L’ECOSOC débat de l’importance de disposer d’une protection sociale minimale pour promouvoir un développement durable et mieux combattre les crises
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Conseil économique et social
Session de fond de 2010
23e et 24e séances – matin & après-midi
L’ECOSOC DÉBAT DE L’IMPORTANCE DE DISPOSER D’UNE PROTECTION SOCIALE MINIMALE POUR PROMOUVOIR UN DÉVELOPPEMENT DURABLE ET MIEUX COMBATTRE LES CRISES
Le Conseil entend de nombreuses interventions sur les liens entre
la réalisation des objectifs de développement et la promotion de la santé publique mondiale
« La croissance économique est nécessaire mais pas suffisante pour assurer une base de progrès social à l’ensemble de la population d’un pays », a rappelé ce matin, M. Assane Diop, le représentant de l’Organisation internationale du Travail (OIT) au cours d’une table ronde organisée dans le cadre de la session de fond du Conseil économique et social (ECOSOC) et portant sur l’application de l’Initiative pour une protection sociale minimale et du Pacte mondial pour l’emploi. Ce Pacte, établi en 2009, est un instrument de l’ECOSOC qui permet aux pays de lutter contre le sous-emploi en mettant l’accent sur la promotion de la protection sociale minimale, de la sécurité alimentaire, du commerce, de la maîtrise de la technologie, de l’innovation et de l’économie verte.
« Aujourd’hui, parvenir à la création d’emplois décents est devenu l’axe principal de toute notre politique », a indiqué M. Norberto Ciaravino, Chef de cabinet au Ministère de travail, de l’emploi et de la sécurité sociale de l’Argentine. Il a précisé que 18 millions d’Argentins –soit la moitié de la population du pays– bénéficiaient de prestations sociales, que 100 000 emplois ont pu être sauvés grâce à des subventions publiques, et que deux millions de personnes –qui ne remplissaient pas toutes les conditions nécessaires- ont été intégrées au système national de retraite et de pension. De son côté, M. Carlos Acevedo Flores, Président de la Banque centrale de réserve d’El Salvador a cité la mise en place d’un plan quinquennal anticrise s’étalant sur la période 2009-2014, dont le but est de fournir une couverture sociale aux 75% de Salvadoriens qui n’en disposent pas. Il a indiqué que la baisse des montants des envois de fonds des migrants salvadoriens et la diminution des exportations du pays ont entrainé une baisse des recettes fiscales de 10%, et que la perte de 40 000 emplois a entrainé la réduction des recettes destinées au secteur social, ce qui a fait replonger le pays au niveau de pauvreté qu’il connaissait il y a 10 ans.
Si la croissance n’est pas une condition suffisante au développement social, l’investissement social est un outil très efficace de lutte contre la pauvreté, ont estimé certains intervenants. Le Directeur du Secteur de la protection sociale de l’OIT a indiqué qu’un investissement de 4% du PIB en prestations de vieillesse, d’invalidité et familiales peut réduire de 40% les taux de pauvreté des pays qui lancent ce genre d’action. La Sous-Directrice générale de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a quant à elle rappelé que 100 millions de personnes tombent sous le seuil de pauvreté chaque année faute de pouvoir faire face à leurs dépenses de santé.
Dans le cadre du débat sur le rôle du système de l’ONU dans la mise en œuvre de la déclaration ministérielle issue du débat de haut niveau du Conseil tenu lors de sa session de fond de 2009*, le représentant de la Belgique, parlant au nom de l’Union européenne, a souligné les liens existant entre les indicateurs sociaux et la croissance économique en rappelant que la santé est un droit fondamental de l’homme et un élément clef du développement durable. Les autres délégations qui ont pris la parole à ce sujet ont rappelé combien la lutte contre l’exclusion sociale était essentielle pour réaliser les OMD. Elles ont insisté sur l’importance d’opérer un investissement substantiel dans les systèmes de santé et de mettre en œuvre des politiques garantissant un meilleur accès des personnes et des populations aux prestations de santé.
La deuxième journée de la deuxième semaine de la session de fond 2010 de l’ECOSOC a également donné l’occasion aux délégations d’aborder le point intitulé « Application et suivi des textes issus des grandes conférences et réunions au sommet organisées sous l’égide de l’ONU »; et « Application des résolutions 50/227, 52/12 B, 57/270 B et 60/265 de l’Assemblée générale, y compris la résolution 61/16 »**.
Dans l’après midi, l’ECOSOC a tenu une table ronde sur le thème « Coopération Sud-Sud et financement du développement: Investissement, commerce et transfert de techniques ». Animée par M. Maged A. Adbelaziz, Représentant permanent de l’Égypte, cette table ronde a commencé par des interventions liminaires de M. Heiner Flassbeck, Directeur de la Division de la mondialisation et des stratégies de développement de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), et M. Ajay Singh, représentant des Laboratoires Reddy (Inde). Le débat a offert aux représentants de l’Inde et du Brésil l’opportunité de rappeler que la coopération Sud-Sud devait être perçue et conduite comme venant en complément et non en remplacement de la coopération Nord-Sud.
En début de journée, le Conseil a entendu la présentation de deux rapports des organes de coordination*** dans le cadre de l’examen du point de son ordre du jour relatif aux « Questions de coordination ». Le premier concerne la mise en œuvre du Pacte mondial pour l’emploi. Lancé en avril 2009, ce Pacte comprend une stratégie détaillée d’action collective face à la crise économique et financière. La stratégie s’appuie sur neuf initiatives anticrise communes du système de l’ONU, dont chacune est coordonnée par un organisme chef de file.
Le Conseil économique et social poursuivra ses travaux demain, jeudi 8 juillet, à 10 heures dans la salle de l’ECOSOC.
* E/2010/85, A/65/84–E/2010/90 et E/2010/CRP.3
** A/65/84–E/2010/90
*** E/2010/69 et E/2010/64
DÉBAT CONSACRÉ AUX QUESTIONS DE COORDINATION
- Questions de coordination, questions relatives au programme et autres questions.
- Application et suivi des textes issus des grandes conférences et réunions au sommet organisées sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies
- Le rôle du système des Nations Unies dans la mise en œuvre de la déclaration ministérielle issue du débat de haut niveau du Conseil tenu lors de sa session de fond de 2009
- Application des résolutions 50/227, 52/12 B, 57/270 B et 60/265 de l’Assemblée générale, y compris la résolution 61/16 (A/65/84–E/2010/90)
Documentation
Rapport succinct de l’audition parlementaire de 2009 (Siège de l’Organisation des Nations Unies, 19 et 20 novembre 2009) (A/64/649–E/2010/8)
Ce rapport est un résumé de l’audition parlementaire de 2009, tenue au Siège des Nations Unies à New York les 19 et 20 novembre 2009 avec la participation de 160 parlementaires venus d’une cinquantaine de pays et de deux parlements régionaux.
