En cours au Siège de l'ONU

CS/10846

Des progrès importants ont été accomplis mais le TPIY et le TPIR demeurent confrontés à des difficultés, soulignent les responsables de ces deux juridictions ad hoc

5/12/2012
Conseil de sécuritéCS/10846
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil de sécurité

6880e séance – après-midi


DES PROGRÈS IMPORTANTS ONT ÉTÉ ACCOMPLIS MAIS LE TPIY ET LE TPIR DEMEURENT CONFRONTÉS

À DES DIFFICULTÉS, SOULIGNENT LES RESPONSABLES DE CES DEUX JURIDICTIONS AD HOC


Le Conseil de sécurité a entendu, cet après-midi, les Présidents et Procureurs des Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda, qui ont fait le point sur la stratégie d’achèvement de leurs travaux respectifs.


Le Président du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et Président du Mécanisme pour les Tribunaux pénaux internationaux, M. Theodor Meron, a reconnu que certains procès avaient pris du retard.  Il a admis que le TPIY restait confronté à une multitude de difficultés pour respecter les délais prévus.  Cela explique que son « Mécanisme résiduel » chargé de prendre le relais à terme du reliquat des activités du TPIY n’entrera en fonctions que le 1er juillet prochain, alors que celui du TPIR est fonctionnel depuis le 1er juillet dernier.  Il a reconnu que certains membres du Conseil pouvaient exprimer des frustrations face à cet état de fait.  Reconnaissant que la lenteur et le coût des procès étaient souvent perçus comme un échec de la justice pénale internationale, il a assuré qu’il avait « particulièrement à cœur de prouver à la communauté internationale que l’équité et l’efficacité ne s’excluaient pas mutuellement ».


Pour sa part, le Président du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), M. Vagn Joensen, a précisé que le transfert à la Division d’Arusha du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles du Tribunal avait bien progressé.  La conclusion des procédures devant la Chambre d’appel est prévue à la fin de 2014.  Outre les problèmes de ressources en personnel, le juge Joensen a aussi évoqué celui posé par les personnes acquittées, en soulignant la nécessité de leur trouver un pays d’accueil.  Il a rappelé que la réinstallation des personnes acquittées était une expression fondamentale de l’état de droit.


Quant au Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), M. Serge Brammertz, il s’est félicité de la coopération quotidienne entre les États de l’ex-Yougoslavie et le Bureau qu’il dirige, coopération qui est indispensable, a-t-il souligné, pour mener à bien les derniers procès en cours.  « La Croatie, la Serbie et la Bosnie-Herzégovine continuent de donner suite à nos demandes d’assistance dans les meilleurs délais et ont pleinement répondu à nos attentes », a-t-il dit.  Le Procureur Brammertz a évoqué par ailleurs l’acquittement d’anciens chefs militaires croates et kosovars, prononcé récemment par le TPIY.  Il a reconnu que les arrêts de la Chambre d’appel avaient « suscité un certain nombre de réactions sur la capacité du Tribunal de promouvoir la justice en ex-Yougoslavie ».  M. Brammertz a encouragé les autorités nationales dans la région à continuer de lutter contre l’impunité dans leur ressort, notamment en renforçant la coopération régionale et en coopérant avec lui.


Enfin, le Procureur du Tribunal pénal international pour le Rwanda et Procureur du Mécanisme international chargé d’exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux internationaux, M. Hassan Bubacar Jallow, a indiqué que la priorité, pour les prochains mois, viserait à se prononcer sur les appels formés devant le Tribunal et à préparer l’archivage des documents du Bureau en vue de leur transfert au Mécanisme résiduel.  Notant la charge de travail accrue pour la Chambre d’appel du Tribunal -31 appels ont été interjetés concernant 9 affaires-, M. Jallow a avancé que le Tribunal devrait achever ses travaux d’ici à 2014, en conformité avec la stratégie adoptée par le Conseil.  Le principal défi du Mécanisme est l’arrestation et le jugement des trois derniers suspects inculpés, a-t-il expliqué.


Lors des échanges qui ont suivi, la majorité des délégations se sont félicitées de la mise en œuvre en cours ou prévue à brève échéance du Mécanisme résiduel pour chacun des deux Tribunaux.  Elles ont estimé que l’on pouvait tirer un bilan positif de la justice rendue par ces premiers tribunaux ad hoc depuis les Tribunaux de Nuremberg et de Tokyo après la Deuxième Guerre mondiale.


Parmi les voix discordantes, la délégation de la Fédération de Russie a critiqué sévèrement les acquittements récemment prononcés par le TPIY.  Le représentant de la Serbie, quant à lui, a fait un long exposé énumérant dans le détail les nombreuses exactions qui avaient été commises contre des Serbes lors de la reconquête par la Croatie de ses régions peuplées par les Serbes et lors du conflit au Kosovo.  « Les Serbes ont-ils droit à la justice? » a-t-il demandé.


La Croatie a souligné en revanche que l’acquittement de ses généraux constituait une nouvelle preuve que l’État croate, en tant qu’institution, n’avait commis aucun crime de guerre au cours du conflit dans les Balkans.  En ce qui concerne les crimes qui ont pu être le fait d’individus isolés, la délégation croate a affirmé que son gouvernement avait poursuivi les auteurs de ces crimes et qu’il s’était engagé à continuer de le faire.


Quant à la Bosnie-Herzégovine, elle souscrit entièrement à l’idée que la coopération entre les États de la région est très importante pour faire en sorte que les crimes commis dans l’ex-Yougoslavie soient jugés.  Elle a rappelé cependant qu’elle supportait le plus lourd fardeau des pays de la région en ce qui concerne les poursuites pour crimes de guerre.


Enfin, la délégation du Rwanda a exhorté les États de la région à coopérer avec le Mécanisme résiduel afin d’appréhender les génocidaires: « De nombreux fugitifs vivent tranquillement dans d’autres régions du monde, notamment en Europe », a-t-il déploré.  « Les archives du TPIR doivent rester la propriété de l’ONU car le génocide du Rwanda était un crime commis contre l’humanité », a-t-il affirmé, avant de demander que ces archives soient déposées à Kigali.


