Face à la conjonction des crises, l’ECOSOC préconise de renforcer la cohérence entre les systèmes de financement et de promotion du développement
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Conseil économique et social
Réunion spéciale de haut niveau avec les institutions
de Bretton Woods, l’Organisation mondiale du commerce
et la Conférence des Nations Unies sur le commerce
et le développement
6e et 7e séances – matin et après-midi
FACE À LA CONJONCTION DES CRISES, L’ECOSOC PRÉCONISE DE RENFORCER LA COHÉRENCE
ENTRE LES SYSTÈMES DE FINANCEMENT ET DE PROMOTION DU DÉVELOPPEMENT
Le Conseil économique et social (ECOSOC) a achevé, aujourd’hui, sa Réunion spéciale de haut niveau de deux jours avec les institutions de Bretton Woods, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED).
Répondant aux recommandations du Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, les participants aux deux débats thématiques tenus aujourd’hui ont appelé à soutenir les activités de redressement et de relance des pays en développement ayant des besoins particuliers, et à soutenir la cohérence des systèmes financiers internationaux de financement et de soutien au développement.
Les intervenants ont ainsi reconnu que la conjonction des crises financière, alimentaire et énergétique et de catastrophes naturelles dévastatrices, comme cela s’est produit en Haïti et au Chili, a plongé de nombreux pays parmi les moins avancés (PMA) dans des situations entravant leur marche vers la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).
S’appuyant sur la présentation de deux publications à venir de la Banque mondiale et de la CNUCED, les participants au premier débat ont mis l’accent sur l’impact désastreux des conflits -responsables de 70 à 90% des retards pris dans la mise en œuvre des OMD- et sur la nécessité de mettre en place de véritables politiques de création d’emplois et de capacités de production de biens et de services dans les PMA.
Ils ont répété que la conclusion du Cycle de négociations commerciales de Doha, prévue pour 2010, permettrait de répondre aux besoins en capacités de production des pays les plus pauvres et les plus vulnérables. « La cohérence commence chez soi », a dit l’un des principaux panélistes. Un certain nombre d’intervenants ont en outre estimé qu’une bonne gouvernance, assurée par un gouvernement solide et compétent, était le meilleur moyen pour garantir la viabilité budgétaire et utiliser les ressources nationales pour pouvoir financer durablement la protection sociale dans chaque pays concerné.
Lors du deuxième débat thématique, tenu dans l’après-midi, les délégations ont souligné l’importance de faciliter les opérations de prêts multilatéraux. Tous les pays devraient pouvoir avoir accès, sans condition, à un mécanisme de réserves de liquidités pour faire face à des chocs économiques et financiers, ont estimé les intervenants. Ils ont aussi considéré, qu’outre un Fonds monétaire international (FMI) plus représentatif et légitime, d’autres solutions améliorées, comme le recours aux droits de tirage spéciaux, devraient être appliquées pour fournir des financements d’urgence aux pays les plus pauvres et les plus vulnérables aux conséquences de la conjonction des crises.
« Réfléchir à un nouveau modèle de croissance, cela signifie voir au-delà des seules considérations financières et prendre pleinement en compte la dimension sociale de la crise », a, par ailleurs, signalé la représentante de la France.
Résumant le sentiment général, elle a considéré que l’ONU, « forte de son efficacité et de sa légitimité », était l’enceinte par excellence où doit être défini une tel modèle à même de répondre aux défis complexes du XXIe siècle.
Dans ses remarques de clôture, le Président de l’ECOSOC, M. Hamidon Ali, de la Malaisie, a salué la tenue d’une réunion propice à encourager, parmi les États Membres, un esprit durable d’engagement. Il s’est aussi réjoui de la volonté affichée par les participants d’améliorer les relations entre toutes les institutions représentées à la Réunion spéciale de haut niveau et l’ONU. M. Ali a conclu en réaffirmant que le respect des engagements de Monterrey et de Doha était essentiel pour aider les pays pauvres à réaliser les OMD d’ici à 2015. Pour ce faire, il a rappelé l’importance de corriger les déséquilibres de l’économie mondiale par le biais d’une refonte du fonctionnement d’institutions financières internationales « adaptées aux défis posés par la crise ».