Intitulée « La voie à suivre: mobiliser l’appui politique et adopter des mesures efficaces relativement à la crise économique mondiale », la réunion avait été principalement axée sur les dispositions prises face à la crise économique mondiale, qui compromettait la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement et la sécurité, et touchait le plus durement les personnes qui en étaient les moins responsables, à savoir les pauvres et les groupes vulnérables. Quatre séances, chacune suivie d’un débat, avaient été organisées, sur les thèmes: « Vue d’ensemble des dispositions internationales adoptées face à la crise »; « La relance verte: des solutions pour une économie plus durable»; « Mesures prises face aux effets sociaux de la crise: filets de sécurité, biens et services collectifs et droits des travailleurs »; et « Rendre les systèmes financiers plus transparents et plus fiables ».
Rapport du Secrétaire général sur le thème « Surmonter la crise: un Pacte mondial pour l’emploi » (E/2010/64)
Le rapport, établi pour le Secrétaire général par l’Organisation internationale du Travail (OIT) en application de la résolution 2009/5 du Conseil économique et social, fait le bilan de l’action engagée aux niveaux national et international pour appuyer l’application du Pacte mondial pour l’emploi. Il explique en quoi les éléments essentiels des politiques adoptées par les pays en réponse à la crise économique et financière cadrent avec les orientations du Pacte et montre comment le système multilatéral a réorienté son assistance financière et technique pour répondre aux besoins des pays et des populations les plus vulnérables sur le plan de l’emploi et de la protection sociale.
Le rapport dresse un état des lieux de l’emploi et des conséquences sociales de la crise, en constatant l’existence de perspectives différenciées de reprise et de croissance, la faiblesse de la reprise des marchés du travail, et les effets de la crise de l’emploi sur les Objectifs du Millénaire pour le développement. Il examine les principaux acquis d’expériences issues des mesures prises au niveau national en faveur de l’emploi et la protection sociale face à la crise économique, les progrès accomplis dans la promotion de mesures intégrées en faveur du Pacte mondial pour l’emploi, ainsi que les contraintes budgétaires et administratives qui se posent aux pays en développement.
Le rapport plaide ensuite en faveur de politiques d’emploi et de protection sociale plus fortes et d’une meilleure coordination internationale des différents plans d’action anticrise afin d’accélérer et de pérenniser la reprise, tout particulièrement dans les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire disposant de marges budgétaires réduites.
Résumé de la réunion spéciale de haut niveau du Conseil économique et social avec les institutions de Bretton Woods, l’OMC et la CNUCED, établi par le Président du Conseil ( A/65/81–E/2010/83)
Ce document contient un résumé, établi par le Président de l’ECOSOC, de la Réunion spéciale de haut niveau que le Conseil a tenue à New York les 18 et 19 mars 2010 avec les institutions de Bretton Woods, l’Organisation mondiale du commerce et la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement. Le rapport traite de la consolidation des acquis de Monterrey et de Doha, en particulier de la réalisation des objectifs de développement convenus sur le plan international, y compris les Objectifs du Millénaire pour le développement.
Le document contient également les résumés de trois débats thématiques organisés lors de la Réunion. Le premier traitait de la mobilisation des ressources financières nationales et internationales nécessaires pour régler les problèmes existants ou nouveaux dans la mise en œuvre des programmes permettant la réalisation des OMD. Le deuxième portait sur le soutien aux activités de redressement, de relance et de développement des pays en développement qui ont des besoins particuliers ou qui sont confrontés à une crise humanitaire. Le troisième débat thématique quant à lui abordait la question du renforcement de la cohérence et de la cohésion des systèmes monétaires, financiers et commerciaux internationaux qui appuient le développement.
Rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre des objectifs convenus et des engagements pris sur le plan international en matière de santé publique mondiale (E/2010/85)
Le débat de 2010 de l’ECOSOC consacré aux questions de coordination porte sur le rôle du système des Nations Unies dans la mise en œuvre de la déclaration ministérielle adoptée par le Conseil économique et social en 2009. Le rapport du Secrétaire général donne un aperçu des actions engagées par le système des Nations Unies pour promouvoir la santé publique mondiale et le développement dans le contexte de crise actuel. Il évalue les initiatives prises par le système des Nations Unies pour mettre en œuvre la déclaration ministérielle de manière coordonnée et analyse les activités des organismes du système des Nations Unies dans les pays.
Le rapport conclut que l’ONU et la communauté internationale ont aidé les pays à mettre en œuvre des programmes ambitieux de santé publique, ajoutant que des mesures ont été prises pour appliquer une grande partie des recommandations énoncées dans la déclaration ministérielle de 2009 dans l’ensemble du champ de l’action sanitaire et du développement. Il ajoute qu’il faut absolument poursuivre sur cette lancée et faire en sorte que la santé publique mondiale reste un enjeu prioritaire pour la communauté internationale, et estime que la réalisation des OMD relatifs à la santé appelle un surcroît substantiel d’efforts et de ressources. Le Secrétaire général rappelle en particulier dans ce rapport que la protection et l’amélioration de la santé supposent un continuum de soins pensé sur tout le cycle de vie, ainsi qu’une couverture sociale et sanitaire efficace et d’un coût abordable s’inscrivant dans un régime de soins de santé primaires.
Rapport du Secrétaire général sur le rôle du Conseil économique et social dans l’application et le suivi intégrés et coordonnés des textes issus des grandes conférences et réunions au sommet organisées sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies, compte tenu des dispositions des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale, y compris la résolution 61/16 (A/65/84–E/2010/90)
Ce rapport constitue une actualisation du rapport de 2009 du Secrétaire général (A/64/87-E/2009/89), qui fournissait une évaluation approfondie des liens entre les différentes parties de l’architecture intégrée de suivi, et qui est jugé comme étant toujours d’actualité. Le rapport de 2010 met donc en lumière les principaux faits nouveaux survenus depuis juin 2009 en matière de suivi intégré des conférences, que ce soit au niveau des pays ou au niveau intergouvernemental, et traite de la participation de la société civile et du secteur privé. Il examine aussi les mesures de rationalisation du programme de travail de l’ECOSOC. Il présente enfin une série de recommandations concernant le travail de l’ECOSOC, y compris pour faire de l’ECOSOC le mécanisme intergouvernemental chargé d’examiner la mise en œuvre des résultats de la réunion plénière de haut niveau de septembre 2010 sur les OMD, notamment par l’intermédiaire de l’Examen ministériel annuel et du Forum pour la coopération en matière de développement.
