En cours au Siège de l'ONU

CS/10614

conseil de sécurité: la CEDEAO et les pays lusophones soulignent l’urgence de régler la crise en Guinée-Bissau, causée par le coup d’État militaire du 12 avril

19/04/2012
Conseil de sécuritéCS/10614
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil de sécurité

6754e séance – après-midi


CONSEIL DE SÉCURITÉ: LA CEDEAO ET LES PAYS LUSOPHONES SOULIGNENT L’URGENCE DE RÉGLER

LA CRISE EN GUINÉE-BISSAU, CAUSÉE PAR LE COUP D’ÉTAT MILITAIRE DU 12 AVRIL


Le Représentant spécial déplore l’impact du renversement

de l’ordre constitutionnel sur la réforme du secteur de la sécurité


« J’espère que tous les partenaires de la Guinée-Bissau apprendront, à la lumière de ce qui s’est passé le 12 avril, que le facteur temps ne saurait être tenu pour négligeable.  Si les ressources nécessaires à la réforme du secteur de la sécurité avaient été débloquées dans de meilleurs délais en faveur de ce pays, peut-être ne serions-nous pas en train de discuter de la situation qui nous préoccupe aujourd’hui », a déclaré cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Guinée-Bissau et Chef du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau.


S’exprimant par vidéoconférence depuis Bissau, M. Joseph Mutaboba faisait, par ces mots, référence au coup d’État perpétré la semaine dernière par le « commandement militaire » de Guinée-Bissau, qui a conduit le Conseil à convoquer une réunion d’urgence pour connaître les derniers développements de la situation dans ce petit pays d’Afrique de l’Ouest.


Alors que le Premier Ministre, M. Carlos Gomes Júnior, était largement donné favori pour le second tour de l’élection présidentielle, les militaires l’avaient renversé du pouvoir, puis emprisonné, sort qu’ils avaient également réservé au Président par intérim du pays, M. Raimundo Pereira.  Une mission avait été immédiatement dépêchée par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour rencontrer tous les acteurs en présence et trouver une issue à la crise.


Dès son départ, les militaires ont exclu le retour de M. Carlos Gomes Júnior au pouvoir et la possibilité d’organiser un second tour à l’élection présidentielle.  En outre, hier, un accord a été conclu entre les forces armées et certains des partis politiques pour ouvrir la voie à une période transitoire de deux ans, ainsi que pour entériner la dissolution du Parlement, la destitution du Gouvernement et le maintien du leadership militaire à la tête de l’État.


Les forces armées, a indiqué le Représentant spécial, ont invoqué la « légitime défense » pour justifier leur geste, qui s’inscrit dans la continuité d’une série de coups d’État et d’assassinats politiques ayant fragilisé la Guinée-Bissau depuis une quinzaine d’années.  Elles auraient notamment argué de l’existence d’un « accord secret » entre le Gouvernement renversé et celui de l’Angola, qui prévoyait de « légitimer » une intervention militaire de l’Angola en Guinée-Bissau, placée sous l’autorité du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine.


Le Ministre des affaires étrangères de la Guinée-Bissau a balayé ces accusations, comme celles de fraudes électorales, en accusant directement le chef de l’état-majorbissau-guinéen, M. Antonio Indjai, d’avoir fomenté le coup d’État, dans le seul but de compromettre le processus de réforme et de poursuivre ses associations avec la criminalité organisée et les trafiquants de drogues.  Ce sont au contraire les progrès accomplis au cours de ces dernières années par la Guinée-Bissau, avec ses partenaires de la réforme du secteur de la sécurité qui, de l’avis de M. Mamadu Saliu Djaló Pires, expliquent la réaction des forces armées.


C’est pourquoi, M. Djaló Pires a « imploré » le Conseil de sécurité d’autoriser le déploiement d’une force de maintien de la paix en Guinée-Bissau dotée d’un mandat vigoureux afin de permettre l’établissement d’un État démocratique légitime dans le pays.  Intervenant au nom de la Communauté des pays de langue portugaise(CPLP), le Ministre des affaires étrangères de l’Angola, M. Georges Rebelo Chikoti, a également encouragé le Conseil à envisager le recours à la force et à prendre des mesures appropriées en vue de rétablir l’ordre constitutionnel, d’assurer la libération sans conditions des dirigeants arrêtés, de conclure le processus électoral, ainsi que de mettre en place un régime de sanctions.


