CS/9987

Le Conseil de sécurité entend un exposé de M. B. Lynn Pascoe sur l’évolution positive du conflit frontalier entre l’Érythrée et Djibouti

20/07/2010
Conseil de sécuritéCS/9987
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Conseil de sécurité

6362e séance – matin


LE CONSEIL DE SÉCURITÉ ENTEND UN EXPOSÉ DE M. B. LYNN PASCOE SUR L’ÉVOLUTION POSITIVE DU CONFLIT FRONTALIER ENTRE L’ÉRYTHRÉE ET DJIBOUTI


Le représentant de l’Érythrée demande la levée des « sanctions injustes » contre son pays, alors que Djibouti en salue le rôle déterminant dans les développements récents


Le Conseil de sécurité a examiné, ce matin, la question du différend frontalier entre Djibouti et l’Éthiopie, à la lumière du récent accord conclu entre les deux pays pour demander la médiation du Qatar, et dans la perspective plus large du retour à la paix et à la stabilité dans la corne de l’Afrique.  Le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, M. B. Lynn Pascoe, a présenté le rapport du Secrétaire général* avant que les représentants de l’Érythrée et de Djibouti ne prennent brièvement la parole, le premier demandant la levée des sanctions imposées à son pays par la résolution 1907 (2009) du Conseil, le second  estimant que ces sanctions avaient, au contraire, contribué à la récente évolution positive de la situation.


Adoptée le 23 décembre 2009, la résolution 1907 (2009), avait imposé un régime de sanctions à l’Érythrée, qui ne s’était pas conformée à la résolution 1862 (2009) du Conseil de sécurité sur le différend frontalier l’opposant à Djibouti et qui avait joué un rôle déstabilisateur dans le conflit en Somalie. 


M. Pascoe a rappelé que le différend entre Djibouti et l’Érythrée avait émergé en mars 2008 à la suite du déploiement par l’Érythrée de troupes et d’équipements militaires à Ras Doumeira et sur l’île de Doumeira, deux localités administrées par Djibouti dans une zone où la frontière reste une ligne de facto du fait d’anciens accords coloniaux divergents. 


Il a ensuite donné des précisions sur l’accord conclu le 6 juin entre l’Érythrée et Djibouti sous la médiation du Qatar, par lequel les deux pays acceptent de résoudre leur différend frontalier par un accord négocié et confient au Qatar le soin de mettre en place un mécanisme destiné à faciliter la démarcation de la frontière.  Le texte de l’accord a été transmis au Conseil de sécurité par le représentant du Qatar dans une lettre datée du 7 juin**.  L’accord, a poursuivi le Secrétaire général adjoint, confie en outre au Qatar le soin de contrôler la frontière et de résoudre la question des prisonniers de guerre et des personnes disparues.  M. Pascoe a précisé que, dans une lettre datée du 9 juillet, le Premier Ministre du Qatar avait informé le Secrétaire général que les troupes érythréennes avaient retiré leurs forces des deux localités contestées, et que le Qatar avait déployé des observateurs militaires dans l’attente d’un accord final que les deux parties sont convenues de considérer comme définitif et contraignant.


M. Pascoe en ensuite rappelé que le Secrétaire général avait proposé les services des Nations Unies, au cas où les parties concernées le souhaiteraient. Faisant référence à une lettre adressée à M. Ban Ki-moon par le Président de l’Érythrée, M. Aferworki Isaias, le 24 juin, il a précisé que le Secrétaire général, dans sa réponse au Président Isaias, réaffirme son engagement à dialoguer avec lui  et son Gouvernement sur les différentes questions mentionnées dans la lettre.  M. Ban y réaffirme aussi qu’une paix durable et la stabilité dans la Corne de l’Afrique requièrent l’engagement constructif de toutes les parties prenantes de la région, y compris l’Érythrée, et qu’il faut adopter une approche globale de l’ensemble des différends, y compris celui du conflit frontalier entre l’Érythrée et l’Éthiopie.  Tout en se félicitant de l’évolution récente, M. Pascoe  a demandé à tous les États et autres parties concernées de collaborer pleinement avec les membres du nouveau Groupe de contrôle sur la Somalie et l’Érythrée, nommés le 1er juillet.  Le précédent Groupe de contrôle avait rendu son dernier rapport le 10 mars.


