Les experts du Cedaw préoccupés par la persistance de " pratiques traditionnelles néfastes " en Guinée-Bissau et le manque d'accès des femmes à la justice
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Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
Quarante-quatrième session
903e et 904e séances – matin et après-midi
LES EXPERTS DU CEDAW PRÉOCCUPÉS PAR LA PERSISTANCE DE « PRATIQUES TRADITIONNELLES NÉFASTES » EN GUINÉE-BISSAU ET LE MANQUE D’ACCÈS DES FEMMES À LA JUSTICE
Les experts du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (Comité CEDAW), qui examinaient aujourd’hui le premier rapport combiné de la Guinée-Bissau, présenté avec 24 ans de retard, ont exprimé leurs préoccupations face à la persistance de « pratiques traditionnelles néfastes » et au manque d’accès des femmes à la justice.
La délégation bissau-guinéenne, qui était dirigée par Mme Iracema Do Rosário, Présidente de l’Institut pour les femmes et les enfants, a souligné, à maintes reprises, la détermination du Gouvernement à lutter contre toute pratique culturelle néfaste.
« Il est urgent de s’attaquer aux pratiques culturelles négatives », a notamment déclaré l’experte du Ghana, tout en notant que la société bissau-guinéenne était fortement ancrée dans une tradition qui veut que les femmes jouent un rôle subordonné et où le droit à la violence est reconnu à l’homme.
L’experte du Brésil a jugé « inacceptable » l’absence d’une loi sanctionnant les mutilations génitales féminines, tandis que sa collègue de l’Égypte, et Présidente du Comité CEDAW, a également porté son attention sur les problèmes provoqués par les mariages précoces et forcés, ainsi que certains tabous alimentaires aux conséquences nuisibles.
La chef de la délégation bissau-guinéenne a évoqué la promulgation de lois pertinentes et la création d’un comité institutionnel de lutte contre les pratiques traditionnelles néfastes, ainsi que la mise au point d’un ensemble de mesures en ce sens.
La délégation a notamment précisé que le mariage précoce était interdit par le Code pénal et que toute agression physique ou sexuelle était passible de sanctions. De nombreuses femmes rechignent cependant à porter plainte de peur d’être marginalisées au sein de leur communauté, a-t-elle indiqué.
De leur côté, les experts ont relevé que le taux important d’analphabétisme chez les femmes contribuait, lui aussi, à dresser un obstacle au recours judiciaire de ces dernières.
La délégation a ajouté que le rôle du pouvoir judiciaire était très réduit dans les régions rurales du pays et que les institutions judiciaires étaient entourées de nombreux tabous. « Le Gouvernement s’efforce, néanmoins, d’assurer le respect et l’efficacité du pouvoir judiciaire sur l’ensemble du territoire bissau-guinéen », a-t-elle assuré.
Les expertes d’Israël et du Kenya ont par ailleurs dénoncé l’existence de lois « extrêmement discriminatoires » au sein du Code civil bissau-guinéen. L’absence d’une loi sanctionnant la violence dans le mariage a également provoqué des commentaires de la part des experts.
« Vous semblez nous dire que nous avons besoin d’un nouveau Code civil », a réagi le Représentant permanent de la Guinée-Bissau, « et nous sommes d’accord avec vous ». Il a estimé que toutes les dispositions du Code civil de 1966 en contradiction avec la Constitution étaient non avenues, et a rappelé que l’article 25 de la Constitution bissau-guinéenne abolissait tout principe discriminatoire et garantissait le principe de l’égalité entre les époux.
En outre, malgré leur appréciation des importants défis auxquels est actuellement confronté ce pays, les experts n’en ont pas moins regretté le manque de statistiques et de données dans ce rapport initial qui combine les six rapports qu’aurait dû précédemment présenter la Guinée-Bissau. La délégation a expliqué que cette insuffisance avait été provoquée par la perte ou la destruction de nombreux documents lors des récents troubles et conflits civils.
Les experts du CEDAW et la délégation bissau-guinéenne ont également débattu des problèmes liés à la traite des enfants, à l’augmentation de la prostitution ou encore au taux important d’abandon scolaire chez les filles.
La Guinée-Bissau a ratifié la Convention CEDAW en 1985, sans émettre de réserves. Elle a également ratifié, en février 2008, le Protocole facultatif qui s’y rapporte. Chaque État partie à la Convention est tenu de présenter au Comité un rapport tous les quatre ans sur les mesures adoptées pour assurer la mise en œuvre des dispositions de la Convention sur le plan national.
Outre Mme Do Rosário, la délégation bissau-guinéenne était constituée de M. Mamdú Sanhá, Directeur du Cabinet du Ministre; M. Mário Augusto Ramalho, Conseiller principal de la Présidente de l’Institut pour les femmes et les enfants; M. Sidi Cassama, Coordonnateur du Cabinet chargé de la question du genre; Mme Osiris Ferreira, Conseillère juridique; et M. Emanue Fernandes, Directeur du Département juridique de l’Institut pour les femmes et les enfants.
Les experts du Comité CEDAW concluront les travaux de leur quarante-quatrième session vendredi 7 août, à partir de 16 heures.
* Le rapport paru sous la cote CEDAW/C/GNB/6 peut être consulté sur le site Internet à l’adresse suivante: www.un.org/womenwatch/daw/cedaw/.
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES
Présentationdu rapport unique valant rapport initial et deuxième à sixième rapports périodiques de la Guinée-Bissau ( CEDAW/C/GNB/6 )
Mme IRACEMA DO ROSÁRIO, Présidente de l’Institut pour les femmes et les enfants, a expliqué que les femmes représentaient environ 52% de la population bissau-guinéenne, laquelle est essentiellement rurale, et que le taux moyen de natalité était de 6,8 enfants par femme. Elle a également signalé que les mariages précoces ou forcés, ainsi que les mutilations génitales féminines étaient à l’origine de l’augmentation de la mortalité maternelle dans le pays. De plus, les femmes sont particulièrement frappées par le fléau du VIH/sida qui entrave également le développement du pays.
