Les experts de la CEDAW dénoncent une définition « étroite » de la traite des êtres humains à Singapour et l’absence d’une commission des droits de l’homme
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Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
Quarante-neuvième session
993e et 994e séances – matin et après-midi
LES EXPERTS DE LA CEDAW DÉNONCENT UNE DÉFINITION « ÉTROITE » DE LA TRAITE DES ÊTRES HUMAINS À SINGAPOUR ET L’ASBENCE D’UNE COMMISSION DES DROTS DE L’HOMME
L’examen, aujourd’hui, du quatrième rapport périodique de Singapour sur la mise en œuvre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) a suscité de nombreuses questions de la part des 23 experts du Comité du même nom qui ont, entre autres, dénoncé une définition « étroite » de la traite des êtres humains et l’absence d’une commission nationale des droits de l’homme.
Devant une délégation singapourienne conduite par la Ministre du développement communautaire, de la jeunesse et des sports, l’experte de la Suisse s’est étonnée de ce que Singapour, qui a ratifié la Convention, il y a maintenant 16 ans, ne l’ait toujours pas intégrée dans la législation nationale. D’où, a commenté l’experte du Bangladesh, une définition « étroite » de la traite des êtres humains qui ne s’élargit au travail forcé.
La délégation, qui s’est enorgueillie de ce que bien avant la ratification de la Convention, les principes de l’égalité entre les sexes étaient consacrés par l’article 12 de la Constitution et la Charte des droits de la femme de 1961, a pourtant reconnu la « gravité » du problème de la traite à Singapour, « un phénomène important qui se développe », a prévenu l’experte du Bangladesh.
Son homologue de l’Espagne a dénoncé les annonces des agences matrimoniales du type « femme jeune, presque enfant, s’offre comme épouse », avant que l’experte de la Turquie ne s’inquiète de l’importance attachée à la chirurgie esthétique.
La délégation singapourienne a tenu à préciser que plus de 40% des cas de traite sur lesquels la police a enquêté ont fait l’objet de mesures « proactives ». En 2010, 94 personnes ont été arrêtées alors que la police avait mené 3 600 opérations sur le marché du sexe. « Tout est mis en œuvre pour réduire la demande des activités commerciales à caractère sexuel, le but étant de gêner l’offre aussi bien que la demande », a affirmé la délégation.
La situation des travailleurs migrants et domestiques a été commentée à maintes reprises; l’experte de l’Espagne s’étant notamment inquiétée du fait que le travail domestique ne semblait pas être régi par la loi.
La délégation a argué d’unnouveau cadre régulateur pour les agences de l’emploi afin de limiter les abus et les mauvaises pratiques. Toute personne qui exploite un travailleur étranger encoure dorénavant des peines plus sévères qu’auparavant, et un plafond a été imposé aux frais de recrutement que les travailleurs étrangers versent aux agences.
Les critiques sur l’absence d’une commission nationale des droits de l’homme ont valu aux experts cette réponse de la délégation: « créer une commission pour suivre l’application de la Convention est une pure formalité, ce qui importe c’est d’examiner ce qu’a accompli le pays ».
Comme les experts ont reproché à Singapour de ne pas intégrer automatiquement les traités et les conventions dans la législation nationale et de priver, à ce titre, une partie lésée, du droit d’invoquer les dispositions de la CEDAW devant les tribunaux, la délégation a assuré que des efforts concrets sont déployés pour incorporer la Convention, malgré l’absence de lois ponctuelles.
Les experts l’ont tout de même félicitée pour le retrait partiel des réserves émises aux articles 2 et 16 de la CEDAW relatifs aux mesures politiques, au mariage et à la vie de famille.
La prochaine réunion du Comité CEDEF aura lieu vendredi 29 juillet, à partir de 16 heures.
