Le Conseil de sécurité fait de l’appropriation nationale la clef du développement des infrastructures institutionnelles dans les sociétés postconflit
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Conseil de sécurité
6472e séance – matin & après-midi
LE CONSEIL DE SÉCURITÉ FAIT DE L’APPROPRIATION NATIONALE LA CLEF DU DÉVELOPPEMENT
DES INFRASTRUCTURES INSTITUTIONNELLES DANS LES SOCIÉTÉS POSTCONFLIT
Dans une déclaration lue par son Président, M. Ivan Barbalić, de la Bosnie-Herzégovine, le Conseil de sécurité a mis l’accent, cet après-midi, à l’issue d’un débat auquel ont participé plus de 40 délégations, sur l’importance de l’« appropriation nationale » dans le cadre du développement de « l’infrastructure institutionnelle, élément critique de la consolidation de la paix » dans les pays émergeant d’un conflit.
Le Conseil, par cette déclaration présidentielle, « souligne que la consolidation de la paix incombe avant tout aux gouvernements et aux acteurs nationaux compétents, notamment à la société civile, et que l’ONU peut jouer un rôle décisif en les aidant à développer leurs institutions ».
Dotés de capacités institutionnelles renforcées, les pays qui sortent d’un conflit sont en mesure d’« accomplir les principales fonctions gouvernementales, notamment gérer pacifiquement les différends politiques, assurer la sécurité et préserver la stabilité, protéger la population, assurer le respect de la légalité, relancer l’économie et fournir les services publics de base, autant d’éléments essentiels à l’avènement d’une paix durable », souligne également le Conseil de sécurité.
Le Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP), M. Peter Wittig, de l’Allemagne, ainsi que le Président de la « configuration » de la CCP concernant la République centrafricaine, M. Jan Grauls, de la Belgique, se sont également exprimés au cours de cette réunion. Ce dernier a reconnu que, dans un contexte postconflit où les institutions de l’État sont souvent fragiles ou menacées, les capacités locales sont généralement dépassées par l’ampleur de la tâche, comme cela a été observé dans les cinq pays actuellement inscrits à l’ordre du jour de la CCP. « La République centrafricaine ou le Libéria ne peuvent fonctionner efficacement en raison notamment d’un manque de capacités administratives ou de magistrats. Le Burundi, quant à lui, a un système pénitentiaire qui ne peut accueillir les détenus en attente d’être jugés », a précisé M. Grauls pour illustrer son propos.
Prenant la parole à l’ouverture de ce débat, le Secrétaire général a relevé qu’en Guinée-Bissau par exemple, des institutions affaiblies demeurent l’une des principales causes de l’instabilité politique et de l’absence de développement économique et social du pays. M. Ban Ki-moon a expliqué que trois enseignements fondamentaux pouvaient être tirés des expériences du passé: renforcer l’appropriation et le leadership nationaux en s’appuyant sur les institutions existantes dans le pays; mettre au point des solutions adaptées à la spécificité de chaque situation postconflit; et maintenir, pendant des « décennies », les activités de consolidation des institutions. Soulignant l’importance de confier aux acteurs nationaux, « capables d’utiliser leurs connaissances du contexte, de recourir aux institutions déjà en place et d’identifier les causes profondes du conflit », la responsabilité première de ces efforts, le Secrétaire général a déclaré que l’« examen international des capacités civiles » en cours était guidé par ce principe directeur. De son côté, le Conseil « attend avec intérêt de recevoir, au début de 2011, le rapport de cet examen international, tout en constatant qu’il faudrait améliorer les mécanismes de déploiement rapide de spécialistes civils qualifiés ».
Le Conseil prie en outre le Secrétaire général de faire figurer dans son prochain rapport de suivi « une évaluation de l’effet qu’a eu son action pour contribuer au développement d’une infrastructure institutionnelle viable dans les pays sortant d’un conflit, et d’y formuler des recommandations nouvelles sur les moyens d’améliorer la contribution des Nations Unies à la mise en place d’institutions plus efficaces, plus stables et plus viables ».
Alors que de nombreux intervenants ont souligné la nécessité de renforcer les partenariats entre acteurs nationaux et internationaux, et notamment la coopération Sud-Sud, le Vice-Premier Ministre du Timor-Leste, M. José Luís Guterres, a annoncé qu’un forum indépendant réunissant des pays en situation postconflit avait été créé, le « G-7+ », qui représente désormais 350 millions de personnes au sein de la communauté internationale. Il a proposé, au nom du G-7+, l’idée d’un rapport spécial du Secrétaire général sur la question du renforcement des institutions dans les États touchés par des conflits.
M. Guterres a indiqué que, grâce à la consolidation de ses institutions, le Timor-Leste, pays émergeant d’un conflit, connaissait depuis trois ans une croissance « à deux chiffres ». Le taux de pauvreté y a baissé de 9%, a-t-il assuré, notant que 96 000 personnes étaient sorties de la pauvreté extrême et que le pays avait progressé en 2010 de 14 places dans l’Index de développement humain des Nations Unies. En outre, 96% des hommes timorais âgés de 30 à 49 ans ont un emploi et l’accès des femmes au marché du travail a été sensiblement amélioré, a ajouté le Vice-Premier Ministre à titre d’exemple.
CONSOLIDATION DE LA PAIX APRÈS UN CONFLIT: DÉVELOPPEMENT DE L’INFRASTRUCTURE INSTITUTIONNELLE
Lettre datée du 10 janvier 2011, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent de la Bosnie-Herzégovine (S/2011/16)
Déclarations
M. BAN KI-MOON, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que le renforcement des institutions constituait une tâche difficile, même dans les conditions les plus favorables. Le bilan du soutien international en ce domaine est mitigé, a-t-il estimé, soulignant qu’il était possible de faire davantage. Ce débat public donne l’occasion d’évaluer le rôle du Conseil de sécurité à cet égard et de tirer les leçons des expériences du passé, a poursuivi M. Ban. Trois enseignements fondamentaux, a-t-il dit, peuvent être tirés des expériences du passé.
La première leçon porte sur la nécessité de renforcer l’appropriation et le leadership nationaux en s’appuyant sur les institutions existantes dans le pays. Le Secrétaire général n’a pas seulement fait référence aux gouvernements nationaux, mais aussi aux autorités locales, aux organismes affiliés, aux communautés, au secteur privé, aux organisations de femmes et à celles de la société civile. Des institutions efficaces et inclusives ne peuvent voir le jour qu’en s’appuyant sur des acteurs nationaux capables d’utiliser leurs connaissances du contexte, de recourir aux institutions déjà en place et d’identifier les causes profondes du conflit. L’examen international des capacités civiles en cours est guidé par ce principe et l’assistance internationale devrait offrir un encadrement aux capacités nationales plutôt que de s’y substituer.
Il faut en outre, a poursuivi le Secrétaire général, éviter à tout prix d’appliquer les mêmes solutions à des situations différentes. Les institutions de chaque pays développent en effet leur propre trajectoire, à leur propre rythme. De la même manière, les changements institutionnels ne devraient pas être envisagés comme un exercice purement technique, mais au contraire être abordés dans le contexte élargi des processus politiques, du développement et de la situation sociale d’un pays. En Guinée-Bissau par exemple, des institutions affaiblies demeurent l’une des principales causes de l’instabilité politique et de l’absence de développement économique et social du pays, a précisé M. Ban.
Enfin, le renforcement des institutions devrait démarrer le plus tôt possible et s’étendre sur des décennies. À court terme, des progrès tangibles auraient besoin d’être réalisés dans certains domaines prioritaires en vue de rétablir la confiance et d’accroître la légitimité des institutions nationales. Ainsi, le développement des capacités pourrait permettre aux institutions clefs de recommencer à fonctionner: les Casque bleus, ainsi que les acteurs de développement et de la communauté humanitaire peuvent jouer un rôle important à cet égard, a souligné le Secrétaire général. Ceci étant, des efforts de réforme prématurée peuvent s’avérer risqués, en particulier s’ils ont lieu sous l’égide d’un gouvernement de transition et avant un premier processus électoral postconflit, a-t-il fait observer. Aussi, est-il nécessaire de parvenir à un équilibre entre court terme et long terme. Rappelant que, de plus en plus, les mandats des opérations de maintien de la paix incluaient des volets de consolidation des institutions, M. Ban a rappelé que cela supposait un renforcement des partenariats entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat, les institutions spécialisées, fonds et programmes des Nations Unies, les institutions financières internationales, les organisations régionales et autres. C’est la raison pour laquelle la Commission de consolidation de paix constitue une plate-forme indispensable à cet égard, a-t-il ajouté avant de conclure.
