Assemblée générale: malgré une mobilisation sans précédent, la traite des personnes reste un fléau en constante évolution dont l’ampleur ne cesse de croître
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Assemblée générale
Soixante-septième session
Réunion de haut niveau sur l’évaluation du Plan
d’action mondial des Nations Unies pour la lutte
contre la traite des personnes
77e séance plénière – matin et après-midi
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE: MALGRÉ UNE MOBILISATION SANS PRÉCÉDENT, LA TRAITE DES PERSONNES RESTE UN FLÉAU EN CONSTANTE ÉVOLUTION DONT L’AMPLEUR NE CESSE DE CROÎTRE
Malgré une mobilisation sans précédent de la communauté internationale, la traite des personnes reste un fléau en constante évolution dont l’ampleur ne cesse de croître. Tel est le constat dressé par les ministres et les délégués venus participer à la Réunion de haut niveau que l’Assemblée générale a organisée aujourd’hui pour évaluer la mise en œuvre du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, adopté en 2010.
La traite des personnes est un cercle vicieux qui rend les victimes dépendantes de leurs bourreaux, s’est alarmé le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, après que le Président de l’Assemblée générale, M. Vuc Jeremić, eut rappelé que le Plan d’action mondial a précisément été mis en place pour lutter contre ce crime qui a fait 25 millions de victimes, en générant 32 milliards de dollars de revenus par an.
Nous sommes devant une criminalité caractérisée par une grande capacité d’adaptation, le cynisme, la sophistication et qui n’épargne aucun coin de la planète, a renchéri le Directeur exécutif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), M. Yury Fedotov.
Il s’est réjoui d’un Plan d’action mondial venu à point nommé pour faciliter la mise en œuvre de la « Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée » et son « Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants ». Adopté en 2000, le premier texte compte 175 États parties et le deuxième, 154, après son entrée en vigueur en 2003.
À ce jour, a dit le Directeur exécutif de l’ONUDC, 83% des pays ont adopté des lois de lutte contre la traite des personnes, contre 60% en 2009, avant l’adoption du Plan d’action mondial. Les condamnations, s’est-il aussi réjoui, ont augmenté dans 25% des pays.
Mais au titre des mauvaises nouvelles, il a cité le faible taux des condamnations, les difficultés dans la collecte des données et le fait que 39 États n’aient pas encore ratifié le Protocole additionnel de la Convention. Il a aussi dénoncé le fait que le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour l’appui aux victimes de la traite ne soit pas correctement financé.
« Ouvrez vos cœurs et vos chéquiers pour rendre une vie aux victimes! » s’est écriée Mme Mira Sorvino, actrice américaine et Ambassadrice de bonne volonté des Nations Unies contre la traite des personnes. Le Ministre des affaires étrangères de la Suède, M. Hans Lunborg, s’est inquiété des chiffres du trafic d’enfants qui a connu une hausse de 20 à 27% entre 2007 et 2010. Son homologue du Bélarus a estimé que la prochaine étape sera aussi de se concentrer sur la traite pour le trafic d’organes, une question, selon lui, qui doit être résolue par une approche axée à la fois sur la recherche et sur l’élaboration d’un document international distinct.
M. Valentin Rybakov n’a pas manqué de rappeler que c’est son pays qui a proposé, au Sommet du Millénaire de 2005, l’initiative qui a conduit au Plan d’action mondial, grâce aux efforts du Groupe des Amis de la lutte contre la traite des êtres humains. Le représentant de la Côte d’Ivoire a rappelé, à son tour, que l’assemblée des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine a adopté, en 2006, le Plan d’action de Ouagadougou qui a lancé les négociations puis l’adoption du Plan d’action mondial.
Le Plan d’action s’appuie sur quatre piliers: la prévention de la traite, la protection des victimes, les poursuites judiciaires et le renforcement des partenariats. S’agissant du troisième pilier, la Sous-Secrétaire d’État du Mexique a mentionné la loi « avant-gardiste » de janvier dernier qui prévoit notamment que la charge de la preuve ne repose plus sur les victimes de la traite mais sur les autorités nationales.
La Réunion de haut niveau, qui s’est aussi déclinée en deux tables rondes sur les approches économiques de l’éthique des relations hommes-femmes, et sur les bonnes pratiques en matière de prévention de la traite, poursuivra ses travaux demain mardi 14 mai à partir de 10 heures.
Déclarations
M. VUK JEREMIĆ, Président de la soixante-septième session de l’Assemblée générale, a d’abord souhaité rendre hommage aux survivants de la traite des êtres humains et exprimé son plaisir d’accueillir des intervenants aussi distingués. Il a rappelé que la traite était une activité criminelle transnationale générant 32 milliards de dollars par an. Le Plan d’action mondial a précisément été mis en place pour lutter contre ce fléau qui touche 25 millions de personnes. Il a dit être favorable à l’intégration de la question dans l’agenda du développement post-2015 et a d’ailleurs rappelé que la résolution A/RES/67/190 souligne la nécessité de renforcer la coopération internationale sous l’égide de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). Le Président a appelé les États Membres à n’épargner aucun effort logistique, financier et humain pour mettre fin à la traite qui n’est autre qu’une version moderne de l’esclavage. Tous les rouages des services juridiques, administratifs et de sécurité doivent être mis à contribution pour renforcer cette lutte.
Il a tenu à remercier tout particulièrement l’action de Mme Mira Sorvino, Ambassadrice de bonne volonté des Nations Unies contre la traite des êtres humains. Il a fait siennes les déclarations de l’actrice appelant à « faire en sorte que la traite des êtres humains prenne fin au cours de notre vie ». « Nous devons tous soutenir cet objectif et en faire un pilier de notre action », a conclu le Président à l’adresse des États Membres.
M. BAN KI-MOON, Secrétaire général de l’ONU, a rappelé que les trafiquants prennent toujours pour cible des personnes vulnérables. Au début du mois, les autorités du Yémen ont dû libérer environ 500 migrants éthiopiens piégés par les trafiquants, a-t-il rappelé, soulignant que ces victimes étaient essentiellement des femmes et des filles dont plusieurs ont été torturées et abusées. La traite, a dit le Secrétaire général, a des effets dévastateurs sur les gens. Elle sape l’économie nationale puisqu’elle génère des milliards de dollars illégaux et finance des activités tout aussi illégales.
Le Secrétaire général a souhaité la ratification universelle du Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Il a aussi encouragé la mise en œuvre du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes et la multiplication des contributions au Fonds des Nations Unies en faveur des victimes de la traite des personnes.
La traite, a-t-il prévenu, est un cercle vicieux qui attache les victimes aux criminels. Nous devons rompre ce cycle, s’est impatienté le Secrétaire général. Nous devons écouter les victimes, a-t-il recommandé, remarquant que l’Organisation internationale du Travail (OIT) venait d’entendre des centaines de victimes qui ont donné des détails sur les mauvais traitements et les tortures qu’elles ont subis. Nous devons répondre à leur appel pour que justice soit faite. Dans cet objectif, M. Ban a souligné d’ancrer solidement la base des efforts dans l’état de droit. Nous devons renforcer les systèmes judiciaires, s’est-il expliqué.
