L’Assemblée adopte ses résolutions sur la coordination de l’aide humanitaire et la sécurité du personnel concerné dans le contexte des conflits en Ukraine et en Syrie
Dans un contexte mondial marqué par le nombre record de 50 millions de personnes déplacées par les conflits, en Ukraine, en Syrie et ailleurs, et les catastrophes naturelles, et par le niveau tout aussi inédit des attaques contre le personnel humanitaire, l’Assemblée générale a adopté aujourd’hui ses très longues résolutions annuelles sur la coordination de l’aide humanitaire et la sécurité du personnel concerné.
La coordination de l’aide humanitaire a été jugée d’autant plus cruciale que, comme l’a noté le représentant de Suisse, l’un des 10 intervenants, « le taux de financement des appels humanitaires ne fait que diminuer alors que le nombre des déplacés est désormais de 50 millions, un nombre jamais enregistré depuis la deuxième Guerre mondiale. Les fonds sont passés de 12,4 milliards de dollars en 2007 à 22 milliards de dollars en 2013 mais ils demeurent insuffisants.
Le représentant du CICR a tenu à préciser que la coordination, c’est un environnement où les acteurs opèrent côte à côte dans la complémentarité et la responsabilité collective.
Dans la résolution adoptée par consensus*, l’Assemblée générale « constate avec satisfaction » que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) s’est efforcé d’établir des partenariats avec les organisations régionales et les donateurs non traditionnels dont le secteur privé. Elle encourage les États à instaurer un environnement propice au renforcement des capacités des autorités locales, des ONG et des communautés nationales et locales, en vue de mieux les préparer à apporter en temps voulu une aide humanitaire efficace et prévisible. Le représentant du Canada avait en effet défendu des programmes humanitaires flexibles, « dont la mise en œuvre est basée sur les vues de leurs bénéficiaires ».
Comme hier, les principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance applicables à l’action humanitaire, dont l’importance est soulignée par les deux résolutions, ont été au cœur de nombreuses interventions. L’Ukraine a, par la voix de son représentant, dénoncé le fait que d’août à novembre, la Fédération de Russie a envoyé huit « convois humanitaires » sans le consentement ni l’inspection des autorités ukrainiennes. Son homologue russe a répondu que son pays fournissait l’aide à travers le Programme alimentaire mondial (PAM).
Des échanges similaires ont eu lieu entre la République arabe syrienne et la Turquie, le premier dénonçant le refus du dernier de laisser passer les convois humanitaires depuis son territoire vers la Syrie. « Pures allégations dénuées de tout fondement », s’est défendu le délégué turc. « La politisation des efforts humanitaires explique pourquoi la crise humanitaire perdure dans mon pays », a renchéri le délégué syrien, qui a accusé certaines organisations humanitaires de soutenir les groupes terroristes en Syrie.
Dans la résolution, l’Assemblée se félicite du premier Sommet mondial sur l’aide humanitaire, à Istanbul, en 2016. Elle encourage d’ailleurs les États à accorder, dans le cadre du débat sur le programme de développement pour l’après-2015, l’importance qu’elle mérite à la réduction des risques de catastrophe.
S’agissant de la sûreté et de la sécurité du personnel humanitaire**, l’Assemblée note avec préoccupation qu’en 2013, 0,8% de membres du personnel des organismes des Nations Unies, soit 1 216 personnes, ont été victimes d’incidents notables de sécurité au cours desquels 28 ont été tuées, 226 blessées et 17 enlevées. Dans le préambule de la résolution adoptée également sans vote, l’Assemblée engage « vivement » les États à prendre « des mesures énergiques » pour que les auteurs de crimes commis contre le personnel humanitaire ne restent pas impunis. Il n’y a pas de solution toute faite » pour gérer les risques de sécurité, a avoué le représentant du CICR « qui met plutôt l’accent sur l’acceptation par les parties ».
Le représentant du Comité a lié ce problème à la « vraie question » qu’est l’accès humanitaire. En conséquence, le Sommet du Japon ne doit pas seulement se concentrer sur les questions techniques et périphériques mais aussi sur les facteurs principaux de l’érosion de l’entreprise humanitaire.
L’Assemblée générale a également adopté toujours par consensus, une résolution relative au vingtième anniversaire de la participation des « Casques blancs » aux opérations de secours humanitaire*** et une autre sur le Processus de Kimberley****.
Dans une dernière résolution relative aux pays en développement sans littoral, également adoptée par consensus*****, elle a fait siens la Déclaration et le Programme d’action de Vienne. « Les priorités de ces pays doivent être maintenant dûment reflétées dans le programme de développement pour l’après-2015 », a plaidé la représentante de la Zambie.
L’Assemblée générale poursuivra ses travaux lundi 15 décembre à partir de 10 heures.
*A/69/L.40; **A/69/L.33; ***A/69/L.37; ****A/69/L.39; *****A/69/L.28
RENFORCEMENT DE LA COORDINATION DE L’AIDE HUMANITAIRE ET DES SECOURS EN CAS DE CATASTROPHE FOURNIS PAR LES ORGNISMES DES NATIONS UNIES, Y COMPRIS L’ASSISTANCE ÉCONOMIQUE SPÉCIALE
Rapports du Secrétaire général sur la sûreté et la sécurité du personnel humanitaire et la protection du personnel des Nations Unies (A/69/406), le Fonds central pour les interventions d’urgence (A/69/96), la coopération internationale en matière d’aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles: de la phase des secours à celle de l’aide au développement (A/69/303), et sur l’assistance au peuple palestinien (A/69/84)
Déclarations
M. GUILLERMO RISHCHYNSKI (Canada) a jugé absolument inacceptable que face au nombre croissant de personnes dans le besoin, l’ONU et les États Membres soient incapables de se mettre d’accord pour reconnaître les capacités des communautés locales touchées à œuvrer à leur propre relèvement. « Nous continuerons d’appuyer des programmes humanitaires flexibles, dont la mise en œuvre sera basée sur les vues de leurs bénéficiaires. » Nous continuerons aussi, a poursuivi le représentant, à souligner l’importance fondamentale qu’il y a à ce que les organisations humanitaires soient capables d’atteindre les personnes dans le besoin et de fournir une aide rapide et sans entrave aux personnes vulnérables.