Présentations
Présentant le rapport annuel d’ensemble du Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies (CCS) pour la coordination pour 2009/10 (E/2010/69), M. THOMAS STELZER, Sous-Secrétaire général à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations, a notamment parlé de la publication début 2009, par le Conseil, d’une déclaration relative à la sûreté et à la sécurité du personnel des Nations Unies, qui approuvait le changement fondamental de culture et d’état d’esprit qui substitue au « Quand partir? » le « Comment rester? » et définissait les mesures que le Conseil adopterait en matière de sûreté et de sécurité du personnel.
Ce rapport décrit les progrès accomplis par le Conseil des chefs de secrétariat et ses trois piliers –le Comité de haut niveau sur les programmes, le Comité de haut niveau sur la gestion et le Groupe des Nations Unies pour le développement– en ce qui concerne le renforcement de la cohérence du système des Nations Unies afin de permettre aux organismes et fonds de l’ONU d’œuvrer de concert à l’exécution des mandats intergouvernementaux aux niveaux mondial, régional et national. M. Stelzer a invité les délégations à suivre les initiatives du CCS sur le site www.unsceb.org.
En 2010-2011, les travaux du CCS devraient s’articuler autour de manifestations telles que la réunion de haut niveau chargée d’examiner les progrès accomplis dans la réalisation des OMD (20-22 septembre 2010), l’Année internationale de la biodiversité (2010), la seizième session de la Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (29 novembre-10 décembre 2010), la quatrième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés (2011), et les préparatifs de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio +20) (2012).
Présentant le rapport du Secrétaire général intitulé « Surmonter la crise: un Pacte mondial pour l’emploi » (E/2010/64), M. ASSANE DIOP, Directeur exécutif du Secteur de la protection sociale de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a déclaré que le Pacte fournissait une feuille de route aux pays qui souhaitent promouvoir une reprise basée sur l’emploi et le dialogue social. Le Pacte mondial pour l’emploi, tel qu’énoncé dans la résolution 2009/5 de l’ECOSOC, est le seul schéma de politique générale convenu sur le plan international pour faire face à l’impact de les crises financière et économique sur l’emploi et la protection sociale, dit le Secrétaire général dans ce rapport. Il vise à réduire le temps de latence entre le redémarrage de l’économie et l’offre d’emplois décents sur le marché du travail. Il encourage une reprise productive axée sur l’investissement, l’emploi et la protection sociale, les droits au travail et le dialogue social. Le Pacte préconise des mesures de relance adaptées à la situation et aux besoins particuliers de chaque pays et tenant compte de l’impact de la crise économique sur les femmes et sur les hommes en intégrant systématiquement la dimension de l’égalité des sexes. Il fait état des besoins spécifiques des pays en développement, notamment de ceux des pays les moins avancés (PMA), et plaide en faveur d’une mondialisation juste, durable et plus verte.
L’ECOSOC a joué et peut encore jouer un rôle central de rapprochement des schémas de politique générale dans la perspective d’une reprise globale pouvant rallier tous les pays, puis d’un développement mondial plus stable et mieux partagé, conclut le Secrétaire général dans ce rapport. Le Pacte mondial pour l’emploi offre un instrument précieux qui permet aux pays et au système des Nations Unies de se concentrer sur la priorité générale de la lutte contre le chômage et le sous-emploi. Un an après l’adoption de la résolution 2009/5, un changement de cap semble imminent, est-il indiqué dans le rapport. L’ampleur des bouleversements provoqués par la crise financière appelle des efforts redoublés afin de renforcer la cohérence des politiques et de la coopération internationale, a noté M. Diop en présentant le rapport du Secrétaire général.
Table ronde sur le thème « Mise en œuvre des mesures à court et à long termes proposées par les Nations Unies face aux crises économique et financière: progrès sur la voie de l’application de l’Initiative pour une protection sociale minimale et du Pacte mondial pour l’emploi »
Animée par M. MORTEN WETLAND (Norvège), Vice-Président du Conseil économique et social, qui a rappelé que les chiffres de l’emploi sont inférieurs aux attentes, cette table ronde a débuté par les exposés liminaires présentés par des représentants de l’Organisation internationale du Travail et de l’Organisation mondiale de la santé, et par les délégations de l’Argentine et d’El Salvador.
Prenant la parole, M. ASSANE DIOP, Sous-Directeur général et Directeur exécutif du Secteur de la protection sociale de l’Organisation internationale du travail (OIT), a mentionné les termes de la déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable, adoptée en 2008, et a expliqué que le Pacte mondial pour l’emploi est indissociable de la protection sociale. Rappelant que le niveau mondial de l’emploi a baissé d’environ 1% en 2009 et que le chômage a augmenté significativement, affectant 210 millions de personnes en 2010, il a aussi signalé que les emplois de moindre qualité se sont multipliés, que l’économie informelle a pris encore plus d’ampleur, et que les revenus ont baissé ou stagné, en niveaux réels. Le coût de cette crise de l’emploi est énorme, notamment pour les populations vulnérables sans épargne et sans filet de sécurité, a-t-il constaté. Avant même cette crise, la pauvreté était massive et touchait 25% de la population mondiale, soit 1,4 milliard de personnes qui vivent avec moins de 1,25 dollar par jour.
Fort de ces constatations, M. Diop a donc invité à trouver des solutions mondiales, en tenant compte de la capacité des pays du Sud, notamment de celle de la Chine, de l’Inde, du Brésil et de l’Afrique du Sud. Il a parlé de la possibilité pour les pays qui le souhaitent d’élaborer un pacte national pour l’emploi, avec l’aide du Bureau international du travail (BIT), comme l’ont fait l’Argentine et El Salvador. Il a aussi appelé à investir dans l’économie réelle pour une croissance forte créatrice d’emplois de qualité, et portée par un secteur financier « assaini ». « Nous savons qu’une croissance économique élevée est nécessaire, mais en soi elle n’est pas suffisante pour assurer une base de progrès social à l’ensemble de la population », a-t-il ajouté. M. Diop a appelé à développer des politiques qui soient donc porteuses de croissance économique et de croissance sociale.
M. Diop a également précisé que le Comité de haut niveau sur les programmes du Conseil des chefs de secrétariats du système des Nations Unies a adopté, en avril 2009, l’Initiative mondiale d’un socle universel de protection sociale, fondée sur une approche holistique novatrice. Elle vise à garantir la disponibilité, la continuité et l’accès géographique et financier aux services sociaux essentiels, ainsi qu’un ensemble de transferts sociaux essentiels, en espèces ou en nature, en faveur des pauvres et des vulnérables pour leur assurer un revenu minimum. M. Diop a précisé que le coût de ces transferts sociaux dans les pays à faible revenu d’Afrique ou d’Asie représenterait de 2,3% à 5,7% du PIB, et que celui d’une modeste pension universelle de base est estimé de 1% à 1,5% du PIB au Burkina Faso ou en Éthiopie. « Un programme de protection sociale de base semble abordable », en a-t-il déduit.
