Lutte contre le trafic de drogues en Afrique de l’Ouest: le Conseil appelle à une action coordonnée pour renforcer l’application des initiatives régionales
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Conseil de sécurité
7090e séance – matin
LUTTE CONTRE LE TRAFIC DE DROGUES EN AFRIQUE DE L’OUEST: LE CONSEIL APPELLE À UNE
ACTION COORDONNÉE POUR RENFORCER L’APPLICATION DES INITIATIVES RÉGIONALES
Le Conseil de sécurité s’est déclaré, ce matin, de plus en plus préoccupé par les graves menaces que font peser le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée sur la paix internationale et la stabilité en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel. Dans une déclaration présidentielle faisant référence à la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, il a souligné que ces fléaux remettaient en cause l’autorité des États, leur sécurité et leur stabilité, la bonne gouvernance, le développement économique et social, ainsi que l’état de droit.
Lors d’une séance publique consacrée à la paix et la sécurité en Afrique, les délégations ont tenté d’apporter des réponses aux questions soulevées par la présidence française du Conseil.
La mobilisation accrue de la communauté internationale, le soutien aux pays de la région, l’adoption de mesures concrètes et le rôle du Conseil de sécurité dans la lutte contre le trafic de drogues, telles étaient les pistes de réflexion proposées par la France et auxquelles les délégations ont contribué en s’appuyant sur les déclarations du Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon; du Directeur exécutif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), M. Yuri Fedotov; et du Représentant spécial et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest, M. Saïd Djinnit.
La valeur marchande de la cocaïne qui transite, chaque année, par l’Afrique de l’Ouest, est estimée à 1,25 milliard de dollars, soulignant ainsi l’ampleur de ce fléau, ont fait remarquer le Secrétaire général et le Directeur exécutif de l’ONUDC. « La région, qui compte plus d’un million d’utilisateurs de drogues illicites, n’est plus seulement une route de transit mais c’est aussi une destination finale », s’est alarmé M. Ban, qui a constaté que l’augmentation de la consommation aggravait davantage la situation actuelle des pays de la région en matière de santé publique et menaçait le développement économique et social en Afrique de l’Ouest. « Trente-trois tonnes de cocaïne ont transité par l’Afrique de l’Ouest en 2010, dont 18 tonnes à destination de l’Europe. » « À ce fléau s’ajoutent le trafic de migrants et la traite des personnes, le trafic d’armes à feu, de cigarettes et d’essence, ainsi que la piraterie dans le golfe de Guinée », a pour sa part relevé avec gravité M. Fedotov.
Les deux responsables onusiens, qui ont reconnu que les pays de la région étaient pleinement conscients des risques que représentaient ces fléaux, ont prôné une réponse coordonnée de la communauté internationale, en réaffirmant que la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel était l’instrument de choix pour guider efficacement l’action des pays. M. Ban a ainsi plaidé pour une approche pragmatique, intégrée et cohérente, « ancrée dans le développement à long terme et respectueuse des droits de l’homme ». « La problématique de la criminalité transnationale organisée doit être discutée de manière approfondie dans le cadre de l’élaboration du programme de développement des Nations Unies pour l’après-2015 », a-t-il estimé. M. Fedotov a, quant à lui, rappelé la pertinence des initiatives en cours, à savoir le Plan d’action de l’Union africaine, la Déclaration politique et le Plan d’action régional de la CEDEAO visant à lutter contre le trafic de drogues, la criminalité transnationale organisée et la toxicomanie en Afrique de l’Ouest.
M. Djinnit a noté avec satisfaction que le Plan d’action de la CEDEAO, qui a été adopté en 2008, avait été étendu jusqu’à la fin 2014. « Le défi que représente le trafic de drogues fait l’objet du second pilier de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel », a-t-il rappelé. La récente visite dans la région du Secrétaire général et de hauts responsables de l’Union africaine, de la Banque mondiale, de l’Union européenne et de la Banque africaine de développement, s’est-il félicité, a donné un coup d’accélérateur à la mise en œuvre de la Stratégie intégrée. « Mon Bureau continuera d’appuyer les initiatives régionales et d’attirer l’attention des dirigeants de la région sur les menaces posées par le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée », a assuré M. Djinnit.
Dans la déclaration présidentielle, les membres du Conseil de sécurité se félicitent des initiatives régionales évoquées par MM. Ban, Fedotov et Djinnit. Commentant ce point, le représentant de la France a assuré que son gouvernement s’était engagé à répondre à la demande d’appui des États de l’Afrique de l’Ouest et qu’il se faisait fort de porter ces thèmes à l’attention de l’Union européenne, en proposant notamment, comme mesure concrète pour faciliter les opérations d’interception maritime, l’adoption d’une stratégie de sûreté. « Celle-ci pourrait se décliner dans le golfe de Guinée, afin de faire face aux menaces transversales qui affectent cette zone maritime », a précisé l’Ambassadeur Gérard Araud.
S’agissant du rôle du Conseil de sécurité, les délégations ont appuyé la demande exprimée dans la déclaration présidentielle que ses membres soient informés de façon plus régulière des activités de l’Équipe spéciale sur la criminalité transnationale organisée et le trafic de drogues, qui est coprésidée par l’ONUDC et le Département des affaires politiques. « Le Conseil doit être mieux informé par l’ONUDC des menaces, notamment lorsqu’il étudie les mandats d’opérations de maintien de la paix et de missions politiques spéciales », a également souligné M. Araud.
Nombre de délégations ont par ailleurs appelé à l’universalisation des conventions et autres instruments internationaux pertinents et ont insisté sur l’importance de s’attaquer aux causes sous-jacentes du trafic de drogues et de la criminalité transnationale organisée, en particulier celles entraînant la marginalisation de la jeunesse. Faisant écho à la déclaration présidentielle, qui encourage des comportements sains chez l’individu et au sein des communautés, le Secrétaire général a résumé l’objectif commun: « Libérer les citoyens du fardeau du crime mais également des conditions propices à l’éclosion du crime ». « Cela signifie que les moyens mobilisés doivent s’attaquer à la corruption, à la pauvreté et au manque de services essentiels », a déclaré M. Ban.