Face aux défis grandissants et à l’augmentation des besoins, le représentant s’est félicité de la décision du Secrétaire général de convoquer un sommet humanitaire mondial en 2016. Reconnaissant l’importance capitale de la culture de la prévention, il a indiqué que son pays venait de consacrer 500 millions de dollars à des campagnes de vaccination pour les enfants pauvres partout dans le monde. Le Canada s’est également engagé à hauteur de 20,6 millions de dollars sur quatre ans pour financer les efforts de reconstruction après le passage du typhon Haiyan aux Philippines. « Cela s’ajoute aux 85 millions de dollars déjà fournis par mon gouvernement, afin d’honorer la promesse de verser un dollar pour chaque dollar promis par un Canadien à des organisations enregistrées au Canada. »
M. DMITRY I. MAKSIMYCHEV (Fédération de Russie) a salué la réforme entreprise en matière de coordination de l’aide d’urgence des Nations Unies, de même que l’initiative du Secrétaire général visant à organiser un sommet humanitaire à Istanbul en 2016. À ce sujet, il a souhaité un processus préparatoire ouvert, transparent et inclusif. Les États dont les populations sont affectées doivent avoir voix au chapitre lors de la prise de décisions au Sommet, a-t-il ajouté. Il s’est dit en faveur du recours aux mécanismes régionaux d’intervention humanitaire qui ont fait leurs preuves. La Fédération de Russie a, en outre, proposé de créer un mécanisme multilatéral pour surmonter les conséquences des catastrophes en temps voulu.
De plus, a insisté le représentant, la Fédération de Russie est « pour un respect scrupuleux des principes directeurs de l’aide humanitaire consacrés par les résolutions des Nations Unies », et pour que les États sinistrés jouent un rôle dans la coordination de l’aide sur leur territoire. Hélas, a-t-il déploré, « force est de constater que dans certaines situations ces principes ne sont pas respectés ».
Il s’est dit particulièrement préoccupé par la situation humanitaire grave dans le sud-est de l’Ukraine, à l’approche de l’hiver. La Fédération de Russie intensifie ses efforts afin d’apporter une aide humanitaire à la population vulnérable de l’Ukraine. Elle fournit notamment, à travers le Programme alimentaire mondial (PAM), une aide financière dans le Donbass qui pâtit le plus des opérations militaires ukrainiennes, et a déjà envoyé huit convois humanitaires, y compris des matériaux de construction et des générateurs électriques. Le représentant a estimé que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pourraient jouer un rôle plus important dans le cadre de ses efforts.
En dépit des mesures adoptées par la communauté internationale, la sécurité du personnel humanitaire des Nations Unies laisse à désirer, a poursuivi le représentant. Il a souhaité une enquête rapide sur la mort tragique d’un membre du CICR à Donesk, « à la suite de tirs aveugles effectués par les Forces de sécurité ukrainiennes ». Enfin, il s’est dit convaincu que les sanctions, « les rares cas de restrictions unilatérales en marge du Conseil de sécurité », ne faisaient qu’aggraver les souffrances de la population civile.
Mme FARAH T A S H ALGHARABALLY (Koweït) a souligné que l’Afrique restait la principale bénéficiaire de l’aide humanitaire des Nations Unies et le fait que les affectations pour les besoins au Moyen-Orient ont augmenté en raison de la situation en Syrie. Elle a salué les États pour avoir honoré leurs engagements financiers dans les cas de catastrophes naturelles comme aux Philippines. Elle a, à son tour, souligné l’importance de la culture de prévention et les prérogatives des États en la matière. La représentante s’est ensuite préoccupée de la baisse de l’aide à Gaza après le blocus israélien. Elle a appelé la communauté internationale à faire pression sur Israël pour qu’il lève le blocus et ouvre tous les points de passage. Elle a rappelé que l’aide humanitaire doit être accordée sans distinction entre régions ou autres critères ethniques ou religieux. Elle a affirmé que le Koweït a doublé son aide aux agences humanitaires et des secours d’urgence des Nations Unies.
M. AKAN RAKHMETULLIN (Kazakhstan) a appelé à la mise en œuvre rapide et efficace du programme de transformation du Comité permanent interorganisations et argué que le cadre commun pour la préparation aux situations d’urgence dudit Comité devrait être optimisé pour une meilleure synergie entre les organisations humanitaires et de développement. Mais, a prévenu le représentant, c’est le financement qui demeure la clef d’une aide efficace. Il faut donc affiner les processus d’appels consolidés et augmenter les contributions au Fonds central pour les interventions d’urgence et aux différents fonds humanitaires communs. Nous devons, a insisté le représentant, faire tout pour que l’action humanitaire soit à la hauteur des défis en 2015 et au-delà. Le Kazakhstan, qui soutient les activités de la liaison du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) à Almaty, est passé du statut de récipiendaire à celui de donateur d’aide. Depuis 2010, le pays a déboursé une somme de 10 millions de dollars pour plusieurs pays et versé 500 000 dollars pour le Fonds humanitaire commun en faveur de la Somalie dont il a d’ailleurs suggéré la création dans le cadre de l’Organisation de la coopération islamique.
Le Kazakhstan, a indiqué le représentant, s’emploie désormais à l’installation définitive de son agence d’aide au développement, KazAID, qui s’occupera aussi de l’aide humanitaire et de son financement et qui étudie en ce moment une aide financière aux pays d’Afrique de l’Est. En août dernier, a enfin confié le représentant, un accord intergouvernemental a été signé sur la création du Centre d’Asie centrale pour la réponse d’urgence et la réduction des risques de catastrophes qui deviendra le point focal du réseau de l’ONU à Almaty, que le Kazakhstan entend abriter au nom de la paix, du développement et de la stabilité dans la région.
M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a dénoncé le fait que certains pays instrumentalisaient l’aide humanitaire en Syrie pour avancer leur agenda politique. « On ne peut aborder la question de l’aide humanitaire sans reconnaître la responsabilité des pays qui soutiennent les groupes terroristes », a-t-il dit. Il s’est étonné de ce que l’influence « maligne » des groupes terroristes en Syrie ne soit pas suffisamment reconnue par les responsables de l’ONU. Il incombe aux entités compétentes de l’ONU de mettre en œuvre les résolutions du Conseil relatives aux groupes terroristes en Syrie afin de les empêcher de poursuivre leurs activités sous des prétextes humanitaires, a-t-il poursuivi. Le délégué a également demandé une enquête sur les organisations humanitaires soutenant les groupes terroristes en Syrie, citant notamment l’organisation caritative française « Perle d’espoir ».
