LES DROITS DE L’HOMME AU MYANMAR, EN RÉPUBLIQUE POPULAIRE DÉMOCRATIQUE DE CORÉE ET DANS LE TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ AU MENU DE LA TROISIÈME COMMISSION
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Troisième Commission
20e & 21e séances – matin et après-midi
LES DROITS DE L’HOMME AU MYANMAR, EN RÉPUBLIQUE POPULAIRE DÉMOCRATIQUE DE CORÉE ET DANS LE TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ AU MENU DE LA TROISIÈME COMMISSION
La Commission dialogue avec les titulaires de mandats spéciaux sur la torture et le droit au logement
Les Rapporteurs spéciaux sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, M. Tomás Ojea Quintana; en République populaire démocratique de Corée, M Vivit Muntarbhorn; et dans le Territoire palestinien occupé depuis 1967, M. Richard Falk; sont venus exposer aujourd’hui devant la Troisième Commission chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, les conclusions auxquelles ils sont parvenus dans le cadre de leurs mandats et répondre aux questions des délégations.
Il faudra des générations pour instaurer une démocratie au Myanmar, a averti Tomás Ojea Quintana, qui s’est fermement déclaré en faveur de bonnes relations de travail avec les autorités. Pour ouvrir la voie à la démocratie, il a recommandé la révision des lois, la libération progressive des prisonniers politiques, la réforme des forces armées et l’indépendance du pouvoir judiciaire.
La République populaire démocratique de Corée est dirigée par une hiérarchie bien ancrée uniquement intéressée par la préservation de son pouvoir, a affirmé Vivit Muntarbhorn. Insistant sur le fossé entre l’élite et le reste de la population dans l’accès à la nourriture et sur la pénurie alimentaire chronique qui touche celle-ci depuis les années 90, il a encouragé le Gouvernement à coopérer avec les agences humanitaires de l’ONU. Il a lancé un appel en faveur de la population qui souffre encore de grande pénurie alimentaire. Il a aussi vivement invité l’armée à ne pas violenter la population et a plaidé en faveur du respect de la dignité des personnes retournant dans le pays.
De son côté, M. Richard Falk a recommandé jeudi à l’Assemblée générale de demander à la Cour internationale de Justice (CIJ) de procéder à une évaluation juridique de l’occupation israélienne du point de vue du droit à l’autodétermination des Palestiniens. Il a pressé les Nations Unies d’agir, de manière décisive au nom de la population palestinienne, dans le cadre de son engagement à protéger toute une population vulnérable confrontée à une catastrophe humanitaire en cours. Dans son dialogue avec la Troisième Commission, M. Falk a constaté le refus du Gouvernement d’Israël de respecter les conclusions juridiques de la Cour internationale de Justice dans son avis consultatif de 2004 relatif aux conséquences légales de la construction d’un mur dans le Territoire palestinien occupé. À son avis, c’est pour cette raison qu’il convient de recourir à nouveau à la CIJ. « Cette situation représente un défi pour tout le système des Nations Unies et la communauté internationale sera jugée sur sa capacité à passer de la rhétorique aux actes », a-t-il conclu au terme d’un débat nourri.
Le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, M. Manfred Nowak, a axé son intervention sur l’isolement cellulaire et les atteintes portées aux droits fondamentaux et à la dignité des personnes handicapées, dont la situation a fait l’objet de l’échange de vues avec plusieurs délégations qui désiraient savoir quelles mesures pertinentes pouvaient être mise en œuvre pour garantir leur protection, notamment dans les situations de détention ou dans les centres psychiatriques.
Le dialogue avec la Rapporteure spéciale sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant, Mme Raquel Rolnik, a permis de mettre en évidence l’impact des crises et catastrophes naturelles sur le logement. La Rapporteure a particulièrement mis en avant l’impact préjudiciable de la spéculation foncière en milieu urbain et a invité les États Membres à inclure le droit à un logement décent à tous les niveaux de leurs politiques nationales. Elle a notamment encouragé à la prise de mesures immédiates pour sortir les sans-abris de la détresse, et a encore incité les États à déployer sur ce dossier, une énergie comparable à celle employée pour mettre les banques et les compagnies d’assurance à l’abri de la tourmente financière.
Par ailleurs, la Commission a approuvé sans vote cinq projets de résolution* qui seront transmis à l’Assemblée générale plénière pour adoption définitive. L’Assemblée déciderait notamment que le douzième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale aura lieu à El Salvador, au Brésil, du 12 au 19 avril 2010. Les autres textes concernent les volontaires, l’alphabétisation, le vieillissement et l’Institut africain des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants. Par ce texte, l’Assemblée prierait le Secrétaire général de continuer à lui faire des propositions concrètes visant notamment à doter cet Institut de personnel d’encadrement permanent supplémentaire, en vue de renforcer ses activités.
Les Philippines ont présenté un projet de résolution** sur la traite des êtres humains.
La Troisième Commission reprendra son dialogue avec d’autres rapporteurs spéciaux vendredi 24 octobre à 10 heures
* A/C3/63/L.2, L.6, L.4, L.7, et L.11
** A/C3/63/L13.
PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME
Exposés et dialogues
Situation des droits de l’homme au Myanmar
M. TOMÁS OJEA QUINTANA, Rapporteur spécial de l’ONU sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, a signalé qu’il avait récemment pu constater quelques signes encourageants envoyés par les autorités du Myanmar, s’agissant notamment de la libération de plusieurs milliers de prisonniers, sept d’entre eux étant des prisonniers de conscience. Mais le cas d’un prisonnier de conscience à nouveau arrêté depuis, ainsi que les conditions de détention de Mme Aung San Suu Kyi nous conduisent à nous interroger, a déclaré le Rapporteur spécial.