* E/2010/11
Débat thématique plénier sur le thème 2: « Soutenir les activités de redressement, de relance et de développement des pays en développement ayant des besoins particuliers et des pays en proie à des situations d’urgence humanitaire »
Mme SARAH CLIFFE, Représentante spéciale et Directrice du Rapport sur le développement dans le monde de la Banque mondiale, a présenté le document de la Banque mondiale intitulé: « Rapport sur le développement dans le monde 2011: Conflits, sécurité et développement ». Mme Cliffe a fait part des premières constatations et idées avancées sur les liens entre les conflits, la sécurité et le développement en parlant notamment de l’impact terrible qu’ont les conflits sur la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). À titre d’illustration, elle a indiqué que si les conflits touchaient moins de 50% des populations des pays en développement, ils étaient néanmoins responsables de 70% à 90% du déficit constaté dans la réalisation des OMD, notamment en matière de mortalité infantile, et d’accès à l’éducation, à l’eau ou aux médicaments. Outre les programmes de développement, il faut promouvoir des actions plus ciblées de renforcement de la confiance et l’inclusion de groupes qui se sont, dans le passé, sentis exclus. C’est nécessaire pour empêcher le retour à la violence, a dit la Représentante spéciale de la Banque mondiale, en précisant que le rapport s’appuyait sur des études menées sur la violence en Irlande du Nord, entre les gangs de Los Angeles, ainsi que sur les attaques lancées par les milices de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) dans six pays ou encore sur les conflits qui ont eu lieu dans de nombreux pays à moyen ou à faible revenus. Nous devons attacher plus d’attention à la prévention, a indiqué Mme Cliffe, en regrettant qu’on accorde plus d’importance aux pays qui ont connu des conflits qu’à ceux qui souhaitent les prévenir. Nous avons aussi examiné les éléments de cohésion sociale, comme la confiance envers les institutions des pays, a-t-elle encore dit, avant de regretter que les programmes d’appui internationaux fassent peu de cas de la question de l’appui à la création d’emplois, à la subsistance agricole, ou à la mise en place d’une police efficace.
De son côté, présentant les grandes lignes du Rapport 2010 sur les pays les moins avancés (PMA), M. CHARLES GORE, Chef du Service de l’analyse des politiques et de la recherche de la Division de l’Afrique, des PMA et des programmes spéciaux de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a mis en évidence les difficultés particulières que rencontrent ces pays, dont plus de 30% ont connu une croissance négative par habitants en 2009. Il est nécessaire de procéder à la mise en place de nouveaux cadres politiques, en mettant l’accent sur le développement des capacités productives de biens et de services des PMA, a-t-il insisté, en notant que les bonus, d’un montant de 1,6 milliard de dollars, qui seront distribués par Goldmann Sachs en 2010 représentant à eux seuls le double du PIB d’Haïti. Même si le taux de croissance moyen des PMA dépasse depuis 2005 la cible de 7% de croissance (cible fixée par le Programme d’action de Bruxelles), un quart des PMA continue à avoir de mauvais résultats en raison notamment de facteurs extérieurs, comme les prix des produits de base et l’insuffisance de l’aide extérieure.
S’appuyant sur les exemples de Madagascar et du Mali, M. Gore a parlé de l’impact de la croissance démographique sur la pauvreté en notant que l’augmentation de la population entrainera une hausse considérable du nombre de personnes vivant avec moins de 1,25 dollar par jour, en l’absence de politiques de création d’emplois. Parlant du blocage constaté dans la transition structurelle qui aurait dû s’opérer au sein des économies, il a souhaité la mise en place d’un mécanisme de stimulation de la croissance afin de promouvoir la production agricole, première source d’emplois, de développer les ressources humaines et de réduire ainsi la dépendance des PMA envers l’aide extérieure. Il a cité l’exemple du Malawi, où les subventions versées aux engrais ont permis d’accroître substantiellement la production agricole. Il a appelé les donateurs à donner aux pays récipiendaires un certain espace politique afin de leur permettre de promouvoir l’appropriation des politiques de développement.
