CONFÉRENCE DE PRESSE DES NOUVEAUX LAURÉATS DU PRIX DES NATIONS UNIES POUR LA CAUSE DES DROITS DE L’HOMME
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CONFÉRENCE DE PRESSE DES NOUVEAUX LAURÉATS DU PRIX DES NATIONS UNIES POUR LA CAUSE DES DROITS DE L’HOMME
Ce sont des messages de paix, de solidarité entre les hommes et de responsabilité, que les nouveaux lauréats du Prix des Nations Unies pour la cause des droits de l’homme ont lancés au cours d’une conférence de presse, cette après-midi au Siège de l’ONU, à New York.
Décernés aujourd’hui au cours d’une séance plénière de l’Assemblée générale, à l’occasion du soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, ces prix, institués en 1966, récompensent à titre honorifique, tous les cinq ans, des particuliers et des organisations ayant contribué de manière exceptionnelle au progrès et à la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Nelson Mandela, Amnesty International, Jimmy Carter, Eleanor Roosevelt et le révérend Martin Luther King figurent au nombre des anciens lauréats.
À l’exception de Louise Arbour, ancienne Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, qui n’a pas pu être présente aujourd’hui, les six autres lauréats ou leurs représentants ont exprimé leurs vues sur la situation des droits de l’homme et la façon de les défendre.
Bilawal Bhutto Zardari, qui représentait sa mère Benazir Bhutto, lauréate à titre posthume, a donné lecture de passages de l’autobiographie de l’ancienne Premier Ministre du Pakistan, assassinée il y a presqu’un an. Alors qu’elle se préparait à revenir au Pakistan, en 2007, Benazir Bhutto avait pleinement conscience des risques d’être arrêtée ou assassinée. « Al-Qaida a essayé de me tuer plusieurs fois, pourquoi n’essaierait-il pas encore », avait-elle fait remarquer. Elle était convaincue de devoir revenir auprès du peuple pakistanais pour être à ses côtés dans sa quête de démocratie, dans l’espoir de le voir jouir du droit à vivre en sécurité, dans la dignité et la liberté. « La démocratie au Pakistan est importante non seulement pour le pays, mais aussi pour le monde entier », avait-elle écrit. « À une époque où on interprète la religion de l’islam de façon radicale, il est important de rappeler que les gouvernements démocratiques n’hébergent pas les terroristes », avait confié Benazir Bhutto.
Interrogé sur l’action de sa mère en faveur des droits de l’homme, Bilawal Bhutto Zardari a assuré que sa mère avait fait tout ce qu’elle pouvait pour que la démocratie au Pakistan puisse prévaloir. Aujourd’hui, il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine, mais le terrorisme et la crise économique nous empêchent d’y consacrer plus de temps, a-t-il regretté. Bilawal Bhutto Zardari a souhaité que les jeunes pakistanais restent aussi loin que possible de la mauvaise interprétation de l’islam, car le vrai message de cette religion est un message de paix.
Ramsey Clark, ancien Ministre de la justice des États-Unis et défenseur des droits de l’homme, a rappelé que le premier objectif de l’ONU est de décourager la guerre. « Aucun enfant ne doit vivre sous la menace de l’arme nucléaire », a-t-il souligné. « Nous disposons d’un Traité de non-prolifération nucléaire qui demande aux puissances nucléaires de ne pas utiliser ces armes et à ceux qui ne l’ont pas de ne pas la développer ». C’est pourquoi, il a appelé l’ONU à être chef de file pour que la planète soit délivrée de l’arme nucléaire. Il a aussi invité au respect des droits des autres, la seule voie, selon lui, vers la paix.
À son tour, Carolyn Gomes, pédiatre jamaïcaine qui a abandonné son métier en 2003 pour se consacrer à la défense des droits de l’homme et de la justice, a expliqué être la Directrice exécutive de l’organisation Jamaicans For Justice (JFJ). Elle a émis l’espoir que le prix qui lui est décerné jette la lumière sur la nécessité urgente, pour la Jamaïque, de protéger les droits de tous ses citoyens. L’immunité qui prévaut actuellement pour les exécutions extrajudiciaires par la police jamaïcaine ne peut plus être tolérée, a-t-elle dit. Elle a demandé qu’une réforme du système de justice soit mise en place et a insisté sur la nécessité de revoir le fonctionnement de la police du pays. « Ce prix reconnaît le courage de tous ceux qui disent non aux abus des droits de l’homme et à ceux qui disent oui à la réalisation de la vision de la Déclaration universelle. Nous avons tous la responsabilité de faire de cette vision une réalité au XXIe siècle », a-t-elle estimé.
