La troisième Conférence des États parties à la Convention relative aux droits des personnes handicapées se penche sur la solidarité, le droit à l’éducation et le milieu de vie
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Conférence des États parties
à la Convention relative aux
droits des personnes handicapées
Troisième session
3e & 4e séances – matin & après-midi
LA TROISIÈME CONFÉRENCE DES ÉTATS PARTIES À LA CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DES PERSONNES
HANDICAPÉES SE PENCHE SUR LA SOLIDARITÉ, LE DROIT À L’ÉDUCATION ET LE MILIEU DE VIE
La troisième Conférence des États parties à la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, qui s’est ouverte hier au Siège des Nations Unies, a poursuivi ses travaux aujourd’hui en tenant deux tables rondes, sous la présidence du prince Raad Bin Zeid Al-Hussein, de la Jordanie. La solidarité envers les personnes handicapées, leur droit à l’éducation, et leur droit à choisir librement leur milieu de vie étaient les thèmes des débats auxquels une trentaine de délégations ont participé.
Après l’intervention de la Ministre chargée des femmes, des enfants et des personnes handicapées de l’Afrique du Sud, pays où des lois ont été adoptées en faveur de l’éducation des personnes handicapées dès 1996, la première table ronde a débattu du droit à l’éducation et de la qualité de l’enseignement dont doivent bénéficier les personnes handicapées. Les experts ont ainsi examiné la mise en œuvre de l’article 24 de la Convention qui vise à « assurer l'exercice de ce droit sans discrimination et sur la base de l'égalité des chances ».
Aux termes de cet article, les États parties à la Convention doivent faire en sorte que le système éducatif « pourvoie à l’insertion scolaire » et offre « des possibilités d’éducation » aux personnes handicapées. L’article 24 fixe une série d’obligations aux États parties et un certain nombre de mesures concrètes à prendre et à mettre en œuvre, tel que la facilitation de l'apprentissage du braille et de la langue des signes.
Les panélistes ont souligné les difficultés que rencontrent les États à appliquer ces dispositions malgré leurs bonnes intentions, ce que le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le handicap a expliqué en citant plusieurs obstacles: le manque d’information et de ressources au niveau local, l’indifférence des enseignants, ou encore les difficultés à appréhender les aspects juridiques des textes.
L’inclusion des enfants handicapés dans le système éducatif sans en assurer la qualité des enseignements serait cependant une simple apparence d’inclusion et, inversement, la qualité sans l’inclusion serait ségrégative, a souligné pour sa part une experte du Comité des droits des personnes handicapées. « Une éducation inclusive suppose le respect de la diversité humaine », a estimé un autre membre de ce Comité.
Au cours de la deuxième table ronde, animée par un membre hongrois handicapé du Parlement européen et qui portait sur « la solidarité et le milieu de vie », les experts et délégations ont examiné la mise en œuvre de l’article 19 de la Convention, qui est relatif à l’autonomie de vie et à l’inclusion des personnes handicapées dans la société.
Alors que les États parties se sont engagés à prendre des mesures efficaces et appropriées pour leur « faciliter la pleine jouissance de ce droit ainsi que leur pleine intégration et participation à la société », le Directeur et Vice-Président du Comité des droits des personnes handicapées a dénoncé la pratique fréquente du placement forcé de ces personnes dans des centres spécialisés. Il a rappelé l’obligation qui incombe aux gouvernements, au titre de la Convention, de permettre aux personnes handicapées de choisir leur lieu de vie.
« On ne fait pas partie d’une communauté quand on est placé dans une institution d’accueil, séparé du reste de la communauté », a souligné lui aussi un professeur de l’Université du Delaware aux États-Unis. Il a invité les participants à apporter un soutien nécessaire aux familles qui accueillent des personnes handicapées, pour éviter qu’elles ne placent leurs proches souffrant d’un handicap dans un asile ou tout autre lieu de vie extérieur à la cellule familiale. Au cours du débat, certaines délégations ont d’ailleurs souligné le rôle des parents, qui ont la responsabilité d’envoyer leurs enfants handicapés à l’école au lieu de les conduire dans la rue pour mendier ou les placer quelque part, hors de la famille.