La représentante a rappelé que la Guinée-Bissau était l’un des pays les moins développés du monde, et a évoqué la dégradation constante des principaux indicateurs socioéconomiques du pays, ce qui entrave, entre autres, la mise en œuvre des objectifs du Gouvernement en matière de parité.
Après avoir passé en revue les principales étapes de l’instauration de l’indépendance dans le pays, Mme Do Rosário a indiqué que plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) avaient été créées pour subvenir aux besoins des femmes bissau-guinéennes. Il existe également un réseau de femmes parlementaires et une plate-forme pour les femmes en politique. Elle a indiqué que le processus de démocratisation se poursuivait dans le pays, en attendant le déroulement des élections municipales qui seront organisées prochainement.
Mme Do Rosário a ensuite indiqué que son pays avait ratifié le Protocole facultatif de la Convention en février 2008, et a assuré que le retard accumulé dans la présentation du rapport de la Guinée-Bissau ne se traduisait pas par une absence de mesures destinées à améliorer la situation des femmes bissau-guinéennes.
Un Ministère des affaires sociales et de la promotion des droits de la femme a été mis sur pied, et l’Institut pour les femmes et les enfants, qui a été créé en 2000, se charge de la mise en œuvre et de l’application de mesures destinées à protéger les droits des femmes et des enfants, a-t-elle dit. Des programmes de sensibilisation ont été lancés à l’attention des femmes du secteur informel, tandis qu’un plan courant allant jusqu’à 2013 a été lancé dans le but d’améliorer la situation socioéconomique des femmes et le respect de leurs droits.
La représentante a ensuite précisé que le retard pris dans la présentation du rapport avait été dû à un manque de ressources financières et humaines. Elle a affirmé que les mécanismes d’incorporation des dispositifs de la CEDAW dans la juridiction nationale du pays faisaient défaut, précisant cependant que le principe de l’égalité des droits des hommes et des femmes ne pouvait être violé par la Constitution ni par aucune des lois actuellement en vigueur dans le pays.
Mme Do Rosário a de même expliqué que le Gouvernement avait lancé des mesures de sensibilisation destinées à modifier le comportement de la population. Elle a également fait état du travail entrepris par les ONG pour lutter contre les mutilations génitales féminines et autres pratiques qui portent atteinte à la santé des femmes. Elle a souligné l’engagement du Gouvernement dans ce domaine. Le Parlement examine des projets de lois destinées à enrayer la traite des enfants et la violence sexuelle et sexiste, et des mesures destinées à augmenter le nombre de femmes dans le corps diplomatique ont également été mises sur pied. Le Gouvernement entend aussi améliorer l’accès des filles à l’éducation et des femmes à des programmes d’alphabétisation. Des programmes d’octroi de crédits existent également.
La représentante a ensuite déclaré qu’un plan national de santé publique avait été élaboré dans le but de mettre en place des infrastructures sanitaires dans l’ensemble du pays, mais que son application s’avérait difficile du fait du manque de ressources dont disposait le pays. Elle a par ailleurs indiqué que les femmes rurales pouvaient bénéficier de programmes de microcrédits, et qu’une aide juridique était également disponible. De plus, des programmes radiophoniques sur le respect des droits des femmes sont régulièrement diffusés.
Avant de conclure, Mme Do Rosário a de nouveau souligné le fait que les autorités bissau-guinéennes étaient particulièrement préoccupées par la question des mariages précoces, des mariages forcés et des mutilations génitales féminines.
Articles 1 et 2, relatifs à la discrimination et aux mesures politiques
Mme DUBRAVKA SIMONOVIĆ, experte de la Croatie,a demandé des informations sur les mesures prises pour mettre en œuvre la Convention, ainsi que sur le processus d’élaboration et d’adoption du rapport. Elle a demandé si ce processus avait été participatif dans le souci d’assurer la collaboration d’un certain nombre d’organisations, et si les ONG avaient été consultées. Elle a cité l’exemple de certains pays qui ont recours à des conseillers pour encadrer ce processus. Elle a demandé des précisions sur ce que la Guinée-Bissau avait entrepris pour mieux faire connaître la Convention, mentionnant les problèmes d’alphabétisation qui limitent sa diffusion.
Notant que la Constitution n’abordait pas la question de la discrimination fondée sur le sexe, elle a demandé si les articles 24 et 25 de la Constitution, relatifs aux discriminations en général, pouvaient s’appliquer à la discrimination fondée sur le sexe. Dans le même ordre d’idées, elle a souhaité avoir des précisions sur les dispositifs juridiques existants en matière de lutte contre la discrimination fondée sur le sexe.
M. CORNELIS FLINTERMAN, expert des Pays-Bas, a demandé si les articles 24 et 25 de la Constitution, relatifs à la discrimination en général, pouvaient être interprétés à la lumière de la Convention de la CEDAW. Comment le Gouvernement encourage-t-il le pouvoir judiciaire à lutter contre la discrimination fondée sur le sexe, a-t-il encore dit, en se demandant s’il ne serait pas préférable de mentionner dans la Constitution l’obligation pour le pouvoir judiciaire d’appliquer les normes internationales en matière de promotion de la femme. Il a demandé s’il existait des procédures gratuites permettant aux femmes de défendre leurs droits.
Mme VICTORIA POPESCU, experte de la Roumanie, a demandé ce que le Gouvernement de la Guinée-Bissau comptait entreprendre pour faire face aux dispositions de certaines lois et du Code civil, qui maintiennent les femmes dans une position défavorable en ce qui concerne l’héritage, le droit de participer aux échanges ou autres droits familiaux ou sociaux.
La représentante de la délégation a expliqué que le rapport de la Guinée-Bissau avait été soumis au Conseil des ministres pour approbation. En ce qui concerne les difficultés de promotion de la CEDAW liées au très faible taux d’alphabétisation, elle a précisé que la CEDAW était diffusée en langues locales et notamment en créole. Elle a déclaré que les articles 24 et 25 de la Constitution s’appliquaient aussi à la parité entre les sexes et l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. Elle a insisté sur le fait que ces principes devaient être appliqués partout en Guinée-Bissau.
