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CS/10431

« Seul un règlement global de la situation en Somalie permettra de répondre au défi que pose la piraterie », estime le Sous-Secrétaire général Tayé-Brook Zerihoun devant le Conseil

31/10/2011
Conseil de sécuritéCS/10431
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Conseil de sécurité

6646e séance – après-midi


« SEUL UN RÈGLEMENT GLOBAL DE LA SITUATION EN SOMALIE PERMETTRA DE RÉPONDRE AU DÉFI QUE POSE

LA PIRATERIE », ESTIME LE SOUS-SECRÉTAIRE GÉNÉRAL TAYÉ-BROOK ZERIHOUN DEVANT LE CONSEIL


Le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques a affirmé, cet après-midi devant le Conseil de sécurité, que seul un règlement global de la situation en Somalie permettra de répondre au défi que pose la piraterie.


« La lutte contre la piraterie, qui ne pourra être victorieuse qu’au moyen d’une stratégie intégrée associant dissuasion, sécurité et état de droit, doit faire partie intégrante du processus de paix en Somalie », a plaidé M. Tayé-Brook Zerihoun, venu présenter au Conseil de sécurité le rapport du Secrétaire général sur la protection des ressources naturelles et des eaux territoriales de la Somalie et le rapport annuel sur la situation concernant les actes de piraterie.


Saluant les efforts « sans précédent » consentis par la communauté internationale pour combattre les actes de piraterie au large des côtes somaliennes, le Sous-Secrétaire général s’est félicité de l’arrestation et de la poursuite d’un nombre accru de pirates, de la mise en place d’une initiative innovante consistant à identifier les sources de financement des groupes de pirates ainsi que des efforts en cours visant à l’établissement d’un cadre réglementant l’utilisation de gardes armés privés à bord des vaisseaux qui transitent le long des côtes de la Somalie.  Grâce à une forte présence navale internationale, l’aide humanitaire, particulièrement nécessaire en Somalie, a pu être acheminée, s’est-il réjoui.


Ces efforts demeurent cependant insuffisants, a poursuivi M. Zerihoun, en indiquant qu’au début d’octobre 2011, pas moins de 316 personnes et 15 navires étaient toujours aux mains des pirates.  Il s’est dit très préoccupé par les liens existants entre les pirates et les milices islamistes Al-Chebaab.  Les actions de maintien de l’ordre lancées par certaines autorités régionales avaient eu pour « conséquence inattendue » de pousser les pirates à conduire leurs activités plus au Sud, dans les zones sous influence des milices Al-Chebaab.


« Si l’on ne peut pas identifier, à ce stade, les commanditaires des enlèvements recensés au Kenya, le renforcement des liens entre pirates et militants Al-Chebaab laisse cependant augurer d’une mutation du problème de la piraterie », a déclaré M. Zerihoun.


Le Sous-Secrétaire général s’est félicité que la feuille de route pour achever la transition en Somalie contienne, notamment, le développement d’une stratégie de lutte contre la piraterie, l’adoption d’un projet de loi contre les actes de piraterie et la proclamation d’une zone économique exclusive somalienne.  Cette dernière mesure devrait permettre de clarifier la base juridique pour la protection des droits souverains de la Somalie sur ses ressources naturelles.


Dans sa résolution 2015 (2011), le Conseil de sécurité avait prié à nouveau le Gouvernement fédéral de transition et les autorités régionales somaliennes d’élaborer d’urgence et d’adopter une série complète de lois pour lutter contre la piraterie.


Le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques a ensuite invité les États Membres et les organisations internationales à s’attaquer aux causes profondes du phénomène de la piraterie, par le biais notamment d’un renforcement du secteur de la sécurité somalien.  Des objectifs intermédiaires pourraient également être avantageusement adoptés comme le développement des capacités somaliennes à lutter contre les actes de piraterie sur terre et le long des côtes somaliennes, a-t-il poursuivi.


« La jeunesse somalienne a besoin de perspectives afin de ne pas succomber à l’appât du gain que lui procure la piraterie », a prévenu M. Zerihoun, avant d’affirmer que le développement et la réhabilitation des pêcheries côtières devraient être au cœur de la lutte contre les actes de piraterie.  Il a assuré que le paiement de rançons ne faisait que mettre plus de vies en danger et ne contribuait pas à trouver une solution à ce fléau.


M. Zerihoun a affirmé que les phénomènes de la pêche illégale et du délestage de produits toxiques, ainsi que les allégations concernant les liens avec les activités de piraterie, devraient également faire l’objet d’une enquête plus approfondie.  Il a encouragé les États Membres à poursuivre les auteurs présumés de tels actes lorsque ceux-ci sont commis dans les limites de leur juridiction.


Concernant la proclamation d’une zone internationale économique, élément important de la feuille de route, il a exhorté les autorités somaliennes à souscrire au cadre juridique international pertinent sous l’égide de l’Organisation maritime internationale (OMI), avant d’appeler au renforcement des efforts visant à appuyer le Gouvernement de transition somalien dans la réforme de son secteur de sécurité.


