En cours au Siège de l'ONU

AG/11364

États Membres et experts débattent du règlement pacifique des conflits en Afrique, en insistant sur les liens entre paix, sécurité et développement

25/04/2013
Assemblée généraleAG/11364
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Assemblée générale                                         

Soixante-septième session                                  

Débat thématique intitulé « Le règlement

pacifique des conflits en Afrique »

Matin & après-midi


ÉTATS MEMBRES ET EXPERTS DÉBATTENT DU RÈGLEMENT PACIFIQUE DES CONFLITS EN AFRIQUE,

EN INSISTANT SUR LES LIENS ENTRE PAIX, SÉCURITÉ ET DÉVELOPPEMENT


L’Assemblée générale saisie d’une Déclaration politique

sur le règlement pacifique des conflits en Afrique, parrainée par les 54 pays d’Afrique


L’Assemblée générale a débattu, aujourd’hui, du règlement des conflits sur le continent africain à un mois de la célébration, à Addis-Abeba, du cinquantenaire de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), créée en 1963 au lendemain de l’indépendance de nombreux pays africains, et remplacée par l’Union africaine en 2002.


À l’ouverture du débat thématique, le Secrétaire général des Nations Unies, M. Ban Ki-moon a souligné que le règlement des conflits en Afrique, comme ailleurs, ne peut faire l’objet d’une décision exclusive des élites.  C’est pourquoi, il a appelé les communautés locales, en particulier les femmes, à prendre part processus de règlement pacifique des conflits.  


Se félicitant des progrès économiques et sociaux réalisés en Afrique au cours des cinq dernières décennies, il a noté que « sur les 10 pays dont le taux de croissance est le plus élevé dans le monde, 7 se trouvent sur le continent africain ».  La quête d’unité du continent africain et sa transformation en une région de prospérité économique et de justice sociale n’ont jamais été aussi près de se réaliser, a estimé, quant à lui, le Président de l’Assemblée générale, M. Vuk Jeremić. 


Il faudrait cependant rester vigilant, a estimé le Secrétaire général, en rappelant que la récente crise en République centrafricaine démontrait combien il était dangereux d’ignorer les frustrations.  De même, a fait observer M. Jeremić, la fragilité de la zone sahélo-saharienne méritait une plus grande attention de la part de la communauté internationale.  À l’instar du Président de la Guinée équatoriale, M. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, une douzaine de ministres et autres représentants d’États Membres ont souligné la nécessité de renforcer la coopération entre l’ONU et les organisations régionales africaines, et en particulier entre le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine et le Conseil de sécurité de l’ONU. 


« L’Afrique doit rejeter l’aide des pays qui lui tendent la main sous prétexte de l’aider, alors qu’ils agissent en réalité comme détonateurs de l’instabilité politique du continent », a prévenu le Président de la Guinée équatoriale, avant de dénoncer les « solutions imposées » de l’extérieur qui ignorent « l’essence culturelle » des peuples africains. 


Sur une note plus positive, le Ministre des affaires étrangères du Libéria, M. Augustine Kpehe Ngafuan, a déclaré que son pays avait une immense dette à l’égard des organisations qui lui ont permis de sortir de 14 années de guerre civile.  Le Libéria, a-t-il rappelé, célébrera au mois d’août prochain le dixième anniversaire de l’Accord de paix signé à Accra en 2003.  Le Libéria, a-t-il ajouté, est aujourd’hui le vingtième pays au monde à avoir un taux de croissance élevé.


« La bonne gouvernance est indispensable à la paix durable, et l’Afrique ne peut pas être une exception à cette règle, a soutenu le Ministre des affaires étrangères de l’Éthiopie, M. Tedros Adhanom Ghebreyesus.  Ce dernier a noté que la bonne gouvernance et la promotion des droits de l’homme n’étaient malheureusement pas la priorité de l’OUA à sa création en 1963 et qu’il a fallu attendre 1993 pour voir la création, au Caire, d’un Mécanisme africain de gestion et prévention des conflits.


Le Haut-Représentant de l’Union africaine pour le Mali et le Sahel, M. Jean-Pierre Buyoya, a précisé qu’avec la création de l’Union africaine en 2002, ce « Mécanisme » avait évolué avec, notamment, l’adoption du Protocole relatif à la création d’un Conseil de paix et de sécurité (CPS) en 2002, et la mise en place d’une architecture africaine de paix et de sécurité (AAPS) en 2004.  Cette architecture, a-t-il précisé, s’appuie sur le CPS, le Groupe des Sages constitué de personnalités africaines reconnues pour leur probité, la Force africaine en attente, le Fonds de la paix, et le Système continental d’alerte rapide.

Dans le cadre de ce débat thématique, l’Assemblée générale a tenu, dans l’après-midi, deux tables rondes intitulées « Promouvoir la coopération entre l’Union africaine et l’Organisation des Nations Unies autour du lien entre paix, sécurité et développement » et « La portée et la complexité des conflits en Afrique (Mali, Somalie, Soudan et République démocratique du Congo) et efforts déployés pour relever ces défis ».  Ces tables rondes étaient animées respectivement par M. Colin Keating, Directeur général de l’organisation Security Council Report et M. Maged Abdelaziz, Secrétaire général adjoint et Conseiller spécial du Secrétaire général pour l’Afrique.

L’Assemblée générale poursuivra son débat sur la question,demain, vendredi 26 avril, à 10 heures.


DÉBAT THÉMATIQUE INTITULÉ « LE RÈGLEMENT PACIFIQUE DES CONFLITS EN AFRIQUE »


Déclarations liminaires


M. VUK JEREMIĆ, Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, a rappelé qu’il y a 50 ans, l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) voyait le jour à Addis-Abeba, en Éthiopie.  Avec le Mouvement des pays non alignés, formé deux ans auparavant à Belgrade, la création de l’OUA, en 1963, a lancé le début d’une nouvelle ère en Afrique, comme l’avait confirmé le Président du Ghana, M. Kwame N’krumah, cette année-là, devant l’Assemblée générale.  Cinq décennies plus tard, a fait remarquer le Président de l’Assemblée générale, « nous pouvons affirmer avec certitude que le soleil n’a jamais autant brillé au-dessus de l’Afrique.  Aujourd’hui, une nouvelle Afrique est en train de naître et la quête d’unité du continent, et son besoin de transformation en une région de prospérité économique et de justice sociale n’a jamais été aussi proche de se réaliser.  Il a ensuite noté que de nombreux pays d’Afrique ont connu la croissance économique ces dernières années, même si d’autres font face à des difficultés inhérentes à la crise économique mondiale. 