De manière plus générale, a poursuivi le Secrétaire général, nous devons améliorer les conditions de vie, car, a-t-il alerté, dans les cas les plus terribles, ce sont les parents eux-mêmes qui vendent leurs enfants pour des sommes ridicules. La bonne nouvelle, a conclu le Secrétaire général, c’est que nous avons une feuille de route pour créer « L’Avenir que nous voulons ». Il a rappelé que le concept des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) est la campagne « la plus réussie de l’Histoire » contre la pauvreté. Nous devons atteindre ces OMD d’ici à 2015 et élaborer les futurs objectifs de développement durable pour l’après-2015.
M. YURY FEDOTOV, Directeur exécutif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a attiré l’attention sur les progrès accomplis et les défis qui subsistent dans l’application de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Cette forme moderne d’esclavage touche des millions de victimes et génère des milliards de dollars pour les criminels, a-t-il observé.
Il a rappelé que 175 États sont aujourd’hui parties à la Convention, dont 154 ont ratifié le Protocole. Aujourd’hui, 83% des pays ont adopté des lois de lutte contre la traite des personnes, a-t-il indiqué, alors que le taux n’était que de 60% en 2009, avant l’adoption du Plan d’action mondial en 2010. Le Directeur exécutif s’est dit encouragé par le grand nombre de pays d’Afrique et du Moyen-Orient qui se sont dotés de telles lois. Les condamnations, s’est-il réjoui, ont augmenté dans 25% des pays. M. Fedotov a rappelé qu’il manquait encore 39 ratifications au Protocole pour qu’il devienne universel.
Il a dénoncé l’impunité puisque 16% des pays n’ont jamais condamné personne pour la traite. Il a aussi dénoncé le fait que le Groupe interinstitutions de coopération contre la traite des êtres humains ne bénéficie pas d’une pleine coopération, indiquant que seulement six institutions de l’ONU y contribuent. M. Fedotov a également souligné le problème de la collecte de données et de leur analyse. Pour le rapport mondial sur la traite de 2012, 61 pays n’ont pas fourni d’informations. Il a souligné le fait que tout le potentiel du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies en faveur des victimes de la traite des personnes n’a pu être exploité à cause d’un manque de financement.
Pour faire passer la mise en œuvre du Plan d’action mondial à la vitesse supérieure, il a donc préconisé la ratification universelle de la Convention et du Protocole, le renforcement de l’engagement des partenaires du Groupe interinstitutions, la multiplication des contributions au Fonds et l’amélioration de la collecte des données pour mieux comprendre la nature de ce crime international.
Entre 2006 et 2009, le nombre détectable des cas de traite pour le travail forcé a doublé, passant de 18% à 36%, a alerté M. Fedotov, montrant ainsi que les responsables du maintien de l’ordre doivent prendre davantage de mesures pour détecter les cas. Il faut aussi une plus grande coopération et un meilleur échange des pratiques exemplaires. Il faut encore multiplier les opérations communes aux frontières, renforcer les stratégies nationales et améliorer les approches régionales et internationales. Le Directeur exécutif n’a pas manqué de plaider en faveur de la coopération de tous les acteurs de la société civile et des médias. Nous devons, a-t-il conclu, calibrer autrement notre approche commune face à la traite.
Mme MIRA SOVIRNO, actrice américaine et Ambassadrice de bonne volonté des Nations Unies contre la traite des personnes, a témoigné de ses rencontres, depuis 2009, avec des survivants et survivantes de la traite des personnes. Elle a, par exemple, parlé de victimes qui tremblaient car leur lieu de protection n’était pas éloigné du lieu où vivaient leurs bourreaux. « En tant qu’avocate contre la traite des êtres humains, je vais vous parler avec le cœur car j’ai entendu des histoires horribles d’enfants jetés hors des bateaux ou de femmes marquées au fer rouge sur la joue », a-t-elle dénoncé. « Tous les pays sont victimes de la traite des personnes, y compris le mien, les États-Unis », a-t-elle fait remarquer. Elle a mis l’accent sur un chiffre: jusqu’en 2010, 60% des pays avouaient qu’ils n’avaient pas arrêté un seul trafiquant de personnes. C’est pourquoi il faut appliquer des mesures sur le terrain et les renforcer, a dit Mme Sovirno, et c’est la lutte contre l’impunité qui nous permettra de réaliser des progrès.
Au niveau mondial, elle a mis l’accent sur la nécessité d’avoir des mécanismes d’aide aux victimes, de mobiliser des fonds pour ces victimes et de lutter contre la demande. « Il faut arrêter la chaîne d’approvisionnement en détruisant les endroits où les trafiquants peuvent placer leurs victimes », a-t-elle ajouté. « L’homme est un animal brutal et a l’intelligence d’exploiter ses pairs. Nous devons aller dépasser cette brutalité. Comment prétendre être civilisés si nous laissons opérer ces marchés et ce commerce sous nous yeux? » s’est-elle indignée.
Elle a encouragé la dénonciation des faits, la formation des agents de l’ordre, du secteur du tourisme, des enseignants, etc. Il faut également mettre en place des lignes téléphoniques d’urgence et instaurer des partenariats avec la société civile, pour que plus aucun individu ne soit vendu en esclavage dans l’espoir d’une vie meilleure. Les pays ne doivent plus accepter cette forme d’esclavage pour disposer d’une main-d’œuvre bon marché. Il faut informer la population, en particulier les filles. La traite doit être arrêtée avant qu’elle ne commence et, pour ce faire, des contributions sont nécessaires. « Ouvrez vos cœurs et vos chéquiers pour rendre une vie aux victimes! »
Mme ALYSE NELSON, Présidente de Vital Voices Global Partnership, a rappelé que les législations internationales en matière de traite n’avaient été adoptées que très récemment. « Il y a 17 ans, il n’y avait pas de législation. Plus de 130 pays ont aujourd’hui des lois sur la traite ». Grace aux dirigeants présents ici, a-t-elle estimé, la traite a bénéficié d’efforts importants de sensibilisation. « Mais pourquoi n’avons-nous pas été en mesure de couper à la racine ce phénomène, pourquoi les législations ne sont pas appliquées? » s’est-elle interrogée. Les trafiquants sont souples, a-t-elle prévenu, ils savent s’adapter pour préserver leurs activités qui sont « un crime mondial aux racines locales ». Il faut donc exploiter les solutions locales, a-t-elle préconisé.
Elle a rappelé qu’en lançant le Plan d’action mondial, le Secrétaire général des Nations Unies avait demandé plus d’information pour mieux comprendre ce crime. Il faut donc mieux écouter les victimes et pour ce faire, mettre en place un comité consultatif pour améliorer la communication avec ces victimes. « Les victimes et les survivants sont les moteurs du changement », a-t-elle asséné.