TRIBUNAL INTERNATIONAL CHARGÉ DE JUGER LES PERSONNES ACCUSÉES DE VIOLATIONS GRAVES DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE COMMISES SUR LE TERRITOIRE DE L’EX-YOUGOSLAVIE DEPUIS 1991


TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL CHARGÉ DE JUGER LES PERSONNES ACCUSÉES D’ACTES DE GÉNOCIDE OU D’AUTRES VIOLATIONS GRAVES DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE COMMIS SUR LE TERRITOIRE DU RWANDA ET LES CITOYENS RWANDAIS ACCUSÉS DE TELS ACTES OU VIOLATIONS COMMIS SUR LE TERRITOIRE D’ÉTATS VOISINS ENTRE LE 1ER JANVIER ET LE 31 DÉCEMBRE 1994


Rapport du Tribunal international pour l’ex-Yougoslavie (S/2012/592)


Rapport du Tribunal pénal international pour le Rwanda (S/2012/594)


Lettre datée du 14 novembre 2012, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Président du Tribunal pénal international chargé de juger les personnes accusées d’actes de génocide ou d’autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais accusés de tels actes ou violations commis sur le territoire d’États voisins entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994 (S/2012/836)


Lettre datée du 16 novembre 2012, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Président du Tribunal international chargé de juger les personnes accusées de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (S/2012/847)


Lettre datée du 16 novembre 2012, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Président du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (S/2012/849)


Déclarations


M. THEODOR MERON, Président du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et Président du Mécanisme pour les Tribunaux pénaux internationaux, a évoqué tout d’abord la stratégie d’achèvement des travaux du TPIY, en soulignant que celui-ci progressait à grands pas vers cette conclusion.  Il a cité les dernières affaires jugées ou celles en cours, en précisant que le jugement de M. Radovan Karadžić aurait lieu d’ici au 31 décembre 2014; celui de M. Ratko Mladic est prévu pour le 31 juillet 2016.  Il a reconnu que certains procès avaient pris du retard, celui de Vojislav Šešelj (par exemple ne devant pas prendre fin avant juillet prochain.  Après cette date, seules les affaires concernant MM. Radovan Karadžić, Goran Hadzić et Ratko Mladić seront pendantes.


Après avoir évoqué les affaires en appel, le juge Meron a reconnu que le TPIY restait confronté à une multitude de difficultés pour respecter les délais prévus dans certaines affaires.  Il a reconnu que certains membres du Conseil pouvaient ressentir une certaine frustration devant l’« approche des échéances, surtout lorsque les prévisions mises à jour ne répondent pas aux attentes ».  Reconnaissant qu’il partageait cette frustration, il a néanmoins attiré l’attention sur le fait que la prévision de la date de clôture d’un procès « relevait plus de l’art que de la science » et que « même la gestion la plus experte des procès ne pouvait prévenir tout risque de retard ».  Il a cité, parmi les obstacles, le départ de fonctionnaires chevronnés ou le refus de comparaître de témoins, sans parler de la traduction des pièces du dossier dans la langue des personnes mises en cause.


Malgré ces retards, « il est incontestable que les travaux accomplis à ce jour par le Tribunal et l’héritage qu’il laissera sont déjà d’une importance primordiale.  Le Tribunal a établi une jurisprudence solide », a-t-il souligné.  Pour le juge Meron, le TPIY « a transformé pour toujours le paysage de la justice internationale, tout en respectant pleinement les droits des accusés et le principe de la légalité ».  « Le Tribunal a largement contribué à ouvrir la voie à une ère nouvelle en matière d’établissement des responsabilités et à un engagement nouveau de toute la communauté internationale en faveur de la justice », des réalisations que le juge Meron a qualifiées d’« inestimables ».


Le Président du TPIY a rappelé qu’en raison des retards précédemment évoqués, il avait souligné la nécessité de proroger le mandat des juges permanents du Tribunal et de certains juges ad litem.  Les procès ne pouvant être interrompus à mi-chemin, il a demandé au Conseil de bien vouloir se pencher sur cette question dans les meilleurs délais.


Le juge Meron a ensuite évoqué l’entrée en fonction du Mécanisme pour les Tribunaux pénaux internationaux, indiquant que la Division d’Arusha était entrée en fonction le 1er juillet dernier.  Malgré le court laps de temps qui s’est écoulé entre la nomination de ses responsables et l’entrée en fonction de la première Division, le Mécanisme est pleinement opérationnel, a-t-il assuré.  Le juge Meron a notamment pris en charge le soutien et la protection des témoins qui ont déposé dans les affaires closes du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).  Il a assuré qu’il suivait aussi les affaires de ce Tribunal qui ont été renvoyées devant les juridictions nationales.  Ce Mécanisme « offre la possibilité unique de participer à la création d’une institution pénale internationale à partir de zéro », s’est-il félicité.


Reconnaissant que la lenteur et le coût des procès étaient souvent perçus comme un échec de la justice pénale internationale, le juge Meron a dit qu’il avait « particulièrement à cœur de prouver à la communauté internationale que l’équité et l’efficacité ne s’excluaient pas mutuellement.  Pour inscrire la justice pénale internationale dans la durée, il faut démontrer qu’elle peut être une solution efficace et abordable pour la communauté internationale ».  Il s’est dit résolu avec ses collègues du Mécanisme à faire de cette institution « un modèle ».


Le Président du TPIY a précisé que tous les actes d’appel contre des jugements rendus par le TPIY qui seront déposés à partir du 1er juillet prochain, date de l’entrée en fonction de la Division de La Haye du Mécanisme, relèveront de la compétence de celui-ci.  Il est à prévoir par conséquent que les appels susceptibles d’être interjetés dans les affaires Šešelj, Karadžić, Hadzić et Mladić seront portés devant le Mécanisme.


Même si le gros des travaux judiciaires portera sur les appels, le Mécanisme sera néanmoins prêt à juger les trois fugitifs (Félicien Kabuga, Augustin Bizimana et Protais Mpiranya) mis en accusation par le TPIR.  « Arrêter et traduire en justice ces trois fugitifs est la première priorité du Mécanisme », a souligné M. Meron, en précisant qu’il s’agit même « d’un impératif moral ».  Si le TPIY a déjà eu une incidence significative sur le paysage de la justice pénale internationale, « le Mécanisme peut s’appuyer sur les acquis de ses prédécesseurs en créant une institution modèle qui soit efficace et qui reflète l’engagement sans faille de la communauté internationale dans la lutte contre l’impunité », a-t-il conclu.