Dialogue interactif
Intervenant au nom du Groupe de Rio,le représentant du Chili s’est demandé si les attentes en matière de réalisation des OMD n’étaient pas exagérées en ce qui concerne les pays sortant de conflits. Sur le même ton, le représentant del’Inde a demandé ce que la CNUCED avait concrètement fait pour aider les pays en difficulté. Au nom des pays les moins avancés (PMA), le représentant du Népal a estimé que le seul renforcement de la capacité de production n’était pas suffisant, si les PMA n’ont pas les moyens d’être concurrentiels sur des marchés internationaux de plus en plus interdépendants.
Le représentant du Guatemala a parlé de l’augmentation des besoins de sécurité et de justice, notamment quand existent des problèmes systémiques dans la répartition des richesses et des ressources. Il a souligné la nécessité de créer des emplois qui soient en mesure de remplacer ceux liés à la pratique d’activités criminelles.
« De quelle latitude disposent les PMA pour augmenter leurs tarifs douaniers afin de protéger leurs productions nationales », a demandé le Président du Conseil du commerce et du développement, tout en notant que la libéralisation des marchés était la principale cause de la multiplication, par quatre, et depuis 2000, de la dette des PMA. Illustrant ces propos, il a rappelé que les PMA étaient les pays qui avaient les taux douaniers les plus bas. Citant le cas d’Haïti, qui a réduit de 50% à 3% ses droits de douane, il a demandé quelle serait la réaction de la Banque mondiale si Haïti souhaitait augmenter ces taux douaniers pour protéger ses petits agriculteurs. Il a insisté sur le besoin, pour les PMA, d’avoir des marges de manœuvre entre les taux appliqués et les taux consolidés mis en œuvre dans le cadre des engagements politiques. « Si l’on comprend le réflexe qu’il y a d’aider d’abord ceux qui sont dans le plus grand besoin », a dit le Doyen du Conseil exécutif de la Banque mondiale, il faut aussi comprendre que le développement durable s’appuie sur la capacité productive, qui elle-même soutient les budgets nationaux des PMA et leur capacité de financer leurs régimes de protection sociale.
Un représentant de la société civile d’Haïti a souligné l’urgence d’arrêter des choix de société basés sur la justice sociale. À l’instar de la représentante de l’Indonésie, il a mis l’accent sur la nécessité de favoriser l’intégration des groupes marginalisés après les catastrophes, comme les femmes, les enfants et les handicapés. La déléguée indonésienne a mis l’accent sur la nécessité de réduire le temps qui s’écoule entre les annonces de contributions et l’arrivée effective de l’aide.
« La réalité est que les PMA n’ont pas les moyens de mettre en œuvre seuls les réformes qui leur sont imposées de l’extérieur », a estimé la représentante de l’Australie en mettant l’accent sur l’importance de l’aide à l’agriculture et de la place de la femme en matière de capacités de production. Un représentant de la Banque mondiale a estimé qu’il fallait garder à l’esprit la cadence des réformes et les attentes et il a insisté sur le fait que pour chaque pays, la cohérence commence chez soi, avec un gouvernement qui soit fort, stable et bien préparé. Si le représentant du Brésil a suggéré la création d’un mécanisme d’appui international comme alternative à la plate-forme sur l’efficacité de l’aide de l’OCDE, celui du Japon a mis l’accent sur la nécessité de vérifier la pertinence des plans de réduction des conséquences des catastrophes. Il a aussi demandé des précisions sur la distinction entre la « bonne gouvernance » et la « bonne gouvernance pour le développement » évoquée par M. Gore.
Un représentant du secteur privé (Civic leadership center) a mis l’accent sur l’importance du partenariat public-privé aux fins de la création d’entreprises et d’emplois, et sur la nécessite de mesurer la corrélation entre investissements privés, développement durable et réalisation des OMD.
Un représentant de la Banque mondiale a souligné l’importance de la capacité productive et de l’emploi et a parlé de la meilleure façon d’intervenir après un conflit pour relancer le développement, tout en se demandant si l’agriculture était la voie à suivre pour les PMA.
De son côté, le représentant du Bénin a souhaité que la communauté internationale prenne la mesure de l’inconséquence des mauvaises initiatives du passé en fustigeant « la hauteur de la tour des conditionnalités » Il a mis l’accent sur la gestion des risques liés au timing des réformes en se félicitant de la nouvelle sensibilité dont fait preuve le système financier international envers les impératifs de cohésion sociale.