M. JOSÉ LUÍS GUTERRES, Vice-Premier Ministre du Timor-Leste, a affirmé que le projet de budget de son pays, en cours de discussion, se concentrait sur le renforcement des infrastructures et du capital humain. Le processus budgétaire est un élément clef du programme de consolidation de la nation, a-t-il dit. Aujourd’hui, les faits parlent d’eux-mêmes, a-t-il souligné, précisant que, malgré la crise économique, le Timor-Leste connaissait depuis trois ans une croissance à deux chiffres. Le taux de pauvreté a baissé de 9%, a-t-il dit, notant que 96 000 personnes étaient sorties de la pauvreté extrême et que le pays avait progressé en 2010 de 14 places dans le classement de développement humain des Nations Unies. Il a ajouté que 96% des hommes âgés de 30 à 49 ans avaient un emploi et que l’accès des femmes au marché du travail avait été amélioré.
Tous ces résultats ont été rendus possibles grâce au renforcement des institutions, a-t-il assuré. La professionnalisation du service public, la réforme de la fiscalité, la promotion de la transparence grâce en particulier à l’établissement des Commissions anticorruption et de service civil, la réforme de la gestion des finances publiques, ont contribué, a-t-il expliqué, à consolider la paix en fournissant de meilleurs services publics.
M. Guterres a également affirmé que le Timor-Leste s’était approprié le processus difficile de rétablissement de la confiance du public dans les forces de sécurité et de défense. Les réformes entreprises en matière de sécurité et de pensions accordées aux anciens combattants avaient permis d’établir un nouveau pacte entre les citoyens et l’État favorisant le développement. Le Vice-Premier Ministre a expliqué qu’un forum réunissant des pays en situation postconflit avait été créé. Ce nouveau forum indépendant, le G-7+, qui représente désormais 350 millions de personnes, forme une voix collective au sein de la communauté internationale, a-t-il dit.
M. Guterres a proposé, au nom du G-7+, l’idée d’un rapport spécial du Secrétaire général sur la question du renforcement des institutions dans les États touchés par des conflits. Il a mis l’accent sur la nécessité d’œuvrer avec les partenaires en développement en vue d’élaborer des actions concrètes susceptibles d’améliorer l’engagement international dans les pays affectés par des conflits. Un plan d’action sera prêt avant la fin de l’année, a précisé le Vice-Premier Ministre du Timor-Leste.
M. PETER WITTIG (Allemagne), intervenant une première fois en sa qualité de Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP), a déclaré que le principe de l’appropriation nationale devrait être la base de tous les efforts déployés pour reconstruire les institutions d’un pays sortant d’un conflit. Chaque situation de conflit est unique et il n’existe pas de solution universellement applicable, a-t-il souligné. Le Président a encouragé, lui aussi, le recours aux institutions déjà existantes dans des domaines aussi cruciaux pour la consolidation de la paix que les secteurs de la sécurité et de la justice, les services de base et le redressement économique. L’Ambassadeur Wittig a ajouté qu’il est également important de conclure un accord sur le plan institutionnel avec les sociétés déchirées par un conflit. La consolidation des institutions va largement au-delà de l’établissement et du maintien des structures organisationnelles. Du partage des pouvoirs et de la rotation à la participation active des femmes, en passant par la distribution équitable des richesses et des opportunités économiques, les sociétés émergeant d’un conflit luttent pour se reconstruire sur la base de « nouvelles règles du jeu », a fait remarquer M. Wittig. Le Président de la Commission de consolidation de la paix a rappelé qu’il faudrait garder à l’esprit le fait que des entités comme les organisations communautaires, le secteur privé et la société civile sont des institutions essentielles pour la promotion de la réconciliation nationale, le rétablissement de la confiance et la création d’opportunités économiques. La Commission de consolidation de la paix peut servir de forum politique pour faciliter, entre parties prenantes nationales, le développement de leurs propres priorités nationales.
S’exprimant ensuite en sa qualité de Représentant permanent de l’Allemagne, M. Wittig a déclaré que l’appui de la communauté internationale au renforcement des institutions d’un pays sortant d’un conflit devrait viser à appuyer les efforts entrepris en faveur de l’appropriation nationale et non pas s’y substituer. Il a estimé que le renforcement des institutions ne devrait pas se limiter à l’édification de nouvelles institutions gouvernementales, mais plutôt tenir compte de l’ensemble de la population ainsi que de l’interaction entre l’état et sa société. Il a ajouté qu’une participation active des femmes, la création d’organisations sociales actives et la réintégration des enfants soldats participaient également au processus de renforcement des institutions.
M. Wittig a par ailleurs affirmé que le renforcement des institutions devrait aller de pair avec le renforcement des capacités nationales, notamment en ce qui concerne la lutte contre l’impunité et les enquêtes sur les auteurs de violations des droits de l’homme. Il a relevé que sans la participation d’organisations disposant d’une bonne expertise locale, les projets en matière d’état de droit ne contribuent pas à faire évoluer de manière adéquate les capacités des institutions judiciaires. Il a appelé le Conseil de sécurité à prendre en compte la question du renforcement des institutions dès la création des mandats de maintien de la paix, ainsi que lors de la prorogation ou du retrait des opérations.
Mme SUSAN RICE (États-Unis) a affirmé que la seule façon de mettre un terme à la guerre était de faire la paix. Il faut prévenir les risques et aiguiser tous les outils à notre disposition pour mieux travailler, a-t-elle dit. Citant en particulier l’exemple de la Bosnie-Herzégovine qui a déployé des efforts inlassables depuis la signature des Accords de Dayton en 1995 pour mettre sur pied des institutions solides, Mme Rice a estimé que l’appropriation nationale et la reconstruction étaient indispensables. Les femmes doivent jouer un rôle plus actif dans l’œuvre de consolidation de la paix, a souligné la représentante américaine.
La durabilité d’un processus de paix dépend du renforcement des institutions clefs, a-t-elle assuré, notant que l’aide internationale peut être indispensable, comme c’est le cas en Afghanistan ou en Haïti. Elle a ainsi appelé à redoubler d’efforts pour aider Haïti à renforcer ses institutions. La déléguée américaine a également mis l’accent sur la nécessité de mobiliser l’assistance dans le domaine du renforcement de l’état de droit et dans le secteur de la sécurité. Elle a dit attendre, au cours des semaines à venir, les résultats de l’examen international des capacités civiles.
M. GÉRARD ARAUD (France) a rappelé que la consolidation des institutions nationales, la mise en place d’un état de droit et le développement des pratiques de gouvernance démocratique sont des éléments essentiels d’une vie politique stable et pacifiée. L’appropriation nationale d’un tel processus permet donc d’assurer que les ressources intellectuelles et humaines du pays seront utilisées à bon escient et que les institutions nouvellement créées sont bien adaptées au contexte national et permettent d’assurer le développement. Un processus exceptionnel que ce Conseil devra suivre avec attention sera bien entendu le Sud-Soudan, s’il doit acquérir son indépendance à l’issue du référendum qui vient de s’achever, a relevé M. Araud.
Il est également nécessaire de mieux définir les priorités en prenant en considération les enjeux de la gouvernance, a poursuivi le représentant français, qui a souligné la menace que fait peser la corruption sur les institutions et les valeurs démocratiques, les valeurs éthiques et la justice. Par ailleurs, dans un contexte d’après-crise immédiat, il faut prêter attention au développement des institutions pour éviter une reprise du conflit. « Il faut des instances démocratiques représentatives, des services publics qui fournissent des biens de première nécessité et des institutions sécuritaires qui assurent la stabilité de l’État », a-t-il étayé.
Évoquant enfin le besoin de financement sur le long terme des institutions nouvellement créées ou consolidées, il a rappelé que l’État sortant d’une crise avait rarement les moyens de le faire et que la communauté internationale devait donc le soutenir. La Commission de consolidation de la paix (CCP) doit elle aussi jouer tout son rôle en adhérant aux trois principes énoncés par la France, qui sont l’appropriation nationale, la bonne gouvernance et l’engagement financier. Le représentant a souhaité en conclusion que la revue à laquelle la CCP a procédé en 2010 aiderait celle-ci à mieux cibler son action.
M. BASO SANGQU (Afrique du Sud) a affirmé que l’appropriation nationale était essentielle pour créer des institutions durables immédiatement après la fin d’un conflit. Il a estimé que, même si les personnes se trouvant dans une situation postconflit risquent de ne pas être capables de formuler leurs priorités, il faudrait au moins leur permettre de les identifier. Cette identification réside au cœur du succès ou de l’échec des efforts de consolidation de la paix, a-t-il ajouté, avant de souligner l’importance du renforcement des capacités et du renforcement institutionnel.
