Les prochaines semaines seront déterminantes pour l’avenir du pays, déclare le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afghanistan
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Conseil de sécurité
6194e séance – matin
LES PROCHAINES SEMAINES SERONT DÉTERMINANTES POUR L’AVENIR DU PAYS, DÉCLARE LE REPRÉSENTANT SPÉCIAL DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL POUR L’AFGHANISTAN
Les membres du Conseil de sécurité demandent au futur Gouvernement afghan de faire preuve de « détermination » pour améliorer le sort de sa population
« Plusieurs décisions qui seront prises dans les prochaines semaines en Afghanistan seront déterminantes pour mettre fin à un conflit qui s’est intensifié ces derniers mois », a déclaré aujourd’hui le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afghanistan et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), M. Kai Eide, lors d’un débat au Conseil de sécurité, en présence du Ministre afghan des affaires étrangères. Ce dernier a demandé à la communauté internationale de ne pas délégitimer les institutions de son pays.
Les membres du Conseil ont, quant à eux, souligné la nécessité pour le futur Gouvernement afghan de faire preuve de détermination à agir rapidement en faveur de la sécurité, de la bonne gouvernance et du développement économique et social du pays, dans le cadre d’un « pacte » avec la population. De la qualité de ce pacte dépendra le soutien que lui apportera la communauté internationale, ont-ils fait valoir.
M. Eide a fermement défendu les élections présidentielles et locales qui s’étaient tenues le 20 août dernier, et a affirmé que les résultats définitifs du scrutin seraient rapidement fixés et certifiés. Tout en reconnaissant que des fraudes et des irrégularités électorales avaient été commises, il a insisté sur l’efficacité des systèmes de vérification ainsi que sur l’engagement de la population, malgré la campagne d’intimidation des Taliban. Dès que ces résultats seront certifiés, chacun devra les reconnaître, a ajouté le Représentant spécial, qui a rappelé que le futur Gouvernement afghan devrait s’atteler à un « immense programme » de renforcement des institutions afghanes et de développement du pays. Il a en même temps appelé les donateurs internationaux à adopter une approche à deux voies alliant projets à impact rapide et visible, pour améliorer le sort de la population, et projets à long terme. Pour l’instant, trop peu de ressources sont consacrées aux projets à long terme, a-t-il regretté.
S’il a reconnu « des cas d’irrégularité » lors des élections du 20 août, le Ministre afghan des affaires étrangères, M. Rangin Dãdfar Spantã, a souhaité qu’on se concentre sur la vision d’ensemble de ce scrutin, le premier organisé par les Afghans eux-mêmes, et il a averti que les éventuelles tentatives pour délégitimer les institutions auraient des conséquences négatives tant pour le pays que pour la communauté internationale. M. Spantä s’est prononcé en faveur d’une stratégie nationale inscrite dans la durée, qui repose sur les piliers de la sécurité, de la bonne gouvernance, du développement économique et de la coopération régionale et internationale. Cette stratégie, a-t-il ajouté, doit être marquée par une bonne répartition des compétences entre son pays et la communauté internationale et être suffisamment financée.
Lors du débat, les 15 membres du Conseil de sécurité se sont généralement félicités de la tenue des élections et ont rendu hommage au courage de ceux qui sont allés voter malgré les menaces. Conscients des fraudes ou irrégularités, plusieurs intervenants ont exprimé leur soutien aux mécanismes de vérification, à l’image de la représentante des États-Unis qui s’est en outre félicitée que les Afghans fassent confiance aux procédures de recours en contentieux électoral plutôt que de se livrer à des actes de violence.
Les orateurs ont également insisté pour que le futur Gouvernement afghan fasse preuve de détermination à agir rapidement dans un certain nombre de domaines prioritaires, parmi lesquels ont été cités le plus souvent la sécurité, la bonne gouvernance, le développement social et économique, les droits de l’homme et la lutte contre les stupéfiants. C’est en fonction de la capacité du Gouvernement à faire progresser le pays que la communauté internationale déterminera son appui, a averti le représentant du Royaume-Uni. Les représentants du Royaume-Uni et de la France ont rappelé leur proposition commune, à laquelle s’est associée l’Allemagne, d’organiser une nouvelle conférence internationale sur l’Afghanistan pour réexaminer le cadre des relations entre l’Afghanistan et la communauté internationale. Le Ministre afghan des affaires étrangères s’est rallié à cette proposition, en souhaitant que la conférence se tienne à Kaboul.
Mais le principal facteur entravant la réalisation de progrès en Afghanistan reste l’insécurité, comme l’ont rappelé, notamment, les représentants du Mexique et du Burkina Faso. Plusieurs intervenants ont mis l’accent sur la nécessité de renforcer les capacités de la police et de l’armée afghane pour que les Forces de sécurité nationales soient mieux à même de faire face aux insurgés. Sans aller jusqu’à affirmer, comme le représentant de la Jamahiriya arabe libyenne, que « l’élimination des Taliban ne doit pas être un objectif en tant que tel », plusieurs délégations ont admis, à l’instar du représentant de la Croatie, qu’il ne saurait y avoir de solution purement militaire.
Faisant écho au Ministre afghan des affaires étrangères qui estime que « l’Afghanistan appartient à tous les Afghans », le représentant du Japon a estimé que la réintégration et la réconciliation des insurgés représentent « l’un des éléments clefs » de la stratégie postélectorale. En revanche, le représentant de la Fédération de Russie s’est dit opposé à la radiation des noms des « Taliban repentis » des listes des Comités des sanctions du Conseil de sécurité. « Nous n’avons aucune garantie que ces individus ne retomberont pas dans leurs travers », a-t-il affirmé. « Seuls les Taliban qui déposent les armes et reconnaissent la Constitution et le nouveau Gouvernement afghans peuvent être pris en compte dans le processus de réconciliation », a-t-il précisé.