Dans un nombre croissant de pays en développement, certaines composantes du socle de protection sociale sont déjà en place à un prix abordable, a signalé M. Diop qui a cité l’exemple du Brésil, avec son programme Bolsa Familia, du Mexique, avec le programme Oportunidades, ainsi que l’Afrique du Sud, la Namibie et le Népal. Il a aussi indiqué que le G-20 a invité les banques multilatérales de développement à soutenir l’extension des systèmes de protection sociale dans le monde et le BIT à les assister techniquement dans la conception et la mise en place de tels systèmes.
Mme CARISSA ETIENNE, Sous-Directrice générale en charge des systèmes et services de santé à l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a relevé que beaucoup de personnes à travers le monde n’ont pas les moyens de se protéger contre les maladies infectieuses et les maladies non transmissibles. Tous les ans, 100 millions de personnes tombent en dessous du seuil de pauvreté parce qu’elles ne sont pas couvertes en matière de santé et doivent payer des soins médicaux et autres services de santé, a-t-elle dit, ajoutant qu’une grande partie de la population mondiale n’a pas accès au socle minimum de protection sociale en matière de santé. Seulement une personne sur cinq dans le monde a un accès large à la protection de la sécurité sociale qui comprend des indemnités pour combler les pertes de revenus en cas de maladie, a relevé Mme Etienne. Elle a cependant mentionné des pays qui ont progressé dans ce domaine, comme le Brésil, le Chili, la Colombie, la Thaïlande, le Ghana, la Chine, la République de Moldova, ou le Sri Lanka, parmi tant d’autres.
Mme Etienne a souligné les grandes différences entre les pays, signalant que seulement 5% à 10% de la population de l’Afrique subsaharienne et de l’Asie du Sud sont couverts, alors que dans les pays à revenu moyen, ce taux va de 20% à 60%. Elle a ensuite rappelé qu’il y a 30 ans, la déclaration signée à Alma Ata sur les soins de santé primaire reconnaissait la nécessité de promouvoir la santé pour le bien-être de l’humanité. L’OMS s’est réengagée en 2008 sur le principe d’une couverture universelle et de soins axés sur les personnes, en cherchant à atteindre en particulier les pauvres, les femmes et les enfants, les migrants, les autochtones et les minorités ethniques, a-t-elle indiqué.
L’OMS travaille activement avec les États Membres pour parvenir à l’accès universel à la protection sociale, a assuré Mme Etienne. Elle a noté que la consommation de médicaments n’a pas diminué avec la crise, précisant que les pays ont eu davantage recours aux produits génériques. Cependant l’accès aux soins préventifs ne peut être réalisé sans un système fort de financement de la santé, a prévenu Mme Etienne, avant de préciser que l’OMS travaille avec de nombreux pays pour les aider à développer un tel système, en collaboration avec des partenaires comme l’OIT, la Banque mondiale, l’Allemagne et la France, dans le cadre de l’Initiative IHP+. Enfin, Mme Etienne a appelé à apporter de façon générale un appui technique accru aux pays du Sud.
M. NORBERTO CIARAVINO, Chef de cabinet au Ministère du travail, de l’emploi et de la sécurité sociale de l’Argentine, a présenté les efforts déployés par son pays pour étendre la couverture sociale à un maximum de la population argentine, ceci étant considéré comme un moyen de renforcer la résistance du pays face aux crises. Il a rappelé que l’Argentine a connu en 2002 une version anticipée et plus aiguë de la crise mondiale de 2009 qui a mis en danger le socle même de la société argentine. Il a indiqué que cette crise a permis au Gouvernement et autres acteurs sociaux de prendre conscience de la nécessité de promouvoir un travail décent et une protection sociale à la population. Aujourd’hui, le travail et l’emploi sont devenus l’axe principal de toute notre politique, a-t-il déclaré en précisant que le Gouvernement argentin a le souci de garantir des services médicaux, des retraites, des prestations familiales et autres couvertures sociales aux travailleurs du secteurs informel. Il a précisé que 18 millions d’Argentins –soit la moitié de la population– bénéficiaient aujourd’hui de prestations sociales.
M. Ciaravino s’est félicité de l’adoption par l’Argentine d’une politique axée sur la création d’emplois, qui a permis de faire passer le taux de chômage de 25% à 8% de la population active. Cent mille emplois ont pu être sauvegardés grâce à des subventions publiques et deux millions de personnes – qui ne remplissaient pas toutes les conditions nécessaires en raison du chômage élevé qui a prévalu au cours des années 1990 - ont été intégrées dans le système de pension. On a élargi le système de protection familiale à tous les enfants argentins sans exception, a-t-il encore ajouté.
M. CARLOS ACEVEDO FLORES, Président de la Banque centrale de réserve d’El Salvador, a parlé des initiatives lancées par le nouveau Gouvernement salvadorien, arrivé au pouvoir en juin 2009, pour amortir l’impact de la crise sur les populations les plus vulnérables, ceci par le biais d’un plan quinquennal anticrise 2009-2014. L’exécution de ce plan passe par la mise en place à terme d’une protection sociale universelle, dans un pays où 75% des habitants ne disposent d’aucune couverture sociale, a relevé M. Acevedo Flores. Il a dit qu’un des problèmes que rencontre El Salvador provient du fait que le secteur bancaire était entre les mains de sociétés étrangères qui ne s’intéressaient pas au développement social du pays. Il a souligné les spécificités d’El Salvador, où la reprise économique sera sans doute l’une des plus faibles. Il a rappelé qu’en 2009 les envois des fonds des migrants salvadoriens représentaient 18% du PIB national du pays. En raison de la diminution des exportations et des envois de fonds, les recettes fiscales ont diminué de 10%. De plus, la perte de 40 000 emplois –2% de la population active- dans le secteur formel a entrainé la réduction des recettes fiscales. Le taux de pauvreté a augmenté de 10%, plaçant le pays dans la situation qu’il connaissait il y a 10 ans. M. Acevedo Flores a évoqué l’appui qu’apporte à El Salvador l’OIT dans la mise en place du Pacte pour l’emploi. Le FMI, la Banque mondiale et la Banque interaméricaine de développement soutiennent aussi le pays. À cet égard, le représentant salvadorien a cité un accord de trois ans signé par El Salvador avec le FMI pour promouvoir la stabilité macroéconomique, et un prêt de 50 millions de dollars accordé par la Banque mondiale pour la création d’emplois. Un prêt de 300 millions de dollars a également été accordé à El Salvador par la Banque interaméricaine de développement pour la lutte contre la pauvreté urbaine et rurale, a dit le représentant.
