Le Conseil de sécurité réaffirme son soutien au Tribunal spécial pour la Sierra Leone
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Conseil de sécurité
6844e séance – matin
LE CONSEIL DE SÉCURITÉ RÉAFFIRME SON SOUTIEN AU TRIBUNAL SPÉCIAL POUR LA SIERRA LEONE
Le Conseil de sécurité, qui a réaffirmé aujourd’hui son ferme soutien au Tribunal spécial pour la Sierra Leone après avoir entendu la Présidente et la Procureure de cette instance, a exhorté la communauté internationale à continuer de lui apporter son appui. Dans une déclaration présidentielle, le Conseil relève en particulier la contribution que le Tribunal spécial a apportée au renforcement de la stabilité dans l’ensemble de la sous-région, ainsi qu’à la lutte contre l’impunité, alors qu’il entame la phase finale de ses travaux.
Le Conseil, qui constate que le Tribunal spécial continue d’avoir besoin d’un soutien financier urgent, souligne qu’il est essentiel que de nouvelles annonces de contributions volontaires soient faites afin que son mandat puisse s’achever dans les délais.
Le Conseil se dit conscient qu’un certain nombre de fonctions devront continuer d’être exercées une fois que le Tribunal aura cessé ses activités, comme la supervision de l’exécution des peines prononcées, la protection des témoins et la préservation des archives. Il se félicite de l’accord conclu entre l’ONU et le Gouvernement sierra-léonais portant création d’un Tribunal spécial « résiduel ».
Lors de la réunion, les membres du Conseil ont entendu des exposés de la Présidente, Mme Justin Shireen Avis Fisher, et de la Procureure du Tribunal spécial, Mme Brenda Hollis. La première a relevé l’attention portée par la cour au sort des femmes et à leur témoignage, en notant aussi que le Tribunal avait été le premier à établir une jurisprudence sur l’enrôlement d’enfants et sur leur utilisation comme soldats. Cette jurisprudence a d’ailleurs déjà été reprise par la Cour pénale internationale dans son premier jugement concernant l’affaire du chef de milice congolais Thomas Lubanga, a rappelé la Présidente.
Quant à la Procureure, elle a évoqué le jugement en première instance de l’ancien Président du Libéria, Charles Taylor, en rappelant que c’était la première fois qu’un ancien chef d’État était condamné depuis les procès de Nuremberg. Mme Hollis a aussi évoqué les nombreux défis que le Tribunal spécial avait eu à relever depuis sa création, ainsi que ceux qui étaient devant lui, en particulier la protection des témoins, qui sont au nombre de 300. Elle a expliqué que nombre de ces témoins continuaient de vivre aux côtés d’individus qu’ils ont pu citer et que le futur « Tribunal spécial résiduel » devrait leur fournir une protection suffisante. Il est crucial qu’il bénéficie du financement suffisant, a insisté Mme Hollis.
Intervenant enfin au nom de la Sierra Leone, la Vice-Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale, Mme Ebun Jusu, a déclaré que le Tribunal spécial avait apporté une contribution sans précédent à la justice concernant les femmes. Il a établi les fondations d’une jurisprudence pénale internationale en ce qui concerne les mariages forcés, la violence et l’esclavage sexuels, ainsi que l’enrôlement d’enfants, a-t-elle souligné.
Lors du débat, les 15 membres ont rendu hommage à l’œuvre accomplie, plusieurs se félicitant en particulier que le Tribunal spécial soit à l’origine d’une jurisprudence spécifique qui a déjà été reprise par la Cour pénale internationale. La Fédération de Russie a apprécié que les délais aient été respectés et que le Tribunal spécial puisse ainsi envisager de fermer ses portes dans les temps, contrairement aux Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda. Le Maroc a souligné, pour sa part, que le Tribunal spécial pour la Sierra Leone illustrait le succès d’un modèle innovant de justice internationale mixte, basé sur la complémentarité et l’appropriation nationale.