Il a affirmé vouloir établir de bonnes relations de travail avec les autorités du Myanmar, persuadé que rien ne peut être fait de façon isolée en lançant l’opprobre, alors que la coopération permet le progrès. La libération récente de sept prisonniers de conscience représente une avancée, et il ne s’agit pas de naïveté de ma part de penser cela, a dit le Rapporteur spécial.
Il faudra des générations pour instaurer une démocratie, mais en attendant je voudrais relever quatre éléments qui peuvent nous servir de repères, pour ouvrir la voie à la démocratie. Il s’agirait de revoir et d’amender les lois nationales pour les mettre en conformité avec les normes internationales des droits de l’homme et les dispositions de la nouvelle Constitution, de libérer progressivement tous les prisonniers de conscience, de réformer les forces armées et de les former aux droits de l’homme et de garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire. Ces quatre éléments fondamentaux devraient être achevés avant les élections de 2010, a estimé l’intervenant.
Après la catastrophe causée par le cyclone Nargis, il faudrait 482 millions de dollars américains pour la reconstruction, mais seulement 240 millions de dollars ont été reçus, a ensuite affirmé le Rapporteur spécial, demandant aux États Membres de ne pas oublier les victimes. Dans le contexte de l’après-Nargis, il a noté certains faits préoccupants, comme le retour forcé de certaines familles dans leur village d’origine ou la persistance d’une crise alimentaire qui touche plus de 20% de la population. L’Armée du Myanmar et les groupes armés non étatiques doivent renoncer à utiliser la force contre les civils non armés, arrêter de recruter des enfants, ne plus poser de mines antipersonnel, mettre fin aux déplacements forcés de villageois et au travail forcé, a conclu le Rapporteur spécial.
Le représentant du Myanmar, M. U THAUNG TUN, s’est dit encouragé par la franchise et l’attitude positive du Rapporteur spécial. Le Myanmar a adopté une nouvelle Constitution et des élections auront lieu en 2010. Ce processus, s’il est mené dans le respect des droits de l’homme, peut nous permettre d’atteindre un idéal démocratique pour lequel nous luttons depuis deux décennies, a dit le représentant. Mais la démocratie ne peut être imposée de l’extérieur.
Le représentant a noté avec satisfaction que M. Quintana reconnaît des faits nouveaux importants survenus notamment en septembre dernier avec la libération de prisonniers. Il aurait toutefois préféré que le Rapporteur spécial, au lieu de dire que le Gouvernement a la responsabilité principale de la reconstruction après les dégâts causés par Nargis, demande à la communauté internationale d’apporter son aide, tant le drame fut affreux, a–t-il insisté. Les médias affirment que le Myanmar a été lent à répondre, qu’il a refusé l’aide internationale mais cela est faux, a affirmé le représentant. Le défi est énorme, nous l’avons reconnu dès le début en demandant très vite l’aide des Nations Unies qui ont dès lors lancé un appel à la communauté internationale. Dans l’intervalle, le Myanmar a ouvert ses portes à plus de 2 000 médecins étrangers, venant notamment de Belgique, du Japon, de France ou du Sri Lanka. Le Groupe tripartite établi en vue de coordonner les efforts de secours a confirmé la bonne réaction des autorités après cette catastrophe.
Toutes les allégations d’irrégularités sur le référendum sont inacceptables, et s’agissant de la protection des minorités ethniques, le rapport émane de témoignages de personnes qui vivent hors du pays, a dénoncé le représentant. Il a incité le Rapporteur spécial à davantage de prudence. S’agissant de confiscations de terres également évoquées dans le rapport, elles ne sont pas vérifiées non plus, du point de vue du Représentant du Myanmar. Le défi à relever est de veiller à ce que l’on ne politise pas ces questions, a-t-il jugé. Il a réaffirmé en conclusion que son gouvernement coopérait de façon constructive avec les Nations Unies.
Dans l’échange de vues qui a suivi, les délégations se sont montrées intéressées par les futurs contours de la mission du Rapporteur spécial de l’ONU sur la situation des droits de l’homme au Myanmar. Elles ont souhaité, à l’instar de celles de la Nouvelle-Zélande, du Japon et de la France s’exprimant au nom de l’Union européenne, connaître le calendrier précis des activités du Rapporteur spécial et aussi savoir si les autorités avaient déjà arrêté des plans précis en vue de se conformer aux recommandations émises dans le rapport. Le Royaume-Uni a souhaité savoir par exemple si le Rapporteur spécial avait eu accès à toutes les régions du pays, notamment celles où vivent les minorités ethniques.
Plusieurs délégations ont manifesté leur volonté d’aider le Rapporteur spécial dans sa tâche et se sont demandées quelle était la meilleure façon d’y parvenir d’une part, et d’autre part si les autorités du Myanmar se montraient promptes à accepter les remarques du Rapporteur spécial. S’agissant des réformes législatives nécessaires, la République tchèque a, par exemple, cherché à connaître par quel moyen elle pourrait venir en aide aux autorités. Les États-Unis ont manifesté leur volonté de voir l’ensemble des prisonniers de conscience libérés.