M. Sangqu a ensuite appelé à une plus grande cohérence et coordination entre l’ONU et ses institutions, fonds et programmes, ainsi qu’entre les institutions financières internationales, les organisations régionales et les donateurs. Sa délégation souligne également qu’il faudrait donner la priorité à la réforme du secteur de la sécurité, au respect de l’état de droit, au programme de démobilisation, désarmement et de réintégration, ainsi qu’au redressement économique. Il s’est félicité du renforcement des relations entre la Commission de consolidation de la paix et l’Union africaine, mais a estimé que les relations entre la Commission et le Conseil de sécurité méritaient d’être améliorée. Il a réclamé une plus grande souplesse dans les méthodes de travail de la Commission afin qu’elle puisse jouer pleinement son rôle de conseiller en matière de renforcement institutionnel postconflit. Il a également encouragé le Conseil à s’assurer que la question du renforcement institutionnel figure au sein de tous les mandats de maintien de la paix. M. Sangqu a par ailleurs engagé l’ONU à envisager d’utiliser les quotes-parts comme moyen de donner un coup d’élan aux activités de consolidation de la paix, notamment au renforcement institutionnel.
M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a affirmé que seuls les acteurs nationaux, en s’acquittant de leurs responsabilités, pouvaient assurer un renforcement durable des institutions après un conflit. Le renforcement du potentiel national doit être la priorité de l’Organisation, a-t-il dit. Toute aide de la part de la communauté internationale doit être accordée avec l’accord des gouvernements nationaux et conformément aux principes fondamentaux énoncés par la Charte des Nations Unies. Il ne peut y avoir de solution universelle, a-t-il dit, tout en mettant l’accent sur l’importance de prendre en compte le caractère spécifique de chaque situation.
La Fédération de Russie estime qu’un rôle important incombe à l’ONU pour ce qui est du rétablissement social et économique, a indiqué son représentant. Il faut, a-t-il dit, des efforts concertés du Secrétariat, des agences, des fonds et des programmes, des institutions financières internationales. Il serait judicieux que les agents de la paix ne soient chargés que des tâches initiales de maintien de la paix, a-t-il poursuivi, en soulignant qu’il était nécessaire de faire participer la Commission de consolidation de la paix (CCP) et les organisations financières internationales aux étapes suivantes de la consolidation de la paix.
M. NÉSTOR OSORIO (Colombie) a affirmé que la consolidation de la paix relève avant tout de la responsabilité nationale; les efforts nationaux devant être soutenus par la communauté internationale et notamment les Nations Unies, les organisations régionales et les institutions financières internationales. Il a estimé qu’il fallait envisager la reconstitution des structures institutionnelles dès les premières étapes du maintien de la paix. M. Osorio a invité le Conseil de sécurité à prendre des mesures qui tiennent compte les particularités politiques, économiques et culturelles de chaque situation. Il est en outre important que tous les acteurs du processus de consolidation de la paix travaillent de façon coordonnée et cohérente, afin d’éviter des doubles emplois et d’utiliser au mieux les ressources disponibles. La Commission de consolidation de la paix doit jouer un rôle central et promouvoir le renforcement des institutions, pour ce faire, encourager le recours par le Conseil à son rôle consultatif.
Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI (Brésil), tout en se ralliant à la déclaration faite par l’Ambassadeur Jan Grauls au nom des cinq présidents des configurations spécifiques aux pays inscrits à l’ordre du jour de la Commission de la consolidation de la paix, a reconnu que le renforcement des institutions gouvernementales était essentiel pour que les pays sortant d’un conflit puissent parvenir à une paix durable. Les efforts de la communauté internationale ne devraient pas se concentrer uniquement sur le soutien aux institutions dans les domaines de la justice et de la sécurité, a-t-elle estimé. Il faut aussi œuvrer en faveur du renforcement des capacités des institutions chargées de la revitalisation économique, de l’administration publique et de la fourniture des services de base, a-t-elle ajouté, soulignant que ces institutions étaient indispensables pour la réduction de la pauvreté et, par conséquent, pour s’attaquer aux causes profondes des conflits sociaux.
Mme Ribeiro Viotti a aussi déclaré qu’il était nécessaire de mettre l’accent sur la contribution des femmes qui, selon elle, doivent à la fois être bien représentées au sein des institutions gouvernementales et voir leurs droits bien défendus par ces institutions. La mise en place des institutions nationales doit se faire immédiatement après la fin d’un conflit. Une des missions principales du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) devait être l’assistance à la mise en place d’institutions nationales dans les pays sortant d’un conflit. Cette tâche doit également être réalisée de manière coordonnée avec les institutions financières internationales et les organisations régionales et sous-régionales. La représentante a aussi insisté sur l’appropriation nationale, afin que le pays sortant d’un conflit ne dépende pas indéfiniment de l’expertise étrangère.
Mme JOY OGWU (Nigéria) a déclaré que le renforcement des institutions englobait non seulement la consolidation des structures organisationnelles, mais aussi l’ensemble de règles et des valeurs d’état de droit qui les sous-tendent. Elle a prévenu que, même si le travail des divers acteurs du système des Nations Unies devait être salué, le rétablissement des institutions clefs ne pouvait pas être externalisé et il était, par conséquent, impératif que les Nations Unies jouent pleinement leur rôle de facilitateur dès le début des activités de consolidation. Les acteurs nationaux devraient toujours prendre la direction des efforts déployés pour répondre aux besoins de leurs pays, avec l’appui des Nations Unies, adapté à chaque situation. La représentante a également préconisé un financement à long terme plus prévisible pour la consolidation des institutions. L’absence d’un financement adéquat, a-t-elle fait remarquer, peut ralentir considérablement la mise en œuvre des mandats de consolidation de la paix. C’est pourquoi, Mme Ogwu a encouragé les donateurs à contribuer davantage au Fonds pour la consolidation de la paix et à d’autres fonds multilatéraux pour appuyer la consolidation des institutions et le redressement postconflit. La représentante a assuré que, pour sa part, le Nigéria apporte un soutien aux niveaux international et régional, en particulier en Afrique de l’Ouest, où il assiste à la réforme du secteur de la sécurité des pays concernés. Depuis 2004, les Forces armées nigérianes travaillent en étroite coopération avec les organisations de la société civile, a ajouté Mme Owgu.
M. NAWAF SALAM (Liban) a relevé que comme certaines institutions pouvaient être la cause même d’un conflit, les opérations de consolidation de la paix devaient avoir pour but d’établir des institutions stables et comptables de leurs actes. Le renforcement des institutions doit pouvoir instaurer un système de valeurs capables de promouvoir le règlement pacifique de différends sur le long terme. La participation précoce de la société civile est importante à cet égard, a-t-il ajouté. M. Salam a estimé que le renforcement des institutions devait être intégré au sein de toute stratégie nationale de consolidation de la paix afin de garantir une plus grande cohérence et une plus grande efficacité.
Une bonne stratégie de consolidation de la paix doit établir un équilibre entre la nécessité d’un impact rapide et le renforcement des capacités sur le long terme, et ce, pour jeter les bases d’une justice sociale et d’une paix durables. Il n’existe pas d’approche à « taille unique », a-t-il ajouté. Le représentant a appelé l’ONU à encourager les initiatives locales. Au lieu de supplanter les institutions nationales, a-t-il précisé, l’ONU et les acteurs internationaux devraient appuyer les acteurs nationaux et la société civile locale afin de les aider à mobiliser les ressources nécessaires à l’édification de leurs propres institutions. La Commission de consolidation de la paix a un rôle important à jouer dans la mobilisation de ressources.
M. HARDEEP SINGH PURI (Inde) a affirmé que l’on ne pouvait pas rétablir la paix dans un pays en conflit ou sortant d’un conflit tant que les autorités nationales n’étaient pas en mesure de gouverner réellement. Le représentant a mis l’accent sur la nécessité de mieux définir la portée de la consolidation de la paix. Il a fait état de l’expérience de l’Inde qui, depuis 60 ans, œuvre dans le domaine du maintien de la paix. L’Inde, a-t-il dit, a davantage contribué aux opérations de maintien de la paix que toute autre nation. Il a souligné que les soldats de la paix indiens avaient fait prendre conscience des efforts à fournir pour aider les autorités locales à renforcer leurs institutions.
