Première Commission: l’incapacité de la CD à entamer l’élaboration d’un traité pour interdire la production de matières fissiles au cœur du débat
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Première Commission
9e séance – après-midi
PREMIÈRE COMMISSION: L’INCAPACITÉ DE LA CD À ENTAMER L’ÉLABORATION D’UN TRAITÉ POUR INTERDIRE
LA PRODUCTION DE MATIÈRES FISSILES AU CŒUR DU DÉBAT
Elle entame demain mercredi, son débat sur des thèmes spécifiques du désarmement
La Première Commission en charge des questions de désarmement et de la sécurité internationale a conclu son débat général en entendant mardi, une quinzaine d’États ainsi que le Comité international de la Croix Rouge (CICR) et l’Organisme pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL). Les débats ont essentiellement portés sur la nécessaire revitalisation des travaux de la Conférence du désarmement (CD), ainsi que les liens entre désarmement et développement humain.
Ce ne sont pas les règles de procédure qui sont à l’origine de l’impasse de la CD, qui ne fait rien d’autre que refléter les réalités politiques actuelles, a déclaré en ouverture des débats le représentant du Pakistan. Rappelant notamment que l’organe de négociation onusien avait déjà mené à bien dans le passé la conclusion de plusieurs instruments, Convention sur les armes chimiques et TICEN notamment, le Pakistan a affirmé qu’aucun traité visant à interdire la production de matières fissiles à des fins nucléaires ne pouvait être adopté contre les intérêts d’un ou plusieurs États en matière de sécurité. Au cours des dernières années, les politiques discriminatoires de certaines grandes puissances en matière de coopération nucléaire ont exacerbé l’asymétrie des stocks de matières fissiles dans notre région, a-t-il dit.
Autre dossier majeur en matière de non-prolifération nucléaire, la création d’une zone exempte d’armes de destruction massive au Moyen-Orient. S’inquiétant d’un risque de course aux armements dans la région, le représentant saoudien a préconisé, à l’instar de plusieurs autres pays, des mesures fortes en vue de diminuer la tension, notamment l’adhésion d’Israël au TNP et le placement de ses installations nucléaires sous le contrôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Il a par ailleurs réaffirmé le droit de tous les États à utiliser le nucléaire à des fins pacifiques, suivi en cela par des délégations comme le Nicaragua et l’Érythrée, qui ont salué l’assistance et le soutien croissant de l’AIEA aux pays en développement dans le domaine de l’énergie, de la sûreté et de la sécurité nucléaires et de l’application de la technologie nucléaire.
S’agissant toujours de la non-prolifération, la Secrétaire générale de l’Organisme pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes a présenté la déclaration commune adoptée par les 33 États membres de la zone exempte d’armes nucléaires d’Amérique latine et des Caraïbes, dans la perspective du quarante-cinquième anniversaire de la signature du Traité de Tlatelolco instaurant cette zone.
Après avoir rappelé les bienfaits pour la stabilité et la sécurité de la création de cette ZEAN en 1963, elle a présenté plusieurs propositions communes des États membres de cette ZEAN, notamment la création d’un système conjoint de coordination entre les cinq ZEAN de la planète.
Abordant La question des armes conventionnelles, de nombreuses délégations sont revenues sur les conséquences de la prolifération des ALPC et le lien étroit entre désarmement et développement humain. Seul État de la planète à avoir renoncé à disposer d’une armée, le Costa Rica a dénoncé le niveau excessif des dépenses militaires qui ont atteint cette année plus de 1 500 milliards de dollars. Si 10% de ces dépenses étaient consacrées efficacement à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), nous aurions été en mesure d’arriver à nos objectifs, a indiqué son représentant. D’autres délégations ont elles aussi appelé à réorienter les dépenses d’armement en faveur du développement, notamment le Botswana et le Nicaragua.
Pour sa part, le Saint-Siège a une nouvelle fois déploré la course aux armements des États, la qualifiant même de lamentable, et appelant à des coupes significatives dans les dépenses militaires qui permettraient d’allouer l’énorme somme d’argent économisée à des actions en faveur de la paix.