En réponse, le Rapporteur spécial a indiqué qu’il avait pu avoir des entretiens privés avec des prisonniers de conscience en août dernier. Ma visite fut positive bien que trop brève, a-t-il ajouté, en souhaitant retourner au Myanmar avant la fin de l’année 2008. Il a confié qu’il était dans l’attente d’une réponse de la part des autorités et voudrait pouvoir, à l’occasion d’une visite plus poussée, se rendre dans les différentes régions du pays dans lesquelles les situations des droits de l’homme sont compliquées. Ma mission consiste à écouter tous ceux qui ont quelque chose à dire sur le pays, y compris ceux qui n’y vivent pas en ce moment, a ajouté le Rapporteur spécial.
Il est revenu sur les quatre recommandations contenues dans le rapport, signalant qu’il fallait absolument que les autorités y donnent suite avant 2010. Cela aurait d’ailleurs déjà dû commencer il y a deux mois, a-t-il ajouté. Par ailleurs, tous ceux qui ont été arrêtés pour avoir librement exprimé leur opinion ou pour s’être tout simplement réunis, doivent être libérés. Il faut examiner chaque cas, et en cas de détention arbitraire, il faut procéder à la libération du détenu.
Les lois du pays contraires aux droits de l’homme doivent commencer à être réformées, a poursuivi le Rapporteur spécial. Il a estimé qu’il pourrait progresser sur ce point-là lors de sa prochaine mission, notamment en matière d’indépendance de la justice désormais prévue par la nouvelle Constitution.
Rapport du Rapporteur spécial (A/63/341)
D’importants faits nouveaux sont survenus depuis l’an dernier en matière des droits de l’homme au Myanmar, dont les plus importants ont été la finalisation de la nouvelle Constitution en février 2008 et son adoption par référendum en mai. Toutefois, l’amélioration des droits de l’homme au Myanmar constitue toujours une tâche difficile, selon M. Tomás Ojea Quintana (Argentine), Rapporteur spécial de l’ONU sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, qui présente son rapport –daté du 5 septembre- à l’issue de sa visite dans ce pays effectuée du 3 au 13 août 2008, à l’invitation des autorités.
Le Myanmar est uniquement partie à deux instruments clef internationaux relatifs aux droits de l’homme, en l’occurrence la Convention relatives aux droits de l’enfant et la Convention sur toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW).
Le Rapporteur spécial déplore que la majorité des prisonniers politiques soient détenus en permanence en isolement cellulaire, ce qui peut être considéré comme une violation de la nouvelle Constitution. Il déplore également la pratique actuelle d’accuser les activistes politiques et civils de prétendus délits non fondés comme prétexte à leur détention. Il note par ailleurs que la majorité des prisonniers dépendent de la nourriture et des médicaments fournis par leurs familles.
En ce qui concerne les moines en détention qui auraient été défroqués par les autorités, le Rapporteur spécial souligne que, en plus de l’article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, cette pratique enfreint l’article 34 de la nouvelle Constitution qui reconnaît le droit à la libre profession et pratique de la religion. Elle est également en contradiction avec l’article 361 qui reconnaît la position particulière du bouddhisme comme la foi professée par une grande majorité des citoyens.
M. Quintana réitère son appel aux autorités afin qu’elles se réengagent auprès du Comité international de la Croix-Rouge et lui accordent la liberté d’accès aux centres de détention. Il se félicite du moratoire sur l’utilisation de la peine de mort, aucune exécution n’ayant eu lieu depuis 1998.
Concernant l’usage excessif de la force par les forces de sécurité, l’armée et la police antiémeutes lors des manifestations de septembre 2007, le Rapporteur spécial dit ne pas posséder d’informations sur l’intervention d’un tribunal indépendant et impartial mais qu’il continue en revanche de recevoir des informations concernant des prisonniers inculpés par des tribunaux de districts pour leur participation aux événements de cette période. Il marque également sa préoccupation à l’égard de la violence perpétrée par l’armée ou par des groupes armés non étatiques contre des civils non armés.
Il exprime sa préoccupation quant à la situation d’une communauté musulmane dans les zones frontalières de l’État du nord Rakhine. D’après les informations reçues, cette communauté a été arbitrairement privée de sa citoyenneté depuis bien des années, ce qui est contraire à l’article 15 de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée
M. VITIT MUNTARBHORN, Rapporteur spécial de l’ONU sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC), a déclaré que ce pays était sous les projecteurs des médias lors des discussions relatives au problème nucléaire dans le cadre des Pourparlers à Six. Ces Pourparlers entre la RPDC, la Chine, les États-Unis, la Fédération de Russie, le Japon et la République de Corée ont permis d’aborder plusieurs questions relatives aux droits de l’homme. Présentant un rapport annuel qui couvre la période 2007 à mi-2008, il a révélé que la situation des droits de l’homme en RPDC demeure grave dans un certain nombre de domaines. Au chapitre positif, le Rapporteur spécial a rappelé que le pays est État partie à quatre traités relatifs aux droits de l’homme et qu’il a soumis des rapports à ce titre, dont un récemment au Comité des droits de l’enfant. Deuxièmement, il s’est embarqué dans un processus de réforme de ses lois sur le contrôle des drogues et le blanchiment des capitaux. Le pays a adhéré à la Convention unique sur les stupéfiants, à celle sur les substances psychotropes et à la Convention contre le trafic illicite des drogues et des substances psychotropes (1988). D’autre part, le Conseil international de contrôle des drogues a été invité à visiter le pays, ce qui montre que les autorités font preuve de plus d’ouverture.