Avant de lever la séance, l’Ambassadeur Araud, en sa qualité de Président du Conseil de sécurité, a tenu à remercier « du fond du cœur » les cinq membres sortant du Conseil de sécurité -l’Azerbaïdjan, le Guatemala, le Maroc, le Pakistan et le Togo- pour le travail remarquable qu’ils ont accompli au cours de leur mandat de ces deux dernières années.
PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE
La lutte contre le trafic de drogues au Sahel et en Afrique de l’Ouest
Lettre datée du 5 décembre 2013, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent de la France auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2013/728)
Déclaration présidentielle
Le Conseil de sécurité réaffirme qu’il tient de la Charte des Nations Unies la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales.
Le Conseil se déclare de plus en plus préoccupé par les graves menaces que font peser le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée sur la paix internationale et la stabilité en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel comme indiqué par la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. Il souligne que le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée, en particulier dans le Sahel et en Afrique de l’Ouest, viennent remettre en cause l’autorité des États, leur sécurité et leur stabilité, la bonne gouvernance, le développement social et économique ainsi que l’état de droit.
Le Conseil se déclare également très inquiet de la proximité de plus en plus étroite, à certains égards, entre le trafic de drogues et d’autres formes de criminalité transnationale organisée dans la région, notamment le trafic d’armes et d’êtres humains, et le terrorisme, ainsi que de la violence croissante résultant des activités des organisations criminelles qui s’y livrent au trafic de drogues. Le Conseil souligne qu’il importe de renforcer la coopération et la coordination interrégionales afin de mettre au point des stratégies non sélectives et efficaces pour combattre de manière globale et intégrée la criminalité transnationale organisée, y compris le trafic d’armes et de drogue, et les activités des groupes terroristes.
Le Conseil prend note avec satisfaction du rapport établi par le Secrétaire général (S/2013/359), accueille favorablement les recommandations qui y sont formulées en application de la déclaration présidentielle 2012/2 en vue de combattre la criminalité transnationale organisée et le trafic de drogues en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel et constate avec préoccupation que le trafic de cocaïne, de cannabis et d’héroïne continue de sévir dans la région, que la consommation locale de stupéfiants est en augmentation et que la production de drogues de synthèse commence à s’y développer.
Le Conseil réaffirme son ferme attachement à la souveraineté, à l’intégrité territoriale, à l’indépendance politique et à l’unité des pays de la région.
Le Conseil se félicite des initiatives et des mesures prises par les États de la région pour lutter contre la menace que représente le trafic de drogues, notamment l’élargissement du Plan d’action de l’Union africaine sur la lutte contre la drogue (2013-2018) et du Plan d’action régional de la CEDEAO visant à lutter contre les problèmes de plus en plus graves du trafic de drogues, de la criminalité organisée et de la toxicomanie en Afrique de l’Ouest (2008-2015), ainsi que de la mise en œuvre du Programme régional pour l’Afrique de l’Ouest exécuté par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), et souligne que les États sont responsables au premier chef de la lutte contre le trafic de drogues. Il se dit satisfait du renforcement de la coopération entre la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, la Communauté économique des États d’Afrique centrale et la Commission du golfe de Guinée, telle que définie dans la Déclaration de Yaoundé sur la sûreté et la sécurité dans le golfe de Guinée, adoptée en juin 2013, en application de sa résolution 2039 (2012). Il accueille également avec satisfaction les initiatives tendant à améliorer la sécurité et la police des frontières dans les régions de l’Afrique du Nord et sahélo-saharienne, grâce à l’adoption du Plan d’action sur la sécurité des frontières lors de la première conférence ministérielle régionale, tenue à Tripoli, en mars 2012, ainsi que la création d’un centre de formation régional pour renforcer la sécurité aux frontières, pendant la deuxième conférence ministérielle régionale, organisée à Rabat, en novembre 2013, et d’autres initiatives sous-régionales soutenues par l’Organisation des Nations Unies.
Le Conseil invite les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier ou appliquer les conventions internationales en la matière, dont la Convention unique sur les stupéfiants de 1961 telle que modifiée par le Protocole de 1972, la Convention de 1971 sur les substances psychotropes, la Convention des Nations Unies de 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, la Convention des Nations Unies de 2000 contre la criminalité transnationale organisée et ses protocoles, et la Convention des Nations Unies de 2003 contre la corruption.
Le Conseil rappelle la Déclaration politique et le Plan d’action sur la coopération internationale en vue d’une stratégie intégrée et équilibrée de lutte contre le problème mondial de la drogue, et affirme à nouveau que la lutte contre le trafic de drogues doit être menée en parfaite conformité avec les buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies ainsi que les dispositions du droit international et de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Le Conseil insiste sur l’importance qu’il y a à renforcer la coopération transrégionale et internationale sur la base d’une responsabilité conjointe et solidaire afin de lutter contre le problème mondial de la drogue et les activités criminelles qui y sont liées et souligne que cela exige une démarche intégrée, pluridisciplinaire et équilibrée.
Le Conseil approuve la décision prise par les États de la région d’harmoniser leurs cadres juridiques nationaux et institutionnels de surveillance maritime et d’arrêter des procédures maritimes opérationnelles communes. Il se félicite aussi de la création de centres régionaux et interrégionaux d’échange d’informations et de coordination sur la façade atlantique, afin de faciliter les interceptions en mer. Il souligne la nécessité de renforcer la coopération transnationale entre les organes de répression, notamment en incorporant la sécurité maritime dans les réformes du secteur de la sécurité et en adoptant des accords bilatéraux et régionaux pour aider, dans le respect du droit international, à prendre des mesures pour lutter contre le trafic de drogues en mer et poursuivre les personnes présumées coupables d’un tel trafic, appréhendées à la suite d’opérations d’interception en haute mer. Il compte sur le soutien continu de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et des autres organisations internationales et régionales. À cet égard, il salue la contribution apportée par l’Union européenne et les États Membres, et demande que l’appui international aux mesures prises aux niveaux régional et national soit renforcé pour permettre d’améliorer la sécurité et la surveillance maritimes contre le trafic de drogues dans cette région. Le Conseil est également favorable à un soutien accru au Programme mondial de contrôle des conteneurs lancé conjointement par l’ONUDC et l’Organisation mondiale des douanes pour améliorer l’efficacité de la police en mer et dans les ports secs.