M. JEAN ASSELBORN, Vice-Premier Ministre du Luxembourg, a insisté sur l’ampleur mondiale du phénomène de la traite des personnes. Il s’est particulièrement inquiété des deux formes d’esclavage moderne, à savoir la traite en vue du trafic d’organes et celle pour le recrutement forcé dans les groupes armés. Dans tous les domaines de la traite contre l’esclavage des personnes, il faut une action commune qui doit se décliner à plusieurs niveaux: régional, national et international. À cet égard, il a encouragé tous les États Membres à ratifier la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et ses Protocoles additionnels.
Le Vice-Premier Ministre a ensuite estimé que le Rapport 2012 sur la traite des personnes de l’ONUDC donne aux États Membres des informations très utiles sur les caractéristiques de la traite et les différents flux. « La plupart des faits ont souvent lieu à l’intérieur d’une même région, raison pour laquelle les organisations régionales doivent s’impliquer dans la lutte contre ce fléau », a-t-il dit.
Il a souligné que l’Union européenne avait adopté une stratégie ad hoc pour la période 2012 à 2016 qui s’articule autour de cinq priorités et place les victimes au cœur des politiques, à travers la prise en charge, l’écoute, le renforcement des mécanismes de santé et l’appui psychologique. Le Vice-Premier Ministre a également insisté sur l’importance du travail de la société civile et a appelé les États Membres à apporter leur contribution au Fonds des Nations Unies.
M. ARMEN GEVORGIAN, Ministre de l’administration territoriale de l’Arménie, a rappelé que son pays fit partie des premiers à avoir adopté le Plan d’action mondial contre la traite des personnes. L’Arménie, a-t-il poursuivi, met aussi en œuvre des plans nationaux d’action fondés sur une approche structurelle ancrée dans la coopération entre les agences et autorités locales. Les trois piliers de cette approche sont la prévention, la protection et la répression, assortis d’une rationalisation de la législation.
Le Ministre a reconnu que les droits des victimes doivent se traduire par la mise en place de structures d’accueil et d’assistance médicale et psychologique, et que les enfants doivent faire l’objet d’une attention particulière. L’Arménie est consciente de sa responsabilité en la matière, a affirmé le Ministre, en soulignant l’engagement de son pays à maintenir les efforts pour venir à bout de ce fléau.
M. EERO HEINÄLUOMA, Président du Parlement finlandais, a affirmé que le Plan d’action mondial représentait une étape importante contre un crime qui est une atteinte « à la dignité et à l’intégrité de l’individu » et qui laisse des séquelles profondes chez les victimes à moins qu’elles ne reçoivent une aide et une protection suffisantes. Un des défis est précisément d’identifier les victimes et de punir les véritables responsables. Le député finlandais a dénoncé le laxisme de certains États et parfois même leur complicité avec les trafiquants.
Il a rappelé que le Gouvernement finlandais avait engagé l’examen de son système judiciaire afin d'améliorer la protection des victimes, lequel, mené avec la société civile, entend durcir l’arsenal juridique de répression. Il a appelé les États membres à traiter les causes profondes de ce phénomène et en particulier, à sortir les femmes et les filles du monde de la pauvreté et à les mettre à l’abri des discriminations.
Mme JOHANNA MIKL-LEITNER, Ministre de l’intérieur de l’Autriche, a dénoncé la traite des personnes comme un crime grave et une violation flagrante des droits de l’homme. Elle a souligné qu’il ne s’agissait pas uniquement d’exploitation sexuelle mais aussi d’autres formes de crimes comme le travail force ou le trafic d’organes. “Malheureusement, à l’instar d’autres pays, l’Autriche est à la fois un pays de transit et un pays cible de la traite de personnes”, a regretté la Ministre qui a cité le chiffre de 24 000 personnes identifiées en Autriche en 2012, en situation irrégulière, soit 15% de plus que l’année précédente. 4 000 d’entre-elles étaient mineures et la plupart étaient d’origine roumaine, bulgare, hongroise, moldave et nigériane, a-t-elle précisé. “Comme vous pouvez le constater, la traite des personnes est aussi bien un problème au sein de l’Union européenne qu’à l’échelle internationale”, a noté la Ministre qui a appelé la communauté internationale à agir de concert pour venir en aide aux victimes et les dédommager.
Conscient du rôle crucial de la police, le Ministère de l’intérieur autrichien a mis en place une série de formation complémentaire. Le deuxième volet d’action consiste à consolider la coopération internationale et dans cet esprit, l’Autriche a ratifié tous les instruments internationaux et appelle tous les pays à ratifier sans plus tarder la Convention des Nations Unies et son Protocole additionnel. Compte tenu du nombre sans cesse croissant des pays ayant ratifié ces instruments, la Ministre a estimé que le Plan d’action mondial avait réalisé ses objectifs et que l’un des mérites est qu’il capitalise sur le rôle central de la société civile, des ONG, du secteur privé et des médias. Les ONG sont des partenaires essentiels, a-t-elle insisté, avant d’exhorter les États Membres à traduire leur volonté politique en actions concrètes et à coopérer étroitement avec l’ONUDC.
M. OSMAN MOHAMMED SALEH, Ministre des affaires étrangères de l’Érythrée, a assuré que son pays s’est engagé fermement dans la lutte contre la traite, notamment en multipliant les campagnes de sensibilisation. Le Gouvernement insiste aussi sur la lutte contre l’impunité et s’attache à poursuivre tous les trafiquants. Nous luttons contre la stigmatisation des victimes, a-t-il indiqué, avant d’ajouter qu’aucun État ne pourra se libérer de ce fléau sans l’aide des autres. L’Érythrée collabore ainsi avec le Soudan et l’Égypte, a-t-il dit. Il a dénoncé les groupes qui s’érigent en militant des droits de l’homme dans son pays et qui pourtant sont impliqués dans la traite. Il a demandé aux Nations Unies de faire toute la lumière sur cette dernière affaire car, a-t-il promis, le peuple et le Gouvernement de l’Érythrée continueront à lutter contre les trafiquants et contre ceux qui les soutiennent.
M. BANDAR BIN MOHAMMAD AL-AIBAN, Président de la Commission des droits de l’homme de l’Arabie saoudite, a déclaré que la traite de personnes était contraire à la Charia, ce qui explique la loi nationale contre ce fléau. Une Commission nationale a été créée pour lutter contre ce crime, aider les victimes et prévenir la répétition des faits. L’Arabie saoudite a décrété et compte décréter encore des règlements relatifs à l'exploitation des travailleurs et à la protection des enfants. Un nouveau règlement a été publié sur le travail domestique. Le pays a aussi la Convention des Nations Unies et son Protocole et contribué à hauteur de 100 000 dollars au Fonds des Nations Unies.
