AG/11048

Assemblée générale: 1 dollar investi dans la prévention des catastrophes naturelles égale sept dollars d’économie dans la reconstruction

9/02/2011
Assemblée généraleAG/11048
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Assemblée générale

Soixante-cinquième session

Débat thématique informel sur

la réduction des risques de catastrophe

matin & après-midi


ASSEMBLÉE GÉNÉRALE: 1 DOLLAR INVESTI DANS LA PRÉVENTION DES CATASTROPHES NATURELLES ÉGALE SEPT DOLLARS D’ÉCONOMIE DANS LA RECONSTRUCTION


L’Assemblée générale a tenu aujourd’hui un débat thématique sur la réduction des risques de catastrophes où il est apparu qu’un dollar investi dans les activités de prévention et de préparation à ces phénomènes équivaut à sept dollars d’économie dans la reconstruction. 


La construction d’un bâtiment « résilient » ne coûte que 5% de plus, ont insisté les participants aux deux tables rondes intitulées « Investir aujourd’hui dans un avenir plus sûr » et « La gestion des défis des risques de catastrophes dans le milieu urbain ».  Plus qu’à la mobilisation des ressources, les participants ont surtout fait appel à la bonne volonté des dirigeants et à la sensibilisation de l’opinion publique.


Après 1980, 2010 aura été l’année la plus meurtrière avec 950 catastrophes naturelles surtout dues au climat comme les cyclones et les inondations.  Quelque 290 000 personnes y ont perdu la vie mais, évaluées à 130 milliards de dollars, les pertes ont en fait affecté 28 millions de personnes. 


Forte de ce constat, l’Assemblée générale a réfléchi au type d’investissements et de pratiques nécessaires pour réduire les risques de catastrophes, en particulier dans les villes dont la population, dans les pays en développement, a augmenté de 77%, soit 2,6 milliards de personnes, au cours de cette dernière décennie.



Table ronde interactive 1: “Investir aujourd’hui pour un avenir plus sûr”


Frappé par un tremblement de terre de magnitude 7 sur l’échelle de Richter, Haïti a perdu 222 775 personnes alors qu’avec une magnitude  8,8e, le Chili n’en a perdu que 562.  Victime à son tour d’une catastrophe de magnitude 7,1, la Nouvelle-Zélande n’a déploré aucun mort, constat confirmé aujourd’hui par le représentant néozélandais en personne. 


La prévention des risques et la préparation aux catastrophes sont capables d’atténuer considérablement l’impact des catastrophes, a souligné TONY FRISCH, Président du Groupe consultatif du Programmes des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) sur les urgences environnementales.


Alors pourquoi devant de tels chiffres, les investissements dans la prévention et la préparation stagnent-ils?  Pour M. Frisch, le problème vient des hommes politiques et des médias.  Par nature, les activités de prévention et de préparation sont « invisibles » et « incapables » de prouver leur valeur, d’où la réticence des politiciens, en particulier dans les pays pauvres, à y investir.  « Invendables », ces activités n’attirent pas non plus l’attention des médias qui préfèrent se focaliser sur les réactions « plus télégéniques » aux catastrophes.


Qui aurait l’idée saugrenue de contester la pertinence et l’importance d’une campagne de vaccination? s’est impatientée TIOULONG SAMURA, Parlementaire cambodgienne et Membre de l’Union interparlementaire.  Pourquoi ne pas avoir la même approche s’agissant de la prévention des risques et de la préparation aux catastrophes? 


Investir un dollar dans ce type de programmes permet d’économiser sept dollars dans les coûts de reconstruction et de réparation.  Lorsque l’on parle d’investissements, a-t-il précisé, il ne s’agit pas de milliards de dollars mais d’« attitude ».  Nous devons la changer, en particulier dans l’aide au développement.  Chaque accord d’aide, s’est-elle expliquée, doit avoir en son centre la prévention des risques de catastrophes.  Le lien entre le financement du développement et le financement des mesures d’adaptation aux changements climatiques doit être renforcé, a reconnu le représentant de la Pologne, au nom de l’Union européenne.


La Parlementaire cambodgienne a aussi souligné le rôle des parlementaires qui pensent trop à leur réélection au lieu de songer aux besoins de leurs mandants.  Ce sont eux qui sont en meilleure position pour sensibiliser leurs électeurs donc la population.  Nous sommes confrontés à un défi et c’est à nous, parlements, de faire en sorte qu’une partie des budgets nationaux soit allouée à la prévention des risques et à la préparation aux catastrophes. 