M. Jeremić a par ailleurs souhaité que le monde s’engage avec plus de détermination dans le règlement des conflits qui continuent de coûter la vie à de nombreux Africains.  Il a fait remarquer qu’en dépit de quelques progrès réalisés récemment en Somalie, au Soudan et au Soudan du Sud, la fragilité de la zone sahélo-saharienne mérite une plus grande attention de la part de la communauté internationale.  Il a plaidé pour un soutien aux solutions africaines à tous les défis de l’Afrique.  Il a également plaidé pour soutenir pleinement l’adoption de la Déclaration politique sur le règlement pacifique des conflits en Afrique, qui a été parrainée par les 54 pays d’Afrique.  Le Président de l’Assemblée générale a ensuite déclaré que l’un des outils stratégiques de prévention des conflits était l’éradication de la pauvreté, un objectif qui est, a-t-il ajouté, la pierre angulaire du programme de développement mondial pour l’après 2015.  Il a par ailleurs rappelé que, lors d’un vote, les pays d’Afrique forment le groupe régional le plus cohérent de l’Assemblée générale des Nations Unies.  Il a souligné que cette position leur offre l’occasion de se placer en première ligne des efforts visant à établir un nouveau partenariat mondial dans lequel les dimensions économique, sociale et environnementale sont incorporées dans un ensemble global cohérent pour un développement mondial qui n’exclura personne. 


La réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), a rappelé le Président de l’Assemblée générale, est d’une importance majeure pour le développement de l’Afrique.  M. Jeremić a annoncé qu’un évènement spécial sur le suivi de ce processus sera organisé par l’Assemblée générale, en septembre prochain.  Il a souhaité que, dans 50 ans, lorsque les dirigeants africains célèbreront le centenaire de leur organisation, ils puissent se consacrer à une réflexion sur l’« âge d’or » qu’ont marqué les 50 années précédentes au cours desquelles ils avaient choisi librement l’avenir de leur pays, en éradiquant la pauvreté, construisant des écoles et les hôpitaux et donné à leurs universités les moyens de guider le monde dans les domaines de la technologie et de l’innovation.


M. BAN KI-MOON, Secrétaire général des Nations Unies, a salué les progrès observés en Afrique en matière de développement de paix et de sécurité, alors que les dirigeants africains célébreront le mois prochain, à Addis-Abeba, le cinquantième anniversaire de l’Organisation de l’union africaine.  Il a précisé que 7 des 10 pays dont le taux de croissance économique est le plus élevé se trouvent en Afrique.  Dans le domaine de la consolidation et de la prévention de la paix, il a fait observer que l’architecture pour la paix et la sécurité et la force en attente africaine sont de plus en plus efficaces.  Il s’est félicité de la coopération croissante entre le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine et le Conseil de sécurité de l’ONU.  Il a salué la signature, en février 2013 d’un accord pour la paix, la sécurité et la coopération entre la République démocratique du Congo (RDC) et la région. 


Illustrant les efforts de l’ONU pour appuyer la paix sur le continent africain, M. Ban a indiqué que le Conseil de sécurité débattait actuellement de la mise en place d’une mission multidimensionnelle dotée d’un mandat politique et humanitaire au Mali.  S’agissant des défis en cours, il a cité la crise en République centrafricaine qui a engendré une grave crise humanitaire et des droits de l’homme, alors que des attaques ont pris pour cible des civils et des membres du personnel de l’ONU.  Il a estimé que la crise de la République centrafricaine démontrait à quel point il était dangereux de ne pas répondre, en temps voulu, à certains griefs.  Le règlement des conflits en Afrique, comme ailleurs, ne peut faire l’objet de la décision exclusive des élites, a-t-il prévenu.  C’est pourquoi, il a appelé les communautés locales, en particulier les femmes, à prendre part à la contribution pacifique des conflits.  


M. PIERRE BUYOYA, Représentant spécial de la Commission de l’Union africaine et Chef de la Mission de l’Union africaine au Mali, a soutenu que l’instabilité politique freinait le développement économique de l’Afrique.  Il a également indiqué que les problèmes économiques de l’Afrique se justifiaient par l’instabilité politique, mais également par une mauvaise gouvernance politique et économique de la part des gouvernants.  Il a rappelé qu’au lendemain de l’indépendance des pays africains dans les années 1960, certains d’entre eux avaient souffert de coups d’État militaires et de luttes de libération dans les pays qui étaient encore sous l’occupation coloniale. 


M. Buyoya a ajouté que la fin de la guerre froide avait coïncidé avec une recrudescence de guerres civiles, comme cela a été le cas en Somalie, au Libéria, en Sierra Leone, au Burundi, au Rwanda et en République démocratique du Congo.  Il a expliqué qu’avec la fin de la guerre froide, de nombreux mouvements de rebellions ont ouvert des hostilités contre leurs gouvernements, sachant que ces derniers ne pouvaient plus s’appuyer sur le soutien des deux grands blocs qui ont marqué la période de la guerre froide.  Avec cette nouvelle donne, a-t-il relevé, les Nations Unies, l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) et les autres organisations sous-régionales ont été amenées à prendre leurs responsabilités et à s’impliquer dans les processus de paix des pays membres.


Concernant le rôle de l’OUA, M. Buyoya a fait remarquer que cette Organisation avait toujours privilégié la résolution pacifique des conflits sur le continent.  Cette approche a été adoptée par l’Union africaine qui l’a remplacée, ainsi que par les différentes communautés économiques régionales qui l’ont toujours privilégiée.  Il a évoqué le principe de l’intangibilité des frontières héritées du colonialisme, adopté par l’OUA, qui aura été la base du règlement pacifique des conflits liés aux contentieux frontaliers entre pays africains.  Il a ajouté que l’OUA s’était également engagée en faveur de la libération des pays qui étaient encore sous le joug colonial, notamment grâce au Comité de libération qui était doté de ressources conséquentes et chargé de coordonner les efforts du continent en appui aux mouvements de libération dans les pays encore sous colonisation.  Avec la fin de la guerre froide, a-t-il indiqué, l’OUA avait adopté, en juin 1993 au Caire, la « Déclaration du Caire » qui a créé le Mécanisme central de prévention, de gestion et de règlement des conflits, afin d’anticiper et de gérer les conflits armés.  M. Buyoya a ensuite souligné qu’avec la création de l’Union africaine en 2002, ce Mécanisme avait évolué avec, notamment, la mise sur pied du Protocole relatif à la création d’un Conseil de paix et de sécurité (CPS) en 2002, et une architecture africaine de paix et de sécurité (AAPS) en 2004.  Cette dernière s’appuie sur le CPS, le Groupe des Sages constitué de personnalités africaines reconnues pour leur probité, la Force africaine en attente, le Fonds de la paix, et le Système continental d’alerte rapide.