La question des ressources naturelles de la Somalie doit être traitée aux niveaux national et régional, a ajouté M. Zerihoun, en invitant les autorités somaliennes à tirer profit du cadre établi par le Processus de Kampala pour engager le dialogue.  « Le sort des otages actuellement aux mains des pirates doit rester une priorité de la communauté internationale », a affirmé le Sous-Secrétaire général avant de conclure.


LA SITUATION EN SOMALIE


Rapport du Secrétaire général sur la protection des ressources naturelles et des eaux territoriales de la Somalie (S/2011/661)


Le présent rapport rend compte de la protection des ressources naturelles et des eaux somaliennes, et des allégations faisant état d’activités de pêche illégales et de rejet illégal de déchets, notamment de substances toxiques, au large des côtes somaliennes.  Le Conseil de sécurité, note le Secrétaire général, a constaté avec préoccupation que les pirates s’étaient servis de ces accusations pour justifier leurs activités criminelles.


M. Ban rappelle tout d’abord que la Somalie est un pays aride à semi-aride, dont 80% de la population dépendent directement des ressources naturelles pour assurer leur survie.  Si l’élevage du bétail est traditionnellement la principale activité, le secteur agricole fournit des denrées de base et des cultures marchandes, poursuit le Secrétaire général, l’exploitation des ressources naturelles étant une autre source de revenus, notamment la production de charbon de bois et la récolte d’arbustes pour le fourrage.


Il rappelle que bien que la Somalie ait signé plusieurs accords internationaux et régionaux, son gouvernement et ses administrations régionales n’ont les moyens ni de les exécuter ni d’en faire respecter les dispositions.  Les obstacles à surmonter sont considérables: instabilité politique, données de référence inadéquates, capacités de recherche et de surveillance insuffisantes, manque de moyens techniques et absence de financement, poursuit le Secrétaire général, en soulignant que la faiblesse des services de surveillance et de répression des infractions de la Somalie facilite les activités criminelles, et notamment les déversements illégaux de déchets toxiques.


Dans ses observations, le Secrétaire général indique qu’il serait judicieux de mettre l’accent sur la protection des ressources naturelles de la Somalie et la prévention de leur exploitation illégale.  Si les ressources naturelles de ce pays continuent de se raréfier, cela constituera une nouvelle menace pour la stabilité politique et entravera le lancement de projets de développement dont le besoin se fait cruellement sentir, poursuit M. Ban.


Attirant l’attention sur les mesures importantes pour lutter contre la pêche illicite contenues dans le plan d’action pour la période de transition, qui a récemment été adopté, comporte des mesures importantes pour aider à lutter contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, le Secrétaire général invite dans son rapport le Gouvernement fédéral de transition, œuvrant de concert avec le Parlement fédéral de transition, à déclarer une zone économique exclusive au large des côtes somaliennes conformément à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, et comme convenu dans le plan d’action.  Cette proclamation, associée à l’adoption des dispositions législatives voulues, préciserait les fondements juridiques légitimant la protection des droits souverains de la Somalie sur les ressources naturelles et sa compétence sur la zone, relève M. Ban.


En attendant que la Somalie se dote des moyens voulus pour surveiller ses côtes, le Secrétaire général propose que les mandats des coalitions navales internationales qui patrouillent au large des côtes somaliennes pour lutter contre la piraterie soient étendus à la surveillance et à la prévention des activités de pêche illégale et de rejet illégal de déchets.  Cela pourrait être fait en collaboration avec le Gouvernement fédéral de transition et les autorités régionales, précise-t-il.


Le Secrétaire général invite également le Gouvernement fédéral de transition à prendre des mesures pour améliorer la sécurité maritime, le lancement d’initiatives visant à encourager la création d’autres moyens de subsistance liés au milieu marin pouvant aussi y contribuer.  Le Gouvernement devrait en outre envisager d’adhérer aux différentes conventions relevant du domaine de compétence de l’Organisation maritime internationale (OMI), notamment la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer, la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires et la Convention sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets et autres matières (Convention de Londres) et son protocole de 1996, poursuit M. Ban dans son rapport.  Il invite instamment les États Membres à répondre à l’appel lancé par le Conseil de sécurité pour qu’ils enquêtent sur les allégations faisant état d’activités de pêche illégales et de rejet illégal de déchets, notamment de substances toxiques, afin qu’ils répriment ces infractions si elles ont été commises par des personnes ou des entités relevant de leur juridiction.  