Le représentant de l’Inde a estimé que les institutions politiques administratives décentralisées constituaient un élément clef du renforcement de l’État. L’Inde, a-t-il précisé, a lancé une grande initiative de décentralisation démocratique il y a 20 ans, axée sur l’inclusion. La mise en œuvre de cette initiative a permis, a-t-il dit, l’autonomisation des personnes autrefois marginalisées, comme les femmes. Le délégué a mis l’accent sur la nécessité de créer un environnement permettant à la volonté locale de s’exprimer. La communauté internationale, a-t-il ajouté, doit débloquer des ressources prévisibles adaptées sur de longues périodes. De même, il faut renforcer les capacités en se concentrant sur les besoins des autorités nationales et non sur les intérêts des donateurs, a-t-il estimé.
M. ALFRED MOUNGARA-MOUSSOTSI (Gabon) a estimé que la question de la reconstruction des institutions des pays sortant de crise -pan très important de la consolidation de la paix- devait être prise en compte dès la cessation des hostilités. L’aide internationale ne saurait cependant remplacer ni la responsabilité des autorités et autres acteurs nationaux ni leur participation au processus visant la reconstruction des institutions de leurs pays. La cohérence et la coordination des différents acteurs qui participent à la reconstruction ou au renforcement des institutions s’imposent afin d’éviter les chevauchements, a-t-il dit. Cette cohérence doit, selon lui, commencer au niveau des Nations Unies, grâce à une définition et à une répartition claires du travail.
Le représentant a estimé que la cohérence devait ensuite s’étendre au partenariat avec les organisations régionales et sous-régionales. Il a encouragé la Commission de consolidation de la paix, dans son rôle de coordination, à développer les partenariats avec toutes les institutions financières et donateurs pouvant aider les pays inscrits à son ordre du jour. Elle devrait également faire participer tous les acteurs, y compris les organisations féminines, a-t-il déclaré.
M. MARK LYALL GRANT (Royaume-Uni) a mis l’accent sur la nécessité de renforcer les capacités institutionnelles pour résoudre les conflits de façon pacifique. Le représentant a estimé que 2011 serait une année pleine de défis pour les Nations Unies dans l’appui au renforcement des institutions, faisant état des situations au Soudan, en République démocratique du Congo (RDC) ou au Libéria. Selon M. Grant, le temps est essentiel. Il faut en effet une volonté politique et administrative suffisante pour fournir dans les temps et de façon adéquate le volume d’aide nécessaire.
De même, a-t-il ajouté, l’appui des Nations Unies en matière de réforme des secteurs de la justice et de la sécurité doit être plus efficace. La planification entre les missions de maintien de la paix et les fonds et programmes doit être aussi véritablement intégrée. Il faut une meilleure qualité et une plus grande rapidité des déploiements civils, a-t-il ajouté, disant attendre avec intérêt le rapport de l’examen international des capacités civiles. Enfin, le représentant a souligné la nécessité d’accorder une plus grande attention aux perspectives et aux expériences des pays eux-mêmes.
M. JOSÉ FILIPE MORAES CABRAL (Portugal) a estimé que l’ONU devait améliorer sa capacité à coordonner les activités entre les acteurs responsables de la sécurité, les agences de développement, les ONG et les organisations régionales participant aux opérations de consolidation de la paix. M. Moraes Cabral a engagé le Conseil de sécurité à doter les missions de mandats précis et de capacités suffisantes tout en améliorant l’interaction avec les parties pertinentes, notamment les organisations régionales, les pays voisins et les pays contributeurs de troupes. Conscient de l’importance du développement économique et social, le représentant du Portugal a estimé que les efforts de consolidation de la paix devaient répondre, le plus tôt possible, au problème du chômage, chez les jeunes notamment. Il a également cité l’importance de l’appropriation nationale et du rôle des femmes. La consolidation de la paix, a-t-il ajouté, doit savoir gérer les attentes des autorités, de la mission et des institutions internationales. L’appropriation nationale contribue au renforcement des institutions, lequel renforce à son tour l’appropriation et la responsabilisation nationales, traçant ainsi la voie à une bonne stratégie de départ.
M. WANG MIN (Chine) a rappelé l’importance du renforcement des capacités institutionnelles dans le contexte de la consolidation de la paix. Selon lui, il faut que les pays sortant d’un conflit assument la responsabilité première de la reconstruction en s’appuyant sur les institutions déjà existantes. L’ONU et la communauté internationale doivent donc s’aligner sur les priorités nationales, en fournissant une expertise et une formation aux personnels nationaux. La première tâche de la communauté internationale est de fournir des services de base et d’appuyer le renforcement de l’état de droit, toujours en tenant compte des priorités fixées par le pays lui-même, a insisté le représentant, pour qui ceci suppose l’élaboration de stratégies globales destinées à éviter les chevauchements et les dépenses superflues.
M. IVAN BARBALIĆ (Bosnie-Herzégovine), dont le pays assure la présidence du Conseil de sécurité pour le mois de janvier, a estimé que la mise en place d’institutions légitimes devrait être un objectif stratégique, dès les premières étapes du processus de consolidation de la paix, alors que l’approche traditionnelle privilégie les secours humanitaires et l’aide au rétablissement du pays. Donner la priorité au développement de ces institutions permet d’éviter de retomber dans un conflit et d’ancrer la légitimité de l’État, a-t-il fait observer. Il faut, a-t-il dit, se concentrer sur les institutions qui assument des fonctions politiques, celles qui sont chargées de questions relatives à la sécurité et à l’état de droit, ainsi que celles qui ont pour rôle de revitaliser l’économie et d’assurer la fourniture des services de base. L’Ambassadeur Barbalić a estimé que les intervenants internationaux et nationaux dans le processus de consolidation de la paix doivent respecter la Constitution en vigueur après un conflit et l’ordre interne du pays. Si la communauté internationale doit parfois assumer une grande part de la responsabilité dans la mise en place d’institutions dans les situations postconflit, l’objectif est de réduire progressivement la dépendance du pays vis-à-vis de la communauté internationale, a-t-il dit, en soulignant l’importance du principe de l’appropriation nationale.
M. Barbalić a également souhaité que les missions de consolidation de la paix aient plus de flexibilité et soient bien coordonnées avec les équipes de pays. Il a aussi invité le Conseil de sécurité à utiliser davantage le rôle consultatif de la Commission de consolidation de la paix, notamment en ce qui concerne le développement d’institutions viables. Il a ensuite donné des exemples concernant son pays où la réforme du secteur de la défense a permis de moderniser les forces armées qui opèrent sous une autorité civile. La volonté politique des parties prenantes nationales mais aussi l’implication d’acteurs internationaux ont permis le succès de cette réforme, a-t-il assuré.
M. JAN GRAULS (Belgique), s’exprimant au nom du Brésil, du Canada, de la Jordanie et de la Suisse, présidents des « configurations » de la Commission de consolidation de la paix (CCP) concernant la République centrafricaine, la Guinée-Bissau, la Sierra Leone, le Libéria et le Burundi, a déclaré que le processus de consolidation des institutions faisait partie intégrante de la consolidation de la paix. Dans un contexte postconflit où les institutions de l’État sont souvent fragiles ou menacées, les capacités locales sont généralement dépassées par l’ampleur de la tâche, comme cela a été observé dans les cinq pays qui sont actuellement inscrits à l’ordre du jour de la CCP. La République centrafricaine ou le Libéria ne peuvent fonctionner efficacement en raison notamment d’un manque de capacités administratives ou de magistrats. Le Burundi, quant à lui, a un système pénitentiaire qui ne peut accueillir les détenus en attente d’être jugés.
Par « consolidation des institutions », il faut entendre la fourniture de services de base et de conditions de sécurité acceptables, des institutions efficaces capables non seulement de protéger ses citoyens, mais aussi d’assurer leur participation élargie aux processus de prise de décisions politiques, a expliqué M. Grauls. Ce concept doit prendre aussi la forme d’un système judiciaire indépendant, d’une administration bien gérée, de stratégies de relance économique et de développement social, sans parler des mécanismes de justice transitionnelle et de réconciliation nationale.
Le représentant a également expliqué, à l’instar d’autres orateurs, qu’il faudrait s’abstenir d’appliquer des solutions « prêtes à l’emploi ». À cet égard, il a souligné que des institutions stables ne pouvaient pas être imposées et que la consolidation des institutions exigeait un soutien constant de la communauté internationale, ainsi qu’un financement approprié. Une expertise civile est également indispensable, dans les domaines de la justice, de la réforme du secteur de la sécurité, de la gouvernance, du redressement économique et des politiques sociales. Il faudrait aussi puiser parmi les experts nationaux, qui connaissent bien la situation sur le terrain, a préconisé l’Ambassadeur Grauls, avant de rappeler l’importance de la Commission de consolidation de la paix dans ces domaines.