LA SITUATION EN AFGHANISTAN
Rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (S/2009/475)
Dans ce rapport trimestriel, en date du 22 septembre, le Secrétaire général revient sur l’élection présidentielle et les élections aux conseils de province qui ont eu lieu le 20 août et dont, rappelle-t-il, les résultats définitifs n’avaient pas encore été certifiés lors de sa publication. Par ailleurs, il juge impératif que la communauté internationale maintienne son engagement à long terme à l’égard de l’Afghanistan et demande une « modification décisive des rapports entre le Gouvernement afghan et la communauté internationale », ainsi qu’un « nouveau contrat » entre le Gouvernement qui sera issu des élections et la population afghane. Le rapport présente par ailleurs en annexe les objectifs et indicateurs de progrès en matière de gouvernance et renforcement des institutions, de sécurité, de développement économique et social, de droits de l’homme et de lutte contre les stupéfiants.
Rappelant que les élections du 20 août ont dominé la période à l’examen, M. Ban Ki-moon estime qu’il a été « incroyablement difficile » de les tenir « dans un pays plongé dans un conflit et ayant des institutions et des infrastructures fragiles, un taux d’analphabétisme élevé et 41 candidats présidentiels ». Pourtant, ajoute-t-il, le calendrier a été respecté, sauf en ce qui concerne le décompte des suffrages et les plaintes, la plupart des bureaux de vote prévus ont été ouverts et les opérations logistiques ont été couronnées de succès. Le fait que la Commission électorale indépendante afghane, principale responsable de l’organisation du scrutin, a pu ouvrir, équiper et doter de personnel des milliers de bureaux de vote dans le pays « a été un succès en soi », ajoute le Secrétaire général. En outre, poursuit-il, « les prédictions d’apathie de la part du public se sont révélées fausses, le public s’est engagé durant la campagne électorale et un débat s’est tenu au sujet de divers projets politiques ». La population afghane « nourrit un sentiment de frustration à l’égard des carences des institutions démocratiques, mais ne tient pas à les abandonner », commente M. Ban.
« Il est toutefois indubitable que le scrutin a été entaché d’irrégularités », ajoute le Secrétaire général, qui parle de « graves fraudes électorales » qui ont « sérieusement entravé la transparence des élections », « malgré la présence de garanties qui n’avaient pas existé durant les élections précédentes ». Il attribue l’origine de ces fraudes « essentiellement mais non exclusivement » au manque d’accès à certaines parties du pays, en particulier le sud, du fait d’une « campagne d’intimidation menée par les Taliban ». M. Ban estime toutefois que les mécanismes contre les fraudes ont « pu détecter une grande partie des irrégularités », et ajoute que les institutions, telles que la Commission du contentieux électoral, « ont pu faire face à ces problèmes ». Il rappelle notamment que la Commission électorale indépendante, qui l’avait demandé, mène un audit et recompte les bulletins dans les bureaux de vote où il existait des indices d’irrégularités graves. « Il est important que le temps et les moyens nécessaires soient accordés à ces activités afin de respecter la loi », ajoute le Secrétaire général qui estime que lorsque l’ensemble du processus électoral sera achevé, il sera « d’une importance capitale que les résultats soient acceptés par tous ».
La formation d’un nouveau gouvernement sera « la première étape essentielle » sur la voie d’une « modification décisive des rapports » entre le Gouvernement afghan et la communauté internationale, affirme le Secrétaire général. « Le Gouvernement afghan doit être plus proche de sa population », déclare M. Ban, qui ajoute qu’il « devra montrer qu’il a la volonté et la capacité » de faire face aux principales préoccupations de celle-ci, notamment en matière de sécurité, d’état de droit et de développement économique et social durable. Ce « nouveau contrat » et la capacité du Gouvernement afghan à jouer son rôle « de manière plus efficace et plus convaincante » contribueront à consolider le partenariat entre le Gouvernement afghan et la communauté internationale, poursuit le Secrétaire général.
M. Ban juge « impératif » que la communauté internationale maintienne son engagement à long terme à l’égard de l’Afghanistan. Il lui demande d’appuyer énergiquement les programmes permettant à l’Afghanistan « d’assumer pleinement ses responsabilités en tant qu’État souverain, afin de faciliter un processus de paix sans laissés pour compte et de donner forme au statut de l’Afghanistan dans la région ». Rappelant que, malgré l’intensité du processus électoral, la dynamique a été maintenue dans un certain nombre de secteurs essentiels tels que le renforcement des institutions de sécurité, des entités financières et du secteur agricole, il demande aux donateurs de consacrer suffisamment de ressources et d’attention aux activités à impact élevé qui pourront améliorer durablement la qualité des institutions et les perspectives de développement économique. Il estime que la coordination des donateurs s’est améliorée et « note une volonté plus grande de s’unir derrière des programmes et des politiques ». Toutefois, ajoute-t-il, il reste encore beaucoup à faire pour que le Gouvernement afghan et la communauté internationale s’alignent sur une stratégie clairement définie et fondée sur un ordre de priorité.
Déclarations
M. KAI EIDE, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afghanistan et Chef de la MANUA, qui a présenté le rapport du Secrétaire général, a affirmé qu’une série de décisions déterminantes pour mettre fin au conflit seront prises, dans les prochaines semaines, en Afghanistan. Le conflit est devenu plus intense ces derniers mois, a-t-il ajouté, en faisant remarquer qu’il n’allait pas annoncer des choses nouvelles. Ce qui a été dit et redit au sein du Conseil de sécurité et ailleurs reste souvent à mettre en œuvre, a-t-il dit.
Bientôt, les résultats définitifs des élections du 20 août seront fixés et certifiés, a déclaré M. Eide. Certes, a-t-il reconnu, il y a eu des fraudes et des irrégularités et la participation a été faible, « presque aussi faible que lors des élections au Parlement européen », a-t-il ironisé. Mais, l’Afghanistan est un pays de conflit et où une longue et intense campagne d’intimidation a été menée contre les électeurs, a-t-il rappelé, faisant observer qu’il n’y avait jamais eu autant d’incidents depuis 2002 que le jour du scrutin. Il a rappelé l’engagement de la Commission électorale indépendante et des Forces de sécurité pour assurer l’accès aux bureaux de vote dans un pays qui n’est pas seulement en conflit mais qui, en outre, dispose d’infrastructures et d’institutions faibles et d’une population largement illettrée confrontée aux bulletins de 41 candidats. Le Représentant spécial a insisté sur l’engagement de la population: ce n’est pas l’apathie de celle-ci qui a limité la participation mais l’intimidation, a-t-il insisté.