Une autre panéliste, Présidente de « Association for Self Advocacy » et membre du Conseil d’administration de l’ONG « Inclusion Europe » a apporté son témoignage personnel de vie en institution, où elle n’était pas libre de ses décisions. Ce n’est que grâce à une association qui l’a assistée qu’elle a pu trouver l’aide dont elle avait besoin pour vivre la vie de son choix.
La séance formelle de la réunion de la Conférence de cet après-midi a été suivie d’une séance informelle dont les échanges ont porté sur les personnes handicapées dans les situations à risque et les urgences humanitaires.
La troisième session de la Conférence des États parties à la Convention relative aux droits des personnes handicapées achèvera ses travaux demain, vendredi 3 septembre 2010, à partir de 10 heures.
QUESTIONS RELATIVES À L’APPLICATION DE LA CONVENTION
Table ronde sur le thème « la solidarité et le droit à l’éducation »
Cette table ronde porte sur l’examen de l’article 24 de la Convention et sur les moyens de le mettre en œuvre.
Aux termes de cet article, relatif aux « droits des personnes handicapées sur le droit à l’éducation », pour « assurer l’exercice de ce droit sans discrimination et sur la base de l’égalité des chances », les États parties à la Convention doivent faire en sorte que le système éducatif « pourvoie à l’insertion scolaire à tous les niveaux et offre, tout au long de la vie, des possibilités d’éducation » qui visent « le plein épanouissement du potentiel humain et du sentiment de dignité et d’estime de soi, ainsi que le renforcement du respect des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de la diversité humaine », « l’épanouissement de la personnalité des personnes handicapées, de leurs talents et de leur créativité ainsi que de leurs aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leurs potentialités », et leur « participation effective à une société libre ».
L’article 24 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées fixe une série d’obligations aux États parties et un certain nombre de mesures concrètes, tel que faciliter l’apprentissage du braille et de la langue des signes, et veiller à ce que les personnes handicapées puissent avoir accès à la formation professionnelle, à l’enseignement pour adultes et à la formation continue, ou encore à ce que des « aménagements raisonnables » soient apportés en faveur des personnes handicapées.
Déclarations liminaires
Le prince RAAD BIN ZEID AL-HUSSEIN de la Jordanie, qui assurait la présidence de cette table ronde, a rappelé que la notion de handicap est devenue une notion qui sous-entend la solidarité et l’inclusion dans tous les milieux de vie et en particulier dans celui de l’éducation. Une éducation accessible aux personnes handicapées, ce sont des écoles accessibles, des enseignants solidaires et des parents encourageants, a-t-il estimé. La mise en œuvre de l’article 24 relatif à l’éducation de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées est complexe, a-t-il d’autre part souligné, rappelant les limites auxquelles les gouvernements sont confrontés dans son application. Il a ensuite donné l’exemple de son pays, la Jordanie, où le Haut Conseil des personnes handicapées a mis au point et lancé des normes académiques pour les personnes handicapées. Il a aussi insisté pour qu’une éducation de qualité soit fournie aux personnes handicapées.