M. VAGN JOENSEN, Président du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), a remercié tous les gouvernements des pays membres du Conseil de sécurité pour leur appui continu au Tribunal alors qu’il s’apprête à achever ses travaux.  Il a précisé que le transfert à la Division d’Arusha du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux internationaux avait bien progressé, conformément au plan prévu depuis l’inauguration du Mécanisme le 1er juillet 2012.  Avec le transfert de la quasi-totalité des fonctions judiciaires à ce Mécanisme résiduel, et la fin du dernier procès sur le génocide, le Tribunal axe désormais ses efforts sur la réduction des effectifs et l’appui au Mécanisme résiduel pour qu’il puisse absorber les dernières fonctions du Tribunal après sa fermeture.  En outre, le Tribunal a continué à réduire sa charge de travail en renvoyant trois affaires supplémentaires devant les juridictions rwandaises entre le 12 mai et le 5 novembre 2012.  Ces renvois ont ainsi permis au TPIR de respecter les délais prévus par la Stratégie d’achèvement.  Le Tribunal doit encore rendre un jugement dans l’affaire Munyagishari, a-t-il indiqué.


Durant la période considérée, deux arrêts ont été rendus dans les affaires Nzabonimana et Nizeyimana, tandis qu’un jugement en appel a été rendu, en octobre 2012, sur l’affaire Gatete, marquant la fin, dans le temps imparti, de quatre jugements en appel concernant quatre personnes en 2012.  Le verdict dans l’affaire Ngirabatware, prévue le 20 décembre prochain, marquera la fin des procès au TIPR, a précisé M. Joensen, en soulignant que la conclusion des procédures devant la Chambre d’appel était prévue à la fin de 2014, notamment avec trois appels concernant sept personnes, qui seront tranchés fin 2013 et les quatre derniers appels concernant 10 personnes, attendus pour fin 2014.  M. Joensen a aussi saisi l’occasion pour exprimer sa gratitude aux membres du Conseil pour l’adoption de la résolution 2054 (2012), ce qui a permis aux juges chargés de l’affaire Ngirabatware et à lui-même de servir au-delà de l’expiration de leur mandat respectif afin d’achever leur travail.


Passant aux questions du personnel, le Président du TPIR a reconnu que le recrutement, la rétention et la séparation continuaient de poser un défi dans le contexte du processus d’achèvement des travaux du Tribunal qui avait du mal à retenir le personnel qualifié, faute de mesures incitatives financières et de perspectives professionnelles.  Pour ces raisons, beaucoup de membres du personnel ont quitté le Tribunal pour accepter des offres d’emploi ailleurs, a-t-il souligné.  La réduction du personnel se poursuit mais pose aux gestionnaires du programme des contraintes en termes d’équité et de transparence dans le processus de prise de décisions car ils doivent s’occuper des questions de ressources humaines et budgétaires, en plus de leur travail régulier.  Cette surcharge a d’ores et déjà augmenté du fait des plans de restructuration, a fait observer M. Joensen.


Évoquant le problème posé par les personnes acquittées, le Président du TPIR a souligné la nécessité de leur trouver un pays d’accueil.  Cinq personnes sont toujours hébergées dans des maisons sécurisées à Arusha, sous la protection du Tribunal, a-t-il dit, en affirmant que l’une d’entre elles se trouvait dans cette situation depuis la confirmation de son acquittement, il y a six ans, par la Chambre d’appel.  Il a rappelé, dans ce contexte, que la réinstallation des personnes acquittées était considérée comme une expression fondamentale de l’état de droit.  Le TPIR est préoccupé par les conséquences qui pourraient résulter du non-respect d’une telle obligation en la léguant au Mécanisme résiduel.  Il a exhorté les membres du Conseil à veiller à ce que cette liberté fondamentale soit respectée.


M. SERGE BRAMMERTZ, Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), a déclaré qu’un objectif important avait été atteint avec l’ouverture du procès Hadzić, le dernier devant le TPIY.  Des progrès importants ont également été réalisés dans les trois autres procès en première instance, ceux de MM. Mladić, Karadžić, Stanišić et Simatović.  Il a ajouté que la Division des appels se préparait à assumer une charge importante de travail.  Celle-ci a « dû prêter main forte à la Division des procès en première instance dont les effectifs diminuent progressivement en raison des suppressions de postes », a expliqué M. Brammertz.


Celui-ci a aussi expliqué que « la coopération quotidienne entre les États de l’ex-Yougoslavie et le Bureau du Procureur demeurait indispensable pour mener à bien les derniers procès en première instance et en appel.  La Croatie, la Serbie et la Bosnie-Herzégovine continuent de donner suite à nos demandes d’assistance dans les meilleurs délais et ont pleinement répondu à nos attentes », a-t-il affirmé.  M. Brammertz s’est aussi félicité de la levée des obstacles juridiques mis à la coopération entre les parquets bosnien et serbe, grâce à la mise en œuvre d’un protocole bilatéral.


Le Procureur du TPIY a déploré toutefois que les autorités nationales continuent de rencontrer des obstacles dans le cadre de la poursuite des crimes de guerre, surtout en Bosnie-Herzégovine.  Outre les dossiers d’enquête transmis par son bureau, ce pays doit aussi traiter des centaines d’affaires concernant des crimes de guerre.  Pour M. Brammertz, la Bosnie-Herzégovine « n’a aucune chance d’atteindre en 2015 et en 2017 les objectifs fixés dans le cadre de la Stratégie nationale sur les crimes de guerre ».  Cet état de fait résulte surtout de la capacité réduite des tribunaux locaux, a-t-il dit.


« Il faut prendre tout un ensemble de mesures pour remédier à cette situation », a-t-il noté, en soulignant l’action entreprise en faveur du renforcement des capacités des tribunaux de la région.  Une évaluation des besoins a été entreprise.  Avec l’appui de l’ONU-Femmes, le Bureau du Procureur a renforcé les activités liées au projet consacré à la poursuite des violences sexuelles, a-t-il indiqué, en faisant remarquer qu’un « grand nombre de crimes de ce type commis pendant les conflits en ex-Yougoslavie n’avaient pas encore été jugés.  « Nous étudions les moyens de transmettre efficacement nos compétences à nos homologues dans la région afin qu’ils puissent continuer à juger les responsables des crimes de violence sexuelle », a-t-il assuré.


Le Procureur Brammertz a évoqué les décisions rendues par la Chambre d’appel dans les affaires concernant d’anciens chefs militaires croates et kosovars.  Il a reconnu que ces arrêts -qui ont abouti à des acquittements- avaient « suscité un certain nombre de réactions sur la capacité du Tribunal de promouvoir la justice en ex-Yougoslavie ».  Il a reconnu qu’il était « indéniable que des documents faisant état de crimes graves avaient été présentés pendant la procédure » et que « les victimes de ces crimes avaient droit à la justice ».  M. Brammertz a encouragé les autorités nationales dans la région à continuer de lutter contre l’impunité dans leur ressort, notamment en renforçant la coopération régionale.  Son Bureau est prêt à les aider à remplir cet objectif, a-t-il assuré avant de conclure.


