il dit.
Même la nomination d’un rapporteur spécial sur les représailles contre les personnes qui coopèrent avec les organes des droits de l’homme ne suffit pas, mais il y a sans doute tout un catalogue de mesures à prendre. Ainsi, on pourrait veiller à ce que cette question soit signalée aux titulaires de mandats sur les défenseurs des droits de l’homme, ou des juges et des avocats.
Ce catalogue a été demandé par les organes de traités à leur dernière réunion de manière à définir une stratégie collective. Concernant l’après-2015, il a répondu à la Norvège que les organes mentionnés avaient adopté une Déclaration de principe, laquelle pourrait être incluse dans les objectifs du programme de développement pour l’après-2015. Il a déclaré qu’il serait néfaste que les droits de l’homme ne soient pas inclus dans ce programme.
Débat général
M. SEBASTIANO CARDI (Italie) a affirmé que son gouvernement accordait la plus haute priorité au moratoire sur les exécutions. Il a évoqué le lancement prochain des négociations sur la rédaction de la cinquième résolution établissant un moratoire sur le recours à la peine de mort, précisant que l’objectif de ce texte n’est pas de pointer du doigt un système ou une culture.
Le représentant a souligné avoir conscience du fait que chaque État évolue à une vitesse différente et a annoncé que le Haut Institut pour les sciences criminelles de Syracuse, en Italie, avait proposé de former les juges de pays rétentionnaires afin de les aider à se départir de l’application de la peine de mort.
M. Cardi a ensuite parlé du rôle critique que jouent la compréhension et la tolérance dans le domaine de la prévention de conflit, et s’est dit convaincu que la religion a un rôle essentiel à jouer pour prévenir les conflits et maintenir la stabilité.
Le représentant a ensuite assuré qu’en sa capacité de Présidente adjointe de la Conférence des États parties à la Convention relative aux droits des personnes handicapées, l’Italie s’emploierait à en renforcer l’efficacité.
M. MAYANK JOSHI (Inde) a salué les efforts déployés par les États Membres pour assurer le succès de l’examen périodique universel, ainsi que l’adoption, en avril 2014, de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale qui entend rationaliser le fonctionnement du système d’organes de traités relatifs aux droits de l’homme.
M. Joshi a ensuite souligné qu’alors que la Constitution de son pays garantit le respect des droits politiques et civiques fondamentaux, un parlement progressif, la liberté des médias et une société civile florissante avaient contribué à renforcer le respect des droits de l’homme en Inde.
Le représentant a précisé que son gouvernement accordait la priorité au développement socioéconomique inclusif, en portant une attention spéciale à la sexospécificité et à l’inclusion des personnes les plus vulnérables et marginalisées.
En 2013, une loi importante sur la sécurité alimentaire a été adoptée et l’Inde s’emploie par ailleurs à renforcer les lois destinées à protéger les femmes et les enfants grâce notamment à l’entrée en vigueur, en 2012, d’une loi visant à protéger les enfants d’agressions sexuelles. La loi sur le droit à l’information a également contribué à autonomiser les citoyens de l’Inde.
M. THIPHASONE SENGSOURINHA (République démocratique populaire lao) a affirmé que son pays était partie à sept des neuf principaux organes de traités de l’ONU et que l’Assemblée nationale lao avait promulgué plus de 90 lois, entre autres, pour honorer les obligations découlant de ces traités. Un plan d’ensemble pour le secteur juridique entend notamment renforcer le respect de l’état de droit d’ici à 2020.
La République démocratique populaire lao a également renforcé son mécanisme de rédaction de rapport en établissant des comités et des commissions à cette fin, notamment le Comité national de coordination pour les droits de l’homme qui a été établi en 2012.
M. Sengsourinha a précisé que ce comité était également chargé de coordonner les propositions de ratifications de traités des droits de l’homme et d’assurer le suivi de la mise en œuvre des obligations dans ce domaine. Le représentant a également indiqué que le Ministère des affaires étrangères avait organisé plusieurs ateliers pour sensibiliser et informer les fonctionnaires du Gouvernement de leur obligation en matière de droits de l’homme.