Les autorités ont déjà pris diverses mesures pour appliquer la Convention, alors que plusieurs ONG s’attachent à protéger le droit des femmes avec le concours du Gouvernement de la Guinée-Bissau, a-t-elle encore affirmé. « Si nous avons conscience des obstacles qui se heurtent à la mise en place de la Convention, nous sommes conscients de l’urgence de promouvoir la place de la femme dans l’éducation, la santé et les activités économiques », a-t-elle ajouté.
Un autre membre de la délégation a indiqué que le rapport de la Guinée-Bissau avait été élaboré à l’issue d’un processus de consultation de toute la société de la Guinée-Bissau. Lorsque le Parlement adopte un traité international, il reconnaît tacitement les principes de ce texte, a-t-il précisé. Il a assuré que la Guinée-Bissau avait l’intention d’intégrer certaines dispositions de la CEDAW lors d’une prochaine révision de la Constitution. Il a précisé que toute personne pouvait s’adresser au Bureau du Procureur général pour déposer plainte face à une atteinte aux droits, y compris le droit des femmes. Il a dit le souci du Gouvernement d’adapter le droit colonial qui subsiste aux ambitions et nouvelles normes des textes internationaux. « Le droit colonial n’est pas notre droit même si ces textes figurent toujours dans les livres », a-t-il ajouté.
Article 3, relatif à la garantie des droits de l’homme et des libertés fondamentales
Mme VIOLETA NEUBAUER, experte de la Slovénie, a estimé que les informations contenues dans le rapport ne permettaient pas d’évaluer l’efficacité du système institutionnel mis sur pied pour garantir la protection des droits de la femme. Elle a souhaité avoir des précisions sur le mandat du ministère chargé du genre, ainsi que sur les ressources humaines et financières dont dispose l’Institut pour les femmes et les enfants. Elle s’est également interrogée sur la coordination des différents organes chargés du genre dans le pays, ainsi que sur l’existence de politiques destinées à promouvoir l’égalité entre les sexes et la mise en œuvre de la Convention.
La délégation a expliqué que le Ministère de la solidarité avait été créé dans le but de protéger, entre autres, les droits de femmes, et que cet organe était chargé de la mise en œuvre des politiques de protection sociale. De son côté, l’Institut se charge de la mise en œuvre de politiques sectorielles. Il a été mis sur pied dans le but de protéger et de défendre les droits des femmes bissau-guinéennes, par le biais, notamment, d’activités de sensibilisation, de formation et d’accès à des microcrédits.
Elle a convenu de l’importance d’accroître la compétence de cet Institut, et a prôné une meilleure coordination avec les ONG et les partenaires économiques du pays, ainsi qu’entre les secteurs formels et informels du pays. Il est important que toutes les agences assurent la mise en œuvre et le respect de la CEDAW, afin de garantir une plus grande participation des femmes à la vie publique du pays et l’amélioration de leur situation socioéconomique, a notamment dit la délégation.
La délégation a ensuite expliqué que chaque ministère disposait d’un point focal chargé de la parité et que des réunions et des sessions de formation étaient organisées régulièrement. Elle a également annoncé que le plan d’action du pays en matière de parité serait mis sur pied très prochainement.
Un autre membre de la délégation a précisé qu’à l’heure actuelle, le Gouvernement était uniquement en mesure de verser les salaires des employés de l’Institut. Cet organe dispose de 22 employés, dont quatre de haut niveau, et ses efforts sont destinés à toutes les femmes du pays, quel que soit leur niveau socioéconomique.
De plus, le Gouvernement rédige actuellement une politique destinée à tous les ministères, et des activités de formation seront également mises au point prochainement. La délégation a indiqué que le pays avait besoin du financement de ses partenaires économiques et de l’aide des ONG, afin de déployer des activités sur l’ensemble du territoire bissau-guinéen.
La délégation a précisé que les femmes rurales profitaient des efforts du Gouvernement, mais a précisé que le rôle du pouvoir judiciaire était très réduit dans les régions où elles vivent. Le Gouvernement s’efforce d’assurer le respect et l’efficacité du pouvoir judiciaire sur l’ensemble du territoire bissau-guinéen. En outre, une attention particulière est placée sur la sensibilisation de ces femmes, ainsi que sur des programmes de microcrédits et de santé reproductive.
Article 4, relatif aux mesures spéciales
Mme YOKO HAYASHI, experte du Japon, a regretté l’insuffisance dedonnées et statistiques, en notant des informations contradictoires dans le rapport de la délégation. Elle a noté une contradiction entre le fait de voir la Guinée-Bissau déclarer ne pas appliquer de mesures spéciales temporaires, tout en faisant état de mécanismes destinés à accélérer la mise en œuvre de l’égalité entre hommes et femmes. Elle s’est demandée si cette contradiction ne témoignait pas d’un problème de perception des termes « mesures temporaires spéciales ». Elle a souhaité obtenir des précisions sur le succès d’un programme d’alphabétisation lancé en 1997 par le Ministère de l’éducation à l’intention de 5 000 femmes. Elle a demandé des informations sur l’achèvement attendu du Plan d’action national en faveur des femmes.
L’experte de la Slovénie a demandé si le Plan d’action national envisageait des mesures temporaires spéciales, et quel était le rôle des ministères et instituts chargés des questions de la femme dans la mise en œuvre de ce Plan d’action.
Un représentant de la délégation a indiqué que la Guinée-Bissau ne souhaitait pas utiliser les termes de « mesures spéciales » pour des dispositions qui n’ont pas encore été transposées dans le droit interne. Il a reconnu l’insuffisance de statistiques, en l’expliquant notamment par la perte ou la destruction de nombreux documents lors des récents troubles et conflits civils. Il a cité les efforts de l’Office des statistiques pour reconstituer des données, tout en reconnaissant qu’elles n’étaient pas toujours fiables. « Nous avons bien conscience de l’importance des données statistiques », a-t-il encore ajouté, en assurant de la volonté de son pays de progresser dans ce domaine. C’est aussi pour cette raison, a-t-il insisté, que la Guinée-Bissau ne dispose pas de statistiques permettant de mesurer tout le succès du Programme d’alphabétisation de femmes, lancé en 1997 par le Ministère de l’éducation. Il a exprimé le souci du Ministère de la solidarité sociale et des institutions en charge des femmes et des enfants de collaborer avec le législateur pour mettre en place des quotas dans tous les organismes. Il a précisé que le fait qu’il y avait eu récemment 50% de candidates à des postes dans le système judiciaire témoignait de la volonté des autorités de respecter le principe de parité entre les sexes.