M. PAULO ABRÃO PIRES JUNIOR, Secrétaire d’État à la justice du Brésil, a salué les efforts déployés par les États Membres, les Nations Unies, et en particulier l’ONUDC, dans la lutte contre la traite des personnes à travers le Plan d’action mondial. Il a cependant mis l’accent sur la nécessité de lutter contre les phénomènes sous-jacents, notamment par des politiques socioéconomiques et de migration. Il a plaidé pour une stratégie efficace et adéquate, qui respecte les victimes et les droits de l’homme.
Au Brésil, le Gouvernement a mis en place des mesures particulières pour les lesbiennes, les homosexuels ou les transgenres qui sont victimes de la traite, a-t-il souligné. Le Brésil a également mis en place des mécanismes de réinsertion pour les femmes qui ont été victimes de la traite et qui sont confrontées à d’importantes difficultés de réinsertion.
Le Ministre a souligné que le thème de la traite était abordé à différents niveaux aux Nations Unies, ainsi qu’en différents lieux, à Genève, à New York ou à Rome. Il a plaidé pour une meilleure coordination des efforts à l’échelle du système, ainsi qu’entre les agences. Il a également insisté sur la nécessité d’une meilleure coopération entre les pays d’origine, de transit et de destination. Ces efforts devraient viser, en priorité, l’accueil des victimes et leur prise en charge, a-t-il dit.
Mme MARISA HELENA MORAIS, Ministre de l’intérieur du Cap-Vert, a rappelé que son pays se situe au carrefour de trois continents, ce qui présente des avantages sur le plan économique mais pose aussi des risques. Le Cap Vert est ainsi vulnérable au trafic de stupéfiants qu’à la traite des personnes. Des dizaines de femmes d’Afrique de l’Ouest forcées de se prostituer ont été retrouvées dans une île capverdienne.
La Ministre a mis l’accent sur la coopération régionale et internationale, qui est selon elle la clef pour lutter contre ce fléau. Le pays ayant ratifié la Convention des Nations Unies et son Protocole additionnel, elle a indiqué qu’il est maintenant en train d’élaborer une législation pour pallier les lacunes. Elle a conclu en appelant tous les États à contribuer au Fonds des Nations Unies.
M. VALENTIN RYBAKOV, Vice-Ministre des affaires étrangères du Bélarus, a affirmé que la lutte contre la traite est une des priorités nationales pour laquelle le Président de la République a pris des mesures globales. Il a rappelé que c’est son pays qui a proposé, au Sommet du Millénaire de 2005, l’initiative qui a conduit au Plan d’action mondial, grâce aux efforts du Groupe des Amis pour la lutte contre la traite des êtres humains.
Le Vice-Ministre a insisté sur les avantages du Plan. Il s’agit d’abord du premier document international sur la question qui prône une approche globale fondée sur la prévention, les poursuites et la protection des victimes et qui a donné lieu à la création d’un Fonds de contributions volontaires. Le Bélarus fait d’ailleurs une contribution de 50 000 dollars au Fonds et appelle les autres États à faire de même ou plus. Le Plan d’action mondial, a poursuivi le Vice-Ministre, a aussi ceci d’avantageux qu’il se concentre sur la coordination internationale alors qu’avant l’on mettait plutôt l’accent sur l’harmonisation des législations nationales. Enfin, le Plan a conduit à l’amélioration des informations sur la traite puisque l’ONUDC est chargé de publier un rapport biannuel.
Le Vice-Ministre a estimé que le but n’est pas de pouvoir crier victoire mais plutôt de réduire au minimum le nombre des défis, ce qui exige du dévouement de la part des acteurs concernés. La prochaine étape sera de se concentrer sur la traite aux fins du trafic d’organes, a prévenu le Vice-Ministre en recommandant une double approche visant la recherche et l’élaboration d’un document international distinct.
M. HISHAM BADR, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Égypte, s’est réjoui de la prise de conscience mondiale de l’importance de la lutte contre la traite des êtres humains. Il s’est félicité de ce que l’Égypte ait su mettre à profit les nombreux liens qu’il a tissés au sein de groupes d’action et de structures internationales tels que le Mouvement des non-alignés et le Groupe des 77 et la Chine, pour encourager l’adoption du Plan d’action des Nations Unies. Il a exhorté les États Membres qui ne l’ont pas encore fait, à ratifier la Convention des Nations Unies et son Protocole, et à renforcer la coopération entre gouvernements, organisations internationales et société civile pour relever les défis existants et grandissants. Il a par exemple fait référence au phénomène de plus en plus menaçant de la traite des enfants.
Le Vice-Ministre a énuméré les initiatives auxquelles son pays prend part en matière de protection des victimes, de coopération internationale et de répression. Malgré ces progrès certains, il a estimé que la menace prenait chaque jour un visage différent et nécessitait un effort d’identification et de qualification. Ces deux types d’efforts sont essentiels pour mettre en œuvre une action efficace et globale.
M. JULIO ARRIOLA, Vice-Ministre de l’intérieur et des affaires techniques du Paraguay, a expliqué que la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle avait été inscrite, en 1992, dans la Constitution du Paraguay comme un crime. Cette définition a, par la suite, été élargie à l’exploitation pour le travail et la traite en vue du trafic d’organes.
Le Paraguay a lancé une stratégie nationale contre la traite des personnes et cherche à mettre en place un secrétariat spécialisé, ainsi qu’un Fonds d’aide aux victimes. D’autres mesures ont déjà été prises pour lutter contre ce fléau, a souligné le Vice-Ministre, comme la mise sur pied d’une unité spécialisée dans la traite des personnes et l’exploitation des enfants ainsi que des formations ciblées pour la police, l’armée, et les écoles.
Le Paraguay a conclu des accords avec les entreprises pour les sensibiliser à la traite des personnes et faire en sorte qu’elles ne recourent pas à des filières d’exploitation. En ce qui concerne plus particulièrement la traite des femmes et des filles, plusieurs initiatives ont été prises, dont les dispensaires pour les victimes, les programmes de réintégration et les projets de prévention pour les villes frontalières, qui sont, a dit le Vice-Ministre, des centres opérationnels pour les trafiquants. Il s’est félicité de ce que ces efforts aient déjà permis l’arrestation d’une centaine de criminels et a promis que son pays poursuivra sur cette lancée grâce une campagne multinationale visant à démanteler les réseaux.
Mme MARCELA CHÁCON, Vice-Ministre du Gouvernement du Costa Rica, a indiqué que son pays a signé et ratifié en 2003 la Convention des Nations Unies et son Protocole additionnel. Elle a suggéré la mise en place de réseaux stratégiques coordonnés pour combattre le plus efficacement possible la traite. Elle a rappelé que l’OIT estime que « la vente » des personnes engendre entre 7 et 12 milliards de dollars par an, auxquels s’ajoutent 32 millions de dollars qui sont le produit de l’exploitation des victimes. Cela en fait l’activité la plus lucrative après les trafics d’armes et de drogues, a-t-elle noté. Elle a assuré que le Costa Rica s’est engagé dans la lutte contre la traite, notamment en fournissant une aide aux victimes et en poursuivant en justice les trafiquants.