Tout en réaffirmant que la sécurisation des frontières est la prérogative souveraine des États Membres, le Conseil invite tous les États Membres de l’Afrique de l’Ouest et de la région du Sahel à renforcer la gestion de leurs frontières de manière à juguler les menaces transnationales, comme le trafic de drogues. À cette fin, il encourage les États Membres et les organisations compétentes, s’il y a lieu, à intensifier la coopération et l’élaboration de stratégies pour lutter contre le trafic de drogues transfrontière et à aider les États Membres de la région qui en font la demande à se donner les moyens de sécuriser leurs frontières contre le trafic, notamment en améliorant les systèmes nationaux et régionaux de collecte, d’analyse et de communication de renseignements criminels. Il encourage à entreprendre de nouvelles activités en faisant fond sur les conclusions de la Conférence des Nations Unies sur la coopération en matière de contrôle aux frontières dans le Sahel et au Maghreb, qui s’est tenue à Rabat. Il salue les initiatives prises par les pays de la région pour rouvrir des postes de police des frontières à des endroits clefs et effectuer des patrouilles conjointes. Il salue également les activités de renforcement des capacités menées au Niger et en Libye par l’Union européenne et l’invite à continuer de prêter son concours à cette entreprise.
Le Conseil se déclare préoccupé par les informations selon lesquelles le trafic de drogues emprunte de plus en plus la voie aérienne et se déclare favorable à ce qu’un appui soit apporté au Programme de communication aéroportuaire sous la direction de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, de l’Organisation mondiale des douanes et d’INTERPOL, et à ce que de nouvelles mesures soient prises pour renforcer les moyens de lutter contre la drogue.
Le Conseil demande aux pays de la région de continuer de s’entraider, dans toute la mesure possible, afin de prévenir le trafic de drogues et les actes de criminalité transnationale organisée qui y sont liés, d’enquêter et d’exercer des poursuites à leur sujet et de les réprimer, et de traduire en justice, dans le respect du droit international, quiconque finance, organise, appuie ou commet de tels actes. Il invite aussi les entités compétentes des Nations Unies, notamment la Commission de consolidation de la paix, et les organisations internationales et régionales compétentes à aider à renforcer les capacités des institutions nationales et régionales, en particulier celles chargées de faire respecter la loi, notamment en vue du renforcement de l’Initiative côtes de l’Afrique de l’Ouest, et celles des appareils judiciaires des pays de la région afin qu’ils puissent prévenir le trafic de drogues et les actes de criminalité transnationale qui y sont liés, enquêter et exercer des poursuites à leur sujet, traduire en justice et punir les responsables et pratiquer l’entraide judiciaire. Le Conseil souligne également l’importance qu’il y a à lutter contre la corruption, à promouvoir la transparence et à renforcer le respect du principe de responsabilité afin de combattre efficacement le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée dans la région.
Le Conseil souligne l’importance de la bonne gouvernance et la nécessité de lutter contre la corruption, le blanchiment d’argent et les flux financiers illicites, notamment dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention des Nations Unies contre la corruption et des normes internationales détaillées que constituent les 40 recommandations révisées du Groupe d’action financière sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et de la prolifération, en particulier à la faveur de l’adoption de mesures législatives et réglementaires qui permettent aux autorités nationales de geler, saisir, confisquer et administrer les avoirs des criminels pour lutter contre le trafic de drogues dans la région. Il engage également les pays de la région à intensifier leur coopération dans le cadre du Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique de l’Ouest.
Le Conseil engage les États à concourir à la lutte contre le problème de la drogue dans la région dans le cadre de stratégies nationales, régionales et internationales, à prendre des mesures efficaces qui mettent l’accent sur des substitutions saines, productives et gratifiantes à la consommation illicite de drogue et à promouvoir, mettre au point, examiner ou renforcer des programmes intégrés de réduction de la demande efficaces, détaillés et scientifiquement fondés, le but étant de promouvoir des habitudes saines et le bien-être social chez l’individu et au sein de la famille et de la collectivité et de réduire les méfaits de la toxicomanie pour l’individu et la société.
Le Conseil salue l’appui apporté par les acteurs bilatéraux et multilatéraux, notamment l’Union européenne, l’Union africaine, les organisations sous-régionales, dont la CEDEAO, et par INTERPOL, l’Organisation mondiale des douanes, l’Organisation maritime internationale et l’Organisation maritime de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, ainsi que par les entités compétentes des Nations Unies, à la lutte contre le trafic de drogues dans la région. Il engage les États Membres à intensifier la coopération internationale et régionale selon le principe de la responsabilité conjointe et solidaire et à renforcer leur coopération avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et l’Organe international de contrôle des stupéfiants afin de lutter contre le trafic, la production et la demande illicites de drogues et de mettre à jour les tendances nouvelles du trafic de drogues.
Le Conseil préconise une collaboration accrue entre toutes les entités compétentes, notamment l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest, le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale, le Département des opérations de maintien de la paix, en particulier la Division de la police, et le Programme des Nations Unies pour le développement, le but étant qu’elles se dotent d’un mécanisme de coordination efficace et détaillé qui leur permette de hiérarchiser les interventions et de coordonner la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, en particulier sur le plan de la sécurité. Il invite toutes les entités des Nations Unies présentes dans la région à faire une place à la lutte contre le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée dans leurs activités, conformément à leur mandat respectif, et à tirer activement parti de l’effet de synergie.