La Première Commission entamera son débat thématique, demain mercredi, à 15 heures.
DÉBAT GÉNÉRAL SUR TOUS LES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR RELATIFS AU DÉSARMEMENT ET À LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE
M. RAZA BASHIR TARAR (Pakistan) a évoqué la nécessité de revitaliser le mécanisme de désarmement, via la Commission du désarmement de l’Assemblée générale et la Conférence du désarmement et s’est étonné que les regards ne se portent que sur ce second organe. Il est intéressant de noter également que la question du désarmement nucléaire, raison d’être de la CD, reste encore un objectif non accompli bien qu’il soit inscrit sur l’agenda de la CD depuis 32 ans, a-t-il ajouté. Le représentant a ensuite rappelé que des instruments tels que la Convention sur les armes chimiques ou le TICEN, sont nés dans le cadre de la CD, ce qui montre par conséquent que les problèmes actuels ne sont pas dus à des règles de procédure. Pour le Pakistan, ce ne sont pas les méthodes de travail qui sont à l’origine de l’impasse actuelle, mais le manque de volonté des États.
Il existe des causes sous-jacentes à l’impasse actuelle, et tout effort consistant à contourner le respect de la règle de consensus poserait un problème, a-t-il poursuivi. Le représentant a ensuite indiqué qu’aucun traité ne pouvait être adopté contre les intérêts des États. S’agissant de la perspective d’un traité interdisant la production de matières fissiles pour la fabrication d’armes et autres dispositifs explosifs nucléaires, le Pakistan a dénoncé l’action des grandes puissances qui ont accumulé des stocks de matières fissiles et accentué l’asymétrie de stocks dans la région, en faisant fi des objectifs en matière de non-prolifération. Ces puissances ont poursuivi leur politique d’exception, mais si elles renonçaient à cette politique fondée sur la discrimination, il serait possible d’arriver à un véritable traité où la sécurité égale de tous les États serait prise en compte.
Le représentant a ensuite indiqué que le Pakistan et 120 membres du Mouvement des non-alignés étaient favorables à la négociation d’un instrument sur les garanties négatives de sécurité, car cela ne met en cause les intérêts d’aucun État. En accord également avec les pays non alignés, le Pakistan est en faveur de la tenue d’une quatrième session extraordinaire des Nations Unies pour relancer le désarmement.
M. STEFAN BARRIGA (Liechtenstein) a déploré les blocages persistants depuis plus d’une décennie au sein de la Conférence du désarmement (CD), estimant qu’ils ne pouvaient plus continuer à être ignorés.
Appelant à une reconsidération complète de la structure des organes de désarmement de l’ONU, il a toutefois noté l’impossibilité de mettre la CD de côté au nom de l’inefficacité de ses procédures. Dans ce contexte, il a donc appelé à une revitalisation rapide de ses travaux et renouvelé le soutien ferme de son pays au lancement de discussions en vue de la création d’un traité international interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires.
Évoquant ensuite le succès de la Conférence d’examen du TNP de 2010 et l’adoption d’un Plan d’action, il a appelé les États qui ne l’ont pas encore fait à signer et ratifier le TICEN, afin de permettre son entrée en vigueur le plus tôt possible.
Aspect plus positif mis en avant par le Liechtenstein dans les efforts internationaux de désarmement, les avancées dans la création d’un traité général sur le commerce des armes, qui fera l’objet d’une conférence internationale l’année prochaine. Le représentant a salué ces avancées, avant d’apporter son soutien à la proposition faite par certains États Membres d’ajouter les transferts d’ALPC et de munitions au traité en discussion. Il a conclu en estimant que si le consensus devait être privilégié pour la mise en œuvre de ce futur traité, cette règle ne devait pas pour autant être une barrière à de nouveaux progrès.
M. JASSER JIMENEZ (Nicaragua) a réitéré qu’aux yeux de son pays, le désarmement général et complet était la seule façon d’aller de l’avant, pour parvenir à un monde exempt d’armes nucléaires. L’objectif d’un désarmement complet doit s’appliquer à toutes les armes de destruction massive, a poursuivi le représentant. Il a insisté sur la nécessité d’adopter des résolutions en ce sens et pour mettre en place un système de contrôle efficace. Le Nicaragua rappelle le droit des États à utiliser l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.