Dans le cadre du partenariat entre l’Union africaine et l’ONU, M. Buyoya a souligné que les Nations Unies avaient joué un rôle central dans la décolonisation de l’Afrique, à travers notamment la résolution 1541 adoptée par l’Assemblée générale le 15 décembre 1960, et qui porte sur l’autodétermination des peuples colonisés.  En termes de gestion des conflits, le Représentant spécial a évoqué l’assistance des Nations Unies aux efforts de la CEDEAO et de l’OUA au Libéria et en Sierra Leone dans les années 1990 et 2000, ainsi que l’appui de l’ONU aux efforts africains dans les processus de médiation et de maintien de la paix au Burundi, au Soudan, en Côte d’Ivoire, en Somalie et en RDC.  Il a également souligné la résolution, adoptée ce matin par le Conseil de sécurité, qui fait passer la Mission d’intervention des Nations Unies au Mali (MISMA) à la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), afin d’aider à la stabilisation du Mali.  M. Buyoya a enfin soutenu qu’au cours de ces 50 dernières années, la coopération entre les Nations Unies et l’Afrique, dans le cadre de la gestion des conflits, avait été riche et variée.  Il a souhaité que les 50 prochaines années puissent être celles qui libéreront le continent africain de guerres et d’instabilité, afin qu’il puisse assumer résolument sa sécurité et son développement économique et social.


Déclarations


M. TEODORO OBIANG NGUEMA MBASOGO, Président de la Guinée équatoriale, a rappelé les principes stipulés par l’Article II de la Charte des Nations Unies qui, a-t-il dit, constituent le fondement du rôle du Conseil de sécurité dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Malheureusement, a-t-il déploré, les organes principaux de l’ONU et, en particulier, le Conseil de sécurité, sont devenus « des instruments politiques » pour quelques États qui cherchent à imposer leurs critères, au mépris des principes fondamentaux consacrés par la Charte de l’ONU.


La Guinée équatoriale estime que le thème du règlement pacifique des conflits ne doit pas se limiter à l’Afrique.  Analysant l’histoire de l’Afrique, le Président a fait remarquer que le continent n’est pas belliqueux par nature, mais qu’il a été un « bastion de résistance » face aux invasions, aux occupations et à l’exploitation de ses ressources par les empires occidentaux.  L’Afrique ne fabrique pas d’armes et ne se livre pas à leur trafic.  « Qui a divisé l’Afrique et continue aujourd’hui de fomenter les conflits qui la divisent?  Pourquoi les États africains se trouvent-ils face à des puissances extérieures pour résoudre leurs conflits internes? » a-t-il interrogé, avant de souligner que l’indépendance et la souveraineté de ces États ne sont pas respectées. 


Pour le Président Mbasogo, il appartient aux dirigeants africains de donner la plus haute priorité au dialogue, à la solidarité, à l’intégration de toutes les forces politiques et à la justice sociale, en vue de prévenir les situations d’instabilité.  « L’Afrique doit rejeter l’aide des pays qui lui tendent la main sous prétexte de l’aider, alors qu’ils agissent en réalité comme détonateurs de l’instabilité politique du continent ».  Il a dénoncé les « solutions imposées » qui ignorent « l’essence culturelle » des peuples africains.  En outre, il n’existe pas de gouvernement qui ne puisse pas contrôler une insurrection interne, a-t-il déclaré, en déplorant la « main invisible » qui appuie les rebelles dans de nombreux conflits dans le monde.  Enfin, « l’intervention armée dans les conflits ne fait que détruire l’esprit de la Charte des Nations Unies ».  En conclusion, le Président de la Guinée équatoriale a appuyé la demande de l’Afrique d’obtenir le droit de veto au Conseil de sécurité et préconisé de « couper le cordon ombilical de la dépendance permanente » des États africains.  


M. TEDROS ADHANOM GHEBREYESUS, Ministre des affaires étrangères de l’Éthiopie, a déclaré que l’ONU devrait rester un partenaire fort de l’Union africaine pour faire du continent africain un continent stable et prospère.  Il a rappelé que l’organisation de l’Unité africaine avait débuté comme un mouvement des peuples bien avant que la majeure partie des 32 États membres fondateurs de l’OUA ne deviennent indépendants.  Notre continent s’est vu infliger énormément d’injustices, d’abord pendant la colonisation, puis lors de la guerre froide, a-t-il dit, avant de déclarer que l’indépendance politique de l’Afrique et le démantèlement définitif de l’apartheid furent la mission principale de l’OUA à sa création.  Rappelant les insuffisances de l’OUA à sa création, il a fait remarquer qu’à cette période, la bonne gouvernance et la promotion des droits de l’homme n’étaient la priorité de l’OUA et qu’il a fallu attendre 1993 pour créer le Mécanisme africain de gestion et prévention des conflits.  L’Afrique a évolué et s’est dotée d’une capacité de jouer un rôle primordial en matière de prévention et de règlement des conflits.  Le représentant s’est félicité que l’Acte constitutif de l’Union africaine pose les fondements d’un certain nombre d’initiatives fondatrices de protection des droits des citoyens, sans oublier la prévention et le règlement pacifique des conflits.  L’Afrique ne tolère plus l’impunité et elle est préparée à assumer sa responsabilité en matière de règlement des conflits et de maintien de la paix sur son continent.  Il a cité, à cet égard, le rôle du Conseil de paix et de sécurité et le système d’alerte précoce de l’Union africaine.  Le représentant s’est félicité de la coopération croissante entre l’Union africaine et l’ONU et, plus précisément, entre le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine et le Conseil de sécurité de l’ONU, tout en estimant qu’il faudrait faire davantage dans ce domaine.  Il est irréaliste, a-t-il dit, d’envisager le développement sans la paix.  La bonne gouvernance est indispensable pour une paix durable, a-t-il souligné, en précisant que l’Afrique ne pouvait pas être une exception à cette règle.