Appuyant à son tour la « création d’une mission de stabilisation mandatée par l’ONU » qui comprendrait des contingents de la CEDEAO, de l’Union africaine et de la Communauté des pays de langue portugaise, le Ministre des affaires étrangères du Portugal, M. Paulo Sacadura Cabral Portas, a également appelé le Conseil de sécurité à prendre des mesures similaires à celles de l’Union européenne, qui a suspendu sa coopération avec la Guinée-Bissau et s’apprête à appliquer des sanctions ciblées.


La CEDEAO, a assuré le représentant de la Côte d’Ivoire, M. Youssoufou Bamba, qui s’exprimait au nom du Président en exercice de cette institution, est « prête à déployer une force militaire en Guinée-Bissau pour sécuriser les institutions et les personnalités publiques et soutenir la transition ».  Elle organisera aussi un sommet extraordinaire sur la situation dans le pays le 26 avril prochain, et dépêchera à nouveau une autre délégation en Guinée-Bissau le 23 avril.


Enfin, la Présidente de la formation Guinée-Bissau de la Commission de consolidation de la paix (CCP), Mme Maria Luiza Ribeiro Viotti, du Brésil, a encouragé le Conseil de sécurité et la communauté internationale dans son ensemble à aider la Guinée-Bissau « à en finir une fois pour toutes avec le cycle de la violence, les coups d’État, l’impunité et l’instabilité », surtout à la lumière des récents progrès économiques et sociaux du pays.


Saluant, de son côté, la « disponibilité dont ferait montre la junte en Guinée-Bissau pour un retour rapide à l’ordre constitutionnel », le représentant du Togo a suggéré la mise en place d’un fonds de pension pour les militaires, sous la conduite de la CEDEAO et de la CPLP, et avec le soutien des Nations Unies.


LA SITUATION EN GUINÉE-BISSAU


Déclarations


M. JOSEPH MUTABOBA, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Guinée-Bissau et Chef du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau, a rappelé qu’à la suite du coup d’état militaire en date du 12 avril, certains membres des forces armées de ce pays avaient justifié leurs actions en prétextant l’existence d’un « accord secret » entre le Gouvernement renversé et celui de l’Angola.  Cet accord, a rappelé le Représentant spécial, aurait eu pour objectif de « légitimer » une intervention militaire de l’Angola placée sous l’autorité du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine.  Les auteurs du putsch ont assuré, a-t-il dit, qu’ils avaient été contraints d’agir en « légitime défense » afin de mettre en échec les tentatives d’« anéantir » les forces armées.  M. Mutaboba a précisé que les auteurs du putsch avaient décliné leurs objectifs immédiats en quatre points: cesser toute entrave à la réforme du secteur de la sécurité; lutter contre le trafic de stupéfiants afin de rendre le pays de nouveau attractif pour les investisseurs étrangers; mettre fin à la culture de l’impunité; et garantir la continuité du processus de démocratisation de l’État sur la base du respect des droits de l’homme et de la liberté d’expression.


Dans le but déclaré de « rétablir l’ordre constitutionnel », les militaires ont invité, le 13 avril, les différents partis politiques à des consultations, invitation acceptée par 23 de ces formations mais pas par celle au pouvoir, le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC).  Deux propositions ont circulé à cette occasion.  La première consiste à assurer le retour à l’ordre constitutionnel en nommant l’actuel Président par intérim de l’Assemblée nationale comme Président intérimaire et de demander au PAIGC de nommer un premier ministre et de former un gouvernement multipartite.  La seconde, à s’engager dans une transition non constitutionnelle qui comprendrait la dissolution du Parlement et la création d’un conseil national de transition.  Dans le cadre de cette seconde option, un président « de la transition » et un gouvernement d’unité nationale dirigé par un premier ministre « de la transition » seraient nommés.  Le 15 avril, a précisé le Représentant spécial, 16 des 23 partis se sont prononcés pour la seconde option, provoquant le départ de la table des négociations des formations qui y étaient opposées.  Un des points de désaccord les plus âpres portait sur la durée de cette période de transition, certains proposant qu’elle dure deux ans, d’autres souhaitant qu’elle s’achève en novembre prochain, au moment de la tenue des élections législatives prévues.