Mme NOTHULANDO AGATHA MAYENDE-SIBIYA, Ministre chargée des femmes, des enfants et des personnes handicapées de l’Afrique du Sud, a déclaré que son pays s’était engagé en faveur d’une éducation inclusive et solidaire permettant la participation de tous ses citoyens sur une base d’égalité, ce qui inclut donc aussi les personnes handicapées. La suppression des obstacles à l’éducation a été examinée et les nouvelles normes à appliquer garantissent l’accès physique des enfants handicapés à l’école, a-t-elle expliqué, avant d’ajouter que l’Afrique du Sud appliquera graduellement des politiques promouvant la solidarité dans le cadre de politiques à long terme programmées sur 20 ans. Pour l’instant, une trentaine d’écoles ont été choisies comme modèles et pour servir de centres d’animation, a-t-elle expliqué. Elle a ajouté que son ministère avait mis en place un site Internet qui recense les informations disponibles
Mme MARIA SOLEDAD CISTERNAS REYES, membre du Comité des droits des personnes handicapées, a expliqué que l’article 24 de la Convention vise à élargir le contenu du droit fondamental à l’éducation en y incluant des éléments transversaux. Au cours du XXe siècle qui vient de s’écouler, on a inséré aux droits fondamentaux le caractère obligatoire et gratuit de l’éducation, puis les caractères culturels, religieux et linguistiques, a rappelé Mme Cisternas Reyes. Aujourd’hui, les éléments essentiels à incorporer à la Convention sont l’inclusion et la qualité de l’éducation. Lorsque l’on parle de solidarité et de droit à l’éducation, il faut comprendre la qualité de l’enseignement et les données pédagogiques appropriées, a précisé Mme Cisternas Reyes.
L’inclusion sans la qualité serait une apparence d’inclusion et, inversement, la qualité sans l’inclusion serait ségrégative, a souligné l’experte. Elle a donc averti qu’il fallait éviter la poursuite du seul objectif de l’accès des enfants handicapés à l’éducation sans rechercher la qualité. L’article 24 apporte un ajustement raisonnable entre l’adaptation nécessaire et le risque de tomber dans la discrimination, a-t-elle aussi expliqué. Mme Cisternas Reyes a par ailleurs souligné l’importance de la formation pédagogique initiale et continue des enseignants, afin de leur permettre ensuite de fournir une éducation spécialisée de qualité. Un instituteur handicapé formé pour enseigner aux handicapés est un plus, a-t-elle ajouté. Elle a aussi fait le lien entre le droit à l’éducation et l’article 8 de la Convention portant sur l’élimination des stéréotypes. Enfin, elle a appelé à encourager le financement privé pour améliorer l’inclusion.
Mme LINDA ENGLISH, parlant au nom de M. Robert Prouty, qui est à la tête d’Educational for All Fast Track Initiatives Unit de la Banque mondiale, a attiré l’attention sur la nécessité de mettre en place des plans de partenariat avec les gouvernements pour améliorer l’éducation des enfants handicapés. Notre organisation a fourni 2 milliards de dollars pour des projets à mettre en œuvre dans des pays à faible revenu, a-t-il signalé. Cela a conduit dans certains pays à une augmentation de 50% de l’accès de ces enfants à l’éducation, par rapport à la période antérieure. En outre, le nombre d’enseignants en Afrique a augmenté de 51%, a-t-elle indiqué. Elle a cependant expliqué que beaucoup de pays rencontrent des difficultés dans la mise en œuvre de leurs stratégies d’accès à l’éducation des handicapés, à cause notamment d’un manque de données. Il est en effet difficile de savoir qui ne va pas à l’école et pour quelle raison, a-t-elle fait remarquer.
Nous avons collaboré avec le Cambodge pour améliorer la base de données existant dans ce pays grâce à un système de tri tenant compte du handicap dont souffre un individu, a poursuivi Mme English. Elle a aussi indiqué que certains pays ont mis au point des programmes à l’attention d’enfants ayant un handicap visuel ou auditif. Mais il faut fournir des outils à ces pays, a-t-elle indiqué. Elle a donné, en exemple, les banques qui mettent des fonds à la disposition d’écoles d’ingénieur et d’universités. Il faut en outre arriver à mettre en place un système global de promotion de l’éducation pour tous qui implique réellement toutes les composantes de la société, a-t-elle préconisé.