« Les coûts de transport représentent 6% à 8% de notre PIB », a déclaré la représentante de la Mongolie, en mettant l’accent sur les difficultés que rencontrent, en matière de compétitivité, les 31 pays en développement sans littoral. Elle a présenté les activités du Groupe international des pays en développement sans littoral, qui souhaite élaborer un accord intergouvernemental sur la question de l’aide au commerce, tout en souhaitant l’élaboration d’un indice de vulnérabilité économique des pays sans littoral.
Le représentant de la France a souligné le paradoxe de la situation des États sortant de conflit, lorsque ces pays ne sont plus en mesure de respecter les critères qui permettent aux pays donateurs de leur accorder leur aide. Il a suggéré que soit lancé l’examen d’une méthodologie sur l’articulation et l’harmonisation des aides des différents intervenants et l’établissement d’indicateurs de la dimension structurelle de la vulnérabilité et de l’éventuelle résistance aux chocs.
Répondant aux observations et interrogations des intervenants, Mme CLIFFE, de la Banque mondiale, a souligné l’importance de la création d’emplois en notant que l’emploi, l’amélioration de la sécurité, et la promotion de l’État de droit étaient des ingrédients interdépendants de la viabilité à long terme. On constate qu’il y a une tendance qui se manifeste. On s’éloigne des procédures rigides basées sur des modèles et on a tend à voir plus clairement quelles sont les institutions qui vont nous permettre de réaliser les objectifs que nous nous assignons, a-t-elle ajouté, avant de souligner que les pays qui ont des institutions fortes présentent les meilleures garanties de l’efficacité de l’aide. Elle a cité le cas du Mozambique, qui a montré que l’on pouvait faire des progrès dans la réalisation des OMD malgré une situation de relative insécurité.
De son coté, M. GORE, de la CNUCED, a expliqué que si le rapport de la CNUCED n’examinait pas la question examinée sous l’angle de la sexospécificité, il le faisait néanmoins sous celui de la capacité de négociation des femmes dans l’élaboration des capacités de production. Il a rappelé que les pays récipiendaires de l’aide, en accord avec la Déclaration de Paris sur l’efficacité de cette forme d’assistance, doivent spécifier les types et formes d’aides qu’ils souhaitent recevoir. Il a, à cet égard, cité les exemples de l’Ouganda et du Malawi. Il a dit que la bonne gouvernance était un concept fondé sur le bon fonctionnement d’institutions associées à des politiques, et qu’elle reposait sur l’imputabilité plutôt que sur les résultats, alors que la « bonne gouvernance pour le développement » est, quant à elle, liée à la fois à l’imputabilité et aux résultats. Faisant allusion aux propos des représentants du Venezuela et de la Turquie sur le rôle de l’État, M. Gore a mis l’accent sur l’importance d’adopter une démarche qui soit pragmatique et non pas idéologique. Répondant à des questions sur la productivité, il a cité la contradiction qu’il y a à voir le riz consommé au Sierra Leone provenir de la Thaïlande et a suggéré, à cet égard, une utilisation intelligente de subventions à la productivité dans ce domaine
Débat thématique plénier sur le thème 3: « Renforcer la cohérence et la cohésion des systèmes monétaires, financiers et commerciaux internationaux qui appuient le développement »
M. ROBERT VOS, Directeur de la Division de l’analyse des politiques de développement du Département des affaires économiques et sociales de l’ONU (DESA), a donné un aperçu de la publication parue sous le titre: « La situation économique et sociale dans le monde, 2010: « Vers un nouveau paradigme de développement: Cohérence dans les politiques de développement et la coopération internationale ». Il a d’emblée estimé que les solutions mondiales doivent être trouvées dans des structures qui sont elles-mêmes mondiales, car « les problèmes actuels sont interdépendants ». Pour M. Vos, les réponses à la conjonction actuelle des crises qui affectent le monde doivent être apportées de manière cohérente aux niveaux local et international.