Il y a deux semaines, beaucoup pensaient que le processus électoral échouerait et pourtant il a été remis sur les rails, a affirmé M. Eide. Grâce aux efforts de la Commission électorale indépendante, de la Commission de recours et à l’assistance d’experts étrangers qui effectuent un audit de l’élection, le processus est conforme aux normes internationales, a-t-il assuré. Il nous permettra de parvenir à un résultat crédible rapidement, ce qui signifie qu’un éventuel second tour pourra être organisé avant l’hiver, évitant ainsi une longue période de vide politique ou d’instabilité, a affirmé le Représentant spécial. Pour M. Eide, le défi consiste à rejeter les votes frauduleux, tout en évitant de disqualifier les électeurs qui ont voté de bonne foi.
Quand le processus électoral sera déterminé, il devra être respecté par tous, a déclaré M. Eide qui a affirmé que ce que les Afghans veulent désormais, c’est voir ce processus s’achever, un gouvernement formé et leur vie améliorée. Il a souhaité la nomination d’un gouvernement qui inspire le peuple afghan et lancera ainsi un signal important à la communauté internationale et aux donateurs. « Nous ne pouvons pas permettre que les seigneurs de la guerre et autres « faiseurs de rois » continuent de contaminer les institutions », a souligné M. Eide. Cela prendra du temps, a-t-il reconnu, mais il doit être clair pour les pouvoirs régionaux qu’ils ne seront plus autorisés à s’opposer à un Afghanistan cohérent, y compris par des moyens non démocratiques ou illégaux. Il doit être clair que l’alternative à la coopération sera pour eux la marginalisation, a ajouté M. Eide.
Le second défi pour le futur président sera d’adopter un ordre du jour qui corresponde aux aspirations du peuple afghan, a poursuivi le Représentant spécial. Il nous faut un nouveau pacte entre le Gouvernement afghan et son peuple, a-t-il déclaré, en citant entre autre nécessité une meilleure gouvernance locale et la lutte contre la corruption, ainsi que le renforcement de l’état de droit.
Un tel pacte sera la pierre angulaire de l’engagement renouvelé de la communauté internationale, a affirmé M. Eide qui a dit s’interroger souvent sur la nécessité d’imposer des conditions à l’assistance. Cette conditionnalité existe de facto, a-t-il estimé, affirmant que c’est en fait dans les pays des donateurs ou fournisseurs de contingents que la décision sera prise, et pas dans les instances internationales. Le futur Gouvernement afghan doit comprendre cette réalité, a-t-il ajouté.
D’importantes décisions doivent être prises par la communauté internationale, a poursuivi le Représentant spécial, qui a rappelé que le général Stanley McChristal avait présenté sa propre évaluation en matière de sécurité, qu’il a jugée « claire, directe mais exigeante ». Il a salué le fait que le général McChrystal ait insisté sur la sensibilité culturelle. Refusant d’entrer dans le débat sur la nécessité de troupes étrangères supplémentaires, il a en revanche jugé nécessaire de renforcer à l’avenir les Forces de sécurité afghanes, de mieux les entraîner et de mieux les équiper. Mais il ne s’agit pas seulement de chiffres, a déclaré M. Eide, qui a rappelé que le taux d’abandon dans la police afghane est de 20 à 25%. Les efforts d’équipement ne peuvent être le fait des seuls États-Unis, a, par ailleurs, affirmé le Représentant spécial, qui a appelé à un élargissement de cette assistance.
M. Eide a déclaré qu’il faudrait « un immense programme » de renforcement des institutions afghanes, affirmant qu’un quart des gouverneurs de district n’ont même pas reçu une éducation primaire et que, dans des proportions comparables, ils ne disposent ni d’un bureau ni d’un véhicule.
M. Eide a dit comprendre l’impatience de la communauté internationale à voir des résultats en matière de développement économique après tous les investissements consentis. Il a prôné une approche à deux voies, avec des projets réalisables qui améliorent rapidement et visiblement le sort de la population, y compris dans les zones de conflits, mais aussi des projets à long terme. Pour l’instant, trop peu de ressources sont consacrées aux projets à long terme, a-t-il regretté. M. Eide a rappelé qu’il avait lui-même présenté des projets dans les secteurs des transports ferroviaires et de l’électrification. Il a demandé une simplification des structures institutionnelles afghanes par la bureaucratie, qu’il juge trop rigide.
Concernant la réconciliation nationale, M. Eide s’est dit convaincu que les efforts de « réintégration », doivent relever d’un processus élaboré par les Afghans. Il a ajouté que la notion de « Taliban modérés » est trop simpliste et qu’il faudrait mieux analyser l’insurrection. Certains sont certes irrécupérables, a-t-il estimé, mais il existe aussi des insurgés qui ont rejoint le mouvement parce qu’ils se sentent aliénés. Une approche simpliste ne réussira pas, a-t-il affirmé.
M. Eide a affirmé que cette année encore, les zones de culture de l’opium se sont réduites et le nombre de provinces touchées a été réduit. Il a ajouté qu’un million et demi d’enfants ont été vaccinés contre la polio, soit 9% des effectifs visés par la campagne, grâce à la coopération de tous, « y compris des Taliban » qui ont permis l’accès à certaines régions jusqu’alors inaccessibles. Il a rappelé l’ambition de la MANUA d’accroître sa présence en province, en précisant qu’elle avait besoin de personnel spécialisé.
M. RANGIN DÃDFAR SPANTÃ, Ministre des affaires étrangères de l’Afghanistan, a estimé que les élections du mois d’août avaient représenté un jalon important dans le processus de démocratisation afghan, qui a impliqué de très nombreux acteurs, afghans et internationaux. C’est la première fois dans l’histoire de l’Afghanistan moderne que les Afghans avaient la possibilité d’organiser une élection nationale, a-t-il ajouté. Toutefois, l’aspect le plus particulier du scrutin a été la campagne d’intimidation dirigée contre les électeurs et agents électoraux, par les Taliban et d’autres groupes, a poursuivi M. Spantã. Il a estimé que le pays avait triomphé de ce défi. Il a reconnu « des cas d’irrégularité » mais a demandé qu’on se concentre sur la vision d’ensemble du scrutin plutôt que sur des cas isolés. Les tentatives pour délégitimer les institutions auraient des conséquences négatives pour le pays et pour la communauté internationale, a-t-il averti.