Le pays s’est notamment doté d’un protocole pour la détection et le signalement d’adolescents et d’enfants victimes de la traite. Une loi contre la traite et un Plan d’action stratégique ont été lancés. La Vice-Ministre a salué le succès de la « Coalition régionale contre la traite des personnes » mise en place en 2009 et dont le Costa Rica assure le secrétariat. L’Amérique centrale est une voie entre le sud et le nord, ce dont profitent les trafiquants.
Mme JIGMIDDASH BAYARTSETSEG, Secrétaire d’État à la justice de la Mongolie, a indiqué que son pays est un pays d’origine de la traite qui attache une grande importance à la prévention et à la détection des cas, ainsi qu’à la protection des droits des victimes, notamment des femmes et des enfants. Le Gouvernement accorde une attention particulière à l’exploitation sexuelle qui constitue les cas les plus fréquents de traite en Mongolie. En 2011, le pays s’est doté d’une loi qui prévoit la protection des victimes par le biais d’une approche holistique. La justice pénale a été réformée et des mesures de sensibilisation du public ont été lancées. Le pays a aussi mis en place un fonds d’affectation spéciale pour les victimes désireuses de revenir en Mongolie. La Secrétaire d’État a appelé à une plus grande coopération aux niveaux mondial et régional, donnant l’exemple de son pays qui a signé un accord avec la région administrative spéciale de Macao pour faciliter la prévention de la traite.
M. ABDULRAHIM YOUSIF AL-AWADI, Vice-Ministre de la justice des Émirats arabes unis, a souligné que la réussite des actions entreprises pour lutter contre la traite dépend d’abord de la lutte contre la pauvreté qui rend les personnes vulnérables à la traite. Il faut autonomiser les femmes et protéger les filles. Il a appelé en particulier les pays d’origine à multiplier leurs efforts et jugé essentielle la coopération entre les pays d’origine et de destination. Le Vice-Ministre a indiqué que son pays a adopté une loi de lutte contre la traite en 2006, la première de ce genre au Moyen-Orient. Il a aussi parlé du Comité de lutte contre la traite qui a été créé pour faciliter l’application de la loi. Son gouvernement s’attache en outre à améliorer la sensibilisation du public par le biais des médias et à renforcer les capacités du système judiciaire et celles des systèmes de réinsertion.
Mme DIPU MONI, Ministre des affaires étrangères du Bangladesh, s’est dite encouragée par les résultats concrets obtenus par le Plan d’action des Nations Unies, trois ans à peine après son adoption. Le Plan est, en effet, devenu un point de référence aux niveaux national et international en vue de renforcer la coopération autour de ses quatre piliers que sont la prévention, la poursuite des auteurs, la protection des victimes et le partenariat. Elle a estimé que le Fonds de contribution volontaire avait acquis une nouvelle dimension, avant d’exhorter l’UNODC à accroître ses petites subventions aux ONG qui ont démontré leur expertise dans le domaine de l’aide aux victimes. La Ministre a salué le travail de l’Office, dont le Rapport 2012 donne les tendances de la traite et des flux basés sur des faits.
En tant que pays d’origine, de transit et de destination de la traite, le Bangladesh s’est inscrit dans les efforts mondiaux et régionaux, a-t-elle affirmé. Le Bangladesh est Partie à la Convention de Palerme et au niveau régional, il a été à la tête d’une initiative visant à renforcer la Convention sur la prévention et la lutte contre le trafic des femmes et des enfants à des fins de prostitution de l’Association sud-asiatique pour la coopération régionale (ASACR). Sur le plan bilatéral, le Bangladesh a intensifié sa coopération avec l’Inde dans le cadre d’un comité conjoint de secours, de rapatriement et de réintégration des victimes. Le pays collabore aussi avec le Myanmar.
Notant que les efforts de lutte contre la traite devaient se concentrer sur le renforcement de la justice, notamment la poursuite des auteurs, ainsi que sur les facteurs sociaux et économiques sous-jacents, Mme Moni a souligné que le Bangladesh continuerait à aborder cette question de façon plus globale, dans le cadre de l’Agenda pour le développement post-2015 et d’une « dynamique des populations ».
M. YOLA AHMED ABDULLAHI, Solliciteur général auprès du Ministère de la justice du Nigéria, a réaffirmé la volonté politique de son gouvernement d’appliquer le Protocole additionnel et de mettre en place un cadre juridique et institutionnel approprié. À ce titre, il a évoqué la mise en place de l’Agence nationale pour l’interdiction de la traite des personnes (NAPTIP) qui est chargée de coordonner la réponse nationale et qui est composée de représentants de la police, des services d’immigration, de la sécurité d’État et du Ministère de la condition féminine. L’Agence a développé un Plan d’action stratégique national qui se base sur le Plan d’action mondial, tout en l’adaptant à la réalité du pays.
M. Abdullahi n’a pas manqué de souligner le rôle essentiel des organisations de la société civile. Le Forum consultatif national a d’ailleurs été mis en place pour encourager la collaboration et la coordination entre le Gouvernement, la société civile, les donateurs et les autres partenaires de développement impliqués dans la lutte contre la traite des personnes. M. Abdullahi a également expliqué que le cadre juridique du Nigéria se base sur la non-criminalisation des victimes et leur assure protection et aide, qu’elle soit en situation régulière ou irrégulière.
Le Nigéria a aussi cherché à renforcer la coopération, en particulier avec les pays de transit et de destination de la traite pour apprendre des meilleures pratiques. À ce jour, ces efforts ont notamment permis d’arrêter plus de 190 personnes et de secourir plus de 6 000, a encore souligné le représentant.
Mme LÍA LIMÓN GARCIA, Sous-Secrétaire d’État aux droits de l’homme du Mexique, a indiqué que le Gouvernement mexicain met en oeuvre des politiques de développement social contre l’extrême pauvreté, l’exclusion sociale, la discrimination et pour l’égalité des chances pour contribuer à lutter contre la marginalisation et les inégalités qui conduisent les gens à tomber dans le piège de la traite. Une loi protège désormais toutes les victimes même celles de la traite, a-t-elle indiqué, ajoutant que la prévention est une autre priorité au Mexique. Depuis 2007, un cadre juridique a été élaboré pour réprimer la traite et protéger les victimes, qui a été complété par une loi de 2012. Cette législation est axée sur le principe de protection maximale des femmes et des enfants.
La Sous-Secrétaire d’État a aussi mentionné une loi d’avant-garde adoptée en janvier 2013 et qui prévoit notamment que la charge de la preuve ne repose plus sur les victimes de la traite mais sur les autorités nationales. Dans sa mise en œuvre, il sera prévu une formation du personnel de l’administration publique pour assurer une meilleure prise en charge des victimes. Le Gouvernement souhaite aussi harmoniser les plans locaux avec les plans nationaux et renforcer le Bureau du Procureur spécial chargé des violences contre les femmes et des victimes de la traite.