M. Ja’afari a dénoncé l’afflux de terroristes en Syrie et l’appui qu’ils reçoivent de certains gouvernements, ce qui ne fait que nourrir le conflit. Ces pays ignorent les souffrances du peuple syrien, a-t-il dit, avant de vivement dénoncer le fait que certains responsables, tels que l’ancien Ministre français Bernard Kouchner ou le Sénateur américain John McCain, se soient introduits en Syrie sans l’aval du Gouvernement syrien. « Mon gouvernement assume ses responsabilités envers le peuple syrien en luttant contre le terrorisme », a-t-il insisté, indiquant que Damas avait tué plus de militants de « l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL) » que les raids aériens de l’alliance internationale. Il s’en est vivement pris aux sanctions contre la Syrie, lesquelles ne font qu’aggraver les conditions de vie des Syriens.
Le représentant a indiqué que la réponse humanitaire en Syrie n’était assurée qu’à hauteur de 25% par la communauté internationale, les 75% restants étant le fait du Gouvernement syrien. « La politisation des efforts humanitaires explique pourquoi la crise humanitaire perdure dans mon pays », a-t-il asséné. Il a invité l’OCHA à ne pas outrepasser son mandat et à respecter les résolutions du Conseil dans la mise en œuvre des programmes humanitaires en Syrie « au lieu de les contourner ». Il a affirmé que lors des trois premiers mois qui ont suivi l’adoption de la résolution 2165 (2014), seuls 5% des convois humanitaires provenaient de l’extérieur de la Syrie. Le délégué a vivement dénoncé le refus du Gouvernement turc de laisser passer les convois humanitaires depuis son territoire vers la Syrie. Enfin, il s’est étonné qu’OCHA ignore le fait que l’aide humanitaire de l’ONU puisse tomber parfois entre les mains de groupes terroristes. Le groupe terroriste « Le drapeau de l’Islam » a ainsi pu mettre la main sur un convoi humanitaire onusien parti de la Jordanie, en raison d’un manque de coordination avec le Gouvernement syrien.
M. YAROSLAV GOLITSYN (Ukraine) a fait remarquer que le mode de vie pacifique et le développement de son pays avaient été profondément bouleversés cette année « par l’annexion illégale de la Crimée et par le conflit provoqué dans deux régions de l’est », entraînant des conséquences dévastatrices pour les peuples et les communautés de toute la région. En dépit d’une série d’accords de cessez-le-feu, des violations graves se produisent tous les jours. Le nombre de personnes déplacées augmente et la vie des citoyens est mise en danger par les actes irresponsables des militants illégaux, a-t-il poursuivi. Ce sont 5,1 millions d’Ukrainiens qui vivent dans des zones affectées par le conflit.
Le Gouvernement ukrainien s’est efforcé d’aider les personnes vulnérables depuis les premiers mois de la crise, a assuré le représentant. Il a mis en place des mécanismes d’assistance en portant une attention particulière à ceux qui participent à des opérations antiterroristes et aux personnes déplacées, pour lesquelles une loi a été adoptée le 20 octobre dernier. Les autorités continuent de fournir du gaz et de l’électricité aux civils dans les zones contrôlées par des militants, malgré des retards de paiement importants. Des centaines de tonnes d’aide humanitaire ont été envoyées dans les régions affectées.
Malheureusement, a-t-il déploré, il y a des obstacles évidents à la fourniture de l’aide du fait de l’interférence des militants. Des groupes armés illégaux ont saisi tous les fonds alloués par le Gouvernement ukrainien aux besoins sociaux des régions. Le représentant a assuré que les indemnités seront versées immédiatement à leurs bénéficiaires dès que le Gouvernement aura repris le contrôle des zones en question.
D’août à novembre, la Fédération de Russie a envoyé huit « convois humanitaires » qui ont traversé illégalement la frontière sans le consentement ni l’inspection des autorités ukrainiennes et sans coordination avec le CICR, s’est plaint le représentant. Le contenu de ces convois est « largement inconnu », de même que leur impact sur les conditions humanitaires dans le Donbass.
M. JIM MCLAY (Nouvelle-Zélande) a indiqué que son pays essaierait de se montrer à la hauteur de la responsabilité particulière qui découle de son mandat de membre non permanent du Conseil de sécurité pour les années 2015 et 2016. Il a apporté son appui à la décision de poursuivre l’aide humanitaire en Syrie au-delà de janvier 2015. M. McLay a ensuite rappelé les principes de neutralité, d’impartialité et d’indépendance qui gouvernent l’aide humanitaire. Soulignant que la région du Pacifique est particulièrement vulnérable aux catastrophes, il a demandé une intensification des efforts pour réduire les risques et souhaité que tous les États Membres s’engagent en faveur de la troisième Conférence mondiale de Sendai sur la réduction des risques de catastrophes naturelles. Le délégué a indiqué que son pays avait contribué à la lutte contre l’épidémie d’Ebola à hauteur de 5 millions de dollars néo-zélandais. Il a dit avoir pris note « avec tristesse » de la démission de la Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires et Coordonnatrice des secours d’urgence, Mme Valerie Amos.
Mme TERRI ROBL (États-Unis) a estimé que le nombre élevé de conflits, comme en attestent les 50 millions de déplacés dans le monde, et l’épidémie d’Ebola ont montré si besoin en était qu’il faut impliquer un plus grand éventail d’acteurs dans l’aide humanitaire, dont le secteur privé, les ONG et les communautés touchées elles-mêmes. La représentante a insisté sur le fait que les attaques contre les centres de santé et le personnel soignant est une source de grande préoccupation et sur le fait que les situations d’urgence en Syrie, en Iraq et en République centrafricaine doivent mobiliser davantage de fonds. Elle a d’ailleurs noté avec satisfaction qu’à ce jour, près de 100 États sont contributeurs de l’aide humanitaire dans le monde. Elle a dit l’intérêt que porte son pays aux réformes qu’il faut apporter au système humanitaire pour qu’il reste à la hauteur des réalités actuelles. Elle a exhorté l’ONU à continuer de peaufiner l’approche fondée sur les besoins face aux crises.
M. HIROSHI MINAMI (Japon) a indiqué que, pour empêcher que l’extrémisme ne s’enracine au Moyen-Orient, tout en répondant rapidement aux crises humanitaires de la région, le Japon a tout de suite débloqué une aide d’urgence de 50 millions de dollars. S’agissant de l’épidémie d’Ebola, c’est 40 millions de dollars supplémentaires qui ont été promis et le 7 novembre dernier, le Japon a fait une autre promesse, celle d’élever sa contribution à 100 millions de dollars.
