FEM/1787

En prévision de la session de fond de l’ECOSOC, la Commission de la condition de la femme se penche sur le respect des engagements liés à l’émancipation de la femme

09/03/2010
Conseil économique et socialFEM/1787
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Commission de la condition de la femme

Cinquante-quatrième session

15e séance – après-midi


E N PRÉVISION DE LA SESSION DE FOND DE L’ECOSOC, LA COMMISSION DE LA CONDITION DE LA FEMME SE PENCHE SUR LE RESPECT DES ENGAGEMENTS LIÉS À L’ÉMANCIPATION DE LA FEMME


La Commission de la condition de la femme a organisé une table ronde, cet après-midi, sur la mise en œuvre des objectifs et engagements convenus sur le plan international en matière d’égalité des sexes et d’émancipation de la femme.  Le Président du Conseil économique et social (ECOSOC), qui a inauguré la table ronde aux côtés de la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a rappelé que ce thème sera aussi celui de l’examen ministériel annuel 2010 (EMA) de l’ECOSOC.


« Il est absolument essentiel de renforcer la détermination et le rôle moteur des responsables politiques », telle est l’une des recommandations formulées par le Secrétaire général dans son rapport sur l’« Examen de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing ».*  Cette recommandation a été réitérée aujourd’hui par les trois spécialistes de l’Asie et de l’Afrique qui ont pris part à la table ronde.


Dans son rapport, le Secrétaire général évoque plusieurs domaines qui méritent une attention critique, notamment la pauvreté, la violence contre les femmes ainsi que les droits fondamentaux des femmes et des filles.


Le Programme d’action de Beijing adopté en 1995 identifie 12 domaines critiques à savoir la pauvreté; l’éducation; la santé; la violence faite aux femmes; les femmes et les conflits armés; l’économie; la prise de décisions; les mécanismes institutionnels chargés de favoriser la promotion de la femme; les droits fondamentaux de la femme; les femmes et les médias; les femmes et l’environnement ainsi que la situation des petites filles.  La mise en œuvre du Programme a fait l’objet d’un premier examen en 2000 puis en 2005.


L’ECOSOC entreprend un examen ministériel annuel (EMA) depuis 2007.  Il évalue ainsi les progrès dans la réalisation des OMD et autres objectifs de développement et contribue à intensifier les efforts en la matière, en promouvant un échange des enseignements tirés de l’expérience et en recensant les pratiques et approches concluantes.


La session de l’EMA se compose de trois éléments principaux à savoir, un examen mondial du programme de développement des Nations Unies, un examen thématique et une série d’exposés présentés volontairement par certains pays sur leurs stratégies nationales de développement.


La Commission de la promotion de la femme poursuivra ses travaux demain, mercredi 10 mars, à partir de 15 heures.


*E/CN.6/2010/2


Table ronde d’experts sur les contributions à l’examen ministériel annuel de 2010 du Conseil économique et social: « Mise en œuvre des objectifs et engagements convenus sur le plan international en matière d’égalité des sexes et d’autonomisation des femmes »


Allocution de la Vice-Secrétaire générale


Inaugurant la table ronde, Mme ASHA-ROSE MIGIRO, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a déclaré que l’émancipation des femmes était l’un des piliers de l’ordre du jour de l’ONU.  Elle a estimé que des progrès importants avaient été réalisés en matière d’éducation, d’accès au marché du travail et de participation aux prises de décisions.  S’appuyant sur le rapport du Secrétaire général, elle a estimé que les États devaient cependant redoubler d’efforts pour promouvoir les droits de la femme.  Elle a notamment évoqué le problème de la violence faite aux femmes et le fait que les femmes représentent deux tiers des analphabètes du monde.


Mme Migiro a notamment appelé à l’adoption d’une « nouvelle génération de politiques », capables, en autres, de faire disparaître les stéréotypes.  Elle a aussi plaidé pour que les femmes soient davantage incluses dans les activités de consolidation de la paix après un conflit.  La Vice-Secrétaire générale a affirmé que la création d’une nouvelle « entité composite » de l’ONU chargée de la promotion de la femme serait une « occasion historique » pour les femmes.


Allocution du Président du Conseil économique et social


À son tour, M. HAMIDON ALI, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a indiqué que le thème de l’Examen ministériel annuel (EMA) du Conseil porterait sur la mise en œuvre des objectifs et engagements relatifs à l’égalité entre les sexes et à l’émancipation des femmes, en ajoutant que le travail de la Commission sera une contribution « essentielle ».  Le Conseil, a-t-il signalé, axera ses délibérations sur le postulat que l’égalité entre les sexes est un but en soi et un moyen de réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).