C’est seulement en mettant en œuvre une stratégie globale inscrite dans la durée qu’on pourra progresser, a affirmé le Ministre. Cette stratégie repose sur la sécurité, la bonne gouvernance, le développement économique et la coopération régionale et internationale, a affirmé le Ministre, qui a souhaité une bonne répartition des compétences entre son pays et la communauté internationale. Il a ajouté que cette stratégie à long terme exigeait des ressources et des compétences adéquates.
M. Spantã s’est félicité du plus grand intérêt que porte la nouvelle Administration américaine à son pays. Il s’est félicité des propositions d’une nouvelle conférence internationale pour réévaluer les besoins en assistance de son pays et a souhaité qu’elle se tienne à Kaboul. Le Ministre a déclaré que l’Afghanistan a besoin d’un État qui fonctionne et qui soit comptable de ses actes, mais il a ajouté qu’on ne peut réduire l’ensemble de nos problèmes à la question de la bonne gouvernance. « Souvent, nous ne disposons pas des institutions nécessaires et c’est pourquoi nous devons les mettre en place, a ajouté le Ministre, qui a aussi dénoncé de mauvaises pratiques « dans la communauté des bailleurs de fonds ».
Rappelant que l’Afghanistan « appartient à tous les Afghans, M. Spantã a ajouté que le Gouvernement avait tout fait pour intégrer le plus grand nombre d’Afghans dans le processus de reconstruction et qu’il continuerait de le faire. Il a toutefois averti, tant que la direction des Taliban et que les autres groupes terroristes seront « protégés par des entités extérieures », nous ne serons pas en mesure de mettre fin à la dynamique de l’insécurité dans le pays.
« La coopération régionale est un pilier de notre politique étrangère et de sécurité et de développement », a déclaré le Ministre, qui a ajouté que de nombreuses difficultés étaient aussi de nature régionale, comme le terrorisme et le trafic de drogues. Dans ce cadre, les relations avec le Pakistan sont des plus importantes, a ajouté M. Spantã, qui s’est réjoui que les relations entre les deux pays soient bonnes.
Les Nations Unies doivent jouer le rôle de chef de file dans ces enjeux, a affirmé le Ministre, qui estime que la MANUA peut assumer ce rôle de passerelle.
M. AHMET DAVUTOĞLU, Ministre des affaires étrangères de la Turquie, a félicité le Représentant spécial, M. Kai Eide, ainsi que le personnel de la MANUA pour le travail remarquable qu’ils ont accompli, avant de saluer les efforts inlassables et l’engagement du peuple afghan en faveur de la démocratie dans le pays. À cet égard, il a indiqué que dans l’attente des résultats définitifs du vote, il faudrait que la communauté internationale continue d’apporter un soutien fort à la recherche de la démocratie dans ce pays.
Des défis « immenses » sur le terrain exigent une attention urgente tant au niveau international qu’à celui du Gouvernement de Kaboul, a estimé le Ministre dont le message au Président de l’Afghanistan pour les cinq prochaines années se résume en deux volets: assurer l’inclusion de l’ensemble de la population afghane et œuvrer courageusement en faveur de la réconciliation nationale. Pour ce faire, la communauté internationale doit continuer de coopérer avec lui et lui offrir son appui, a poursuivi M. Davutoğlu.
Annonçant que, l’année prochaine, la Turquie présidera les travaux du Conseil de sécurité sur l’Afghanistan, le Ministre a informé que son pays s’efforcera de maintenir l’élan positif imprégné par le Japon, avec l’assistance des Nations Unies et des autres membres du Conseil de sécurité. « La Turquie n’est pas étrangère à cette géographie. La Turquie a des liens historiques avec le peuple frère d’Afghanistan », a affirmé le Chef de la diplomatie turque, en précisant que « la Turquie était en train de mettre en œuvre le programme d’assistance le plus exhaustif de son histoire en Afghanistan et continuera son travail intense d’appui à la reconstruction ». Il a mentionné à cet égard que son pays était également actif à l’échelle régionale, notamment dans le contexte du processus du Sommet tripartite.
Le Ministre turc des affaires étrangères a souligné que l’approche qui s’impose en Afghanistan doit être axée sur quatre points. La communauté internationale doit entamer une solide campagne en vue d’un plan de reconstruction économique considérable et recentré. Il faudrait constituer une armée et une force de police afghanes plus efficaces et dans des délais plus rapides. La communauté internationale doit encourager un processus de réconciliation nationale inclusif dirigé par le Gouvernement de l’Afghanistan; et, enfin, il faudrait créer un climat propice à la démocratie et au développement à travers un enseignement moderne. M. Davutoğlu a jugé que les « objectifs stratégiques » figurant dans le rapport du Secrétaire général étaient « centrés et réalisables », et s’est particulièrement félicité du fait que ces objectifs prévoyaient les cinq aspects les plus importants d’une stratégie globale, sur lesquels la Turquie a toujours insisté, en l’occurrence: la sécurité, la bonne gouvernance, le développement social et économique, les droits de l’homme et la lutte contre les stupéfiants.
M. YUKIO TAKASU (Japon) a rendu hommage au peuple afghan pour s’être rendu aux urnes malgré le climat marqué par des intimidations. Maintenant que les votes sont faits, a estimé le représentant du Japon, il faut aller au bout du processus électoral sans plus attendre. À cet égard, il a indiqué qu’il attendait que la Commission des recours gère correctement les multiples plaintes pour fraude électorale. Rassuré par la coopération en cours entre cette Commission et la Commission électorale indépendante, le Japon s’attend à ce que les résultats du vote soient certifiés sous peu. Le représentant a lancé un appel à toutes les parties pour qu’elles acceptent ces résultats une fois qu’ils seront annoncés et les a encouragées à surmonter leurs divergences politiques et d’œuvrer pour la formation du nouveau Gouvernement. « Les six prochains mois sont critiques pour déterminer dans quel sens l’Afghanistan se tournera », a déclaré M. Takasu, préconisant par conséquent une assistance internationale soutenue pendant cette période postélectorale. À cet égard, l’Afghanistan peut compter sur le soutien continu du nouveau Gouvernement japonais qui reste engagé pour assurer la stabilité et la reconstruction du pays. M. Takasu a estimé que la conférence internationale qui a été proposée sera l’occasion à la fois pour la communauté internationale, mais aussi pour le nouveau Gouvernement afghan de confirmer leurs engagements respectifs.
