ENV/DEV/1196

Préparant la CDD-19, les délégations préconisent l’intégration de programmes de consommation et de production durables dans les politiques de développement

03/03/2011
Conseil économique et socialENV/DEV/1196
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Commission du développement durable

Réunion préparatoire intergouvernementale

7e et 8e séances – matin & après-midi                       


PRÉPARANT LA CDD-19, LES DÉLÉGATIONS PRÉCONISENT L’INTÉGRATION DE PROGRAMMES DE

CONSOMMATION ET DE PRODUCTION DURABLES DANS LES POLITIQUES DE DÉVELOPPEMENT


La Réunion préparatoire intergouvernementale à la dix-neuvième session de la Commission du développement durable (CDD-19), qui se tiendra en mai prochain au Siège de l’ONU à New York, s’est penchée, aujourd’hui, sur la question des modes de consommation et de production durables. 


Les délégations, qui étaient saisies du rapport pertinent du Secrétaire général (E/CN.17/2011/8), ont notamment évoqué le cadre décennal des programmes sur les modes de consommation et de production durables.  La structure et les grandes lignes de ce projet, issu du processus onusien de Marrakech sur les modes de consommation et de production durables (CPD), feront l’objet de négociations lors de la dix-neuvième session de la CDD. 


Les grands groupes régionaux, comme le Groupe des 77 et de la Chine et l’Union européenne (UE), ont ainsi fait entendre leur voix, le premier, par l’intermédiaire de l’Argentine, soulignant que le cadre décennal devra établir des mesures concrètes de promotion de nouveaux modes de consommation et de production « respectueux de l’environnement de la planète et conscient du fait que ses ressources ne sont pas inépuisables ».  La représentante argentine a également noté que, comme devrait le demander la Conférence Rio+20, le cadre décennal devra jouer un rôle d’éducateur sur les avantages d’une économie « verte ». 


Sur ce point, le représentant de la Hongrie, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne (UE), a jugé que le moment était venu d’avancer dans la définition d’une telle économie verte qui doit, selon lui, répondre aux préoccupations sociales des populations.  « Le cadre décennal devra être structuré de manière à ce que sa vision soit clairement exposée dans un document dont les préceptes et directives seront non contraignants », a-t-il aussi insisté.


En écho à ces propos, la représentante des États-Unis a demandé que le cadre décennal s’adresse clairement à un public qui soit le plus large possible et encourage les décideurs à intégrer dans leurs stratégies les objectifs du développement durable. 


« La structure au sein de laquelle pourra être développé le cadre décennal doit être conçue d’une manière qui soit favorable à une transition sans heurt des pays vers le développement durable, c'est-à-dire sans que leur soient imposées des contraintes ou de nouvelles formes de mesures protectionnistes », a estimé de son côté le représentant de l’Algérie. 


La délégation de la France, quant à elle, a proposé que soit mis en place un système de labellisation « cadre décennal » des programmes sectoriels dans lesquels sont déjà engagés les décideurs politiques et les plates-formes d’experts.


Avant l’échange de vues entre États Membres, des panélistes avaient fait des exposés soulignant la difficulté de mettre en œuvre de nouveaux modes de production et de consommation.


M. Joachim H. Spanberger, Vice-Président de l’Institut européen de recherche sur le développement durable, a, par exemple, relevé que la consommation et la production reposaient sur des dynamiques différentes.  « En Allemagne, la diminution de la consommation des ressources, couplée à l’augmentation de la production, tire l’Europe dans la bonne direction; alors qu’en Amérique du Nord et dans les pays émergents, le rythme actuel de consommation, s’il se maintenait jusqu’en 2050, entraînerait une augmentation de la consommation mondiale d’énergie de 300% par rapport à son niveau actuel, une situation par définition non durable sur le plan écologique », a-t-il averti. 