Présentation du quatrième rapport périodique de Singapour (CEDAW/C/SGP/4)
Mme HALIMAH YACOB, Ministre du développement communautaire, de la jeunesse et des sports de Singapour, a expliqué qu’afin d’assurer une meilleure coordination s’agissant des mesures législatives et autres relatives à la mise en œuvre de la CEDAW, le Gouvernement avait établi un Comité appuyé par le Bureau pour le développement des femmes du Ministère qu’elle dirige. Elle a signalé que Singapour figurait au dixième rang de l’indice de disparité entre les sexes de l’ONU. L’espérance de vie des Singapouriennes est de 84 ans et le taux de mortalité maternelle compte parmi les plus faibles au monde.
La Ministre a ensuite expliqué que grâce aux possibilités en matière d’éducation, de nombreuses femmes choisissaient de travailler et de garantir ainsi leur indépendance économique. En 2010, les femmes représentaient 56,5% de la population active, comparé à 30% pendant les années 1970. Mme Yacob a également indiqué qu’un nombre croissant d’entreprises avaient adopté des initiatives relatives à l’aménagement des horaires de travail afin d’aider leurs employées à concilier vie professionnelle et vie familiale. Le Gouvernement a aussi renforcé son système d’allocations pour les crèches et les gardes d’enfants.
La chef de la délégation a par ailleurs signalé que les femmes représentaient 25,3% des employeurs du pays, comparé à 16,8% en 1999, et qu’elles occupent 59% des places dans les hautes sphères de la fonction publique. Un peu moins de 20% des juges de la Cour suprême sont des femmes.
Mme Yacob a cependant indiqué que des efforts constants étaient nécessaires pour assurer l’accès des femmes aux emplois dans les nouvelles technologies. Il faut également aider les femmes à mieux concilier vie professionnelle et vie familiale et améliorer les infrastructures destinées à aider les femmes âgées.
Après avoir fait savoir que Singapour avait ratifié l’amendement à l’article 20 de la CEDAW, la Ministre s’est attardée sur l’application de la charia à Singapour. Elle a annoncé que son pays avait partiellement retiré ses réserves aux articles 2 et 16 de la CEDAW, avant de signaler que la loi sur le droit musulman avait été amendée en 2008 de manière à faire passer l’âge minimum de mariage de 16 à 18 ans pour les deux époux.
La même année, une fatwa a été émise reconnaissant le conjoint survivant comme propriétaire légal des biens du couple à condition qu’une « nuzriah » ou legs ait été établi entre les époux de leur vivant. Une autre fatwa permet dorénavant aux détenteurs d’un fonds central de prévoyance de nommer leur conjoint ou personnes à charge comme bénéficiaire du montant du compte.
Revenant sur le maintien de réserve à l’égard des articles 2 et 16, Mme Yacob a argué que la minorité musulmane devait pouvoir respecter son droit familial et personnel. La Ministre a ensuite fait savoir que les femmes occupaient désormais 22,2% des sièges au Parlement. Depuis 2008, elles bénéficient d’un congé-maternité de 16 semaines, par rapport à 12 précédemment; les femmes enceintes sont protégées de tout licenciement abusif. La subvention des crèches et les allocations familiales ont également été augmentées. Les mères qui travaillent bénéficient d’une aide fiscale tandis que les femmes chefs de famille peuvent maintenant déclarer leur mari comme personne à charge. Mme Yacob s’est également félicitée de ce que depuis 2009, 30% des pères avaient profité des nouveaux congés payés pour parents d’un enfant en bas âge.
Pour ce qui est des femmes vulnérables, la Ministre a indiqué que les lois du pays avaient été renforcées de manière à protéger les femmes et les jeunes filles du commerce du sexe. Le tourisme pédophile est punissable, comme toute promotion de l’exploitation sexuelle de mineurs. Par ailleurs, la Charte des femmes a été renforcée pour les protéger des conséquences du divorce.
Mme Yacob a également fait savoir qu’une équipe interagences de lutte contre la traite des personnes avait été mise sur pied en mars 2011. La politique met l’accent sur la coopération avec les pays voisins, les ONG et le secteur privé et encourage les dénonciations, la protection des victimes ainsi que le partage d’informations. Singapour envisage par ailleurs d’adhérer au Protocole sur la traite des personnes.