En troisième lieu, au lendemain des inondations qui ont dévasté le pays en août 2007, les autorités ont permis l’accès des agences humanitaires aux districts affectés et plusieurs sources indiquent que les autorités ont relativement bien coopéré avec les Nations Unies et avec d’autres agences dans la distribution de l’assistance alimentaire et aux groupes dans le besoin. Le Rapporteur spécial a ensuite détaillé la situation négative qui prévaut en RPDC. La structure politique fortement stratifiée et la centralisation de l’économie créent une situation dans laquelle le processus de développement se heurte à une iniquité qui fait que l’élite se porte bien alors que le reste de la population vit en marge du processus de développement.
Le pays est ainsi dirigé par une structure non démocratique, avec une hiérarchie du haut vers le bas bien ancrée et uniquement intéressée par la préservation de son pouvoir, ce qui perturbe les allocations budgétaires. L’élite profite aussi d’une économie clandestine. Le Rapporteur note qu’il n’y a pas de participation du peuple, composante déterminante dans le développement durable Par ailleurs, le pays adhère à une politique du « tout militaire » avec des millions de personnes enrôlées dans la machine et l’industrie de guerre, ce qui gaspille les ressources, vu les nombreuses pénuries et les privations subies par la population. On estime que les forces armées comptent 1 million d’hommes et une réserve de 7,7 millions d’hommes, a-t-il précisé en rappelant qu’en 2006, la course aux armements avait conduit à plusieurs tests nucléaires et de missiles que la communauté internationale avait alors condamnés.
Il a aussi évoqué le fossé entre l’élite et le reste de la population dans l’accès à la nourriture et à d’autres besoins élémentaires. La pénurie alimentaire chronique, qui affecte la population depuis le milieu des années 90, est due d’une part aux catastrophes naturelles, et d’autre part à une mauvaise gestion des autorités.
Au chapitre des recommandations à court terme, il a encouragé le Gouvernement de la RPDC à coopérer de manière constructive avec les agences de l’ONU et les organisations humanitaires, à cesser de pénaliser les réfugiés qui retournent dans le pays et à mettre fin aux exécutions publiques et à d’autres atteintes à la sécurité des personnes. Il a aussi appelé à une coopération transparente et à la responsabilisation pour trouver des solutions aux étrangers enlevés par la RPDC. Le Rapporteur a aussi appelé le pays à lui accorder une invitation à se rendre dans le pays
Pour ce qui est des recommandations à long terme, il a, entre autres, demandé à la communauté internationale de répondre à la nécessité d’une réaction calibrée de l’ensemble du système des Nations Unies aux violations dans ce pays « qui n’ont que trop duré ».
Dans l’échange de vues avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en RPDC, le Royaume-Uni a souligné les conditions particulièrement difficiles dans lesquelles celui-ci a conduit son travail et a exprimé sa préoccupation face aux violations systématiques décrites dans le rapport. La représentante a néanmoins observé de légères améliorations, par exemple le fait que les autorités du pays aient changé la politique concernant les personnes handicapées et que celles-ci soient mieux suivies. Elle a cependant déclaré que tant que la RPDC ne donnera pas le feu vert aux organisations internationales et aux observateurs pour entrer dans le pays, il faudra prendre ces informations avec précaution. Elle a demandé au Rapporteur s’il avait contacté d’autres États qui ont accueilli des demandeurs d’asile originaires de la RPDC.
Le Canada a souligné, à son tour, la nécessité de mettre l’accent sur la nature systématique des violations des droits de l’homme mais a salué l’ouverture de l’accès au Programme alimentaire mondial (PAM) cette année. Il a prié le Rapporteur spécial de fournir quelques exemples de mesures pratiques susceptibles de faciliter l’amélioration du dialogue avec les autorités, de régler les différends et de fournir une assistance technique. Prenant la parole, la représentante de la République de Corée a, sur la situation des personnes déplacées et les demandeurs d’asile, établi une distinction entre deux catégories de réfugiés, à savoir ceux qui quittent le pays pour des raisons personnelles et ceux qui craignent d’être persécutés. Elle a voulu savoir dans quelles conditions vivent les personnes dans leur pays d’accueil. S’agissant de la recommandation du Rapporteur sur le respect du principe de non-retour par la force ou du-non refoulement, elle a demandé comment il s’applique.
Pour sa part, le représentant du Japon a recommandé à la RPDC de régler la question des étrangers enlevés et de se plier aux recommandations contenues dans le rapport. Il a rappelé que les deux pays s’étaient mis d’accord sur les modalités de l’enquête mais que la RPDC n’a pas respecté les termes de cet accord. Il a instamment invité les autorités de ce pays à mettre en place un comité d’enquête avec les pouvoirs requis pour commencer une nouvelle enquête. Il a prié la RPDC d’inviter et de recevoir le Rapporteur spécial. S’adressant au Rapporteur spécial, il a voulu savoir quel type d’assistance le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) offre à ce pays.
La représentante des États-Unis est revenue sur la répression « routinière » dans ce pays et la situation tragique des migrants qui fuient le pays ou encore le statut des enfants nés en dehors de la RPDC. Les violations se poursuivent apparemment dans une impunité totale, a-t-elle souligné, en invitant la communauté internationale à s’attaquer de front à cette question. Elle a assuré que son pays continuera de rechercher des moyens concrets pour améliorer la situation de la population.