L’un des éléments clefs de la stratégie postélectorale, a estimé le représentant du Japon, est la réintégration et la réconciliation des insurgés. Les efforts en ce sens doivent être entrepris par le nouveau Gouvernement afghan, a souligné le représentant, ajoutant que ce Gouvernement doit être perçu au plan central et local comme fort et compétent pour pouvoir mener à bien de telles actions. Le Japon se propose de l’assister dans cette mission, en offrant notamment des formations professionnelles à ceux qui auront été réintégrés. Par ailleurs, le Japon appuie pleinement M. Kai Eide qui propose un ordre de priorités et une meilleure coordination de l’aide internationale dans des domaines clairement définis, a assuré le représentant. En outre, le Japon invite les pays ayant répondu aux appels de contributions pour l’Afghanistan à les débloquer sans plus tarder dès que le nouveau Gouvernement afghan aura réaffirmé ses engagements. Tout en soulignant qu’il faut au préalable assurer un climat de sécurité dans le pays, le représentant du Japon a rendu hommage aux pays contributeurs de troupes et aux Forces de sécurité afghanes pour leurs efforts au cours des mois passés. Il a insisté cependant sur la nécessité de faire davantage pour renforcer leurs capacités, tâche à laquelle le Japon s’attèle déjà.
M. LE LUONG MINH (Viet Nam) a salué les progrès enregistrés sur place au cours des trois derniers mois, notamment la tenue des élections présidentielles et provinciales du 20 août, la première organisée par la Commission électorale indépendante afghane. En dépit des irrégularités, l’aspiration du peuple afghan à la paix et à la sécurité ne peut être mise en doute, a-t-il ajouté, en souhaitant que des leçons soient tirées en vue de la tenue des élections parlementaires de 2010. Le représentant du Viet Nam a indiqué que compte tenu du contexte délicat qui prévaut actuellement sur le terrain, toutes les parties concernées doivent coopérer de manière constructive en vue d’établir un gouvernement afghan solide, capable de remettre le pays dans le sens de la marche. Après avoir évoqué les menaces à la sécurité, la faiblesse des institutions et le manque de ressources financières qui sapent la stabilisation et l’essor de l’Afghanistan, M. Le Luong Minh a suggéré aux parties concernées de faire siennes les recommandations du Secrétaire général dans son rapport, afin de fixer les priorités dans les domaines clefs que sont la sécurité, le renforcement des institutions, le développement économique, la promotion des droits de l’homme et la lutte contre le trafic illicite de drogues. Le représentant du Viet Nam a estimé que la protection des civils et l’amélioration des conditions de vie du peuple afghan devraient être considérées comme des priorités.
M. RANKO VILOVIĆ (Croatie) s’est félicité de la tenue des élections en Afghanistan et a félicité le peuple afghan pour sa participation, malgré les risques encourus pour aller voter. Il a estimé que les sauvegardes électorales ont permis de déceler l’essentiel des fraudes et irrégularités et a souhaité que le processus en cours permette de rapidement certifier les résultats. M. Vilović s’est dit préoccupé de la montée de la violence et a dénoncé les attaques ciblant les civils. Le représentant s’est félicité à cet égard des nouvelles mesures adoptées par la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS). Il s’est félicité de l’accélération du processus « d’afghanisation » du maintien de l’ordre. Néanmoins, a-t-il ajouté, les moyens militaires ne suffiront pas pour obtenir la réconciliation et il a souhaité une politique de réconciliation nationale bien menée.
M. Vilović a appuyé l’évaluation du Secrétaire général, qui souligne notamment que le niveau de confiance de la population envers le futur Gouvernement afghan aura une influence sur l’engagement de la communauté internationale. Il a jugé encourageant d’entendre que le processus d’établissement des priorités s’est amélioré de manière significative. Étant donné l’ampleur de la tâche qui lui est confiée, le représentant a soutenu le renforcement des moyens de la MANUA.
M. THOMAS MAYR-HARTING (Autriche) a appuyé l’observation du Secrétaire général selon laquelle le futur Gouvernement afghan devra être formé dans un climat de confiance mutuelle entre la population et les autorités politiques du pays. La bonne gouvernance, l’État de droit et le respect des droits de l’homme devront être la priorité de ce gouvernement et constituer la base de son action. Le représentant autrichien a poursuivi en notant que la lutte contre la corruption et le trafic illicite de drogues serait décisive pour permettre à la communauté internationale de maintenir un engagement à long terme en Afghanistan. À son tour, il a appelé à tirer les leçons de l’élection présidentielle d’août dernier afin d’assurer la tenue crédible des élections parlementaires prévues pour 2010. Les recommandations de la Mission d’observation électorale de l’Union européenne, ainsi que celles des experts de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pouvant être utiles à cette fin, a-t-il dit.
Le représentant autrichien a ensuite mis l’accent sur la situation en matière de sécurité, en affirmant notamment que les actes d’intimidation et les attaques contre les travailleurs humanitaires sont totalement inacceptables et que les auteurs de ces actes doivent être condamnés et jugés. Il faut également minimiser le nombre alarmant de victimes civils, en soutenant l’approche de la FIAS qui a fait de la protection des civils sa plus haute priorité, en intensifiant son partenariat opérationnel avec les Forces de sécurité nationales afghanes. Concernant la situation humanitaire, M. Mayr-Harting a salué l’adoption d’une loi sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes en juin dernier. Il a souhaité que cette loi soit privilégiée aux mesures prises au titre de la loi chiite et qui contreviennent aux normes du droit international et aux engagements internationaux de l’Afghanistan. Avant de conclure, le représentant autrichien a appuyé l’idée de tenir une conférence internationale pour relancer le Pacte pour l’Afghanistan et toute mesure destinée à renforcer la marge de manœuvre de la MANUA dans les provinces.