M. HASSAN BUBACAR JALLOW, Procureur du Tribunal pénal international pour le Rwanda et Procureur du Mécanisme international chargé d’exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux internationaux, a tout d’abord indiqué que le Bureau du Procureur du TPIR avait conclu sa phase des procès, à l’exception de l’affaire Augustin Ngirabatware, dont le jugement est prévu pour le 20 décembre 2012.  « De même, toutes les activités relatives aux procès, y compris l’actualisation des dossiers des fugitifs recherchés et la préservation des éléments de preuve concernant les trois principaux, Félicien Kabuga, Protais Mpiranya et Augustin Bizimana, ont été achevées », a-t-il poursuivi.


Le Procureur du TPIR a indiqué que la priorité, pour les prochains mois, viserait à se prononcer sur les appels formés devant le Tribunal et à préparer l’archivage des documents du Bureau en vue de leur transfert au Mécanisme résiduel.  Notant la charge de travail accrue pour la Chambre d’appel du Tribunal -31 appels ont été interjetés concernant 9 affaires-, M. Jallow a avancé que le Tribunal devrait achever ses travaux d’ici à 2014, en conformité avec la stratégie adoptée par le Conseil.  Il a indiqué qu’il avait remis au Greffe de la Division d’Arusha du Mécanisme résiduel, laquelle a commencé ses opérations en juillet 2012, les archives de son Bureau concernant 27 affaires.  Ces archives constituent l’héritage du TPIR pour les futures générations de juristes et d’historiens, a-t-il dit, avant de mentionner les autres efforts entrepris par le Tribunal pour transmettre cet héritage.


« Le TPIR et le Bureau du Procureur ont accompli des progrès substantiels dans la mise en œuvre des projets visant à faire fructifier les leçons du passé, concernant la poursuite et l’arrestation des fugitifs ou du renvoi des affaires devant les juridictions nationales, renvoi qui n’est pas sans soulever des difficultés », a-t-il dit.  Le Procureur a souhaité participer ainsi au renforcement du partenariat entre les juridictions nationales et internationales et à la mise en œuvre du principe de complémentarité, lequel est crucial, a-t-il estimé, pour l’avenir de la future justice pénale internationale.


« Le TPIR est également en train de finaliser deux manuels sur l’enquête sur les crimes sexuels et la poursuite de leurs auteurs, ainsi que sur la prise en charge des témoins et victimes de ces crimes sexuels dans les situations de conflit armé », a-t-il indiqué.  Il a ensuite mentionné la considérable diminution du personnel du TPIR et du Bureau du Procureur, après l’allégement de sa charge de travail.  « La section chargée des enquêtes à Kigali sera fermée le 31 décembre 2012 », a-t-il ajouté.


Abordant les activités du Bureau du Procureur de la Division d’Arusha du Mécanisme résiduel, le Procureur a fait remarquer que le recrutement du personnel essentiel –8 personnes sur 14 prévues ont pour l’heure été recrutées- était en cours et devrait s’achever dans quelques mois.  « La Division d’Arusha du Mécanisme résiduel s’est, depuis juillet dernier, concentrée sur la traque des trois principaux fugitifs, Félicien Kabuga, Protais Mpiranya et Augustin Bizimana, sur la supervision des affaires renvoyées devant les juridictions nationales, ainsi que sur les préparatifs des procès de ces trois fugitifs s’ils devaient être arrêtés », a-t-il affirmé.


M. Jallow a précisé en outre que le Bureau du Procureur de la Division d’Arusha avait répondu à 23 requêtes en assistance formulées par 11 pays, ajoutant que ce « service est crucial pour renforcer les capacités judiciaires nationales ».  Le principal défi du Mécanisme est l’arrestation et le jugement de ces trois fugitifs, a-t-il reconnu, en assurant que la traque s’était intensifiée, notamment au Kenya et au Zimbabwe, et s’était étendue à d’autres pays situés hors d’Afrique.  « Concernant Protais Mpiranya, j’ai reçu des garanties de responsables du Zimbabwe quant à la collaboration de leur pays avec le Mécanisme », a-t-il dit.  Rappelant que la coopération de tous les États Membres était cruciale pour l’arrestation des trois fugitifs précités, ainsi que celle des huit autres personnes dont les affaires ont été renvoyées aux juridictions rwandaises, le Procureur a rappelé que le TPIR et le Mécanisme résiduel n’avaient pas le pouvoir de procéder à des arrestations.  En s’adressant, avant de conclure, aux fugitifs, M. Jallow a déclaré: « votre traque ne prendra pas fin ».


M. GERT ROSENTHAL (Guatemala) s’est félicité des progrès considérables réalisés par les Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et pour le Rwanda (TPIR) pour conclure à temps leur mandat et transférer le travail restant à accomplir vers le Mécanisme résiduel.  Il a observé avec satisfaction que toutes les procédures devant le TPIY seront menées à leur terme, sauf dans les cas où les mandats d’arrêt ont été délivrés tardivement.  Il s’est dit cependant préoccupé par le fait que neuf personnes soient toujours recherchées par le TPIR.  Ce Tribunal ne pourra terminer son travail avec succès que si tous les États font preuve d’une coopération effective, a-t-il souligné, en appelant tous les États et, en particulier, ceux de la région des Grands Lacs, à intensifier leurs efforts pour appréhender les personnes recherchées.


Le représentant du Guatemala s’est dit également préoccupé par la difficulté des deux Tribunaux face à la réduction de leurs effectifs, ce qui constitue l’un des principaux obstacles à l’accomplissement des stratégies.  C’est un honneur pour le Guatemala de présider le Groupe de travail officieux sur les Tribunaux internationaux, a indiqué M. Rosenthal, qui a rappelé leur immense contribution à la justice et au rétablissement de l’état de droit dans les pays de l’ex-Yougoslavie et au Rwanda.  Il a expliqué que la Division du Mécanisme résiduel pour le TPIR à Arusha était entrée en fonctions le 1er juillet dernier et que ce Mécanisme résiduel constituait une garantie, après la fermeture du TPIR, pour la protection des témoins, la coopération avec les autorités nationales (y compris pour le transfert de preuves), la révision des jugements et la supervision de l’exécution des peines.  Le Guatemala voit d’un œil favorable le processus en cours pour l’installation, en 2013, de la Division de La Haye du Mécanisme pour le TPIY.  Après deux décennies, ce processus est un succès pour la justice pénale internationale et, partant, pour l’ONU et ses États Membres, a conclu M. Rosenthal.