Le représentant de la République tchèque a souligné le refus du Gouvernement de la RDPC de coopérer avec le Rapporteur spécial et l’a prié de revenir sur sa position. Il a demandé s’il était possible d’appliquer la notion de « responsabilité de protéger » figurant dans la résolution 1674 de 2006 du Conseil de sécurité
En réponse à ces commentaires, le représentant de la RDPC, M. Kim Song Chol, a qualifié le rapport de « politiquement biaisé et totalement infondé ». Il a maintenu avec force sa position consistant à ne pas reconnaître et à ne pas accepter les résolutions sur son pays. Les informations contenues dans le rapport, a-t-il dit, sont le produit de la politisation des droits de l’homme par les États-Unis et l’Union européenne. Elles n’ont que très peu de rapport avec les droits de l’homme. Les tentatives visant à nous faire changer d’avis ou de régime, a prévenu le représentant, sont une perte de temps et un rêve qui ne se réalisera jamais. Il a précisé que le système socialiste garantit les droits de l’homme et les libertés fondamentales du peuple. En réaction à l’intervention du Japon, il l’a qualifiée d’accusation sans fondement.
La France, au nom de l’Union européenne, a appelé la RPDC à une meilleure coopération avec le Rapporteur. Il a noté que le Gouvernement a toutefois ouvert l’accès aux agences humanitaires mais que la situation reste critique, que le sort des habitants s’aggrave et que la non-coopération continue. Il a prié le Rapporteur de lui indiquer comment la communauté internationale pourrait mieux collaborer avec lui. Parlant de la réforme du système carcérale et des garanties d’un procès équitable, il a voulu savoir quel rôle le Bureau du HCDH pourrait jouer dans ce domaine, notamment pour réduire la vulnérabilité des femmes et des enfants dans le contexte actuel du pays.
Le Rapporteur spécial a indiqué qu’il a contacté le HCR pour traiter du terme « asile ». Il a expliqué qu’en RPDC, les réfugiés qui ont quitté le pays sans visa de sortie sont refoulés à leur retour. Il s’agit ici d’avoir des mesures efficaces pour qu’il n’y ait pas de refoulement aux frontières et qu’il y ait une protection humanitaire, a-t-il dit. M. Muntarbhorn a signalé que la RPDC n’a pas encore accepté les propositions de coopération technique mais il a indiqué que le PAM et le HCR envisagent une entrée dans le pays pour une assistance à long terme. Il a préconisé l’adoption d’une approche exhaustive de la part des Nations Unies, en indiquant, par exemple, qu’il y avait « des points d’entrée » qu’il reste à explorer dans le domaine de l’immigration. Il a jugé utile que le Conseil des droits de l’homme adopte une directive technique en vue d’une approche plus humaine dans le traitement de telles situations par la RPDC.
Rapport du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (A/63/332)
Le Secrétaire général exprime sa grave préoccupation quant au fait que le Chef du Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) ne prenne pas en considération les graves craintes en matière de droits de l’homme, craintes précisées par l’Assemblée générale lors de sa dernière session de 2007. La RPDC continue de juger les résolutions de l’ONU sélectives, politisées et traduisant une politique de « deux poids, deux mesures ». Comme les années précédentes, les demandes de visite du Rapporteur spécial chargé de la situation des droits de l’homme dans le pays sont restées sans suite. Il s’est donc rendu dans plusieurs pays voisins à la recherche d’informations auprès de la société civile, d’interlocuteurs publics et des Nations Unies.
Des rapports émanant du pays continuent de faire état d’arrestations arbitraires, d’absence de procédures équitables et d’état de droit, de cas de torture, de conditions de détention inhumaine, d’exécutions publiques, de mauvais traitement des réfugiés ou des demandeurs d’asile et de travaux forcés. La population est privée de tous ces droits et une répression féroce de la petite criminalité économique serait actuellement en cours, dont la fréquence a augmenté sous l’effet de la grave pénurie de denrées alimentaires et des conditions de vie difficiles. Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés continue d’observer qu’un flot constant de ressortissants de la RDPC quitte le pays pour chercher ailleurs protection et assistance.
Dans ses conclusions, le Secrétaire général salue le fait que le Gouvernement de la RPDC ait accepté l’aide alimentaire externe. Le Secrétaire général demande au Gouvernement d’adopter des mesures pour garantir la sécurité alimentaire et l’encourage à continuer de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire.
Préoccupé par l’absence de progrès en matière des droits fondamentaux et des libertés, le Secrétaire général exhorte le Gouvernement à apporter des signes tangibles de réformes. Il lui demande avec insistance de donner au Rapporteur spécial accès à des informations sur la question.
Le rapport du Rapporteur spécial figure au document A/63/322.
Situation des droits de l’homme dans le Territoire palestinien occupé depuis 1967
M. RICHARD FALK, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967, a indiqué que depuis sa prise de fonctions le 1er mai dernier, il n’a pas été en mesure de se rendre dans le Territoire palestinien occupé et en Israël. La coopération de l’État d’Israël pour me permettre une visite, qui est le seul moyen de me rendre compte par moi-même de la situation, est souhaitable dans un avenir proche, a ajouté le Rapporteur spécial. Les conclusions contenues dans le rapport du 25 août (A/63/326) sont formulées à partir de diverses sources, notamment des mises à jour des rapports précédents, et d’un voyage privé effectué en Israël, dans les colonies et à Ramallah en juillet, a indiqué le Rapporteur spécial, en précisant qu’il avait essayé d’être aussi pertinent que possible s’agissant de la situation de Gaza et de la Cisjordanie.
