Le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, M. Edmond Mulet, avertit que des « progrès considérables » restent à accomplir au Darfour avant les élections de 2010
| |||
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York |
Conseil de sécurité
6227e séance – matin
LE SOUS-SECRÉTAIRE GÉNÉRAL AUX OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX, M. EDMOND MULET, AVERTIT QUE DES « PROGRÈS CONSIDÉRABLES » RESTENT À ACCOMPLIR AU DARFOUR AVANT LES ÉLECTIONS DE 2010
« La confrontation militaire est bel et bien finie et la paix a triomphé au Darfour », affirme, pour sa part, le représentant du Soudan devant le Conseil de sécurité
Des « progrès considérables restent à accomplir » dans les mois à venir pour que les élections nationales soudanaises prévues en avril 2010 aient un sens au Darfour, a déclaré ce matin devant le Conseil de sécurité le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, M. Edmond Mulet. « Les Soudanais savent ce qu’ils ont à faire », a-t-il ajouté, tout en prévenant qu’en l’absence de tels progrès, le scrutin « pourrait avoir des conséquences importantes pour la paix ». « Le défi pour le Conseil de sécurité, les Nations Unies et l’Union africaine est d’aider les parties à parvenir à une solution politique qui traite de ces questions », a estimé M. Mulet.
Le représentant du Soudan a affirmé, quant à lui, que « la confrontation militaire est bel et bien finie et que la paix a triomphé au Darfour ». Il a accusé les Nations Unies de présenter des rapports « non objectifs » et de mettre en avant des « incidents isolés » qu’il a minimisés. Convaincu que le processus politique « demeurait le seul moyen de résoudre la confrontation », il a estimé que le « seul maillon de la chaîne de paix » qui continue à faire défaut est « l’élan que pourrait donner le Conseil de sécurité » et l’« action immédiate » qu’il prendrait « contre quiconque refusant de s’engager dans le processus de paix ».
De son côté, le Médiateur en chef conjoint ONU-Union africaine pour le Darfour, M. Djibrill Bassolé, qui voit dans le scrutin de 2010 un élément clef de la paix, a jugé un accord politique nécessaire pour éviter que le processus électoral ne soit boycotté ou pris en otage.
RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN
Rapport du Secrétaire général sur l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (S/2009/592)
« Après près de deux années de présence au Darfour, la MINUAD a fait des progrès considérables vers un déploiement total », écrit le Secrétaire général dans son rapport soumis en application de la résolution 1881 (2009) du Conseil de sécurité et qui couvre exceptionnellement une période de quatre mois allant de juillet à octobre 2009. Il ajoute toutefois que la Mission continue de « faire face à d’énormes difficultés ».
Au 28 octobre 2009, la MINUAD comptait 14 638 militaires sur les 19 555 autorisés, 4 449 policiers, soit 69% de l’effectif approuvé, et 3 921 civils, soit 70% de l’effectif approuvé de 5 546, explique le Secrétaire général. La Mission, ajoute-t-il, se concentre « maintenant, plus que jamais, sur ses tâches essentielles » de protection des civils et de facilitation de l’acheminement de l’aide humanitaire. M. Ban précise que la Mission a, en particulier, « pris d’importantes mesures pour intensifier ses patrouilles », y compris de nuit, « maintenir une présence permanente dans les camps pour personnes déplacées et renforcer la capacité des pouvoirs publics et de la police du Darfour » de régler les problèmes liés aux violations des droits de l’homme, notamment les violences sexuelles et sexistes.
La MINUAD continue toutefois de se heurter à d’énormes difficultés, écrit le Secrétaire général. Il cite notamment les menaces croissantes contre le personnel international, y compris l’enlèvement, le 29 août, de deux membres du personnel international de la MINUAD. Il note la poursuite des activités militaires entre le Tchad et le Soudan et à l’intérieur du Darfour. Faisant état de « graves incidents » le long de la frontière qui ont impliqué, à plusieurs reprises, les Forces armées tchadiennes et soudanaises entre la mi-août et le début septembre, M. Ban « demande encore une fois » à toutes les parties de faire preuve de retenue, de cesser de soutenir les groupes rebelles au Tchad et au Soudan et d’œuvrer de bonne foi à l’instauration d’un climat de sécurité au Darfour.
Le Secrétaire général estime que, « compte tenu de la violence actuelle au Darfour, la libre circulation du personnel de la MINUAD et du personnel humanitaire est indispensable ». Il dénonce les « nombreux incidents » au cours desquels des agents du Gouvernement soudanais ont empêché des patrouilles de la MINUAD de passer ce qui constitue des « violations directes de l’Accord sur le statut des forces conclu avec le Gouvernement soudanais et un grave obstacle à la capacité de la Mission de s’acquitter de son mandat ».
Le Secrétaire général déplore aussi que « les parties au conflit n’aient pu s’engager en faveur d’un règlement global négocié de la crise », ajoutant que le processus politique au Darfour « a atteint un point critique ». Malgré « les efforts extraordinaires déployés par les principaux États et le Médiateur en chef conjoint », les mouvements ne se sont pas montrés disposés à s’unir et à engager des discussions de fond à Doha, constate M. Ban. Quant au Gouvernement soudanais, le Secrétaire général remarque qu’il « s’est déclaré prêt à entamer un processus politique » mais que « ses activités militaires au Darfour se poursuivent ».