M. MARKKU JOKINEN, Président de la Fédération mondiale des sourds et malentendants, qui s’exprimait dans la langue des signes, a mis l’accent sur l’importance de l’utilisation de ce langage codifié. La langue des signes représente pour les malentendants une langue parfaitement acceptable. Les enfants doivent l’apprendre, mais aussi leur parents. Pour permettre à l’enfant malentendant de s’épanouir, il doit pourvoir communiquer dans le langage des signes avec d’autres enfants qui sont dans la même situation que lui, a dit M. Jokinen. Mais, à travers le monde, combien d’enfants jouissent vraiment de ce droit fondamental? a-t-il demandé. En réalité, environ 90% des enfants vivant à travers le monde n’ont pas accès à l’éducation et beaucoup d’entre eux resteront illettrés au cours de leur vie, a-t-il affirmé, avant de plaider en faveur d’une approche bilingue utilisant à la fois la langue des signes et la langue nationale de chaque pays. Ceci permettrait aux enfants de s’ancrer dans leur milieu culturel et de s’épanouir, a-t-il estimé. Cette éducation bilingue se fait dans le cadre de filières d’éducation spécialisées, mais elle devait aussi pouvoir se faire dans le milieu scolaire classique, a ajouté M. Jokinen. Il a en outre invité l’auditoire à participer à l’heure du déjeuner à un événement culturel parallèle organisé en collaboration avec la Mission de la Finlande auprès de l’ONU.
M. SHYBE CHALKLEN, Rapporteur spécial des Nations Unies sur le handicap, de la Commission du développement social, a rappelé que l’exclusion des personnes handicapées des milieux d’éducation devait être interdite dans l’avenir. Il a ajouté que la tendance était à l’inclusion des enfants handicapés dans les écoles. Certains pays ont pris des mesures en ce sens avant même que la Convention n’existe, a précisé M. Chalklen, y compris des pays pauvres qui ont parfois fait des efforts considérables. Le rapporteur spécial a ainsi cité le Malawi, et a donné l’exemple de l’Afrique du Sud. Dans ce dernier pays, des lois ont été prises dans l’éducation à partir de 1996, bien avant que la Convention ne soit établie et adoptée, a-t-il expliqué. Il a évoqué l’existence de nombreux obstacles, qui expliquent la différence entre les intentions affichée au niveau du gouvernement et le caractère limité des réalisations. Il a cité comme obstacles le manque d’information et de ressources au niveau local, l’indifférence des enseignants, ou encore les difficultés à appréhender les aspects juridiques des textes. Si on veut vraiment mettre en œuvre l’article 24 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, il faudra étudier en détail tous les obstacles existants afin d’être en mesure de les surmonter, a conclu M. Chalklen.
Mme ANA PELAEZ, membre du Comité des droits des personnes handicapées, a indiqué son attachement au respect de la personnalité, de la dignité et du libre choix des personnes handicapées. La Convention donne des orientations sur ce que doit être la politique éducative de chaque État et suppose que les États parties révisent leur propre politique éducative pour la rendre conforme à ses termes, a rappelé Mme Palaez. Ceci suppose que ces pays aient des écoles normales qui assurent une éducation inclusive accessibles aux enfants handicapés, a-t-elle noté. Une éducation inclusive suppose le respect de la diversité humaine; il faut donc s’assurer que les enseignants aient une formation appropriée, a-t-elle préconisé. Mme Pelaez a aussi rappelé que les handicaps étaient de natures diverses, mais aussi que les ressources financières en faveur de l’éducation des handicapés sont insuffisantes. Elle a demandé que l’assistance internationale joue un rôle important en faveur des personnes handicapées.
Table ronde sur « la solidarité et le milieu de vie »
Cette table ronde porte sur l’examen de l’article 19 de la Convention et sur les moyens de le mettre en œuvre.