LA SITUATION EN SIERRA LEONE
Déclarations
Mme JUSTIN SHIREEN AVIS FISHER, Présidente du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, a fait remarquer qu’au douzième anniversaire de l’adoption de la résolution 1325 (2000), relative aux femmes, la paix et la sécurité, pour la première fois dans l’histoire des tribunaux internationaux, le Tribunal spécial comprenait des femmes aux fonctions les plus importantes, citant ainsi la Présidente, la Procureure, la Greffière et la Défenseure principale. Elle a indiqué que le Tribunal conclurait prochainement sa première affaire en prononçant le jugement contre l’ancien Président Charles Taylor dont la culpabilité ou l’innocence sera déterminée. Le Tribunal spécial fermera ensuite ses portes. Le Tribunal, qui sera la première instance judiciaire temporaire à conclure ses travaux, aura ainsi accompli son mandat, contribuant à en finir avec l’impunité et rendre justice à la population, a observé sa Présidente. Selon une enquête d’opinion financée par l’Union européenne, près de 80% des Sierra-Léonais estiment que le Tribunal a rempli son mandat. Il est encore plus réconfortant de constater que 91% des personnes interrogées en Sierra Leone et 78% au Libéria pensent que le Tribunal spécial avait contribué à rétablir la paix dans leur pays.
Pour sa Présidente, le succès du Tribunal est celui du Conseil de sécurité. Cette juridiction, la première du genre, est le résultat du premier partenariat entre autorités nationales et Nations Unies afin de créer un système crédible de justice au lendemain d’un conflit qui réponde aux normes internationales en vigueur. Il s’agit du premier tribunal hybride créé pour assister un État souhaitant rendre justice après un conflit mais qui ne disposait pas de la capacité suffisante pour le faire. Il s’agit aussi du premier tribunal établi sous les auspices de l’ONU qui œuvre sur le territoire même où de sérieuses violations du droit international humanitaire ont été commises, en faisant en sorte que les survivants du conflit soient des acteurs des jugements et pas uniquement des spectateurs. Ce succès n’est pas seulement une réalisation pour le temps présent mais, de manière tout aussi importante, pour l’avenir car il apparaît comme un modèle avéré de complémentarité positive.
Cet exemple devrait permettre de lever tout doute sur la question de savoir si la complémentarité positive peut réussir dans des contextes difficiles. Le conflit avait détruit les institutions judiciaires et la Sierra Leone n’avait pas les ressources humaines et financières nécessaires pour étancher par elle-même sa soif de justice, a-t-elle observé. Outre l’attention portée au sort des femmes et à leur témoignage, le Tribunal spécial a été le premier à établir une jurisprudence sur l’enrôlement d’enfants soldats. Celle-ci a d’ores et déjà été reprise par la Cour pénale internationale dans son premier jugement concernant l’affaire Lubanga. Il a aussi été le premier à trancher sur les effets des amnisties nationales en droit international, sur l’immunité des chefs d’État et sur les crimes commis contre des Casques bleus. Le Tribunal spécial est prêt à partager la connaissance et l’expertise qu’il a acquises avec les États Membres, a assuré sa Présidente, avant de souligner que la garantie de protection offerte aux témoins ne pouvait qu’encourager d’autres personnes à se faire connaître auprès d’autres institutions judiciaires.
Mme BRENDA J. HOLLIS, Procureure du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, a rappelé que M. Charles Taylor avait été condamné par le Tribunal pour avoir planifié les attaques ayant abouti à l’invasion de Freetown en janvier 1999 et aux atrocités de masse qui en avaient découlé, de même que pour avoir apporter son appui aux membres du Front révolutionnaire uni et du Conseil des forces armées révolutionnaires dans la commission de ces atrocités. C’est la première fois qu’un ancien chef d’État est condamné depuis les procès de Nuremberg, s’est-elle félicitée. Mme Hollis a ensuite indiqué que le Tribunal spécial avait mené à bien son programme de sensibilisation de son travail auprès de la population de la Sierra Leone, le Bureau ayant joué un rôle particulier à cet égard. Puis elle a souligné l’apport du Bureau du Procureur à la jurisprudence pénale internationale, notamment sur les questions des mariages forcés et du recrutement d’enfants soldats.