M. PAUL ROBERT TIENDRÉBÉOGO (Burkina Faso) a salué la tenue des élections dont l’organisation constituait en soi un « véritable défi », et qui ont permis aux Afghans de se prononcer sur leur avenir. Il a souhaité que le processus d’audit et de recomptage des votes puisse se dérouler rapidement, afin que les résultats soient acceptables par tous. M. Tiendrébéogo a salué les efforts de la MANUA pour rendre l’aide internationale plus efficace, améliorer la coordination locale et pour son soutien dans les domaines politique et des droits de l’homme. Il s’est félicité de l’adoption le 19 juillet de la loi sur l’élimination de la violence contre les femmes. Le représentant s’est félicité également des progrès dans le suivi du financement du développement, tout en s’inquiétant cependant d’une tendance à mettre l’accent sur les préférences des donateurs, qui accroît la dépendance du Gouvernement face à ces derniers. Il a salué en outre les efforts de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC) et ses succès dans la réduction de la production d’opium.
Pour garantir les progrès du pays, il faut renforcer les capacités de l’État et sa présence sur le territoire, mais il faut encore plus avoir la volonté politique, a affirmé le représentant, qui a appuyé les propositions du Secrétaire général en ce sens. Toutefois, a ajouté M. Tiendrébéogo, aucun objectif ne pourra être atteint dans l’insécurité. C’est pourquoi, il a soutenu le renforcement des effectifs et moyens des Forces de sécurité afghanes, ainsi que la nouvelle approche tactique de la FIAS, axée sur la protection des populations et l’amélioration des conditions des opérations ainsi que sur le développement des Forces afghanes. « C’est un travail de longue haleine mais c’est la voie à suivre si nous voulons la paix et la prospérité de l’Afghanistan », a conclu M. Tiendrébéogo.
M. PHILIP JOHN PARHAM (Royaume-Uni) a estimé que la tenue, en août dernier, des élections présidentielles constituait un progrès en soi, car il s’agit du premier processus électoral mené en 30 ans en Afghanistan. Cela montre, a-t-il fait observer, que le pays poursuit sa marche difficile vers la constitution d’un État autonome et fort. Pour vérifier les résultats, il faut être patient et laisser les commissions électorales compétentes faire leur travail, a-t-il ajouté. Il est nécessaire, a-t-il souligné, que, quelle que soit l’identité du vainqueur, ces résultats finaux soient crédibles et reflètent les aspirations réelles du peuple afghan. Le représentant britannique a ensuite indiqué que le Gouvernement qui émanera de cette élection devra être lui aussi crédible et déterminé à s’engager efficacement et de manière transparente à lutter contre l’insécurité et à faire de la restauration de l’état de droit et du développement social et économique les priorités de son action. C’est sur cette capacité que la communauté internationale se positionnera quant à l’appui qu’elle doit continuer d’apporter au pays, a-t-il dit, en souhaitant à son tour la tenue d’une conférence internationale pour relancer le Pacte pour l’Afghanistan, présidée par l’ONU et le nouveau Gouvernement afghan. Le représentant a par ailleurs salué les efforts de la MANUA, instrument indispensable pour coordonner au mieux les contributions internationales à la paix sur l’ensemble du territoire afghan. Il a ainsi rendu hommage aux membres du personnel de la Mission qui on trouvé la mort lors de l’attaque contre ses locaux, à Kaboul, le 18 août dernier.
M. IBRAHIM O. A. DABBASHI (Jamahiriya arabe libyenne) a estimé que la situation en Afghanistan n’avait pas beaucoup changé depuis que les forces américaines en avaient chassé les Taliban. Des civils continuent d’être tués, tant par les Taliban que par les forces internationales, a-t-il ajouté, en ajoutant que chaque camp avait toujours des arguments à présenter pour se justifier: l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) parle d’erreur ou explique que les civils tués étaient en fait des Taliban déguisés, et les Taliban déclarent qu’ils luttent contre les forces étrangères et ceux qui collaborent avec elles. Mais, en fin de compte, ce sont toujours des morts civils, a-t-il rappelé.
Le représentant a fait part de sa préoccupation face à certains constats du rapport du Secrétaire général, y compris le fait que l’insurrection n’est pas enrayée malgré l’accroissement des forces étrangères et afghanes. Il a rappelé que le Représentant spécial lui-même venait de dire que la situation sécuritaire était la pire depuis 2002. Il s’est prononcé pour un « processus de réconciliation durable ». L’élimination des Taliban ne doit pas être un objectif en tant que tel, a affirmé le représentant, qui estime qu’il n’y a pas de solution uniquement militaire. M. Dabbashi a également dénoncé les conditions de détention dans certains centres, y compris celui de Bagram qui, a-t-il rappelé, est dirigé par des forces internationales. Le rapport ne fait pas de commentaires sur la situation humanitaire et des droits de l’homme dans ces centres, a-t-il noté, en demandant au Représentant spécial d’apporter quelques éléments de réponse.
M. CLAUDE HELLER (Mexique) a condamné d’emblée les attentats perpétrés aujourd’hui à Kandahar qui ont fait de nombreuses pertes parmi les civils. Il a poursuivi en remerciant le Représentant spécial du Secrétaire général, M. Kai Eide, pour la présentation du rapport et pour son travail remarquable en faveur du développement de l’Afghanistan, en dépit des défis auxquels son bureau est confronté. Il l’a également remercié pour l’inclusion d’indicateurs de progrès. Le représentant s’est dit cependant préoccupé par l’absence de clarté dans l’issue du processus des élections présidentielles, entachées par de nombreuses allégations d’irrégularités et de fraudes électorales. Il s’est déclaré tout aussi préoccupé par les actes d’intimidation et de violence qui ont « inhibé de manière significative la participation citoyenne, notamment celle des femmes ». Le diplomate mexicain a néanmoins formé le vœu que la Commission des plaintes les examine dûment de sorte que le résultat final qui sera annoncé par la Commission électorale indépendante soit respecté par tous les acteurs concernés, évite une recrudescence de la violence et, surtout, permette que l’Afghanistan et ses institutions sortent renforcés par ce processus, privilégiant ainsi la cohésion sociale, la stabilité et la sécurité de la population dans tout le pays.
En matière de sécurité, M. Heller a déploré l’augmentation des incidents violents par rapport aux années précédentes, en indiquant que les chiffres contenus dans le rapport à cet égard montrent bien à quel point l’insécurité demeure le principal facteur entravant la réalisation de progrès en Afghanistan. Il a considéré que l’action des forces internationales doit être accompagnée de mesures parallèles d’appui au développement, de respect des droits de l’homme et de renforcement de l’état de droit, en s’attaquant aux causes profondes à l’origine de cette situation. Il a appuyé l’approche que la FIAS a commencé à mettre en œuvre, qui octroie la plus haute priorité à la protection de la population civile afghane.