Questions de suivi
Mme PRAMILA PATTEN, experte de Maurice, a voulu savoir si les dispositifs de la Convention pouvaient être directement invoqués par les tribunaux du pays. De plus, les agents des forces de l’ordre reçoivent-ils une formation? a-t-elle demandé. Elle a également réclamé des précisions sur l’accès des femmes à la justice, notamment celles qui vivent dans les archipels du pays. Elle s’est également dite préoccupée par le fait que le Gouvernement n’envisageait pas de sanctionner les entreprises coupables de mesures discriminatoires à l’égard des femmes.
L’expert des Pays-Bas a demandé des précisions sur le processus de ratification du Protocole facultatif, ainsi que sur la réforme constitutionnelle du pays.
L’experte du Japon a estimé qu’il existait peut être un malentendu sur la définition des mesures temporaires spéciales. Relevant que le pays disposait de 10 femmes juges sur 30, elle a voulu savoir si ce n’était pas là le résultat d’une initiative gouvernementale.
L’experte de la Roumanie a demandé des précisions sur la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité.
L’experte de la Croatie a demandé des précisions sur le calendrier de réforme constitutionnelle.
La délégation a expliqué que la lettre de ratification du Protocole facultatif serait déposée auprès du Secrétaire général de l’ONU avant la fin de la session des travaux de la quarante-quatrième session de la CEDAW.
Elle a expliqué que la Guinée-Bissau disposait de tribunaux de première instance et de seconde instance, ainsi que de tribunaux régionaux, permettant ainsi de garantir l’accès à la justice pour l’ensemble de la population. Elle a cependant expliqué que les habitants des îles encouraient des frais de déplacement s’ils désiraient se rendre dans les tribunaux du pays. De plus, le tribunal du secteur de Bubaque a dû être fermé, faute de moyens, tandis que le manque de scolarisation des femmes entrave leur accès à la justice. La délégation a également souligné que les institutions judiciaires étaient considérées comme un tabou en Guinée-Bissau, et que le Gouvernement et les ONG entreprenaient un important travail de formation auprès de la population dans le but de le lever.
La délégation a également affirmé qu’un plan d’action aidait les femmes victimes de violence à avoir accès à la justice. Par ailleurs, la présence d’un nombre important de femmes au sein du système judicaire permettra également de mieux garantir la protection des droits de leurs consœurs.
Un autre membre de la délégation a précisé des ateliers d’information ont été organisés afin de sensibiliser la population à la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité, ainsi que sur les dispositifs de la CEDAW.
Article 5, relatif aux rôles stéréotypés
Mme NAÉLA MOHAMED GABR, experte de l’Égypte et Présidente du Comité, a invité la Guinée-Bissau à ratifier des textes internationaux de base, comme la Convention internationale sur les travailleurs migrants, ainsi que celle sur les personnes handicapées. Tout en notant l’utilité de certaines traditions, elle a demandé des précisions sur les initiatives législatives pour lutter contre les modèles culturels et pratiques traditionnelles néfastes aux droits des femmes. Elle a pris note de l’existence d’un comité institutionnel pour lutter contre les pratiques néfastes, comme le mariage précoce, les tabous alimentaires ayant des conséquences néfastes sur la santé des femmes et des enfants et les mutilations génitales.
Mme DORCAS COKER-APPIAH, experte du Ghana, a rappelé que la société de la Guinée-Bissau était fortement ancrée dans la tradition où les femmes jouent un rôle subordonné et alors que le droit à la violence est reconnu à l’homme. Elle a souligné que la tradition pouvait avoir un rôle dynamique et évoluer positivement. Elle a noté l’urgence de s’attaquer à des pratiques culturelles négatives par le biais d’une approche multidisciplinaire, afin d’aborder tous les aspects du problème. Elle a souhaité obtenir des précisions sur les efforts visant à lutter contre la violence à l’égard des femmes. Quelles sont les mesures pour sensibiliser l’opinion publique et les femmes sur leurs droits, et quels sont les services et ressources destinés aux femmes victimes de violence? a-t-elle encore demandé. Elle a également voulu des informations sur les résultats des campagnes de sensibilisation et des programmes d’éducation visant à limiter la domination de l’homme sur la femme.
Mme FERDOUS ARA BEGUM, experte du Bangladesh, a demandé des précisions sur les services et appuis accordés aux femmes victimes de violence.
L’experte de la Roumanie a demandé des précisions sur le rôle des médias en matière de lutte contre les stéréotypes. Elle a souhaité recueillir des précisions sur les efforts entrepris par l’Institut pour les femmes et les enfants et des ministères concernés pour que les medias ne reproduisent pas les stéréotypes sur les femmes. Elle a également demandé des informations sur la date de création, le financement et les activités du Comité de lutte contre les pratiques traditionnelles néfastes. Elle a demandé si la Guinée-Bissau disposait d’une définition officielle de la violence domestique et si le viol conjugal était considéré comme un crime. Qu’en est-il des femmes victimes de viols systématiques pendant le récent conflit? a-t-elle en outre demandé, en souhaitant des précisions sur les structures et moyens mis à disposition de ces femmes.