Les besoins sont tellement immenses, a prévenu le représentant, que les contributions financières des donateurs traditionnels ne suffiront tout simplement pas. D’aucuns suggèrent, a noté le représentant, la possibilité de créer un « super-Fonds central pour les interventions » dans les urgences de niveau 3, à savoir un fond commun basé sur des quotes-parts, ce qui ressemble à ce qui se fait pour les missions de maintien de la paix. Mais, a prévenu le représentant, la création de nouvelles quotes-parts requiert d’autres discussions entre acteurs humanitaires. Ce n’est donc pas un outil qui peut être utilisé immédiatement pour les crises auxquelles le monde fait face aujourd’hui.
Nous devons, a estimé le représentant, non seulement discuté du financement des besoins humanitaires mais aussi de la manière dont on peut s’attaquer à ces besoins. Il s’est dit convaincu de l’« importance essentielle » d’une plus grande coordination entre une variété d’acteurs dont les gouvernements, les donateurs, les organisations internationales et les ONG. Il a souligné l’importance du mécanisme de coordination dirigé par l’OCHA et a estimé que le Sommet humanitaire de 2016 à Istanbul est une grande occasion de réunir les acteurs humanitaires pour discuter des divers défis. De son côté, le Japon a accueilli un processus régional de consultations pour l’Asie du Nord et de l’Est et accueillera, en mars 2015, la troisième Conférence des Nations Unies sur la réduction des risques de catastrophes, au cours de laquelle il entend partager les bonnes pratiques et les enseignements tirés du grand tremblement de terre de mars 2011, y compris le concept « reconstruire en mieux ».
Mme MAY-ELIN STENER (Norvège) a dit que le monde avait besoin d’un système humanitaire mieux adapté. Elle a rappelé que le droit international humanitaire déterminait des obligations claires pour les parties aux conflits armés s’agissant de la protection de la population civile. Pourtant la vaste majorité des victimes des conflits armés sont des civils, a-t-elle constaté.
La Norvège reconnaît qu’il appartient aux États de faire en sorte que les besoins de ses ressortissants affectés soient satisfaits. Toutefois, si les États ne peuvent pas, ou ne veulent pas répondre aux besoins humanitaires et fournir une protection, les acteurs humanitaires doivent être en mesure de le faire. Cela veut dire que, pour sauver des vies et atténuer les souffrances humaines, les États et les parties aux conflits doivent permettre un accès rapide et sans entraves aux populations affectées. « Un tel accès ne peut pas être arbitrairement refusé », a ajouté la représentante.
Mme Stener s’est dite particulièrement préoccupée par l’usage d’armes explosives dans les zones peuplées, et par les attaques dirigées contre les écoles et les écoliers. Il faut faire plus pour garantir l’éducation des enfants dans les conflits, car l’absence d’éducation a des effets immédiats et à long terme. À ce sujet, elle a espéré que les directives pour protéger les écoles et les universités contre leur utilisation militaire pendant les conflits armés s’avèreront efficaces.
Enfin, les établissements médicaux et le personnel soignant sont de moins en moins protégés dans les crises et les conflits. Ils sont mêmes souvent directement attaqués, a déploré la représentante, alors que l’obligation de protéger les missions médicales dans les conflits armés est stipulée dans le droit international humanitaire.
M. Y. HALIT ÇEVIK (Turquie) a indiqué que les préparatifs du premier Sommet mondial sur l’action humanitaire qui doit se tenir en Turquie en 2016 étaient bien avancés. Ce Sommet devrait permettre à toutes les parties prenantes, dont les États, d’échanger les meilleures pratiques et d’élargir leurs partenariats dans le champ humanitaire en vue de renforcer l’efficacité de l’aide. S’agissant de la crise syrienne, qui est entrée dans sa quatrième année, le délégué a indiqué que son pays continuerait de fournir l’assistance nécessaire au peuple syrien en étroite coopération avec les agences de l’ONU. « La communauté internationale doit intensifier son soutien afin de répondre aux besoins des Syriens et de renforcer la résilience des communautés soumises à des pressions considérables ». Le délégué de la Turquie a aussi affirmé que les déclarations du délégué syrien aujourd’hui n’étaient que pures allégations dénuées de tout fondement.
Il a indiqué que depuis le début de la crise, le Gouvernement turc a consacré 4,5 milliards de dollars de son budget afin de prêter assistance aux Syriens en Turquie. « Nous poursuivons également nos efforts pour répondre aux autres urgences humanitaires, y compris en République centrafricaine, en Iraq, au Myanmar, en Somalie et en Ukraine », a-t-il dit, ajoutant qu’en 2013, la Turquie était devenue le troisième plus grand donateur gouvernemental. Enfin, il a indiqué que son pays avait contribué à hauteur de 2,25 millions de dollars au Fonds central pour les interventions d’urgence.
M. OLIVIER ZEHNDER (Suisse) a regretté qu’en raison de l’intransigeance de certains États, il soit toujours impossible de progresser au plan normatif sur des questions humanitaires centrales telles que l’accès ou la redevabilité aux populations affectées. « Le système humanitaire n’a jamais autant été mis au défi et cependant nous sommes incapables de répondre à un impératif humanitaire primordial qui consiste précisément à rendre des comptes à tous ceux à qui nous entendons porter assistance », a-t-il ajouté.
Tout d’abord, le représentant a constaté avec préoccupation que le taux de financement des appels humanitaires ne faisait que diminuer alors que les besoins se faisaient toujours plus grands. « L’efficacité de l’aide humanitaire pâtit de cette situation », a-t-il estimé. La réduction de cet écart passe selon lui par une meilleure prévention des risques, le développement de nouveaux partenariats et une meilleure collaboration entre acteurs du développement et acteurs humanitaires.
Ensuite, sur la question de la protection et de l’accès aux bénéficiaires, il a rappelé qu’un accès rapide et sans entrave aux populations civiles dans le besoin devait être assuré par toutes les parties au conflit. La Suisse a publié récemment deux manuels visant à améliorer les capacités des organisations humanitaires à obtenir l’accès aux populations affectées. En outre, les principes universels d’humanité, d’impartialité, de neutralité et d’indépendance doivent être au cœur de toute action humanitaire.