Mme Hollis a ensuite détaillé les nombreux défis que le Tribunal spécial avait dû relever depuis sa création, en indiquant tout d’abord que les chefs d’inculpation étaient fondés sur les preuves rassemblées devant le Procureur. Elle a précisé que ces chefs d’inculpation visaient à refléter fidèlement la nature et l’ampleur des crimes dont est suspectée une personne et à s’assurer que les poursuites seront menées avec la diligence requise. La Procureure a ensuite abordé le défi qu’a constitué le recrutement d’un personnel en nombre suffisant pour le Tribunal spécial étant donné la nature non pérenne de son financement volontaire. « Nous avons relevé ce défi en utilisant des contrats de court terme, en réduisant le nombre de postes permanents et en nous appuyant fortement sur les experts dépêchés par les États, a-t-elle déclaré.
La protection des 300 témoins qui avaient été appelés à témoigner par son Bureau constitue toujours un défi crucial, a affirmé la Procureure, en ajoutant que beaucoup de ces témoins vivaient encore aux côtés des individus qu’ils ont pu citer. Mme Hollis a souligné que le mécanisme résiduel du Tribunal spécial serait renforcé par le partage d’une plateforme administrative avec les autres cours et tribunaux, en ajoutant que ce mécanisme résiduel devrait, en vertu du Statut du Tribunal spécial, fournir la protection suffisante aux témoins. Il est crucial que ce mécanisme résiduel bénéficie du financement suffisant, a conclu Mme Hollis.
Mme EBUN JUSU, Vice-Ministredes affaires étrangères et de la coopération internationale, a déclaré que le Tribunal spécial relevait d’un partenariat entre le Gouvernement et le peuple sierra-léonais, d’une part, et les Nations Unies, d’autre part, afin de promouvoir la justice et combattre l’impunité pour les crimes haineux commis pendant la guerre civile. En tant que tribunal hybride créé pour assister un État désireux de combattre l’impunité concernant les crimes contre l’humanité, le Tribunal spécial a apporté une contribution sans précédent à la justice en faveur des femmes en posant les fondements d’une jurisprudence pénale internationale sur les mariages forcés, la violence et l’esclavage sexuels, ainsi que l’enrôlement d’enfants. Le Tribunal spécial a aussi décidé que toute attaque contre des soldats de la paix de l’ONU était passible de poursuites. La jurisprudence du Tribunal spécial souligne en particulier l’importance de prendre en compte les traumatismes liés aux violences sexuelles du point de vue de celles et ceux qui les ont subies, ainsi que leur souffrance dans le contexte culturel local. Le Tribunal spécial a aussi apporté une contribution essentielle aux efforts de réconciliation nationale ainsi qu’à la restauration et au maintien de la paix et de la sécurité internationales dans la sous-région. Le Tribunal spécial, a estimé la Vice-Ministre, s’est montré à la hauteur de sa tâche.
Malgré ses succès, a-t-elle fait remarquer, le Tribunal spécial continue de faire face à des difficultés de financement pour achever son mandat en accomplissant ses tâches résiduelles. Mme Jusu a déclaré que la Sierra Leone exprimait sa gratitude aux Nations Unies et, notamment aux États Membres qui, par leurs contributions financières volontaires, ont contribué au succès des travaux du Tribunal spécial. La Vice-Ministre a souligné la nécessité pour la communauté internationale et l’ONU de continuer à soutenir le Tribunal spécial dans l’achèvement de son excellente tâche. Il n’est pas nécessaire, a-t-elle conclu, de souligner qu’un tel soutien enverrait le message fort selon lequel la communauté internationale soutient fermement les institutions créées pour établir les responsabilités de ceux qui ont commis des crimes de guerre.
