Conférence de presse du Président du Conseil de sécurité pour le mois d'août sur le programme de travail mensuel du Conseil
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LA PRÉSIDENCE FRANÇAISE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ POUR LE MOIS D’AOÛT ESPÈRE PARVENIR À UNIR TOUS LES MEMBRES
SUR LES QUESTIONS HUMANITAIRES EN SYRIE, DÉCLARE L’AMBASSADEUR GÉRARD ARAUD
Le Président du Conseil de sécurité pour le mois d’août et Représentant permanent de la France auprès des Nations Unies, M. Gérard Araud, a présenté, cet après-midi, devant la presse le programme de travail du Conseil de sécurité de ce mois. La situation en Syrie a retenu l’essentiel de l’attention des journalistes, notamment après l’annonce, ce matin, de la démission de l’Envoyé spécial conjoint des Nations Unies et de la Ligue des États arabes pour la crise en Syrie, M. Kofi Annan.
L’Ambassadeur Araud a exprimé sa quasi certitude concernant le non-renouvellement de la Mission de supervision de l’ONU en Syrie (MISNUS), dont le mandat s’achève le 19 août. Face à des « divisions très profondes et irréconciliables en termes politiques » qui confirment le blocage du Conseil de sécurité sur la situation en Syrie, la France a l’intention d’orienter le débat sur les questions humanitaires, a-t-il dit. Il a aussi émis l’espoir que le texte proposé par le Groupe des États arabes à l’Assemblée générale sera adopté demain.
Au cours du mois d’août, outre les séances consacrées au renouvellement du mandat de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) et au débat trimestriel sur la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), le Président du Conseil a indiqué qu’en application de ses résolutions, le Conseil examinera également la situation en Somalie, au Soudan et au Soudan du Sud, au Mali et en Syrie.
Le Conseil dissocie en principe les sujets libanais et syrien, a précisé M. Araud à propos du renouvellement du mandat de la FINUL qui, selon lui, ne devrait pas poser de problème particulier.
Par ailleurs, le 2 août est l’échéance prévue par la résolution 2046 (2012) du 2 mai 2012 qui demandait au Soudan et au Soudan du Sud de prendre certaines mesures, a-t-il rappelé. Même si des progrès ont été accomplis, les deux pays n’ont pas rempli toutes les conditions posées, a-t-il indiqué. Les membres du Conseil sont d’accord pour ne pas envisager des sanctions à ce stade, mais ils souhaitent continuer à exercer une pression sur les deux Soudan.
Le 8 août, il est prévu que le Secrétaire général fasse un exposé devant le Conseil sur le thème « paix et sécurité en Afrique », conformément à la résolution 2056 (2012) du 5 juillet dernier concernant le Mali, mais aucune décision particulière ne devrait être prise par le Conseil, a précisé le Président du Conseil.
« Le point le plus difficile sera la résolution 2059 (2012) », texte adopté le 20 juillet dernier pour proroger le mandat de la MISNUS « pour une dernière période de 30 jours ». M. Araud a tout d’abord rappelé que la Mission en Syrie avait dû suspendre ses activités à la mi-juin, sur décision du général Robert Mood, alors Chef de la MISNUS. Les conditions de sécurité ne permettaient pas de maintenir le personnel sur le terrain et, mis à part quelques patrouilles qui continuent à être menées, le Secrétaire général a retiré la moitié des effectifs.
À la suite du double veto sino-russe, le Conseil de sécurité a renouvelé le mandat pour 30 jours, dans la reconfiguration proposée par le Secrétaire général, en attendant le rapport à mi-parcours de celui-ci. Ce rapport sera présenté, cet après midi, au Conseil, par le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Hervé Ladsous, au nom du Secrétaire général, a expliqué M. Araud.
Selon le Président du Conseil, la question la plus difficile est celle du sort de la Mission après l’expiration de son mandat le 19 août. Des consultations sont prévues le 16 août, a-t-il dit, tout en soulignant que « les divisions restent toujours aussi profondes ». Il a prévenu qu’il pourrait y avoir un affrontement entre ceux qui pensent que la Mission doit prendre fin et ceux qui souhaitent la prolonger. Il faudra ainsi adopter une nouvelle résolution.
En ce qui concerne la fin de la transition en Somalie, prévue le 20 août, M. Araud a expliqué que, un peu comme pour le Soudan et le Soudan du Sud, « le verre est à moitié vide ou à moitié plein ». Dans sa déclaration présidentielle sur la question, le Conseil avait décidé que cette période de transition ne serait prorogée, a-t-il rappelé, avant d’annoncer des consultations le 28 août sur le sujet.
Enfin, le débat sur la Mission au Kosovo, qui est programmé tous les trois mois, sera « l’occasion de faire la connaissance du nouveau Ministre des affaires étrangères de la Serbie », a-t-il dit.
Revenant à la question de la Syrie, le Représentant permanent a rappelé que le Ministre français des affaires étrangères, M. Laurent Fabius, avait annoncé son intention de tenir une réunion ministérielle au Conseil de sécurité. En Europe, les évènements en Syrie provoquent une indignation du public, a expliqué M. Araud, en invoquant par ailleurs le blocage évident du Conseil de sécurité après des vetos à trois reprises. « La réunion ministérielle devrait se tenir à la fin du mois, mais ce n’est pas facile en raison des divisions extrêmement profondes et vives ».
