En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/12011-SC/9542-AFR/1791

FACE AU DÉPART IMMINENT DES FORCES ÉTHIOPIENNES DE SOMALIE, BAN KI-MOON APPELLE AU RENFORCEMENT DE L’AMISOM

16/12/2008
Secrétaire généralSG/SM/12011
SC/9542
AFR/1791
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

FACE AU DÉPART IMMINENT DES FORCES ÉTHIOPIENNES DE SOMALIE, BAN KI-MOON APPELLE AU RENFORCEMENT DE L’AMISOM


On trouvera ci-après le texte intégral de la déclaration faite par le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, devant le Conseil de sécurité sur la situation en Somalie, à New York, le 16 décembre 2008:


La présente séance se tient à une conjoncture critique du drame qui frappe la Somalie.  La lettre que l’Éthiopie m’a adressée le 25 novembre, dans laquelle elle indiquait qu’elle comptait retirer ses troupes de la Somalie d’ici à la fin de l’année, est conforme à l’Accord de Djibouti, mais cela pourrait facilement mener à l’anarchie.  Face au risque de détérioration des conditions de sécurité et des préoccupations exprimées par l’Union africaine, cet organe et l’Union africaine doivent œuvrer en étroite coopération pour fournir un appui additionnel à la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) afin de renforcer ses capacités à se défendre et à continuer à tenir les zones stratégiques de Mogadiscio tandis que les efforts axés sur la mise en place des structures de sécurité somaliennes en vertu du processus de Djibouti se poursuivent.  Le Premier Ministre Zenawi a réaffirmé au Parlement éthiopien son intention de retirer la totalité des troupes dans deux semaines.


L’Union africaine a prévu examiner la prorogation du mandat de l’AMISOM lors de la réunion ministérielle qui se tiendra à Addis-Abeba le 22 décembre.  Si le mandat n’est pas renouvelé, les forces de l’AMISOM partiront sans doute avant le retrait des forces éthiopiennes.  Nous sommes cependant encouragés par le fait que le Burundi et le Rwanda ont indiqué qu’ils étaient prêts à fournir de nouvelles unités de combat à l’AMISOM si les ressources essentielles étaient mises à disposition.  Tous les yeux sont fixés sur le présent débat pour mesurer la détermination de la communauté internationale face à ce danger.  Les mesures que nous prendrons aujourd’hui seront d’une importance critique pour les décisions que l’Union africaine prendra la semaine prochaine à propos de la Somalie.


Je voudrais maintenant évoquer brièvement les derniers faits nouveaux d’ordre politique survenus en Somalie.


Un processus politique crédible est en cours dans ce pays. Il s’agit du processus de Djibouti que mon Envoyé spécial, M. Ahmedou Ould Abdallah, a encouragé.  Le 25 novembre, les parties somaliennes ont accepté d’ajouter 275 sièges au Parlement fédéral de transition.  Elles ont convenu également de prolonger de deux années la période de transition, qui prend fin en septembre 2009.  Ce parlement élargi devrait élire de nouveaux dirigeants somaliens.  Les parties ont convenu aussi de constituer une force conjointe qui constituerait le pilier d’une force unique de sécurité.


Le retour du dirigeant de l’Alliance pour la seconde libération de la Somalie, Cheikh Sharif, et de 39 de ses partisans à Mogadiscio après deux ans d’exil, est de bon augure.  Des rapports indiquent qu’ils ont été accueillis chaleureusement par les Somaliens.  C’est là une première étape dans l’importation et l’instauration du processus de paix de Djibouti en Somalie.


Comme nous l’avons dit à maintes reprises, c’est aux Somaliens eux-mêmes qu’incombe la responsabilité première de rétablir la paix et la stabilité dans leur pays.  Toutefois, les querelles continuelles au sein du Gouvernement fédéral de transition et le partage récent entre le Président et le Premier Ministre des fonctions présidentielles risquent de compromettre le processus de paix et d’affecter le fonctionnement et la stabilité du Gouvernement.  En même temps, j’exhorte les groupes armés en Somalie qui ont posé comme condition à la fin des combats le retrait de l’Éthiopie à déposer les armes et à se joindre au processus de Djibouti.