M. SHRI E. AHAMED(Inde) a indiqué que le Tribunal spécial pour la Sierra Leone s’était acquitté avec succès de son mandat, trois des quatre principales affaires ayant été menées à leur terme, la quatrième étant au stade du jugement devant la Chambre d’appel. Il s’est ensuite félicité du programme de sensibilisation mené par le Tribunal spécial auprès de la population, de son régime de protection des témoins et de son programme d’archives. La création d’un musée de la paix contribuerait à la réconciliation nationale, a-t-il ajouté. Le représentant a en outre plaidé pour qu’un appui continue d’être fourni au Tribunal spécial ainsi qu’au mécanisme résiduel du Tribunal spécial. En conclusion, il a détaillé l’aide apportée par son pays à la reconstruction de la Sierra Leone, notamment près de 100 millions de dollars de prêts à destination du secteur agricole sierra-léonais.
M. MICHAEL TATHAM (Royaume-Uni) a indiqué que le procès de Charles Taylor était un jalon important pour la justice pénale internationale, ainsi que pour la réconciliation de la société sierra-léonaise. Les crimes ne resteront pas impunis, a-t-il assuré. Il s’est également félicité du régime de protection des témoins du Tribunal, ainsi que de sa contribution à la jurisprudence pénale internationale concernant notamment les mariages forcés et le recrutement d’enfants soldats. À plus long terme, le mécanisme résiduel devra bénéficier d’un financement sûr pour protéger les témoins, a-t-il conclu, tout en détaillant le montant du financement apporté par son pays.
M. CHRISTOPHE EICK (Allemagne) a salué la contribution du Tribunal spécial à l’évolution du droit international, en assurant une certaine justice aux victimes. Cette juridiction a contribué, par son action en matière de renforcement des capacités, à la reconstruction du système judiciaire de la Sierra Leone. Par son action en faveur des victimes, le Tribunal spécial a aussi contribué aux efforts qui ont conduit à l’adoption de la résolution 1325 sur les femmes, la paix et la sécurité. Sa jurisprudence a d’ores et déjà été reprise par la Cour pénale internationale dans l’affaire Lubanga, a estimé le représentant de l’Allemagne, en se félicitant aussi de l’inculpation de l’ancien Président Charles Taylor. Toutefois, les travaux du Tribunal spécial ne sont pas terminés, a-t-il dit, en précisant que l’Allemagne attendait avec intérêt la conclusion des accords pertinents entre l’ONU et la Sierra Leone à cet égard. Il a rappelé la contribution de l’Allemagne au fonctionnement du Tribunal spécial, en soulignant le soutien de son pays à la recherche de financements supplémentaires.
M. RAZA BASHIR TARAR (Pakistan) a déclaré qu’il était nécessaire de reconnaître l’action du Tribunal spécial au moment où le mandat du Tribunal est sur le point de prendre fin. Toutefois, des domaines méritent encore d’être abordés, notamment la fin de la procédure concernant l’ancien Président du Libéria, Charles Taylor. La question de la protection des témoins, la poursuite des suspects en fuite, la gestion des greffes font partie des ces tâches « résiduelles » mais néanmoins importantes qui sont au programme du Tribunal spécial, a rappelé le représentant du Pakistan.
M. KODJO MENAN (Togo) a indiqué que la preuve était faite aujourd’hui que la Cour spéciale avait remarquablement contribué au renforcement de la stabilité de la Sierra Leone, ainsi que de la sous-région de l’Afrique de l’Ouest. Saluant la contribution du Tribunal spécial à la jurisprudence internationale, il s’est aussi réjoui que le Tribunal ait conclu avec le Gouvernement du Rwanda un accord garantissant l’exécution des peines infligées. Il a ensuite affirmé que son pays soutenait particulièrement la dimension de travail de mémoire de la Cour. La stratégie d’achèvement du Tribunal spécial ne devrait, en aucune manière, signifier ni la porte ouverte à des procès expéditifs ni à l’impunité, a affirmé M. Menan. Le mécanisme résiduel du Tribunal spécial, a-t-il assuré, poursuivra la lutte contre l’impunité. En conclusion, le délégué du Togo a invité le Tribunal spécial à travailler sans relâche et avec le même pragmatisme pour respecter les délais dans l’achèvement de ses travaux.