Affirmant que « la consommation durable est l’envers de la surconsommation », le panéliste a assuré que la solution à apporter à la question qui se pose était politique, estimant à cet égard qu’il faut trouver le juste compromis entre surconsommation et sous-consommation, « sachant que l’écart entre les deux extrêmes existe au cœur même des pays d’un même ensemble régional ».  « La consommation durable sera atteinte quand les États auront troqué leurs politiques actuelles, qui sont ciblées sur l’individu, par de nouvelles politiques ciblant plutôt des groupes », a affirmé M. Spanberger.


Mme Chee Yoke Ling, Conseillère juridique de la coalition d’ONG et de cercles de réflexion « Third World Network », a considéré pour sa part qu’un des principaux problèmes qui se posent était que toutes les parties prenantes au développement durable ne sont effectivement pas égales en droit, en capacité d’action et en pouvoir.  « Même si la menace des changements climatiques nous pousse à agir plus rapidement, des obstacles se multiplient », a-t-elle expliqué, relevant les freins et les obstacles que posent certaines dispositions du droit régissant la propriété intellectuelle au développement des technologies vertes innovantes.  Rappelant combien la réalisation des objectifs de développement durable était coûteuse, elle a indiqué que le dernier plan quinquennal de la Chine, visant à réduire l’intensité énergétique de ce pays de 20%, s’était traduit par la fermeture de 2 000 usines polluantes, « avec toutes les conséquences sociales liées aux pertes d’emplois y afférentes ». 


Par ailleurs, les délégations de la Réunion préparatoire intergouvernementale à la CDD-19 ont attiré l’attention sur le fait que les questions des transports, des produit chimiques, de la gestion des déchets, de l’exploitation minière et des modes de consommation et de production durables étaient étroitement liées.  « Les politiques et les mesures destinées à améliorer chacun de ces domaines peuvent aussi améliorer les autres », a ainsi résumé le Président de la réunion, M. Andrew Goledzinowski, de l’Australie, qui se référait au rapport du Secrétaire général sur la question (E/CN.17/2011/3).  Après lui, les participants au débat ont admis la nécessité d’aborder ensemble les thèmes centraux du développement durable afin de faciliter la mise en œuvre des politiques de développement, et ce, en gardant à l’esprit la nécessité de découpler la croissance économique de l’exploitation mal gérée des ressources.


La Réunion préparatoire se poursuivra demain, vendredi 4 mars, à 10 heures. 


ORIENTATIONS POSSIBLES ET MESURES ENVISAGÉES POUR ACCÉLERER LA MISE EN ŒUVRE


Débat interactif sur le cadre décennal de programmation concernant les modes de consommation et de production durables (E/CN.17/2011/8)


Le Président de la Commission du développement durable (CDD), M. LÁSZLÓ BORBÉLY (Roumanie), a lancé la discussion sur le cadre décennal de programmes sur les modes de consommation et de production durables en rappelant qu’en 2002, la communauté internationale avait reconnu que le développement doit être réalisé en puisant avec précaution dans les ressources disponibles dans les écosystèmes.  « Depuis lors, nos préoccupations ont porté sur le fait que les modèles de consommation actuels épuisent les ressources de la terre, tandis que des portions de plus en plus importantes de la population n’ont pas accès aux biens les plus élémentaires pour une vie décente ».  M. Borbély a ajouté qu’il était temps que les États se mettent d’accord sur des programmes fiables, afin de rendre plus durables les modes de consommation et de production.  Ceci est possible, « compte tenu de ce que les réunions récentes ont montré que la volonté politique existe pour ce faire ».  Pour le Président de la séance, « les initiatives nationales et régionales doivent faire en sorte que la croissance économique ne s’effectue pas d’une utilisation désordonnée des ressources et aux dépens de l’environnement ».  M. Borbély a jugé que les initiatives pertinentes menées par les gouvernements, les villes, les communautés, la société civile et le monde des affaires, devraient être coordonnées au sein d’agences et d’alliances d’organisations spécialisées dans différents domaines.  Il a estimé que dans ce contexte, la CDD peut jouer un rôle de forum permettant aux États Membres de partager leurs expériences et leurs idées, et de discuter régulièrement et de manière approfondie des moyens d’augmenter le rendement écologique des programmes sans mettre en péril les aspirations des pays en développement.