S’agissant de la gestion des risques et de la réduction des vulnérabilités, M. Zehnder a observé que la fréquence des catastrophes ne cessait d’augmenter. Elles sont exacerbées par des facteurs tels que les changements climatiques, l’augmentation de la population, l’urbanisation non planifiée, l’insécurité alimentaire ou liée à l’eau. « Le système de réponse humanitaire international est poussé au-delà de ses capacités et ne peut désormais plus faire face aux besoins urgents de millions de personnes vulnérables », s’est-il inquiété. Il a jugé urgent de passer d’une approche de gestion des crises à une approche de gestion des risques. « La prévention paie », a-t-il insisté. L’accent doit être mis sur la réduction des vulnérabilités et le renforcement de la capacité de résilience des communautés.
Enfin, M. Zehnder a souhaité qu’un dialogue substantiel sur les thèmes du Sommet humanitaire de 2016 puisse avoir lieu plus régulièrement. La Suisse sera l’hôte de la consultation globale en octobre 2015.
M. OSCAR LEÓN GONZÁLEZ (Cuba) a voulu que l’on redouble d’efforts pour aider le peuple palestinien à recouvrer sa liberté et pour assister les réfugiés palestiniens ainsi que les victimes de la dernière guerre de Gaza. Cuba exige la fin immédiate de l’occupation israélienne et du blocus de Gaza, a dit le représentant, en demandant l’ouverture des points de passage. Il a rappelé que 55% des habitants de Gaza et 17% de ceux de la Cisjordanie, soit 1,5 million de personnes, souffrent d’insécurité alimentaire à cause des agissements d’Israël. Il s’est prononcé en faveur de l’imposition d’une date butoir pour la fin de l’occupation israélienne et la création de l’État de Palestine. C’est la politique israélienne qui empêche de trouver une solution juste au conflit et notamment la solution à deux États, a dénoncé le représentant.
Il a dit l’attachement de son pays aux principes de l’aide humanitaire dont le consentement préalable des États. L’aide humanitaire à la Syrie doit se faire avec la coopération du Gouvernement syrien, a-t-il insisté, pour ne pas qu’elle devienne une arme contre ledit Gouvernement. La solution définitive aux crises humanitaires passe par la fin des conflits, a-t-il conclu.
Mme ANNE CHRISTENSEN, Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, a dit qu’étant donné la fréquence et la sévérité des catastrophes liées aux changements climatiques et leurs impacts dévastateurs, il est important que les efforts d’adaptation et de réduction des risques de catastrophes soient liés. Cela requiert une intégration coordonnée et complète dans la planification de l’investissement public et privé, et dans le programme de développement et humanitaire de tous les acteurs. Cela requiert aussi de donner la priorité à la gestion des risques de catastrophe, aux stratégies des communautés concernées et à l’accroissement des efforts de sensibilisation et d’éducation du public sur les risques de catastrophes et climatiques.
La Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge travaille en partenariat avec ses 189 sociétés nationales membres et les appuie dans leur rôle d’auxiliaires auprès des autorités publiques. Dans ce contexte, la Fédération internationale travaille avec les sociétés nationales pour bâtir la résilience par le renforcement de la préparation et des capacités des communautés pour mieux répondre et se relever après les catastrophes, promouvoir des actions qui réduisent les dangers, et protéger les acquis du développement des impacts des catastrophes.
S’agissant de l’épidémie d’Ebola, la représentante a déclaré que « nous avons besoin d’éduquer les communautés, isoler et traiter les malades simultanément ». Comme Ebola est une crise mondiale complexe, nous devons travailler ensemble dans un effort coordonné, durable et croissant. Nous devons rester vigilants, persévérants et équipés pour relever de nouveaux défis.
Sur le long terme, il est important de tirer des enseignements et d’investir dans les systèmes de santé des pays concernés. Cette épidémie a affaibli des systèmes déjà faibles avec peu de ressource pour soutenir des services de santé essentiels qui devraient s’occuper d’autres maladies et pressions.
M. PHILIP SPOERRI, Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a fait remarquer que malgré les progrès, 2014 a vu un nombre record de déplacés, qui sont au nombre de 50 millions et ce pour la première fois depuis la deuxième guerre mondiale. Si le financement de l’aide humanitaire n’a cessé de croître, passant de 12,4 milliards de dollars en 2007 à 22 milliards de dollars en 2013, le fossé entre ressources et besoins a cru tout aussi rapidement, a souligné le représentant. En même temps, le manque d’accès, quelle qu’en soit la raison, fait que des millions de personnes ne reçoivent ni aide humanitaire de base ni protection. Pour inverser cette tendance, les États ont l’obligation de mieux prévenir et résoudre les conflits et d’améliorer la protection de ceux qui sont piégés par la violence. Les acteurs humanitaires n’étant concernés que par la deuxième tâche, ne peuvent que jouer un rôle subsidiaire.
Le CICR, qui a pour mandat de vérifier l’application du droit international humanitaire, estime que les États ont un rôle à jouer: ils peuvent développer de nouveaux mécanismes de mise en œuvre mais surtout faire preuve d’un engagement politique, en incorporant les règles humanitaires dans les lois nationales et en formant leurs soldats et autres personnes habilitées à exercer une quelconque forme d’autorité pendant un conflit armé.
Répondre adéquatement à la magnitude et à la complexité des besoins humanitaires générés par les conflits actuels exige une action holistique et l’implication active d’une large gamme d’acteurs, a dit, à son tour, le représentant. Le but n’est pas de faire en sorte que tous les acteurs humanitaires se comportent de la même manière mais plutôt de les laisser puiser dans leurs propres forces, conformément à leur mandat et à leur spécialité. Le CICR est convaincu que la réponse humanitaire est mieux servie quand on promeut une coordination où les acteurs opèrent côte à côte dans la complémentarité et la responsabilité collective.
Mais, a-t-il prévenu, la coordination humanitaire n’a de valeur que si elle se traduit par une protection et une assistance efficaces sur le terrain, ce qui implique que les agents humanitaires puissent avoir accès aux personnes dans les zones de conflit et communiquer avec tous les belligérants. « Malheureusement, cela devient de plus en plus difficile », a déploré le délégué.
Les agents humanitaires sont bien conscients d’opérer dans des environnements dangereux mais il est inacceptable qu’ils soient délibérément pris pour cible par ceux qui cherchent à marquer des points politiques, militaires ou économiques. Contre cela, les États peuvent aussi éviter de déplacer les lignes entre les initiatives politiques et militaires, d’une part, et l’action humanitaire, d’autre part, au risque de politiser cette action et donc d’éroder la confiance des parties au conflit et de compromettre la sûreté et l’acceptation des agents humanitaires et leur capacité d’atteindre les communautés affectées.