M. MAGED A. ABDELAZIZ (Égypte) a soutenu le principe de l’appropriation nationale de la consolidation de la paix, s’opposant fermement à ce que la communauté internationale, même en temps de conflit, fournisse des services qui en principe incombent aux gouvernements nationaux ou de transition. L’expérience aux niveaux international et régional a prouvé que l’appropriation nationale de toutes les phases du processus de consolidation de la paix est essentielle, a-t-il rappelé. La mise en place d’institutions est une composante clef des stratégies de consolidation de la paix et requiert des méthodologies innovantes, a-t-il ajouté. Le représentant a aussi soutenu qu’il faudrait procéder à une analyse approfondie des capacités et ressources nationales. Les efforts menés par les pays dans les situations postconflit doivent être soutenus grâce à des partenariats multidimensionnels tant au sein du système des Nations Unies qu’en dehors, a souligné le représentant, en souhaitant une implication des institutions financières internationales et des organisations régionales. De l’avis de sa délégation, il faut aussi que les acteurs de la consolidation de la paix et du développement contribuent activement à l’élaboration et à la mise en œuvre de la stratégie de sortie des opérations de maintien de la paix. Enfin, il a mis l’accent sur la nécessité de disposer de ressources financières suffisantes et prévisibles. À cet égard, il a rappelé la proposition faite par l’Égypte l’an dernier visant la convocation d’une conférence annuelle de donateurs en faveur du Fonds pour la consolidation de la paix.
M. ERTUĞRUL APAKAN (Turquie) a affirmé que son pays était de plus en plus engagé dans les efforts de diplomatie préventive, de maintien de la paix et de consolidation de la paix au lendemain d’un conflit, précisant que ces efforts étaient étroitement liés. Il est essentiel, a-t-il dit, d’utiliser ces outils dans un cadre cohérent et stratégique. Le représentant a assuré que la consolidation de la paix relevait en premier lieu de la responsabilité nationale, d’où l’importance, a-t-il précisé, de l’appropriation nationale. La réalisation efficace et durable des objectifs de consolidation de la paix exige un engagement actif de tous les acteurs locaux concernés, y compris la société civile, les associations professionnelles et les organisations de femmes. L’appropriation nationale et le renforcement des capacités constituent également, a-t-il dit, un élément clef d’une stratégie de sortie efficace.
M. Apakan a ensuite estimé que l’appui et la coopération des acteurs régionaux, en particulier des pays voisins, était un autre élément essentiel d’une consolidation de la paix et d’un renforcement des institutions réussis. Avant de conclure, le représentant de la Turquie a mis l’accent sur le rôle que les Nations Unies doivent jouer, de façon stratégique, pour coordonner les activités des différents acteurs. Le soutien des Nations Unies aux organisations régionales et sous-régionales devrait être accru afin de développer les capacités de ces dernières à mieux s’acquitter de leurs tâches à l’avenir.
M. RANKO VILOVIĆ (Croatie) a rappelé lui aussi que l’appropriation nationale était une composante clef des efforts de consolidation de la paix. Il a indiqué que son pays avait, dès le départ, soutenu la création du Groupe consultatif de haut niveau chargé d’évaluer les capacités civiles afin de renforcer la capacité de déploiement rapide et d’appuyer le développement de l’infrastructure institutionnelle dans les pays sortant d’un conflit. Le représentant a en conclusion reconnu et salué la contribution du Conseil de sécurité pour assurer une plus grande cohérence entre les activités de maintien et de consolidation de la paix, notamment en transformant des opérations de maintien de la paix en missions intégrées de consolidation de la paix.
M. ZAHIR TANIN (Afghanistan) a rappelé la transition qu’a connue son pays après 30 années de conflit, alors qu’il n’avait plus d’armée ou de police professionnelle et que le personnel qualifié avait fui le pays. Malgré l’ampleur de la destruction, les efforts de stabilisation en Afghanistan ont produit des résultats impressionnants, a-t-il dit, reconnaissant que le développement du pays a pu se réaliser grâce à l’aide de la communauté internationale. Près de 7 millions de réfugiés sont rentrés au pays et le rôle des femmes en politique s’est beaucoup renforcé, a-t-il indiqué. Il a aussi mentionné les progrès importants accomplis dans les domaines des infrastructures, de l’éducation, des soins médicaux et de l’égalité d’accès des femmes et des filles à l’éducation. En outre, les institutions en matière de sécurité se sont développées, a-t-il précisé, et les rangs de l’Armée nationale afghane se sont bien étoffés. Nous avons donné la priorité à la réintégration et à la réconciliation et c’est maintenant aux Taliban d’assumer leurs responsabilités en ce sens.
Un des plus gros défis à relever est de maintenir une paix durable, pas seulement en Afghanistan mais aussi dans tout pays sortant d’un conflit, a poursuivi M. Tanin. Un tel pays doit disposer à cet effet de ressources, notamment humaines, pour faire face au risque d’insurrection. Pour le cas de l’Afghanistan, la coopération régionale est un élément important du processus de stabilisation, a-t-il précisé. Pour les années à venir, il sera très important que l’Afghanistan poursuive le processus d’appropriation nationale et continue de bénéficier des partenariats internationaux.
M. EDUARDO ULIBARRI (Costa Rica) a affirmé que son pays avait été un acteur déterminant sur la voie de la paix en Amérique centrale. La participation de la communauté internationale et l’existence d’un leadership régional orientant les efforts se sont avérées essentielles, a-t-il souligné, citant en particulier les exemples du Nicaragua, d’El Salvador et du Guatemala. La cessation des hostilités ne servirait pas à grand chose si les accords nationaux ne portaient pas sur la consolidation de la paix. Il existe des défis qui, s’ils ne sont pas abordés à temps, mettraient en danger la démocratie et la stabilité, a-t-il dit. Le représentant a également mis l’accent sur la nécessité pour les pays qui comptent une forte population de jeunes d’offrir à ceux-ci des opportunités en matière d’éducation, de loisirs et d’emploi, en vue, notamment, de les dissuader de former des bandes ou de se livrer à la criminalité organisée. Il faut également, a-t-il dit, encourager une société civile et une presse dynamiques.
M. BENEDICT LAWRENCE LUKWIYA (Ouganda) a jugé essentiel que les efforts de consolidation de la paix se concentrent sur les racines et causes du conflit et l’édification d’institutions nationales efficaces dans l’intérêt d’une paix et d’un développement durables. Il a souligné que la responsabilité première en matière de renforcement d’institutions reposait sur les autorités nationales appuyées par des partenaires internationaux, dont les organisations régionales et l’ONU. La mise en place d’institutions nationales passe par l’identification de priorités clefs en prenant en compte les besoins spécifiques du pays, a-t-il dit. M. Lukwiya a précisé que cette identification de priorité devrait être suivie par la mise en place d’une stratégie nationale de mise en œuvre, avec la mobilisation des moyens politiques, financiers et techniques nécessaires. Il a mis l’accent sur l’importance de protéger la vie et les propriétés, de garantir la réconciliation nationale, de promouvoir la bonne gouvernance et l’état de droit. Le représentant a également souligné la nécessité de distribuer les dividendes de la paix et d’assurer les services de base pour améliorer la qualité de vie de la population. En cas de violations flagrantes des droits de l’homme, a-t-il insisté, il est indispensable que les responsables soient poursuivis.
En outre, le représentant de l’Ouganda a estimé que le principal défi auquel sont confrontés les pays sortant d’un conflit pour renforcer leurs institutions était l’insuffisance de moyens financiers et d’expertise technique dans de nombreux domaines. Il a salué l’engagement croissant de l’ONU, par le biais de la Commission de consolidation de la paix, les partenaires régionaux et internationaux, ainsi que les institutions financières internationales pour soutenir les capacités nationales. Il a ajouté que les efforts doivent également être axés sur le développement de compétences nationales afin de ne plus dépendre de l’expertise et de l’aide internationales. Avant de conclure, M. Lukwiya a dit attendre beaucoup de la conclusion de l’étude sur les capacités civiles internationales et ses recommandations sur les moyens d’améliorer la réponse internationale et la fourniture de capacités civiles appropriées à la consolidation de la paix.