La grande difficulté à laquelle se heurtent les planificateurs et les décideurs, c’est le fossé qui persiste entre de vastes ensembles qui, comme l’Asie, ont pris leur envol économique, et un continent comme l’Afrique, confronté aux principaux obstacles au développement, a-t-il ajouté. Il a également indiqué que l’urbanisation galopante, « s’effectue à un même rythme partout, creusant les inégalités entre les pays qui peuvent s’adapter et les autres. »
« D’ici à 2050, 70% de la population mondiale seront composés de populations citadines », a noté M. Vos, ce qui pèsera « forcément » sur la sécurité alimentaire et énergétique. « Les répercussions d’une telle évolution sur l’environnement sont bien connues », a poursuivi Robert Vos, qui a mis en avant le fait que la prospérité humaine et l’exploitation des ressources n’avaient jamais eu le coût environnemental qu’elles ont aujourd’hui dans toute l’histoire de l’humanité. Comment réformer les institutions internationales de gouvernance dans un contexte marqué, nous l’avons dit, par une interdépendance accrue des défis? a-t-il ensuite demandé.
Pour M. Vos, au plan commercial, l’Initiative « Aide pour le commerce » est une réponse efficace, mais juste temporaire, « elle ne suffit pas à régler ce que recherchent les négociateurs du Cycle de Doha, à savoir de nouvelles règles commerciales permettant d’harmoniser les transferts de technologie et les taux de croissance des pays en développement ».
Pour ce qui est du financement du développement, il a appelé les Gouvernements réunis au sein du G-20 à traduire en actes leurs engagements en matière de rééquilibrage des économies mondiales. « Rééquilibrer l’économie internationale, c’est la rendre plus juste et rendre durable la prospérité », a-t-il estimé. « Cela exige une refonte complète de l’architecture financière, pour notamment redonner aux politiques les moyens de reprendre la main et se concentrer sur l’amélioration du bien-être de leur population, comme notamment celles de pays en développement, qu’ils ont promis d’aider dans le cadre de la réalisation des OMD », a encore indiqué M. Vos.
M. DETLEF J. KOTTE, Chef du Service des politiques macroéconomiques et des politiques de développement de la Division de la mondialisation et des stratégies de développement de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et la développement (CNUCED), a estimé que les déséquilibres financiers actuels étaient dus au manque de coordination des politiques macroéconomiques.
« Nous y revenons: le rôle du dollar en tant que devise de réserve a été crucial dans la survenue de la crise, car les réajustements nécessaires n’ont pas pu être effectués à temps », a-t-il dit. Selon lui, il s’agit d’un problème récurrent qu’ont subi hier les économies émergentes et que subissent aujourd’hui les pays en développement. « Quand il y a instabilité dans les échanges internationaux, ce sont toujours les économies fragiles qui souffrent le plus et le plus longtemps », a encore déclaré M. Kotte.
« La « financialisation » excessive des marchés de capitaux a créé une gigantesque bulle spéculative coupée des marchés réels où s’échangent les biens et les services concrets dont ont besoin les économies pour fonctionner et les sociétés pour se développer », a poursuivi le responsable de la CNUCED, qui a affirmé que le FMI aurait dû imposer davantage de coordination dans les politiques macroéconomiques de ses membres pour pouvoir stabiliser les finances internationales.
« Le Fonds s’est accroché à la croyance selon laquelle les marchés financiers sont les meilleurs juges des situations économiques et donc les plus à même de rétablir automatiquement les déséquilibres », a-t-il constaté. Il a estimé qu’aujourd’hui, le FMI doit, aux côtés des instances de gouvernance politique, s’attacher à la fois à redonner confiance aux marchés et combler le manque de règles multilatérales et de rigueur à l’origine de l’échec des politiques monétaires et financières.
M. Kotte a également vanté les mérites des droits de tirage spéciaux (DTS), qui pourraient « réduire la dépendance au dollar ainsi que le besoin de conserver des réserves de devises ». « On peut imaginer des réserves DTS qui seraient plus stables que les monnaies nationales et faciliteraient ainsi, dans les pays en développement, une gestion des taux de change à l’avantage de ces derniers et des puissances émergentes », a-t-il dit.