Le fait que la Médiation met de plus en plus l’accent sur la société civile du Darfour « montre combien les mouvements et le Gouvernement sont peu disposés à aller de l’avant et combien elle estime que la population du Darfour doit être représentée » dans tout accord de paix futur, commente M. Ban. Le Secrétaire général ajoute que les efforts faits par la Médiation pour que les vues de la population du Darfour soient prises en compte dans le processus de paix « offrent une occasion cruciale pour assurer la plus large participation possible du peuple du Darfour aux prochaines élections ». Il demande au Gouvernement soudanais de « faire en sorte que tous les groupes au Darfour, en particulier les personnes déplacées, puissent y participer dans un climat caractérisé par la liberté d’expression et la libre circulation ».
M. Ban déclare que l’ONU procède à « un examen approfondi » du rapport du Groupe de haut niveau de l’Union africaine sur le Darfour, dont les recommandations ont été approuvées le 29 octobre 2009 par le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, afin « d’assurer un niveau de complémentarité aussi élevé que possible entre les travaux du Groupe et les activités de l’ONUau Soudan ». Il dit « attendre avec intérêt de pouvoir approfondir davantage le partenariat stratégique entre l’ONU et l’Union africaine ».
Par ailleurs, en application de la résolution 1881, le rapport présente un « plan de travail stratégique » assorti de repères destinés à mesurer et à suivre les progrès accomplis par la MINUAD dans l’exécution de son mandat. M. Ban explique que quatre domaines prioritaires ont été définis: mise en œuvre d’une solution politique globale; instauration d’un climat de sécurité et de stabilité; renforcement de l’état de droit, de la gouvernance et des droits de l’homme; et stabilisation de la situation humanitaire.
Le Secrétaire général précise ensuite les quatre hypothèses sur lesquelles se fonde l’aptitude de la MINUAD à mettre en œuvre ce plan de travail. Il faut d’abord que le processus de paix, mené sous la conduite du Médiateur en chef conjoint, se poursuive et aboutisse à la conclusion d’un règlement global du conflit au Darfour qui viendra compléter l’Accord de paix global. La deuxième hypothèse est que le Gouvernement soudanais poursuivra sa coopération avec la MINUAD et lui permettra de mener toutes les activités qui lui ont été assignées. La troisième hypothèse est que la communauté internationale continuera de fournir l’appui et les ressources nécessaires à la MINUAD. Enfin, il est présumé que les conditions de sécurité sur le terrain permettront à la Mission de poursuivre son déploiement et de fonctionner.
Déclarations
M. EDMOND MULET, Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, qui présentait au Conseil de sécurité le dernier rapport en date du Secrétaire général sur la MINUAD (S/2009/592), a insisté sur les entraves au travail de la Mission, sur la persistance de l’insécurité et sur le contexte politique dans la perspective des élections nationales prévues en avril 2010. Il a notamment demandé au Conseil de sécurité son « soutien » face aux « entraves significatives à la liberté de mouvement » auxquelles est constamment confrontée l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) de la part tant des autorités soudanaises que des mouvements rebelles. « Nous sommes déterminés à résoudre la question des entraves à la liberté de mouvement de la MINUAD de manière ouverte et transparente et en collaboration avec les autorités soudanaises », a précisé le Sous-Secrétaire général, tout en soulignant que les mouvements rebelles doivent être tenus aux mêmes obligations ». M. Mulet s’est en outre inquiété du morcellement des mouvements rebelles qui « demeure une réalité, avec des conséquences évidentes pour la médiation et le processus de paix ».
M. Mulet s’est également inquiété de l’inscription en cours sur les listes électorales en vue du scrutin de 2010, constatant que de nombreuses questions sont encore en suspens, y compris sur les résultats du recensement, la délimitation des circonscriptions électorales et l’achèvement du processus d’inscription. Il nous faut aussi un débat transparent et utile sur les conditions requises pour la tenue d’élections au Darfour, a ajouté M. Mulet, qui a rappelé que plusieurs groupes rebelles avaient exprimé des préoccupations sur la tenue d’élections avant que soit conclu un accord de paix. Dans ce contexte, a rappelé le Sous-Secrétaire général, le début du processus d’inscription, le 1er novembre, a provoqué un surcroît de tension dans plusieurs zones du Darfour. La MINUAD, a-t-il ajouté, travaille à répandre le message selon lequel « aucune violence visant à perturber la préparation du scrutin ne sera tolérée ».