Mme BÉATRICE LE FRAPER DU HELLEN (France) s’est félicitée de la procédure suivie par le TPIR pour préserver les éléments de preuve en vertu de l’article 71 bis de son Règlement.  Elle a estimé que cela facilitera les procédures à l’encontre des trois fugitifs, ayant vocation à être jugés par le Mécanisme résiduel lorsqu’ils seront appréhendés, Félicien Kabuga, Augustin Bizimana et Protais Mpiranya.  La représentante de la France a estimé que le renvoi devant les juridictions nationales était un élément important de la stratégie d’achèvement. Elle a indiqué que le Président et le Procureur du Tribunal sont venus en France pour s’informer de l’état d’avancement des affaires portées devant les juridictions françaises concernant MM. Laurent Bucyibaruta et Wenceslas Munyeshhyaka.  Elle a ajouté que le Greffier par intérim et le Porte-parole du TPIR était en France cette semaine, en assurant que les autorités françaises accordaient toute leur attention aux préoccupations et demandes du TPIR.  Soulignant les difficultés du TPIR en matière de coopération, elle a demandé au Conseil de sécurité de rappeler aux uns et aux autres cette obligation de coopération.  Mme Le Fraper du Hellen a mis l’accent sur l’assistance au Tribunal en matière de relocalisation des personnes acquittées par le Tribunal, en précisant que la France avait été la première à accueillir plusieurs individus à la demande du TPIR.  La France, a-t-elle dit, appuie la proposition d’étendre le mandat des juges.


Pour ce qui concerne le TPIY, la représentante a souhaité que rien ne vienne saper la capacité de ce Tribunal à rendre la justice dans des affaires aussi complexes et graves que les affaires Šešelj, Mladić, Karadžić.  Elle a souhaité que tous les crimes commis contre des civils ou des combattants en violations des Conventions de Genève soient poursuivis, en ajoutant que l’excuse selon laquelle certains crimes n’auraient été commis qu’en réaction à des attaques n’est pas recevable.  Elle a estimé que les derniers jugements rendus et les réactions très contrastées aux récents acquittements montrent une sensibilité qui reste très forte dans la région vis-à-vis des travaux du Tribunal.  Elle a ajouté que les populations concernées doivent être convaincues que justice sera rendue pour les victimes.  Alors que les Tribunaux internationaux sont en voie d’achever leurs activités, la responsabilité des pays de la région de s’engager en faveur de la lutte contre l’impunité et du devoir de mémoire est au premier plan, a insisté la représentante de la France.  Mme Le Fraper du Hellen s’est dite très préoccupée par la lecture du rapport qui ne donne en aucun cas le sentiment d’une mobilisation des pays de la région en vue de mener des poursuites au niveau local.  Pour les membres de l’Union européenne, a-t-elle insisté, la pleine coopération avec le TPIY et la coopération régionale restent une considération majeure des obligations essentielles dans le cadre du processus de stabilisation et d’association des pays candidats et candidats potentiels à l’adhésion.


M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a déclaré que si sa délégation veillerait toujours au respect de la justice internationale, elle déplorait le manque d’efficacité, voire l’absence d’esprit de justice des Tribunaux pénaux internationaux.  Il a accusé le TPIY de légèreté et de désinvolture dans l’acquittement de deux généraux croates.  La justice n’a pas abouti, a-t-il fait observer.  Dans le cas kosovar, il a fait remarquer que si des crimes avaient incontestablement été commis, la preuve n’a pu être établie et par conséquent, il n’y a pas de coupable.


Que faire avec ces demandes récurrentes des Tribunaux pénaux internationaux en faveur de la prorogation des mandats des juges, contrairement aux dispositions de la résolution 1966 (2010)? s’est-il interrogé.  Les délais sont sans cesse rallongés, a constaté le représentant de la Fédération de Russie.  La durée moyenne de chaque affaire est de quatre ans et demi, ce qui est un précédent, a-t-il fait observer.  Le TPIY devrait plutôt s’inspirer du TPIR pour respecter les délais de procédure, a souligné l’Ambassadeur Churkin.


En outre, un soutien administratif supplémentaire est nécessaire avec le soutien d’experts indépendants, a ajouté le représentant.  Il a cité le cas du Tribunal spécial pour la Sierra Leone qui a fait appel à un tel expert.  La Fédération de Russie exige par conséquent un calendrier prévisionnel des travaux jour par jour afin de pouvoir prendre une décision en connaissance de cause pour toute requête budgétaire du TPIY.


M. PETER WITTIG (Allemagne) s’est félicité du quasi-achèvement des travaux du TPIR et a félicité le Rwanda pour avoir renforcé les capacités de son système judiciaire, afin de statuer désormais sur les affaires qui lui sont renvoyées.  Le TPIY a été un modèle pour la région des Balkans, en montrant que les criminels de guerre seront à terme jugés, a-t-il dit.  Se félicitant que ces deux Tribunaux pénaux internationaux aient montré leur indépendance, M. Wittig a indiqué qu’ils étaient une source d’inspiration pour tous les tribunaux qui jugeront à l’avenir des affaires de ce type.


Reconnaissant que certaines décisions du TPIY avaient pu soulever de vives émotions, le délégué de l’Allemagne a condamné vigoureusement les allégations d’une possible partialité du TPIR, lesquelles, a-t-il prévenu, ne font que saper la légitimité du TPIY.  En conclusion, M. Wittig a appelé la Croatie, la Serbie et la Bosnie-Herzégovine à continuer de coopérer avec le TPIR, en regrettant à ce titre que la Serbie ait récemment diminué le niveau de sa coopération. 


Mme GUO XIAOMEI(Chine) s’est félicitée des efforts entrepris par le TPIR en vue de respecter les délais prévus, tout en constatant que des retards ont été enregistrés dans le déroulement des travaux du TPIY.  Tout en comprenant ces retards, elle a recommandé de faire le maximum pour accélérer les choses.  S’agissant d’arrêts rendus par la Chambre d’appel qui ont soulevé des réactions dans le monde, la représentante de la Chine a rappelé l’importance de préserver la stabilité régionale.  La délégation chinoise félicite par ailleurs le TPIR pour la mise en œuvre du Mécanisme résiduel et attend la mise en route prévue de celui du TPIY, a indiqué la représentante.  Sa délégation, a-t-elle ajouté, estime que l’arrestation des trois fugitifs relevant du TPIR est une priorité absolue.  C’est pourquoi, elle a appelé les pays de la région à apporter leur concours à cet effort.