Débat interactif
Les délégations qui ont participé au dialogue qui a eu lieu après les exposés ont, à l’instar de la représentante de l’Argentine, noté l’importance d’apporter des réponses cohérentes sur le long terme aux questions qui se posent en matière d’emploi et de protection sociale. Elles ont, dans l’ensemble, appuyé le Pacte mondial pour l’emploi. La mise en œuvre effective du Pacte dans les pays a cependant été soulevée par le représentant du Bangladesh qui a relevé un certain décalage entre le travail effectué au Siège, notamment par le Conseil des chefs de Secrétariat, et ce qui est fait sur le terrain.
Le Vice-Président de l’ECOSOC a indiqué à cet égard que, selon les termes de l’expert économiste Jeffrey Sachs qu’il avait un jour interrogé sur l’efficacité des mécanismes de suivi, ce sont l’OIT, l’OMS et le FMI qui assurent le mieux le suivi sur le terrain. M. DIOP, de l’OIT, a précisé que le BIT a inclus le Pacte mondial dans les programmes de travail décent prévus pour chaque pays, ce qui permet de mieux suivre son application.
Le représentant de la Belgique, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne (UE), a demandé qu’il soit pleinement tenu compte de la dimension de l’emploi et de la protection sociale dans les réponses à la crise, et il a apporté l’appui de l’UE à l’initiative de l’OIT sur la promotion d’un socle solide pour l’emploi. L’UE a mis en place sa propre initiative dans ce domaine, appelée « Europe 2020 », a-t-il indiqué.
De son côté, le représentant du Brésil a précisé ce que faisait son gouvernement pour mettre en œuvre le Pacte pour l’emploi, notamment en réduisant de façon temporaire les taxes et impôts afin de permettre le maintien de nombreux emplois. M. Ciaravino, officiel du Gouvernement de l’Argentine, a quant à lui mentionné une politique mise en œuvre dans son pays, et qui contraint les entreprises à préserver les emplois existants. Le représentant du Bénin a ensuite appelé à prendre en compte de façon spécifique les jeunes dans la politique de croissance sociale.
La représentante de la République de Corée a précisé que 6% du PNB du pays ont été utilisés pour stimuler l’économie. Le rôle du secteur privé doit être renforcé dans les efforts pour créer une croissance durable créatrice d’emplois stables et décents, a-t-elle estimé, avant d’indiquer que se tiendra bientôt à Séoul un Sommet des affaires regroupant des dirigeants de grandes entreprises, afin de discuter d’une reprise économique durable.
La reprise du secteur productif de l’économie, qui est celui de l’économie réelle et non spéculative, a également été jugée prioritaire par le représentant du Venezuela. Ce secteur qui doit être mieux financé, a-t-il préconisé. Il a estimé que le secteur financier et spéculatif prend une place trop importante dans l’économie aux dépens du secteur réel. Le représentant de Cuba a lui aussi demandé comment revitaliser l’économie réelle. Il a par ailleurs noté que le thème de la protection sociale a un caractère idéologique dans certaines parties du monde. Dans sa réponse, M. DIOP a reconnu qu’il fallait en effet développer le secteur productif de l’économie afin de créer plus d’emplois.
Pour sa part, le représentant d’El Salvador a souhaité l’adoption d’une approche multidisciplinaire, insistant sur le dialogue en matière de financement du développement et sur le lien entre l’OMD no 1 (réduire l’extrême pauvreté et la faim) et l’OMD no 8 (partenariat mondial pour le développement). La place de l’agriculture est essentielle dans les pays en développement, a-t-il estimé, appuyé par M. Diop qui a souligné l’impact fort que peut avoir le socle de protection sociale sur l’agriculture et le PIB. M. FLORES, de la Banque de réserve d’El Salvador, a reconnu qu’une intervention prioritaire dans le secteur de l’agriculture est justifiée. Il a aussi averti que ce secteur souffre de discrimination parce qu’il ne produit sans doute pas autant de revenus que les autres.
Débat général sur les questions de coordination
M. ABDULLAH ALSAIDI (Yémen), au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a rappelé que le rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre des objectifs convenus et des engagements pris sur le plan international en matière de santé publique mondiale montre que, sur la base des tendances actuelles, beaucoup des pays en développement ne réaliseraient pas les OMD d’ici à 2015, du fait de la série de crises mondiales qui les ont affectés ces deux dernières années. Il s’est dit très préoccupé que la santé maternelle reste marquée par de plus grandes inégalités, et a rappelé que, chaque année, 350 000 femmes meurent encore des complications dues à la grossesse ou à l’accouchement, ajoutant que 99% des 10 millions de femmes qui meurent par génération viennent du monde en développement et que ces décès pourraient être prévenus par des soins efficaces et peu coûteux.
Le représentant a également rappelé que les progrès réalisés dans la lutte contre le VIH/sida n’ont pas été suffisants pour assurer un accès universel à la prévention, au traitement et aux soins de soutien, et que cela ne pourrait se faire d’ici à la fin de 2010, ou pour pouvoir inverser la tendance de la pandémie. Celle-ci continue de s’étendre et d’effacer des décennies de progrès économique et social, tout en ayant des effets dévastateurs sur la population.
Le Groupe des 77 et la Chine rappellent que la réalisation des OMD liés à la santé requiert la réaffirmation, de la part de la communauté internationale, de ses engagements à soutenir les États dans les efforts qu’ils mènent pour renforcer leur système de santé, a déclaré M. Alsaidi. Il faut augmenter le financement mondial en faveur de la mise en place de capacités suffisantes en matière de santé et pour assurer leur efficacité. Il est également temps de lancer un mouvement mondial pour la santé maternelle et infantile comparable à celui lancé pour lutter contre le VIH/sida, a ajouté le représentant. Il a rappelé aux pays développés leur engagement de porter leur APD à 0,7% de leur PIB en 2015, et à 0,5% fin 2010, ainsi que celui de consacrer entre 0,15% et 0,20% de leur PIB à l’APD destinées aux pays les moins avancés. Le représentant a en outre rappelé l’importance de l’ECOSOC dans la coordination des activités et programmes du système des Nations Unies dans les domaines économiques et sociaux, et il a souhaité un renforcement de cette coordination dans le cadre de la réalisation des OMD.
Intervenant au nom de l’Union européenne, M.CHRISTOPHE DE BASSOMPIERRE (Belgique) a déclaré l’attachement de l’Union européenne à la déclaration ministérielle de 2009 qui souligne les liens entre les indicateurs sociaux et la croissance économique. La santé est un droit de l’homme fondamental et un élément clef du développement durable, a-t-il insisté. Les efforts visant à lutter contre l’exclusion sociale sont essentiels. Il faut procéder à un investissement significatif dans les systèmes de santé et mettre en place une politique garantissant un meilleur accès à la santé. « Investir dans la santé, c’est investir dans le développement humain », a-t-il insisté. Le message central de la déclaration ministérielle est donc plus pertinent que jamais, a-t-il souligné, en se félicitant des progrès constatés dans de nombreux pays en matière de promotion de la santé publique. Néanmoins, il s’est inquiété des progrès inégaux réalisés dans la mise en œuvre des OMD nos 4 et 5 en Afrique subsaharienne et dans certains pays asiatiques.