Mme MAITE NKOANA-MASHABANE, Ministre des relations et de la coopération internationales de l’Afrique du Sud, a déclaré que le « pan-africanisme et la renaissance africaine » constituaient le thème du cinquantième anniversaire de l’OUA.  Elle a déclaré que les sept économies dont le taux de croissance économique était le plus élevé se trouvent actuellement en Afrique.  Elle a encouragé le Soudan et le Soudan du Sud à mettre en œuvre scrupuleusement les accords qu’ils ont signés.  La Ministre a espéré que le peuple congolais connaisse bientôt la paix, la sécurité et la stabilité.  Elle a fait remarquer que 70% du programme de travail du Conseil de sécurité sont identiques à ceux du Conseil de la paix et de la sécurité de l’Union africaine.  C’est pourquoi, a-t-elle souhaité, ces deux organes doivent coopérer plus étroitement, comme le souligne la résolution 2033 du Conseil de sécurité. 


L’Afrique devrait disposer d’au moins deux sièges permanents au sein du Conseil de sécurité, lorsqu’il y aura la refonte de cet organe, a estimé la Ministre.  Elle a souhaité que des progrès puissent être réalisés sur la question de la composition du Conseil de sécurité d’ici à 2015 et à l’occasion du soixante-dixième anniversaire de l’ONU.  Par ailleurs, elle a estimé que les délibérations relatives aux Objectifs de développement post-2015 ne détournent pas notre attention de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) d’ici à 2015.  Les OMD doivent, a-t-elle insisté, représenter un moyen concret de mesurer les progrès réalisés en faveur des pauvres.


M. NETUMBO NANDI-NDAITWAH, Ministre des affaires étrangères de la Namibie, a estimé que le cinquantième anniversaire de la création de l’Organisation de l’unité africaine, Organisation qui a préfiguré l’Union africaine, devrait être l’occasion d’œuvrer pour la paix, la stabilité et le développement économique.  Il s’est par ailleurs félicité « qu’à l’exception du Sahara occidental, qui demeure encore sous l’occupation honteuse d’un autre pays africain », le continent africain soit libre de toute domination étrangère.  Cependant, a-t-il poursuivi, les conflits subsistent encore.  Les origines profondes de ces conflits doivent être identifiées et les ressources énergétiques doivent faire l’objet d’une gestion prudente et équitable, a-t-il souligné.  Il faudrait, en outre, mettre l’accent sur la bonne gouvernance, la participation des femmes aux processus de paix et le renforcement de l’état de droit. 


L’Afrique, a-t-il rappelé, a adopté une politique de tolérance zéro en matière d’alternance politique anticonstitutionnelle.  À cet égard, il a réaffirmé la position de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) en ce qui concerne Madagascar et exhorté les Nations Unies à en faire de même pour dénoncer les coups d’État dans le monde.  Cette politique de tolérance zéro a parfois eu des revers, a-t-il dit, en faisant remarquer que l’intégration de certains anciens combattants à des gouvernements dits inclusifs avait contribué à saper les efforts entrepris pour faire obstacle à des coups d’État.  Il a conclu en appelant la communauté internationale à soutenir les efforts des pays africains engagés à mettre en place l’architecture africaine de paix et de sécurité.


M. MOHAMED KAMEL AMR, Ministre des affaires étrangères de l’Égypte, a noté que l’expérience de ces dernières décennies montre que pour parvenir à une solution durable aux conflits, il était nécessaire de s’attaquer aux racines mêmes du problème.  Il a ajouté que cela pouvait se faire à travers des processus de paix véritables, le dialogue politique, le développement économique, l’éducation et la lutte contre la prolifération illégale des armes.  Il a également déclaré que les solutions militaires aux conflits étaient pour la plupart inadéquates et tendaient à exacerber les conflits, tout en causant de nombreuses victimes civiles.  Il a estimé que l’Afrique devrait être fière de ce qu’elle a accompli pour faire face aux défis de la paix et de la sécurité.  Citant ensuite un rapport du Secrétaire général, le Ministre a noté que le nombre de pays africains en conflit était passé de 14 à la fin du siècle dernier à 4 à la fin de la première décennie du XXIe siècle.  Il a estimé que les fonds ainsi préservés, grâce à la paix, pourraient servir au développement économique.


Les progrès réalisés dans la gestion des conflits en Afrique sont le résultat des nombreux efforts entrepris par les pays africains dans le cadre de la démocratisation et de l’état de droit, et aussi d’une bonne croissance économique, a expliqué le Ministre.  Il a également salué les efforts des pays africains visant à mettre en œuvre les mécanismes institutionnels de l’Union africaine et des organisations sous-régionales.  L’Égypte soutient, a-t-il dit, l’architecture de paix et de sécurité de l’Union africaine.  Le Ministre a affirmé que la mise en place du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (MAEP), auquel 31 pays du continent ont adhéré, est un succès dans le cadre de la stabilité de l’Afrique.  Il a aussi salué l’adoption du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique comme vision de développement pour le continent, ce qui témoigne, a-t-il noté, de la reconnaissance par les Africains du lien entre la stabilité, la paix et le développement. 


Le continent africain est, malheureusement aujourd’hui, confronté, à de nouveaux défis sécuritaires tels que la criminalité transfrontalière, le terrorisme, le trafic de drogues et la piraterie qui se greffent aux implications politiques, sécuritaires et humanitaires relatives aux changements climatiques et la désertification, a regretté M. Amr, qui a souhaité, à cet égard, un renforcement du partenariat entre les Nations Unies et l’Union africaine.  Rappelant que ce partenariat datait de 1965, il a proposé de lancer une discussion entre les deux organisations pour établir un nouveau partenariat, qui remplacerait le Programme de renforcement des capacités en matière de prévention des conflits dont l’expiration aura lieu en 2016.  Le Ministre a dénoncé par ailleurs « l’injustice dont est victime l’Afrique, dont la représentation au sein du Conseil de sécurité demeure insuffisante, en dépit du fait que 70% des délibérations du Conseil concernent directement ce continent ».


M. HANNA SERWAA TETTEH, Ministre des affaires étrangères et de l’intégration régionale du Ghana, a rappelé que la paix et la stabilité sont des conditions préalables essentielles pour le développement socioéconomique en Afrique.  Dans son ensemble, l’Afrique a réalisé des progrès considérables au cours des deux dernières décennies.  Néanmoins, des conflits subsistent dans la ceinture saharienne et la région des Grands Lacs.  Des problèmes transfrontières, tels que la traite des personnes, la piraterie, le trafic illicite des armes et des stupéfiants sont également préoccupants.