D’autant plus que les catastrophes  « silencieuses » comme la sécheresse ont un impact grave et pourtant totalement évitable, a commenté, ABEBE HAILE-GABRIEL, Directeur de la Division de l’agriculture et de l’économie rurale de l’Union africaine, en appelant à une meilleure gouvernance et à des institutions fiables d’alerte précoce.  Il a aussi cité le développement de programmes intégrés, l’amélioration de la planification ou encore l’intégration des concepts pertinents dans les opérations de réhabilitation.  Il a attiré l’attention de l’Assemblée sur le Programme d’action pour la mise en œuvre de la Stratégie régionale de l’Union africaine 2006-2015. 


Adaptation du cadre juridique, définition des structures nécessaires et surtout promotion de la recherche et de la formation sont les axes de la politique de prévention et de gestion de risques de catastrophes mise en œuvre au Mexique, a expliqué, à son tour, RUBEN HOFLIGER, Directeur général du Fonds mexicain pour les urgences en cas de catastrophes (FONDEN).  


La clef du succès réside dans un bon code de construction, la sensibilisation de l’opinion publique et l’éducation, a insisté THOMAS LOSTER, de Munich Re Foundation qui a tout de même souligné l’importance d’un bon système d’assurances.  Un système, a commenté le représentant de la Pologne, au nom de l’Union européenne, qui a beaucoup à nous apprendre sur la réduction des risques. 


Le représentant du Pakistan s’est montré dubitatif face aux propos de M. Loster selon lesquels le monde des assurances est tout à fait disposé à sceller des partenariats public-privé.  Ce sont les pays du Sud qui réclament un système mondial d’assurances et ce sont les pays du Nord, pressés par leur secteur privé, qui se montrent réticents, a asséné le représentant pakistanais. 


Pour expliquer le manque de progrès en la matière, le représentant Munich Re Foundation a invoqué le manque de données nécessaires à la préparation de plans adéquats.  Il faudrait des données portant sur une période de 30 ans, a-t-il souligné en citant l’exemple de la Nouvelle-Zélande.  La question est bien plus complexe, a rétorqué le représentant du Pakistan, toujours dubitatif, avant que la Parlementaire cambodgienne ne lui demande pourquoi les pays du Sud ne mettraient-ils pas eux-mêmes sur pied un mécanisme approprié.


Mais la question des ressources se pose, a répondu le représentant du Pakistan, appuyé en cela par son homologie du Bénin, qui a parlé des « sommes colossales » qu’il faut pour combattre  la désertification en Afrique de l’Ouest.  Pourquoi, s’est demandé le représentant pakistanais, les pays qui ont des facilités régionales d’assurances refusent-ils de partager leur expérience ou de financer les initiatives des autres. 


La République dominicaine, le Qatar et la Turquie ont l’idée de créer un Groupe de réflexion sur un cadre qui pourrait coordonner l’action civile et militaire en cas de catastrophes, a indiqué le représentant dominicain.  Il a dit son intention de présenter un projet de résolution en ce sens à l’Assemblée générale.


En toutes choses, il s’est avéré que l’appropriation nationale est un facteur de succès des stratégies mises en place.  Le représentant de l’Union africaine a cité le cas du Malawi qui a obtenu des donateurs d’utiliser leurs fonds non pas seulement pour porter secours aux exploitants affectés par la sécheresse mais aussi pour financer la politique nationale de hausse de la productivité agricole. 


En Éthiopie, a commenté le représentant de Munich Re Foundation, il y a eu de nombreux projets pilotes mais sans un travail de renforcement des capacités étalé sur cinq à huit ans, rien ne sera possible.   


Quels sont les facteurs critiques pour la planification des politiques? a voulu savoir le représentant de la Suède, au nom des pays nordiques.  Le facteur critique, c’est la volonté politique, a tranché la Parlementaire cambodgienne.  Mais aussi la décentralisation qui privilégie la volonté populaire et qui y répond jusqu’en bas de l’échelle. 


Un Fonds peut être utile mais il ne suffit pas, il faut des programmes d’assurances, de réassurances et aussi des nouveaux cadres juridiques pour prévoir les sommes nécessaires dans les budgets nationaux ou locaux, a ajouté le représentant du FONDEN.  Oui mais dans les pays les moins avancés (PMA), où faut-il investir en priorité?, s’est demandé le représentant des États-Unis.  Dans la sensibilisation de l’opinion publique, a tranché le Président du Groupe consultatif PNUE/OCHA.


L’Assemblée doit exprimer son appui et transmettre un sentiment d’urgence aux États membres qui se réuniront à la troisième session de la Plate-forme biennale mondiale sur la réduction des risques de catastrophes qui se réunira au mois de mai de cette année à Genève, a dit le représentant de l’Argentine, au nom du Groupe des 77 et de la Chine.