Le représentant est ensuite revenu sur les désastres humains et écologiques liés aux 2 000 essais nucléaires réalisés depuis plus d’un demi-siècle, appelant à leur interdiction totale. Il a déploré que 1 500 milliards de dollars soient consacrés chaque année aux dépenses d’armement, et que des millions d’ALPC soient toujours en circulation, avec de sérieuses conséquences humanitaires. Nous souhaitons que l’article 7 de la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel soit appliqué. Le représentant a rappelé que son pays avait mis en œuvre un programme de déminage ayant abouti à la destruction de la totalité d’entre elles sur le territoire du Nicaragua. Enfin, il a insisté sur l’importance du narcotrafic en Amérique centrale, un fléau qui aggrave l’insécurité dans une des régions les plus dangereuses du monde. Le Nicaragua continuera à lutter contre le narcotrafic, a indiqué le représentant, rappelant le chiffre de plus de 20 000 arrestations opérées ces dernières années dans son pays. Nous continuons à attaquer les bases stratégiques des narcotrafiquants mais nos ressources sont encore limitées pour poursuivre ce combat, a-t-il dit.
M. SAAD ABDULLAH ALSAAD (Arabie saoudite) a estimé que la sécurité internationale et régionale était confrontée à des défis réels dus au manque de crédibilité des traités et conventions internationaux précédemment entrés en vigueur.
Rappelant notamment la nécessité de parvenir à l’universalité du TNP et le fait que de nombreux États Membres considèrent ce Traité comme la pierre angulaire du régime international de désarmement et de non-prolifération, il a pour sa part jugé que les efforts internationaux déployés dans ce cadre multilatéral restaient en deçà du niveau escompté.
Déplorant ensuite le manque de progrès tangibles dans la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, il a mis en garde contre les risques d’une course à l’armement dans cette région. Soulignant ensuite l’importance d’éviter une telle course, le représentant saoudien a préconisé des mesures fortes en vue de diminuer la tension dans la région, citant en exemple l’adhésion d’Israël au TNP et le placement de ses installations nucléaires sous le contrôle de l’AIEA. La non-adhésion d’Israël au TNP et son refus de se soumettre au régime d’inspection international est un obstacle pour la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, a-t-il encore insisté.
Rappelant ensuite que l’Arabie saoudite reconnait le droit des États à utiliser l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, dans le cadre des procédures prévues par l’AIEA, le représentant a indiqué que son pays reconnaissait l’engagement de l’Iran à se soumettre à ses obligations concernant la prévention de la non-prolifération d’armes de destruction massive, espérant que ces engagements seront traduits dans des actions concrètes éliminant les doutes sur son programme nucléaire.
M. ALEXANDRU CUJBA (République de Moldova) a déclaré que la Moldova appuyait tous les efforts visant à renforcer la sécurité et la stabilité internationales par le biais du contrôle des armes, de la non-prolifération et du désarmement et a pris des mesures durables au niveau national à cet égard. Il a souhaité une mise en œuvre efficace du Plan d’action adopté par la Conférence d’examen 2010 du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Il a précisé que la Moldova finalisait des procédures internes en vue de signer et ratifier le protocole additionnel à l’Accord de garanties de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) afin de participer à la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de renforcer la capacité du pays à réagir avec efficacité à tout trafic de matériels nucléaires et radioactifs. Le représentant de Moldova a aussi souhaité l’entrée en vigueur du TICEN en se félicitant de la volonté des États-Unis et de l’Indonésie de ratifier ce Traité.
Par ailleurs, M. Alexandru Cujba a dit l’importance du Programme d’action en de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères, en citant les efforts de son pays pour adapter son cadre législatif aux normes internationales en matière de régime de contrôle des armes et de munitions à usage civil et renforcer ses capacités en matière de gestion de stocks d’armes légères. Il a aussi salué l’entrée en vigueur de la Convention sur les armes à sous-munitions en précisant que son pays avait détruit toutes ses armes de ce type au 1er août 2010. Il a appelé à des négociations pour l’adoption d’un protocole sur les armes à sous-munitions à la Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques.