M. KEVIN BRADY, Membre fondateur de la compagnie « Five Winds International », qui est un des leaders mondiaux en matière de conseil en développement durable, a mis l’accent sur la nécessité de renforcer la coopération internationale en matière d’échanges d’informations, d’expériences et d’innovations en vue de la réalisation d’objectifs ayant trait aux modes de consommation et de production durables.  Nous utilisons le cadre de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour promouvoir la croissance verte et pour voir comment le monde peut parvenir à mettre en place un système qui renforce la consommation et la production durables, a précisé M. Brady.  Il a indiqué que différents modèles pouvant contribuer à la mise en œuvre de ce genre de programmes existent, avant de noter l’importance des contributions qu’apportent la Banque mondiale, les banques de développement et les organismes de développement aux initiatives visant la production et la consommation durables.  M. Brady a jugé essentiels le partage des informations et le transfert des technologies, qui sont nécessaires afin de progresser vers l’adoption de modes de consommation et de production durables.  Il a par ailleurs souligné l’importance de l’accélération des innovations et de la création de normes de certifications acceptables par toutes les parties prenantes, notamment dans le domaine de la gestion des matériaux durables.  « Nous pourrions faire beaucoup d’économies en matière d’achats ‘‘verts’’, a-t-il estimé, en recommandant de mettre en place un cadre de collaboration permettant de mieux mesurer les progrès, d’améliorer la qualité des produits verts offerts et de mesurer l’impact de leur consommation sur la promotion du développement durable.


M. JOACHIM H. SPANBERGER, Vice-Président de l’Institut européen de recherche sur le développement durable, a estimé que pour réaliser la consommation et la production durables, il faut définir des buts spécifiques liés à des objectifs de développement durable tels que la réduction des émissions de gaz à effet de serre et celle de la pauvreté.  « Il faut exploiter les opportunités de changement en liant tous les efforts déployés », a-t-il ajouté, avant de souligner que l’une des difficultés rencontrées vient du fait que la consommation et la production reposent sur des dynamiques différentes.  Le panéliste a ensuite noté qu’actuellement, en Allemagne, la diminution de la consommation des ressources, couplée à l’augmentation de la production, tire l’Europe dans la bonne direction, « car dans ce cas de figure, on épargne des ressources et on consomme de manière plus responsable tout en préservant l’environnement ».  M. Spanberger a expliqué que cette tendance s’oppose à celle qui domine en Amérique du Nord et dans les pays émergents.  « Ces pays et régions doivent être conscients qu’au rythme de consommation qui est le leur, d’ici 2050, la consommation mondiale d’énergie aura augmenté de 300%, ce qui est une situation par définition non durable sur le plan écologique », a-t-il averti.  « La consommation durable est l’envers de la surconsommation, qui est socialement intenable », a encore ajouté le panéliste, qui a préconisé que soient fixées des limites, « unique moyen pour que les modes de vie les plus divers se perpétuent sans négativement s’affecter mutuellement ».  « La solution à apporter est politique », a-t-il assuré, estimant qu’il faut trouver le juste compromis entre surconsommation et sous-consommation, « sachant que l’écart entre les deux extrêmes existe au cœur même des pays d’un même ensemble régional, y compris en Europe et dans les pays émergents ».  « La consommation durable sera atteinte quand les États auront troqué des politiques ciblées sur l’individu avec des politiques ciblant des groupes », a affirmé M. Spanberger.