Aux termes de cet article 19, les États parties à la Convention « reconnaissent à toutes les personnes handicapées le droit de vivre dans la société, avec la même liberté de choix que les autres personnes », et prennent des mesures efficaces et appropriées pour leur « faciliter la pleine jouissance de ce droit ainsi que leur pleine intégration et participation à la société ». Aux termes de l’article 19 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, les États parties doivent en particulier veiller à ce que les handicapés aient la « possibilité de choisir leur lieu de résidence et où, et avec qui, elles vont vivre ». Aux termes de cet article les États parties doivent veiller que les personnes handicapées « ne soient pas obligées de vivre dans un milieu de vie particulier ». En outre, les personnes handicapées doivent avoir accès à des services à domicile ou en établissement, et à l’aide personnelle nécessaire pour leur permettre de vivre dans la société et de s’y insérer et pour empêcher qu’elles ne soient isolées ou victimes de ségrégation. Les services et équipements sociaux destinés à la population générale doivent être mis à leur disposition et adaptés à leurs besoins, est-il stipulé dans l’article 19.
Déclarations liminaires
M. ADAM KOSA, modérateur de la table ronde sur la solidarité et le milieu de vie, qui s’exprimait en employant la langue des signes, a estimé, « en tant que membre hongrois handicapé du Parlement européen », que, même si la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne fait partie, depuis 2009, du droit européen (les « acquis communautaires ») et oriente les politiques européennes, il faut attirer davantage l’attention sur le handicap dans le cadre de la responsabilité, en en distinguant le concept de celui de la dignité humaine et de celui des droits de l’homme. Il a signalé que la mise en œuvre de l’article 19 de la Convention en Hongrie, - cet article étant celui relatif à l’autonomie de vie et à l’inclusion dans la société-, n’était pas encore satisfaisante, du fait de ressources limitées. Il a cependant fait part des bonnes pratiques de son pays et souligné le rôle important joué par les organisations hongroises dédiées aux personnes handicapées et par le Parlement hongrois. Il a aussi appelé à traiter le problème social et démographique du vieillissement de la société en parallèle avec les questions liées au handicap.
M. MOHAMMED AL-TARAWNEH (Qatar), Directeur et Vice-Président du Comité des droits des personnes handicapées, a souligné l’importance qu’il y a de s’assurer que le droit des personnes handicapées de participer à la vie communautaire et de choisir leur lieu de vie est bien respecté et appliqué. Ce droit leur est souvent refusé, a-t-il regretté, expliquant que certaines personnes handicapées sont contraintes de vivre dans des institutions d’accueil. Il a dénoncé ce placement forcé des personnes handicapées dans des centres spécialisés et rappelé l’obligation qui incombe aux gouvernements, au titre de la Convention, de permettre aux handicapés de choisir leur lieu de vie et de créer des conditions favorables pour leur permettre d’exercer cette liberté de choix. Pour fournir à la personne handicapée les moyens de faire ce choix, l’État doit notamment mettre en place des services sociaux adaptés, a noté M. Al-Tarawneh. Il faut aussi favoriser l’intégration de ces personnes dans la communauté au sein de laquelle ils veulent vivre et encourager leur autonomie, a-t-il ajouté.
M. STEVEN EIDELMAN, Professeur au Département du développement humain et des études familiales de l’Université du Delaware, aux États-Unis, a affirmé que la Convention promeut la solidarité et reconnait le droit des handicapés à l’autonomie. Or, on ne fait pas partie d’une communauté quand on est placé dans une institution d’accueil qui réduit l’accès à l’extérieur et où les personnes handicapées sont séparées du reste de la communauté. Dans le monde actuel, de telles asiles et institutions d’accueil sont démodées, a ajouté M. Eidelman, qui a estimé qu’il existait toute une série de possibilités pour aider les personnes handicapées et répondre à leurs besoins. Il a estimé que, dans de nombreuses sociétés, les personnes handicapées vivaient dans leurs familles, ajoutant qu’il faut donc apporter à ces familles l’appui dont elles ont besoin pour éviter qu’elles ne placent leurs proches souffrant d’un handicap dans un asile. Il a estimé que, dans plusieurs pays, existent des modes de vie, des cultures et des stratégies et des méthodes efficaces, et il a demandé qu’on examine en premier lieu les avantages qu’elles représentent plutôt que leur coût.