Le Secrétaire général envisage aussi d’inclure des mises à jour à ce sujet dans ses prochains rapports sur la piraterie au large des côtes somaliennes.  Les problèmes qui se posent concernant les ressources naturelles de la Somalie devront être examinés simultanément aux niveaux local, régional et national, écrit M. Ban, en ajoutant que le Gouvernement fédéral de transition et le Parlement fédéral de transition devraient collaborer avec les autorités régionales du Puntland, du Somaliland et du Galmudug pour relever ces défis et donner suite aux observations formulées ci-dessus.  En conclusion, il invite instamment tous les Somaliens à tirer pleinement parti du mécanisme de dialogue établi dans le cadre du processus de Kampala.


Rapport présenté par le Secrétaire général en application de la résolution 1950 (2010) (S/2011/662)


Le présent rapport rend compte de l’application de ladite résolution et de la situation concernant les actes de piraterie et les vols à main armée commis en mer au large des côtes somaliennes.


Au début d’octobre 2011, 316 personnes et 15 navires étaient détenus en otage, contre 389 personnes et 18 navires en octobre 2010, note ainsi le Secrétaire général, en attribuant cette diminution à l’action des forces navales et d’une application plus systématique des meilleures pratiques de protection contre la piraterie au large des côtes de la Somalie et recommandées par l’Organisation maritime internationale (OMI).


M. Ban note également que la piraterie en Somalie est devenue une activité criminelle hautement organisée, les bandes de pirates, dont les revenus ne cessent d’augmenter grâce aux rançons toujours plus élevées qu’ils exigent, ayant renforcé leurs capacités.  En 2011, les pirates, disposant d’armes plus perfectionnées et de plus gros calibre, se sont attaqués à un plus grand nombre de pétroliers et de navires de plaisance, poursuit le Secrétaire général, en ajoutant qu’en Somalie, les pirates opèrent actuellement le long de toute la côte est du pays, y compris à partir de secteurs contrôlés par Al-Chebaab.


Dans son rapport, le Secrétaire général rappelle que le Gouvernement fédéral de transition de la Somalie s’est publiquement engagé à éliminer la piraterie et a souscrit à une stratégie nationale de lutte contre la piraterie, comme prévu dans la feuille de route de Mogadiscio de septembre 2011.  M. Ban passe ensuite en revue les décisions prises par le Gouvernement fédéral de transition et des autorités régionales somaliennes à cette fin, notamment l’établissement d’une zone économique exclusive au large des côtes de la Somalie, la nomination par le Gouvernement fédéral de transition d’un coordonnateur de la lutte contre la piraterie relevant d’un ministère désigné, la création d’un organe chargé de faire respecter le droit maritime, la mise en route dans le cadre de projets de développement économique des régions côtières de programmes visant à associer les communautés locales à la lutte contre la piraterie et le renforcement des capacités du secteur de la justice pénale et la promulgation de lois de lutte contre la piraterie.  Le Gouvernement fédéral de transition étudie actuellement la possibilité de sous-traiter à des entreprises privées les patrouilles qu’il s’est engagé à effectuer dans les eaux somaliennes, poursuit M. Ban.


Le Secrétaire général s’inquiète néanmoins des nouvelles faisant état de l’établissement de liens entre Al-Chebaab et les groupes de pirates.  L’intensification des mesures de répression par les autorités de certaines régions somaliennes a permis de repousser les nids de pirates plus loin vers le Sud, dans des secteurs qui coïncident avec la zone d’influence d’Al-Chebaab, avertit M. Ban dans son rapport.


Dans ses observations, le Secrétaire général se félicite que la présence continue des forces navales des États Membres ait réussi à réduire le nombre d’incidents de piraterie et de vols à main armée dans la région et permis d’arrêter et de traduire en justice un plus grand nombre de pirates.  En outre, des progrès sont réalisés pour suivre les transactions financières des cerveaux de l’entreprise qu’est la piraterie, note-t-il.


Insistant sur le fait que la lutte contre la piraterie au large des côtes somaliennes ne pourra être couronnée de succès qu’au moyen d’une stratégie intégrée tendant à la fois à dissuader les attaques, à renforcer la sécurité et l’état de droit et à promouvoir le développement, M. Ban invite par conséquent aussi bien la Somalie que la communauté internationale à s’attaquer plus énergiquement aux facteurs qui encouragent la piraterie.  Les efforts de lutte contre la piraterie devraient être intégrés plus étroitement au processus de paix en Somalie, poursuit M. Ban, en soulignant à cet égard que les éléments relatifs à la lutte contre la piraterie de la feuille de route de Mogadiscio constituaient un pas dans la bonne direction.


L’élimination de la piraterie est certes un objectif central, mais il importe de définir, en attendant, les interventions à mettre en œuvre en priorité pour combattre ce fléau, par exemple en complétant les opérations qui sont menées actuellement pour améliorer la sécurité en mer par une action plus énergique à proximité du rivage, dans la zone située entre la côte et les eaux internationales, ajoute M. Ban.  Enfin, le Secrétaire général se dit profondément préoccupé par le sort des victimes du monde entier qui demeurent aux mains des pirates et qui, le plus souvent, sont détenues dans des conditions difficiles, voire inhumaines.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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