Le thème choisi sera l’occasion de réorienter les stratégies internationales, nationales et locales en matière de développement durable, de croissance économique équitable et d’émancipation des femmes.  Nous avons l’occasion de renforcer le caractère transversal des questions qui touchent les femmes et les filles et de les rattacher à l’ordre du jour du développement, a–t-il dit.


Après avoir signalé que cette année, un nombre record de 13 États présenteraient un exposé national volontaire au cours de l’EMA, M. Ali a estimé que la déclaration ministérielle qui sera adoptée à l’issue de cet événement devrait mettre l’accent sur les questions les plus pertinentes pour l’émancipation des femmes et l’égalité entre les sexes.


Exposés des intervenants et dialogue intéractif


À son tour, Mme GITA SEN, Économiste indienne, a cité Gandhi pour qui, la « pierre angulaire de tout progrès doit être basée sur l’amélioration des conditions de travail des plus démunis ».  Nehru, quant à lui, précisait que c’est l’évaluation des conditions sociales des femmes qui permet de connaître l’état général d’une société à un moment donné.  « Le progrès c’est l’émancipation des femmes », en a conclu la panéliste.  Elle a donc regretté que les indicateurs décrivent une évolution de la situation des femmes « difficile à saisir ».


« De 2004 à 2009, dans un grand nombre de pays, on note une réduction parfois très nette des disparités en matière de formation et de participation à la vie politique.  En revanche, s’est expliquée la panéliste, quand une crise mondiale survient, les écarts économiques, qui se sont, en outre, peu réduits au cours des 15 dernières années, s’aggravent de façon spectaculaire.  Pour la panéliste, « il est évident que la crise économique et financière internationale pèse essentiellement sur la situation des femmes ».


Ce constat, a-t-elle dit, fait ressortir le fait que la mondialisation n’aide pas les pays parmi les plus fragiles ou en proie à un conflit.  La mondialisation crée des barrières, y compris commerciales, qui ont des conséquences très néfastes sur la vie quotidienne des femmes et des mères de famille.  Ce que montre également la crise actuelle, c’est que la femme est en première ligne dans les pays en développement, notamment pour assurer chaque jour la sécurité alimentaire du ménage.  Mais lorsque la crise frappe, son statut s’effondre, son rôle se précarise brutalement et dramatiquement, menaçant l’équilibre familial et donc l’ensemble du tissu social.


Mme Sen a exhorté la communauté internationale, qui « a besoin de locomotives politiques, de chefs d’État qui prennent la question de l’égalité des sexes à bras le corps », à refonder son architecture de la parité en l’adaptant aux besoins réels des femmes.  Cette architecture doit être financée pour répondre efficacement aux défis en matière d’égalité, une problématique, nous le voyons, qui évolue en fonction des crises.


Concluant, la panéliste a mis l’accent sur la nécessité de changer le mode de fonctionnement des institutions de gouvernance mondiale, pour que les engagements, « réaffirmés à l’envi chaque année », soient enfin traduits en actes concrets.


Axant son intervention sur la lutte contre la pauvreté, en signalant une certaine stagnation dans les pays à faible croissance, Mme AGNES R. QUISUMBING, Chercheuse à l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, a vu un lien direct entre le problème de la faim et les inégalités entre hommes et femmes.  La faim prévaut notamment dans les pays qui ont des inégalités marquées entre les sexes.  Il faut donc fonder les politiques de réduction de la pauvreté sur la situation des femmes et donner la priorité aux ressources qui leur profitent directement.


Mme Quisumbing a évoqué les difficultés rencontrées lors de la réforme du régime foncier en Afrique subsaharienne, en insistant sur le caractère « vain » d’une telle réforme si les femmes ne sont pas informées de leurs droits.  La panéliste a parlé des bienfaits du microfinancement au Bangladesh, avant de s’attarder sur les programmes de transfert de trésorerie adoptés en Amérique latine.  Il faut, a-t-elle préconisé, une évaluation plus systématique des programmes gouvernementaux de lutte contre la pauvreté.  S’ils sont bien conçus, ces programmes sont capables d’influer substantiellement sur l’équilibre entre hommes et femmes.


Le « rôle déterminant » des femmes dans le règlement et la prévention des conflits a été souligné par Mme LEYMAH ROBERTA GBOWEE, Directrice exécutive du réseau africain « Femmes, paix et sécurité ».  Elle a estimé que l’adoption en 2000 de la résolution 1325 du Conseil de sécurité a contribué à cette importante prise de conscience du fait que les femmes ont leur mot à dire sur les questions de paix et de sécurité.  La panéliste a tout de même reconnu qu’en dépit de la résolution 1325 et des textes qui ont suivi, la volonté politique d’appuyer concrètement la contribution des femmes aux efforts de paix a fait défaut.