Pour prévenir les conflits en Afrique, il faudrait examiner les causes profondes de l’instabilité, dont l’exclusion sociale et politique, le sort des populations vulnérables comme les jeunes sans emploi, l’inégalité des sexes, l’extrême pauvreté et les disparités économiques.  Le Ministre a demandé à l’ONU et à toutes les parties intéressées d’accorder une importance particulière à la gestion des élections pour que celles-ci contribuent à la gouvernance démocratique et à une paix durable sur le continent.  Récemment, l’Afrique a contribué aux efforts de paix en établissant le Conseil de paix et de sécurité, le système d’alerte rapide à l’échelle du continent, le Groupe des Sages et la Force africaine en attente.


La communauté internationale doit continuer à concentrer ses efforts sur les processus de consolidation de la paix, y compris la prévention des conflits, a poursuivi M. Tetteh.  Rappelant la Réunion de haut niveau des Nations Unies sur les besoins de l’Afrique en matière de développement et la résolution 66/293 de l’Assemblée générale établissant les mécanismes de surveillance des Nations Unies, le Ministre a souhaité le renforcement du partenariat global pour l’Afrique.  Par ailleurs, « l’Union africaine doit agir rapidement et pacifiquement face au fléau des conflits sur le continent », a reconnu le Ministre.  En particulier, il a encouragé l’ONU et la communauté internationale à appuyer l’Union africaine pour permettre à la Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (AFISMA) de remplir son mandat pendant la transition vers une opération de stabilisation des Nations Unies.  S’agissant du Mali, il a précisé qu’il faudrait se pencher sur les divisions qui existent tant au sein du Gouvernement qu’avec les Forces maliennes de défense et de sécurité, et préparer les élections présidentielle et parlementaires respectivement des 7 et 21 juillet. 


M. EMMANUEL ISSOZE NGONDET, Ministre des affaires étrangères du Gabon, a déclaré qu’il ne peut y avoir de construction nationale sans paix et que la prévention et le règlement pacifique des conflits ont toujours été au cœur des priorités des États africains.  Il a ensuite indiqué que le Gabon avait contribué à la recherche de solutions aux différentes crises qui ont affecté certains pays tels que l’Angola, le Tchad, le Congo et, récemment, la République centrafricaine.  Il a souligné que le règlement pacifique des conflits doit être le premier recours comme cela a été le cas dans la facilitation gabonaise pour les accords inhérents à la situation en Centrafrique.  Il a appelé les Nations Unies et la communauté internationale à apporter leur appui au dispositif sous-régional chargé d’assurer la mise en œuvre de ces accords et à la transition définie sous l’égide de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC).


Le Ministre a ensuite rappelé que les pères fondateurs de l’Union africaine avaient la vision d’une approche pacifique de résolution des conflits.  Ce qui les a guidés à adopter des mesures telles que l’intangibilité des frontières et la mise sur pied de la Commission de médiation, de conciliation et d’Arbitrage (CMCA).  C’est dans le même veine, a-t-il affirmé, que l’Union africaine, ayant pris le relais de l’OUA en 2002, a mis en place une architecture de prévention et de résolution pacifique des conflits comprenant, entre autres, le Mécanisme d’alerte rapide et le Conseil de paix et de sécurité.  Il a par ailleurs dit son inquiétude face à la situation de certains pays en conflits et a souhaité que les processus politiques soient privilégiés pour le règlement des conflits qui ont cours, notamment, en RDC, au Mali, en Somalie, en Guinée-Bissau et sur la question du Sahara occidental.


M. Ngondet a par ailleurs salué le partenariat stratégique établi entre les Nations Unies et l’Union africaine depuis septembre 2006, ainsi que les rencontres périodiques entre le Conseil de sécurité des Nations Unies et le Conseil de paix et de sécurité de l’union africaine.  Il a souhaité, dans un souci d’efficience, que cette collaboration puisse également porter sur la culture de la prévention des conflits.  Il a aussi plaidé pour que le règlement des conflits passe par des mécanismes judiciaires, notamment la Cour internationale de Justice (CIJ) et la Cour permanente d’arbitrage (CPA).  Il a également souhaité que le règlement pacifique des conflits puisse s’appuyer sur l’amélioration de la gouvernance, la démocratie et les droits de l’homme.


M. AUGUSTINE KPEHE NGAFUAN, Ministre des affaires étrangères du Libéria, a souligné l’expérience du relèvement économique et social de son pays après 14 années de guerre civile et 10 années de maintien de la paix.  Le Libéria, qui était autrefois un havre de paix et de stabilité, a connu un violent coup d’État, le 12 avril 1980, organisé par 17 membres des forces armées du Libéria.  Ces derniers avaient assassiné le Président du Libéria, M. William R. Tolbert, qui était à cette date le Président en exercice de l’OUA.  M. Kpehe Ngafuan a précisé que les conséquences économiques et sociales de ce coup d’État avaient donné lieu à des épisodes de violence avant d’aboutir à une véritable guerre civile en 1989.  Dans les 14 années qui ont suivi, le Libéria n’a pas connu un instant de paix, a-t-il dit, en rappelant que son pays était rapidement envahi par des armes de guerre.  « L’épais nuage de la guerre s’est étendu sur les pays voisins et le Bassin du fleuve Mano -comprenant le Libéria, la Guinée, la Côte d’Ivoire et la Sierra Leone- qui est ainsi devenu l’une des régions les plus dangereuses du monde. 


La nature cruelle du conflit libérien a entraîné toute une série d’efforts de règlement de conflits lancés, notamment, par la CEDEAO, avec l’appui de l’Union africaine et de l’ONU.  Le conflit civil a pris fin avec un accord de paix global signé en août 2003, à Accra, au Ghana.  Il s’est traduit par le déploiement de 15 000 Casques bleus et la mise en place d’un gouvernement de transition chargé de superviser des élections libres, équitables et démocratiques et qui ont permis l’élection de la première femme présidente du continent africain, Mme Ellen Johnson-Sirleaf.  « Cette année, nous allons fêter le dixième anniversaire d’une paix sans interruption au Libéria », s’est-t-il félicité.  Le représentant a ajouté que, même si l’économie libérienne a toujours des difficultés, elle fait aujourd’hui partie des 20 économies du monde dont le taux de croissance est élevé.  À cet égard, il a exprimé la gratitude de son pays à tous les pays et organisations internationales qui ont permis au Libéria de passer de la guerre à la paix, puis au redressement économique. 