M. LUIS CDEBACA, Département de lutte contre la traite des personnes au Département d’État des États-Unis, a rappelé que le Président Obama avait annoncé, en septembre 2012, la mise en place d’un plan pour venir en aide aux survivants de la traite. Ce plan, qui entrera en vigueur à l’automne 2013, se fonde sur une meilleure coordination entre les organisations nationales, tribales et locales, une sensibilisation plus large du public, une meilleure identification des victimes et l’amélioration de la qualité des services d’aide aux victimes. Ce dernier aspect entend notamment mieux prendre en compte les traumatismes et adapter l’aide à l’âge, au sexe, à la religion et à la culture des victimes. Il a appelé les États à porter une attention particulière à leur secteur agricole pour éviter que la traite des êtres humains n’y soit associée.
M. YOUSSOUFOU BAMBA (Côte d’Ivoire), qui s’exprimait au nom du Groupe des États d’Afrique, s’est dit particulièrement préoccupé par l’augmentation des activités menées en Afrique par les organisations criminelles transnationales actives dans la traite des personnes. Il s’est particulièrement inquiété de la vulnérabilité des femmes, des filles et des enfants. Pour lutter contre ce fléau, a-t-il dit, l’Assemblée des Chefs d’État et de Gouvernements de l’Union africaine a adopté, en 2006, le Plan d’action de Ouagadougou qui a lancé les négociations puis l’adoption, par l’Assemblée générale de l’ONU, du Plan d’action mondial.
Plusieurs facteurs rendent les personnes plus vulnérables à la traite, a-t-il poursuivi, notamment la pauvreté croissante, le chômage, les inégalités, les situations d’urgence humanitaire, la violence sexuelle, les discriminations fondées sur le sexe, l’exclusion sociale, le racisme ou la marginalisation. « Il est donc urgent d’examiner les facteurs sociaux, économiques, culturels et politiques qui rendent les populations vulnérables à la traite en adoptant et en mettant en œuvre des politiques et des programmes destinés à prévenir la traite aux niveaux national, régional et sous-régional », a-t-il dit. M. Bamba a notamment plaidé pour le renforcement de la coopération entre plusieurs acteurs, notamment la communauté internationale, les États Membres, les communautés, la société civile et les ONG. Il a aussi plaidé pour la mise en place de plans d’action régionaux qui faciliteraient l’échange d’informations et de capacités techniques ainsi que l’assistance mutuelle.
Pour le Groupe des États d’Afrique, il est vital de travailler à l’autonomisation des victimes afin qu’elles recouvrent l’estime d’elles-mêmes. Les victimes de la traite n’ont souvent pas accès à une information adéquate, ne sont pas reconnues en tant que victimes, ne sont pas protégées ou n’ont pas les moyens de faire entendre leur voix, a souligné le représentant. Il a insisté sur la nécessité de tenir compte de ces faits dans la formulation des politiques visant à lutter contre la traite des personnes.
M. THOMAS MAYR-HARTING, Chef de la délégation de l’Union européenne auprès des Nations Unies, a exprimé son émotion devant le développement de la traite des êtres humains. Il a rappelé que près de 21 millions de personnes étaient victimes du travail forcé dans le monde et 880 000 à l’intérieur de l’Union européenne. Entre 2008 et 2010, a-t-il précisé, 23 632 personnes ont été identifiées comme victimes du trafic d’êtres humains au sein de l’UE. Il a également expliqué que 70% de ces victimes étaient des femmes et que les enfants représentaient 15% de ces victimes. Il a en outre réaffirmé la volonté de l’Union européenne de traiter ce phénomène en adoptant une approche globale. L’Union européenne a en effet adopté des textes et instruments criminalisant la traite des êtres humains tout en mettant en œuvre la Stratégie pour l’éradication du trafic des êtres humains entre 2012 et 2016. Un coordonnateur a, à ce titre, été nommé en 2011 pour mettre en œuvre une orientation stratégique et une coopération avec les pays tiers.
Il a par ailleurs énuméré les cinq priorités de la stratégie européenne en la matière. Cette stratégie inclut en premier lieu, l’identification, la protection et l’assistance aux victimes et en second lieu une intensification des efforts en matière de prévention combinée à une répression accrue des trafiquants. La quatrième priorité est une coopération renforcée entre les acteurs principaux de la lutte. Enfin, la stratégie européenne comprend une meilleure connaissance des défis à venir et la définition de réponses appropriées. Il a invité les États Membres à s’inspirer de l’Union européenne en appelant à renforcer les droits des victimes et des migrants.
M. HANS LUNDBORG, Ministre des affaires étrangères de la Suède, s’est inquiété des chiffres cités dans le rapport de l’ONUDC, en particulier ceux liés au trafic d’enfants, qui a connu une hausse de 20 à 27% entre 2007 et 2010, et dont deux tiers des victimes sont des filles.
Il a rappelé que le trafic des personnes n’est pas seulement une violation « horrible » des droits de l’homme mais aussi, une activité qui représente près de 32 milliards de dollars par an. « La traite des personnes est l’un des trafics illégaux les plus lucratifs au niveau mondial », a-t-il insisté, « et l’argent de cette activité illégale, servira, tôt ou tard, à financer d’autres activités criminelles, comme le trafic de drogues ou le trafic d’armes légères et de petit calibre ». Il a, dès lors, plaidé pour une réponse multilatérale à ce fléau.
Il a ensuite expliqué que son pays avait mené, l’an dernier, une étude visant à dresser une carte des efforts entrepris au niveau multilatéral pour lutter contre la traite des personnes. Cette étude a démontré que des projets avaient, certes, été couronnés de succès mais que les efforts multilatéraux demeuraient encore trop fragmentés. « Une meilleure coordination est fondamentale », a-t-il estimé. Face aux revenus juteux que génère la traite, M. Lundborg a appelé les États Membres à faire preuve de volonté politique et à fournir les ressources nécessaires à la lutte contre ce fléau. « Sans ces ressources, il sera pratiquement impossible de mettre en œuvre avec succès le Plan d’action », a-t-il prévenu.
Les États doivent fournir des directives claires aux organisations traitant de cette question et utiliser à meilleur escient le système de l’ONU pour créer des synergies lorsque cela est possible. Le Ministre a également appelé au renforcement du Groupe interinstitutions de coopération contre la traite des êtres humains (ICAT) qui, ces deux dernières années, a publié un certain nombre de rapports dans lesquels les organisations internationales ont la possibilité de parler d’une seule voix à tous les acteurs de la lutte contre la traite.
Pour la Suède, la lutte contre la traite des personnes passe également par des décisions fondées sur des données concrètes. « Les analyses faussées risquent en effet de nous faire passer à côté des priorités et entraîner des gaspillages », s’est-il expliqué. Il s’est donc félicité du travail de l’ONUDC qui a fourni dans son Rapport 2012 un meilleur aperçu du phénomène et l’occasion de développer de nouvelles stratégies ». La Suède a d’ailleurs appuyé financièrement la publication de ce Rapport, a souligné le Ministre.