Le Rapporteur spécial a ensuite déclaré que l’État d’Israël n’avait pas respecté la Déclaration commune d’Annapolis du 27 novembre 2007 qui plaide pour un renouveau du processus de paix, une circulation plus libre des Palestiniens et le gel du développement des colonies. Au contraire, de nouveaux points de passage ont été installés en Cisjordanie et le rythme d’expansion des colonies s’est encore accéléré. Ces développements constituent des violations graves des droits de l’homme des Palestiniens et diminuent leurs perspectives d’avenir, a déclaré le Rapporteur spécial. Évoquant le cessez-le-feu entré en vigueur le 20 juin 2008 entre Gaza et Israël grâce aux bons offices de l’Égypte, le Rapporteur spécial a admis qu’il avait permis de faire reculer les violences politiques mais a constaté dans le même temps, que l’État d’Israël n’avait pas pour autant facilité la libre circulation des biens et des personnes. Au contraire, le siège de Gaza s’est encore renforcé depuis, a souligné le Rapporteur spécial. Les conséquences en sont terribles pour la population de Gaza, des malades sont morts faute d’avoir pu obtenir les autorisations de sortie nécessaires. La crise sanitaire aggravée qui affecte les Palestiniens touche à la fois leur santé physique et leur santé morale, comme le rapportent plusieurs organisations non gouvernementales. Le droit à la santé est pourtant un droit fondamental internationalement reconnu, a rappelé le Rapporteur spécial. Il s’agit là également d’une violation de la quatrième Convention de Genève car ces restrictions de circulation ne sont pas motivées par des impératifs sécuritaires crédibles, a dit le Rapporteur spécial.
La population de Gaza est collectivement punie par l’État d’Israël depuis juillet 2007, ce qui est pourtant interdit par l’Article 33 de la quatrième Convention de Genève. Les membres de la communauté internationale qui sont tenus de faire respecter les obligations contenues dans la quatrième Convention, doivent se sentir interpellés par ces constats, a estimé le Rapporteur spécial. L’article 1 stipule en effet que les États parties doivent, non seulement se soumettre aux obligations de la Convention, mais aussi qu’ils doivent s’assurer de leur respect, en toute circonstance.
Le Rapporteur spécial a ensuite évoqué le refus de l’État d’Israël de se conformer aux conclusions auxquelles sont parvenus 14 des 15 juges de la Cour internationale de Justice (CIJ) dans un jugement consultatif de 2004 sur les conséquences juridiques de la construction d’un mur dans le Territoire palestinien occupé, conclusions d’ailleurs largement soutenues par l’Assemblée générale. Le Rapporteur spécial a proposé que l’Assemblée générale demande un deuxième avis consultatif à la CIJ du point de vue du droit des Palestiniens à l’autodétermination, compte tenu du fait que la violation de ce droit se poursuit depuis plus de 40 ans.
Il appartient aux Nations Unies de protéger de toute urgence une population vulnérable confrontée à une catastrophe humanitaire, a considéré le Rapporteur spécial. Il a évoqué à titre d’exemple le cas de 250 étudiants palestiniens recensés par le Centre palestinien pour les droits de l’homme qui ne pourront pas se rendre à l’étranger pour étudier, malgré les bourses dont ils sont titulaires. Sept d’entre eux devaient étudier dans des universités américaines. Cela prive le monde d’informations transparentes sur le confinement de Gaza, a dénoncé le Rapporteur spécial. L’extension des colonies en violation de l’article 46 de la quatrièmeConvention de Genève alourdit le fardeau des Palestiniens qui tentent de se déplacer en Cisjordanie, a-t-il ajouté.
Le Rapporteur spécial a recommandé à l’Assemblée de demander à la CIJ une évaluation juridique de l’occupation par Israël du Territoire palestinien occupé. Selon lui, d’autre part, l’assistance du Conseil de sécurité devrait être sollicitée dans la mise en œuvre de l’avis consultatif rendu par la CIJ en 2004 sur les conséquences juridiques de la construction du mur. Il a proposé que la Suisse convoque une réunion des États parties à la Convention de Genève pour envisager ensemble comment remplir les obligations juridiques nées de la Convention. Selon le Rapporteur spécial, il faudrait également que les manquements d’Israël à ses engagements résultant d’Annapolis soient relevés par les entités pertinentes des Nations Unies qui devraient d’ailleurs reprendre leur assistance économique en priorité vers Gaza, compte tenu de la souffrance de la population.
Mme ADY SCHONMANN (Israël) s’est déclarée consternée par le rapport qu’elle a jugé déséquilibré et porteur de préjugés. Plusieurs pays se joignent à nos demandes répétées de faire évoluer le mandat du Rapporteur spécial pour qu’il prenne également en considération les violations des droits de l’homme commises par des Palestiniens, mais cela n’aboutit pas en raison des pressions politiques de certains pays devant le Conseil des droits de l’homme, a dénoncé la représentante. Les vues fortement politisées du Rapporteur lui-même, dont les publications passées se montraient déjà véhémentes à notre endroit, ne peuvent rien augurer de bon, a estimé la représentante.