Le Conseil invite le Secrétaire général à retenir ces menaces parmi les facteurs pris en considération dans les stratégies de prévention des conflits, l’analyse des conflits, les évaluations consacrées aux missions intégrées, les activités de planification et l’appui à la consolidation de la paix et à envisager de faire figurer dans ses rapports une analyse du rôle joué par ces menaces dans les situations dont il est saisi. Il estime que l’ONUDC doit le tenir informé des menaces que font peser le trafic de drogues et les actes de criminalité transnationale qui y sont liés, lorsqu’elles ont un rapport avec les situations dont il est saisi, notamment lorsqu’il examine les mandats des opérations de maintien de la paix et des missions politiques, et demande à l’ONUDC et au Département des affaires politiques de lui présenter, dans le cadre d’exposés réguliers, des informations sur les activités de l’Équipe spéciale des Nations Unies sur la criminalité transnationale organisée et le trafic de drogues en tant que menaces pour la sécurité et la stabilité.
Déclarations
M. BAN KI-MOON, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré qu’à travers le monde, le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée menaçaient la sécurité, sapaient l’état de droit et compromettaient la paix et la stabilité. Dans un nombre croissant de pays, les réseaux criminels alimentent les activités terroristes et des groupes extrémistes. La corruption, la porosité des frontières et le manque de ressources et de coopération ne font qu’aggraver le problème, a ajouté M. Ban Ki-moon. Se concentrant sur la situation en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel, il a estimé à 1,25 milliard de dollars la valeur marchande de la cocaïne transitant chaque année par l’Afrique de l’Ouest. Il a ensuite constaté avec inquiétude que la région, qui compte plus d’un million d’utilisateurs de drogues illicites, n’était plus seulement une route de transit mais aussi une destination finale. Il a noté que l’augmentation de la consommation aggravait davantage la situation en matière de santé publique et menaçait le développement économique et social en Afrique de l’Ouest. Pour M. Ban, la communauté internationale doit articuler ses réponses en application des conventions pertinentes contre la criminalité transnationale organisée, le trafic de drogues et la corruption ainsi que des instruments contre le terrorisme. Ce dispositif doit être mis en œuvre dans le respect du droit des personnes. « J’exhorte tous les États Membres à ratifier et à pleinement appliquer ces instruments sans délai », a-t-il dit.
Le Secrétaire général de l’ONU a plaidé pour de nouveaux partenariats transatlantiques combinant les efforts de l’Amérique latine, l’Afrique de l’Ouest et l’Europe. Il n’a pas manqué d’appeler de nouveau à un renforcement de la coopération afin d’aider les pays de la région à affermir leurs capacités dans le domaine de la sécurité et leurs moyens de lutte contre le blanchiment d’argent et la contrebande d’armes. Après avoir souligné que l’ONU et ses États Membres travaillent ensemble au démantèlement des réseaux criminels et proposent nombre de programmes de prévention et de réhabilitation, il a martelé qu’« avant tout, nous avons besoin d’une approche coordonnée ». M. Ban a considéré que la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel était l’instrument de choix pour guider efficacement l’action des pays. Il a ainsi souligné la nécessité de promouvoir une réponse internationale pragmatique, intégrée et cohérente ancrée dans le développement durable et respectueuse des droits de l’homme. Pour le Secrétaire général, la problématique de la criminalité transnationale organisée doit être discutée de manière approfondie dans le cadre de la définition du programme de développement des Nations Unies pour l’après-2015. « Notre objectif, a-t-il souligné, est de libérer les citoyens du fardeau du crime mais également des conditions propices à l’éclosion du crime ». Cela signifie que les moyens mobilisés doivent s’attaquer à la corruption, à la pauvreté et au manque de services essentiels, a précisé le Secrétaire général avant de conclure.
M. YURY FEDOTOV, Directeur exécutif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a déclaré que près de 33 tonnes de cocaïne avaient transité par l’Afrique de l’Ouest en 2010, dont 18 tonnes à destination de l’Europe pour une valeur marchande d’environ 1,25 milliards de dollars. Le rapport 2013 de l’ONUDC sur les stupéfiants dans le monde, a-t-il indiqué, confirme que le phénomène mondial du trafic de drogues est très préoccupant en Afrique de l’Ouest. À ce fléau s’ajoutent le trafic de migrants et la traite des personnes, le trafic d’armes à feu, de cigarettes et d’essence, ainsi que la piraterie dans le golfe de Guinée. M. Fedotov a déclaré que les fonds dégagés permettraient aux organisations criminelles de soutenir leurs opérations et éventuellement d’appuyer les activités terroristes dans la région. Ces activités et les énormes profits qu’elles génèrent ont des conséquences préjudiciables sur les efforts déployés pour la sécurité et le développement de la région. Ils compromettent la bonne gouvernance, sapent les économies et alimentent la corruption, a constaté avec gravité le Chef de l’ONUDC. Les pays de la région sont pleinement conscients des risques que représentent ces fléaux, a-t-il assuré. La communauté internationale a, pour sa part, pris la mesure de l’urgence de la situation, en raison notamment de la prolifération des armes dans la région du Sahel et des liens manifestes entre organisations criminelles et groupes extrémistes. M. Fedotov a rappelé la pertinence des initiatives en cours, à savoir le Plan d’action de l’Union africaine, la Déclaration politique et le Plan d’action régional de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) visant à lutter contre le trafic de drogues, la criminalité transnationale organisée et la toxicomanie en Afrique de l’Ouest.
L’ONUDC, à travers son programme régional, a indiqué M. Fedotov, assiste les pays de la région, à travers un large éventail de projets régionaux, sous-régionaux et nationaux. Toutes nos actions sont mises en œuvre en étroite consultation avec les gouvernements de la région, et en coopération avec nos partenaires régionaux et internationaux, dont le Bureau de M. Djinnit, le Département des opérations de la paix, le Département des affaires politique, l’Organisation mondiale des douanes et INTERPOL. M. Fedotov a par ailleurs mentionné la Conférence d’Abidjan, que l’Office avait organisée en octobre dernier, et à l’occasion de laquelle a été lancé un appel urgent pour renforcer la coopération régionale et les capacités nationales pour le contrôle des frontières terrestres, maritimes et aériennes, ainsi que les systèmes de justice pénale et la coopération judiciaire. « Nous devons soutenir les efforts mis en œuvre pour la collecte, l’analyse et la diffusion du renseignement », a-t-il aussi souligné. Avant de conclure, il a insisté sur le fait que la lutte contre le trafic de drogues et la criminalité en Afrique de l’Ouest et dans le Sahel devrait être intégrée aux efforts déployés pour mieux répondre aux défis liés notamment à la gouvernance et à l’état de droit, à la pauvreté et au chômage des jeunes. Cette action, a-t-il dit, est envisagée dans la Stratégie intégrée de l’ONU pour la région du Sahel qui pose les fondements de la stabilité et du développement durable, conformément à la résolution 2056 (2013) du Conseil de sécurité.