Mme ARINO YAGUCHI (Japon) a fait savoir que les rapports du Japon sur l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale avaient été examinés en juillet et août respectivement.
Elle s’est félicitée du dialogue constructif engagé entre son gouvernement et les Comités pertinents. Mme Yaguchi a ensuite annoncé que le Japon avait ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées le 20 janvier 2014, précisant que deux personnes handicapées avaient ensuite représenté le Japon lors de la Conférence des États parties à cette Convention.
La représentante a également indiqué que le Japon entend augmenter à au moins 30%, d’ici à 2020, la proportion de femmes occupant des postes de prise de décisions dans les secteurs politique et public.
Mme JUANA SANDOVAL (Nicaragua) a déclaré que les objectifs stratégiques du Gouvernement nicaraguayen, fondés sur le développement durable et la réduction de la pauvreté, s’appuyaient sur une conception fondamentale de restitution des droits par le truchement d’une stratégie du « vivre proprement, vivre sainement, vivre agréablement, vivre bien », en donnant une priorité aux enfants, aux femmes et aux jeunes.
La stratégie d’éradication de la pauvreté du Nicaragua repose sur un modèle de démocratie directe et participative avec des responsabilités partagées entre le Gouvernement central, les municipalités, les producteurs, les milieux d’affaires et le rôle du pouvoir citoyen.
Elle a ajouté que le Nicaragua continuait d’adapter son cadre juridique aux normes internationales des droits de l’homme, dont la plupart sont déjà inscrits dans sa Constitution, et qu’il avait mis sur pied un bureau de procureur général chargé de la défense des droits de l’homme, qui se consacre particulièrement aux thèmes de l’éducation, de la santé, de la violence envers les femmes, du handicap, du VIH/sida et de l’orientation sexuelle.
Des stages de formation et de sensibilisation ont également été proposés aux agents de la police nationale, de l’armée, de l’administration pénitentiaire et du système judiciaire, avec une sensibilisation aux droits des peuples autochtones et afro-descendants. Les formations dans le système pénitentiaire ont également porté sur le traitement des mineurs et des femmes.
Enfin, a souligné la représentante, le Nicaragua participe activement au Conseil des droits de l’homme et à plusieurs organismes régionaux et internationaux des droits de l’homme, sans oublier son adhésion à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Mme FOUROUZANDEH VADIATI (République islamique d’Iran) a déclaré que son pays réitérait son engagement à promouvoir et à protéger les droits de l’homme, et à coopérer de façon constructive avec le système de traité sur les droits de l’homme et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.
Le deuxième examen périodique universel de l’Iran sera présenté dans les jours qui viennent, et l’Iran attend une participation efficace et constructive durant ce processus, a-t-elle dit. La République islamique a également eu plusieurs réunions de haut nouveau avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme afin d’améliorer la coopération technique de l’Iran, a noté la représentante, précisant que le Haut-Commissaire avait été invité à se rendre dans le pays.
Pour l’Iran, les droits de l’homme en soi ne sont pas issus d’une culture particulière, mais sont indéniablement un consensus transculturel avec des racines dans toutes les cultures et civilisations.
Aucun système ne doit être imposé aux États, et la coopération internationale doit permettre à différentes cultures et civilisations d’avoir leur propre interprétation et conceptions du concept plus large de l’universalité des droits de l’homme dans le monde, a ajouté la représentante. Elle a donc déploré le fait que certains États, poursuivant leurs objectifs politiques, aient retenu une politique montrant du doigt certains pays s’agissant des droits de l’homme.
Elle a souligné que d’une façon générale les sanctions unilatérales et les mesures coercitives contrevenaient aux normes internationales des droits de l’homme et nuisaient à la jouissance des droits de l’homme par les personnes ordinaires. Par conséquent, l’Iran espère que le Haut-Commissaire condamnera les sanctions imposées.