Il a ensuite souligné l’importance des institutions africaines en place pour promouvoir la paix, le développement et la stabilité, en citant l’architecture pour la paix et de sécurité, le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), et le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs.  Il a salué les progrès considérables qui permettent aujourd’hui à l’Afrique de s’imposer comme un pôle de croissance économique.  « Nous devons être conscients des conséquences extrêmement graves des conflits, a-t-il insisté en appelant à promouvoir la prévention des conflits plutôt que leur règlement.  Il faudrait aussi encourager la bonne gouvernance et la démocratie dans nos pays, a-t-il dit en appelant à régler nos différends par les urnes plutôt que par les armes.  À cet égard, il s’est réjoui de l’adoption récente du Traité sur le commerce des armes.


M. ALI AHMED KARTI, Ministre des affaires étrangères du Soudan, a soutenu que les conflits en Afrique résultaient, notamment, de rivalités dans la gestion des ressources naturelles et parfois de phénomènes naturels tels que la désertification et les changements climatiques.  Il a indiqué que le Gouvernement soudanais venait de mettre fin à l’un des plus longs conflits africains, et ce, par le biais des négociations et des mécanismes africains.  Il a lancé un appel à la communauté internationale afin qu’elle mette la pression sur les groupes rebelles qui n’ont pas encore souscrit aux accords de paix soudanais de le faire au plus vite.  Il a également dénoncé les « soi-disant partenaires de l’Afrique » qui ont essayé d’imposer leur médiation dans le conflit soudanais avec des résultats infructueux. 


Le continent africain possède de riches traditions qui ont fait leur preuve en matière de règlement des conflits, a-t-il dit, en précisant que ces traditions avaient guidé les travaux des pères fondateurs de l’OUA.  Il a ensuite indiqué qu’il revenait en premier lieu à l’Afrique de prendre les décisions sur les sujets les concernant.  Il a par ailleurs plaidé pour l’augmentation des sièges au sein du Conseil de sécurité, afin, a-t-il expliqué, de mieux entendre le continent qui est le plus touché par les conflits. 


M. EFFRON C. LUNGU, Ministre des affaires étrangères de la Zambie, a déclaré que les guerres et conflits -internes ou entre États- qui avaient éclaté ces dernières années en Afrique, avaient pour causes communes la corruption politique, le non-respect du droit, la distribution inégale des ressources comme la terre et les richesses minières, la pauvreté et les violations des droits de l’homme.  Les efforts visant à régler un conflit en Afrique devraient se concentrer sur les causes profondes de ce conflit, afin d’établir une base solide pour les stratégies de prévention et de règlement.  La médiation doit aussi se concentrer sur la création de canaux de communication efficaces entre les parties afin de cultiver la confiance et l’esprit de négociation entre les parties concernées.


Le règlement des conflits peut être géré efficacement si les canaux diplomatiques axent davantage les efforts sur l’ouverture d’un dialogue politique entre les dirigeants des pays, des factions, des milices et autres groupes d’intérêt dans toutes les situations de conflit.  Il est également impératif que des mécanismes variés de règlement pacifique des conflits, comme la médiation, l’arbitrage, la négociation, les opérations de maintien de la paix soient employés aux niveaux local, régional et international. 


Après avoir félicité la signature de l’Accord-cadre de coopération, de sécurité et paix pour stabiliser la région est de la République démocratique du Congo, le 24 février dernier, M. Lungu a rappelé que le conflit dans cette région a des dimensions régionales parce que les peuples de la région des Grands Lacs sont liés aux plans social, économique, culturel et linguistique.  Cela veut dire qu’une instabilité générée par des causes internes dans un pays pourrait rapidement créer une dynamique de conflits dans toute la région.  La persistance d’attaques aux frontières a provoqué une profonde insécurité dans la région et ont été la source de déstabilisation politique pour les pays voisins, y compris la Zambie.  La signature du Pacte de sécurité, de stabilité et de développement par les chefs d’État et de gouvernements, lors de la conférence internationale sur la région des Grands Lacs en 2006 au Kenya, avait marqué un nouveau chapitre vers la stabilisation de la région des Grands Lacs.  La Zambie reste engagée au processus de paix en République démocratique du Congo et la recherche du retour à la paix et à la sécurité dans l’est de ce pays.


M. OLUGBENGA ASHIRU, Ministre des affaires étrangères du Nigéria, a souligné que les situations au Sahel, dans la région des Grands Lacs et dans la corne de l’Afrique représentaient plus de 60% du programme de travail du Conseil de sécurité.  La plupart des conflits sont exacerbés par un manque de connaissance de leurs causes et par l’introduction d’autres éléments, tels que la prolifération des armes légères et de petit calibre ou l’exploitation illicite des ressources naturelles, y compris le vol de pétrole.  Cependant, a souligné le Ministre, « le climat économique et politique général en Afrique est favorable », grâce aux progrès réalisés sur la voie de la démocratie, de la bonne gouvernance et du développement.


M. MANUEL AUGUSTO, Secrétaire d’État aux relations extérieures de l’Angola, a déclaré que, malgré les progrès dans la consolidation de la démocratie et le développement économique, les pays africains continuaient d’affronter de nombreux défis dans la prévention et la résolution de conflits, dans la lutte contre la pauvreté, les changements climatiques et les crises humanitaires.  La transformation de l’Organisation de l’unité africaine en Union africaine a donné à l’Organisation plus de capacités opérationnelles pour assurer la paix et le développement durable sur le continent.  L’Angola reconnaît le rôle important que jouent le Conseil de paix et de sécurité, le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs, le système d’alerte rapide et le NEPAD. 


Il n’en demeure pas moins que l’Angola reste profondément préoccupé que la prise de pouvoir par des moyens inconstitutionnels reste d’actualité dans certains pays contrairement aux principes fondamentaux et aux valeurs de la Charte des Nations Unies et de l’Union africaine.  L’Angola est engagé à la recherche de solutions pacifiques aux conflits au Mali, en Guinée-Bissau, en République centrafricaine et dans la région des Grands Lacs.  Le dialogue ouvert et inclusif demeure la voie la plus appropriée pour trouver des solutions crédibles, consensuelles et équilibrées.  En outre, l’Angola condamne le coup d’État qui a eu lieu en République centrafricaine et appelle à la mise en œuvre des mesures de restauration de la légalité et de l’Accord de paix de Libreville.


Avec d’autres pays, l’Angola joue un rôle actif dans la recherche de la paix et la stabilité dans la région des Grands Lacs.  À cet égard, M. Augusto a félicité l’initiative du Secrétaire général des Nations Unies qui a conduit à la signature, le 24 février dernier, de l’Accord d’Addis-Abeba sur le mécanisme de paix, de sécurité et de coopération en République démocratique du Congo et dans la région ».  C’est dans cet esprit que le 12 mars 2013, les Chefs d’État angolais, sud-africain et congolais s’étaient rencontrés au cours d’un sommet tripartite, dans la capitale angolaise, afin d’approfondir la réflexion sur les moyens de renforcer et de rendre effectif les mécanismes qui devraient être mis en place pour assurer la mise en œuvre durable de l’Accord.