En outre, il a précisé que la République de Moldova a présidé le 29 septembre 2011, à Vienne, la quatrième conférence d’examen du Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe. Conformément aux obligations liées à ce Traité, elle a réitéré la nécessité de compléter le processus de retrait de son territoire de munitions russes stockées à Covasna et des troupes qui les gardent. Il a souhaité que les arrangements de maintien de la paix en vigueur soient remplacés par une mission civile multinationale. Il a affirmé l’appui de son pays à tous les efforts visant à revitaliser le régime de contrôle des forces armées conventionnelles en Europe sur la base des principes fondamentaux du droit international, en particulier du principe du consentement du pays hôte en ce qui concerne le stationnement de forces militaires étrangères.
Mme ELSA HAILE (Érythrée) a mis l’accent sur le droit inaliénable des États de développer tous les aspects de la science et technologie nucléaires pour favoriser l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire dans le respect des obligations liées au Traité de non-prolifération. Elle a salué l’assistance et le soutien croissants de l’AIEA aux pays en développement dans les domaines de l’énergie nucléaire civile, de la sûreté et de la sécurité nucléaires et de l’application de la technologie nucléaire. La représentante de l’Érythrée a demandé le plein respect du transfert libre, sans entraves et non-discriminatoire de technologies nucléaires à des fins d’utilisation pacifique.
Par ailleurs, tout en reconnaissant le danger des armes de destruction massive, la représentante de l’Érythrée a déclaré que la prolifération des armes classiques est devenue la principale source de destruction dans les pays en développement. Elle a précisé que la sophistication et la disponibilité sans limite des armes légères et de petit calibre posaient un grand défi à la paix, à la sécurité et au développement de la plupart des régions du monde. Elle s’est aussi inquiétée du risque de voir du matériel nucléaire tomber entre les mains de terroristes et d’acteurs non étatiques. Dans le cadre des négociations en cours pour un traité sur le commerce des armes, elle a souhaité que tout texte adopté soit équilibré et respecte l’Article 51 de la Charte qui consacre le droit des États à la légitime défense.
M. EDUARDO ULIBARRI (Costa Rica) a indiqué que le renforcement de la démocratie et le respect du droit étaient des moyens pour faire avancer le désarmement. L’autre voie est la démilitarisation. Il a rappelé que son pays était un modèle en la matière. Ce que nous remettons en question, ce sont les dépenses militaires excessives, surtout en période de crise, a-t-il indiqué. Nous observons des distorsions de priorités au niveau mondial, a-t-il poursuivi, relevant que les dépenses militaires avaient augmenté considérablement, pour arriver au chiffre de 1,500 milliards de dollars. Si 10% de ces dépenses étaient consacrées efficacement à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), nous aurions été en mesure d’arriver à nos objectifs, a-t-il fait savoir. Il faut viser le développement humain, a-t-il insisté. Le représentant a rappelé la facilité d’accès aux ALPC dans la région où est situé son pays, et toute l’instabilité qui en découlait. Ces ALPC qui déstabilisent la région sont fabriquées dans des pays développés qui constituent eux-mêmes les marchés pour les fournisseurs de drogues, a souligné le représentant, refusant pour autant de faire porter la responsabilité des pays de sa région aux pays développés. Le concept de sécurité humaine doit se retrouver dans les politiques des pays, c’est à l’aune de cette approche que doit être mené le désarmement, a-t-il poursuivi. Si nous voulons un bon traité sur le commerce des armes, il nous faudra un texte robuste, universel et contrôlable, a conclu le représentant.