Mme SENADA HALILCEVIC, Présidente de « Association for Self Advocacy » et membre du Conseil d’administration de l’ONG « Inclusion Europe », a présenté son expérience personnelle. Elle a expliqué que, du fait de sa situation familiale, elle avait passé l’essentiel de sa jeunesse dans des institutions. Après avoir réussi ses études secondaires, elle est retournée dans sa famille et a cherché un travail, sans pouvoir en trouver, et a dû retourner en institution, où elle n’était pas libre de ses décisions, qui étaient prises à sa place par le personnel de l’établissement. Elle a alors recherché des informations sur les moyens dont pourrait disposer une personne comme elle pour pouvoir quitter une telle institution, et elle a trouvé une association, qui lui permet désormais de vivre au sein de la communauté qu’elle a choisie. Au début, cela a été difficile, a déclaré Mme Halilcevic, qui a expliqué qu’elle avait eu beaucoup de choses à apprendre, mais a ajouté que, grâce à l’association qui l’assiste, elle a toujours pu trouver de l’aide, et qu’aujourd’hui, c’est elle qui décide de l’importance de l’aide dont elle a besoin. « Aujourd’hui, je me sens utile à la communauté », a poursuivi Mme Halilcevic, qui a expliqué travailler pour l’Association pour l’autopromotion, de Zagreb, qui s’adresse aux personnes ayant un handicap intellectuel. Chaque personne devrait pouvoir décider de son destin et avec qui elle va vivre, a-t-elle ajouté. Affirmant que sa vraie vie avait commencé à 30 ans, elle a déclaré que toutes les personnes placées en institutions devraient avoir la possibilité de vivre leur vraie vie.
Débat interactif
Au cours du débat portant sur les deux tables rondes, de nombreux États parties à la Convention ont fait part des efforts qu’ils déploient pour améliorer l’éducation des personnes handicapées, ainsi que leur intégration sociale et leurs conditions de vie en général.
La représentante du Kenya a évoqué la toute nouvelle Constitution de son pays, qui prévoit le droit fondamental des kényens à l’éducation, ceci y compris pour les enfants handicapés. De son côté, la délégation de la Serbie a signalé qu’une nouvelle loi sur l’aide à l’éducation a été élaborée conformément à l’article 24 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées. Le représentant des Émirats arabes unis a évoqué l’initiative de « l’école pour tous » lancé dans son pays.
De même, le représentant du Brésil a assuré que son pays est engagé dans l’éducation solidaire qui intègre les personnes handicapées. En Thaïlande, les personnes handicapées peuvent recevoir une éducation universitaire gratuite, a dit la délégation de ce pays. D’autres États Membres et parties à la Convention, comme l’Inde, le Soudan, le Qatar et le Malawi, ont signalé les lois relatives aux personnes handicapées qu’ils ont adoptées, afin d’assurer à ces personnes l’éducation, l’égalité des chances et la pleine participation à la vie sociale.
Le représentant de Saint-Marin a indiqué que son pays prépare une nouvelle loi-cadre pour intégrer la Convention. Il a proposé de procéder à un échange d’information entre les gouvernements sur les lois qui sont élaborées en la matière. L’Union européenne élabore quant à elle une stratégie 2010-2020 pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention, a indiqué son représentant.
Des mesures législatives ont également été prises au Chili, comme la loi sur l’égalité dont doivent jouir les chances des personnes handicapées. À la suite du tsunami, a ajouté la représentante chilienne, nous travaillons avec le Ministère du logement pour que les villes soient reconstruites en respectant l’accessibilité des personnes handicapées aux lieux publics et autres cadres de vie.
Le Canada a également pris des mesures pour améliorer l’accessibilité des personnes handicapées aux logements et aux transports, a expliqué la représentante de ce pays. Le Gouvernement canadien offre aussi des réductions d’impôts et des plans d’épargne aux personnes handicapées, a dit la délégation de ce pays. En Jamaïque, premier pays à ratifier la Convention, l’interdiction de conduire pour les sourds a été abrogée, a annoncé le représentant jamaïcain.