Le coup a été condamné par le PAIGC, ainsi que par les cinq candidats à la présidence contestant le processus électoral, a noté le Représentant spécial.  Les tentatives de manifester de la population ont été vigoureusement réprimées par l’armée et si la situation semble être revenue au calme, les banques sont toujours fermées et de nombreux habitants de Bissau ont fui la capitale.  Soulignant que le coup avait été condamné par la plupart des partenaires bilatéraux et multilatéraux de la Guinée-Bissau, M. Mutaboba a ensuite expliqué qu’une mission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait été dépêchée sur place pour rencontrer les acteurs en présence.  Quelques heures à peine après le départ de cette mission, les militaires ont exclu le retour de M. Carlos Gomes Júnior au pouvoir et la possibilité d’organiser le second tour de l’élection présidentielle.  Le 18 avril, un accord a été conclu entre les forces armées et les partis politiques pour une transition d’une durée de deux ans, ainsi que pour la dissolution du Parlement, la destitution du Gouvernement et le maintien du leadership militaire à la tête de l’État.


Le Représentant spécial a tenu à informer le Conseil de sécurité qu’il n’y avait aucun doute sur le fait qu’il était en présence d’un coup « politico-militaire » perpétré sous les yeux des Nations Unies et de la communauté internationale.  « J’espère que tous les partenaires de la Guinée-Bissau apprendront à la lumière de ce revers que le facteur temps ne saurait être tenu pour négligeable.  Si les ressources nécessaires à la réforme du secteur de la sécurité avaient été débloquées dans de meilleurs délais, peut-être ne serions-nous pas en train de discuter de la situation qui nous préoccupe aujourd’hui », a déclaré M. Mutaboba.  Il a également déploré le fait que les négociations en cours aujourd’hui étaient une fois de plus basées sur l’exclusion d’un acteur politique important, en l’occurrence le PAIGC, le parti disposant de la majorité parlementaire.  Aussi est-il d’une importance capitale que la communauté internationale ne donne son aval à des accords ou des solutions qui ne tiennent pas compte d’une importante partie de la population ou de parties prenantes de premier plan, au risque d’alimenter les crises futures, a conclu le Représentant spécial.


M. MAMADU SALIU DJALÓ PIRES, Ministre des affaires étrangères de la Guinée-Bissau, a condamné le coup d’État violent perpétré par un soi-disant « commandement militaire » et ayant conduit au renversement de la présidence du pays et à l’emprisonnement du Premier Ministre et candidat à la présidence, ainsi que du Président par intérim de la République.  Si une telle action constituait n’importe où ailleurs une atteinte flagrante à l’état de droit, dans le cas particulier de la Guinée-Bissau, elle prendrait une résonance particulière puisqu’elle s’inscrirait dans la continuité des troubles déjà causés par les forces armées de ce pays.  M. Djaló Pires a ouvertement accusé le chef de l’état-major, M. Antonio Indjai, d’avoir perpétré le coup d’État, dans le seul but de compromettre le processus de réforme et de poursuivre ses associations avec la criminalité organisée et les trafiquants de drogues. 


Le Ministre des affaires étrangères a balayé les arguments invoqués par les militaires selon lesquels il y aurait eu des fraudes électorales, en rappelant que le scrutin s’était déroulé sous la surveillance d’observateurs internationaux et de la société civile nationale, qui ont tous qualifié le processus de transparent et ouvert.  M. Djaló Pires a jugé tout aussi peu crédible l’accusation lancée par l’état-major contre le Gouvernement, selon laquelle ce dernier aurait eu l’intention d’« anéantir les Forces armées de Guinée-Bissau ».  Le Ministre a, au contraire, estimé que les progrès accomplis, en dépit des difficultés, au cours de ces dernières années par la Guinée-Bissau, avec le soutien des Nations Unies et de ses partenaires bilatéraux et multilatéraux, étaient perçus comme une menace par certains éléments, notamment M. Indjai.  Avant de conclure, M. Djaló Pires a « imploré » le Conseil de sécurité d’autoriser le déploiement d’une force de maintien de la paix en Guinée-Bissau dotée d’un mandat vigoureux afin de tourner la page et de permettre l’établissement d’un État démocratique légitime dans le pays.