M. SAID DJINNIT, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest, a indiqué que la consommation de drogue était devenue une réalité menaçante en Afrique de l’Ouest. Il s’est ensuite félicité de l’intensification de la mobilisation des acteurs de la région face à ce fléau, en rappelant que son Bureau, aux côtés de l’ONUDC, avaient appuyé les efforts de la CEDEAO pour l’adoption d’un Plan d’action régional en la matière en 2008. Ce Plan d’action a été étendu jusqu’à la fin 2014, a-t-il précisé.
Le défi que représente le trafic de drogues fait l’objet du second pilier de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, a rappelé M. Djinnit. Il a indiqué que la mise en œuvre de cette Stratégie intégrée avait pris un élan important depuis la récente visite dans la région du Sahel, aux côtés de hauts responsables de l’Union africaine, de la Banque mondiale, de l’Union européenne et de la Banque africaine de développement.
« Le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest continuera d’appuyer les initiatives régionales et d’attirer l’attention des dirigeants de la région sur les menaces posées par le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée », a-t-il assuré. M. Djinnit a ensuite rappelé que les États de l’Afrique de l’Ouest et ceux de la sous-région du Sahel ne pouvaient pas supporter seuls le fardeau politique et financier de la lutte contre les organisations criminelles. Ces organisations sont parfois dotées de moyens plus importants que ceux dont disposent les institutions nationales qui sont chargées de les combattre, a relevé M. Djinnit. C’est pourquoi il a plaidé pour une meilleure coopération internationale et a appelé les donateurs à appuyer résolument les efforts de ces pays. C’est ainsi, a-t-il soutenu, que le principe de responsabilité partagée de l’ONU pourra prévaloir.
M. FERNANDO CARRERA, Ministre des affaires étrangères du Guatemala, a pointé du doigt les énormes revenus générés par le trafic de drogues, lesquels, a-t-il dit, érodent les fondements des pays et s’accompagnent de trafics d’armes. « Il n’est pas exagéré de dire que le trafic de drogues et les flux financiers sous-jacents sapent les institutions démocratiques, en Afrique de l’Ouest et au Sahel, mais aussi, à un degré différent, dans notre région », a-t-il fait remarquer. Rappelant que la réponse mondiale qui a prévalu pour l’heure résidait dans l’interdiction des drogues, il a souligné la nécessité d’axer l’action sur la régulation, la santé publique et l’amélioration du bien-être des citoyens. Nous devons nous éloigner des formules qui n’ont pas fonctionné pour adopter des réponses plus intégrées à même d’aboutir à des résultats, a-t-il déclaré. Il est nécessaire, a-t-il poursuivi, d’établir à cette fin un dialogue à l’échelle mondiale. M. Carrera a précisé qu’un dialogue intergouvernemental avait déjà été engagé en Amérique latine.
Le Ministre s’est ensuite félicité de la coopération entre les acteurs de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel pour lutter contre le trafic de drogues, avant de mentionner les mécanismes existants en Amérique latine. Il a cependant regretté l’absence de coopération entre les différentes régions du monde. « Nous devons y remédier et faire fond sur les expériences de l’Afrique et des pays d’Amérique latine », a-t-il plaidé. « Mon pays se tient prêt à appuyer le dialogue entre les pays de sa région et l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, afin d’identifier et de développer les stratégies permettant de mieux répondre au trafic de la drogue », a-t-il assuré.
M. MARK LYALL GRANT (Royaume-Uni) a rappelé que le trafic de drogues était l’un des aspects les plus graves de la criminalité transnationale organisée. À ce jour, 15% de la cocaïne consommée en Europe passe par l’Afrique de l’Ouest, a-t-il affirmé. Le Royaume-Uni, a-t-il indiqué, s’oppose au paiement de rançons en cas d’enlèvements. Ces rançons, a-t-il fait remarquer, profitent à des organisations criminelles. Le délégué du Royaume-Uni a émis l’espoir que le Conseil de sécurité se penche rapidement sur le projet de résolution sanctionnant le paiement de rançons en cas d’enlèvements.
Ces organisations criminelles fragilisent des États qui sont déjà vulnérables, a-t-il déclaré. Il faudrait adopter, a-t-il souligné, des mesures économiques afin de faire en sorte que les activités criminelles deviennent moins lucratives. Il est également important d’améliorer la coopération en Afrique de l’Ouest pour lutter contre le trafic de drogues. Avant de conclure, le représentant du Royaume-Uni a mis l’accent sur le renforcement de la coopération internationale pour mieux faire face à ce fléau, dont les dimensions, a-t-il précisé, sont mondiales.
M. MOHAMMED LOULICHKI(Maroc) a déclaré que la région du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest était devenue un carrefour pour le trafic des différentes drogues. « Il s’agit désormais d’un tremplin permettant aux trafiquants de transférer leurs marchandises de l’autre côté de l’Atlantique. » « Sans nul doute possible, l’Afrique de l’Ouest est un lieu d’implantation des cartels de la drogue », a ajouté le représentant. Il a en outre noté que la région s’était transformée en une zone de destination pour les stupéfiants, engendrant ainsi des conséquences redoutables pour la santé publique et la situation économique et sociale des pays concernés. « Comme l’ont souligné le Secrétaire général et le Directeur exécutif de l’ONUDC, le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée sont des facteurs d’insécurité et de déstabilisation régionale », a-t-il fait remarquer. Il a appelé les États à appuyer la mise en œuvre de l’Initiative « Côte de l’Afrique de l’Ouest » et a rappelé que le Maroc, dès 2009, avait établi un cadre de coopération regroupant les 22 États africains riverains de l’Atlantique. Il a expliqué que ce cadre prônait une réponse coordonnée et solidaire au trafic de drogues et à la criminalité transnationale organisée. « Vaincre le trafic de drogues et ses corollaires ne sera possible que si l’on s’attaque à leurs causes sous-jacentes, en particulier l’absence de perspectives pour les jeunes », a-t-il soutenu.