Enfin la déléguée a souligné que l’extrémisme violent incarné aujourd’hui par l’État soi-disant islamique, sa brutalité et sa sauvagerie comptaient parmi les menaces ravageant l’Iraq et la Syrie et pesaient sur le Moyen-Orient. « Nous rejetons les stéréotypes essayant de souiller le nom de l’islam en essayant de les associer à ces actes violents et sanguinaires commis par de tels groupes méprisables, en violation de tous les droits de l’homme et du droit humanitaire », a-t-elle conclu.
Mme REN XIAOXIA (Chine) a appuyé les différents organes conventionnels et les efforts entrepris en vue de la promotion de l’application des instruments internationaux en matière de droits de l’homme. La Chine dialoguera bientôt avec le Comité contre la torture et le Comité pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, comme elle l’a fait avec d’autres organes auxquels elle a soumis ses rapports périodiques.
Au vu de la situation nationale, le Gouvernement a activement mis en œuvre les recommandations des comités qu’il a acceptées. La représentante s’est ensuite félicitée de la résolution sur le renforcement des organes conventionnels et a invité les parties prenantes à faire preuve de transparence et de sens de l’équilibre dans le cadre de la pleine exécution de la résolution.
Les services consultatifs et le renforcement des capacités doivent être accordés avec le consentement de l’État partie et les avis de celui-ci doivent être pleinement respectés, a-t-elle précisé. Toute demande allant à l’encontre de l’État ou sans son consentement ne ferait qu’alourdir les procédures du Comité.
Elle a recommandé un système de contrôle et de reddition de comptes des comités conventionnels qui doivent éviter d’outrepasser leur mandat, ou d’être impartiaux et sélectifs. Il est aussi nécessaire que les organes de traités et le Secrétariat filtrent les informations soumises par des individus qui cherchent à participer à ses travaux pour s’assurer qu’elles sont fiables et crédibles.
Mme DINARA IZANOVA (Kazakhstan) a déclaré que le Kazakhstan envisageait de ratifier la Convention relative aux droits des personnes handicapées, qu’il avait remis un rapport récemment sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, et qu’il allait également soumettre un rapport aux termes de la Convention contre la torture.
Elle a toutefois ajouté que le Kazakhstan aimerait qu’une assistance technique soit fournie aux pays pour les rapports. Elle a précisé que son pays avait déjà reçu des rapporteurs spéciaux notamment pour les formes contemporaines d’esclavage et pour la liberté de religion. Son pays a également entrepris des activités pour intensifier sa coopération avec le comité des disparitions forcées.
Concernant les droits des enfants, le Kazakhstan prépare un rapport et a prévu d’œuvrer à l’établissement d’un institut de l’ombudsman pour les droits des enfants. Il a, en outre, un projet de code sur les droits des enfants.
Enfin, la déléguée a reconnu qu’il restait beaucoup à faire et que son gouvernement entendait coopérer sur ces sujets avec les institutions civiles. Le Kazakhstan est en faveur d’un financement pour le Conseil des droits de l’homme et ses procédures afin qu’il puisse conseiller les États.
M. PHILLIP TAULA (Nouvelle-Zélande) s’est félicité du fait que Samoa eût signé la Convention relative aux droits des personnes handicapées au mois de septembre de cette année. Il a ensuite rappelé que la Nouvelle-Zélande s’était portée candidate pour occuper un siège au Comité des droits des personnes handicapées pendant la période 2017-2020. Il a également salué la décision de créer un mandat de Rapporteur spécial pour les personnes handicapées.
M. Taula s’est ensuite inquiété du fait que les personnes handicapées sont souvent laissées de côté par les processus de développement. Il s’est félicité de l’inclusion de la question du handicap dans les objectifs de développement durable et a appelé les États Membres à défendre l’inclusion de références aux personnes handicapées lors de la dernière étape de négociation du programme de développement pour l’après-2015.