Dans le rapport de M. Falk, le Hamas est présenté comme une entité légitime, ce qui nous préoccupe particulièrement, a dit la représentante. C’est un affront pour notre instance alors que le Hamas, organisation terroriste, viole les droits de l’homme, a-t-elle insisté. Le rapport est erroné, ignorant notamment le fait que les dirigeants du Hamas demandent l’anéantissement d’Israël et ne mentionnant pas une seule fois les attaques-suicide terroristes des Palestiniens, comme en juillet dernier à Jérusalem. Le rapport ne cite pas non plus le fait qu’Israël accorde des autorisations par milliers, chaque année, pour que les Palestiniens puissent se soigner en Israël.
Si Israël avait exercé un contrôle effectif sur Gaza, il aurait empêché les roquettes et les contrebandes, a affirmé la représentante. Le rapport ne dit pas que la plupart des attaques terroristes visent des civils à partir de zones dans lesquelles vivent des civils.
Israël, pourtant, veut s’engager dans de sérieuses négociations avec des Palestiniens modérés, a assuré la représentante, en déplorant que le droit des Israéliens à la vie est complètement ignoré par le rapport.
M. RIYAD H. MANSOUR, Observateur permanent de la Palestine, a souhaité que le Rapporteur spécial puisse rapidement se rendre sur place et a demandé à Israël s’il considérait également que le rapport du Secrétaire général présenté au Conseil de sécurité, dans lequel le Secrétaire général dénonce le refus d’Israël de se conformer à ses obligations au titre de la Feuille de route, était également un rapport erroné. Il a rappelé qu’Israël ne se soumettait pas non plus aux recommandations du Quatuor, ni aux demandes répétées de l’Union européenne de cesser les implantations de nouvelles colonies. Le moment est venu pour les Israéliens d’arrêter de penser que tout le monde est contre eux et de permettre enfin à un État palestinien indépendant de voir le jour avec Jérusalem-Est pour capitale.
Dans leur échange de vues avec le Rapporteur spécial, les délégations dont la France au nom de l’Union européenne, l’Afrique du Sud, Cuba, l’Indonésie, la Malaisie, la République islamique d’Iran, l’Égypte, la République arabe syrienne et le Soudan ont été nombreuses à exprimer leur soutien au mandat sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés et à demander comment amener Israël à honorer les engagements d’Annapolis et plus largement, à respecter le droit humanitaire. Le Liban a fait remarquer que le Conseil de sécurité n’assumait pas lui-même ses responsabilités, alors comment demander à Israël de se conformer aux recommandations de la Cour internationale de Justice? Les États Membres des Nations Unies, au titre du droit humanitaire, ont-ils le droit de rompre le blocus de Gaza, s’est encore interrogé le représentant du Liban. La délégation des États-Unis a critiqué la partialité du rapport de M. Falk, estimant que les négociations d’Annapolis étaient sincères et qu’Israël allait s’y tenir. La saisine de la Cour internationale de Justice ne paraît pas appropriée et le Conseil de sécurité ne devrait pas intervenir pour rendre les décisions de la CIJ contraignantes, a déclaré la représentante, qui a appuyé Israël dans sa volonté de voir le mandat de M. Falk élargi. Le représentant de la Suisse a plaidé pour une analyse plus poussée des responsabilités respectives d’Israël et de l’Autorité palestinienne s’agissant du déclin de la situation sanitaire observé dans les territoires palestiniens occupés. S’agissant d’une prochaine visite du Rapporteur spécial dans cette région, le représentant suisse a également voulu savoir si elle serait possible et si, le cas échéant, le Rapporteur prévoit une visite conjointe avec le titulaire du mandat spécial sur le droit à la santé.
Dans ses réponses, le Rapporteur spécial a d’abord vivement regretté les accusations personnelles de la représentante d’Israël et a garanti qu’il ne soutenait en aucun cas les actes terroristes. Il s’est dit résolu à ce que son mandat permette d’aboutir à la paix, dans le respect du droit international et des droits de l’homme. Tout en souhaitant qu’un dialogue constructif puisse être instauré, il a estimé que le Gouvernement israélien, en proférant des menaces à son encontre, au cas où il choisirait de pénétrer sur son territoire, a commis une grave erreur. Mon objectif est simplement de rapporter ce que je vois, de témoigner de la réalité, mais je suis prêt à tenir compte des arguments du Gouvernement israélien, a dit le Rapporteur spécial. Il ne faut pas occulter le réel désespoir des Palestiniens, a—t-il dit, ajoutant que le refus d’Israël de donner suite aux engagements pris à Annapolis, notamment en continuant à étendre ses colonies, lance un message aux Palestiniens et au monde. Ce message est de dire que l’engagement d’Israël envers la paix n’est pas quelque chose de sérieux, car le minimum de la bonne foi serait de geler tout développement de colonies de peuplement et certainement pas d’accélérer le rythme de leur expansion. Il n’y a pas d’explication crédible à ce comportement, a considéré le Rapporteur spécial, estimant que la saisine de la CIJ pour avis consultatif était de ce fait amplement justifiée.
C’est un défi pour les États Membres, comme pour le Secrétaire général des Nations Unies, qui doivent chercher à obtenir un certain degré de mise en œuvre des engagements d’Annapolis, a dit le Rapporteur spécial. Il a regretté que ses remarques concernant les conséquences positives du cessez-le-feu n’aient pas été relevées par les délégations des États-Unis et d’Israël. Personne ne remet en cause le droit légitime d’Israël à l’autodéfense, mais ce qui est remis en cause, ce sont les abus dus à des préoccupations sécuritaires souvent exagérées, a estimé le Rapporteur spécial.