Une représentante de la délégation a fait état d’initiatives et d’un projet de loi en faveur des personnes handicapées. Elle a précisé que les handicapés étaient protégés par la loi et qu’ils recevaient une aide sous forme de médicaments, de vêtements et de matériels pédagogiques. Elle a déclaré qu’un plan national en faveur des handicapés devait être adopté pour les aider à mieux s’intégrer dans la société et dans la vie quotidienne. Elle a évoqué la promulgation de lois sur les pratiques néfastes et la violence à l’égard des femmes et des enfants, ainsi qu’un projet de loi sur la traite des êtres humains. En ce qui concerne les tabous, elle a cité un ensemble de mesures englobant le mariage précoce, le mariage forcé et la violence à l’égard des femmes, ainsi que la diffusion d’informations sur ces questions dans les zones rurales. Elle a souligné que les parents de filles mariées précocement étaient traduits en justice. Elle a, de même, mentionné la création de mécanismes judiciaires pour protéger les femmes. Elle a souligné le rôle essentiel des médias en matière de sensibilisation, tout en insistant sur l’importance des radios dans les zones rurales.
La délégation a indiqué que le Gouvernement s’efforçait de garantir l’éducation dans les familles, une bonne image de la maternité et une responsabilité commune des parents à l’égard de leurs enfants. De plus, une commission interministérielle de lutte contre la traite a été mise sur pied.
La délégation a indiqué que l’ensemble du Gouvernement coopérait pour éradiquer le mariage forcé. Des centres de refuge pour les victimes de viol n’existent pas encore, mais des institutions les aident, en revanche, à traduire les auteurs de ces actes en justice. Les radios communautaires sont fréquemment utilisées pour diffuser des messages de sensibilisation dans les différentes langues du pays. La délégation a indiqué, par ailleurs, que la Commission de protection de la santé des femmes n’existait plus, mais que le Gouvernement était conscient de l’importance de la remettre sur pied.
Un autre membre de la délégation a ensuite précisé que le mariage précoce était interdit par le Code pénal et que toute agression physique ou sexuelle était passible de sanction. Il a néanmoins indiqué que de nombreuses femmes ne portaient pas plainte par peur d’être marginalisées au sein de leur communauté. Il existe cependant des services d’aide destinés aux femmes victimes de violence.
Article 6, relatif à la prostitution
L’experte du Bangladesh a demandé des précisions sur les programmes en vigueur pour lutter contre la mutilation génitale et sur les aides pour reconvertir les personnes qui vivent de cette pratique.
Mme ZOHRA RASEKH, experte de l’Afghanistan, a noté que le rapport présentait peu d’informations sur l’ampleur du phénomène de la traite des femmes et les activités du Gouvernement relatives au quatrième pilier de cette lutte, à savoir la protection, la prévention et la poursuite. Elle a demandé si la Guinée-Bissau prévoyait une loi distincte sur la traite des femmes. Elle a souhaité des informations sur les initiatives en matière de formation des policiers et des douaniers pour lutter contre la traite des enfants et des femmes. Existe-t-il des centres d’accueil pour les femmes sauvées de la traite? a-t-elle encore demandé, en souhaitant des précisions sur la qualité des campagnes menées pour prévenir la traite.
Mme SAISUREE CHUTIKUL, experte de la Thaïlande, a demandé si la législation de la Guinée-Bissau faisait référence au Protocole de Palerme sur la traite des êtres humains. Elle a souhaité des précisions sur les initiatives prises face à la prostitution, notamment les actions menées contre la pauvreté, laquelle constitue la principale source de prostitution.
Un représentant de la délégation a indiqué qu’une directive relative à la Commission nationale de prévention de la traite des êtres humains venait d’être adoptée, en mettant l’accent sur la traite des enfants. Il a précisé que la première démarche de cette nouvelle stratégie avait consisté en une information des forces de l’ordre et de la police des frontières.
Il a souligné que la définition utilisée dans la législation de la Guinée-Bissau était celle du Protocole de Palerme, reconnaissant l’absence de législation spécifique à la traite des êtres humains, même si le Code pénal aborde la question de l’enlèvement. Il a affirmé qu’une législation était en cours d’élaboration et que son pays avait passé un accord avec la Guinée-Conakry afin de faciliter la coopération en matière de lutte contre la traite des êtres humains, notamment des enfants. Il a déclaré qu’aux termes de la législation de la Guinée-Bissau, aucun enfant ne pouvait quitter le pays sans l’autorisation des parents.
Le représentant a en outre évoqué l’existence de centres d’accueil temporaires pour les enfants qui ont été sauvés de la traite. Il a par ailleurs noté combien le grave problème des travailleuses du sexe s’était développé après la guerre du 7 juillet 1999. Il a fait état de l’organisation de séminaires et d’ateliers de sensibilisation, avec des résultats très concrets concernant les travailleuses du sexe. Il a dit que le succès de ces campagnes dépendait aussi de la capacité de ces femmes à trouver un autre emploi. Il a précisé que cette activité était désormais criminalisée.
Le délégué a assuré le Comité de la volonté de son gouvernement d’introduire les normes de la CEDAW dans la législation nationale. La chef de la délégation a, elle, indiqué que le projet de loi sur la traite n’avait rien à voir avec le projet de texte sur la violence domestique.
Questions de suivi
L’experte du Japon a demandé si la loi approuvée en 1997 était toujours en vigueur. Elle a souhaité obtenir des précisions sur la portée de l’ensemble des lois citées ce matin. Elle a demandé s’il s’agissait de projets de loi distincts ou d’un projet d’ensemble couvrant toute une variété de sujets.
L’experte du Bangladesh a demandé ce qui était fait pour limiter la demande en matière de prostitution, ainsi que des précisions sur les programmes de réintégration et de réinsertion à destination des survivants de la traite.
L’experte de la Roumanie a demandé si le viol et le viol conjugal étaient considérés par le Code pénal comme crimes. Elle a réclamé des précisions sur les mesures visant à réhabiliter les femmes victimes de viols systématiques pendant la guerre.
L’experte de l’Afghanistan a demandé des précisions sur les blocages existants face au projet de loi sur l’interdiction des mutilations génitales, notamment sur la nature des pressions exercées par des groupes religieux.