Mme ROMAN OYARZUN (Espagne) a déclaré que la non-prolifération et le désarmement sont deux sujets d’égale importance pour instaurer la paix. L’Espagne travaille avec d’autres États pour promouvoir les politiques permettant d’atteindre ces objectifs, a-t-il souligné. La construction de la paix est un des signes identitaires de l’action extérieure de mon pays. Le représentant a reconnu que des progrès ont été accomplis dans le domaine nucléaire, tels que la Conférence de 2010 sur le Traité de non-prolifération de 2010 ou l’entrée en force du nouveau Traité sur la réduction et la limitation des armements stratégiques offensifs (START).
Il a déclaré que le Traité de non-prolifération nucléaire (TPN) continue d’être la composante essentielle du système mondial de non-prolifération. Le représentant a salué le séminaire qui s’est tenu en juillet sous les auspices de l’Union européenne et il a émis l’espoir que la conférence planifiée en 2012 contribuera positivement à l’objectif commun d’une paix durable au Moyen-Orient. La communauté internationale continue de faire face à de nombreux défis en ce qui concerne la prolifération nucléaire, tels que les programmes nucléaires de l’Iran, ou de la République populaire démocratique de Corée. En conclusion, le représentant a estimé « qu’au lieu de mettre à jour des résolutions adoptées, la Première Commission devrait être le lieu pour des débats motivés, tout en évaluant ses propres méthodes de travail pour augmenter son efficacité dans les années à venir.
Mme FORTUNA DIBACO (Éthiopie) a indiqué que la mise en place de zones exemptes d’armes nucléaires était efficace pour la non-prolifération nucléaire et les efforts de désarmement. Elle a insisté sur le lien entre la stabilité et le développement économique. Elle a rappelé que la prolifération des ALPC était un fléau pour son pays. Pour l’Éthiopie, il est nécessaire que le Programme d’action relatif aux ALPC soit mis en œuvre le plus rapidement possible. La représentante a affirmé que la prolifération des armes classiques constituait un défi à la paix et à la sécurité et que l’effort de désarmement des armes classiques devait aller de pair avec les efforts de désarmement nucléaire menés par ailleurs.
M. CHARLES T. NTWAAGAE (Botswana) a mis en avant le lien entre sécurité, désarmement et développement. La capacité des États à assurer la paix et la stabilité est une condition préalable, selon lui, au développement durable et il existe une relation étroite entre désarmement et développement. Il a dénoncé le fait que face aux milliards de dollars dépensés chaque année pour des armes, il est très difficile de trouver les fonds adéquats pour financer le développement économique et social. Pour sa part, le Botswana soutient pleinement l’agenda du désarmement des Nations Unies, et partage l’opinion selon laquelle il faut essayer de résoudre les conflits pacifiquement.
L’une des priorités reste, selon lui, la lutte contre le commerce illicite d’armes légères et de petit calibre (ALPC), en particulier en Afrique. Ainsi le Botswana préconise un instrument international de traçage de ce type d’armes, soulignant qu’il faut mettre l’accent sur les contrôles aux frontières, le marquage et l’enregistrement. Le Botswana soutient pleinement le Programme d’action relatif aux ALPC, ainsi que les mesures mandatées par les instruments juridiques régionaux et internationaux comme la Déclaration de Bamako qui reflète la position africaine commune sur la prolifération, la circulation et le commerce illicite des ALPC et le Protocole de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) sur le contrôle des armes à feu, et des munitions. De l’avis du représentant, les initiatives régionales sont les plus adaptées à la lutte contre la prolifération de ce type d’armes, puisque le succès dépend des actions communes notamment aux frontières et d’instruments de marquage et de traçage. Le Botswana attache un intérêt particulier à la conclusion d’un traité sur le commerce des armes en 2012.
S’agissant du désarmement nucléaire, le représentant reste convaincu des mérites des zones exemptes d’armes nucléaires en tant que catalyseur de la non-prolifération. À ce titre, le représentant a exhorté tous les États Membres à prendre les mesures nécessaires à la signature des Protocoles du Traité de Pelindaba en vue de permettre sa pleine mise en œuvre.