L’accès humanitaire reste très limité et le niveau d’insécurité des travailleurs humanitaires et de la population civile locale est inacceptablement élevé.  Au cours de cette seule année, 250 000 personnes environ ont été déplacées de Mogadiscio.  Le nombre total de personnes déplacées est de 1,3 million et, chaque mois, 5 000 réfugiés somaliens en moyenne arrivent dans les camps de réfugiés au Kenya.


Le nombre de personnes ayant besoin d’aide et de moyens de subsistance en Somalie est aujourd’hui de 3,2 millions.  L’acheminement de cette aide demeure un défi logistique, notamment à cause de la piraterie, qui a entraîné une hausse des coûts de transport des fournitures.


Je suis extrêmement préoccupé par le fait que les travailleurs humanitaires et le personnel des Nations Unies sont directement visés, ce qui a causé la mort de quatre membres du personnel des Nations Unies entre septembre et décembre.  Les problèmes sont immenses, mais les organismes humanitaires continuent à acheminer des secours, y compris dans les zones de conflit.  Si les conditions de sécurité se détériorent, l’accès à l’aide humanitaire ne pourra qu’empirer.


Je n’ai cessé de déclarer que la façon la plus appropriée de relever les défis complexes qui existent en Somalie en matière de sécurité réside dans une force multinationale plutôt que dans une opération de maintien de la paix typique.  Cette force devrait disposer de toutes les capacités militaires requises pour appuyer la cessation de l’affrontement armé, stabiliser Mogadiscio et se défendre.


J’ai demandé à 50 pays et à 3 organisations internationales de demander des contributions pour une force multinationale.  Les réactions n’ont pas été encourageantes.  Aucun État Membre n’a proposé d’assumer le rôle de chef de file.


En l’absence d’engagements adéquats en faveur d’une force multinationale, je compte proposer au Conseil trois mesures concrètes qui fourniraient les arrangements nécessaires en matière de sécurité en appui au processus de paix de Djibouti.  Si elles sont acceptées, ces mesures prépareraient la voie au déploiement d’une opération de maintien de la paix des Nations Unies, conformément à la résolution 1814 (2008) du Conseil de sécurité.


Premièrement, nous devrions fournir à l’Union africaine des ressources crédibles et substantielles en vue de renforcer l’AMISOM, y compris les moyens de déployer les unités de combat supplémentaires promises par le Rwanda et le Burundi.  Je proposerai aussi que toutes les ressources promises pour l’établissement d’une force multinationale soient redirigées vers l’AMISOM au cas où cette force multinationale ne verrait pas le jour.  Son financement sera une préoccupation majeure, et nous devrons envisager avec les États Membres des moyens novateurs de mobiliser les fonds nécessaires.  Alors que nous liquidons la Mission des Nations Unies au Soudan, nous avons déjà déterminé quels avoirs pourraient être donnés à l’AMISOM avec l’approbation de l’Assemblée générale.


Deuxièmement, le Conseil de sécurité devrait examiner les moyens de renforcer la capacité des parties somaliennes elles-mêmes de rétablir la sécurité, d’importer les pourparlers de Djibouti en Somalie et de faire avancer le processus de paix.  Cela pourrait inclure la formation, par le biais des partenaires internationaux, des forces conjointes entre le Gouvernement et l’Alliance établies par l’Accord de Djibouti, ainsi que le renforcement des capacités de la police et des secteurs judiciaire et pénitentiaire.  Ces activités pourraient être conduites dans le cadre d’une stratégie globale de réforme du secteur de la sécurité, qui pourrait être contrôlée par les autorités du pays, l’ONU assumant un rôle de coordination.


Enfin, le Conseil pourrait envisager la possibilité d’établir un groupe d’intervention navale ou d’ajouter une force d’intervention rapide aux opérations actuelles de lutte contre la piraterie.  Cela permettrait de lancer en Somalie des opérations qui appuieraient les activités du Bureau politique des Nations Unies pour la Somalie, ainsi que les opérations de l’AMISOM.