Il a précisé que la France explore la manière d’organiser une réunion ministérielle et réfléchit sur ce que peut faire le Conseil de sécurité, notamment en ce qui concerne les questions humanitaires. Alors que 3 millions de Syriens ont besoin de nourriture et d’aide humanitaire, les autorités syriennes ne laissent pas accès aux organisations humanitaires, à part le Croissant Rouge syrien qui est débordé de travail.
« L’évolution de la crise syrienne pourrait nous amener à tenir d’autres réunions », a aussi prévenu M. Araud. « Par ailleurs, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a annoncé qu’elle reviendrait devant le Conseil pour demander le déploiement d’une force de maintien de la paix au Mali, mais nous n’avons pas d’informations particulières à cet égard », a-t-il ajouté.
Interrogé sur tous les aspects de la crise syrienne et de la dynamique du Conseil à ce sujet, M. Araud a estimé que « les trois vetos ont été extrêmement clairs ». Le texte du projet de résolution était pourtant modéré, car il ne prévoyait pas de sanctions, ni de menace de sanctions, a-t-il estimé. « Le Conseil de sécurité est définitivement impuissant face à la crise en Syrie », a-t-il regretté, avant d’ajouter: « Mais nous voudrions au moins prouver que le Conseil peut réagir dans le domaine humanitaire ». Malgré le « gouffre politique » qui sépare deux membres du Conseil de la majorité de ses membres, il a émis l’espoir de retrouver une unité au Conseil sur les questions humanitaires.
De l’avis de M. Araud, si le blocage du Conseil est préoccupant et si la crédibilité du Conseil est atteinte, la question la plus grave est le sort du peuple syrien. « On a l’impression épouvantable que la situation ne peut que s’aggraver », a-t-il observé, en soulignant l’évaluation faite par le Comité international de la Croix-Rouge qui affirme qu’il s’agit bien d’une guerre civile. Il a aussi exprimé ses craintes pour le Liban, dont les partis politiques et le Gouvernement ont, selon lui, réagi jusqu’à présent de façon admirable.
Le Président du Conseil a aussi donné son avis sur les possibilités de renouvellement du mandat de la MISNUS. « Honnêtement, a-t-il dit, je pense qu’il n’y aura pas d’accord et que la Mission disparaîtra la 19 août. ». « Je ne vois pas de scénario, sauf changement sur le terrain, qui permettrait le maintien de la Mission ». Indiquant ne pas avoir encore reçu d’instructions officielles sur ce point, il a expliqué que la Mission ne pouvait pas remplir sa mission de mettre fin à la violence et de soutenir le processus politique. Il a soulevé, en outre, le problème de la sécurité des membres de la Mission. Ils interviennent, ce qui est rare pour une force des Nations Unies, dans une zone de guerre, a-t-il fait remarquer.
Sur la démission de M. Kofi Annan, le Président du Conseil a reconnu qu’on lui avait confié « une mission impossible », car il n’y a actuellement ni processus politique, ni de négociations en cours. On a l’impression que c’est la logique militaire qui l’emporte avec les risques que cela entraîne pour la région, a-t-il fait observer. Il appartiendra aux Secrétaires généraux de l’ONU et de la Ligue des États arabes de désigner un successeur. L’Ambassadeur français a estimé que, même si la situation est désespérée, il serait quand même utile de désigner un successeur. « Il n’y a rien de plus dangereux que le vide politique absolu ».
L’Ambassadeur Araud a espéré qu’à l’Assemblée générale, une large majorité des États Membres approuveront le texte présenté par le Groupe des États arabes, lequel, a-t-il fait remarquer, est basé sur le projet de résolution rejeté au Conseil de sécurité à cause des deux vetos. La Fédération de Russie et la Chine représentent une très petite minorité, mais je vois déjà les objections qu’elles vont exprimer, a-t-il dit. Il a aussi reconnu que sa délégation avait, à un moment, exprimé certaines réserves sur le texte préparé par le Groupe des États arabes.
« Nous allons essayer de travailler avec l’opposition syrienne afin qu’elle soit unie et, le moment venu, capable d’entamer un dialogue. L’Ambassadeur Araud a précisé que la France apportait un soutien politique à l’opposition syrienne, notamment avec la Turquie. « Nous avons déjà annoncé que nous sommes prêts à fournir des équipements non létaux », a-t-il rappelé.
Enfin, interrogé sur la déclaration à la presse lue ce matin par le Président du Conseil au sujet de la République démocratique du Congo (RDC), l’Ambassadeur Araud a précisé que les membres du Conseil avaient buté sur la question de savoir s’il fallait ou non citer nommément certains pays. « Le texte est le résultat d’un compromis délicat et difficile à atteindre », a-t-il expliqué. Il a aussi exprimé combien la situation en RDC était tragique. Outre les nombreux morts et les souffrances vécues par la population, il a mentionné les 200 000 personnes déplacées depuis la reprise des combats, le problème de l’enrôlement d’enfants soldats et les viols massifs. La MONUSCO fait un travail très courageux, avec seulement 19 000 hommes, a-t-il assuré. Mais « la Mission est allée au bout de son mandat », a-t-il ajouté, avant d’évoquer l’idée de mettre en place une force neutre.
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