De son côté, M. DJIBRIL YIPÈNÈ BASSOLÉ, Médiateur en chef conjoint ONU-Union africaine pour le Darfour, a souligné que la société civile avait un rôle important à jouer dans le processus de paix. « Son engagement sera crucial pour la promotion de la réconciliation intercommunale et pour débarrasser le Darfour des germes du conflit chronique qui affectent toute la sous-région », a-t-il fait remarquer. Pour M. Bassolé, la société civile doit être impliquée dans le règlement de toutes les questions à l’origine de la persistance de la crise au Darfour, la gestion des terres, la lutte contre les effets de la dégradation du climat sur les conditions d’existence des nomades, ou encore l’appréhension des nouvelles réalités sociales et politiques liées aux camps de personnes déplacées. Il a ensuite appelé le Gouvernement d’unité nationale à renforcer le processus de paix, en axant son action sur la réduction des tensions au Darfour, l’amélioration de la sécurité et l’accélération du développement. Il a également exhorté tous les belligérants à cesser les hostilités en mettant fin à l’impunité, aux prises d’otages, aux recrutements de combattants et à la circulation anarchique des armes.
« Au cours des prochains pourparlers, la Médiation encouragera les parties à établir un mécanisme de coordination avec la MINUAD chargé de faciliter la circulation en toute sécurité des biens et des personnes de part et d’autre du Darfour », a annoncé M. Bassolé. Le Médiateur en chef conjoint a par ailleurs souligné qu’il était important d’améliorer les relations entre le Soudan et le Tchad, de rétablir la confiance entre les deux pays afin de « réduire rapidement et de manière significative les tensions au Darfour ». Il a ainsi demandé au Conseil de sécurité d’encourager la poursuite des efforts diplomatiques menés par la Libye, le Groupe de contact de Dakar, le Qatar et la communauté internationale dans son ensemble pour rapprocher les deux États.
M. Bassolé a en outre déclaré que les élections générales de 2010 constitueraient un élément clef de la paix. La Médiation exhorte par conséquent les parties à la crise du Darfour à parvenir à un accord politique pour permettre la tenue d’élections qui renforceront « la démocratie, la paix et la stabilité au Darfour et dans tout le Soudan », a-t-il dit. Un tel accord politique, a-t-il précisé, est nécessaire pour éviter que le processus électoral ne soit boycotté ou pris en otage. « Je compte inviter le Gouvernement d’unité nationale du Soudan, y compris le Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan, à œuvrer aux côtés des parties lors des pourparlers qui se tiendront à Doha, notamment pour les convaincre de la nécessité que tous les Darfouriens participent aux élections de 2010 », a ainsi indiqué M. Bassolé.
Le Médiateur en chef a noté que le refus de certains mouvements armés de prendre part au dialogue politique et la persistance des divisions entre certaines parties ne devraient pas bloquer les efforts en cours pour instaurer une paix durable au Darfour. « C’est pourquoi, la Médiation soumettra bientôt aux belligérants des éléments de réponse pour une sortie de crise tenant compte des aspirations communes à l’ensemble des communautés du Darfour », a-t-il dit. « Avec l’appui des Darfouriens et l’assistance de la communauté internationale, il sera possible de faire des progrès significatifs vers une paix sociale durable au Darfour », a-t-il conclu.
La page de la confrontation militaire au Darfour « est bel et bien tournée et la paix a triomphé », a ensuite affirmé le Représentant permanent du Soudan auprès des Nations Unies, M. ABDALMAHMOOD ABDALHALEEM MOHAMAD. Insistant sur la volonté de paix du Gouvernement soudanais, il a affirmé que le processus politique demeurait le seul moyen de résoudre la confrontation actuelle. « Un seul maillon » de la chaîne de paix continue de faire défaut, à savoir l’élan que le Conseil de sécurité » pourrait donner ainsi que l’« action immédiate » qu’il prendrait « contre quiconque refusant de s’engager dans le processus de paix », a-t-il fait observer. M. Mohamad a affirmé que, « grâce à la coopération du Gouvernement soudanais » et à ses efforts conjoints avec les Nations Unies et l’Union africaine, un mécanisme tripartite avait été mis en place pour accélérer le déploiement de la MINUAD. Il a par ailleurs mentionné une « initiative importante » pour « normaliser les relations avec le Tchad, pays frère », et a assuré que le processus d’inscription dans la perspective des élections de 2010 se poursuivait « partout au Soudan, y compris au Darfour ».
M. Mohamad a également fait remarquer que le rapport du Secrétaire général indiquait que « la MINUAD a acquis sa pleine capacité opérationnelle depuis plus d’un an ». Insistant sur la « coopération illimitée » offerte par le Gouvernement soudanais, il a exprimé sa surprise en notant que le rapport du Secrétaire général « donne l’impression qu’il existe des obstacles » en se fondant uniquement sur des incidents « individuels et isolés qui pourraient se produire partout dans le monde ». Ce rapport « ne reflète pas la réalité » et met l’accent sur des « incidents isolés ou passagers » qui sont condamnés par le Gouvernement du Soudan, a souligné le représentant, qui a cité notamment l’enlèvement de deux membres de la MINUAD. La situation au Darfour en matière de sécurité « est calme et ne cesse de s’améliorer », a-t-il assuré, en insistant sur la nécessité pour les Nations Unies d’établir des rapports « objectifs qui servent la cause de la paix et qui ne visent pas, au contraire, à lui nuire », a-t-il conclu.
* *** *
À l’intention des organes d’information • Document non officiel