S’exprimant au nom de la Communauté des pays de langue portugaise(CPLP), M. GEORGES REBELO CHIKOTI, Ministre des affaires étrangères de l’Angola, a estimé que le coup d’État du 12 avril avait mis un terme à la période la plus prometteuse de l’histoire récente pour la Guinée-Bissau, marquée par le retour de la bonne gouvernance et par une croissance économique significative au cours des dernières années.  Soulignant la solidarité historique de la CPLP avec la Guinée-Bissau, le Ministre a fait état du soutien constant du Portugal et du Brésil vis-à-vis de ce pays dans le cadre de projets de développement social et économique.  M. Chikoti a

ensuite rappelé que le Gouvernement de l’Angola avait signé, en 2010, avec son homologue de la Guinée-Bissau un accord bilatéral qui inclut un programme d’aide financière et un volet de coopération militaro-technique à l’appui de la réforme du secteur de la sécurité. 


La Guinée-Bissau, a lancé le Ministre, a besoin d’une « thérapie adéquate » avec l’aide du Conseil, de la Commission de consolidation de la paix (CCP), de l’Union africaine, de la CEDEAO, de la CPLP et d’autres acteurs pertinents.  C’est pourquoi, le Conseil de sécurité doit envisager de prendre des mesures appropriées en vue de rétablir l’ordre constitutionnel, d’assurer la libération sans conditions des dirigeants arrêtés, de créer une force de maintien de la paix pour la Guinée-Bissau, de conclure le processus électoral, ainsi que de mettre en place un régime de sanctions s’appliquant en cas de non-respect de ces mesures.  « Si la Guinée-Bissau est mise en échec, nous serons tous considérés comme responsables », a-t-il prévenu avant de conclure.


M. YOUSSOUFOU BAMBA (Côte d’Ivoire), s’exprimant au nom du Président en exercice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a relevé que durant les deux dernières décennies, les dirigeants d’Afrique de l’Ouest n’avaient épargné aucun effort pour établir une culture démocratique dans la sous-région et pour jeter les bases d’un développement économique prospère en Afrique de l’Ouest.  Il a rappelé que le premier tour de l’élection présidentielle en Guinée-Bissau s’était déroulé le 18 mars dernier, juste avant que cinq dirigeants de partis politiques ne boycottent le second tour du scrutin.  Dans le même temps, les tensions se sont intensifiées entre les forces armées du pays et les forces angolaises présentes dans le pays, dans le cadre de la Mission militaire technique angolaise pour l’assistance et la réforme du secteur de la défense et de la sécurité (MISSANG). 


Face à ces tensions, la CEDEAO, a rappelé le représentant, avait envoyé une mission d’évaluation en Guinée-Bissau le 31 mars dernier.  À la suite de cette mission, le Président de la Guinée, M. Alpha Condé avait été désigné comme médiateur de la crise en Guinée-Bissau.  De même, des recommandations avaient été faites pour sortir le pays de l’impasse, notamment l’appel aux candidats à l’élection présidentielle de ne pas boycotter le second tour du scrutin, a précisé M. Bamba.  En outre, la CEDEAO avait suggéré le retrait de la MISSANG dans un délai de deux mois, et son remplacement par une force de la CEDEAO.  Malheureusement, les dirigeants politiques du pays et l’armée de la Guinée-Bissau avaient rejeté les propositions de la CEDEAO et le coup d’État est intervenu le 12 avril dernier.


La CEDEAO avait dépêché une deuxième mission dans le pays, le 16 avril dernier, pour discuter avec les différents acteurs politiques et militaires du pays des moyens de sortir le pays de l’impasse qu’il traverse.  M. Bamba a précisé que la CEDEAO avait exigé des putschistes le retour à l’ordre constitutionnel et la libération des dirigeants politiques détenus.  De son côté, la junte avait souhaité que la CEDEAO assiste le pays dans la phase de transition.  Le représentant a assuré que la CEDEAO est maintenant prête à déployer une force militaire en Guinée-Bissau, en accord avec les principes d’intervention des Nations Unies, pour sécuriser les institutions et les personnalités publiques et soutenir la transition.  Il a, en outre, annoncé que la CEDEAO organise un sommet extraordinaire sur la Guinée-Bissau le 26 avril prochain.  De plus, une autre délégation de la CEDEAO se rendra de nouveau en Guinée-Bissau le 23 avril.  M. Bamba a souhaité que l’Union africaine et les Nations Unies accompagnent la CEDEAO dans ses efforts de rétablir l’ordre constitutionnel en Guinée-Bissau.


Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI (Brésil) a regretté que 22 jours seulement après avoir informé le Conseil de sécurité des progrès réalisés par la Guinée-Bissau en matière de consolidation de la paix, il soit obligé de revenir pour examiner cette fois la prise de pouvoir illégale du 12 avril 2012.  Elle a précisé que la configuration pour la Guinée-Bissau de la Commission de consolidation de la paix avait condamné dans les termes les plus forts la prise de pouvoir illégale en Guinée-Bissau et la détention arbitraire du Président par intérim, du Premier Ministre et d’autres hauts fonctionnaires.  La représentante a indiqué que la « configuration » a appelé les parties à résoudre leurs différends par le biais de moyens politiques et pacifiques dans le cadre des institutions démocratiques du pays, en s’opposant à tout changement de pouvoir par le biais de mesures inconstitutionnelles. 


Mme Ribeiro Viotti a salué l’engagement des organisations régionales et sous-régionales ainsi que des partenaires internationaux clefs, dont la Communauté des pays de langue portugaise, la CEDEAO et l’Union africaine à rechercher la paix et la sécurité en Guinée-Bissau et la restauration de l’ordre constitutionnel.  Soulignant les récents progrès de la Guinée-Bissau en matière financière, de réforme du secteur de la sécurité et de lutte contre le trafic de drogues, la représentante du Brésil a exhorté la communauté internationale à agir, de manière urgente, afin de préserver les acquis économiques et sociaux du pays.  Le Conseil de sécurité et la communauté internationale dans son ensemble doivent agir, de manière concertée et résolue, afin d’aider la Guinée-Bissau à en finir une fois pour toutes avec le cycle de la violence, des coups d’État, de l’impunité et de l’instabilité, a insisté la représentante du Brésil.          


M. PAULO SACADURA CABRAL PORTAS, Ministre des affaires étrangères du Portugal, s’est félicité que la communauté internationale se soit exprimée d’une seule voix pour condamner la prise de pouvoir illégale en Guinée-Bissau par des éléments des forces armées.  Il a rappelé que le Conseil de sécurité a, quelques heures seulement après le coup militaire, posé les trois conditions suivantes: la libération immédiate du Président par intérim, du Premier Ministre et de tous les officiels retenus; la restauration immédiate de l’ordre constitutionnel et du Gouvernement légitime; et la conclusion du processus électoral.  Il a souhaité que le principe de tolérance zéro approuvée par la CEDEAO à l’égard de toute prise de pouvoir inconstitutionnelle soit respecté.  Il a mis l’accent sur les conséquences de cette crise sur l’instabilité de l’Afrique de l’Ouest, la prolifération et le trafic d’armes et de drogues et la menace croissante de la branche maghrébine d’Al-Qaida.  Aujourd’hui, il y a le choix entre un État basé sur la Constitution ou un État s’appuyant sur le pouvoir du trafic de drogues, a fait remarquer le Ministre. 


Depuis 1998, la Guinée-Bissau a connu une guerre, quatre coups d’État militaires et l’assassinat d’un Président et de quatre chefs d’état-major des forces armées, sans oublier l’assassinat de plusieurs hauts responsables, a-t-il rappelé.  C’est pourquoi, nous ne pouvions plus tolérer ces assassinats et coups militaires comme moyens de résoudre des problèmes.  Le Ministre a déclaré qu’il appartenait à la communauté internationale de saisir ce moment crucial de l’histoire de la Guinée-Bissau, pour mettre fin à la spirale de la violence et à l’interruption de l’ordre constitutionnel et d’avancer de manière efficace vers une réforme du secteur de la sécurité.  Il a souhaité la mise en œuvre de mesures restrictives et la création d’une mission de stabilisation mandatée par l’ONU.  Insistant sur le fait qu’une prise de pouvoir illégale ne pouvait rester impunie, il a appelé le Conseil de sécurité à prendre des mesures similaires à celles de

l’Union européenne qui a suspendu sa coopération avec la Guinée-Bissau et s’apprête à appliquer des sanctions aux individus qui font obstacle à la paix, la sécurité et au fonctionnement normal des institutions constitutionnelles.  Il a exhorté le Conseil de sécurité à prendre en compte l’appel du Gouvernement légitime pour l’envoi d’une mission de stabilisation internationale de l’ONU, qui comprendrait des contingents de la CEDEAO, de l’Union africaine et de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP).