M. PHILIP PARHAM (Royaume-Uni) a assuré de l’appui de son pays aux travaux du TPIY et pris note du maintien de la coopération entre le TPIY et la Serbie.  Le récent acquittement de deux généraux croates a été rendu à l’issue d’une procédure régulière, a-t-il fait observer, avant d’appeler les autorités bosniennes à renforcer leur coopération avec le Tribunal.  Il a souligné qu’il était crucial que tous les procès soient achevés dans les délais prévus afin que le Mécanisme résiduel puisse commencer ses travaux.


En ce qui concerne le TPIR, le délégué du Royaume-Uni a exhorté les États Membres à coopérer avec le TPIR pour que les fugitifs recherchés soient arrêtés.  Il a également plaidé pour qu’une solution durable soit trouvée au défi posé par la réinstallation des personnes acquittées et qui se trouvent à Arusha.  La stratégie d’achèvement des travaux des Tribunaux pénaux internationaux n’est pas une fin en soi, a déclaré le délégué, en plaidant également, avant de conclure, pour le renforcement des capacités des systèmes judiciaires nationaux.


M. JOSÉ FILIPE MORAES CABRAL (Portugal) a noté que les Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda étaient confrontés à des défis significatifs.  Il a déclaré qu’il était très important que les deux Tribunaux puissent surmonter les difficultés actuelles pour mettre en œuvre leur stratégie d’achèvement respective.  Il s’est félicité que les procès en première instance du TPIR soient terminés en temps voulu.  Le représentant a souligné les défis qui demeuraient, le premier d’entre eux étant relatif aux problèmes de gestion des ressources humaines.  Un autre défi touche, a-t-il dit, aux activités visant à renforcer les capacités des juridictions nationales pour que les deux Tribunaux pénaux internationaux puissent leur passer le relais avant de conclure leurs affaires.  Le Portugal estime que, pour ce faire, le TPIY et le TPIR doivent être correctement financés.  Il a fait remarquer que le renforcement de la coopération entre les États de la région et le Bureau du Procureur de chacun de ces deux Tribunaux et le sort des personnes condamnées et acquittées constituaient également des défis.  Le Portugal, qui s’est joint à cet effort, a accepté un condamné dans un de ses établissements pénitentiaires afin de purger sa peine, a-t-il indiqué.


M. SAMIR SHARIFOV (Azerbaïdjan) s’est félicité du respect du calendrier prévu pour achever les travaux du TPIR et de leur transfert à la Division d’Arusha du Mécanisme résiduel.  Il a ensuite appuyé la poursuite des travaux des deux Tribunaux pénaux internationaux -TPIY et TPIR- et a appelé à renforcer les efforts visant à préserver leur héritage.  Le délégué de l’Azerbaïdjan s’est ensuite félicité des contributions du TPIY et du TPIR à la justice pénale internationale.  Mentionnant deux décisions rendues récemment par la Chambre d’appel du TPIY et qui ont soulevé des réactions, le délégué a rappelé l’importance de juger « tous ceux qui ont commis des violations graves à la dignité humaine ».  En conclusion, il a affirmé que les décisions des deux Tribunaux participaient à l’impérieuse promotion de l’état de droit.


M. KOKOU NAYO MBEOU (Togo) a estimé que les deux Tribunaux étaient en voie de respecter le calendrier de la stratégie d’achèvement, conformément à la résolution 1503 (2003), sauf dans le cas où des exigences pratiques y font obstacle.  Concernant le TPIR, il a noté que la seule affaire encore pendante se trouve actuellement dans la phase de rédaction du jugement, qui sera rendu dans les prochains jours.  Pour ce qui est de la procédure d’appel, il a constaté que l’engagement de rendre quatre jugements dans les affaires du TPIR pendant l’année 2012 avait été tenu, en confirmant ainsi que le TPIR était résolument engagé sur la voie de l’achèvement.  Le représentant du Togo a invité le TPIR à faire de même pour réaliser ses projections, afin de se prononcer sur les appels concernant sept personnes en 2013 et 10 personnes en 2014.


Par ailleurs, le représentant a estimé que le Conseil de sécurité devrait considérer les difficultés pratiques et insurmontables qui ont poussé le TPIY à des reports de dates et à l’impossibilité de compléter les appels dans d’autres affaires pendantes avant le 31 décembre 2014.  M. Kokou MBeou s’est félicité des efforts des deux Tribunaux en vue de transférer les affaires des accusés de rang intermédiaire et subalterne vers des juridictions nationales.  Il s’est réjoui que le TPIR ait pu créer au Rwanda un mécanisme de surveillance dans le cadre du procès d’un accusé transféré.  Néanmoins, il a souhaité que le Conseil de sécurité soit davantage informé sur la composition effective et le fonctionnement dudit mécanisme ainsi que de ses aptitudes et sa marge de manœuvre à faire respecter les droits de la personne transférée.  Le représentant s’est félicité de la procédure suivie par le TPIR pour préserver les éléments de preuve en vertu de l’article 71 bis de son Règlement.  Il a salué les efforts déployés par le Bureau du Procureur du TPIR et du Mécanisme résiduel pour poursuivre les enquêtes et la recherche des accusés.  En conclusion, il a souligné l’importance de la coopération avec les tribunaux, en précisant que le TPIR avait envoyé des experts pour renforcer les capacités du personnel de la Cour de la CEDEAO à Abuja.


M. FERNANDO ALZATE (Colombie) a estimé que les Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda, ainsi que le Mécanisme résiduel, ont fourni et continueront de fournir un service inestimable au service de la cause de la justice internationale et du maintien de la paix.  Il a salué la diligence toute particulière des juges et du secrétariat du Mécanisme dans l’adoption d’instruments régissant leurs activités.  M. Alzate s’est également félicité que la subdivision d’Arusha du Mécanisme ait commencé à fonctionner le 1er juillet 2012 et que celle de La Haye fasse de même le 1er juillet 2013.  Le Mécanisme a un rôle particulièrement important à jouer dans le suivi des affaires transmises à des juridictions nationales, a-t-il estimé, en citant les deux affaires déférées à la justice française en novembre 2007 ainsi que celle transmise aux juridictions rwandaises.  Le représentant de la Colombie a insisté sur l’importance de veiller au respect des droits des accusés.  M. Alzate a aussi plaidé pour que les États concernés continuent à soutenir la subdivision d’Arusha.  Avant de conclure, il a déploré que plusieurs des personnes accusées par le Tribunal pénal international pour le Rwanda n’aient pas encore été arrêtées, malgré la détention d’informations assez précises sur les lieux où ils pourraient se trouver.