La chef de la délégation a mentionné la présentation de projets de loi à l’Assemblée nationale portant sur la lutte contre la violence domestique, sur la santé de la reproduction et sur la lutte contre la traite des femmes et des enfants. Selon elle, s’il n’y a pas de statistiques sur la traite des femmes, c’est notamment en raison des troubles civils récents. Elle a fait état des initiatives du Gouvernement en matière de lutte contre les mutilations génitales, en précisant que le Haut Conseil national de l’islam et le Groupe de la jeunesse islamique faisaient partie de la commission concernée. Elle a ajouté que le Gouvernement et les ONG étaient très préoccupés par tout ce qui affectait la santé des femmes et des enfants.
Un autre représentant de la délégation a indiqué que la législation de la Guinée-Bissau n’avait pas de définition de la violence dans le mariage. Il a assuré que les prochaines réformes intégreraient cette question.
Articles 7 et 8, relatifs à la vie politique et publique et à la représentation
Mme SOLEDAD MURILLO DE LA VEGA, experte de l’Espagne, a relevé qu’aucune ONG n’avait accompagné la délégation bissau-guinéenne, et a demandé des précisions sur la marge de manœuvre dont ces organisations bénéficient dans leur travail. Elle a également réclamé des informations sur le nombre de femmes parlementaires, et a estimé que les mutilations génitales féminines devaient constituer des infractions.
« Il est clair que l’évolution naturelle des femmes aux processus de prise de décisions politique et publique ne suffit pas, et qu’il faut des mesures précises », a déclaré, de son côté, Mme NICOLE AMELINE, experte de la France. Elle a demandé des précisions sur les quotas évoqués par la délégation, ainsi que sur les mesures destinées à encourager les femmes à présenter leurs candidatures lors des prochaines élections locales du pays.
Mme MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie, a encouragé la délégation bissau-guinéenne à avoir plus de femmes avocates, juges ou encore diplomates. Elle a demandé des précisions sur le quota de 40% de représentation féminine prévu par le Gouvernement. Après avoir félicité la délégation pour son courage, l’experte a estimé que les partis politiques du pays ne devaient recevoir des subventions gouvernementales que s’ils mettaient en œuvre les dispositifs de la CEDAW.
En réponse à la question de l’experte de l’Espagne, la délégation a signalé que la Ligue des droits de l’homme était présente dans la salle, et que les partenaires de la Guinée-Bissau avaient permis à la délégation de se rendre à New York. Elle a souligné qu’en raison de l’instabilité que connaissait le pays, il était d’autant plus important de permettre aux femmes d’occuper des postes de prise de décisions, car il avait été prouvé qu’elles contribuaient à la stabilité. La délégation a ensuite assuré que les femmes bissau-guinéennes présenteraient leurs candidatures en masse lors de la tenue des prochaines élections locales dans le pays.
La délégation a ensuite indiqué que la Cour suprême était dirigée par une femme, que de nombreuses femmes étaient juges dans les tribunaux secondaires et qu’elles étaient également présentes dans de nombreuses autres institutions judiciaires du pays. La représentante s’est dite convaincue que la Guinée-Bissau parviendrait à atteindre le taux de 40% de représentation féminine dans tous les bureaux et départements du Gouvernement. Elle a également souligné le rôle des partenaires financiers du pays, afin de permettre au pays de se stabiliser sur le plan politique, puis sur le plan économique.
Article 9, relatif à la nationalité
L’expert des Pays-Bas a estimé que la Guinée-Bissau n’avait pas déployé suffisamment d’efforts pour garantir l’égalité des femmes en matière de nationalité. Il a voulu savoir si la Guinée-Bissau reconnaissait la double nationalité, et a demandé des précisions sur la nationalité des enfants nés d’une mère bissau-guinéenne et d’un père étranger.
La délégation a expliqué que la loi sur la nationalité avait été adoptée en 1992 dans un contexte de démocratisation. Ce texte stipule que si un des parents est bissau-guinéen, l’enfant sera bissau-guinéen quel que soit son lieu de naissance. Cependant, si l’enfant n’est pas né sur le sol national, une demande de nationalité devra être déposée. De plus, le conjoint étranger d’un ressortissant de la Guinée-Bissau peut également être naturalisé. Enfin, toute personne née sur le territoire national peut être inscrite sur le registre national. La délégation a ensuite indiqué que le pays ne reconnaissait pas encore la double nationalité.
Article 10, relatif à l’éducation
L’experte du Japon s’est interrogée sur les contradictions relevées aux pages 20 et 49 du rapport concernant l’alphabétisation des femmes. Elle a demandé des précisions sur les mesures prises depuis 2002 en matière de scolarisation des enfants, notamment des filles.
Mme BARBARA EVELYN BAILEY, experte de la Jamaïque, a souhaité des précisions sur l’amélioration du taux de scolarisation des enfants, en s’inquiétant d’un taux d’achèvement extrêmement faible des études primaires des filles. Notant que 79% des enseignants étaient des hommes, elle a demandé ce que le Gouvernement comptait entreprendre pour favoriser le recrutement des femmes. Elle a regretté l’absence de données ventilées pour le secondaire, notamment en ce qui concerne la formation professionnelle.
La chef de la délégation a fait état de l’ouverture de cantines dans les écoles grâce au soutien du Programme alimentaire mondial (PAM). Tout en reconnaissant les freins que constituent certaines traditions face à la scolarisation des filles, elle a assuré que le Gouvernement ne ménageait aucun effort pour que toutes les filles puissent aller régulièrement à l’école. Elle a évoqué des campagnes de sensibilisation pour que toutes les filles et tous les garçons puissent être scolarisés. Elle a mentionné des cours d’alphabétisation des parents pour qu’ils comprennent mieux l’importance de l’école pour leurs enfants. Elle a précisé que 40% des enseignants étaient formés.