M. ZAHEER LAHER (Afrique du Sud) a souligné les contributions du Tribunal spécial à la jurisprudence pénale internationale et s’est félicité de la bonne mise en œuvre des accords conclus avec le Rwanda concernant le transfert des prisonniers. Le Tribunal spécial est un modèle de complémentarité positive, a-t-il affirmé, en ajoutant que celle-ci était désormais une réalité. Il a ensuite pris note des efforts de réduction des effectifs du Tribunal et affirmé que l’héritage du Tribunal devrait bénéficier à toute la région, et non seulement à la Sierra Leone. Enfin, il a assuré le Tribunal spécial de l’appui financier de son pays, et ce, jusqu’à la fin de son mandat.
M. SERGEY KAREV (Fédération de Russie) a rappelé que la communauté internationale avait déjà une certaine expérience de la mise en œuvre de tâches résiduelles, en citant la situation du Tribunal pénal international pour le Rwanda et celle du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. Il a émis l’espoir que le Tribunal spécial pour la Sierra Leone ne connaîtrait pas les mêmes difficultés que ses deux prédécesseurs. Il a estimé que celui-ci avait apporté une contribution positive et qu’il constituait un bon exemple en termes de respect des délais, alors que les autres tribunaux internationaux avaient eu tendance à soutenir que l’on ne pouvait prévoir le temps nécessaire à la conclusion des affaires.
M. NÉSTOR OSORIO (Colombie) a déclaré qu’il s’agissait d’une excellente occasion de réaffirmer l’appui des membres du Conseil au Tribunal spécial dont le résultat le plus visible est le procès et la condamnation de l’ancien Président du Libéria, Charles Taylor. Il s’agit d’un jalon important dans la réalisation du droit international. Le Tribunal spécial a apporté une contribution essentielle à la concrétisation de la justice pénale internationale, a estimé le représentant de la Colombie. L’état de droit et la bonne gouvernance dans les pays concernés ne peuvent que bénéficier de l’action du Tribunal spécial, a-t-il dit. Le représentant de la Colombie a appelé les États et les organisations internationales en mesure de fournir un appui financier à contribuer à l’achèvement des travaux du Tribunal spécial.
M. AGSHIN MEHDIYEV (Azerbaïdjan) a souligné la contribution du Tribunal spécial à la lutte contre l’impunité, ainsi qu’à la jurisprudence pénale internationale, en particulier en ce qui concerne le recrutement d’enfants soldats. Il s’est aussi félicité du régime de protection des témoins du Tribunal spécial. Le délégué a ensuite souhaité que la transition des activités du Tribunal spécial au mécanisme résiduel se fasse dans de bonnes conditions. Les États Membres doivent fournir leur appui au Tribunal spécial pour qu’il mène à bien la dernière étape de son mandat, ainsi qu’au mécanisme résiduel lorsqu’il lui succèdera, a-t-il conclu.
M. MOHAMMED LOULICHKI (Maroc) a indiqué que le Tribunal spécial représentait le succès d’un modèle innovant de justice internationale mixte, basé sur la complémentarité et l’appropriation nationale. Tout en se félicitant de l’accord conclu par le Gouvernement sierra-léonais et les Nations Unies sur la stratégie d’achèvement des travaux du Tribunal spécial, il a estimé qu’il était important de maintenir le même niveau de soutien politique et d’assurer les ressources suffisantes pour faire face aux nombreux défis propres à cette phase critique, notamment la protection des témoins, l’exécution des peines et la préservation des archives. Il s’est enfin félicité que les activités de sensibilisation et de mémoire menées par le Tribunal spécial se poursuivront à l’avenir, en se réjouissant de ce que le projet du Musée de la paix soit bientôt achevé.