Mme ZHANG DUN (Chine) a salué les efforts déployés par l’ECOSOC pour faciliter la mise en œuvre de la déclaration ministérielle adoptée en 2009 en matière de promotion de la santé publique mondiale, avant de rappeler que la santé, à ce niveau global, était confrontée à de nombreux défis du fait des crises, mais aussi des catastrophes naturelles, qui posent de obstacles à la réalisation des OMD en matière de santé. Les institutions du système des Nations Unies devraient renforcer leur coordination et leur coopération mondiale en matière de santé publique, a-t-elle ajouté.
Mme Zhang a estimé que le Sommet de septembre sur les OMD serait l’occasion de parvenir à un consensus politique sur la question et de prendre des mesures concertées, notamment pour accélérer les progrès, encore trop lents, en matière de santé maternelle et infantile. Elle a demandé aux pays développés de respecter leurs engagements en matière d’aide au développement. La réalisation des OMD relatifs à la santé suppose aussi la mise en place de systèmes nationaux de santé, a ajouté Mme Zhang, qui a estimé que de tels systèmes ne produiraient de bons résultats que lorsqu’ils seraient le résultat d’une réelle appropriation nationale. Les États doivent renforcer leur engagement politique, améliorer les soins de santé primaire, offrir davantage de ressources financières et humaines et mettre en place des systèmes de santé adaptés à leurs conditions nationales, a-t-il affirmé. Quant au système des Nations Unies, elle doit mobiliser les ressources et moyens techniques nécessaires pour apporter un soutien concret à la mise en place des structures nationales de santé publique, a préconisé la représentante de la Chine. Elle a ensuite présenté les mesures prises par son pays, affirmant que la réforme du système de santé publique en Chine avait produit des résultats positifs. La Chine est prête à partager son expérience et ses bonnes pratiques pour contribuer à la réalisation des objectifs mondiaux en matière de santé publique, a souligné Mme Zhang.
M. VASSILY NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est opposé à tout processus qui risque d’affaiblir le rôle de l’OMS. Il a souhaité que l’on accorde une grande attention à l’examen des aspects économiques et sociaux de la santé. Il a dit que la déclaration ministérielle issue du débat de haut niveau du Conseil, qui a eu lieu lors de sa session de fond de 2009, était une clef de la coordination des différentes actions des Nations Unies sur les questions de santé. Il a souligné l’importance du prochain Sommet international sur les maladies infectieuses. Il a mis l’accent sur l’importance de la réduction du nombre de victimes des accidents de la route en exhortant tous les États à participer, en mars 2011, au lancement de la « décennie internationale de la sécurité routière ». Le représentant de la Fédération de Russie a précisé que la première réunion du Groupe des amis de cette décennie a eu lieu à Genève le 25 juin 2010. Il a salué les efforts déployés par le Président de l’ECOSOC pour rationaliser le programme de coordination en suggérant que le Conseil des chefs de secrétariat pour la coordination (CCS) ait la latitude de conduire une évaluation politique des travaux de l’ECOSOC et qu’il lui soit assigné de nouvelles taches en rapport avec les futurs grands sommets de l’ONU et les décisions de l'Assemblée générale.
M. GUILHERME DE AGUIAR PATRIOTA (Brésil) a souligné que tous les objectifs du développement se renforcent mutuellement et que les gouvernements nationaux sont pour l’essentiel responsables du développement économique et social de leur pays. Notant aussi que le manque de ressources empêche la réalisation des OMD en matière de santé, il a appelé à consacrer davantage de moyens financiers à ce secteur, notamment pour permettre aux pays et aux populations de lutter efficacement contre les maladies infectieuses. L’ONUDI, le PNUD et l’OMS ont un rôle important à jouer pour renforcer le rôle de l’ONU dans le domaine de la santé, a-t-il ajouté. Il faut notamment arriver à améliorer l’accès aux médicaments en levant les obstacles qui se posent dans ce domaine aux pays en développement, notamment concernant l’accès aux médicaments génériques bon marché, a dit le représentant du Brésil.
Il s’est ensuite félicité que l’ECOSOC examine les mécanismes de suivi en ce qui concerne les modalités de financement du développement. À cet égard, il a appuyé l’idée de créer un mécanisme à trois niveaux. Il a cependant noté que la Conférence de Monterrey est le seul sommet dans le domaine économique et social qui n’ait pas aboutit à la mise en place d’un organe de suivi. La création récente d’« ONU Femmes » devrait ouvrir la voie dans ce sens, a-t-il espéré. Il a aussi souligné combien le chômage nuit à la réalisation des OMD et a appelé les gouvernements à adopter des politiques renforçant la création d’emplois et promouvant la création d’emplois décents. Les efforts internationaux peuvent en outre être coordonnés pour favoriser la création d’emplois, a-t-il suggéré. Enfin, le représentant a noté que certaines initiatives proposées par le Conseil des chefs de Secrétariat n’ont ni mandat ni définition, citant le cas du « processus de promotion d’une économie verte » qui est encore en discussion dans plusieurs instances. Il a donc insisté sur la nécessité d’aligner les initiatives des Nations Unies sur les mandats décidés par les États Membres.
M. DANIEL WORKIE (Éthiopie) a salué l’importance de ce débat consacré à la mise en œuvre des engagements pris sur le plan international en matière de santé publique mondiale conformément à la résolution 2008/29 du Conseil économique et social. Il a souligné combien il est important pour les pays de se concentrer sur la réduction de la mortalité infantile et maternelle, et a regretté qu’il semble évident que les PMA ne pourront réaliser l’OMD no 5 d’ici à 2015. Il a souhaité que la déclaration ministérielle issue du débat de haut niveau de la session de fond de 2009 du Conseil économique et social soit mise en œuvre en tenant compte des spécificités respectives des pays en développement. Il a salué la récente Initiative de Muskoka, par laquelle les pays du G-8 se sont engagés à consacrer cinq milliards de dollars supplémentaires, au cours des cinq prochaines années, à la promotion de la santé.