Article 11, relatif à l’emploi
L’experte de Maurice a regretté l’absence de données sur la situation des femmes sur le marché de travail. Elle a souhaité que le prochain rapport de la Guinée-Bissau soit l’occasion de mettre l’accent sur la mise en œuvre de garanties juridiques pour les femmes sur le marché de travail. Elle a demandé des informations sur les reformes envisagées pour garantir aux femmes les mêmes ressources qu’aux hommes. Notant qu’il subsistait une ségrégation horizontale et verticale sur le marché de travail, elle a demandé ce qui était fait pour promouvoir les femmes aux postes de fonctionnaires, dans des métiers qualifiés ou à des postes de responsabilité. Elle a noté les préoccupations exprimées par le Bureau international du Travail (BIT) à l’égard d’une déclaration du Gouvernement de la Guinée-Bissau estimant qu’il n’y avait pas de discrimination envers les femmes sur le lieu de travail. Elle a demandé des précisions sur les dispositions à l’égard du harcèlement sexuel sur le lieu de travail.
M. NIKLAS BRUUN, expert de la Finlande, a noté que dans le souci d’appliquer la Convention 111 du BIT, la Guinée-Bissau avait demandé une aide pour appliquer le principe d’« égalité de salaire pour travail égal » entre hommes et femmes. Citant la Convention 182 du BIT relative aux pires formes de travail des enfants, il a demandé si le taux important d’abandon de scolarité des filles était lié au fait qu’elles travaillaient surtout dans le secteur informel. Il a demandé ce que le Gouvernement comptait entreprendre pour faire face à cette situation.
La chef de la délégation a présenté les efforts entrepris par la Guinée-Bissau en citant l’adoption d’une loi sur la propriété agraire. Elle a assuré que son pays s’attachait à promouvoir la femme dans les domaines politique, social et de l’éducation. Elle a mentionné la référence que constitue le Document stratégique national de lutte contre la pauvreté. Un autre membre s’est dit encouragé par les recommandations du CEDAW pour la mise en œuvre de la Convention.
Article 12, relatif à la santé
Mme SILVIA PIMENTEL, experte du Brésil, a salué la franchise du rapport en ce qui concerne la santé des femmes. Elle a fait part de ses préoccupations au sujet des difficultés d’accès aux services sanitaires et a voulu savoir comment le Gouvernement comptait remédier à la situation. Elle a par ailleurs demandé si une fille violée par un membre de sa tribu risquait d’être expulsée de sa communauté et d’être contrainte à se prostituer. L’experte a également estimé que l’absence d’une loi sur les mutilations génitales féminines était inacceptable.
L’experte de l’Afghanistan a relevé qu’un rituel d’initiation avant la mutilation génitale féminine pouvait entraîner la mort des jeunes filles y participant, et a demandé des précisions sur les peines encourues lors de tels décès. Elle a également demandé des précisions sur les mesures destinées à mettre fin aux mutilations, ainsi que sur les services d’aide médicale dont bénéficient les jeunes filles en cas de complication. Elle a réclamé des informations sur les services d’aide psychologique.
Mme MAGALYS AROCHA DOMINGUEZ, experte de Cuba, a estimé que les informations contenues dans le rapport étaient exhaustives, mais manquaient de clarté. Elle a demandé des précisions sur la stratégie que comptait déployer le Gouvernement pour enrayer le taux élevé de mortalité maternelle de la Guinée-Bissau, qui est l’un des plus élevés de la région. Elle a notamment évoqué le manque de motivation du personnel médical, ainsi que la faiblesse générale des ressources. L’experte a également dit douter de l’efficacité des programmes d’éducation sexuelle de la Guinée-Bissau, relevant que peu de jeunes femmes utilisaient des contraceptifs.
La délégation a expliqué qu’il existait un plan national de développement sanitaire, tout en reconnaissant la précarité du système sanitaire de la Guinée-Bissau, notamment en matière d’équipement médical moderne. Elle a également indiqué que les programmes de planification familiale étaient entravés par la pauvreté.
La délégation a également expliqué que les auteurs de violence sexuelle étaient traduits en justice, et que les victimes bénéficiaient d’un appui psychologique. Le Gouvernement et les ONG exhortent également les familles de ses jeunes filles à ne pas les rejeter. Le Gouvernement s’est engagé à renverser la tendance actuelle en matière de violence sexuelle et les auteurs de mutilations génitales féminines sont traduits en justice. La délégation a indiqué qu’une législation en la matière devrait être prochainement adoptée et qu’une commission d’experts existait dans certaines régions du pays. Elle a cependant expliqué que cette commission n’avait qu’un seul véhicule à sa disposition, ce qui réduisait ses déplacements dans le pays.
La délégation a également souligné l’importance de procéder à des campagnes de sensibilisation pour veiller au bon déroulement des accouchements. Elle a affirmé que les mutilations génitales féminines pouvaient provoquer des décès au cours des accouchements. La Guinée-Bissau ne ménagera aucun effort dans le domaine de la santé et s’assurera que les traditions n’entravent pas l’accès des femmes aux soins, a-t-elle assuré.
Article 13, relatif aux prestations économiques et sociales
L’experte de l’Espagne a demandé si les femmes avaient besoin de l’autorisation du mari pour bénéficier de l’accès, par exemple, aux microcrédits. Elle a souhaité obtenir des précisions sur les initiatives du Gouvernement en matière de formation des femmes aux microcrédits. Elle a demandé des informations sur la réalité des contradictions subsistant entre la loi et la tradition dans le domaine des prestations économiques et sociales.
La chef de la délégation a indiqué que l’épouse n’avait pas besoin de l’autorisation du mari pour recourir à un microcrédit. Elle a fait état de la création d’une banque de solidarité nationale destinée à appuyer des projets en faveur des femmes et des enfants, et qui s’adressera particulièrement aux femmes d’affaires. Un autre représentant a indiqué que les prêts étaient octroyés aux femmes via des ONG, en notant des contradictions entre la coutume et la loi. Il a aussi évoqué l’existence de tabous et la méconnaissance de la loi et du droit civil. Il a reconnu la persistance de nombreuses pratiques qui contredisaient encore la loi. Il a précisé que l’octroi de microcrédits en échange de la scolarisation permettait, à terme, de lutter contre la pauvreté.