M. MARTIN BRIENS (France) a qualifié d’immense l’héritage du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, en ajoutant que parmi les décisions historiques du Tribunal figurait le jugement du 30 mai 2012 concernant l’ancien Président du Libéria, Charles Taylor. C’est une leçon à méditer pour d’autres cas, dont Bosco Ntaganda en République démocratique du Congo, a-t-il affirmé. M. Briens a indiqué que la capacité du Tribunal à transférer ses activités au mécanisme résiduel et aux juridictions nationales aura également valeur d’exemple pour les autres tribunaux ad hoc. Notant le souci particulier du Tribunal spécial d’assurer dans la durée la protection des témoins, il a affirmé qu’il s’agissait d’une préoccupation prioritaire pour l’ensemble des juridictions pénales internationales.
M. Briens s’est ensuite félicité du fort soutien dont bénéficie le Tribunal spécial auprès des citoyens sierra-léonais, en précisant que 75% d’entre eux pensent que le Tribunal a fait progresser la justice. Lorsque le Conseil de sécurité donne ses chances à la justice, en s’assurant du plein respect de ses résolutions, la justice, à son tour, peut servir la stabilité, a estimé M. Briens. Avant de conclure, il a indiqué que la mise en place d’un système permanent de justice, avec la Cour pénale internationale (CPI), rendait obsolète la création de nouvelles juridictions ad hoc dans les domaines de compétence de la CPI.
M. JEFFREY DE LAURENTIS (États-Unis) a déclaré que le Tribunal spécial se trouvait à la croisée des chemins, en se félicitant de la procédure judiciaire indépendante que cette juridiction a apportée à la Sierra Leone. Ce pays a pu ainsi tourner la page d’un chapitre pénible de son histoire. Le Tribunal spécial a établi que les crimes sexuels pouvaient relever du crime de guerre, voire du crime contre l’humanité. Si le procès s’achève pour Charles Taylor, le Tribunal spécial n’a pas achevé pour autant ses travaux, a-t-il fait remarquer. Les États-Unis se félicitent de l’accord conclu entre la Sierra Leone et les Nations Unies concernant le processus d’achèvement du mandat du Tribunal. Le représentant a rappelé que son pays était celui qui avait le plus contribué au fonctionnement du Tribunal, en citant le chiffre de 85 millions de dollars auxquels se sont ajoutés récemment deux autres millions de dollars. Le Tribunal spécial doit pouvoir achever son mandat dans les meilleures conditions, ce qui implique, selon sa Présidente, de disposer d’un budget d’une quinzaine de millions de dollars, a rappelé le représentant des États-Unis. Le Tribunal spécial pour la Sierra Leone a beaucoup à apporter quant aux leçons qu’il faudrait retenir de l’histoire, a-t-il également commenté.
Mme GUO XIAOMEI (Chine) a déclaré que sa délégation avait pris note des progrès enregistrés par le Tribunal spécial depuis 2009, en rappelant qu’il serait la première instance judiciaire internationale à fermer ses portes. Cette contribution positive ne pourra que servir de référence à d’autres instances similaires, a estimé la représentante de la Chine. Le mécanisme spécial résiduel devrait continuer à coopérer avec les autorités sierra-léonaises, a-t-elle souligné, en appelant de ses vœux que le financement pour cette tâche en soit assuré.
M. JOSÉ FILIPE MORAES CABRAL (Portugal) a indiqué que l’apport du Tribunal spécial à la jurisprudence pénale internationale était remarquable. « Mon pays soutient pleinement la stratégie d’achèvement des activités du Tribunal spécial », a-t-il affirmé, en ajoutant que des questions demeuraient en suspens bien après que le Tribunal ait rendu ses dernières décisions. Il s’est dit convaincu que le transfert des activités au mécanisme résiduel se fera de manière souple. Il a conclu en indiquant que tous les regards étaient désormais tournés vers la Cour pénale internationale, les tribunaux spéciaux lui ayant désormais passé le relais dans la lutte contre l’impunité,
M. GERT ROSENTHAL (Guatemala) a déclaré que son pays reconnaissait la contribution importante du Tribunal spécial pour la Sierra Leone en matière de justice pénale nationale et internationale. Cette contribution met en lumière le rôle de cette juridiction dans la réconciliation et la restauration nationale, dans le maintien de la paix dans le pays et la région. Le Guatemala applaudit la contribution historique apportée dans la compréhension de l’impact des conflits armés sur les femmes et les filles qui est reflétée dans sa jurisprudence et dans le traitement des survivants en tant que participants à la justice au lendemain d’un conflit. Il attend avec intérêt la conclusion du jugement de l’ancien Président du Libéria Charles Taylor, un cas exceptionnel en matière de justice pénale internationale, et reconnaît le travail complexe réalisé par le Tribunal spécial.