M. LOTFI BOUCHAARA (Maroc) a déclaré que le rétablissement et le renforcement des capacités institutionnelles de l’État sortant d’une situation de conflit étaient particulièrement importants au regard des risques nombreux de rechute dans les conflits. De ce fait, la coordination entre les acteurs locaux et internationaux est critique pour la stabilisation de l’État hôte et doit contribuer au relèvement de ses institutions. Cependant, l’un des principaux défis de la phase de consolidation de la paix est la cohérence et la coordination de l’action des acteurs internationaux, a fait observer M. Bouchaara. Or, trop souvent, a-t-il regretté, les Nations Unies et leurs partenaires internationaux agissent sans impliquer activement les autorités du pays hôte. Le Maroc estime qu’il est important pour les autorités nationales de s’approprier l’entreprise de consolidation de la paix et d’assumer, dès que possible, la responsabilité de rétablir les institutions de l’État, de restaurer l’état de droit, de revitaliser l’économie, de réformer le secteur de la sécurité et de la justice, d’assurer la fourniture des services de base et de répondre aux autres besoins essentiels en matière de consolidation de la paix. Cette exigence illustre aussi la nécessité de l’avènement d’une logique partenariale entre le pays hôte, l’ONU et les bailleurs de fonds, a estimé le représentant, qui a appelé à une meilleure coordination entre le Bureau d’appui à la consolidation de la paix et la Banque mondiale.
M. TSUNEO NISHIDA (Japon) a déclaré que la Japon accordait une grande importance au renforcement des institutions et qu’il mettait l’accent sur l’appropriation nationale. Il a souhaité que le Conseil de sécurité utilise la Commission de consolidation de la paix (CCP) de manière plus proactive. Il a suggéré que l’on facilite la formation de capacités civiles et leur déploiement, en suggérant au Conseil de mettre en œuvre les recommandations du prochain rapport de M. Guéhenno sur la question. Compte tenu de la complexité du mécanisme de partenariats en matière de consolidation de la paix, il a invité le Conseil à promouvoir un leadership fort sur le terrain, pour permettre aux représentants de l’ONU et du gouvernement concerné de travailler ensemble pour trouver des solutions reflétant les spécificités locales.
S’agissant tout particulièrement de la CCP, le représentant a estimé que des liens plus forts entre cet organisme et le Conseil de sécurité seraient de nature à faire avancer les choses. Il a rappelé que, l’année dernière, le Japon avait facilité un dialogue informel entre le Conseil et la CCP. La CCP peut être utilisée comme un forum de discussions sur les stratégies de retrait des opérations de maintien de la paix. En la matière, le Libéria peut être examiné comme un cas d’école. La CCP, a poursuivi le représentant, doit augmenter le nombre de pays à son ordre du jour et s’appuyer sur les expériences acquises. Mettant l’accent sur la CCP en tant qu’outil de mobilisation de ressources, il a indiqué que le Japon souhaitait ajouter une contribution supplémentaire de 13 millions de dollars au Fonds pour la consolidation de la paix.
M. PETER SCHWAIGER, Union européenne, a estimé qu’une meilleure coordination sur le terrain entre les différents acteurs internationaux s’imposait, notamment entre les institutions financières internationales et les donateurs bilatéraux. Il a affirmé qu’on pourrait tirer davantage profit du potentiel de la Commission de consolidation de la paix en renforcent ses liens avec les équipes sur le terrain. Cela leur permettra de profiter de sa direction stratégique et de son influence politique, notamment en matière de renforcement des institutions, a-t-il expliqué. À l’instar du Secrétaire général, il a également estimé que le Conseil de sécurité pouvait tirer parti des recommandations de la Commission.
Le représentant de l’Union européenne a dit accorder une grande importance à l’examen des capacités civiles, en voulant voir ce processus déboucher sur des recommandations et des objectifs concrets et réalistes. M. Schwaiger a également estimé que le renforcement des mécanismes civils de contrôle et la participation de la société au processus de consolidation de la paix donnerait davantage de légitimité aux priorités et aux institutions créées. Il a passé en revue les activités mises en œuvre par l’Union européenne pour renforcer les capacités des parlements et des médias, au Timor-Leste par exemple.
M. KIM BONGHYUN (République de Corée) a affirmé qu’après la cessation des hostilités, la mise en place des institutions devrait commencer le plus tôt possible. Le renforcement des institutions devrait être intégré dans une approche holistique de la consolidation de la paix, abordant également l’aide humanitaire et l’assistance au développement à long terme. Il est impératif, a-t-il dit, que le maintien de la paix, la consolidation de la paix et le développement durable soient conduits en parallèle. Le représentant a par ailleurs souligné que les activités de consolidation de la paix devraient être exécutées de façon à respecter et à renforcer l’appropriation nationale ainsi que les priorités des pays récipiendaires. L’objectif final de la consolidation de la paix n’est pas seulement de stabiliser la situation postconflit, mais aussi d’établir les fondements d’un développement durable à long terme. À cet égard, les organisations internationales, les institutions financières et la société civile ont un rôle important à jouer, a-t-il expliqué.
Mme BERNADETTE CAVANAGH (Nouvelle-Zélande) a déclaré que les missions dotées d’une forte composante « renforcement des capacités institutionnelles » devaient articuler leur planification autour de cette composante. Cela passe par une évaluation des capacités locales existantes et une identification des priorités, a-t-elle insisté; le renforcement des institutions devant se faire en accord avec les priorités et objectifs nationaux. Cela n’est pas seulement une exigence du principe d’appropriation nationale mais surtout l’élément crucial d’une coordination efficace de l’aide internationale et de la pérennité des capacités créés au niveau local. D’ailleurs, a-t-elle précisé, l’aide au renforcement des institutions doit s’appuyer sur une évaluation sans complaisance des capacités nécessaires. La représentante a jugé essentiel de coordonner efficacement cette aide pour assurer la cohérence des efforts. Il faut en outre, a-t-elle poursuivi, analyser les avantages comparatifs des missions et des autres acteurs face aux tâches à accomplir en matière de renforcement institutionnel. Il faut enfin, a-t-elle conclu, renforcer la capacité de l’ONU à identifier et à déployer aussi tôt que possible l’expertise civile adéquate.
Mme YANERIT MORGAN SOTOMAYOR (Mexique) a fait observer que souvent, l’accent était mis sur la situation humanitaire et le renforcement de la sécurité, au détriment de la consolidation de l’état de droit dans les pays sortant d’un conflit. La représentante a estimé que le Conseil avait pour tâche d’élaborer de plus en plus systématiquement des mandats visant à favoriser le renforcement de l’état de droit au sein des pays émergeant d’un conflit. Cela ne peut se faire sans confier la responsabilité première de consolidation des institutions aux acteurs nationaux, a-t-elle ajouté. Il faut à cet égard que la Commission de consolidation de la paix garantisse une cohérence entre ces acteurs et les partenaires internationaux, a conclu Mme Morgan.
M. GYAN CHANDRA ACHARYA (Népal) a affirmé que son pays, qui sort lui-même d’un conflit, faisait tous les efforts possibles pour conserver les gains enregistrés en période de paix. Ces efforts, a—t-il dit, ne pourraient être réalisés en l’absence de réseaux institutionnels efficaces. Le représentant a notamment insisté sur l’importance de disposer d’institutions compétentes afin de permettre aux populations d’avoir espoir en un avenir meilleur. Les relations Sud-Sud et Nord-Sud sont fondamentales en matière de consolidation de la paix, de même que l’appropriation nationale, a-t-il dit. La communauté internationale doit apporter tout son soutien pour assurer la transition, le renforcement des institutions jouant, à cet égard, un rôle majeur. Le représentant a également mis l’accent sur le rôle que joue la Commission de consolidation de la paix (CCP).
M. GARY QUINLAN (Australie) a déclaré que la leçon la plus importante que l’on peut tirer du débat d’aujourd’hui est que l’appropriation et le leadership nationaux sont déterminants pour le succès des activités de consolidation de la paix. Le processus de consolidation des institutions doit en outre être mené à temps, faire preuve de souplesse et s’avérer durable, a poursuivi le représentant, qui a ensuite appelé les acteurs internationaux à faire preuve de coordination. L’assistance devrait s’étendre sur l’ensemble du pays ainsi qu’aux organisations de la société civile et au secteur privé. Le représentant a également mis l’accent sur la contribution que les femmes peuvent apporter dans les processus de prise de décisions et dans le renforcement des institutions.
M. GONZALO GUTIÉRREZ (Pérou) a mis l’accent sur la nécessité de tenir compte des besoins de chaque cas ainsi que des priorités nationales en vue d’élaborer une réponse spécifique. Il a insisté également sur l’importance d’intervenir rapidement au moment de la mise en œuvre du processus de maintien de la paix. La création d’institutions est fondamentale pour un développement économique et social durable, a-t-il dit. M. Gutierrez a jugé indispensable de mettre en place des mécanismes permettant une plus grande participation de la société civile et du secteur privé pour mieux jeter les bases de la reconstruction du pays. L’intégration des femmes et leur autonomisation constituent également un facteur clef, a-t-il ajouté. Le représentant a, de même, souligné le rôle de la coopération régionale, de la coopération Sud-Sud et Nord-Sud. Le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix (CCP), en particulier son Comité d’organisation, ont un rôle à jouer dans l’élaboration des mandats des opérations de maintien de la paix. Il est important de créer des mécanismes permettant à la CCP d’assurer une coordination fréquente et active à la fois avec le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale.