Table ronde interactive 2: “Villes menacées – Relever les défis associés aux risques de catastrophe en milieu urbain”


D’emblée, le Directeur du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat) a prévenu: « nous n’avons plus beaucoup de temps pour rectifier le tir », la population urbaine représentant désormais plus de 50% de la population mondiale.  Cette population, principale victime des catastrophes naturelles, n’occupe pourtant qu’1% des terres, a indiqué JOAN CLOS.  Au cours des 20 prochaines années, 2 milliards de personnes effectueront un exode rural.  « Nous n’avons plus aucune excuse », il faut planifier, a-t-il averti.


Prévention étant moins onéreuse que réaction, le Directeur d’ONU-Habitat a donné ce qu’il a appelé les « cinq commandements ».  « Ne pas construire sur un terrain en pente.  Ne pas construire à moins de 200 mètres d’un cours d’eau.  Ne pas construire en basse terre sans un système de drainage approprié.  Ne pas construire dans un espace urbain sans consacrer 30% aux rues.  Ne pas construire des rues d’une largeur de moins de 25 mètres », a dit celui qui fut élu deux fois Maire de Barcelone, une ville dont la moitié est consacrée à des espaces publics.


Trop souvent, a reconnu KADIR TOPBAS, Maire d’Istanbul, ville secouée par un tremblement de terre en 1999, les plans de développement nationaux ne comprennent aucun plan d’utilisation des terres.  Si les zones urbaines ne sont pas choisis avec intelligence, les risques continueront de se multiplier.  Tous les pays doivent travailler ensemble, à savoir les gouvernements, les autorités locales, les ONG, le grand public et le secteur privé.  La transformation de la ville d’Istanbul a certes rencontré des obstacles mais grâce à des mesures correctives, le succès a été au rendez-vous, a-t-il affirmé. 


Maire de la deuxième ville d’El Salvador, en termes de développement humain, OSCAR ORTIZ a ajouté que Santa Tecla est aussi l’endroit le plus apprécié du pays grâce à une politique de reconstruction qui a tiré toutes les leçons du glissement de terrain de 2001.  La Mairie a fait quatre choses principales à savoir, le refus de l’improvisation au profit de la planification, le renforcement des mécanismes interinstitutionnels, le développement de capacités locales et la formation des responsables locaux. 


Ville indonésienne la plus touchée par le tsunami de 2004, Banda Aceh s’est armée contre d’éventuelles catastrophes, a assuré son Maire, MAWARDY NURDIN, qui a cité un « Forum de sensibilisation du grand public » et souligné la « très importante » coordination avec la communauté internationale.  Également ancienne Maire aux Philippines, MARY JANE ORTEGA, Secrétaire général de CITYNET a insisté, à son tour, sur la coordination et la coopération qui ont pris la forme de son organisation, un réseau unique regroupant des autorités locales, des ONG, des associations communautaires, des institutions de recherche et de formation et des entreprises privées. 


Défendant la notion de « villes soeurs », Mme Ortega a lancé un appel aux États Membres car, a-t-elle souligné, les réseaux ne peuvent fonctionner sans le concours des gouvernements.  En l’occurrence, le représentant d’El Salvador s’est attardé sur le potentiel de la coopération sud-sud. 


Le cas des promoteurs immobiliers sans scrupules bénéficiant bien souvent de la complicité des autorités locales a été évoqué.  Pour se prémunir, le Maire de Santa Tecla a préconisé des règles du jeu claires.  Il a avoué qu’après la catastrophe de 2001, les tenants d’une réglementation plus sévère en matière de construction, sans pour autant tuer l’économie, l’ont emporté après une âpre bataille.  Une feuille de route claire est essentielle, a renchéri le Maire d’Istanbul.


À une question du secteur privé, le Maire de Santa Tecla a répondu que le défi est de planifier et de faire participer tous les intéressés, sur la base d’une nouvelle philosophie plus équilibrée entre le secteur public et le secteur privé.  La dichotomie entre réglementations et investissements n’est pas automatique.  Ville très réglementée, Santa Tecla a pourtant réussi à attirer beaucoup d’investisseurs. 


Il faut à la fois développer et prévenir les risques, a plaidé le Directeur d’ONU-Habitat.  Il faut des institutions, une économie dynamique et des mesures spécifiques dans les pays les plus pauvres.  Tout doit partir d’un plan d’urbanisme bien réfléchi, a dit le représentant du Japon qui a rappelé qu’il n’y a aucune catastrophe que son pays ne connaisse pas.  Il a parlé d’un plan qui prévoit des espaces d’évacuation comme des écoles résilientes et facilite l’accès des secouristes en cas de besoin.  Un plan qui doit être connu de toute la population, a-t-il insisté. 