Déclaration présidentielle
Le Conseil de sécurité remercie vivement le Président et le Procureur du Tribunal spécial pour la Sierra Leone de l’exposé qu’ils lui ont présenté le 9 octobre 2012.
Le Conseil réaffirme qu’il soutient fermement le Tribunal spécial et salue les progrès accomplis par ce dernier (S/2012/741). Il relève en particulier la contribution que le Tribunal spécial a apportée au renforcement de la stabilité en Sierra Leone et dans la sous-région, et à la lutte contre l’impunité.
Le Conseil félicite le Tribunal spécial pour avoir achevé le 30 mai 2012, le procès en première instance de l’affaire Charles Taylor et prend acte de l’ouverture de la procédure d’appel, dont la date de clôture est fixée au 30 septembre 2013.
Le Conseil prend également acte des avancées réalisées par le Tribunal spécial dans l’application de sa stratégie de fin de mandat. Il compte que tous les organes du Tribunal spécial mettront tout en œuvre pour mener à terme les travaux restants dans le respect de cette stratégie, y compris les éventuelles procédures pour outrage.
Le Conseil salue l’action importante que mène le Tribunal spécial pour faire connaître ses activités judiciaires aux populations de la Sierra Leone et du Libéria et contribuer ainsi au rétablissement de l’état de droit dans ces deux pays et dans l’ensemble de la région.
Le Conseil apprécie combien la jurisprudence du Tribunal spécial relative aux crimes ressortissant à sa compétence, à savoir, les crimes contre l’humanité, les violations graves de l’article 3 commun aux Conventions de Genève et du Protocole additionnel II, et d’autres violations graves du droit international humanitaire, ainsi que certains crimes de droit sierra-léonais, a contribué à faire progresser la justice pénale internationale et salue l’œuvre accomplie par le Tribunal spécial dans les domaines des femmes, de la paix, de la sécurité et de la protection des enfants touchés par les conflits armés, notamment par le biais de ses programmes de sensibilisation et d’appui aux témoins.
Le Conseil sait qu’un certain nombre de fonctions devront continuer d’être exercées une fois que le Tribunal aura cessé ses activités, comme la supervision de l’exécution des peines prononcées, la protection des témoins et la préservation des archives. À cet égard, il se félicite de l’accord conclu entre l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement sierra-léonais portant création d’un Tribunal spécial résiduel pour la Sierra Leone.
Le Conseil exhorte la communauté internationale à continuer d’apporter son appui au Tribunal spécial à l’heure où celui-ci entame la phase finale de ses travaux.
Le Conseil observe, en particulier, que le Tribunal spécial continue d’avoir besoin d’un soutien financier urgent. Il souligne qu’il est essentiel que de nouvelles annonces de contributions volontaires soient faites afin de permettre au Tribunal spécial d’achever son mandat dans les délais. Il invite les États Membres à verser des contributions généreuses au Tribunal spécial et pour l’application de l’Accord portant création d’un Tribunal spécial résiduel pour la Sierra Leone et encourage le Secrétaire général à coopérer avec le Greffier du Tribunal spécial pour trouver des solutions pratiques répondant de la manière la plus efficace qui soit aux besoins du Tribunal spécial résiduel.
Le Conseil continuera d’appuyer résolument le Tribunal spécial, dont le mandat se termine, ainsi que le Tribunal spécial résiduel qui entame ses activités.
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À l’intention des organes d’information • Document non officiel