M. YURIY VITRENKO (Ukraine) a déclaré qu’il était d’accord avec la philosophie générale de la déclaration présidentielle présentée aujourd’hui, qui propose d’intégrer durablement le concept de consolidation des institutions dans le cadre élargi des activités de maintien de la paix. Avec une contribution substantielle aux opérations de maintien de la paix, notamment sous la forme d’un engagement militaire et policier, l’Ukraine pourrait jouer un rôle déterminant pour promouvoir un ordre du jour en matière de consolidation des institutions, a estimé son représentant. « Mon pays est disposé à envisager la fourniture d’une expertise civile, en particulier dans les domaines de la justice, de la réforme du secteur de la sécurité et de la gouvernance, et la formation de professionnels nationaux afin de renforcer les capacités locales », a assuré M. Vitrenko.
M. NOJIBUR RAHMAN (Bangladesh), au nom du Mouvement des non-alignés, a prévenu qu’une paix durable ne peut être atteinte que si le processus est partagé et dirigé par ses premiers bénéficiaires, à savoir les acteurs nationaux, qui son les seuls à même de comprendre clairement les valeurs inhérentes et les priorités normatives de leur société. Dans une telle dynamique, l’appui international doit se fonder sur une volonté politique affirmée et des ressources adéquates et prévisibles. En termes de capacités, il faut remplacer l’approche de l’offre contre celle de la demande et l’assortir de cours de formation ou de programmes d’échange. Le représentant a insisté sur l’appropriation nationale, l’efficacité des partenariats, l’intégration d’une démarche soucieuse d’égalité entre les sexes et l’amélioration de la coordination des tâches. Il est temps, a-t-il estimé, que les Casques bleus aient aussi pour mandat de préparer le pays où ils interviennent au travail de consolidation de la paix. À cet égard, il a insisté sur les trois types de coopération à savoir Sud-Sud, Nord-Sud et triangulaire.
M. GAREN NAZARIAN (Arménie) a affirmé que le renforcement des institutions, en particulier dans les pays qui émergent d’un conflit, devrait être réalisé à tous les niveaux de la société, en insistant sur le caractère unique de chaque cas. Il est essentiel, a-t-il ajouté, que les programmes adoptés soient bien ciblés et orientés sur les besoins des pays concernés afin de conserver la confiance des populations touchées et d’assurer leur succès. Dans ce contexte, un renforcement efficace des institutions pendant les différentes phases du processus exige une coordination parmi tous les acteurs pertinents et la Commission de consolidation de la paix (CCP), de même que les institutions financières internationales, les entités des Nations Unies, les organisations régionales, la société civile, y compris les femmes, les experts locaux et d’autres parties prenantes. Le représentant a également mis l’accent sur la nécessité d’une collaboration étroite entre le Conseil de sécurité et la CCP.
Mme SANJA ŠTIGLIC (Slovénie) s’est déclarée convaincue que les sociétés sortant d’un conflit couraient le risque d’y retomber et que, par conséquent, il était essentiel que les efforts internationaux visent à appuyer leur transition de la stabilisation à court terme à la stabilisation à long terme. Dans ce contexte, il est essentiel que l’appropriation nationale se concentre sur le renforcement des capacités institutionnelles et des fonctions gouvernementales de base, a souligné la représentante. Elle a aussi appelé à établir des partenariats plus étroits entre acteurs nationaux et partenaires internationaux. Reconnaissant le rôle que joue la Commission de consolidation de la paix, Mme Štiglic a préconisé un rapprochement de cet organe avec le Conseil de sécurité.
M. FEODOR STARČEVIĆ (Serbie), estimant que le renforcement des institutions est l’un des aspects les plus importants dans l’établissement d’une paix durable, a invité tous les acteurs de la communauté internationale à y contribuer. Le système des Nations Unies doit être au premier plan de ces efforts, a-t-il ajouté. Rappelant que la Serbie se trouvait dans une région qui traverse une période difficile depuis 20 ans, il a estimé que tous les pays de la région devraient s’engager activement dans la consolidation de la paix en promouvant de bonnes relations de voisinage et en mettant en place des institutions démocratiques. La Serbie, signataire des Accords de paix de Dayton, a soutenu l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine, a-t-il rappelé. En outre, la Serbie coopère activement avec la présence internationale au Kosovo, menée par la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), a ajouté le représentant, soulignant ainsi la volonté de son pays de contribuer à la paix et à la stabilité dans la partie occidentale des Balkans. Assurant que son pays continuerait à soutenir les activités des Nations Unies visant le renforcement des institutions, M. Starčević a estimé qu’il faudrait réduire progressivement la dépendance des pays sortant d’un conflit vis-à-vis de la communauté internationale.
M. TAHIR ANDRABI (Pakistan) a estimé que la question du renforcement des institutions figure parmi les priorités identifiées par le Secrétaire général, au même titre que la sécurité, le soutien au processus politique, la fourniture de services de base et la revitalisation économique. La communauté internationale peut permettre d’optimiser les efforts en ce sens, a-t-il dit, en préconisant une approche centrée sur les personnes et adaptée aux circonstances. Il a souhaité également que le renforcement des institutions soit envisagé dans les mandats des missions de maintien de la paix dès le début, en insistant sur le rôle que doivent jouer à cet égard les Casques bleus. Les efforts doivent être axés sur le volet développement du processus de consolidation de la paix, en accordant la priorité notamment à l’emploi des femmes et des jeunes, a-t-il ajouté. Le représentant a estimé en outre qu’il faudrait établir une bonne coordination au sein du système de l’ONU, tout en se félicitant, à cet égard, des activités menées par le Groupe directeur pour une action intégrée. La Commission de consolidation de la paix (CCP) est l’organe approprié pour élaborer une approche intégrée dans ce domaine, a-t-il dit. M. Andrabi a proposé de créer un groupe de travail sur le renforcement d’institutions au sein du Comité d’organisation de la CCP ou de ses configurations de pays.
M. JUSTIN N. SERUHERE (République-Unie de Tanzanie) a affirmé que son pays avait accompagné tous les processus qui avaient permis de mettre fin à des conflits en Afrique australe et dans la région des Grands Lacs. Le renforcement des institutions est essentiel dans le processus de consolidation de la paix, a-t-il dit, notant qu’il était indispensable que ces institutions aient pour objectif l’amélioration des conditions de vie des peuples au cours des différentes étapes après le conflit, en vue d’atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et de répondre aux indices de développement humain souhaitables. Le représentant a notamment mis l’accent sur la nécessité pour tous les États Membres et la communauté internationale d’appuyer le renforcement des institutions dans les sociétés postconflit et les pays voisins afin d’établir et de promouvoir la bonne gouvernance, la démocratie, l’état de droit, le respect des droits de l’homme, la sécurité et la stabilité, ainsi que la croissance économique, le développement et l’intégration.
Mme ALICE A. MUNGWA, Observatrice permanente de l’Union africaine, a déclaré que la reconstruction et le développement postconflit étaient l’une des priorités de l’Union africaine, rappelant qu’elles avaient été mentionnées comme telles pour la première fois par l’Union africaine lors de sa septième session ordinaire à Syrte (Libye) en juillet 2005. En adoptant un cadre politique sur la reconstruction et le développement postconflit, le Conseil exécutif de l’Union africaine a également souligné l’importance d’institutions solides dans la mise en œuvre des réformes, a-t-elle poursuivi. L’Union africaine a par ailleurs pris un certain nombre de mesures pour concrétiser ce cadre politique au niveau des États membres concernés, comme c’est le cas au Soudan, ou encore au Burundi, au Tchad, en République centrafricaine, en Guinée-Bissau, ou en Somalie, pays dans lesquels l’Union a maintenu des bureaux de liaison. Mme Mungwa, qui s’est dite aussi favorable au renforcement des différents niveaux de coopération, a préconisé un resserrement des liens entre le Conseil de paix et sécurité de l’Union et le Conseil de sécurité de l’ONU.
M. JEAN-FRANCIS R. ZINSOU (Bénin) a déclaré que la réussite du développement institutionnel passait par le renforcement de la capacité d’analyse, de conception de stratégies nationales de relèvement et de développement des pays, en établissant un équilibre optimal entre l’approche structurelle et l’approche fonctionnelle. Cette démarche permettra, a-t-il ajouté, de déterminer s’il faut mettre en place de nouvelles institutions ou plutôt établir des mécanismes de coordination et de coopération. Le représentant a estimé que la Commission de consolidation de la paix (CCP), par ses attributions et sa composition plurielle, était à même de développer une sensibilité particulière aux liens de causalité qui peuvent concourir à une meilleure analyse des données recueillies sur le terrain.