Le Représentant permanent de l’Érythrée auprès de l’ONU, M. Araya Desta, a présenté l’accord du 6 juin comme étant une étape importante.  Il a affirmé que son pays avait fait preuve de retenue et qu’il avait opté pour cette option, en tenant compte des relations amicales qu’il entretient avec le Qatar.  En ce qui concerne la Somalie, le représentant a assuré que son pays continuerait à œuvrer avec la communauté internationale dans la recherche d’une paix durable en Somalie, ajoutant que c’est dans cet esprit que son pays avait participé à la récente Conférence d’Istanbul sur la Somalie.  La communauté internationale, a estimé le représentant, doit fonder son action sur certains principes, précisant qu’il peut y avoir de solution militaire au conflit en Somalie et qu’un règlement durable ne pourra être réalisé que par le biais d’un processus politique inclusif, dirigé par les Somaliens et avec les Somaliens.


M. Desta a par ailleurs remercié le Secrétaire général d’avoir souligné la nécessité de mettre fin au conflit frontalier entre l’Érythrée et l’Éthiopie qui, a-t-il rappelé, a été résolu de façon pacifique, juridique et technique par la Commission du tracé de la frontière.  Il a relevé que la non-application de la décision de cette Commission continuait à susciter des problèmes dans la région, ajoutant que la question de l’occupation du territoire érythréen par l’Éthiopie devrait être réglée par l’application de l’Article 51 de la Charte de l’ONU et des dispositions pertinentes du droit international.  Il a regretté qu’au cours des huit dernières années, le Conseil de sécurité ait refusé de traiter le problème du refus de l’Éthiopie de mettre en œuvre la délimitation « définitive et contraignante » de la Commission, en date du 13 avril 2002, et sa décision de démarcation de novembre 2007 et a donc exhorté au Conseil d’assumer ses responsabilités et d’assurer le retrait des troupes éthiopiennes des territoires érythréens souverains.


Plaidant pour la levée des sanctions imposées à son pays qu’il a jugées injustes, le représentant de l’Érythrée a assuré que son gouvernement prenait très au sérieux les questions de paix et de sécurité.  Il a invité la communauté internationale à ne pas décourager son pays de participer à des discussions concrètes contribuant à une paix durable dans la région.  Dans une lettre en date du 30 juin***, adressée au Président du Conseil de sécurité, le Représentant permanent de l’Érythrée étayait cette même argumentation.


Au contraire, la représentante de Djibouti, Mme Kadra Ahmed Hassan, a estimé que les résolutions 1862 et 1907 du Conseil de sécurité avaient très clairement contribué à une évolution rapide sur le terrain, ajoutant que, sans cette prise de position ferme du Conseil, il est peu probable que le dernier rapport du Secrétaire général aurait eu la même teneur positive.  La résolution 1907, qui a imposé les sanctions, a été déterminante, a-t-elle affirmé.  Son gouvernement se réjouit que son appel ait été entendu, a-t-elle ajouté.  Affirmant que Djibouti désire conclure un accord durable sur le différend frontalier et clore la crise initiée par l’Érythrée il y a deux ans, la représentante a exprimé sa confiance dans leadership du Qatar pour parvenir à un accord.  Le chemin reste toutefois long et supposera un engagement indéfectible de chacun dans les mois à venir, a-t-elle averti, avant de remercier le Secrétaire général pour ses efforts.  Elle a conclu en souhaitant que son prochain rapport puisse souligner la même note positive.


* S/2010/327

** S/2010/291

*** S/2010/350


Rapport du Secrétaire général sur l’Érythrée (S/2010/327)


Ce rapport, établi en application de la résolution 1907 (2009), du 23 décembre 2009, par laquelle le Conseil de sécurité, suite à une demande de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et de l’Union africaine, avait imposé un régime de sanctions à l’Érythrée qui ne s’était pas conformée à sa résolution 1862 (2009) sur le différend frontalier l’opposant à Djibouti et pour avoir joué un rôle déstabilisateur dans le conflit en Somalie.  La résolution impose à l’Érythrée un embargo sur les armes, une interdiction de voyager et le gel des avoirs pour les hauts responsables politiques et militaires érythréens qui agissaient en violation de l’embargo sur les armes, fournissaient un appui aux groupes d’opposition armés déstabilisant la région ou entravaient l’application de la résolution 1862 (2009).