M. EVGENY T. ZAGAYNOV (Fédération de Russie) a plaidé pour l’universalisation des conventions internationales contre le trafic de drogues et pour le renforcement du contrôle international dans ce domaine. « Les trafiquants de la région de l’Afrique de l’Ouest et, en particulier du Sahel, sont de plus en plus souvent les complices des terroristes, grâce notamment aux armes qui transitent depuis la Libye ». « Les mesures limitées ne suffiront pas. C’est pourquoi, nous fondons de sérieux espoirs dans la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, qui comporte des volets techniques ambitieux et n’oublie pas la lutte contre les causes sous-jacentes de la criminalité transnationale organisée, comme la marginalisation des jeunes », a déclaré le représentant. Il a conclu en mentionnant des programmes d’aide établis par la Fédération de Russie pour aider les pays de la région du Sahel à mieux former les cadres et spécialistes et renforcer l’efficacité de leurs services de renseignements.
M. KODJO MENAN (Togo) a appelé les États de la région de l’Afrique de l’Ouest et de la sous-région du Sahel, à travers un engagement politique, à faire de la lutte contre le trafic de drogues une priorité. L’extension du Plan d’action régional de la CEDEAO pour la période 2013-2018 illustre cet engagement des États à répondre, de manière intégrée, au problème croissant du trafic de la drogue et de la criminalité transnationale organisée. Le représentant du Togo s’est réjoui de l’appui apporté par l’ONUDC au Plan d’action et il a noté que la coopération entre les États de la sous-région avait permis, en dépit de financements insuffisants, de faire en sorte que de nombreux criminels soient identifiés et traduits en justice.
Concernant l’action de son pays, le représentant a indiqué que son gouvernement avait promulgué des lois et pris des mesures institutionnelles pour lutter contre le fléau de la criminalité transnationale organisée et pour juguler l’impact financier de ce fléau. Ces dernières années, a-t-il poursuivi, la surveillance accrue des douanes togolaises avait permis la saisie de plusieurs kilos de drogue aux frontières, notamment en provenance de l’Amérique du Sud. Ces résultats sont en partie dus à l’appui et à la coopération de nos partenaires. M. Menan a par ailleurs souligné que l’appui international ne devrait pas se limiter à la seule dimension sécuritaire. Il devrait intervenir également dans les domaines de la prévention des conflits, de la gouvernance et du développement, a-t-il soutenu.
Mme PHILIPPA KING (Australie) a rappelé l’expérience des pays de la région Asie-Pacifique en ce qui concerne la gestion des frontières. La coopération régionale, a-t-elle souligné, est cruciale pour faire face aux menaces, avant même qu’elles ne traversent les frontières. C’est dans ce contexte qu’elle a exhorté la communauté internationale à appuyer le cadre adopté lors de la Conférence de Rabat sur la gestion intégrée des frontières au Sahel et au Maghreb. Mme King a ensuite souligné qu’il était nécessaire de renforcer les capacités des systèmes judiciaires, en faisant remarquer que les poursuites devant les tribunaux et les condamnations étaient l’un des outils les plus efficaces pour lutter contre le trafic de drogues. L’établissement de cellules de lutte contre la criminalité transnationale organisée en Libéria et en Sierra Leone a renforcé les institutions judiciaires de ces pays.
Concernant le blanchiment d’argent, la représentante de l’Australie a fait observer que les groupes terroristes et les trafiquants de drogue opéraient dans les mêmes zones. Il est essentiel, a-t-elle dit, d’examiner de manière approfondie les liens qui existent entre les groupes terroristes et les trafiquants de drogue. Elle a souhaité qu’une meilleure synergie soit établie entre les différentes entités du système des Nations Unies qui œuvrent dans le domaine de la lutte contre la criminalité transnationale organisée. La Stratégie intégrée de l’ONU pour le Sahel est une importante étape dans cette voie, s’est-elle félicitée. Le Conseil de sécurité devrait déterminer clairement dans les mandats des missions des Nations Unies le rôle que ces missions peuvent jouer pour combattre la criminalité transnationale organisée, a-t-elle estimé.
M. LIU JIEYI (Chine) a rappelé que les principaux responsables dans la lutte contre le trafic de drogues étaient les gouvernements. La communauté internationale doit les appuyer, notamment en ce qui concerne la formation des policiers et la fourniture de technologies, a-t-il estimé. Le représentant a ensuite salué le soutien fourni par l’Union du fleuve Mano et le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest aux pays de la région. L’ONU doit continuer de jouer un rôle de coordination, a-t-il déclaré. Le Conseil de sécurité devait rester saisi de la question du trafic de drogues afin que l’attention de la communauté internationale demeure mobilisée, a souligné le délégué de la Chine, avant d’appeler les institutions des Nations Unies concernées à assurer la mise en œuvre de la Stratégie intégrée pour le Sahel.