M. MASOOD KHAN (Pakistan) s’est félicité de la contribution historique des deux Tribunaux pénaux internationaux -TPIY et TPIR- à la justice pénale internationale.  Il a noté les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la stratégie d’achèvement des deux Tribunaux, en soulignant leur professionnalisme.  Il s’est félicité aussi des efforts accomplis pour passer le relais aux mécanismes résiduels, en émettant l’espoir que ce transfert respecterait les dispositions de la résolution 1966 (2010), même si l’on peut comprendre les difficultés rencontrées dans l’achèvement des travaux et le respect des délais.  Le représentant du Pakistan a souligné l’importance de préserver les archives et, ainsi, de la transmission des réalisations des Tribunaux pénaux internationaux.


M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) s’est réjoui de l’ouverture de la Division d’Arusha du Mécanisme résiduel et du premier arrêt qu’elle a rendu.  « De son côté, le TPIY a accompli un travail important », a-t-il poursuivi, avant de souligner l’importance du transfert des activités des deux Tribunaux au Mécanisme résiduel.  Ce transfert implique l’établissement d’un calendrier du renvoi des affaires de première instance et d’appel, a-t-il expliqué.


Insistant sur la nécessité de respecter les décisions rendues par la Chambre d’appel du TPIY, le représentant a félicité le TPIY pour avoir accéléré le rythme de ses procès.  Conscient de l’importance pour le TPIY de retenir un personnel de qualité, il a souhaité que l’Assemblée générale vote une incitation financière afin de lutter contre l’érosion du personnel du Tribunal.  Le délégué a ensuite exhorté les États de la région des Grands lacs à intensifier leurs efforts en vue d’arrêter les fugitifs, en ajoutant que son pays offrait à cette fin des récompenses.  Les héritages de ces deux Tribunaux permettront d’éviter que l’histoire soit l’objet d’interprétations motivées, a-t-il conclu.


M. HARDEEP SING PURI (Inde) a déclaré que sa délégation était rassurée par les assurances fournies par les juges Meron et Joensen, respectivement Présidents du TPIY et du TPIR, concernant l’entrée en fonctions du Mécanisme résiduel dans les délais prévus, et ce, même si quelques affaires restent pendantes devant le TPIY.  L’Inde félicite les Procureurs Brammertz et Jallow d’avoir agi en faveur du renforcement des capacités judiciaires nationales des pays concernés.  S’agissant du respect des calendriers, il semble que le manque de personnel qualifié pèse lourd dans cet état de fait, ce qui est préoccupant, a déclaré le représentant de l’Inde, en assurant que sa délégation était favorable à prendre en compte les propositions présentées par les Présidents des deux Tribunaux.  Sa délégation attire par ailleurs l’attention sur le sort des personnes acquittées qui, a-t-il dit, constitue un « problème humanitaire grave ».  Le représentant a émis l’espoir que les trois suspects toujours en fuite seront rapidement appréhendés.  Il a indiqué qu’il souhaitait que les deux Tribunaux pénaux internationaux prennent toutes les mesures nécessaires pour respecter le calendrier établi, en déclarant que sa délégation appuyait la prorogation des mandats des juges.


M. ZAHEER LAHER (Afrique du Sud) a rappelé le caractère temporaire des deux Tribunaux pénaux internationaux –TPIY et TPIR- lorsque le Conseil avait décidé de leur création.  « Néanmoins, la lutte contre l’impunité ne doit pas faire les frais de l’arrêt des travaux de ces deux Tribunaux », a-t-il poursuivi, en soulignant l’importance, à cet égard, des tâches du Mécanisme résiduel.


Le représentant s’est ensuite félicité de la contribution des deux Tribunaux à la jurisprudence pénale internationale, ainsi que du respect du principe de complémentarité dont ont fait montre les deux Tribunaux, et ce, dans un environnement politique difficile.  Le délégué sud-africain a ensuite encouragé les États Membres à intensifier leurs efforts en vue d’arrêter les fugitifs recherchés par le TPIR, en particulier « les pays dans lesquels ces fugitifs sont présumés avoir trouvé refuge ».  Enfin, il s’est félicité du partage des ressources entre le TPIR, le TPIY et le Mécanisme résiduel et a plaidé pour une amélioration de leur coopération.


M. MOHAMMED LOULICHKI (Maroc) a déclaré que sa délégation notait avec satisfaction les progrès accomplis en vue d’achever les travaux des deux Tribunaux pénaux internationaux, le TPIY et le TPIR.  Ces deux juridictions doivent s’assurer dans le même temps que les affaires en suspens seront jugées de manière équitable, a-t-il ajouté.  Le Maroc apprécie le fait que le TPIR ait pu respecter les délais qu’il avait lui-même fixés, a indiqué son représentant.  Il a rappelé que 18 ans après sa création, le mandat de cette instance approchait de son terme avec succès.


S’agissant du TPIY, le représentant du Maroc considère qu’il est essentiel de respecter à la fois les procédures tout en faisant en sorte de les accélérer.  La poursuite du dialogue entre les deux Tribunaux, ainsi qu’avec les instances des Nations Unies contribuera à surmonter les difficultés qu’ils rencontrent.  Il s’agit aussi d’apporter un plus grand soutien dans la poursuite et l’achèvement du mandat des deux Tribunaux, a estimé également le représentant du Maroc.


M. ALEKSANDAR VUČIĆ, Vice-Premier Ministre de la Serbie, a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur de la réconciliation dans la région des Balkans.  La justice doit prendre le pas sur les considérations politiques, a-t-il affirmé, en déplorant dans le même temps que de telles considérations aient pu parfois guider les travaux du TPIY.  « Avec l’arrestation de Goran Hadžić en juillet 2011, la Serbie a établi sa coopération avec le Tribunal, pour tout ce qui concerne la remise des accusés en fuite », a-t-il déclaré, en ajoutant que parmi les 45 accusés remis par la Serbie se trouvaient deux anciens présidents serbes.  « Mon pays n’a rejeté aucune demande d’assistance », a-t-il assuré.  M. Vucić a indiqué que la confiance de son pays envers le TPIY avait été entamée par les acquittements d’Ante Gotovina et de Mladen Markač, décidés récemment  par la Chambre d’appel du TPIY.


« Les Serbes ont-ils droit à la justice? » s’est-il interrogé, en faisant référence aux nombreux crimes commis contre les populations serbes de la République serbe de la Krajina lors de l’opération Tempête en 1994.  Énumérant les crimes et meurtres commis contre la population serbe par les forces placées sous le commandement de Mladen Markač et d’Ante Gotovina, le délégué de la Serbie a voulu savoir qui étaient les véritables auteurs de ces crimes maintenant que le TPIY a décidé que ces deux hommes n’étaient pas coupables.  « La décision de la Chambre d’appel est grotesque et dénuée de fondement », a-t-il insisté.