M. TREVOR BHUPSINGH (Canada) a estimé que la traite des êtres humains est un crime abominable qui touche tous les pays du monde. Son pays, a-t-il affirmé, a renforcé les outils législatifs et d’information pour lutter efficacement contre ce fléau, et venir en aide aux victimes notamment en les informant et en les sensibilisant. Il a félicité les organisations de la société civile pour leur action avec lesquelles son gouvernement a multiplié les échanges dans le respect des principes d’inclusivité, de transparence et d’ouverture, qui sont selon lui des « principes d’application universelle ».
Le Canada, a-t-il poursuivi, a versé depuis 2008, 30 millions de dollars pour aider des pays dans les Amériques, l’Asie du Sud-Est et l’Europe de l’Est. Le Canada coopère avec des organisations internationales telles que l’UNICEF et l’ONUDC mais aussi l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (ANASE). Le représentant a exhorté les États à ratifier la Convention des Nations Unies et son Protocole additionnel.
Mme RARINTHIP SIRORAT (Thaïlande) a souligné que le Plan d’action mondial restait un instrument hautement pertinent mais que des efforts devaient encore être déployés pour mettre en œuvre une stratégie unifiée et harmonisée entre les différents acteurs locaux et internationaux. La Thaïlande reste attachée à une approche fondée sur la répression, la protection, la prévention et le partenariat et met en œuvre des efforts associant une variété d’agences et d’organismes nationaux. À ce titre, l’amélioration du contrôle des flux migratoires a fait l’objet d’une attention particulière, parallèlement au renforcement du droit du travail. La représentante a indiqué que son pays maintenait ses contributions au Fonds des Nations Unies. L’allocation des ressources doit être hiérarchisée et viser en priorité les minimas sociaux et l’autonomisation des groupes de population les plus vulnérables.
M. ALVARO JOSÉ DE MENDONÇA E MOURA (Portugal) a estimé que le Plan d’action mondial demeurait un outil efficace pour les États Membres et la communauté internationale. La traite des personnes, a-t-il dit, qui est une attaque contre la dignité des individus, est malheureusement en hausse. « Cela devrait nous encourager à renforcer notre coopération, notamment à travers le renforcement des outils existants comme la Convention des Nations Unies dont M. Moura a voulu une ratification universelle.
Il s’est félicité que le Plan d’action soit basé sur une perspective centrée sur les droits de l’homme et le développement social. Il a également mis l’accent sur la nécessité d’une coopération nationale, régionale et internationale renforcée. Il a précisé que le Portugal avait apporté son appui financier à un cours de formation de l’ONUDC pour le personnel de la police criminelle. Il a émis l’espoir que ces cours seraient développés dans de nombreux autres pays et a appelé les États à faire des contributions au Fonds des Nations Unies.
Mme MARIA RUBIALES DE CHAMORRO, Vice-Ministre des relations extérieures du Nicaragua, a rappelé que c’est en 2008, sous la présidence du nicaraguayen Miguel d’Escoto, qu’a commencé le débat officiel en vue de l’adoption du Plan d’action mondial. Ce thème paraissait très controversé à l’époque, a-t-elle souligné, félicitant la délégation du Bélarus et le Groupe des amis contre la traite des personnes pour leur persévérance. Le Nicaragua est un des pays les plus avancés dans la lutte contre la traite, a-t-elle poursuivi, expliquant que le cadre juridique mis en place est orienté vers la protection des victimes. Une coalition nationale contre la traite des personnes comprend des institutions publiques et des organisations de la société civile. Elle a aussi parlé de la ligne de téléphone d’urgence qui a reçu 20 000 appels entre 2009 et 2011. La Vice-Ministre a ensuite indiqué que 81,25% des plaintes portées devant les juridictions pénales en 2011 ont abouti. Les unités spécialisées de la police ont, quant à elles, secouru 178 victimes. La Vice-Ministre a enfin parlé de la coopération de son pays au sein de la Coalition régionale de lutte contre la traite.
Table ronde I: Différentes approches économiques, dans le but de fonder la relation entre les hommes et la Terre sur des bases éthiques
Alors que la Suède était aujourd’hui le seul État Membre à annoncer une contribution de 100 000 dollars au Fonds de contributions volontaires des Nations Unies en faveur des victimes de la traite de personnes, les participants à la table ronde intitulée « Les différentes approches économiques dans le but de fonder la relation entre les hommes et la Terre sur des bases éthiques » ont convenu que le partenariat entre les États, le système des Nations Unies, les ONG, les médias et les victimes reste l’une des approches les plus efficaces pour faire face au fléau de la traite de personnes.
Le représentant de la Suède a annoncé que son pays allait apporter 100 000 dollars au Fonds, une première annonce qu’il a espéré être suivie par d’autres, car, « une petite somme est déjà importante ». « C’est épouvantable que si peu d’États aient annoncé des contributions aujourd’hui », s’est alarmé M. Jim Clancy, Modérateur et Journaliste à CNN International. « Ce n’est pas seulement une question d’argent car la vie des victimes n’a pas de prix. Il faut aussi donner de son temps comme le font les ONG, a-t-il tancé.
Le Président de la table ronde et représentant de l’Autriche, dont le pays est le premier contributeur du Fonds avec 519 000 dollars, a rappelé que face aux 32 milliards de dollars que représentent les revenus de la traite dans le monde, les 800 000 dollars dont dispose le Fonds sont « des cacahuètes ». « C’est même honteux », s’est-il impatienté. « Sur le terrain, les ONG ont du mal à trouver des ressources pour venir en aide aux victimes. Il faut plus de volonté politique », a lancé la Rapporteure spéciale des Nations Unies sur la traite de personnes.
Depuis 2010, seuls 12 pays des 193 membres que compte l’ONU ont contribué, a rappelé un des membres du Conseil d’administration du Fonds. Il faut donc avouer que seuls 54,77% du montant promis ont été versés dont plus de la moitié par l’Autriche et le Luxembourg. Deux pays ont même promis des fonds sans les verser. L’Amérique du Nord n’a jamais contribué, a précisé la Rapporteure, contrairement aux quatre pays d’Asie et aux trois du Moyen-Orient.
L’argent, a-t-elle aussi précisé, est utilisé pour appuyer le travail des ONG qui aident directement les victimes. Aussi, sur 42 projets présentés par les ONG, seuls 11 ont pu recevoir un financement. « J’espère que les promesses de contributions deviendront une réalité », a-t-elle dit avant d’annoncer que « Pour 2014, le financement est déjà insuffisant ». Le Fonds a déjà réduit ses coûts administratifs au plus bas. Il tient les réunions avec ses partenaires par vidéoconférence pour économiser. Il pense désormais à lancer un appel de fonds en ligne et à organiser des manifestations culturelles pour lever des fonds.