Le Conseil de sécurité des Nations Unies doit continuer à jouer un rôle vital pour la paix et la sécurité en Afrique, notamment dans le cadre du Chapitre VIII de la Charte relatif aux accords régionaux.  M. Ashiru a rappelé que plus de 70% des opérations et des soldats de maintien de la paix se trouvent en Afrique.  À cet égard, il a salué l’adoption, ce matin, de la résolution 2100 sur le Mali par le Conseil de sécurité, qui illustre la synergie entre l’ONU et les mécanismes régionaux pour résoudre le conflit.  En outre, il a appuyé le travail de la Commission de consolidation de la paix dans la région.


Évoquant les questions de la sécurité humaine et la responsabilité de protéger, le Ministre a regretté l’intervention tardive du Conseil de sécurité au Libéria, en Sierra Leone, au Rwanda dans les années 1990 et, récemment, au Mali.  La communauté internationale doit pouvoir répondre rapidement et efficacement quand la paix et la sécurité sont menacées, a-t-il dit.  Soulignant l’importance de la prévention des conflits, il a rappelé que le Président du Nigéria, M. Goodluck Jonathan, avait proposé l’établissement, sous les auspices de l’ONU, d’une « commission de médiation des conflits ». 


Les 12 et 13 avril 2013, l’Union africaine a élaboré avec le Groupe des Sages un réseau panafricain des Sages (« PanWise ») et un plan d’action pour la période 2013-2014 afin d’harmoniser les initiatives régionales et internationales sur la prévention des conflits et la consolidation de la paix.  Le Nigéria a également participé, depuis 1948, à 40 des 59 missions de maintien de la paix de l’ONU dans le monde.  À ce sujet, M. Ashiru a appelé la communauté internationale à appuyer les efforts visant à rendre opérationnelle la capacité de déploiement rapide de la Force africaine en attente.     


Table ronde I : « Promouvoir la coopération entre l’Union africaine et l’Organisation des Nations Unies autour du lien entre paix, sécurité et développement »


La première table ronde animée par M. COLIN KEATING, Directeur général de l’organisation Security Council Report avait pour thème « Promouvoir la coopération entre l’Union africaine et l’Organisation des Nations Unies autour du lien entre paix, sécurité et développement ».


Présentations


Le Professeur MAHMOOD MAMDANI, Directeur de l’Institut de recherches sociales à l’Université de Columbia, a appelé à la démocratisation du fonctionnement du Conseil de sécurité et de ses règles.  Il a souligné qu’il était indispensable que la composition du Conseil s’ouvre à l’Afrique.  Il s’est inquiété que l’ONU semble se transformer en une institution de gouvernance mondiale dominée par seulement cinq pays, en estimant que le droit de veto signifiait que les cinq membres permanents pouvaient agir en toute impunité.  Il a cité le génocide rwandais et la fin de l’apartheid en Afrique, intervenus tous deux en 1994, et qui ont profondément changé l’Afrique.  Le panéliste s’est inquiété du fonctionnement non démocratique des Comités 1267 et 1373 du Conseil de sécurité, qui ne recourent pas à un tribunal pour l’examen des éléments de preuve et ne disposent pas d’un mécanisme d’appel.  La procédure d’inscription sur la liste peut être utilisée comme une véritable menace, a-t-il estimé.


Le Professeur EMMANUEL K. AKYEAMPONG, Professeur d’histoire africaine à l’Université de Harvard, a présenté les différentes manières dont l’Union africaine et l’ONU pourraient œuvrer ensemble dans l’intérêt du développement.  Il ne faudrait pas sous-estimer l’influence de la chute de l’Union soviétique et de l’événement de la place Tien An Men sur l’Afrique, a-t-il dit, en citant par exemple la « révolution de velours » au Bénin ou encore la fin des combats en Angola et au Mozambique.   


À son tour, le Professeur ABDUL KARIM BANGURA, de Howard University, a parlé de la question de respect, en notant que l’intervention des puissances occidentales en Libye représentait un des pires cas de non-respect de l’Union africaine.  Il a estimé que les puissances intervenues en Libye avaient privilégié la mise en œuvre de leur agenda de politique étrangère au mépris de l’Union africaine et de ses initiatives.  Il a estimé qu’il était intéressant de voir, par le biais de Youtube, Facebook et Twitter, si le printemps arabe n’avait pas été créé par des ONG occidentales.  Il a appelé à respecter les moyens utilisés par l’Afrique pour régler les conflits, en tenant aussi compte de la paix à travers le colonialisme.  Des études nous montrent que les projets démocratiques et la redistribution des richesses ne sont pas liés et qu’il n’y a pas de corrélation entre la bonne gouvernance et la démocratie d’un côté et l’augmentation des revenus de l’autre.  Il a appelé à se libérer des mythes et clichés, en expliquant que des études démontrent que l’ethnicité, ou l’Islam, étaient des éléments tout à fait marginaux dans le déclenchement de conflits en Afrique.  Les interventions étrangères et l’influence des complexes militaro-industriels sont beaucoup plus déterminantes, a-t-il dit.


M. CHEIKH TIDANE GADIO, ancien Ministre des affaires étrangères du Sénégal, a déclaré que les Africains devraient cesser de demander l’argent européen et américain pour régler des problèmes africains.  Pour réussir, il faut être en mesure de fournir de l’argent africain à des projets africains, a-t-il insisté.  Il a jugé indispensable de s’appuyer sur les leçons apprises de la crise malienne.  Cette première leçon, a-t-il dit, est l’extrême vulnérabilité de nos États.  Ce qui est arrivé au Mali peut arriver à de nombreux pays africains, a-t-il fait remarquer, en précisant que certains pays africains ne disposent d’aucun radar pour surveiller leur ciel.  Seul le Tchad a su démontrer sa préparation à réagir face à des menaces extérieures, a-t-il noté.  M. Gadio a souligné le « choc des agendas » qui s’est produit au Mali, en citant l’agenda des islamistes, celui des salafistes vaincus en Algérie et en Mauritanie, l’agenda des militaires putschistes, l’agenda des séparatistes ou encore l’agenda de l’économie criminelle qui s’est renforcé en Afrique.  « Nous avons même des Colombiens qui vivent maintenant dans le Sahel », a–t-il fait observer.