M. ADE PETRANTO (Indonésie) a rappelé que l’éradication de la pauvreté représentait une priorité urgente, car elle conditionne la réalisation de tous les autres Objectifs du Millénaire pour le développement. Il faut donc tout faire pour empêcher des reculs dans la lutte contre la pauvreté, malgré le contexte mondial de crises, a recommandé M. Petranto. Pour se faire, il faut utiliser tous les outils à notre disposition, et la coordination en est un, a-t-il ajouté. En effet, la coordination clarifie le rôle de chacun, identifie les lacunes, et aide à trouver les mesures et les solutions nécessaires aux problèmes qui se posent. Les Nations Unies doivent donc continuer de diriger les efforts pour une meilleure coordination.
C’est particulièrement vrai de la coordination des efforts en matière de santé, y compris dans le cadre des OMD, a ajouté M. Petranto, qui a estimé que de bons efforts de coordination avaient été accomplis pour soutenir les besoins immédiats dans la réalisation des OMD liés à la santé. Toutefois, un élément essentiel manque encore, a poursuivi le représentant, qui a rappelé le retard pris en matière de santé maternelle et infantile. Il a déclaré qu’il faillait améliorer la quantité et la qualité des services de santé au niveau mondial, ainsi que l’accès à ces services. Pour le représentant, la coordination devrait se concentrer sur les moyens de renforcer le financement des prestations et des structures de santé et sur les modalités de la mise à la disposition des populations de soins et de médicaments à des prix abordables. Il faut aussi renforcer les connaissances médicales et la capacité à relever les défis qui se posent en matière de santé, de pauvreté, de malnutrition et de faim. La coordination peut préserver les progrès acquis et en permettre de nouveaux, mais il faut que nous soyons tous impliqués, a conclu le représentant.
M. GONZALO GUTIÉRREZ REINEZ (Pérou) a souligné les incidences de la santé sur les capacités de développement de son pays. Il a jugé essentiel de lier les objectifs de l’amélioration de la santé avec les autres OMD. Des lignes directrices de gestion claire pour la réalisation des OMD en matière de santé, dont des lois sur l’accès universel aux soins de santé, sont indispensables, a dit le représentant. Entre 2007 et 2008, le nombre de personnes ayant accès à une assurance de santé a augmenté de 10%, portant à 50% la proportion de la population péruvienne ayant une telle couverture. Pour les pays à revenu intermédiaire, la coopération internationale est essentielle pour lutter contre le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme, a relevé le représentant péruvien. Il a évoqué avec regret l’impact qu’ont les maladies non transmissibles sur le Pérou, en rappelant que la pneumonie est la première cause de décès des enfants âgés de moins de cinq ans au Pérou. Il a également mis l’accent sur l’impact croissant des accidents de la route, et a ajouté qu’un meilleur accès aux services d’eau et d’assainissement était aussi un moyen de réduire les accidents.
Table ronde sur le thème « Coopération Sud-Sud et financement du développement: Investissement, commerce et transfert de techniques »
Présidée par le Vice-Président du Conseil économique et social et animée par M. MAGED A. ADBELAZIZ, Représentant permanent de l’Égypte auprès de l’Organisation des Nations Unies, la table ronde organisée cet après-midi sur le thème « Coopération Sud-Sud et financement du développement: Investissement, commerce et transfert de techniques » accueillait comme intervenants MM. Heiner Flassbeck, Directeur de la Division de la mondialisation et des stratégies de développement de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED); er Ajay Singh, des Laboratoires Reddy (Inde).
M. MAGED ABDELAZIZ (Égypte) a estimé que l’économie mondiale commence à montrer des signes de redressement après la plus grande récession économique que le monde ait connue depuis les années 1930. Il a ajouté que la crise avait eu d’importantes conséquences négatives sur les pays en développement et que, malgré les signes de redressement, on était encore loin d’être revenu à la situation d’avant la crise. M. Abdelaziz a constaté la montée de la coopération Sud-Sud, qu’il a attribuée notamment à la montée en puissance de certains pays en développement et à l’intégration régionale opérée par les pays du Sud. Il a rappelé que des initiatives fructueuses avaient été prises par certains pays en développement en matière de transferts de technologies Sud-Sud. Il a jugé important de traiter de la nécessaire approche holistique pour les financements et de rappeler que la coopération Sud-Sud est un complément et non un substitut à la coopération Nord-Sud.
M. AJAY SINGH, des Laboratoires Reddy (Inde) a rappelé que toute sa carrière s’était faite dans l’industrie pharmaceutique, ceci en travaillant tant pour les marques détentrices de brevets que pour la production de médicaments génériques, et ce, dans les pays du Nord et dans ceux du Sud. Il a estimé qu’entre le Nord et le Sud, chacun avait un rôle à jouer. Le moteur de l’innovation est dans le Nord, mais, quand il s’agit d’augmenter l’accès aux soins de santé, y compris dans le Nord, les entreprises du Sud jouent un très grand rôle, a dit M. Singh. Le Nord se concentre sur les nouveaux médicaments et les nouvelles molécules, alors que le Sud se concentre sur la réduction des coûts et la distribution au plus grand nombre, y compris dans les pays du Nord. Il a cité en exemple le « neupogène », médicament donné aux personnes souffrant du cancer pour augmenter leur production de globules blancs. En réduisant son prix d’environ 50%, les ventes de ce produit ont été multipliées par 10, a précisé M. Singh. Il y a vu l’illustration de l’ampleur de la demande en médicaments, que des prix élevés ne peuvent permettre de satisfaire. Sur la base de l’expérience, M. Singh a affirmé qu’il fallait appliquer ce raisonnement à d’autres maladies en dehors du sida ou du paludisme. Il a insisté sur le rôle immense joué par les entreprises du Sud dans l’initiative « 3x5 » et affirmé que ce modèle était très rentable du point de vue du marché.
M. Singh a ensuite parlé de transition épidémiologique, en expliquant que la baisse de la mortalité due à des maladies telles que le paludisme ou la tuberculose, et l’augmentation de l’espérance de vie, permettent d’observer la croissance d’autres maladies jusqu’alors peu répandues dans les pays en développement, comme par exemple les maladies cardiovasculaires. Or, ces dernières causent proportionnellement beaucoup plus de décès dans les pays du Sud que dans le reste du monde.
M. Singh a ensuite mis l’accent sur la coopération Sud-Nord, en prenant l’exemple d’un médicament générique d’origine indienne commercialisé par une grande chaîne commerciale américaine avec l’agrément de la Food and Drug Administration (FDA), pour un montant de quatre dollars, qui a permis de donner aux personnes modestes les moyens de se soigner aux États-Unis. Plus de 70% des médicaments vendus aux États-Unis sont aujourd’hui des génériques, a-t-il affirmé. M. Singh a en outre préconisé une harmonisation du cadre réglementaire des différents pays, expliquant que, si un médicament agréé dans un pays pouvait aussitôt l’être dans les autres dans les mêmes conditions, on pourrait, par des économies d’échelle, réduire de manière importante les coûts.