Elle a insisté sur le fait que les femmes pouvaient être utiles pour alerter les dirigeants de l’imminence d’un conflit; assurer la survie des communautés pendant les conflits eux-mêmes; et enfin accompagner les différentes phases de reconstruction préparant un retour à la normalité.  « Au Libéria, les femmes ont été actives dans ces trois phases et il en a été de même en Sierra Leone et en Somalie, a affirmé la panéliste.


La diplomatie internationale doit donc tenir compte des besoins des femmes dans les pays et régions troublés, en se basant sur l’expérience des femmes, a conseillé la panéliste.  « Tenons compte des formidables résilience et résistance des femmes africaines confrontées aux guerres sans fin », a-t-elle dit.  « Tenons compte aussi de ce qu’elles demandent au lendemain des conflits, à savoir la reconnaissance de leur rôle dans la mise en œuvre des accords de paix; le renforcement juridique de leurs droits et les moyens d’assurer leur protection; et une participation plus effective à la vie politique », a-t-elle exhorté.


La panéliste a demandé un appui financier accru aux initiatives sexospécifiques de consolidation de la paix et une responsabilisation plus poussée des femmes sur le terrain.  « Les femmes, qui sont les personnes qui paient le plus lourd tribut en temps de guerre, ne veulent plus se voir écartées des processus de relèvement une fois que les armes se sont tues », a-t-elle plaidé.


« Comment s’assurer d’une émancipation durable des femmes? », s’est d’emblée interrogée la représentante du Pakistan qui a notamment relevé l’impact disproportionné de la mondialisation sur les femmes.  Notant, à son tour, la persistance de législations discriminatoires, la représentante de l’Espagne, qui intervenait au nom de l’Union européenne, a voulu connaître la nature des mesures à prendre pour accélérer la réalisation de l’OMD 3 relatif à l’égalité entre les sexes.


Il faut commencer par ne pas appliquer des politiques de rigueur qui ont un impact négatif sur les femmes, a d’abord estimé la panéliste indienne.  Elle a plaidé pour la régulation des prix des produits de première nécessité avant de suggérer l’instauration d’un système d’audit de la parité dans la réalisation de tous les OMD.


L’importance d’une budgétisation sensible au genre a été soulignée par la Chercheuse à l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires qui a aussi souligné la nécessité de poursuivre la réforme des législations.


Dans ce cadre, la représentante du Mali a posé la question des quotas, en arguant que de nombreuses femmes s’y opposaient au motif qu’ils dépréciaient leur rôle.  « Les quotas jouent un rôle primordial pour changer les tendances », a affirmé la panéliste indienne pour qui, sans un tel système, il serait très difficile d’assurer la participation des femmes.


Renchérissant, la Directrice exécutive du réseau africain « Femmes, paix et sécurité » a estimé que l’imposition des quotas serait particulièrement profitable à la participation des femmes au maintien de la paix.  Elle a plaidé pour des mesures d’incitations pour augmenter les nombres de femmes dans les contingents de l’ONU.


Pour la représentante du Rwanda, il faut insister sur la responsabilisation dans la mise en œuvre des législations.  « Nous sommes sur le chemin de l’égalité, mais avançons-nous réellement », a-t-elle demandé avant que son homologue de la Thaïlande ne déplore l’absence de « dirigeants compétents ».


Peu de pays maîtrisent les différentes conventions des droits de la femme, empêchant ainsi leurs citoyens d’y avoir recours, a déploré, à son tour, le représentant de la Jordanie. Il faut d’abord résoudre ce problème avant d’adopter d’autres mesures sur l’égalité entre les sexes.


Rebondissant sur ce commentaire, la Directrice exécutive du réseau africain « Femmes, paix et sécurité », a reconnu que beaucoup de pays en voie de développement s’empressaient de signer des conventions internationales pour avoir accès à tout un éventail de subventions, sans pourtant avoir les moyens de mettre en œuvre ces textes.


S’interrogeant, entre autres, sur la pertinence ou pas d’une loi portant interdiction de l’excision, le représentant du Mali a pourtant reconnu le lien « direct » entre cette pratique et la capacité des femmes à revendiquer leurs droits.  Légiférer ne suffit pas.  Il faut pouvoir s’appuyer sur les communautés locales, a admis la Chercheuse à l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires.


De nombreux pays connaissant des difficultés à évaluer les retombées de leurs programmes d’égalité entre les sexes, la représentante du Sénégal s’est demandé quel rôle jouaient les organes d’appui technique.  D’autres délégations ont soulevé les questions de l’accès au microfinancement, des différences entre les milieux urbain et rural et de l’intégration du Programme d’action de Beijing dans les accords multilatéraux.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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