Au lieu d’appeler un sommet de la CEDEAO pour s’attaquer au problème du Mali, nous aurions dû appeler un sommet de l’Union africaine, a-t-il dit.  « La crise malienne nous démontre qu’il nous faut revoir le mécanisme de prévention des conflits en Afrique » et réviser nos visions du passé afin de mieux articuler le combat des organisations sous-régionales avec celui de l’Union africaine.  Il a rappelé que N’Krumah disait déjà, il y a 50 ans, que la sécurité précède le développement.  Parmi les initiatives à prendre, il a suggéré la création de forces spéciales d’intervention africaine stationnée dans une base militaire panafricaine.  Une telle démarche est indispensable, a-t-il souligné, en regrettant que les 54 pays africains n’aient pu mettre à disposition 10 000 soldats pour le Darfour alors que l’on compte deux millions de soldats. 


Réagissant au propos du professeur Abdul Karim Bangura, le représentant de l’Égypte a insisté que le printemps arabe égyptien était né dans les rues du Caire et était le fruit de nombreuses années de frustration. 


Table ronde II: « La portée et la complexité des conflits en Afrique (Mali, Somalie, Soudan et République démocratique du Congo) et efforts déployés pour relever ces défis »


Présentations


La seconde table ronde, animée par M. MAGED ABDELAZIZ, Secrétaire général adjoint et Conseiller spécial du Secrétaire général pour l’Afrique, avait pour thème « La portée et la complexité des conflits en Afrique (Mali, Somalie, Soudan et République démocratique du Congo) et efforts déployés pour relever ces défis ». 


Le premier intervenant, M. MOLEFI KETE ASANTE, Professeur d’études afro-américaines à l’Université de Temple (États-Unis), a regretté que des conflits meurtriers fassent de nombreuses victimes en Afrique comme ce fut le cas au Rwanda et au Soudan où les dissensions avec le sud, sur fond de rivalités pour le contrôle des richesses pétrolières, ont conduit à plus de 2 millions de morts.  Il a ajouté que certains conflits africains étaient dus aux croyances et à la religion, et parfois à des frustrations ou discriminations vécues par certains groupes de la population, comme ce fut le cas en Afrique du Sud du temps de l’apartheid et au Soudan.  Il a lancé un appel afin que les solutions aux conflits africains puissent intégrer les valeurs et traditions ancestrales propres au continent. 


M. VASU GOUNDEN, Fondateur et Directeur exécutif du Centre africain pour la résolution constructive des conflits, a indiqué que la diversité d’identités au sein de la population africaine, la pauvreté, l’intolérance religieuse, la prolifération des drogues et des armes, constituent le cocktail explosif qui crée et intensifie la plupart des conflits en Afrique.  Il a estimé que des solutions à court terme ne pouvaient régler les conflits et que la transition vers un continent pacifique était un processus de longue haleine.  Pour ce faire, il a suggéré de mettre en place des mécanismes visant à transformer de manière profonde les sociétés africaines.  Il a également proposé l’amélioration de l’alerte précoce des conflits en Afrique, afin de les juguler rapidement.  Si la prévention échoue, a-t-il dit, la médiation doit suivre.  Il a également plaidé pour des investissements dans les infrastructures et dans le capital humain africain, car, a-t-il noté, la pauvreté tue autant que les armes en Afrique.


M. BOUBACAR N’DIAYE, Professeur d’études africaines et de Sciences politiques au Collège de Wooster (États-Unis), a affirmé que les Africains, plus de 50 ans après l’indépendance, n’ont pas encore réglé la question des États postcoloniaux qui ont été mis en place pour desservir les populations.  Il a expliqué que cette situation conduisait à des conflits sans fin, et c’est pourquoi, a-t-il proposé, il est nécessaire de se libérer du joug colonial.  Il a également évoqué la crise de la gouvernance qui se manifeste, par exemple, par la mauvaise gestion des ressources des pays par une minorité de dirigeants.  Il a ensuite dénoncé le déficit de gestion et de prévention des conflits dans les États africains.  Il a aussi déploré que le secteur sécuritaire ait pour but, dans les pays africains, de contenir les oppositions politiques.  Si la sécurité était gérée de manière quelque peu orthodoxe, les conflits surviendraient moins en Afrique, a-t-il estimé.


M. COLIN KEATING, Fondateur et Directeur exécutif du « Security Council Report », a affirmé que pendant le génocide rwandais de 1994, les Nations Unies et l’OUA avaient échoué à faire éviter les massacres.  Il a cité cet exemple pour mettre en exergue les atermoiements et les contradictions de la communauté internationale face à la résolution des conflits.  « Nous avons le devoir collectif d’agir, mais nous échouons en rejetant des propositions censées permettre de sécuriser les populations », a-t-il regretté.  Au cours de la présidence du Conseil de sécurité par son pays -la Nouvelle-Zélande- en 1994, le Conseil adoptait parfois des positions causant des frustrations pour les parties en conflit.  Il a également estimé que la communauté internationale ne devrait pas sélectionner les situations de conflits où elle devrait intervenir, seulement à cause des richesses de ces pays.  Il a rappelé, en outre, que la prévention est toujours moins coûteuse, en termes financiers et humains que l’intervention.  Il a également plaidé pour l’appropriation régionale et locale du règlement des conflits.  


Échange interactif


Au cours de l’échange interactif qui a suivi les exposés, le représentant de la République démocratique du Congo (RDC) a souhaité que les pourparlers de Kampala (Ouganda) puissent déboucher sur une paix durable en RDC, et il a remercié les pays contributeurs de troupes de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).  Le représentant du Soudan a, pour sa part, fustigé les arguments du professeur Asante qui s’est exprimé sur son pays et sur l’Afrique en général sans avoir fait le déplacement sur le terrain.  Il a aussi regretté la comparaison, faite par le panéliste, entre le régime soudanais et le régime d’apartheid d’Afrique du Sud.  Il a rappelé que Khartoum avait été le premier pays à avoir offert un passeport diplomatique à Nelson Mandela après sa libération de prison.  Le professeur Asante a réagi en précisant qu’il s’est rendu en Afrique plus de 80 fois.  Le représentant du Cap-Vert a appelé de tous ses vœux l’avènement d’une Afrique inventive et créatrice qui soit libérée de conflits et promeuve la solidarité.  Le modérateur a souhaité, à la fin de l’échange, qu’un débat pareil soit organisé de nouveau afin de permettre à ceux qui n’ont pas pu s’exprimer de pouvoir le faire.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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