La Représentante spéciale déplore que les avancées dans la consolidation de la paix au Burundi soient entachées par des cas d’exécutions extrajudiciaires
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Conseil de sécurité
6677e séance – matin
LA REPRÉSENTANTE SPÉCIALE DÉPLORE QUE LES AVANCÉES DANS LA CONSOLIDATION DE LA PAIX AU BURUNDI
SOIENT ENTACHÉES PAR DES CAS D’EXÉCUTIONS EXTRAJUDICIAIRES
Le représentant du Burundi attribue la persistance
de la violence armée dans son pays à la présence illégale d’armes à feu
La Représentante spéciale du Secrétaire général pour le Burundi, Mme Karin Landgren, qui présentait ce matin le rapport sur les activités du Bureau des Nations Unies au Burundi (BNUB)*, a assuré, devant le Conseil de sécurité que le Burundi poursuivait « comme prévu » ses efforts en matière de consolidation de la paix, tout en faisant état « de développements qui risquent d’hypothéquer les acquis ». Elle a cependant déploré que la consolidation de la paix dans le pays soit « entachée » par des exécutions extrajudiciaires.
« Entre le 1er janvier et le 30 novembre dernier, le BNUB a documenté 57 cas d’exécutions extrajudiciaires qui lui avaient été signalés », a-t-elle indiqué, avant d’exhorter le Gouvernement burundais à prendre des mesures immédiates pour punir les agents gouvernementaux coupables de tels actes.
Le représentant du Burundi, M. Adolphe Nahayo, qui a pris la parole après Mme Landgren, lui a répondu que la persistance de la violence armée au Burundi s’expliquait par plusieurs facteurs et, en premier lieu, par la présence illégale d’armes à feu. M. Nahayo a ainsi affirmé qu’il y avait encore des caches d’armes dans le pays. En raison de la porosité des frontières, des armes en provenance de pays voisins transitent par son pays, a-t-il fait remarquer. « Des règlements de compte entre anciens combattants pour des conflits fonciers, des affrontements entre les bandits armés et la police ou les attaques contre la population civile par des bandes armées expliquent cette violence armée », a-t-il dit, tout en assurant que le Ministère de la sécurité publique du Burundi prenait les mesures nécessaires lorsque les présumés coupables étaient des agents de l’ordre.
La Représentante spéciale a ajouté « que les arrestations et les assassinats des membres de certains partis extraparlementaires assombrissaient les perspectives de normalisation des relations entre le Gouvernement et l’opposition extraparlementaire ». Le rapport du Secrétaire général indique en effet que la scène politique au Burundi reste dominée par les tensions entre le Gouvernement du Burundi et l’Alliance des démocrates pour le changement Ikibiri (ADC-Ikibiri), coalition des partis politiques qui se sont retirés du processus électoral. Si Mme Landgren a noté la volonté de dialogue du Gouvernement, concrétisée par le lancement de réunions trimestrielles avec les partis politiques agréés, elle a relevé dans le même temps que les partis se réclamant de « ADC-Ikibiri » n’avaient pas participé à ces réunions.
Le représentant du Burundi a déclaré, pour sa part, que le défaut de dialogue entre le Gouvernement et l’opposition extraparlementaire ne pouvait manifestement pas être attribué au Gouvernement « qui a multiplié, sans succès jusqu’à présent, les appels aux opposants en exil ».
De retour d’une visite d’une semaine au Burundi, le représentant de la Suisse, M. Paul Seger, qui était invité à participer à cette réunion en sa qualité de Président de la configuration spécifique de la Commission de consolidation de la paix (CCP) sur le Burundi, a encouragé l’opposition à renoncer à la politique de la « chaise vide » et à s’éloigner, sans équivoque, de toute forme de violence. Il a dans le même temps invité le Gouvernement burundais à accélérer ses efforts dans les domaines du dialogue politique, des droits de l’homme et de la bonne gouvernance.
Tout en se félicitant des préparatifs à la création de la Commission Vérité et réconciliation, ainsi que de la mise en place d’une Commission nationale indépendante des droits de l’homme, la Représentante spéciale a souligné le contexte difficile pour les droits de l’homme au Burundi. « Je suis préoccupée par les restrictions imposées aux médias indépendants, au secteur judiciaire et à la société civile », a-t-elle dit, avant de détailler les critères qui devraient être retenus pour la transformation future du BNUB en équipe de pays des Nations Unies. Elle a notamment plaidé pour la mise en place d’un secteur de sécurité sous contrôle démocratique et d’une autorité judiciaire « plus indépendante, facile d’accès et crédible ».
Le représentant du Burundi a expliqué que son gouvernement ne pouvait pas être seul responsable des lenteurs judiciaires dans le pays, comme en témoignent les demandes de reports d’audience faites par les partenaires de la justice afin d’entendre tous les témoins et d’approfondir les dossiers. Il a ajouté que son gouvernement avait entrepris, sur la base des recommandations de la Commission de consolidation de la paix, d’engager une réflexion sur la réforme du secteur de la sécurité, qui s’étendra sur huit ans en ce qui concerne la Force de défense nationale et sur 10 ans pour la Police nationale. « Ne perdons pas de vue que le Burundi est un pays sortant d’un conflit », a-t-il rappelé, avant de détailler la « vision 2025 » par laquelle son gouvernement veut faire du Burundi un État de droit qui soit économiquement prospère.