Le représentant a déploré vigoureusement le récent acquittement de Ramush Haradinaj, qui est, a-t-il dit, entaché par plusieurs erreurs dont est responsable le Bureau du Procureur.  Il a détaillé les crimes commis par Ramush Haradinaj à Jablanica au Kosovo et à Metohija, avant de demander que l’on en désigne alors ses véritables auteurs.  La tâche fondamentale du TPIY est d’œuvrer à la réconciliation, a-t-il dit, en regrettant que la nation serbe ait été la seule à avoir été déclarée responsable des violations massives des droits de l’homme perpétrées sur tout le territoire de l’ex-Yougoslavie.  En conclusion, M. Vucić a assuré que son pays maintiendra une coopération technique avec le TPIY.


M. RANKO VILOVIĆ (Croatie) a rappelé que son pays fut un des premiers pays à militer pour la création du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY).  Le Tribunal doit continuer son travail en dépit des difficultés et de la remise en cause par certains États de sa légitimité, a-t-il estimé.  À cet égard, il a souligné l’importance de la défense de la vérité et de la nécessité de distinguer entre d’une part les crimes commis par des personnalités officielles et d’autre part les crimes commis par des individus ou groupes isolés.  Le dernier verdict du Tribunal ayant relaxé des généraux croates à la retraite est une nouvelle preuve que l’État croate, en tant qu’institution, n’a commis aucun crime de guerre au cours du conflit ayant secoué les Balkans, a-t-il estimé.  En ce qui concerne les crimes qui ont pu être commis par des individus, M. Vilović a affirmé que le Gouvernement croate avait poursuivi les auteurs de ces crimes et s’était engagé à continuer de le faire. 


En outre, a expliqué le représentant de la Croatie, son pays considère que le Tribunal joue un rôle déterminant pour établir les fondations d’une coopération apaisée et constructive entre les différents États de la région.  Il a déploré que la Serbie ait critiqué le récent jugement du Tribunal et assuré que son pays ne s’était pas immiscé dans le processus judiciaire.  Son gouvernement attache une grande importance au respect de la compétence du Tribunal et à l’autorité de la chose jugée dans le cadre des lois nationales et des traités en vigueur.  Réaffirmant son attachement à la coopération régionale, il a rappelé que la Croatie avait présenté, en mars dernier, à la Serbie un projet d’accord relatif à la poursuite et au jugement des crimes de guerre tout en regrettant l’absence de réponse formelle à cette proposition.


Mme MISRADA ČOLAKOVIĆ (Bosnie-Herzégovine) a indiqué que la mise en place des deux Tribunaux pénaux internationaux –TPIY et TPIR- et leur héritage respectif devraient adresser un message aux générations futures pour rappeler que personne n’est au-dessus des lois et que les crimes graves commis en ex-Yougoslavie et au Rwanda ne seront nulle part tolérés.  S’agissant de l’achèvement des travaux des deux Tribunaux, la représentante a noté les efforts accomplis au cours de la période considérée, conjugués à des réformes additionnelles de leurs procédures et à des efforts visant à améliorer leur productivité et l’accroissement de leur efficacité, sans sacrifier le respect de la légalité.  Il est évident que les deux Tribunaux sont confrontés aux mêmes défis, qui ont inévitablement un impact sur l’achèvement de leurs travaux et le respect des exigences nécessaires pour la transition vers le Mécanisme résiduel, a-t-elle ajouté.  La Bosnie-Herzégovine espère que les deux Tribunaux, dans les derniers stades de leurs travaux, seront en mesure de combler rapidement les retards, confirmant ainsi leur promesse ferme que la justice s’appliquera à ceux qui ont perpétré des atrocités. 


La représentante a indiqué que la prorogation de juges permanents et de juges ad litem, conformément aux exigences actuelles des procédures en premier instance et en appel au sein du TPIR, était une étape positive et nécessaire pour renforcer leur capacité à traiter plusieurs affaires en même temps.  Pour ces raisons, quelques-unes des priorités de la Bosnie-Herzégovine consistent à renforcer la justice pénale internationale, à garantir que la responsabilité des crimes sera établie, et à ne laisser aucune place à l’impunité pour les crimes commis sur le territoire de l’ex-Yougoslavie.  La Bosnie-Herzégovine souscrit entièrement à l’idée que la coopération entre les États de la région est très importante, et tous les efforts sont dirigés vers l’amélioration de cette coopération, par le biais de plusieurs accords bilatéraux qui puissent répondre à des déficiences possibles.  La représentante a réaffirmé l’engagement et le respect de son pays pour s’assurer que la responsabilité de tous les crimes commis serait établie.  « Comme le Mécanisme résiduel est prêt à exercer les fonctions transférées par les deux Tribunaux, nous avons la garantie que le corpus complet des décisions qu’ils ont rendues en matière de droit pénal international ainsi que leurs contributions révolutionnaires à la jurisprudence internationale et au système international de justice seront préservés pour toujours », a-t-elle conclu.


M. EUGENE RICHARD GAZANA (Rwanda) a exhorté tous les États de la région à coopérer avec le Mécanisme résiduel afin d’appréhender les fugitifs génocidaires, en premier lieu, Félicien Kabuga et Protais Mpiranya.  « De nombreux fugitifs vivent tranquillement dans d’autres régions du monde, notamment en Europe », a-t-il déploré, avant d’insister sur la nécessité d’œuvrer davantage pour arrêter ces fugitifs.  S’il s’est félicité du renvoi de huit affaires devant les juridictions nationales rwandaises, il a déploré la lenteur des procédures dans les deux affaires renvoyées à la France par le TPIR, avant de demander à ce pays d’accélérer ses procédures.  Le délégué du Rwanda s’est ensuite inquiété des informations selon lesquelles des génocidaires rwandais couleraient des jours paisibles au Mali, alors qu’ils avaient été envoyés dans ce pays pour purger leur peine.


« Les archives du TPIR doivent rester la propriété de l’ONU car le génocide a été un crime commis contre l’humanité », a-t-il affirmé, avant de demander que ces archives soient transférées à Kigali, afin d’éclairer les futures générations du Rwanda.  La République-Unie de Tanzanie, pays hôte du TPIR, nous soutient dans cette démarche, a-t-il assuré.  Tout en rendant un vibrant hommage au travail accompli par le TPIR, le délégué a indiqué que son pays, lorsqu’il entamera son mandat de membre élu du Conseil de sécurité à partir de janvier prochain, veillera à « l’achèvement harmonieux des travaux du TPIR et au transfert effectif au Mécanisme résiduel ».


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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