M. Heller a salué d’autre part la réduction de la culture de l’opium, « thème stratégique pour la sécurité du pays », de même que le dialogue et la coopération bilatérale instaurés entre l’Afghanistan, le Pakistan et la République islamique d’Iran, ce qui constitue selon lui un pas de plus pour confronter les défis communs à la stabilité régionale tels que le terrorisme, le trafic illégal des stupéfiants et la criminalité organisée. Il a souhaité à cet égard que ce processus conduise à une « planification stratégique à long terme, incluant des mesures concrètes qui contribueront à l’accélération et à l’élargissement de tels progrès ». Il s’est ensuite réjoui de la signature par le Président Karzai de la loi sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes, qui pénalise la violence sexuelle, en particulier le viol, le mariage forcé et le mariage précoce. M. Heller a également salué la coopération des Nations Unies avec les institutions du système judiciaire afghan dans le but de s’aligner sur les normes internationales relatives aux droits de l’homme pour ce qui a trait à la détention et au droit à un procès équitable. Il a souligné qu’il s’agit également d’accorder une attention particulière à la lutte contre la corruption et l’impunité, tâche qui incombe au premier chef au Gouvernement afghan et dont les résultats lui permettront d’asseoir son autorité et sa légitimité, de gagner la confiance de la population et de renforcer sa position face à l’insurrection. M. Heller a conclu en condamnant les attentats contre le personnel humanitaire et en exprimant son inquiétude pour la menace grave que posent pour la population civile les mines antipersonnel et autres explosifs et engins de guerre. Il a salué les efforts du Gouvernement afghan et de la communauté internationale en vue du déminage et de la destruction de tous ces engins dans le pays.
M. GÉRARD ARAUD (France) a salué d’emblée le rôle de la MANUA dans l’organisation des élections présidentielles d’août dernier et, de manière générale, dans la coordination des efforts internationaux engagés en Afghanistan. La France s’est fortement engagée avec plus de 3 000 hommes, dont de nombreux soldats qui ont payé un lourd tribut, des forces de gendarmerie et une aide civile régulièrement renforcée, a-t-il ajouté. Le représentant a indiqué que la France, à l’instar de ses partenaires internationaux, maintiendrait son engagement le temps nécessaire à l’avènement d’un État afghan à même de prendre en main le destin du pays. Il a ensuite appelé les parties à assurer que le travail des commissions électorales compétentes chargées de vérifier les résultats des élections présidentielles puisse être mené en toute transparence dans le respect des procédures.
Ces résultats, indépendamment de l’identité du vainqueur, doivent refléter le choix des Afghans, a rappelé M. Araud. Il a ensuite salué le fait que le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, appuie la proposition conjointe de la France, de l’Allemagne et du Royaume-Uni de tenir une conférence internationale après l’installation du nouveau Gouvernement afghan. Cette conférence devra servir à établir le cadre des relations entre l’Afghanistan et la communauté internationale à l’intérieur duquel les Afghans devront prendre en main leur destin national, a déclaré le représentant de la France. Il a souhaité que le nouveau Gouvernement afghan affiche sa détermination de mener d’urgence les réformes politiques qui, jusqu’ici, n’ont pas fait l’objet des efforts nécessaires. Les priorités du nouveau Gouvernement afghan devront être le renforcement des capacités militaires et civiles, la lutte contre la corruption et la conduite du processus de réconciliation national, ainsi que les opérations de démobilisation, a indiqué M. Araud. Enfin, il a précisé que les modalités de la conférence internationale devront être discutées avec le prochain Gouvernement afghan, dont il a souhaité qu’il sera déterminé à relancer, dès que possible, le Pacte sur l’Afghanistan.
M. LIU ZHENMIN (Chine) a déclaré que les élections auront des conséquences importances pour l’avenir du processus de paix, en souhaitant qu’elles concourent à la stabilité du pays et au renforcement des capacités du Gouvernement. Il a souhaité que les Forces de sécurité afghanes, avec l’aide de la MANUA et de la FIAS, soient bientôt en mesure d’assurer par elles-mêmes le maintien de la sécurité dans le pays. Il s’est réjoui de la réduction des champs pour la culture du pavot à opium.
La communauté internationale doit contribuer davantage à la reconstruction de l’Afghanistan, a déclaré le représentant, qui a cité les secteurs de l’agriculture, de l’éducation et de la santé. La communauté internationale doit aussi promouvoir le développement durable de la société, réduire de manière fondamentale les facteurs de déstabilisation, a ajouté M. Liu Zhenmin, qui a assuré que son pays était favorable à ce que les Nations Unies continuent à jouer un rôle de chef de file dans la reconstruction de l’Afghanistan.
M. CHRISTIAN GUILLERMET (Costa Rica) a estimé que la tenue des élections présidentielles d’août dernier, représentait, à elle seule, un véritable succès. Il a cependant déploré les retards pris dans l’annonce des résultats finaux, dus selon lui à la lenteur inquiétante de la Commission du contentieux électoral. Le représentant a souhaité que des enseignements soient tirés pour améliorer le déroulement des élections parlementaires de 2010, tout en soulignant que cela doit passer par un renforcement urgent des jeunes institutions démocratiques afghanes. Concernant les droits de l’homme, le représentant a déploré le fait que les femmes participant à la vie publique sont de plus en plus souvent attaquées. Il a salué l’adoption d’une nouvelle loi contre les violences à l’égard des femmes qu’il a qualifiée de mesure prometteuse en vue de faire échec aux lois chiites qui contreviennent au droit international et aux obligations internationales de l’Afghanistan en matière de droit de l’homme. Le représentant du Costa Rica a ensuite invité la communauté internationale à voir au-delà des seules solutions militaires, comme le préconise le Secrétaire général dans son rapport, où ce dernier exprime sa forte préoccupation devant le nombre très élevé de pertes civiles qui sont le fait des forces internationales.