Pour les organisations humanitaires, a affirmé le représentant, il n’y a « pas de solution toute faite » pour gérer les risques de sécurité. Certains privilégient les escortes armées et d’autres essayent d’opérer à distance, en recourant au personnel local, aux contractants privés ou aux partenaires locaux pour mettre en œuvre leurs programmes. Le CICR, qui a fait les deux, met plutôt l’accent sur l’acceptation par les parties pour assurer la sécurité de son personnel.
À cet égard, le représentant a salué le recours aux Sociétés nationales de la Croix-Rouge, compte tenu de leur capacité opérationnelle unique et de leurs connaissances des circonstances locales. L’ONU les sollicite de plus en plus dans les endroits où elle n’est pas acceptée et où sa sécurité est en danger. Mais, a prévenu le représentant, il faut faire en sorte que ces Sociétés ne soient pas perçues comme opérant sous l’autorité des agences onusiennes.
L’accès humanitaire est une vraie question, a admis le représentant car certains gouvernements voient l’action humanitaire comme une menace à leur souveraineté, malgré le fait que le droit humanitaire veille à l’équilibre entre les préoccupations en matière de souveraineté et les impératifs de l’aide humanitaire. De leur côté, les acteurs non étatiques suspectent les agences humanitaires d’avoir un agenda politique ou militaire. En conséquence, le Sommet du Japon ne doit pas seulement se concentrer sur les questions techniques et périphériques mais aussi sur les facteurs principaux de l’érosion de l’entreprise humanitaire, a conclu le représentant.
Droits de réponse
Le représentant d’Israël est revenu sur la longueur et le ton « ironique » de l’intervention de l’Observateur permanent de la Palestine hier. Il s’est étonné que celui-ci ne se livre à aucune autocritique, « comme si les Palestiniens, et l’Autorité palestinienne au premier chef, n’étaient responsables de rien ». Il a affirmé que la reconstruction de Gaza n’était pas une priorité de M. Mahmoud Abbas « qui n’a même pas foulé le sol de Gaza depuis la fin des combats ». Le délégué a argué que c’est son pays qui avait permis l’acheminement de milliers de tonnes de matériaux de construction et de ciment pour la reconstruction de Gaza.
« Les Palestiniens monopolisent le temps de cette Assemblée pour se plaindre de leurs difficultés financières », alors, a-t-il aussi argué, que 4% du budget de l’Autorité palestinienne va à des éléments terroristes détenus dans les prisons israéliennes. « Cela équivaut à dire que plus vous assassinez, plus nous payons », a-t-il poursuivi. Il a invité l’Autorité à plutôt honorer la dette de 430 millions de dollars à la compagnie israélienne d’électricité, sans oublier de revenir sur les scandales financiers qui ont éclaboussé certains responsables du Fatah. Le représentant s’est donc dit surpris de la bienveillance systématique de la communauté internationale à l’égard de la direction palestinienne. « Il est temps que les responsables palestiniens assument leurs responsabilités », a-t-il tranché, ajoutant que son pays était prêt à des pourparlers directs avec les Palestiniens afin de parvenir à la paix.
Le représentant de la Fédération de Russie a répondu aux « jugements politisés » du représentant de l’Ukraine qui a employé le terme « illégal » pour qualifier les convois humanitaires envoyés par son pays dans le Donbass. Il a assuré que, depuis le début, la Fédération de Russie a affiché son ouverture, informé les autorités ukrainiennes de l’envoi de ces convois et permis aux gardes-frontière de les inspecter.
Son homologue de la Syrie a rappelé au représentant de la Turquie que le Gouvernement turc avait bien refusé de permettre aux convois humanitaires de traverser la frontière. « Des terroristes sont formés sur le territoire turc », a-t-il martelé. Quelque 14 000 combattants du Caucase et d’autres pays ont transité par la Turquie et en juin dernier, la Turquie a autorisé l’entrée de 47 tonnes d’armes pour le mouvement terroriste DAECH.
LES DIAMANTS, FACTEUR DE CONFLIT
Rapport sur le Système de certification du Processus de Kimberley pour 2014 (A/69/622)
Le rapport est présenté par la Chine, présidente en 2014 du Processus de Kimberley qui a pour objectif de briser le lien entre commerce de diamants et conflits armés. À ce jour, presque tous les pays qui produisent ou transforment des diamants ou qui en font le commerce participent au Processus. Grâce à l’efficacité du Système de certification établi en 2003, la situation en matière de sécurité s’est considérablement améliorée dans plusieurs pays producteurs de diamants.
Parmi les faits nouveaux, il faut retenir la décision administrative en vue de veiller à ce que les diamants de la République centrafricaine n’entrent pas dans le commerce licite et le fait que la présidence a annoncé la reprise du commerce de diamants bruts provenant de Côte d’Ivoire. En outre, le Venezuela a fait part de sa volonté de participer pleinement à nouveau au Processus et de reprendre le commerce de diamants bruts.
L’Angola succédera à la Chine à la présidence du Processus, à compter du 1er janvier 2015. Les Émirats arabes unis et l’Australie se sont proposés pour assurer la vice-présidence. Toutefois, aucun consensus n’a été trouvé sur la question de savoir lequel de ces deux pays devrait exercer la vice-présidence. Les consultations se poursuivent.
Déclarations
M. THOMAS MAYR-HARTING, Union européenne, a souligné que la crédibilité du Système de certification dépendait de sa mise en œuvre efficace par les participants. En tant que Président du Groupe de travail sur le suivi, l’Union européenne a contribué activement au renforcement du Processus de Kimberley et encouragé les participants à se soumettre à l’examen critique de leurs pairs et à produire des rapports annuels substantiels. Le représentant a salué la décision d’examiner les recommandations pertinentes du Groupe d’action financière (GAFI) sur les risques inhérents à la filière d’approvisionnement des diamants.
Il s’est félicité des efforts entrepris s’agissant de la République centrafricaine (RCA), pour contrôler la situation et fournir une assistance technique aux pays voisins pour les aider à repérer les diamants d’origine illicite. Il a aussi salué les progrès s’agissant de la Côte d’Ivoire. Il a également salué l’engagement continu du Processus au Libéria de même que l’initiative des participants de la région du fleuve Mano visant à renforcer leur coopération. Toutefois, il a fretté le fait que le Libéria, la Sierra Leone et la Guinée n’aient pas été en mesure d’envoyer des délégués à la réunion plénière du Processus à cause de la crise d’Ebola. Le Processus s’efforce néanmoins de fournir une assistance technique aux communautés minières affectées par l’épidémie.