Les lois relatives aux travailleurs migrants sont régulièrement révisées, a poursuivi la chef de la délégation. Le Ministère du travail a créé un nouveau cadre régulateur pour les agences d’emplois dans le but de limiter les abus et les mauvaises pratiques. Toute personne qui exploite un travailleur étranger encoure des peines plus sévères qu’auparavant. Un plafond a été imposé aux frais de recrutement que les travailleurs étrangers versent aux agences. Ce point est d’autant plus significatif que pratiquement tous les travailleurs étrangers arrivent à Singapour par l’intermédiaire d’une agence de recrutement.
La Ministre a ensuite fait savoir que la population de Singapour vieillissait et que son pays améliorait, par conséquent, ses services de soins préventifs et de soins de santé primaire. Elle a notamment indiqué que le dépistage du cancer du sein et du cancer du col de l’utérus était fortement subventionné. Par ailleurs, la nouvelle loi sur la retraite et la reprise de travail permet aux personnes de travailler au-delà de l’âge minimum de la retraite qui est de 62 ans. Une loi relative aux parents à charge permet en outre aux personnes âgées qui se trouvent dans le besoin d’obtenir une aide financière de la part de leurs enfants.
Articles 1, 2 et 3 relatifs à la discrimination, aux mesures politiques et à la garantie des droits de l’homme et des libertés fondamentales
Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIĆ, experte de la Croatie, a demandé des précisions sur le rôle du Parlement dans la rédaction du rapport. Elle a regretté l’absence de précisions sur la non-ratification du Protocole facultatif de la Convention. Les tribunaux peuvent-ils invoquer la Convention? Avez-vous l’intention d’interdire explicitement la discrimination fondée sur le sexe?
Mme PATRICIA SCHULZ, experte de la Suisse, a demandé si Singapour souhaitait ratifier les autres sept traités internationaux en matière de droits de l’homme. Elle a estimé que le paragraphe 2 de l’article 12 de la Constitution limitait la protection des Singapouriennes et semblait exclure les femmes migrantes. Elle a demandé des précisions sur le cadre juridique relatif aux homosexuels et transgenres.
Mme VICTORIA POPESCU, experte de la Roumanie, a invité Singapour à créer un mécanisme indépendant pour les droits de la personne. Elle a regretté qu’il n’y ait toujours pas de médiateur ou d’ombudsman ni de loi globale sur la lutte contre la discrimination.
Mme YOKO HAYASHI, experte du Japon, a demandé des précisions sur le fonctionnementduComité de coordination pour la mise en œuvre de la Convention. Elle a demandé si le « Service des affaires féminines » offrait des cours de sensibilisation aux juges, policiers ou agents de la fonction publique, en général.
Réponse de la délégation
La délégation a précisé que l’article 12 de la Constitution stipule que « toutes les personnes sont égales devant la loi et ont droit à une protection égale de la loi ». Ces principes s’appliquent naturellement aux femmes qui sont ainsi protégées de la discrimination fondée sur le sexe. Elle a aussi précisé que les conventions et traités internationaux ne sont pas automatiquement intégrés dans la législation nationale.
Toute personne s’estimant victime de discrimination ne peut invoquer que les dispositions nationales conformes à la « Convention » mais pas la « Convention » en tant que telle. Le Gouvernement continue d’étudier la possibilité d’adhérer au Protocole facultatif de la « Convention ». Il ne l’a pas encore fait parce qu’il estime que les dispositions nationales permettent déjà de lutter contre toutes les formes de discrimination dont seraient victimes les femmes.
Une enquête a montré que seules 0,02% des personnes ont indiqué avoir été l’objet de discrimination sur le lieu de travail. La délégation a avoué que certaines dispositions du droit musulman rendaient obligatoire le maintien de certaines réserves à la Convention, dont l’article 16 de la Constitution relatif au mariage. Aussi, la loi permet-elle la polygamie mais, au cours des six dernières années, les mariages polygames représentaient moins de 1% des unions; la femme pouvant s’opposer à ce que son mari prenne une deuxième femme. À ce jour, il n’y a pas de mariage de filles de moins de 18 ans, même si cela est encore légal.