M. KODJO MENAN (Togo) a précisé à nouveau que le Togo « rejetait le recours à la force comme moyen de règlement des problèmes politiques ».  Il a ajouté que le coup d’État que les auteurs considéraient comme une solution, portait en lui-même les germes d’une remise en cause, à terme, de l’ordre qu’il prétend établir.  Le représentant a ensuite relevé que ce coup d’État du 12 avril dernier en Guinée-Bissau vient saper les perspectives prometteuses du pays, au regard des progrès accomplis au cours de ces dernières années dans le cadre de la consolidation de la paix.  Il a salué, dans ce contexte, le travail effectué par le Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau (BINUGBIS), notamment les appuis qu’il a apportés à la Commission électorale en vue du bon déroulement du processus électoral qui vient de connaître un coup d’arrêt du fait du coup d’État.  M. Kodjo a indiqué, par ailleurs, que cette situation interpelle la communauté internationale sur la problématique de « l’irruption récurrente de l’armée dans la vie politique en Guinée-Bissau ». 


Le représentant a ensuite attiré l’attention sur le besoin d’effectuer des réformes dans le secteur de l’armée et de la sécurité, de la lutte contre la drogue et la criminalité transnationale organisée en Guinée-Bissau.  Il a suggéré la création d’un fonds de pension pour les militaires, sous la conduite de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), et avec le soutien des Nations Unies.  Le représentant a également salué la « disponibilité dont ferait montre la junte en Guinée-Bissau pour un retour rapide à l’ordre constitutionnel ».  Il a ensuite relevé que ce coup d’État en Guinée-Bissau, survenu après celui du Mali, constitue un évènement de plus qui porte atteinte à la situation précaire que connaît l’Afrique de l’Ouest.  Le trafic et la circulation des armes et de la drogue, la criminalité organisée et les activités des groupes armés islamiques radicaux, la piraterie dans le golfe de Guinée, la crise humanitaire et l’afflux de milliers de réfugiés et les velléités sécessionnistes sont les problèmes auxquels est confrontée la sous-région, a-t-il fait remarquer.  C’est pourquoi, le Conseil de sécurité doit adopter une position ferme face à la dérive militariste qui plane constamment sur les institutions, en particulier en Afrique.


M. BASO SANGQU (Afrique du Sud) a déclaré que le coup d’État militaire, perpétré le 12 avril dernier, avait compromis les progrès enregistrés, au cours de ces dernières années, dans la mise en œuvre de la réforme du secteur de la sécurité en Guinée-Bissau.  Seuls le retour à l’ordre constitutionnel et la libération sans condition de tous les prisonniers retenus contre leur gré permettront de remédier à une telle situation, a estimé le représentant.  À l’instar de l’Union africaine, qui a suspendu la Guinée-Bissau de son droit à siéger au sein de cette organisation, la communauté internationale doit maintenant adresser un message très clair par lequel elle fera comprendre qu’elle ne tolèrera pas l’impunité. 


Pour sa part, l’Afrique du Sud rejette toute tentative supplémentaire de remettre en cause l’état de droit dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.  Son gouvernement, a indiqué le représentant, appelle en outre à la conclusion du processus électoral, interrompu après le premier tour, conformément à la décision rendue par la Cour suprême de Guinée-Bissau.  M. Sangqu a également déclaré que l’Afrique du Sud soutenait les efforts coordonnés de l’Union africaine, de la CEDEAO, de la CPLP et des partenaires bilatéraux pour favoriser le retour à l’ordre constitutionnel et de promouvoir le développement, la bonne gouvernance, la démocratie, la réforme du secteur de la sécurité et la lutte contre le trafic de drogues.  Avant de conclure, il a souhaité que les auteurs de ce coup d’État soient tenus responsables de leurs actions.


*   ***   *

À l’intention des organes d’information • Document non officiel
À l’intention des organes d’information. Document non officiel.