M. OLIVIER NDUHUNGIREHE (Rwanda) a rappelé que les pays de l’Afrique de l’Ouest servaient principalement de points de transit dans l’acheminement de la drogue vers les marchés européen et nord-américain. Il a plaidé pour qu’une véritable guerre soit menée à l’échelle mondiale contre le trafic de drogues dont il a longuement détaillé les effets déstabilisateurs en Afrique de l’Ouest. La situation en Guinée-Bissau est symptomatique, a-t-il fait remarquer, tout en mettant en garde contre la prise de pouvoir par des réseaux criminels. Il a ensuite salué les efforts de la CEDEAO et rappelé que l’Union africaine avait adopté un plan d’action global en matière de lutte contre la criminalité transnationale organisée et le trafic de drogues. Les initiatives prises montrent que les organisations régionales et sous-régionales africaines ont pleinement pris conscience de la nécessité de lutter contre le trafic de drogues, a-t-il noté, en rappelant une nouvelle fois la gravité de la situation en Guinée Bissau. En conclusion, le délégué du Rwanda a appelé la communauté internationale à tout faire pour que l’Afrique ne devienne pas une plaque tournante dans le trafic de drogues.
Mme MARÍA CRISTINA PERCEVAL (Argentine) a souligné l’importance de mettre en œuvre la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel « dans toutes ses dimensions ». « Les pays de la région sont vulnérables au trafic de la drogue et à la criminalité transnationale organisée en raison de leurs faibles institutions », a-t-elle fait remarquer. La représentante a estimé qu’il était essentiel d’aider ces pays à renforcer leurs capacités, « comme le demande le Secrétaire général dans son rapport ». « L’Argentine souscrit au principe de la responsabilité partagée entre pays producteurs, de transition et de destination », a assuré la représentante. Pour sa délégation, c’est entre ces acteurs politiques que la synergie et la coopération dans les domaines sécuritaire et judiciaire doivent être les plus fortes. « Les problèmes dont nous débattons sont les conséquences de causes profondes qui appellent des réponses pérennes tenant compte des besoins des peuples en matière de développement humain », a rappelé Mme Perceval avant de conclure.
M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) s’est inquiété de l’association grandissante des trafiquants de drogue avec les extrémistes les plus violents en Afrique de l’Ouest et dans la sous-région du Sahel. Il a tenu à souligner que les gouvernements de la région avaient la responsabilité de s’attaquer aux causes économiques et sociales qui poussent les jeunes à se livrer à la criminalité. « Le Plan d’action de la CEDEAO est un cadre solide pour répondre aux problèmes. » Il a estimé que les nombreux accords régionaux et sous-régionaux doivent être traduits en actes, sous l’égide de l’ONU. Celle-ci doit jouer, a-t-il dit, son rôle de coordonnateur dans ce domaine. Il a rappelé les programmes que les États-Unis ont conduits au Nigéria, en Côte d’Ivoire, au Libéria et au Bénin pour y renforcer l’état de droit et sensibiliser les jeunes aux effets dévastateurs du trafic et de la consommation de la drogue et de la criminalité transnationale organisée sur leurs communautés. « Cette année, nous avons contribué à hauteur de 2,5 millions de dollars aux activités de l’ONUDC et de l’Initiative « Côte de l’Afrique de l’Ouest », a-t-il assuré.
M. AGSHIN MEHDYEV (Azerbaïdjan) a salué l’adoption par les pays de la région de nombreuses initiatives et mesures aux niveaux national, régional et sous-régional. Il a ajouté que ces pays, souvent dépourvus des ressources financières adéquates, doivent être soutenus par la communauté internationale et, notamment, par le système des Nations Unies. À son tour, il a plaidé pour une réponse coordonnée aux fléaux du trafic de drogues et de la criminalité transnationale organisée en Afrique de l’Ouest et dans la sous-région du Sahel. Le représentant a attiré l’attention sur l’importance de tenir compte des besoins spécifiques des pays, à la fois en matière de sécurité et de développement. « Comme l’a souligné le Secrétaire général, l’appui doit se concentrer sur le renforcement des capacités des États de la région et des organisations pertinentes », a-t-il noté.
Mme SYLVIE LUCAS (Luxembourg) a indiqué que les pays de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel devraient pouvoir compter sur le soutien sans faille de la communauté internationale pour lutter contre le trafic de drogues. L’Union européenne s’est engagée dans le cadre de sa propre Stratégie de lutte contre la drogue pour la période 2013-2020, a-t-elle indiqué. Elle s’est félicitée de ce que l’ONUDC coopère de façon accrue avec d’autres acteurs à l’échelle du système des Nations Unies, citant ainsi l’exemple de l’Équipe spéciale sur la criminalité transnationale organisée et le trafic de drogues. Le Conseil de sécurité, a-t-elle préconisé, doit être informé plus régulièrement des activités de cette Équipe. Elle a également demandé que le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et les missions mandatées par le Conseil dans les pays de la région renforcent leur coordination, ainsi que leurs capacités d’analyse concernant l’impact du trafic de drogues. La Commission de consolidation de la paix a aussi un rôle important à jouer, a-t-elle déclaré.
Évoquant les résultats encourageants obtenus en Sierra Leone, Mme Lucas a plaidé pour le renforcement des cellules de lutte contre la criminalité transnationale organisée et des systèmes judiciaires et pénitentiaires afin de lutter contre l’impunité. Le meilleur dispositif policier est voué à l’échec si le « processus pénal » est interrompu au niveau de la justice ou des prisons, a-t-elle rappelé.
M. JOON OH (République de Corée) a tout d’abord fait observer que la mise en œuvre des stratégies visant à lutter contre le trafic de drogues en Afrique de l’Ouest dépendait des moyens qui lui sont consacrés. C’est pourquoi, il a appelé la communauté des donateurs à s’engager plus fermement dans la région. Le délégué a ensuite souligné le rôle fondamental que jouent les organisations régionales et sous-régionales dans ce domaine, citant notamment la CEDEAO et l’Union du Fleuve Mano. La Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel est, à cet égard, très importante, a-t-il dit, en insistant sur sa pleine mise en œuvre. Avant de conclure, il a souhaité une meilleure coordination entre les entités du système des Nations Unies qui œuvrent dans le domaine de la lutte contre le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée dans la région.
