CS/10107

« Un génocide est toujours en cours au Darfour », déclare le Procureur de la CPI devant le Conseil de sécurité

09/12/2010
Conseil de sécuritéCS/10107
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Conseil de sécurité

6440e séance – après-midi


« UN GÉNOCIDE EST TOUJOURS EN COURS AU DARFOUR », DÉCLARE LE PROCUREUR DE LA CPI DEVANT LE CONSEIL DE SÉCURITÉ


M. Luis Moreno-Ocampo déplore l’absence de coopération du Gouvernement soudanais

avec la Cour et accuse le Président Al-Bachir de « couvrir les crimes commis »


« La situation au Darfour n’est pas seulement une crise humanitaire, c’est également une attaque systématique contre une population civile. »  C’est ainsi que le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), M. Luis Moreno-Ocampo s’est adressé, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité.


Présentant son douzième rapport en application de la résolution 1593 (2005), le Procureur de la CPI a déclaré qu’« un génocide est toujours en cours au Darfour ».  « Comme je l’indique dans mon rapport, des centaines de civils ont été tués au cours des six derniers mois, des centaines de milliers de personnes ont été déplacées de force, et plus de 2 millions de personnes déplacées souffrent d’une forme subtile de génocide: le génocide par le viol et la peur », a précisé M. Moreno-Ocampo.  Ces armes, a-t-il dit, « sont silencieuses et échappent au radar des forces des Casques bleus et leur usage ne peut être stoppé par les organisations humanitaires ». 


Saluant la réaffirmation par le Conseil de sécurité de son engagement de mettre fin aux crimes contre les femmes et les enfants lors de sa réunion du 26 octobre qui commémorait l’adoption de la résolution 1325, le Procureur de la CPI a plaidé pour que ce texte soit mis en œuvre au Darfour.  M. Moreno-Ocampo a rappelé que l’un des chefs d’accusation retenus par les juges était le transfert forcé de civils.  « Par conséquent, en prenant en considération l’absence de conditions sur les retours volontaires, la nouvelle Stratégie pour le Darfour, établie par le Gouvernement du Soudan, doit être analysée avec la plus grande prudence ».  « La communauté internationale ne doit pas être partie prenante de ces crimes », a-t-il prévenu.


M. Moreno-Ocampo a également évoqué les plus récentes activités de la Cour pénale internationale concernant les affaires relatives aux crimes commis au Darfour dont elle est saisie.  Il a, en particulier, confirmé que la Cour avait pris la décision de délivrer un second mandat d’arrêt contre le Président du Soudan, M. Omar Al-Bachir, pour qu’il réponde aux chefs d’accusation de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. 


Il aussi fait savoir, qu’hier, la Cour pénale internationale avait tenu une audience pour la confirmation des chefs d’accusation visant des dirigeants des groupes rebelles ayant mené, en 2007, « l’attaque violente » contre les Casques bleus de l’Union africaine, dans leur base de Haskanita.  Cette attaque avait coûté la vie à 12 Casques bleus de la Mission de l’Union africaine au Soudan. 


« Pour le Bureau du Procureur de la CPI, les crimes contre les Casques bleus figurent parmi les plus graves qui relèvent de sa compétence », a-t-il dit, précisant qu’ils « affectent la vie de millions de civils placés sous la protection des soldats de la paix ».  Il a précisé que la Cour déciderait, le 17 février prochain, de confirmer ou non les charges.  « Le Bureau du Procureur s’attend à ce que les chefs d’accusation de crimes de guerre soient confirmés et le procès des deux accusés pourrait débuter en 2011 », a-t-il confié. 


« Je voudrais en outre confirmer que le Gouvernement du Soudan ne coopère pas avec la Cour et ne conduit aucune procédure nationale contre les responsables des crimes commis », a poursuivi M. Moreno-Ocampo. 


Il a renchéri en soulignant que, depuis 2005, les autorités soudanaises n’ont cessé de promettre qu’elles rendraient justice, en créant des mécanismes comme les tribunaux spéciaux ou procureurs, et ce, « tout en protégeant délibérément les auteurs de crimes ».  « Le Président Al-Bachir, selon les preuves établies par la Cour, donnent des ordres criminels pour attaquer des civils et détruire des communautés », a-t-il encore assuré, ajoutant « qu’en toute logique, le Président soudanais ne veut pas enquêter sur ceux qui lui obéissent ».  « Le Président Al-Bachir, par ses promesses de rendre justice, manipule la communauté internationale et couvre ses crimes », a-t-il affirmé. 


Le Procureur de la CPI a par ailleurs souligné qu’en matière de coopération, les parties au Statut de Rome insistent sur la nécessité d’assurer le respect des décisions de la Cour.  La présence de nombreux représentants d’États parties dans la salle du Conseil traduisent, a-t-il dit, leur « appui constant à la lutte contre l’impunité » des crimes dont connaît actuellement la Cour. 


« Tant que le Gouvernement soudanais n’ordonnera pas la cessation des crimes au Darfour, il ne sera pas possible de rendre justice », a fait remarquer M. Moreno-Ocampo.  Le travail juridique est réalisé mais « des crimes continuent d’être commis », a-t-il regretté.  « Le Président Al-Bachir et ses partisans déploient d’énormes efforts pour couvrir ces crimes et détourner l’attention de la communauté internationale, en annonçant de nouvelles stratégies », a-t-il lancé.  Le Procureur de la Cour a par ailleurs noté que les États parties s’acquittaient de leurs obligations en adoptant des politiques pour rompre tout contact avec des individus recherchés par la Cour.  « Le Président Al-Bachir a ainsi été exclu du récent Sommet Afrique-Union européenne », a-t-il relevé, en soulignant que les organisations régionales, « dont la Ligue des États arabes et l’Union africaine », ont un rôle crucial à jouer pour améliorer la situation humanitaire et assurer la stabilité le Soudan.  « Un dialogue approprié avec celles-ci est cruciale pour réaliser ces objectifs », a-t-il dit, avant de rappeler que l’exécution des décisions de la Cour incombe au Gouvernement du Soudan, et en dernier ressort, au Conseil de sécurité.


*     Le rapport sera disponible prochainement sur le site Web du Bureau du Procureur

http://www.icc-cpi.int/Menus/ICC/Structure+of+the+Court/Office+of+the+Prosecutor .


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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