Rappelant que les armes nucléaires continuaient de poser un risque existentiel à l’humanité, M. ALEXANDRA LOMAIA (Géorgie) a estimé que le régime international mis en place pour gérer ces armes restait incomplet. À l’appui de ce constat, il a cité les éléments manquants pour que le TNP constitue une réponse complète et adéquate, notamment l’absence d’entrée en vigueur du TICEN, les blocages qui demeurent au sein de la CD et empêchent le lancement de discussions sur un traité sur les matières fissiles ainsi que sur les garanties négatives de sécurité.
Dans ce contexte, la Géorgie se joint aux appels lancés par d’autres États Membres pour que la Première Commission prenne sérieusement en considération les moyens de poursuivre le travail au sein de la CD.
Abordant ensuite la question de la circulation des armes conventionnelles, la Géorgie a réitéré son engagement dans la lutte contre la circulation illicite des ALPC, ainsi que la mise en œuvre du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce d’ALPC. Son représentant s’est ensuite félicité des avancées significatives dans l’élaboration d’un traité général sur les ventes d’armes, tout en soulignant que les mesures visant à éliminer le trafic des armes conventionnelles ne seront efficaces qu’à la condition d’être accompagnées d’un contrôle rigoureux des transferts d’armes, du respect du droit international humanitaire, des droits de l’homme ainsi que des risques de diversions existants dans ses critères.
Soulevant le problème des risques de voir des armes conventionnelles ou nucléaires tomber aux mains d’organisations criminelles ou terroristes, le représentant géorgien a indiqué que plusieurs tentatives d’acquisition de matériel nucléaire avaient eu lieu ces dernières années dans les territoires d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud. Il a souligné que l’absence de présence internationale dans ces territoires occupés par une force étrangère avait rendu la situation totalement opaque, rendant impossible tout contrôle par les autorités géorgiennes.
L’existence de territoires occupés, où les mécanismes de contrôle international sont très faibles ou inexistants, créé un terrain fertile pour le transfert illicite et la vente d’armes conventionnelles ou nucléaires, a-t-il déclaré, avant de dénoncer la poursuite de l’accumulation d’armes et du renforcement des capacités militaires dans ces deux territoires occupés de la Géorgie par son « voisin du nord ».
À l’appui de ces mises en causes, il a cité plusieurs exemples: le déploiement d’un système lance missile « Smerch » à proximité de la ville occupée de Tskhinvali en décembre 2010, l’installation d’un système de missile « Scarab B » en janvier dernier à 40 kilomètres de la capitale géorgienne Tbilissi, le déploiement de missiles « Grad » dans la région occupée d’Abkhazie et enfin la mise en place dans les régions géorgiennes occupées de missiles « Iskander » et d’hélicoptères d’attaques.
Soulignant aussi la présence de 11 000 militaires appartenant aux troupes d’occupation dans ces deux régions, et la construction en cours de six bases militaires dont une base navale, le représentant géorgien a estimé que tant qu’aucun contrôle international ne serait en place dans ces régions, il n’existerait aucune garantie que ces armes ne soient pas transmises à des groupes terroristes ou criminels.
M. FRANCIS ASSISI CHULLIKATT, Observateur permanent du Saint-Siège, a rappelé le lien étroit existant entre désarmement et développement, soulignant les répercussions positives qu’a le développement humain sur la stabilité et la sécurité d’un pays.
Sur ces bases, le Saint-Siège a une nouvelle fois déploré la course aux armements dont nous sommes témoins aujourd’hui, symbolisée par une nouvelle augmentation des dépenses militaires globales, qui ont atteint 1,6 milliard de dollars en 2010. Cet état de fait va à l’encontre des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et de la Charte des Nations Unies, a-t-il insisté, avant d’appeler les États à mettre un sérieux coup de frein à cette lamentable course aux armements et à promouvoir des coupes significatives dans les dépenses militaires. Cela permettrait de garantir la sécurité dans de meilleures conditions et d’allouer l’énorme somme d’argent économisée à des actions en faveur de la paix.
Considérant ensuite que les blocages observés depuis une décennie au sein de la Conférence du désarmement étaient emblématiques du peu de progrès réalisés dans le domaine du désarmement, du contrôle des armes et de la réduction des dépenses militaires, l’Observateur du Saint-Siège a appelé à la reprises des discussions en vue de la création d’un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires, ainsi qu’à la poursuite des signatures et des ratifications du TICEN pour permettre son entrée en vigueur.