Notre objectif est de stabiliser la Somalie et de trouver une solution durable à la crise dans ce pays.  Je reconnais que certains membres du Conseil ont d’autres propositions à faire pour remédier à la crise de sécurité que connaît la Somalie, l’une d’entre elles consistant à placer dès maintenant les forces de l’AMISOM sous l’autorité d’une opération de maintien de la paix des Nations Unies.  Ce n’est pas notre option préférée.  Nous sommes d’avis que le renforcement de l’AMISOM par le biais, notamment, de la fourniture d’un financement, d’un appui logistique, de la formation et du matériel nécessaires et d’autres renforcements facilités par l’ONU et les États Membres constitue à l’heure actuelle une option plus réaliste.  Dans le même temps, nous poursuivons nos activités de planification d’urgence en vue du déploiement à part entière des opérations de maintien de la paix au moment opportun et dans les conditions requises, comme cela est demandé par le Conseil.  Je vais bientôt fournir un rapport détaillé au Conseil de sécurité portant sur ces propositions.


Je partage la vive préoccupation des États Membres face à l’escalade des actes de piraterie et des vols à main armée au large des côtes de Somalie.  Je me félicite de la décision prise par le Conseil d’examiner cette question.


Je suis particulièrement impressionné par les actions des États Membres et des organisations internationales pour regrouper leurs efforts et leurs ressources afin de lutter contre la piraterie et les vols à main armée en mer.  Je tiens à remercier l’Union européenne, l’OTAN et les États Membres qui ont apporté leur contribution à cet égard.  La nécessité de coordonner et de renforcer ces efforts est constante.  Mon Représentant spécial pour la Somalie a convoqué une conférence internationale sur la piraterie les 11 et 12 décembre pour débattre davantage de la question.  Mon Conseiller juridique est disposé à apporter son aide aux États pour tenter de trouver une solution aux questions pratiques et juridiques et aux problèmes de compétence judiciaire.  Comme l’a demandé le Conseil de sécurité dans sa résolution 1846 (2008) du 2 décembre, je vais soumettre des recommandations sur les moyens de garantir la sécurité à long terme de la navigation internationale au large des côtes somaliennes.  Dans l’intervalle, le Secrétariat a désigné un coordonnateur au Bureau des affaires militaires du Département des opérations de maintien de la paix en vue d’échanger des informations sur les opérations menées pour lutter contre la piraterie.


Nous devons prendre en considération le fait que la piraterie est symptomatique de l’anarchie qui persiste en Somalie depuis plus de 17 ans.  Ce désordre généralisé constitue une menace grave pour la stabilité régionale et pour la paix et la sécurité internationales.


Les efforts que nous déployons pour lutter contre la piraterie doivent être placés dans le contexte d’une approche globale qui encourage un processus de paix ouvert à tous en Somalie et aide les parties à reconstituer les capacités dont elles disposent en matière de sécurité et de gouvernance, à examiner les questions relatives aux droits de l’homme et à ouvrir des perspectives économiques dans tout le pays.


Je lance un appel aux dirigeants et au peuple somaliens pour qu’ils donnent une chance à la paix et qu’ils rejettent derrière eux les 17 années de guerre.  Je suis particulièrement préoccupé par la désunion qui persiste au sein de la direction du Gouvernement.  S’il n’y a pas un gouvernement efficace et uni à soutenir, la communauté internationale ne pourra pas faire grand-chose en Somalie.  J’exhorte les dirigeants du pays à mettre de côté leurs différends et à placer l’avenir du peuple somalien au premier rang de leurs priorités.


En tant que communauté internationale, nous devons aujourd’hui envoyer un message politique positif au peuple somalien et à l’Union africaine faisant part de notre désir de tracer la voie sécuritaire qui complètera les compromis politiques forgés grâce au processus de Djibouti.  Nous devons agir avant qu’il ne soit trop tard.


*   ***   *

À l’intention des organes d’information • Document non officiel
À l’intention des organes d’information. Document non officiel.