Le délégué a appuyé le cadre pour la mise en œuvre de la Déclaration de Washington sur l’intégration de l’exploitation artisanale des mines de diamants dans le Processus de Kimberley et a conclu en rappelant la structure tripartite unique du Processus qui implique l’industrie et la société civile.
M. DAVID YITSHAK ROET (Israël) a affirmé que grâce à l’engagement international accompagné avec une action globale, 99% des diamants vendus aujourd’hui sont certifiés propres. Cette réalisation montre que les pays peuvent faire mieux en faisant ce qui est bien. Cela signifie aussi que nous pouvons multiplier notre succès dans le pétrole, le café et d’autres ressources minérales industrielles.
Le représentant a ensuite salué la Côte d’Ivoire pour avoir mis en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité et repris le commerce international de ses diamants bruts. Il a aussi reconnu le progrès fait par la République centrafricaine en s’attaquant aux violations du Système de certification. Il a encouragé la coopération avec l’Union africaine et les institutions des Nations Unies au moment où la République centrafricaine renforce son système de contrôle interne.
Après avoir réaffirmé l’importance de la nature tripartite du Processus, le représentant a dit que la société civile doit être pleinement impliquée. Le Processus de Kimberley doit raffermir la collaboration avec l’association de l’industrie du diamant, les organisations internationales et les forces de l’ordre. Toutes les parties prenantes bénéficieront de l’échange d’informations, a estimé le représentant.
M. DMITRY I. MAKSIMYCHEV (Fédération de Russie) a indiqué que son pays participe activement au Processus de Kimberley depuis 2000. Il s’est dit favorable au renforcement du cadre juridique du Processus et a également préconisé le renforcement du contrôle intérieur des mouvements de diamants bruts, des centres de commerce, de la transparence et des statistiques du Processus.
Le représentant a jugé « inacceptable de politiser le Processus de Kimberley et de changer radicalement ses pratiques de travail en introduisant des questions de défense des droits de l’homme qui n’entrent pas dans son mandat ». De même, il est contreproductif d’inclure des questions liées au Processus dans d’autres instances internationales comme l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Il faut régler de façon constructive les questions liées aux diamants bruts dans le cadre du Système de Kimberley, a-t-il tranché.
M. NKOLOI NKOLOI (Botswana) a reconnu que dans de nombreuses parties du monde, les diamants du sang avaient été utilisés pour attiser les conflits, sapant l’état de droit et déstabilisant les gouvernements. Nous sommes disposés à partager les enseignements tirés de l’expérience et les meilleures pratiques avec les producteurs et les fabricants qui le souhaitent, a-t-il dit. Le représentant s’est dit ravi du retour de la Côte d’Ivoire dans la famille du Processus de Kimberley. En revanche, il s’est préoccupé par la poursuite du conflit en République centrafricaine. Il s’est dit inquiet de l’impact socioéconomique du conflit et de l’instabilité et l’insécurité entretenues par les milices. Il a déploré le fait que des milliers de femmes et d’enfants soient déplacés et que l’accès à l’éducation et à la santé soit devenu un défi. Il a reconnu les efforts des dirigeants centrafricains pour mettre fin au conflit et travailler à la normalisation, y compris pour le commerce des diamants bruts. Il a dit apprécier l’ouverture et la sincérité avec lesquelles le Gouvernement travaille dans le cadre du Processus de Kimberley.
Mme CAROL HAMILTON (États-Unis) a apporté le soutien indéfectible de son pays au Processus de Kimberley, qui joue un rôle crucial pour que les diamants ne contribuent pas au conflit. Elle a plaidé pour une interaction accrue avec la société civile, l’industrie du diamant et le Conseil mondial du diamant. Elle a souhaité voir l’élargissement de la définition de la notion de « conflit », auquel les diamants peuvent contribuer.
M. PETER SCOTT (Australie) a estimé que le Processus de Kimberley avait remporté de grandes victoires. En tant que membre du Conseil de sécurité, l’Australie a appuyé l’attachement du Conseil à un Processus qui a amélioré la transparence du commerce des diamants, grâce à ses statistiques. L’Australie, qui est le sixième producteur mondial de diamants en termes de volume et de qualité, a aidé les autres pays à exploiter leurs ressources naturelles et défendu la mise en valeur des minerais africains, y compris la production artisanale.
Le représentant a considéré que le Processus devait continuer de créer des opportunités pour partager les pratiques exemplaires, notamment en Afrique de l’Ouest. Il a constaté un grand enthousiasme vis-à-vis des formations organisées par l’Australie. Il a appuyé l’accent mis par l’Angola, qui préside le Processus, sur la mise en œuvre des Déclarations de Moscou et de Washington et sur les principes volontaires de sécurité et de droits de l’homme. La société civile est essentielle à la légitimité internationale du Processus, a-t-il ajouté, avant d’estimer que le système d’alerte précoce est important dans une industrie qui attache une grande importance à la réputation de ses produits. Les diamants doivent être « source de richesse et de progrès », a-t-il conclu.
SUIVI DE LA DEUXIÈME CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS EN DÉVELOPPEMENT SANS LITTORAL
Déclarations
Mme THERESAH CHIPULU LUSWILI CHANDA (Zambie), Présidente du Bureau du Groupe des pays en développement sans littoral, a indiqué que l’adoption du Programme d’action pour la Décennie 2014-2024 était la preuve que les besoins des pays en développement sans littoral étaient désormais pleinement reconnus. Ce Programme d’action est basé sur le fait que nos pays continuent de faire face à des coûts de transport très élevés, par rapport aux pays voisins qui ont un accès à la mer. Elle a mentionné les six domaines d’actions clefs identifiés par le Programme, à savoir les questions fondamentales de politique en matière de transit, le développement et l’entretien de l’infrastructure, le commerce international et sa facilitation, l’intégration et la coopération régionales, la transformation structurelle de l’économie et les moyens de mise en œuvre.
Elle s’est dite consciente que la communauté internationale était engagée dans des processus parallèles et complémentaires mais elle a souhaité que les priorités des pays en développement sans littoral soient dûment reflétées dans le programme de développement pour l’après-2015. Le succès de ce Programme d’action dépendra de la vigueur des partenariats que ces pays ont déjà forgés et continueront de forger à l’avenir.
Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a rappelé l’importance qu’il y a à mettre effectivement en œuvre les engagements pris dans le Programme d’action. Il a demandé aux partenaires de développement d’intégrer le Programme dans leur politique de coopération et de fournir l’appui technique et financier demandé. Dans « un esprit de solidarité », les pays en développement sont aussi engagés à agir dans le cadre de la coopération Sud-Sud, qui complète la coopération Nord-Sud, sans toutefois s’y substituer, a souligné le représentant.
M. AMERICO BEVIGLIA ZAMPETTI, Union européenne, s’est dit heureux de se rallier au consensus sur le Programme d’action et a exprimé la détermination de l’Union à soutenir les pays en développement sans littoral dans des domaines politiques clefs et à les aider à lever les graves obstacles à leur développement durable. Il faudra donc concentrer les efforts sur les six domaines d’action prioritaires, a dit le représentant, en se félicitant, en particulier, de la participation du secteur privé à la Conférence de Vienne. La contribution de ce secteur sera fondamentale tout comme la création d’un environnement favorable aux investissements et le renforcement d’une croissance inclusive et durable.
Mme SEWA LAMSAL ADHIKARI (Népal) a souligné que les pays en développement sans littoral sont l’un des groupes les plus vulnérables aux conséquences des changements climatiques et autres crises. Le manque d’accès direct à la mer, l’éloignement des grands marchés internationaux et l’insuffisance des infrastructures de transport constituent des obstacles majeurs. Il est impératif de répondre aux besoins de ces pays par des mesures ciblées, a ajouté la représentante. Ces besoins devraient être jugés prioritaires dans l’élaboration du programme de développement pour l’après-2015, a insisté la représentante.
M. ENRIQUE JOSÉ MARÍA CARRILLO GÓMEZ (Paraguay) a indiqué que son pays bénéficiera grandement de l’assouplissement des normes encadrant le trafic aérien. L’alliance entre les pays sans littoral, les pays de transit et les autres partenaires sera renforcée par la mise en œuvre du Programme d’action de Vienne, a-t-il dit. Il a aussi rappelé que les relations entre pays sans littoral et pays de transit étaient bénéfiques aux deux parties. Il s’est félicité de ce que les spécificités des pays en développement sans littoral soient pleinement reconnues. « Nous devrions également bénéficier d’un traitement préférentiel au sein du système commercial international », a-t-il estimé.
Mme FORTUNA DIBACO CIZARE (Éthiopie) a souligné que le Programme d’action vise notamment à gommer les difficultés observées dans la mise en œuvre du Programme d’action d’Almaty. Le Programme d’action de Vienne a prévu plus d’intégration, une transformation structurelle de l’économie, l’atténuation de l’impact négatif de l’isolement, et des mesures pour faire face aux chocs extérieurs. Vienne, a-t-il poursuivi, a produit un Programme d’action dynamique comprenant une feuille de route dotée d’objectifs précis. Maintenant, la question est de savoir comment il sera mis en œuvre. À cet effet, la représentante a réclamé un partenariat plus fort dans le domaine des technologies. Elle a d’ailleurs demandé à ce que le Programme d’action de Vienne soit pris en compte dans le document final de la prochaine Conférence sur le financement de développement que son pays accueillera en juillet 2015 et dans le programme de développement pour l’après-2015.
M. KARMA CHOEDA (Bhoutan) a estimé que le Programme d’action de Vienne constituait une vision renouvelée et une feuille de route apte à répondre aux besoins spécifiques des pays en développement sans littoral. Il s’agit d’un programme holistique et plus complet, qui permettra notamment à ces pays de libérer leur potentiel de croissance économique. Le représentant a également affirmé que la mise en œuvre de ce Programme permettra de faciliter la réalisation des objectifs nationaux de développement et a jugé indispensable, pour la bonne mise en œuvre du Programme, de mobiliser le plus grand nombre de partenariats possible, notamment avec l’ONU, le secteur privé et les pays voisins des pays en développement sans littoral.
M. KHIANE PHANSOURIVONG (République populaire démocratique lao) a indiqué que l’adoption du Programme d’action a été le fruit de longs mois de travail de la part des États Membres et de leurs partenaires, ce qui montre bien la volonté affichée par tous d’aider les pays en développement sans littoral. « La tâche qui nous incombe maintenant est claire: nous devons mettre en œuvre ce Programme pour aider ces pays à surmonter les difficultés liées à leur statut particulier », a-t-il résumé.
M. NOBORU SEKIGUCHI (Japon) a affirmé que son pays est toujours prêt à appuyer les pays en développement sans littoral y compris dans la mise en œuvre du Programme d’action. Le Japon est un vieux partenaire de ces pays pour lesquels il a mis en place un guichet unique à la frontière, a rappelé le représentant. Il a ajouté que les priorités du Programme d’action sont des domaines dans lesquels le Japon a acquis une longue expertise. Il a insisté sur l’importance des infrastructures, jugeant que le Programme d’action augure d’un avenir brillant pour les pays en développement sans littoral. Le Japon est prêt à les aider à renforcer leur croissance économique, a promis le représentant.
M. TLEUZHAN S. SEKSENBAY (Kazakhstan) a noté que tous les gouvernements des pays en développement sans littoral et leurs partenaires de transit ont exprimé leur volonté politique de tenir compte du Programme d’action, en conjonction avec d’autres plateformes et processus qui façonneront l’après-2015. Le Programme d’action sera une part importante et intégrale de ce mouvement mondial et le défi est maintenant d’intégrer et de faire la synthèse de ces actions dans le courant interconnecté du développement et d’« Unis dans l’action ». La Conférence de suivi qui se tiendra en Zambie, l’année prochaine, sera l’occasion de réfléchir à la manière d’évaluer et de surveiller la mise en œuvre du Programme d’action et de proposer les outils et les mécanismes qu’il faut. Il s’agira aussi, a poursuivi le représentant, de voir à quel point des partenariats ont été forgés, y compris avec le secteur privé et les autres institutions multilatérales.
De son côté, le Kazakhstan a déjà adopté « Nurly Zhol », une feuille de route pour surmonter les obstacles géographiques propres aux pays sans littoral. C’est une approche bien conçue pour chaque aspect du développement national, un développement centré sur l’homme et fondé sur les principes de l’ONU. Le Kazakhstan serait heureux de partager les enseignements qu’il a tirés de son expérience et de profiter de ceux des autres pays en développement sans littoral. L’appui des partenaires au développement est crucial, a ajouté le représentant, en appelant à « la solidarité mondiale ».