Mme INTISAR NASSER MOHAMMED ABDULLAH (Yémen) a déclaré que les droits de l’homme avaient été intégrés dans les garanties constitutionnelles suite aux réformes entreprises avec le changement politique et le processus de justice transitionnelle. Le Conseil des ministres a donné son approbation pour un projet de lutte contre la traite des personnes et une loi portant création d’un organe national indépendant sur les droits de l’homme a été promulguée.
Un certain nombre de traités et protocoles ont été ratifiés en vue de la protection des groupes vulnérables comme les personnes handicapées, ou les enfants qui travaillent dans les forces armées. Enfin, des conférences sur les nouvelles démocraties, ou encore sur les détenus de Guantanamo ont aussi été organisées au Yémen. La déléguée a souligné que certains détenus yéménites de Guantanamo n’avaient rien à voir avec des terroristes et qu’il serait opportun de revoir leur situation en vue de leur libération.
M. OUINIBANI KONATE (Burkina Faso) a affirmé que son gouvernement avait adopté, au mois de mai, une loi portant prévention et répression de la torture après avoir adopté, en avril, une loi portant définition et répression de la vente d’enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants. Le Gouvernement a noué un partenariat fécond avec la société civile pour mener des campagnes de sensibilisation afin de mieux faire connaître, protéger et promouvoir les libertés individuelles et collectives.
M. Konate s’est aussi félicité des progrès enregistrés en matière de droits économique, sociaux et culturels avec la mise en œuvre de la Stratégie nationale de croissance accélérée et de développement qui, a-t-il expliqué, prend en compte toutes les couches sociales dans la conception du développement.
Dans le domaine du droit à la santé, des mesures ont été prises pour rendre gratuits certains soins, dont la vaccination. Le droit à l’alimentation, a enchaîné le représentant, connaît aussi une nette amélioration grâce à une politique dynamique de développement de l’agriculture et de l’élevage.
Mme JEANNE D’ARC BYAJE (Rwanda) a déclaré que la question des droits de l’homme au Rwanda était de la plus haute importance, vu son histoire de mauvaise gouvernance et de génocide entre autres.
Le Rwanda a donc veillé à ratifier tous les instruments liés aux droits de l’homme et à les inscrire dans sa constitution, qui consacre tout un chapitre à la protection des droits fondamentaux de tous les civils sans discrimination.
La représentante a également noté que le Rwanda avait été le premier pays africain à se soumettre au mécanisme d’évaluation par ses pairs africains en 2005, et qu’en 2007 il avait mis sur pied une équipe spéciale interinstitutionnelle qui a travaillé avec les organisations de la société civile et de l’ONU.
Par ailleurs des lois et réglementations sur les organisations politiques et les organisations non gouvernementales ont été promulguées ou améliorées et plusieurs élections libres nationales et locales ont été organisées, une loi sur l’accès à l’information a été votée et les médias continuent de croître.
Enfin, le Rwanda a aboli la peine de mort, « décision nécessaire pour un pays se reconstruisant à la sortie d’un génocide », a noté la représentante, et il a amélioré les conditions de détention avec la construction ou la rénovation de prisons. Il a également enregistré des résultats extraordinaires pour les droits civils et juridiques et mis sur pied un système d’aide juridique, tandis que le système judiciaire indépendant a pris des mesures pour garantir les droits constitutionnels de tous les citoyens.
La représentante a également souligné que les droits de l’homme doivent commencer par l’élimination de la pauvreté.
Mme ENKHTSETSEG OCHIR (Mongolie) a annoncé qu’au début du mois, son gouvernement avait ratifié la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Il est par ailleurs sur le point d’achever le processus de ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que du troisième Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications.
Mme Ochir a également indiqué qu’un plan d’action avait été élaboré pour assurer la mise en œuvre des recommandations formulées au cours de l’examen périodique universel. La Mongolie élabore aussi un nouveau plan d’action pour faire face aux défis rencontrés lors de la promotion et de la protection des droits de l’homme.
Mme INDAH NURIA SAVITRI (Indonésie) a dit le souci des États Membres d’entretenir un dialogue fructueux avec les membres des organes conventionnels et a rappelé que ceux-ci devaient respecter les principes de redevabilité, d’indépendance et d’impartialité, conformément à leur mandat.