Débat interactif
Le représentant du Chili, parlant au nom du Groupe de Rio, a affirmé que la crise était due pour l’essentiel aux déséquilibres structurels entre économies. « Un consensus est né du constat qu’il faut réformer l’architecture financière internationale en renforçant la transparence des institutions concernées », a-t-il ajouté. Le représentant chilien a, à son tour, plaidé pour une participation accrue des pays en développement aux prises de décisions des institutions financières internationales. « C’est dans le sillage de l’ONU qu’une nouvelle gouvernance économique, et pas seulement politique, doit être définie », a encore estimé le délégué chilien. Selon lui, une solution trouvée dans le cadre des Nations Unies serait un gage de légitimité et de représentativité, et elle rendrait les actions collectives entreprises en matière économique et de financement du développement plus crédibles et efficaces.
Une représentante de la société civile a, pour sa part, réagi aux exposés en considérant que le système actuel d’évaluation des PIB de différents pays était dépassé. « Il faut changer d’approche, prendre en compte le coût réel d’un salaire digne, le coût de la pollution sur une économie locale, et celui de l’épuisement des ressources, pour évaluer au plus près la situation socioéconomique d’un pays », a-t-elle dit. L’intervenante a aussi plaidé pour la fin d’un système où ce sont « les experts des riches qui décident, dans le secret, des règles qui s’appliquent à la totalité des pays, y compris les plus pauvres et les plus vulnérables ».
Pour la représentante de la France, « la crise a révélé qu’une mondialisation non maitrisée et un mode de croissance non durable et inéquitable avaient des conséquences désastreuses dans la majorité des pays ». « Notre réponse doit être efficace et coordonnée à la crise », a-t-elle poursuivi, en saluant l’engagement du G-20 de réformer en profondeur le cadre réglementaire dans lesquels s’effectuent les opérations financières. Concernant la refonte des institutions de Bretton Woods, la représentante a souligné qu’elle était indispensable pour rééquilibrer la représentativité accordée aux différents pays et les processus de prise de décisions qui en découlent.
« Le FMI et la Banque mondiale ont entamé une réforme essentielle de leur système de quotes-parts en vue de le rendre plus juste », a-t-elle indiqué. « Réfléchir à un nouveau modèle de croissance, cela signifie voir au-delà des seules considérations financières et prendre pleinement en compte la dimension sociale de la crise », a, d’autre part, signalé la déléguée française. Elle a reconnu que l’ONU, forte de son efficacité et de sa légitimité, était le lieu où, aux côtés des institutions de Bretton Woods et de la société civile, doit être défini un tel modèle par les États Membres.
Le représentant du Paraguay, qui s’exprimait au nom des pays en développement sans littoral, a fait observer que l’Initiative « Aide pour le commerce » avait été utile pour accélérer le développement des infrastructures commerciales de ces pays, mettre en œuvre les mesures de facilitation commerciale, et renforcer l’harmonisation et l’intégration des régulations pertinentes au plan régional.
« L’intensification de la cohérence au sein de la communauté internationale est vitale pour assurer les engagements en matière commerciale, ceci pour que les pays en développement sans littoral, fragilisés par la crise climatique, puissent surmonter les obstacles qui les empêchent d’atteindre l’autosuffisance économique », a-t-il dit.
Les participants au débat ont par ailleurs souligné l’importance de faciliter les opérations de prêts multilatéraux. Tous les pays devraient pouvoir avoir accès sans condition à un mécanisme de réserves de liquidités pour faire face à des chocs économiques et financiers, a-t-il été ainsi dit. Les intervenants ont aussi considéré, qu’outre un FMI plus représentatif et légitime, d’autres solutions innovantes devraient être mises en œuvre pour allouer des financements d’urgence aux pays les plus pauvres et les plus vulnérables pour qu’ils fassent front aux conséquences de la conjonction des crises. Sur ce dernier point, le rôle des droits de tirage spéciaux a de nouveau été évoqué, les délégations estimant que, pour devenir une monnaie attrayante, les DTS devaient être échangés à l’intérieur d’importants marchés publics et privés. Les participants au débat ont appuyé la recommandation faite par le Secrétaire général pour que soit créé un mécanisme facilitant les opérations de change directes dans toutes les monnaies, que ce soit celles des pays développés que celles de pays en développement.
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