En conclusion de son exposé, et en prévision des élections qui doivent se tenir en 2015 dans le pays, la Représentante spéciale a invité le Burundi à continuer d’œuvrer en faveur d’un processus de paix, de réconciliation et de justice « sans exclusive ».
Le Président de la configuration spécifique de la CCP sur le Burundi a émis l’espoir que les élections de 2015 permettront à tous les partis de participer librement et d’une manière égale à la compétition politique.
« Le Gouvernement gardera la main tendue pour le dialogue politique mais il n’arrêtera pas sa démarche pour mettre en œuvre la vision 2025 » a, pour sa part, affirmé M. Nayaho.
Rapport du Secrétaire général sur le Bureau des Nations Unies au Burundi (BNUB) (S/2011/751)
Faisant suite à la résolution 1959 (2010) du Conseil de sécurité, le rapport évalue les problèmes de la consolidation de la paix au Burundi et les activités du Bureau des Nations Unies au Burundi qui a succédé au Bureau intégré des Nations Unies au Burundi (BINUB) en janvier 2011.
Le Secrétaire général indique dans ce rapport que, depuis la tenue des élections de 2010 –jugées libres et honnêtes par les observateurs internationaux mais boycottées par les grands partis de l’opposition après les élections communales–, la consolidation de la paix au Burundi a continué de progresser à certains égards. « La situation des droits de l’homme mérite certes encore l’attention mais des mesures positives ont été prises, dont la création de la Commission nationale indépendante en la matière, le Bureau du Médiateur et les préparatifs de la création, au premier trimestre de 2012, de la Commission Vérité et réconciliation », écrit M. Ban
La scène politique est restée dominée par les retombées des élections de 2010 et, surtout, par les tensions entre le Gouvernement et l’Alliance des démocrates pour le changement Ikibiri (ADC-Ikibiri), coalition des partis politiques qui se sont retirés du processus électoral, note cependant le Secrétaire général. Il rappelle que le 26 août 2011, lors de la célébration du premier anniversaire de son deuxième mandat, le Président Pierre Nkurunziza avait souligné que le Gouvernement engagerait le dialogue et c’est pourquoi, il avait invité tous les partis à se préparer pour les élections de 2015.
Sur le plan de la sécurité, le Secrétaire général relève que la situation générale est restée relativement stable pendant la période à l’examen, même s’il y a encore eu des violences entre les Forces de sécurité burundaises et des groupes armés non identifiés. M. Ban indique aussi que la situation économique et sociale au Burundi est caractérisée par une pauvreté généralisée et un taux de chômage élevé, en particulier chez les jeunes. On estime que 67% de la population vivent à un niveau proche du seuil de pauvreté », poursuit-il.
Le Secrétaire général souligne ensuite que le Burundi a accompli des progrès notables en ce qui concerne la mise en œuvre de la stratégie nationale de réintégration économique et sociale des personnes affectées par le conflit. « Entre 2002 et 2010, le Burundi est parvenu à réintégrer plus de 510 000 anciens réfugiés avec l’appui du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés », relève M. Ban.
Par ailleurs, il fait observer que sans préjudice des progrès accomplis sur plusieurs fronts, la situation des droits de l’homme dans le pays demeure préoccupante. Il se félicite, au contraire, des importantes avancées qui ont été accomplies en matière de justice transitionnelle. Notant que le Burundi a été, à bien des égards, un modèle pour la transition entre la phase d’une opération de maintien de la paix et celle d’une mission politique spéciale et d’un bureau intégré des Nations Unies, le Secrétaire général indique que la transition du BINUB au BNUB s’est faite sans heurt.
« Toutes les activités du BINUB qui n’ont pas été reprises dans le mandat du BNUB ont pris fin le 31 mars 2011 », précise M. Ban.
Le Secrétaire général se félicite particulièrement des nettes avancées faites vers la mise en place de mécanismes de justice transitionnels. « Ces mécanismes devraient aider les Burundais à se réconcilier entre eux et avec leur Histoire », affirme-t-il. Tout au long de l’année, l’atmosphère politique a été alourdie par l’absence de dialogue entre le Gouvernement et les partis qui ont boycotté les élections de 2010 et ne sont donc pas représentés au Parlement.
« On n’a donc toujours pas trouvé de formule qui permettrait aux partis du Gouvernement et aux principaux partis de l’opposition extraparlementaire de se rencontrer », estime M. Ban, qui insiste ensuite sur les obstacles économiques et sociaux considérables que le Burundi doit surmonter. Soulignant la modestie des effectifs et du mandat du BNUB, qui témoigne des progrès accomplis par le Burundi, le Secrétaire général recommande donc de reconduire le mandat du BNUB pour un an à compter du 1er janvier 2012. « Conformément à la demande formulée par le Conseil de sécurité dans sa résolution 1959 (2010), ma Représentante spéciale, Mme Karin Landgren consultera en 2012 les membres du Conseil sur les critères à retenir pour la transformation future du Bureau des Nations Unies au Burundi, en une équipe de pays des Nations Unies », indique-t-il avant de conclure.
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