Mme CHEE YOKE LING, Conseillère juridique de la coalition d’ONG et de cercles de réflexion « Third World Network », s’est particulièrement inquiétée de l’accroissement des inégalités dans les pays industrialisés et les pays émergents depuis une vingtaine d’années.  Elle a rappelé que la croissance économique, en elle-même, n’a pas de sens si les besoins fondamentaux des populations continuent d’être en grande majorité insatisfaits et si la communauté internationale s’avère incapable d’assurer une gestion durable des ressources de la planète.  Elle a dit qu’un des principaux problèmes qui se posent vient du fait que toutes les parties prenantes au développement durable ne sont effectivement pas égales en droit, en capacité d’action et en pouvoir.  « Même si la menace des changements climatiques nous poussent à agir plus rapidement, des obstacles se multiplient », a dit Chee Yoke Ling, en relevant les freins et les obstacles que posent certaines dispositions du droit régissant la propriété intellectuelle au développement des technologies vertes innovantes.  « Nous avons échoué dans la gestion des ressources en ce qui concerne la durabilité de leur exploitation, et nous avons échoué à donner un rôle accru à la communauté internationale et au multilatéralisme », a-t-elle ajouté.  Elle a rappelé combien la réalisation des objectifs du développement durable était couteuse et parfois très pénible pour les pays.  À titre d’illustration, elle a précisé que le dernier plan quinquennal de la Chine, visant à réduire l’intensité énergétique de ce pays de 20%, s’y est traduit par la fermeture de 2 000 usines polluantes, avec toutes les conséquences sociales liées aux pertes d’emplois y afférentes. 


La représentante de l’Argentine, qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a déclaré que le cadre décennal concernant les modes de consommation et de production durables devrait établir des mesures concrètes de promotion de nouveaux modes de consommation et de production respectueux de l’environnement de la planète et conscients du fait que ses ressources ne sont pas inépuisables.  « Le cadre décennal devrait ainsi se concentrer sur la mise en œuvre d’initiatives à court et moyen termes et baser ses lignes directrices sur les efforts en cours », a-t-elle ajouté, en préconisant que le cadre soit doté de fonctions propices au partage de l’information, ainsi que de fonctions de facilitation de la coopération et du « réseautage ».  Le cadre doit aussi veiller à favoriser et préserver la stimulation de l’innovation dans le domaine du développement.  « Le cadre, comme devrait le demander la Conférence Rio+20, devra également jouer un rôle d’éducateur global quant à la nécessité de rendre durables les modes de consommation et de production qui doivent être promus par une économie « verte », a souligné la représentante. 


Le représentant de la Hongrie, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne, a rappelé qu’il y a 10 ans, à Rio, les États avaient reconnu la nécessité de changer les modes de production et de consommation actuels, qui sont insoutenables, au profit du développement durable.  Il a estimé que le temps est venu de prendre des mesures concrètes à cet égard, cela en avançant dans la définition d’une économie verte répondant aux préoccupations sociales des populations.  Le représentant a ajouté que le cadre décennal, qui doit être adopté à la dix-neuvième session de la CDD, devra être structuré de manière à ce que sa vision soit clairement exposée dans un document dont les préceptes et directives seront non contraignants.  Il a considéré que ce document devra rappeler que l’établissement de modes de consommation et de production durables est l’un des trois objectifs majeurs à réaliser pour parvenir au développement durable.  La transition vers ces nouveaux modes de production et de consommation doit s’effectuer en assurant aux populations une protection sociale forte, au travers d’un dialogue ouvert et par le biais de programmes de formation adaptés, a-t-il également indiqué. 


La représentante de la Barbade, qui s’exprimait au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a mis l’accent sur la nécessité, pour les pays de la région des Caraïbes, de lier l’application des programmes de promotion de modes de consommation et de production durables à celle des mesures destinées à réduire l’impact social du changement climatique.


La représentante des États-Unis a souhaité que la structure du cadre décennal soit simple, souple et adaptable.  « Nous devons nous concentrer sur les efforts de promotion de modes de consommation et de production durables, qui sont en cours, et éviter de nous lancer dans la négociation, toujours très complexe, d’un document », a-t-elle ajouté.  Le cadre décennal doit s’adresser clairement à un public qui soit le plus large possible et encourager les décideurs à intégrer dans leurs stratégies les objectifs du développement durable, a-t-elle encore précisé.  C’est ainsi qu’elle a insisté de nouveau sur la nécessité d’élaborer un outil accessible à l’ensemble des parties prenantes au développement durable auxquelles il est destiné.  Nous proposerons les principes et les programmes dans leurs grandes lignes, et ce seront eux qui ensuite suggéreront les solutions innovantes destinées à soutenir leur mise en œuvre », a-t-elle dit. 