Le lien entre l’impact d’un séisme et le sous-développement a été admis par le représentant d’Haïti après que l’eut souligné un représentant du secteur privé.  Aujourd’hui, après le tremblement de terre de 2010, le problème n’est pas la reconstruction mais bien la refondation.  


Il a imputé les énormes pertes en vies humaines à une ville congestionnée et à un système centralisé.  Des gens sont morts, a-t-il expliqué, à cause de l’exode rural, conséquence directe du sous-développement.  Mais dans un État comme Haïti, des gens sont morts aussi parce qu’ils étaient en ville pour des démarches administratives. 


La prévention des risques en Haïti exige donc la prise en compte du facteur du sous-développement pour que la reconstruction favorise le développement, en particulier le développement rural et celui d’institutions administratives locales.  Le Directeur d’ONU-Habitat a tout de même rappelé le phénomène bien connu du « fantasme des villes ».  Les gens s’y installeront de toute manière et dans notre monde, il n’y pas de développement sans développement urbain, a-t-il tranché.  Non seulement il n’est pas impossible mais il est essentiel, pour les pays du Sud, de concrétiser le rêve du développement des villes provinciales, a rétorqué la représentante du Gabon


Modérant un peu son propos, le Directeur d’ONU-Habitat a indiqué qu’en effet, ce sont les villes de taille moyenne qui sont celles qui croient le plus.  Comme c’est une bonne nouvelle, a-t-il dit, nous appelons les pays à développer des politiques pour le développement des villes provinciales, en pensant à leur résilience.  Nous savons que c’est un grand défi mais la bonne nouvelle c’est que les plans d’urbanisme ne coûtent pas chers et sont bien établis, ils sont même générateurs de revenus. 


En conclusion, MARGARETA WAHLSTROM, Sous-Secrétaire générale à la réduction des risques de catastrophe et Représentante spéciale du Secrétaire général pour la mise en oeuvre du Cadre d’action de Hyogo, est revenue, entre autres, sur la question des données sans lesquelles les compagnies d’assurances ne peuvent investir.  Ce n’est pas un problème de pays riches et de pays pauvres, a-t-elle ainsi répondu aux remarques faites dans l’autre table ronde par le représentant du Pakistan. 


Déclarations


      En ouvrant les travaux, le Président de l’Assemblée générale, M. JOSEPH DEISS, a rappelé qu’en septembre dernier, lors de la réunion plénière de haut niveau de l’Assemblée générale sur les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), les chefs d’État et de gouvernement ont reconnu que la réduction des risques de catastrophes et le renforcement de la capacité de résistance à tous les types d’aléas naturels peuvent « avoir des effets multiplicateurs et accélérer la réalisation des OMD ».  Ils ont aussi constaté que pour certains petits États insulaires en développement, les catastrophes naturelles sont un obstacle significatif sur le chemin du développement durable.


La réduction de la vulnérabilité aux risques naturels doit donc figurer en tête des priorités de la communauté internationale, a souligné le Président.  Il s’est dit encouragé par les progrès dans la mise en œuvre du « Cadre d’action de Hyogo pour des nations et des collectivités résilientes face aux catastrophes ».  Mais au niveau local, a-t-il regretté, il reste difficile d’atteindre les communautés les plus vulnérables et les plus pauvres avec les investissements et les soutiens institutionnels requis. 


Le Président a cité les exemples encourageants du Chili, de Cuba, du Japon et du Bangladesh.  Les villes, qui se caractérisent par une forte densité d’habitants et d’activités économiques, doivent faire des efforts supplémentaires pour atténuer les risques de catastrophes, a-t-il prévenu.  Il a salué la campagne menée par la Stratégie internationale de prévention des catastrophes « Pour des villes résilientes ».


À ce jour, plus de 600 villes et bourgades dans toutes les régions se sont engagées à mettre en œuvre les 10 points de la Stratégie, a indiqué le Secrétaire général de l’ONU, M. BAN KI-MOON.  Cette année, a-t-il promis, nous allons nous concentrer sur les petits États insulaires en développement et les pays les moins avancés (PMA). 


À la veille de la Conférence internationale sur le développement durable, qui doit se tenir à Rio en 2012 –Rio+20-, il ne fait plus aucun doute que la réduction des risques de catastrophes y figurera en bonne place.  Il nous faudra, a prévenu le Secrétaire général, du courage, de la vision, du leadership, la participation de tous et des investissements. 


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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