Article 14, relatif à la situation des les femmes rurales
Mme ZOU XIAOQIAO, experte de la Chine,a espéré que des informations ventilées seraient présentées dans le prochain rapport périodique de la Guinée-Bissau pour permettre au Comité de mieux mesurer la situation de la pauvreté en zone rurale et des femmes rurales. Elle a demandé si la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté contenait des mesures spéciales en faveur des zones rurales, notamment des objectifs spécifiques concernant les femmes seules ou vulnérables. Elle a demandé combien de femmes rurales avaient bénéficié de mesures de ce type depuis la mise en œuvre de la Stratégie. Elle a souhaité avoir des précisions sur le taux de scolarisation des enfants dans les zones rurales, sur les femmes illettrées, ainsi que sur les formations dispensées en direction des femmes rurales.
L’experte du Bangladesh a souhaité des éclaircissements sur les droits des femmes en matière d’héritage et le droit à la terre, ainsi que sur la situation des femmes âgées et handicapées et des femmes déplacées dans les zones rurales.
L’experte de la France a souhaité des précisions sur les conséquences de l’insécurité alimentaire. Elle a demandé des informations sur les stratégies envisagées par la Guinée-Bissau dans les zones rurales en matière de protection sociale et de santé. Elle a dit son inquiétude quant à la réalité du développement du trafic de drogues en Afrique de l’Ouest, en se demandant si la pauvreté ne risquait pas d’entraîner une partie de la population de la Guinée-Bissau vers ce fléau.
La chef de la délégation a mis l’accent sur l’importance du Plan national de développement de l’agriculture en matière d’accès à des centres de santé qui fournissent des soins gratuits. Elle a salué le rôle prépondérant des femmes dans la main-d’œuvre agricole. Elle a rappelé que les femmes menaient des campagnes agricoles et soutenaient les familles. S’agissant de la faiblesse des taux de scolarité des filles en zones rurales, elle a souligné l’importance des efforts du Gouvernement et des ONG de la Guinée-Bissau pour promouvoir la scolarisation et l’alphabétisation des femmes.
Un autre membre de la délégation a apporté des précisions sur la loi de la propriété foncière. Il a noté que la réalité de l’illettrisme n’aidait pas les femmes à prendre conscience de leurs droits.
Articles 15 et 16, relatifs à l’égalité devant la loi et au mariage et à la vie civile
Mme VIOLET TSISIGA AWORI, experte du Kenya, a évoqué l’article 25 de la Constitution qui garantit l’égalité des hommes et des femmes, mais a estimé que ses dispositifs juridiques manquaient de clarté. Elle a réclamé des précisions sur les dispositifs tendant à protéger les droits des femmes, au même titre que ceux des hommes. Elle a également relevé qu’une femme ne pouvait exercer une activité commerciale sans le consentement de son époux.
Mme RUTH HALPERIN-KADDARI, experte d’Israël, s’est dite surprise de l’existence de lois « extrêmement discriminatoires » au sein du Code civil bissau-guinéen. Elle a voulu savoir s’il existait plusieurs types d’union en Guinée-Bissau, et a réclamé des précisions sur le droit des veuves. Elle a estimé que la Guinée-Bissau semblait reconnaître les mariages entre enfants.
La délégation a expliqué que le mariage civil était le seul mariage reconnu par la loi, mais que les unions pouvaient de facto être également reconnues. Elle a précisé que l’âge minimum du mariage était de 18 ans, mais qu’une loi permettait l’émancipation de mineurs âgés de 16 ans. Dans ce cas, a-t-elle dit, le mariage de personnes émancipées de moins de 16 ans est reconnu. Elle a ajouté que le Code civil du pays était ajusté à la réalité actuelle du pays, mais ne pouvait être en contradiction avec la Constitution.
La délégation a ensuite expliqué que la coutume traditionnelle voulait qu’en cas de décès d’un époux, son frère ou son cousin pouvait « hériter » de sa femme et de ses enfants. Lorsque des veuves refusent un nouveau mari, elles sont expulsées de chez elles, a indiqué la délégation, qui a insisté sur l’importance de sensibiliser la population.
Dans le cadre de questions de suivi, l’experte du Japon a demandé si l’article 1686 du Code civil avait été aboli, alors quel’experte du Kenya a souhaité des précisions sur les initiatives concrètes prises par la Guinée-Bissau pour lutter contre les mesures discriminatoires contenues dans le Code civil
Le Représentant permanent de la Guinée-Bissau a reconnu que son pays avait besoin d’un nouveau Code civil. Il a estimé que toutes les dispositions du Code civil de 1966 en contradiction avec la Constitution étaient non avenues. Il a rappelé que l’article 25 de la Constitution s’imposait, en abolissant tout principe discriminatoire, et garantissait le principe de l’égalité entre les époux
Dans ses remarques de clôture, la représentante de la délégation a remercié le CEDAW d’avoir permis à la Guinée-Bissau, pour la première fois, de présenter les efforts réalisés dans la promotion de la femme. Faisant le point sur la situation des mariages forcés, des mutilations génitales, de l’exploitation des jeunes filles, de la traite des êtres humains, de l’accès des femmes aux prises de décisions et à la santé, elle s’est déclarée persuadée que son pays serait plus performant à l’avenir, grâce au soutien de toutes les femmes de la Guinée-Bissau. « Je pars avec la conviction », a-t-elle dit, que toutes les leçons apprises et que toutes les recommandations du CEDAW pourront être mises en œuvre dans l’intérêt de la Guinée-Bissau.
Dans ses conclusions,laPrésidente du Comitéa souligné l’importance des contacts entre les experts et la délégation pour faire face aux difficultés des femmes. Elle a estimé qu’il valait mieux que ce soit l’État partie qui rédige son propre rapport, plutôt que des consultants. Tout en étant consciente des difficultés de la Guinée-Bissau, elle a insisté que l’objectif final devait être l’adaptation de la législation nationale aux objectifs de la CEDAW. S’agissant des contradictions entre la tradition et le droit, elle a mis l’accent sur l’importance de la sensibilisation de toutes les couches de la société et de l’éducation des femmes rurales qui représentent la grande majorité des femmes du pays.
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