M. MASOOD KHAN (Pakistan) s’est dit « effrayé » par les chiffres cités par le Directeur exécutif de l’ONUDC et les conséquences dévastatrices du trafic de drogues et de la criminalité transnationale organisée sur le développement des pays. « Il faut passer de l’aspect normatif à des actions concrètes pour mettre fin à ces menaces en Afrique de l’Ouest et dans la sous-région du Sahel. » « Les actions nationales doivent être accompagnées d’une mobilisation accrue des ressources internationales et le développement d’un cadre propice à une coordination accrue », a-t-il préconisé. Le représentant du Pakistan a par ailleurs estimé que la lutte contre la corruption et l’impunité était un préalable à une utilisation optimale du soutien international aux capacités institutionnelles des États, en particulier dans les secteurs de la sécurité et de la justice. Il a aussi salué le rôle fondamental de l’ONUDC, « grâce auquel nous ne partons pas de zéro », et plaidé pour la pleine mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. Enfin, le représentant a invité les pays de la région à tenir compte des recommandations des Comités de sanctions du Conseil de sécurité concernant des pays africains.
M. GÉRARD ARAUD (France) a déclaré que face à l’émergence de la menace examinée, les États de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel avaient alerté la communauté internationale et demandaient un soutien à leurs initiatives. « Le Secrétaire général, dans plusieurs rapports, a relayé leurs préoccupations », a-t-il ajouté, en assurant que la France s’était engagée à répondre à cet appel. « Lors du Sommet pour la paix et la sécurité, tenu à Paris les 6 et 7 décembre dernier, les chefs d’État et de gouvernement ont exprimé leur détermination à endiguer la production, la transformation, la consommation et les trafics de drogue sur les deux continents, à lutter contre les flux financiers illicites et à renforcer la coopération judiciaire et sécuritaire. » « La France continuera à apporter son soutien pour la sécurité et la sûreté du domaine maritime africain et des espaces frontaliers, dans le prolongement du Sommet de Yaoundé et de la Conférence de Rabat », a-t-il également souligné.
M. Araud a expliqué que la France avait aussi porté ces thèmes au sein de l’Union européenne, notamment en appelant à l’adoption d’une stratégie de sûreté maritime. « Celle-ci pourrait se décliner dans le golfe de Guinée, pour faire face aux menaces transversales qui affectent cette zone maritime », a-t-il précisé. Concernant le rôle du Conseil de sécurité, il a soutenu qu’avec ce débat, les membres du Conseil marquaient leur engagement contre le trafic de drogues et la criminalité transnationale organisée.
« Dans la déclaration présidentielle que nous avons adoptée, les membres du Conseil apportent leur soutien aux initiatives prises par les États de la région. » « Ils demandent aux Nations Unies d’aider à leur mise en œuvre, notamment dans le cadre de la Stratégie intégrée pour le Sahel, en coopération avec les autres organisations pertinentes, telles que l’Union européenne. » « Ils appellent surtout à des mesures concrètes pour faciliter les opérations d’interception maritime, la surveillance des espaces frontaliers, les poursuites, le jugement et la condamnation des trafiquants, la lutte contre la corruption et le blanchiment des capitaux et, enfin, à l’adoption de mesures sanitaires pour lutter contre la demande de drogues », a commenté l’Ambassadeur Araud.
Le représentant de la France a estimé que le Conseil de sécurité devrait avoir une meilleure connaissance de l’impact du trafic de drogues et de la criminalité transnationale organisée sur les situations inscrites à son ordre du jour. « C’est pourquoi, le Conseil, dans cette déclaration présidentielle, demande à être mieux informé par l’ONUDC de ces menaces, notamment lorsqu’il étudie les mandats d’opérations de maintien de la paix et de missions politiques spéciales », a-t-il précisé. Enfin, il a invité l’ONUDC et le Département des affaires politiques, dans le cadre de séances d’information périodiques, à informer le Conseil des travaux de l’« Équipe spéciale sur la criminalité transnationale organisée et le trafic de drogues comme menaces à la sécurité et à la stabilité ».
La France continuera ainsi à apporter son soutien à titre national, dans le cadre européen et au Conseil de sécurité, aux initiatives des pays du Sahel et d’Afrique de l’Ouest, pour lutter avec eux contre le fléau du trafic de drogues, a-t-il assuré avant de conclure.
M. TÉTE ANTÓNIO, Union africaine, a indiqué que l’infiltration par les trafiquants de drogue des autorités chargées de la sécurité aux points d’entrée et de sortie des pays concernés était l’une des raisons essentielles exigeant des efforts concertés pour lutter contre le trafic de droguess aux niveaux local, national, régional et continental.
Il a ensuite indiqué que l’Union africaine était en train d’élaborer des mesures visant à appuyer ses États membres dans leur lutte contre le trafic de drogues, y compris en Afrique de l’Ouest et dans le Sahel. La Commission de l’Union africaine a développé un plan d’action pour les années 2013 à 2017 qui propose une stratégie visant, notamment, à s’attaquer aux questions de l’offre et de la demande de drogues, a-t-il dit. Ce plan d’action, a-t-il précisé, répond également aux conséquences sanitaires et économiques et sociales du trafic de drogues et a souligné la nécessité d’adopter une approche collective. En conclusion, M. António a indiqué que l’Union africaine souhaitait renforcer une stratégie continentale coordonnée avec la CEDEAO et le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest.
M. YOUSSOUFOU BAMBA (Côte d’Ivoire), au nom de la CEDEAO, a détaillé les grandes lignes du Plan d’action régional de la CEDEAO sur la prévention de l’abus de stupéfiants, le trafic illicite de la drogue et la criminalité transnationale organisée en Afrique de l’Ouest. Il a ainsi indiqué que les États membres de la CEDEAO devaient fournir des ressources adéquates pour assurer la mise en œuvre de ce Plan d’action et renforcer la coopération régionale à cette fin. Ce Plan d’action vise aussi à établir un cadre juridique qui permette de mieux administrer la justice pénale et de créer une base de données fiable pour évaluer l’ampleur du trafic de drogues. Enfin, M. Bamba a réaffirmé le ferme engagement des chefs d’État de la CEDEAO à Yaoundé, au Cameroun, les 24 et 25 juin 2013, en faveur du renforcement de la coopération régionale dans le domaine de la sécurité maritime.
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