Le représentant du Mexique a demandé que soit intégrée dans les négociations sur le cadre décennal la question du potentiel des innovations tirées des savoirs traditionnels, en particulier ceux que détiennent les communautés autochtones.  Lors des discussions de la dix-neuvième session de la CDD, nous devrons être clairs et prévoyants quant au mécanisme de financement de la structure administrative du cadre décennal, a-t-il aussi déclaré.


Le représentant de l’Algérie a mis l’accent sur la nécessité de mettre en place une structure au sein de laquelle pourra être développé le cadre décennal.  Ceci doit être fait d’une manière qui soit favorable à une transition sans heurts des pays vers le développement durable, c’est-à-dire sans que leur soient imposées des contraintes ou de nouvelles formes de mesures protectionnistes.  À son tour, il a souligné qu’il est important que les objectifs et buts choisis en matière de consommation et de production durables soient intégrés dans les politiques de développement socioéconomique des États Membres. 


La représentante de la Chine a indiqué que le Gouvernement chinois, en décrétant l’adoption de son douzième plan quinquennal de développement, s’était engagé clairement à bâtir une société économe sur le plan énergétique et respectueuse de l’environnement.  Ces dernières années, mon pays s’est concentré sur l’établissement d’un système juridique devant encadrer les modes de consommation et de production durables, ainsi que sur la mise en place de mécanismes d’appui portant sur la gestion scientifique de l’économie, l’accès au marché, la production verte, l’éducation et la sensibilisation du public aux enjeux de l’heure, a indiqué la représentante.  Elle a souhaité que le document de la dix-neuvième session relatif au cadre décennal mette clairement en exergue le lien entre la promotion de l’énergie verte et le développement d’une consommation et d’une production durables.


Le représentant de la France a déclaré qu’en vue de son adoption à la dix-neuvième session de la CDD en mai prochain, le cadre décennal doit être présenté comme un instrument permettant d’engager l’ensemble des nations sur la nécessaire transformation.  Cet engagement doit se faire autour de principes communs et doit promouvoir des modes de consommation et de production durables.  « Une complémentarité doit être recherchée entre cet engagement politique et les plates-formes d’experts qui travaillent déjà sur les différentes thématiques concernées », a-t-il ajouté.  Après avoir préconisé la mise en place d’un système de labellisation « cadre décennal », le représentant français y a appuyé l’inclusion de programmes sectoriels. 


Débat interactif sur l’interdépendance et les questions intersectorielles (E/CN.17/2011/3)


Le Président de la séance, M. ANDREW GOLEDZINOWSKI, de l’Australie, a souligné les liens profonds existant entre les questions touchant aux transports, aux produits chimiques, à la gestion des déchets, à l’exploitation des mines et aux modes de production et à la consommation durables.  « Les politiques et les mesures destinées à améliorer chacun de ces domaines peuvent aussi améliorer les autres », a-t-il estimé.  « Les questions intersectorielles telles que l’éradication de la pauvreté, l’éducation, la santé, et le genre, peuvent également bénéficier de l’amélioration des secteurs évoqués plus haut », a-t-il encore dit.  Pour le Président de la séance, « aborder ensemble les thèmes centraux du développement durable facilite mécaniquement la mise en œuvre des politiques de développement, en gardant à l’esprit la nécessité de découpler la croissance économique de l’exploitation mal gérée des ressources ».  M. Goledzinowski a ajouté que le concept d’économie « verte » dans le contexte du développement durable et celui de la lutte contre la pauvreté, qui seront les grands sujets de la Conférence de 2012, pourraient permettre à la communauté internationale d’aboutir à l’édification d’un modèle économique réellement alternatif.  M. Goledzinowski a noté que la promotion d’une économie de ce type « devrait fournir des investissements significatifs dans les domaines de l’énergie renouvelable, des transports à faible émission de carbone, des bâtiments écologiques, des énergies propres, ou encore de l’amélioration de la gestion des déchets ».  Il a insisté sur le fait que la mise en œuvre des objectifs pertinents doit tenir compte des besoins spécifiques des pays en développement, ce qui exige des financements substantiels, soutenus, robustes et clairement définis.  « Dans le contexte actuel de conjonction de crises majeures, les financements, aujourd’hui comme hier, ne peuvent être les laissés-pour-compte du développement durable », a-t-il affirmé. 