Singapour ne veut pas seulement ratifier des conventions pour la forme. Créer une commission des droits de l’homme pour suivre l’application de la Convention est une pure formalité, ce qui importe c’est d’examiner ce qu’a accompli le pays, a argué la délégation. Le Gouvernement a décidé de mobiliser toutes les ressources des différents ministères pour faire avancer l’égalité entre les sexes.
Articles 4, 5 et 6 relatifs aux mesures spéciales, aux rôles stéréotypés par sexe et préjugés, et à la prostitution
Mme VIOLETA NEUBAUER, experte de la Slovénie, a demandé des précisions sur la structure du Gouvernement. Il semblerait qu’un certain nombre de ministères ne soient pas représentés dans le Comité interministériel, notamment celui des finances. Singapour est encore loin d’une représentation équitable des femmes aux postes de direction; les efforts du Gouvernement en la matière n’étant pas tous conformes à la Convention.
Garantir un traitement égal des femmes ne suffit pas, il faut opérer un changement culturel et politique, a-t-elle souligné. Il revient au Gouvernement de supprimer les privilèges dont bénéficient les hommes dans la vie publique et privée. Les mesures temporaires spéciales ne doivent pas être considérées comme une aide aux femmes, mais comme un instrument de correction du déséquilibre entre les sexes, a tranché l’experte.
Mme AYSE FERIDE ACAR, experte de la Turquie, s’est dite préoccupée par l’importance de l’industrie de la beauté à Singapour, notamment la chirurgie esthétique. L’exagération de la beauté féminine est un stéréotype traditionnel et le faire par la médecine moderne est préoccupant, a-t-elle estimé.
Elle a par ailleurs observé que la société singapourienne continuait d’adhérer à l’idée que l’homme est le chef de famille. Pourquoi en est-il ainsi, a-t-elle demandé, et que fait le Gouvernement pour lutter contre cela? L’égalité se traduit par une égalité de résultat et pas uniquement par une égalité des chances, a prévenu l’experte.
Mme NAELA MOHAMED GABR, experte de l’Égypte, a rappelé que Singapour était un pays de destination pour la traite et a engagé le pays à ratifier la nouvelle Convention de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur le droit des travailleurs domestiques. Elle s’est inquiétée d’une législation nationale qui donne une définition très limitée de la traite.
Quelles sont les mesures de protection de témoins? Nos sources indiquent que les victimes sont refoulées vers leur pays d’origine et que leur nombre ne fait qu’augmenter, a dit l’experte.
Mme SOLEDAD MURILLO DE LA VEGA, experte de l’Espagne, a voulu savoir si le Conseil national de la famille reconnaît la responsabilité des parents s’agissant des soins à donner aux enfants? Elle a relevé que des inégalités découlaient du fait que les femmes ne font pas le service militaire. Elle s’est par ailleurs inquiétée du contenu des annonces des agences matrimoniales qui, a-t-elle affirmé, décrivent souvent un rôle d’esclavage et d’asservissement. Elle a notamment fait lecture d’une annonce pour « femme jeune, presque enfant, s’offre comme épouse ».
L’experte a aussi observé que pratiquement tous les ménages avaient un employé domestique et que ce travail n’était pas considéré comme « normal », ni réglementé par le droit. Que fait l’État pour protéger les travailleurs domestiques victimes d’abus, dont d’abus sexuels?
Mme SILVIA PIMENTEL, experte du Brésil,a demandé si Singapour comptait intégrer dans sa législation nationale les principes de l’article 5 de la Convention relatif aux « rôles stéréotypés des sexes et préjugés ». Elle a invité Singapour à mettre fin à la censure touchant les homosexuels dans les médias et à s’appuyer sur les récentes initiatives du Brésil concernant les homosexuels.