M. HEINER FLASSBECK, Directeur de la Division de la mondialisation et des stratégies de développement de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a tiré les leçons de la crise financière en relevant l’importance des investissements, pas uniquement ceux des banques d’affaires, mais toutes les formes d’investissements, y compris ceux effectués dans les capitaux fixes, les économies vertes, les changements structurels et les soins de santé, afin d’améliorer la productivité de l’économie réelle. Il faut mettre l’accent sur les retours sociaux, a-t-il ajouté, et règlementer à nouveau le secteur financier et l’ensemble de ce système. Il a averti qu’il y avait un risque de tomber dans un nouveau creux de récession, parce que l’argent des banques centrales n’est pas réinvesti dans les activités réelles, mais dans le secteur financier spéculatif.
M. Flassbeck a aussi invité les États Membres et les autres acteurs à adopter des règles pour équilibrer le commerce mondial et éviter l’endettement des États. Ce qui fait défaut, c’est la cohérence commerciale, a-t-il ajouté. Beaucoup de pays ont en effet été submergés par de l’argent et des transferts financiers à court terme qui n’ont suscité que des gains de même nature, a-t-il expliqué, citant les cas de l’Islande et du Brésil où le secteur commercial s’est retrouvé en difficulté parce que le secteur financier n’avait pas fonctionné correctement. À la CNUCED, nous avons examiné le système financier international et envisagé des règles pour que ce secteur soit cohérent et compatible avec le secteur du commerce, a signalé M. Flassbeck.
En ce qui concerne le transfert des technologies, il a estimé que les pays en développement avaient trop mis l’accent sur les investissements étrangers directs, ne faisant pas assez confiance en leurs capacités propres. Or, a-t-il estimé, cela n’est pas suffisant, et il faut favoriser les investissements nationaux. Il faut aussi éviter les monopoles, y compris ceux des producteurs se trouvant dans d’autres pays du Sud. Il a donc appelé les pays du Sud à faire preuve de créativité et à rattraper leur retard. Ces enseignements n’ont pas non plus été tirés, raison pour laquelle les politiques adéquates n’ont pas été mises en place, a-t-il expliqué. En conclusion, M. Flassbeck a invité les pays en développement à renforcer leur coopération Sud-Sud afin de se défendre plus efficacement contre les flux de capitaux étrangers. Il a aussi dénoncé les taux d’intérêts prohibitifs pratiqués dans les pays en développement et les a appelés à les réduire. M. Flassbeck a enfin annoncé que la CNUCED allait bientôt présenter un rapport sur la croissance inclusive, expliquant combien il est important d’encourager la participation de la population à l’économie pour générer une demande interne et rendre possible une croissance durable. Il a enfin rappelé que la coopération régionale est une question de volonté politique. Constatant qu’en Europe les tentatives d’améliorer cette coopération ont échoué, il s’est interrogé sur les perspectives existant dans ce domaine dans les pays en développement, et a encouragé ces pays à renforcer leur coopération.
Débat interactif
Au cours du débat, plusieurs représentants ont rappelé que la coopération Sud-Sud ne devait pas remplacer, mais compléter la coopération Nord-Sud. Le représentant du Brésil a estimé que les transferts Sud-Sud pouvaient atténuer les effets négatifs de la crise financière et de la baisse de l’APD, mais a rappelé que l’APD restait importante pour certains pays, et notamment pour les pays les moins avancés (PMA). Il a souligné que les pays développés ne respectaient toujours pas leurs engagements en ce domaine. Le représentant de l’Inde a estimé que la coopération Sud-Sud générait de bons résultats mais n’était pas encore, en termes de volume et d’échelle, au niveau de la coopération Nord-Sud. Il a insisté sur l’importance du partage des connaissances et donc de la coopération triangulaire. Le représentant de la République de Corée a cité, parmi les avantages comparatifs de la coopération Sud-Sud, celui de l’expérience en matière de promotion du développement. À cet égard, il a fait remarquer que son pays avait connu une certaine réussite.
La représentante de l’Union européenne a rappelé que la Déclaration de Bogota, adoptée en mars dernier, souligne le besoin de renforcer la complémentarité entre coopération Sud-Sud et coopération Nord-Sud. Mais il faut aussi tenir compte des spécificités de la coopération Sud-Sud, a-t-elle rappelé, en insistant sur le poids de la Chine, qui fournit à elle seule 83% de l’aide venant des pays en développement à l’Afrique. Elle a justifié l’approche de coopération triangulaire adoptée par l’Union européenne. Celle-ci consiste à aider des pays du Sud, qui à leur tour aident d’autres pays du Sud.
M. FLASSBECK, de la CNUCED, a répondu à certaines observations de la représentante de l’UE en estimant qu’il faudrait éviter de créer toute forme de compétition entre les différents donateurs. Pour être efficace, il faut une coopération entre bailleurs de fonds, traditionnels ou nouveaux, a-t-il ajouté, tout en faisant observer qu’il était probable que les nouveaux pourvoyeurs d’aide interviennent dans des domaines qui ne sont pas couverts par les bailleurs de fonds traditionnels.
Plus spécifiquement, le représentant du Bangladesh a demandé comment on pouvait envisager l’avenir de la coopération Sud-Nord telle que décrite dans le cas du secteur pharmaceutique, et si on pouvait envisager de l’étendre au-delà de ce secteur précis. Le représentant de la République de Corée a estimé que la coopération Sud-Sud devrait pouvoir s’étendre dans le domaine de l’industrie pharmaceutique, tout en ajoutant que, dans ce domaine, elle avait besoin de la coopération Nord-Sud, notamment pour les transferts de technologies. Il a souhaité connaître les types d’obstacles qui se posent à une telle expansion.
M. WETLAND a demandé dans quelle mesure il était vrai que les entreprises pharmaceutiques traditionnelles avaient besoin de vendre à un coût élevé pour rentabiliser leurs frais de recherche, et a voulu savoir quel était le rôle des droits de propriété intellectuelle. M. SINGH a confirmé que la mise au point de nouveaux médicaments avait un coût très élevé. Il a ajouté que l’innovation continue de venir pour l’essentiel du Nord. Il existe au Nord un cadre qui permet aux chercheurs qui ont des idées innovantes de les développer. Ce genre d’environnement fait encore défaut au Sud, ainsi que les ressources financières.
La représentante de la Mongolie a souligné l’initiative lancée par plusieurs pays sans littoral pour créer un centre de recherche et d’analyse sur des défis qui leur sont communs, tels ceux posés par les changements climatiques ou la désertification. Elle a estimé que ce centre pourrait devenir un bon exemple de coopération Sud-Sud qui pourrait bénéficier du soutien de la CNUCED et du système des Nations Unies.
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