Elle a relevé que le Haut-Commissariat avait désormais 70 bureaux et unités hors-siège, et que le Conseil des droits de l’homme avait nommé 52 titulaires de mandats, ce qui représente un fardeau en termes de travail et de ressources financières.
La représentante a estimé que l’examen périodique universel était un mécanisme clef pour faire des progrès sûrs dans le domaine des droits de l’homme. Les dialogues avec les organes de traités offrent l’occasion d’un échange qualitatif qui permet ensuite de combler les lacunes au niveau national et de mieux cibler les besoins d’assistance.
En mars 2014, l’Indonésie, ainsi que le Maroc et le Danemark ont lancé une initiative visant à la promotion de l’assistance technique et la coopération dans le cadre de l’application de la Convention contre la torture. L’Indonésie met actuellement en œuvre le troisième Plan d’action en vue du renforcement des mécanismes d’application des traités auxquels le pays a souscrit, avec la participation d’un large éventail d’acteurs, y compris les organisations de la société civile.
M ROBERT ALEXANDER POVEDA BRITO (Venezuela) a déclaré que le système des droits de l’homme avait été renforcé au Venezuela, pas seulement dans le système juridique mais avec l’ensemble de la politique menée. Le Venezuela est un État démocratique et social, un État de droit qui donne la prééminence à la démocratie et aux droits de l’homme.
Les traités, pactes et conventions ratifiés par le Venezuela ont une préséance en droit interne, a précisé le représentant. Il a noté qu’en 2011, son pays avait adhéré au Protocole contre la torture et autres traitements cruels et dégradants ainsi qu’au Protocole sur les droits des migrants, et qu’en 2013, il avait adopté la Convention sur les droits des personnes handicapées.
Le Venezuela est à jour de la présentation de ses rapports dans les différents domaines relevant des droits de l’homme, notamment pour la discrimination à l’égard des femmes, a-t-il précisé.
Par ailleurs il a noté que la politique menée depuis plusieurs années avait conduit à une réduction de la pauvreté, y compris dans des secteurs de la société historiquement oubliés.
M. SAHAK SARGSYAN (Arménie) s’est félicité du trentième anniversaire, cette année, de la Convention contre la torture, et a jugé qu’il était impératif de relever les défis qui persistent dans la protection des droits de l’homme. Il a souligné la nécessité d’une stratégie nationale intégrée pour que tous les droits soient couverts sur un pied d’égalité, avec l’établissement d’une institution du médiateur. Cette année, le médiateur a nommé un défenseur des droits des femmes, a dit le représentant.
La cruauté et la violence ne doivent jamais être tolérées et la communauté internationale doit améliorer les systèmes de prévention des actes de torture. Il a rappelé que la communauté internationale avait été choquée dernièrement par la mort du villageois arménien Karen Petrosian à Bakou, torturé à mort en Azerbaïdjan, et qui était accusé de faire partie d’un groupe armé. Il a fait état d’une autre affaire similaire de paysan torturé, exigeant une enquête sur ces deux cas.
M. KEVIN CASSIDY, de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a affirmé que les normes du travail s’inscrivaient dans le cadre général des droits de l’homme, ce qui a été fait pendant plus de 100 ans. L’approche participative et transparente démontre l’importance qu’il y a à travailler avec des personnes crédibles. Avec son expertise dans le monde du travail, l’OIT appuie les activités des organes conventionnels, comme c’est le cas du Comité sur les droits des travailleurs migrants et les membres de leur famille.
Il a affirmé que les huit conventions internationales de l’OIT constituaient aussi des bases pour la protection des migrants. L’OIT vise aussi, à travers une convention récente, à la protection des travailleurs et des travailleuses domestiques, ainsi qu’à l’éradication du travail forcé et de la traite humaine. À cet égard, un nouveau protocole facultatif contraignant a été adopté qui inclut les réparations pour le travail forcé et envisage la poursuite de ses auteurs.