Mme ISMAT JAHAN, experte du Bangladesh, a estimé que la législation nationale contre la traite des êtres humains est loin de répondre aux attentes du CEDAW, car elle ne protège pas assez les victimes. Si l’État partie prétend que les cas de traite sont très rares, il semble au contraire qu’il s’agit d’un phénomène important qui se développe. Il semble, a-t-elle ajouté, que cette perception soit le fait d’une définition insuffisante de la traite qui ne prend pas en compte la question du travail forcé. Comptez-vous adopter une loi générale de lutte contre la traite ayant une dimension sexospécifique? Votre politique de l’immigration est trop restrictive et peut favoriser la traite.
Mme ZOHRA RASEKH, experte de l’Afghanistan, a demandé des précisions sur le mandat de l’Équipe interinstitutions de lutte contre la traite des êtres humains. Elle a souhaité des informations sur les efforts menés en termes de prévention et d’information sur les droits et recours des travailleuses migrantes. Quels financements avez-vous fourni aux ONG qui peuvent sensibiliser le public ou les autorités?
Mme VIOLET TSISIGA AWORI, experte du Kenya, s’est aussi attardée sur la question de la définition de la traite. Avez-vous mis en place une formation pour les agents de police et les services judiciaires?
Réponse de la délégation
La délégationa reconnu la gravité du problème de la traite à Singapour. Elle a précisé qu’une femme victime de la traite ne peut être poursuivie. Toute personne arrêtée pour prostitution bénéficie d’une protection et est considérée comme une victime si elle a été forcée. Des cours de formation sont prévus pour les policiers. Des installations spéciales ont été créées pour limiter le traumatisme des victimes durant l’enquête. Le taux d’occupation des trois abris dont le pays dispose est de 80%. Un des problèmes auxquels Singapour se heurte est le manque de suivi des ambassades qui ne répondent pas toujours aux demandes de renseignements.
Plus de 40% des cas de traite sur lesquels la police a enquêté ont fait l’objet de mesures proactives, a précisé la délégation, en assurant que l’Équipe interinstitutions essaye d’aligner ses politiques sur les dispositions de la « Convention ». Elle travaille actuellement à l’élaboration d’un plan d’action national qui comprendra une mission de sensibilisation. Tout est mis en œuvre pour réduire la demande des activités commerciales à caractère sexuel. Le but est de gêner l’offre aussi bien que la demande. En 2010, 94 personnes ont été arrêtées et la police a mené 3 600 opérations sur le marché du sexe.
Naturellement, a poursuivi la délégation, les employeurs qui maltraitent leurs travailleurs domestiques sont passibles de poursuites. Ils doivent assurer l’hébergement et la couverture médicale de leurs travailleurs. L’année dernière, cinq personnes ont été poursuivies pour mauvais traitement.
La prime payée à l’agence de recrutement ne peut dépasser un ou deux mois de salaire, l’agence devant rembourser 50% si la personne est licenciée dans les six mois suivant son entrée en service. La majorité des travailleurs, a affirmé la délégation, est satisfaite de sa situation et est consciente de ses droits. La loi sur l’emploi des étrangers doit être révisée l’année prochaine.
Le Gouvernement a lancé des cours d’éducation sur l’amour propre et l’importance d’avoir une image positive de soi. Les médecins sont passibles de peines disciplinaires s’ils ne respectent pas les directives mais rien n’a été imposé aux instituts de beauté si ce n’est que toutes les informations doivent se fonder sur les faits, conformément au mécanisme mis en place sur l’éthique dans la publicité.
Rien n’empêche les Singapouriennes de faire le service militaire, a aussi précisé le représentant, en soulignant que les femmes touchent un salaire plus élevé que les hommes dans le secteur tertiaire.
Les agences matrimoniales ne sont régies par aucune loi mais leurs annonces doivent respecter certaines normes, dont l’intégrité de la personne.