Des aides spéciales pour les personnes handicapées exclues socialement ont été conçues au Costa Rica, a indiqué la délégation de cet État partie à la Convention, avant de préciser que les familles qui accueillent une personne handicapée perçoivent une allocation. La représentante du Mexique a attiré l’attention sur l’importance des fonds destinés à aider les personnes handicapées, insistant pour que les gouvernements les mobilisent indépendamment des conditions économiques dans lesquelles se trouvent leurs pays.
Sur le plan de l’organisation de la société civile et des initiatives qu’elle peut prendre, le représentant de la Turquie a fait part du projet turc de créer une union internationale des personnes handicapées. Celui de l’Italie a invité les gouvernements à impliquer davantage les associations et organisations non gouvernementales à leur action en faveur des personnes handicapées.
En matière d’emploi, la délégation de l’Italie a signalé la création d’un centre chargé d’identifier les secteurs du marché du travail qui doivent être ouverts aux personnes handicapées. À Maurice, des lois ont été adoptées sur la formation des personnes handicapées et sur l’emploi, qui obligent certains employeurs à embaucher des personnes handicapées, a annoncé la délégation mauricienne.
Plusieurs pays, comme l’Allemagne et l’Afrique du Sud, ont indiqué mettre en œuvre l’article 19 de la Convention, relatif à l’autonomie de vie et l’inclusion dans la société. Cet article demande notamment que les personnes handicapées ne soient pas obligées de vivre dans un milieu de vie particulier. Expliquant que les institutions et centres d’accueil et d’hébergement de personnes handicapées non conformes à l’article 19 ont été fermés en Nouvelle-Zélande, la représentante de ce pays a cependant relevé que les services de placement au bénéfice des personnes handicapées existent toujours. La Suède a indiqué, pour sa part, avoir remplacé les institutions pour accueil d’handicapés par des mesures de prestation de services à domicile et des mesures résidentielles. La représentante du Nicaragua a souligné la nécessité de disposer de données sur le nombre de personnes souffrant d’un handicap, indiquant qu’une enquête sociale est en cours dans son pays.
Divers centres de services aux personnes handicapées ont été créés dans certains pays, notamment en République de Corée où le Gouvernement soutient 120 « centres pour la vie indépendante ». En Serbie, une loi en préparation prévoit la création de « centres de soins de jour » pour personnes handicapées. Avec 83 millions de personnes handicapées, la Chine a actuellement 3 000 « foyers du soleil » créés pour fournir des services aux personnes handicapés, qui reçoivent quotidiennement une centaine de personnes chacun.
Parmi les pays signataires de la Convention, les États-Unis ont signalé que le Département de l’éducation soutenait 450 « centres de vie indépendante » qui dispensent une formation aux personnes handicapées. Les enfants handicapés reçoivent en outre une éducation spécialisée gratuite. Au Niger, plus de 1 500 membres du personnel d’encadrement pédagogique ont été formés à l’éducation des personnes handicapées, a annoncé la délégation de ce pays.
Le représentant du Nigéria, autre pays signataire, a souligné le rôle des parents, qui ont la responsabilité d’envoyer leurs enfants handicapés à l’école au lieu de les conduire dans la rue pour faire mendier. Dans le même sens, un représentant de la société civile a appelé à former les parents à être des alliés de leurs enfants handicapés, plutôt que de chercher à les placer quelque part hors de la famille.
Les autres pays signataires de la Convention qui se sont exprimés étaient Israël, la Colombie et le Togo. Les panélistes ont ensuite rapidement répondu aux questions posées au cours du débat. À ce titre, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le handicap a relevé que beaucoup d’enseignants s’opposent à l’inclusion des personnes handicapées dans le système éducatif normal, car ils sont souvent mieux payés quand ils s’occupent de ces élèves dans des établissements spécialisés. Répondant à plusieurs questions sur les moyens de partager les meilleures pratiques, un représentant du Secrétariat a assuré que des recueils portant sur la question seraient bientôt disponibles.
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