« Vous devez dire à vos gouvernements de contribuer au Fonds » car être libéré de la traite n’est qu’un premier pas vers la liberté, a renchéri la Directrice exécutive de la Coalition pour l’abolition de l’esclavage et de la traite. « Les ONG sont la voix des survivants », a ajouté la Fondatrice de « Tronie Foundation and Trafficking survivor », elle-même survivante de la traite. Les survivants commencent à avoir de l’espoir quand on les prend en charge, a-t-elle dit.
Ce sont les victimes qui doivent être au centre du partenariat, a insisté la Rapporteure sur la traite des personnes. On peut progresser ensemble vers un partenariat transversal, a-t-elle expliqué, en dénonçant le fait qu’en raison du manque de financement, les victimes ne reçoivent pas de dédommagement, sans compter le fait qu’elles ont du mal à accéder à l’information et à s’intégrer dans les pays de destination. La Rapporteure a rappelé que dans le rapport qu’elle avait présenté en 2010, elle proposait déjà d’impliquer les victimes dans la recherche de solutions pour que ces solutions soient pérennes et durables.
Les médias peuvent apporter leur pierre à l’édification, a dit le Modérateur de la table ronde et Journaliste à CNN International dont l’équipe s’est rendu dans 40 pays pour faire des reportages sur la traite de personnes. « Alors qu’une victime sur 100 est sauvée de la traite de personnes, nous devons travailler avec les médias, la société civile et les victimes car sans ce partenariat, nous ne vaincrons jamais ce fléau », a conclu le représentant de l’Autriche et Président de la table ronde.
Table Ronde II: Échanger les bonnes pratiques et les leçons tirées de l’expérience en matière de prévention et de répression de la traite des personnes dans le cadre de la mise en oeuvre du Plan mondial d’action des Nations Unies
Dans ses remarques d’ouverture, le représentant du Cap-Vert et Président de la table ronde, s’est dit indigné du fait que la situation des victimes de la traite des personnes ne cesse d’empirer et qu’il est désormais clair que la traite n’affecte pas seulement les victimes mais la société dans son ensemble car elle représente un véritable danger pour les valeurs mêmes sur lesquelles sont fondées nos sociétés. Demain ce sont nos propres enfants qui risquent d’être affectés par la banalisation de ces valeurs, a-t-il averti ajoutant que cela équivaudrait à admettre que « nos sociétés sont pourries de l’intérieur ». Face à ce danger fondamental, il a appelé à « l’union sacrée », à savoir à une coopération renforcée entre pays et régions, mais aussi au renforcement des capacités de la lutte contre ce problème.
La Princesse BAJRAKITIYABHA MAHIDOL de Thaïlande a mis l’accent sur le lien entre traite des personnes et développement. La prévention exige que l’on lutte contre les facteurs qui contribuent à la vulnérabilité des victimes potentielles, à savoir les femmes, les enfants et les migrants. Elle a insisté sur l’importance de la criminalisation de la traite et la lutte contre l’impunité des trafiquants, en renforçant l’état de droit et en réformant la justice pénale. La Princesse a reconnu qu’en la matière, un des obstacles reste la peur des représailles chez les victimes. L’autre obstacle est le manque d’une coopération efficace aux plans régional et international, s’agissant tant de l’offre que de la demande.
Plaidant pour une aide accrue aux victimes pour empêcher toute « revictimisation », elle a appelé à plus de contributions au Fonds des Nations Unies et en tant qu’Ambassadrice de bonne volonté pour Onu-Femmes, elle a insisté sur l’importance sur la collecte de données ventilées par nombre de cas et nombre de poursuites judiciaires et de condamnations. Parmi d’autres indicateurs, elle a cité l’efficacité des organes juridiques dans l’harmonisation des lois et manuels de formation; la définition de la traite dans les législations nationales; l’accès à la justice et la coopération tant au plan régional qu’international. Pour la Princesse les deux clefs du succès dans le combat contre la traite des personnes sont la prévention et la lutte contre l’impunité.
L’Ambassadeur pour la lutte contre la traite des personnes de la Suède a confié que son pays a choisi de s’attaquer à la demande en punissant ceux qui achètent les services alimentés par la traite. Le Gouvernement est parti du constat que les « vendeurs des services sexuels » sont le maillon faible; la force motrice de la prostitution étant la demande. « Le modèle suédois a fait ses preuves » a-t-il affirmé. Le succès à long terme exige aussi que l’on offre des services sociaux aux victimes et que l’on traque sans pitié les criminels, en s’attaquant, entre autres, à la corruption. Le représentant a dénoncé les énormes difficultés pour obtenir des pays qu’ils mettent en place des mécanismes de lutte contre la corruption. Il a également reconnu le rôle essentiel que doit assumer l’Union européenne pour lutter contre le volet « demande ».
La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a ajouté d’autres domaines d’action: la lutte pour l’égalité entre les sexes, contre la pauvreté, pour la protection sociale et juridique des victimes, pour des lois coercitives et pour la sensibilisation des populations cibles de la traite. La réponse doit être holistique et multisectorielle et avoir en son centre les droits des victimes dont la perspective et le vécu doivent être pris en compte dans les politiques et stratégies.
Elle a d’ailleurs rappelé que, cette année, la Commission de la condition de la femme avait demandé aux gouvernements d’identifier les victimes de la traite, de ne pas les pénaliser et de leur apporter les soutiens nécessaires. Elle a en revanche exigé que toutes les formes de traite soient criminalisées et que les trafiquants soient poursuivis en justice.
La Présidente de « End Human Trafficking a épinglé, dans ce contexte, la responsabilité des entreprises. « Le pouvoir d’achat parle et peut influencer les comportements », a-t-elle affirmé en appelant les entreprises à mieux contrôler leurs chaînes d’approvisionnement pour garantir qu’elles n’ont pas recours au travail « d’esclaves ». Elle a appelé à terme à un système de certification. En attendant, elle a estimé qu’une des options serait d’investir directement dans les communautés locales et rurales pour que les parents « n’éprouvent plus le besoin de vendre leurs enfants ».
Au cours du dialogue, les pays en développement, dont sont souvent originaires les victimes de la traite des personnes, ont salué l’argumentaire de l’Ambassadeur de la Suède. Malgré tous nos efforts, s’il n’y a pas de volonté pour faire face à la demande dans les pays de transit et de destination, il ne sera pas possible d’efficacement lutter contre la traite, a affirmé la représentante du Nigéria. Les principales victimes de son pays étant surtout de jeunes garçons, son homologue de l’Érythrée a dénoncé dans les pays de destination « les politiques et pratiques encourageant de façon voulue ou non » les jeunes à quitter leur pays ». Il a réitéré la demande de l’Érythrée au Secrétaire général pour qu’une enquête impartiale soit menée sur la traite des personnes dans son pays et dans la région.
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