Abordant ensuite les efforts déployés pour mettre en place un traité général sur le commerce des armes, il a estimé que les ALPC ne pouvaient pas être considérées comme des marchandises offertes à la vente sur les marchés locaux et régionaux ou sur le marché mondial. La production, le commerce et la possession de ces ALPC ont des implications sociales et éthiques, a-t-il insisté, avant d’appeler à une régulation de ce marché conformément à des principes spécifiques de nature morale et juridique.
Rappelant encore les conséquences de la prolifération des armes conventionnelles et de leur commerce illicite, qui encouragent les conflits locaux et la violence urbaine, le Saint-Siège a appelé à la mise en œuvre d’un traité général sur le commerce des armes qui régule le marché de ces armes, permette de lutter contre leur commerce illicite, mais protège aussi la vie, afin de construire un monde plus respectueux de la dignité humaine.
M. WALTER A. FÜLLEMANN, Observateur du Comité international de la Croix Rouge (CICR), a rappelé que dès la fin des années 1990, le CICR, dont la mission est de protéger et d’assister les victimes de conflits armés et d’autres situations de violence, a souligné le coût humain élevé de la disponibilité non réglementée des armes. Ainsi, le CICR soutient énergiquement l’adoption, l’année prochaine, d’un traité sur le commerce des armes, complet et efficace. Le représentant a insisté sur le fait qu’un tel traité protègerait des vies et des moyens de subsistance et qu’il réduirait aussi les conséquences sociales et économiques dramatiques qu’entraîne l’insécurité armée. M. Füllemann a demandé instamment aux États Membres de s’engager à travailler de manière intensive dans l’année qui vient pour faire en sorte que la Conférence diplomatique de juillet prochain sur le commerce des armes soit couronnée de succès. Selon lui, pour être complet et efficace, ce traité exigera un examen minutieux de tous les transferts d’armes classiques et de leurs munitions.
Abordant la question de la non-prolifération nucléaire, il a regretté que très peu de progrès aient été faits en termes de réalisation des engagements pris l’année dernière lors de la Conférence d’examen du TNP. Il est crucial que les engagements pris lors de cette Conférence soient suivis d’effet en tant qu’impératifs humanitaires, moraux et politiques, a déclaré l’Observateur. Il faut faire davantage pour informer les responsables politiques, les médias et le public sur le coût humain catastrophique d’une potentielle utilisation des armes nucléaires, et, par conséquent, sur l’urgence de mettre en place un instrument international juridiquement contraignant qui en interdise l’usage et conduise à leur élimination. Pour sa part, le CICR s’est employé à mieux faire comprendre les données réelles du problème au sein du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge, a précisé M. Füllemann.
Il a également salué le succès de la Convention sur les armes à sous-munitions, adoptée en 2008, et le fait que certains États n’y ayant pas encore adhéré reconnaissent néanmoins à présent, l’impact de ces armes sur le plan humanitaire et se déclarent prêts à prendre des mesures pour le limiter. Cependant, dans le domaine du droit international humanitaire, le CICR considèrerait comme regrettable que de nouvelles dispositions soient adoptées qui contreviendraient à la Convention sur les armes à sous-munitions et qui permettraient la mise au point et l’utilisation de certains types d’armes à sous-munitions susceptibles de perpétuer le problème humanitaire. Le représentant a demandé à tous les États parties à la Convention de prendre toute la mesure de leurs responsabilités dans ce domaine au moment où ils se préparent pour la Conférence d’examen de la convention sur certaines armes classiques, qui se tiendra en novembre.
Mme GIOCNODA UBEDA RIVERA Secrétaire générale de l’Organisme pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL) est intervenue pour présenter la déclaration commune adoptée par les 33 États membres de la zone exempte d’armes nucléaires d’Amérique latine et des Caraïbes, dans la perspective du quarante-cinquième anniversaire de la signature du Traité de Tlatelolco instaurant cette zone.