Le représentant a invité le Conseil à tirer profit des expériences de la CCP et suggéré que les mandats des opérations de maintien de la paix (OMP) intègrent des perspectives de consolidation de la paix qui prennent en compte le renforcement de l’infrastructure institutionnelle. Il a mis l’accent sur la nécessité d’une synchronisation précoce qui permettra de réduire la durée des opérations de maintien de la paix et de passer, dès que possible, à des missions de consolidation de la paix plus longues en raison de la nature des tâches et l’objectif de durabilité qui s’y attachent. L’idée de conserver une partie du budget des OMP au financement des activités prioritaires de consolidation de la paix dans les pays concernés devra faire son chemin pour alléger la pression sur les ressources du Fonds pour la consolidation de la paix, a-t-il ajouté.
M. PHOLOGO GAUMAKWE (Botswana) a déclaré que la promotion de valeurs comme la tolérance, la démocratie, la bonne gouvernance et l’état de droit était d’une importance capitale pour le renforcement des institutions. « Ma délégation, a-t-il dit, est convaincue que l’investissement dans la reconstruction et la réhabilitation des infrastructures physiques, ainsi que dans les programmes économiques et sociaux, est essentiel pour la reconstruction postconflit. » Il a appelé à ce que l’aide donnée à un pays postconflit soit toujours accompagnée de la création d’une mécanique étatique légitime afin de sauvegarder les intérêts et le bien-être des citoyens. La reconstruction de systèmes judiciaires et d’application du droit crédibles est essentielle pour permettre au pays d’être fermement ancré dans le respect de l’état de droit et d’éviter de retomber dans une situation de conflit, a-t-il souligné. De l’avis de sa délégation, l’appropriation nationale joue un rôle capital aussi bien dans le cadre des activités de reconstruction que dans l’identification des priorités en matière de développement. Il a également estimé que l’aide humanitaire à court terme devrait être accompagné de projets de reconstruction, notamment d’écoles et de dispensaires de soins.
M. JORGE ARGÜELLO (Argentine) a estimé, comme le Secrétaire général l’indiquait dans son rapport, qu’une réponse efficace de l’ONU en matière de renforcement des institutions exige d’élaborer une stratégie coordonnée, basée sur les priorités des autorités locales et orientée vers des objectifs concrets. C’est une tâche de grande ampleur, a-t-il reconnu. Il a rappelé que la consolidation de la paix incombe en premier lieu aux autorités nationales, tout en soulignant le rôle que peuvent jouer en la matière les organisations internationales, régionales et sous-régionales. Le représentant de l’Argentine a aussi estimé que lorsque la communauté internationale est déjà engagée dans la consolidation de la paix dans un pays sortant d’un conflit, il est un peu tard pour développer sa capacité institutionnelle. Il faut plutôt envisager la consolidation de la paix avec l’objectif pour le pays concerné de ne plus avoir besoin de la présence de la communauté internationale et des Nations Unies sur son territoire, a-t-il expliqué. M. Argüello a aussi souligné le rôle important des organisations régionales et sous-régionales dans la prévention, la gestion et la résolution des conflits, appelant à renforcer les capacités des systèmes régionaux pour soutenir les pays sortant de conflit.
Le Conseil rappelle les déclarations précédentes de son président sur la consolidation de la paix après un conflit. Il souligne qu’il importe de développer l’infrastructure institutionnelle, élément critique de la consolidation de la paix, et de donner une réponse nationale et internationale plus efficace et plus cohérente à ce problème, de façon que les pays qui sortent d’un conflit puissent accomplir les principales fonctions gouvernementales, notamment gérer pacifiquement les différends politiques, assurer la sécurité et préserver la stabilité, protéger la population, assurer le respect de la légalité, relancer l’économie et fournir les services publics de base, autant d’éléments essentiels à l’avènement d’une paix durable. Il met l’accent à cet égard sur l’importance de l’appropriation nationale.
Le Conseil souligne que la consolidation de la paix incombe avant tout aux gouvernements et aux acteurs nationaux compétents, notamment à la société civile, dans les pays qui sortent d’un conflit et que l’Organisation des Nations Unies peut jouer un rôle décisif en les aidant à développer leurs institutions. Il constate qu’il faut constamment améliorer l’acheminement de cette aide au lendemain d’un conflit afin de stabiliser la situation tout en amorçant le processus de développement de l’infrastructure institutionnelle à plus long terme, notamment des institutions qui encouragent l’adoption de procédures démocratiques et stimulent le développement économique et social dans l’attente d’une paix durable.
Le Conseil souligne que l’Organisation des Nations Unies et la communauté internationale doivent être plus efficaces et mieux coordonner leur action d’évaluation des besoins et de planification d’un développement efficace des institutions et chercher à mieux utiliser le potentiel national et les perspectives du pays, afin d’assurer l’appropriation nationale. Il souligne qu’il faut un soutien systématique au développement des capacités nationales dans toutes les activités de consolidation de la paix menées par l’Organisation des Nations Unies et en faire une priorité du système, et que les stratégies de consolidation de la paix et le développement des institutions doivent être considérés en fonction des caractéristiques du pays.
Le Conseil souligne qu’il faut mieux intégrer les efforts accomplis, assurer une meilleure prévisibilité et une meilleure responsabilisation au sein de l’Organisation des Nations Unies, pour aider à développer l’infrastructure institutionnelle dans les pays sortant d’un conflit. Il rappelle qu’il importe de mettre en place des solutions coordonnées, sectorielles et adaptées au contexte, s’agissant de la gouvernance, de la stabilité économique, du respect de la légalité et du renforcement du secteur de la sécurité, qui doivent être contrôlées par le pays lui-même.
Le Conseil souligne qu’il est disposé à recourir davantage au rôle consultatif de la Commission de consolidation de la paix. Il note que la Commission peut contribuer à la réalisation des objectifs stratégiques de consolidation de la paix et notamment au développement d’institutions viables et responsables dans les pays dont elle s’occupe. Il souligne aussi l’importance de mettre en place des partenariats bien définis et bien ciblés entre les organismes de développement des Nations Unies, les partenaires bilatéraux et les autres acteurs compétents, en particulier les organisations régionales et sous-régionales et les institutions financières internationales, pour appliquer les stratégies nationales visant à développer l’infrastructure institutionnelle qui reposent sur des objectifs de résultats et de responsabilité mutuelle.
Le Conseil réaffirme qu’il est fondamental de disposer d’un financement rapide, modulable pour la consolidation de la paix, et notamment pour le développement des institutions et le renforcement des capacités, et engage instamment les États Membres et d’autres partenaires à faire plus pour réaliser cet objectif, notamment par la reconstitution des ressources du Fonds pour la consolidation de la paix et à l’aide des fonds d’affectation spéciale multidonateurs, tout en saluant les contributions déjà versées.
Le Conseil se déclare résolu à continuer d’approfondir ses débats et sa réflexion sur les premières tâches de consolidation de la paix relative au développement des institutions lorsqu’il fixe le mandat et la composition des opérations de maintien de la paix, des missions politiques spéciales et des bureaux intégrés de consolidation de la paix, afin d’y apporter au besoin les modifications nécessaires, en fonction des progrès déjà réalisés, des enseignements dégagés ou de l’évolution des conditions sur le terrain. À ce propos, il note avec satisfaction la contribution des soldats de la paix et des missions de maintien de la paix aux premières opérations de consolidation de la paix et constate qu’il faut prendre en compte les connaissances et les données d’expérience acquises par les missions dans l’élaboration des stratégies de consolidation de la paix.
Le Conseil attend avec intérêt de recevoir, au début de 2011, le rapport de l’examen international des capacités civiles, et constate qu’il faut améliorer les mécanismes de déploiement rapide de spécialistes civils qualifiés pour appuyer le développement de l’infrastructure institutionnelle dans les pays sortant d’un conflit. Il prie le Secrétaire général de faire figurer dans le prochain rapport de suivi sur la consolidation de la paix au lendemain des conflits une évaluation de l’effet qu’a eu son action pour contribuer au développement d’une infrastructure institutionnelle viable dans les pays sortant d’un conflit, et d’y formuler des recommandations nouvelles sur les moyens d’améliorer l’efficacité de la contribution de l’Organisation des Nations Unies à la mise en place d’institutions plus efficaces, plus stables et plus viables qui soient à même de prévenir une reprise du conflit.
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