La délégation a argué que, le fait que le Ministère des finances ne soit pas représenté au Comité interministériel ne signifie pas que la question du financement soit délaissée. Singapour estime aussi que les mesures temporaires spéciales ne sont nécessaires que dans les situations où les violations sont très graves. Or, les politiques du pays encouragent la pleine participation des femmes à tous les aspects de la société.
Questions de suivi
Si Singapour respecte les droits de l’homme, pourquoi ne ratifie-t-il pas les conventions pertinentes?, a demandé l’experte de la Suisse. Elle est revenue sur la situation des homosexuelles et a demandé des précisions sur le fonctionnement de l’aide judiciaire. La Convention a été ratifiée il y a 16 ans, mais n’est toujours pas intégrée à la législation nationale, s’est-elle étonnée.
L’experte de la Croatie a demandé des explications sur les réserves de Singapour.
L’experte de la Turquie,a souhaité des précisions sur la définition du chef de famille. Quel est le pourcentage de chefs de famille hommes, a-t-elle insisté.
L’experte de l’Espagne,a souhaité des précisions sur la lutte contre les dérives des agences matrimoniales.
Mme RUTH HALPERIN-KADDARI, experte d’Israël,a jugé nécessaire que Singapour poursuive ses efforts pour adapter la charia aux principes de la Convention. Elle a demandé si des femmes étaient membres du Conseil de la religion islamique et si des femmes occupaient des postes de direction au sein de la communauté musulmane, en général.
L’experte de la Roumanie a voulu savoir comment Singapour donnait effets aux lois spéciales visant à intégrer la Convention dans la législation nationale. Quelles mesures ont été adoptées pour permettre aux plaignants d’invoquer la Convention devant les tribunaux? Quelles sont les garanties pour le respect des droits de l’homme à Singapour? Des déclarations d’engagement ont été prises, mais la mise en œuvre fait encore défaut, a-t-elle estimé.
Réponse de la délégation
La délégation a assuré que des efforts concrets étaient déployés pour incorporer la Convention au droit national, malgré l’absence de lois ponctuelles. Le principe d’égalité sérieusement considéré et l’article 12 de la Constitution est invoqué devant les tribunaux du pays. Les recommandations du Comité sont dûment prises en compte, de même que les observations générales. Les tribunaux tiennent dûment compte des instruments internationaux. La loi protège la femme contre la violence; toute personne coupable est passible d’une peine de prison d’au moins six mois, conformément au Code pénal.
Les femmes sont au nombre de 21 au Conseil de la religion islamique. L’élite religieuse se montre d’ailleurs très sensible au fait que les femmes doivent participer à l’élaboration des fatwas les concernant directement. De plus, 14,7% des administrateurs des mosquées sont des femmes.
À ce stade, le Gouvernement pense que ses objectifs en matière de parité peuvent être atteints grâce aux instruments dont il dispose déjà. Aucune loi ne spécifie que l’homme doit assumer le rôle de chef de famille. Le reste tient des préjugés dont l’élimination participe d’un processus continu. La délégation a tout de même reconnu que le fonctionnement des agences matrimoniales peut parfois poser problème.
Articles 7 et 8 relatifs à la vie politique et publique, et à la représentation
Mme OLINDA BAREIRO-BOBADILLA, experte du Paraguay, a demandé si les organisations de femmes avaient les moyens d’influencer la budgétisation des ministères impliqués dans la promotion des droits de la femme. Le Comité interministériel compte-t-il accroître la présence des femmes en son sein? Après avoir exhorté Singapour à prendre des mesures temporaires pour renforcer la présence des femmes dans la vie politique, elle a voulu en savoir sur le pouvoir des femmes au sein du Conseil de la religion islamique de Singapour.
Mme MARIA HELENA LOPES DE JESUS PIRES, experte du Timor-Leste, a demandé combien de femmes siégeaient au Parlement et quel était leur niveau de représentativité au sein des partis politiques. Elle a demandé des précisions sur la représentation des femmes appartenant à des minorités sexuelles.