M. JEREMY GREGORY, Chercheur au Massachusetts Institute of Technology (MIT), a mis l’accent sur la difficulté de mesurer les différents éléments économiques et sociaux constituant le concept de durabilité.  Il a jugé essentiel d’évaluer l’ensemble du cycle de vie des produits, en rappelant que les acteurs économiques concernés doivent tenir compte, à tous les stades de ce cycle, des effets de leurs activités sur la production et la consommation durables, et ce, de l’extraction des ressources naturelles à la consommation en passant par le recyclage et le transport.  En ce qui concerne tout particulièrement les risques liés aux déchets des produits électroniques, il a dit qu’il fallait s’attaquer à l’ensemble du cycle de vie de ces produits et des ordures qui en sont issues.  Ceci comprend le coût du traitement et le transport de ces déchets, qui est une étape de plus en plus importante.  M. Gregory a aussi souligné la nécessité de voir comment éduquer le consommateur à la problématique de la gestion des déchets issus des produits électroniques et de sensibiliser le secteur informel dans les pays en développement.  Il a mis l’accent sur le caractère essentiel de l’investissement public-privé, des multiples formes de partenariats qui sont possibles dans ce secteur, et de la promotion de la coopération dans le domaine de la recherche et de l’innovation. 


M. ADIL NAJAMA, Professeur de politiques globales à l’Université de Boston, a souligné la difficulté proprement politique qui se pose quand il faut lier les thèmes du développement entre eux.  « Il faut atteindre un certain degré de gouvernance et pouvoir pratiquer une forme d’ouverture courageuse à toutes les parties prenantes à la réalisation d’objectifs de développement majeurs », a-t-il ajouté.  « Car reconnaître l’existence de liens logiques entre les différents problématiques du développement, cela suppose de refonder des traités multilatéraux qu’il aura fallu des années d’âpres négociations pour conclure ».  « La consolidation des questions est en elle-même un processus très exigeant, mais qui permet ensuite aux États Membres réunis autour de questions intersectorielles d’agir de manière coordonnée », a-t-il aussi souligné.


M. PAT MOONEY, spécialiste des technologies émergentes, de nanotechnologie, de génomique et des neurosciences, a souligné l’importance des nouvelles technologies, dont les technologies propres ou biosynthétiques, pour pallier les incidences négatives de la surexploitation de matières premières comme le cuivre et le coton.  Il s’est dit particulièrement inquiet de constater que 90% des brevets relatifs aux cultures étaient contrôlés par six grandes sociétés.  C’est pourquoi, il a exhorté l’industrie de l’énergie à suivre de près les conséquences potentielles de ces brevets pour les différents pays et régions concernés.  


Ce débat sur l’interdépendance et les questions intersectorielles a été l’occasion pour de nombreux intervenants de souligner la nécessité de parvenir à un développement qui soit profitable à l’ensemble de la société; qui permette de mettre en valeur le capital humain et social grâce à l’éducation et à la participation de tous à la vie sociale; d’assurer des services d’infrastructure rentables, fiables et abordables, y compris des services de transport durables; de faciliter la gestion rationnelle des produits chimiques et des déchets solides et dangereux en privilégiant la prévention, de gérer les ressources naturelles de façon cohérente et responsable. 


Intervenant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, la représentante de l’Argentine a mis l’accent sur les moyens de mise en œuvre des stratégies choisies, en expliquant que sans ressources suffisantes et prévisibles, le développement durable se résumera à un vœu pieu. 