M. RUHAKANA RUGUNDA (Ouganda) a estimé que malgré les irrégularités, les élections du 20 août dernier constituent une étape positive dans le processus de reconstruction de l’Afghanistan. Mettant l’accent sur le rôle de la Commission électorale indépendante, il a invité le peuple afghan au calme et à la patience. Il a condamné les attentats commis dans le pays qui cherchent à en détruire la stabilité. La reconstruction et le maintien de l’ordre incombent en premier lieu aux Afghans eux-mêmes mais l’assistance internationale est nécessaire, y compris au profit des Forces de sécurité afghanes, a estimé le représentant.
Il reste beaucoup à faire pour reconstruire l’économie afghane, a déclaré M. Rugunda. La communauté internationale doit accompagner les efforts du nouveau Gouvernement afghan dans divers domaines critiques, comme l’éducation, l’énergie, la santé ou les infrastructures, a-t-il estimé, avant de préciser que c’est au Gouvernement afghan d’assumer ces responsabilités avec l’aide de ses partenaires internationaux. Le représentant s’est félicité que l’Afghanistan se soit approprié le processus de développement dont le succès, a-t-il rappelé, dépendra aussi largement des ressources disponibles. M. Rugunda a appelé la communauté internationale à fournir davantage d’efforts et a souhaité que davantage de ressources soient accordées à la MANUA.
M. VITALY I. CHURKIN (Fédération de Russie) a souhaité que les procédures de vérification des résultats des élections présidentielles s’achèvent rapidement. La formation du nouveau Gouvernement afghan en dépend, a-t-il ajouté, avant de souligner que le principal obstacle au redressement du pays restait la situation sécuritaire. Tous les efforts déployés par les partenaires internationaux de l’Afghanistan et les autorités du pays n’ont pas permis d’amélioration durable dans ce domaine, et les Taliban et autres membres d’Al-Qaida continuent de semer la terreur et de déstabiliser le pays, a poursuivi le représentant russe. Il a souhaité que le processus de réconciliation nationale soit mené à son terme pour permettre d’amorcer un retour au calme, l’insécurité en Afghanistan faisant peser de graves menaces sur la stabilité de régions entières.
M. Churkin s’est dit opposé à la radiation des noms des Taliban repentis des listes des Comités des sanctions du Conseil de sécurité. « Nous n’avons aucune garantie que ces individus ne retomberont pas dans leurs travers », a-t-il prévenu, estimant que seuls ceux qui renoncent à leurs liens avec Al-Qaida et qui reconnaissent la Constitution et le nouveau Gouvernement afghans pourront être dignes de confiance. M. Churkin a également demandé que les trafiquants de drogues soient inscrits sur les listes des Comités des sanctions du Conseil de sécurité, leurs activités illégales constituant toujours la principale source de financement des insurgés. S’agissant de la proposition d’organiser une nouvelle conférence internationale sur l’Afghanistan, M. Churkin a estimé qu’un tel événement doit, au préalable, être pleinement appuyé par les Afghans eux-mêmes.
Mme ROSEMARY A. DICARLO (États-Unis) a rappelé que son pays continuait d’appuyer fermement les efforts de la MANUA dont le travail, a-t-elle estimé, n’est pas achevé même si des progrès importants ont été accomplis. Elle a rappelé que le processus électoral n’avait pas été une chose aisée et a salué le courage des électeurs afghans et le dévouement des fonctionnaires électoraux. Face aux « allégations graves » de fraude, elle s’est félicitée que les Afghans répondent par des procédures de contentieux électoral et non par la violence. La communauté internationale doit appuyer la Commission chargée des recours électoraux et la Commission électorale indépendante, a ajouté Mme Dicarlo. En outre, elle a estimé que la communauté internationale devrait « immédiatement » travailler avec le futur Gouvernement afghan, dès qu’il sera formé. Il faut aussi commencer au plus tôt les préparatifs pour les élections parlementaires de 2010, a ajouté la représentante.
Rappelant que la MANUA est chargée de la coordination de l’assistance internationale à l’Afghanistan, Mme Dicarlo a souhaité que cette dernière soit conforme aux priorités du Gouvernement afghan et s’est félicitée des progrès réalisés dans la coordination de l’aide. La représentante s’est dite heureuse de l’extension de la présence de la MANUA en province, dans laquelle elle a vu pour la Mission un moyen de mieux suivre et surveiller l’application des programmes sur le terrain. Elle s’est prononcée en faveur de l’accroissement des moyens de la MANUA. Les États-Unis et la FIAS continuent de faire de grands efforts pour éviter les pertes civiles, a affirmé Mme Dicarlo, qui a rappelé qu’une nouvelle tactique était mise en œuvre par le commandant de la coalition militaire internationale, le général McChrystal. Elle a rappelé que l’essentiel des pertes civiles était imputable aux insurgés. « Nous faisons tout pour éviter les pertes civiles. Quand il y en a, nous menons des enquêtes approfondies avec le Gouvernement afghan et nous apportons une aide humanitaire aux communautés touchées », a-t-elle assuré. Avant de conclure, Mme Dicarlo a émis des « objections » à certains des propos du représentant de la Libye qui, a-t-elle affirmé, « ne contribuent pas à la discussion d’aujourd’hui ».
Reprenant la parole en fin de séance, le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afghanistan a précisé qu’il entendait ouvrir quatre bureaux supplémentaires de la MANUA en province dans les semaines à venir, mais seulement là où cela est possible.
Le Représentant spécial a affirmé que les efforts consentis par le général Stanley McChristal, commandant de la coalition militaire internationale, pour éviter les pertes civiles du fait des actions de la coalition, sont « impressionnants », et a ajouté que, ces dernières semaines, la tendance « va très clairement dans la bonne direction ». Il a confirmé avoir visité des centres de détention et avoir l’intention d’en visiter d’autres. Dans le cas de Bagram, les choses « vont dans la bonne direction », a-t-il assuré. En revanche, a-t-il fait remarquer, les installations afghanes « sont misérables ». Il a attribué la raison principale de cet état de fait à l’absence de ressources, tant pour les centres de détention eux-mêmes que pour l’ensemble du système de justice. Il a donc demandé à la communauté internationale de consacrer davantage de ressources à ces domaines. M. Eide a enfin déclaré que dans le processus électoral, il y avait eu « une pleine harmonie » entre ses vues et celles des ambassadeurs autour de cette table et de la communauté diplomatique à Kaboul.
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