Médecin en République démocratique du Congo (RDC), Denis Mukwegea fondé le Panzi Hospital, établissement qui traite les survivants de violence sexuelle dans l’est du pays et qu’il dirige. Il a accepté le prix au nom de millions de femmes qui souffrent dans leur corps et qui sont « déshumanisées ». Il s’est dit très impressionné par les intentions humbles et généreuses quant aux droits de l’homme, exprimées au cours des tables rondes aujourd’hui. « Nous disposons de très bons textes sur les droits de l’homme, mais dans la pratique nous sommes sur une autre planète », a constaté cet homme de terrain. « Je suis ici pour ces personnes de « l’autre planète », ces femmes qui sont torturées, violées et contaminées volontairement par le VIH. Il y a malheureusement des implications politiques qui font que les intérêts politiques passent avant les intérêts humains », a-t-il regretté.
Répondant à une question d’un journaliste, il a rappelé que les 17 000 hommes de l’ONU sur le terrain en RDC ne pouvaient pas faire face aux 6 000 hommes des groupes armés qui terrorisent et tuent depuis 10 ans. La force d’observation ne veut rien dire pour les victimes, a-t-il relevé, et cette mission devrait avoir un mandat beaucoup plus vigoureux.
Au nom de Human Rights Watch, fondée en 1978 et principale organisation non gouvernementale de défense des droits de l’homme, son Directeur exécutif, Kenneth Roth, a rappelé la série de traités qui existent en matière des droits de l’homme et qui constituent l’héritage de la Déclaration universelle. Mais la plus grande force de la Déclaration, selon lui, c’est le mouvement des droits de l’homme qui est né et qui a évité à bien des gouvernements d’être tentés par la violation de ces droits. « Nous enquêtons et montrons du doigt les gouvernements qui succombent à cette tentation et travaillons avec ceux qui peuvent mettre une pression politique sur eux. Dans les situations de génocide, a-t-il donné comme exemple, nous poussons pour que les auteurs des crimes soient poursuivis en justice. Nous vérifions que la responsabilité de protéger est mise en œuvre par l’envoi de Casques bleus là où c’est nécessaire. »
Passant en revue les lieux où les menaces sont réelles aujourd’hui, Kenneth Roth a parlé, en ce qui concerne la responsabilité de protéger, de la situation dans l’est de la RDC où 3 000 soldats de la paix supplémentaires vont être déployés à la Mission d'observation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC). Notant cependant que cela va prendre trois ou quatre mois, il a demandé comment gérer cette situation d’urgence et protéger les civils. L’Union européenne en a les moyens mais trouve des excuses pour ne pas envoyer ses forces, a-t-il affirmé, dénonçant en particulier le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne.
En ce qui concerne la justice, Kenneth Roth a évoqué la mise en accusation du Président soudanais Omar Al-Bashir. Il est essentiel que le Conseil de sécurité ne cède pas au chantage, a-t-il demandé. S’agissant du Conseil des droits de l’homme, il est dominé par une série de gouvernements répressifs, a-t-il souligné. Enfin, il a dénoncé les méthodes de lutte contre le terrorisme international adoptées par le Gouvernement des États-Unis. Il s’est demandé si le président élu fermerait les centres de détention de la CIA et de Guantanamo. Il a aussi émis l’espoir que les États-Unis signeraient des traités comme celui sur les disparitions forcées et le Statut de la Cour pénale internationale (CPI).
Répondant à une question d’un journaliste, Kenneth Roth a souhaité qu’un meilleur système de responsabilité pour les Casques bleus soit établi, comme un tribunal spécial des Nations Unies pour connaître des actes graves commis par les membres du personnel de maintien de la paix.
Enfin, en mémoire de sœur Dorothy Mae Stang, de la congrégation des sœurs de Notre-Dame de Namur, sont intervenus son frère, David Stang, ainsi que sœur Joan Burk. Celle-ci a rappelé qu’il s’agissait d’une personne ordinaire mais qui avait une compassion et un dévouement extraordinaires. Elle avait épousé la cause du peuple brésilien, au cœur de la forêt amazonienne. Se nourrissant de la parole de Dieu, elle a donné confiance au peuple qu’il pouvait réagir devant la violence et la déforestation de la forêt amazonienne.
« Un autre monde est possible, dans lequel tous les êtres humains auraient ce dont ils ont besoin ». Sœur Dorothy en était fermement convaincue, a expliqué son frère. Il s’est souvenu que, avant d’être assassinée, elle se demandait comment le peuple du monde pouvait partager la planète. Elle voulait que les pauvres aient leur place dans l’économie mondiale, a-t-il indiqué. Née américaine et devenue citoyenne brésilienne, elle était fière d’être citoyenne du monde, a-t-il rappelé.
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