Si la représentante de l’Argentine a insisté sur le caractère essentiel du financement, du transfert de technologie et du renforcement des capacités, celui de la Hongrie, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne, a réaffirmé toute la pertinence des trois priorités liées aux trois objectifs du développement durable.  Il a appelé à l’avènement d’une économie mondiale plus verte et plus compétitive, en exhortant la CDD à renforcer la cohésion politique des États et autres acteurs dans l’objectif d’identifier et d’adopter des mesures politiques et pratiques d’élimination de la pauvreté.  Il a également souhaité la mise en place d’un mécanisme de promotion des transferts de compétences et de technologies.   


Au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique (PEID-D), la représentante de Nauru, a exhorté la communauté internationale à financer la restauration des infrastructures mises à mal par les inondations répétées dont souffrent les petites îles du Pacifique.  Ces inondations récurrentes sont liées aux changements climatiques et à la montée du niveau de la mer, a-t-elle précisé.  Elle a rappelé combien les modes de consommation non durables des pays développés touchaient les moyens de subsistance et la santé des pays en développement, en citant par exemple la haute teneur en mercure des poissons pêchés dans le Pacifique.  Ce mercure provient de déchets toxiques en provenance du monde industrialisés et qui sont déversés dans les mers autour du monde. 


Le représentant des Philippines a indiqué que son pays, en tant que membre de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), appuyait des objectifs de croissance verte qui soient adaptés au contexte particulier de chaque pays. 


Répondant à cette première série d’interventions et de remarques, un panéliste, le Professeur NAJAM, a regretté que les gouvernements se soient limités à aborder de manière séparée les questions qui se posent, sans les percevoir de manière unifiée et intégrée.  De son côté, M. PAT MOONEY, autre panéliste, a estimé que l’Accord de Nagoya sur la biodiversité devait être perçu comme un processus en cours qui doit encore évoluer.  Il a rappelé qu’aujourd’hui les technologies existantes permettent que l’on puisse déchiffrer la carte ADN d’une plante en 15 minutes et de modifier l’ADN de cette plante.  Ceci affecte automatiquement les droits de ceux qui doivent en principe être détenteurs des droits et des ressources liées à l’exploitation de cette plante.  Il y a donc un effort de régulation à faire dans ce domaine.


La représentante de la Suisse a mis l’accent sur les économies que l’on peut réaliser en améliorant les techniques de production actuelles, notant que 50% des récoltes sont perdues actuellement dans les processus agricoles utilisés.  Elle a annoncé l’organisation par son pays, en collaboration avec la FAO et la société civile, d’un événement sur l’importance de l’agroalimentaire pour réaliser les objectifs de promotion d’une économie verte.  Dans le même ordre d’idées, la représentante du Groupe des agriculteurs a estimé que beaucoup de pertes pouvaient être évitées avec la mise en place d’un système de transport et de conservation de récoltes plus adéquat que celui dont on dispose aujourd’hui.  


Le représentant du Chili a mis l’accent sur l’importance des pratiques, des expériences et des traditions qui régissent les différents genres de techniques agricoles en matière de promotion du développement durable, tandis que la Secrétaire exécutive de la Convention de Bâle a souligné la contribution importante des activités de recyclage en ce qui concerne la promotion d’emplois « verts » et la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre liées à la destruction des déchets.  De son côté, le représentant de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a exhorté les gouvernements à utiliser moins de pesticides, en attirant l’attention des délégations sur le développement rapide de maladies liées à ces pesticides, dont certains sont dangereux pour la santé humaine.


Réagissant à cette série d’interventions, M. MONEY a salué le modèle que propose la FAO sur les questions de gouvernance dans le domaine de l’agriculture et de l’alimentation.  « Si nous reconnaissons tous les liens qui unissent les différents thèmes, il faut être conscient que toutes les choses importantes que nous venons de dire cet après-midi seront condamnées à rester à la périphérie plutôt qu’au centre des débats si les États ne font pas montre d’une véritable volonté politique », a conclu pour sa part M. NAJAM.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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