Par ailleurs, au 10 juin 2010, 26 États Membres avaient communiqué au Conseil des informations sur les mesures prises pour appliquer les sanctions prévues par la résolution 1907 (2009), qui confie le suivi de l’application des sanctions imposées à l’Érythrée au Groupe de contrôle sur la Somalie, dont le mandat a été élargi.  Dans son dernier rapport, daté du 10 mars 2010, le Groupe de contrôle indiquait que « l’Érythrée qui, pendant un temps, a beaucoup soutenu les groupes d’opposition armés » en Somalie, « semble avoir réduit son assistance militaire, mais elle continue d’offrir un appui politique et diplomatique, parfois même financier ».


Dans ses observations, le Secrétaire général relève que, malgré les positions qu’il a adoptées de longue date sur la Somalie et Djibouti, le Gouvernement érythréen a récemment « pris un certain nombre d’initiatives » pour engager un dialogue constructif avec les pays voisins et la communauté internationale.  Il a ainsi reçu des représentants du Comité des sanctions à Asmara à la fin avril et participé à la Conférence d’Istanbul sur la Somalie, le 23 mai. En outre, début juin, le Président érythréen Afwerki et le Président djiboutien Guelleh ont signé un accord visant à confier au Qatar une médiation pour tenter de régler le différend frontalier entre les deux pays, dont l’Érythrée niait jusqu’alors l’existence même. Le Secrétaire général se réjouit de ses développements, de même que des initiatives prises par l’Érythrée pour rétablir sa représentation au siège de l’Union africaine, à Addis-Abeba.  Il engage l’Érythrée à faire de même pour rétablir son affiliation à l’IGAD.


M. Ban Ki-moon se félicite en outre de l’approbation de la Déclaration d’Istanbul sur la Somalie par l’Érythrée, dans laquelle il voit « une rupture notable avec sa politique antérieure », qui consistait à contester la légalité et la légitimité du Gouvernement fédéral de transition et à exiger l’expulsion des forces de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM).


Le Secrétaire note que « la capacité de l’ONU de vérifier le respect par l’Érythrée de la résolution 1907 (2009) est très restreinte » et souhaite que le nouveau groupe de contrôle sur la Somalie et l’Érythrée qui sera créé en temps utile, pourra surveiller la mise en œuvre des mesures imposées par la résolution.


Tout en jugeant que l’évolution récente de la situation « représente un pas dans la bonne direction », le Secrétaire général exhorte le Gouvernement érythréen à intensifier ses efforts afin d’apporter la preuve qu’il se conforme à la résolution 1907 (2009) et applique les mesures concrètes qui y sont énoncées.  Il souligne en outre qu’une paix et une stabilité durables dans la corne de l’Afrique requièrent une approche globale du règlement des conflits interdépendants dans la région.  Il souhaite, à cet égard, des progrès dans la mise en œuvre de la décision de la Commission du tracé de la frontière entre l’Érythrée et l’Éthiopie et dans la normalisation des relations entre les deux pays.


Lettre datée du 30 juin 2010, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Représentant permanent de l’Érythrée auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2010/350)


Dans cette lettre, le représentant de l’Érythrée auprès de l’ONU dénonce comme une « injustice pure et simple » les sanctions imposées à son pays et ajoute que l’évolution de la situation ces derniers mois « montre qu’il n’existe plus aucun prétexte au maintien des sanctions ».  Le représentant y rappelle l’accord conclu entre l’Érythrée et Djibouti grâce aux efforts de médiation du Qatar, réitère la position de son pays concernant la Somalie et demande que soient appliquées les décisions de la Commission du tracé de la frontière entre l’Érythrée et l’Éthiopie.  Pour promouvoir la paix dans la corne de l’Afrique. 


Rapport du Coordonnateur résident et Coordonnateur humanitaire des Nations Unies  en Somalie (S/2010/372)


Dans son rapport sur les obstacles rencontrés dans l’acheminement de l’aide humanitaire en Somalie, concernant la période allant de mars à juillet 2010, le Coordonnateur résident et Coordonnateur humanitaire des Nations Unies en Somalie explique que l’accès des organisations humanitaires aux populations dans le besoin a subi des restrictions mais n’a pas été rendu impossible.  Des décisions prises localement par des acteurs non étatiques ont permis aux organisations humanitaires d’intervenir dans la majeure partie du centre et du sud du pays, mais l’absence d’autorisation systématique a limité l’éventail des interventions possibles.  Il mentionne aussi que des mesures d’atténuation visant la politisation et l’utilisation à mauvais escient et le détournement de l’aide humanitaire sont en place.  Pour les organisations humanitaires, le défi consiste à poursuivre l’élaboration de méthodes de distribution et de systèmes de contrôle adéquats, susceptibles de maintenir un niveau suffisant d’aide humanitaire.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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