Dans ce Document, les États latino-américains renouvellent leur engagement et s’engagent à continuer à l’exprimer au travers d’actions concrètes, englobant le renforcement de leur propre ZEAN et de la coopération avec d’autres ZEAN existantes, ainsi que le soutien à la création de nouvelles ZEAN et le déploiement de nouveaux efforts contribuant au processus global de désarmement et de non-prolifération.
Après avoir rappelé le contexte de la guerre froide lors de la signature du Traité de Tlatelolco en 1963, la Secrétaire générale de l’OPANAL a estimé que la création de la ZEAN d’Amérique latine et des Caraïbes avait représenté, sans aucun doute, une réelle contribution à la paix et la sécurité de la région.
Soulignant que cinq ZEAN regroupant 114 États avaient été créées dans le monde depuis cette initiative pionnière, elle a indiqué que l’OPANAL entendait désormais aller de l’avant en consolidant la coopération et la coordination entre les ZEAN. Dans ce contexte, elle a salué l’organisation, le mois prochain, à l’initiative de l’AIEA, d’un forum rassemblant les représentants des ZEAN afin de partager leur expérience dans la perspective de la création d’une ZEAN au Moyen-Orient.
La Secrétaire générale de l’OPANAL a conclu son intervention en formulant une série de propositions contenues dans la déclaration commune des États Membres de la ZEAN d’Amérique latine et des Caraïbes: la création d’un système conjoint de coordination entre les cinq ZEAN de la planète, l’ouverture de discussions au sein de la Conférence du désarmement sur un instrument juridique universel organisant les garanties négatives de sécurité offertes par les États nucléarisés aux États non nucléarisés, le lancement également au sein de la CD de négociations sur un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires, et enfin, la fin de la ratification du TICEN pour permettre son entrée en vigueur dès que possible.
S’adressant aux délégations de la Première Commission à la fin du débat, SERGIO DUARTE, le Haut-Représentant pour les affaires de désarmement, a décrit les efforts entrepris pour la mise en œuvre des résolutions votées par la Première Commission et transmises à l’Assemblée générale de l’ONU.
L’année dernière, par exemple, la Première Commission a adopté 55 résolutions, 6 de plus qu’en 2009, et demandé 26 rapports au Secrétaire général de l’ONU, moins que les précédentes années, a-t-il indiqué, estimant que ce changement reflétait la consolidation des réformes lancées. Il est clair toutefois, que les États Membres continuent de considérer ces rapports comme utiles pour évaluer les conséquences de la mise en œuvre des résolutions, a-t-il ajouté.
Après avoir détaillé plusieurs statistiques établies à partir des années précédentes et montrant l’évolution du nombre de résolutions soumises à la Première Commission, ainsi que les variations sur le nombre d’États qui les soutiennent, il a indiqué que le Bureau des affaires de désarmement restait activement engagé dans toute activité visant à promouvoir la mise en œuvre des résolutions. « Notre objectif reste le même: être utile aux États Membres pour faire avancer un agenda du désarmement multilatéral et robuste, a-t-il conclu, précisant que mon résumé de ces rapports est très fourni avec ce même objectif en tête. »
Droits de réponse
Le représentant de la République arabe syrienne a exercé son droit de réponse pour demander au Portugal et à l’Espagne de relire la déclaration de son pays faite hier et de clarifier certaines choses qu’ils n’auraient pas comprises.
Le représentant de la Fédération de Russie a exercé son droit de réponse suite à la déclaration de la Géorgie. Il a dénoncé l’idée selon laquelle il existerait des contingents russes sur le territoire de la Géorgie. Les contingents sont situés en Abkhazie et en Ossétie du Sud, reconnus comme États souverains.
Le représentant de la Géorgie a affirmé, en disant s’appuyer sur le droit, que l’Ossétie du Sud n’avait pas le droit de faire sécession. Les interventions menées par un pays tiers étaient illégales, a-t-il dit, citant un rapport de la mission chargée d’établir les faits sur le conflit en Géorgie.
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