Article 9 relatif à la n ationalité
Mme ZOU, experte de la Chine, s’est félicitée que Singapour ait en avril 2004 permis aux enfants nés à l’étranger de mère singapourienne d’acquérir la nationalité de leur mère. Mais qu’advient-il des enfants nés avant 2004?
Réponse de la délégation
La délégation a précisé qu’il y avait deux femmes de moins au Parlement depuis les élections générales de mai 2011. Elle a aussi parlé d’un réseau d’assistance aux femmes étrangères qui reçoivent une protection égale à celle des femmes singapouriennes. Elle a ajouté que 90% des demandes de naturalisation présentées par les femmes étrangères reçoivent une réponse positive.
Article 10 relatif à l’éducation
Mme ZOU, experte de la Chine, a demandé si les centres de formation professionnelle sont ouverts aux femmes ayant peu de qualifications. Elle a demandé des précisions sur les politiques menées en faveur des enfants handicapés.
Article 11 relatif à l’emploi
M. NIKLAS BRUUN, expert de la Norvège, a regretté que Singapour ait émis une réserve à l’article 11, qu’il a attribuée à une mauvaise compréhension dudit article, car Singapour a ratifié la Convention 100 de l’OIT sur le principe du « salaire égal pour un travail égal ». Le Gouvernement a-t-il l’intention d’adopter de nouvelles lois sur le harcèlement sexuel sur le lieu du travail et la discrimination fondée sur le sexe? a demandé l’expert.
L’experte du Japon, a demandé combien de travailleurs domestiques étrangers ont soumis une procédure de conciliation et combien ont obtenu réparation. Elle a demandé ce qu’il advenait des femmes, travailleuses domestiques et enceintes risquant d’être expulsées?
Mme PRAMILA PATTEN, experte de Maurice, a dénoncé le fait que les femmes étrangères ne peuvent bénéficier d’un congé-maternité et doivent quitter le territoire à moins de se marier dans les 12 semaines suivant l’accouchement. Singapour pousse-t-il toujours les hôtesses de l’air à démissionner en cas de grossesse? Pourquoi de nombreuses multinationales n’ont-elles pas encore de politique d’aménagement du temps de travail?
Mme MAGALYS AROCHA DOMINGUEZ, experte de Cuba, a voulu en savoir plus sur les politiques relatives aux femmes migrantes. Ont-elles le même droit à la santé? Qu’en est-il des migrantes malades du sida? Comment sont gérer les plaintes pour discrimination fondée sur l’orientation sexuelle? Qu’en est-il de la situation des femmes souffrant d’une incapacité grave?
L’experte du Brésil a voulu savoir si une femme sans assurance médicale pouvait accoucher gratuitement.
Articles 15 et 16 relatifs à l’égalité devant la loi, et au mariage et à la vie de famille.
Pourquoi le Code de la famille s’appelle Charte des femmes? s’est étonnée l’experte d’Israël. Le fait que la polygamie soit légale ne constitue-t-il pas une discrimination à l’égard des femmes musulmanes? Pourquoi ne pas tout simplement interdire aux hommes de prendre une seconde épouse?
L’experte a ensuite qualifié d’« alarmant » le fait que Singapour pénalise uniquement le viol conjugal lorsque mari et femme n’habitent plus ensemble. Elle a également voulu des précisions sur la situation des unions de fait.
Réponse de la délégation
La délégation a précisé que des centres de formation professionnelle ont été ouverts pour les travailleuses domestiques étrangères. Depuis 2010, 217 000 travailleurs ont suivi une formation, dont la moitié était des femmes. S’agissant du harcèlement sexuel sur le lieu de travail, elle a souligné qu’au titre du Code pénal, les auteurs de harcèlement risquent des amendes allant jusqu’à 2 000 dollars américains et des peines de prison allant jusqu’à deux ans.
La délégation a aussi présenté les initiatives en matière de dépistage du VIH/sida, insistant sur le fait que Singapour assure une couverture médicale à tous. Singapour progresse sur le front de l’aménagement du temps de travail mais s’agissant du viol entre époux, le consensus manque toujours.
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