En conclusion, il a complété les recommandations contenues dans son rapport, en disant qu’un groupe d’États Membres pouvait commencer un processus d’enquête sur la façon dont la population occupée pouvait être protégée. Les Palestiniens depuis le début des Nations Unies ont un lien spécial avec la communauté internationale qui peut se saisir de cela, a estimé le Rapporteur spécial. Seules des pressions politiques peuvent expliquer que l’on ne cherche pas à évaluer la pertinence de cette responsabilité de protéger.
Citant le Président brésilien Lula qui avait, en 2006, pointé la défaillance de la communauté internationale dans ce dossier, le Rapporteur spécial a repris la proposition d’alors, selon laquelle une conférence des Nations Unies avec la participation des pays de la région et d’autres, serait utile. Ni la Feuille de route, ni le Quatuor, ni les discussions d’Annapolis n’ont permis d’avancer, a estimé le Rapporteur spécial. Il a donc appelé l’Assemblée générale à prendre au sérieux la convocation d’une telle conférence. La communauté internationale sera jugée sur sa capacité à passer de la rhétorique aux actes, a conclu le Rapporteur spécial.
Rapport du Rapporteur spécial (A/63/326)
L’Organisation des Nations Unies devrait examiner quelle est sa responsabilité propre pour ce qui est du bien-être des Palestiniens vivant sous occupation illégale, en particulier s’agissant des irrégularités concernant le contrôle des frontières, la liberté et l’indépendance des journalistes et la crise sanitaire générale, en particulier à Gaza, recommande le nouveau Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, M. Richard Falk, qui a pris ses fonctions début mai.
Compte tenu de la crise sanitaire à Gaza, les membres de la communauté internationale, et notamment l’Organisation des Nations Unies, devraient reprendre leur assistance économique à titre hautement prioritaire. Face à la menace de catastrophe humanitaire, il importe au plus haut point de faire tout ce qui est possible pour alléger les souffrances humaines. Il s’agit d’une responsabilité envers la population civile de Gaza qui n’a rien à voir avec le respect par le Hamas des conditions politiques définies par Israël ni avec le maintien du cessez-le-feu, plaide M. Falk dans son rapport.
Le Rapporteur spécial indique, qu’aux fins du rapport –qui se veut impartial-, il entend, sans que cela ait d’implications politiques, traiter l’administration du Hamas à Gaza comme une « autorité de facto ».
Il conclut que, compte tenu du fait que les Conventions de Genève ont fait l’objet de graves violations pendant longtemps, il serait bon de se pencher sérieusement sur les obligations juridiques des parties à ces traités afin de veiller à ce que les engagements de fond mentionnés à l’article premier soient respectés. Le rapporteur estime qu’il pourrait être envisagé initialement de prier instamment le Gouvernement suisse, dépositaire des Conventions de Genève, de convoquer une réunion des États parties afin d’examiner comment ils peuvent s’acquitter de leurs obligations juridiques, compte tenu du fait qu’Israël persiste à violer son régime juridique d’occupation.
Évoquant les conséquences d’une occupation prolongée durant laquelle les directives de l’ONU relatives au respect des droits reconnus par la loi ont été systématiquement ignorées, M. Falk indique qu’il conviendrait que tous les organismes compétents des Nations Unies prennent dûment note du fait qu’Israël ne respecte pas les engagements qu’il a pris lors du Sommet d’Annapolis du 27 novembre 2007 de mettre un terme à l’expansion des colonies de peuplement, d’améliorer la liberté de mouvement en Cisjordanie et de satisfaire les besoins humanitaires des Palestiniens qui vivent sous son occupation.
Nommé le 26 mars 2008, le Rapporteur spécial n’a pas encore été à même de se rendre en Israël et dans le Territoire palestinien occupé pour s’acquitter pleinement de son mandat et présenter un témoignage de première main.
Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
M. MANFRED NOWAK, Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, a déclaré d’emblée que l’interdiction de la torture est absolue et nul ne pouvait y déroger. Pourtant en contraste, on ignore avec précision si des formes de torture et autres peines dégradantes sont infligées ou si elles ont diminué. Les détenus font partie des groupes humains vulnérables oubliés par le monde et la torture est encore très utilisée, a-t-il rappelé, en mettant l’accent sur l’absence totale de transparence et l’opacité dans de nombreux cas qui couvre cette pratique. Le manque d’indépendance du système judiciaire fait que des pressions sont exercées sur le système pénal où cette pratique est utilisée. Des victimes sont encore attachées sur une chaise, nues et les yeux bandés. Des détenus subissent tabassage avec barre de fer, câble, bottes ou avec d’autres moyens comme l’électrocution ou la suspension les pieds en l’air. Le temps combiné que les détenus peuvent passer entre la garde à vue et la détention préventive dans des pays où il existe des dysfonctionnements du système judiciaire peut durer des années.
L’intervenant a signalé que dans bien des endroits, les postes de police et de détention sont inaccessibles et fermés aux enquêtes indépendantes. La question d’atteinte aux droits de l’homme dans les situations de détention inhumaine ne peut être résolue en un jour, a-t-il constaté. Il a appelé à redoubler d’efforts pour autonomiser les détenus et leur permettre de jouir de leurs droits dans la dignité. Il a en particulier décrit la situation des personnes handicapées, vulnérables aux abus et à la violence, y compris sexuels. Au niveau médical, elles sont soumises à des traitements intrusifs et inhumains sans leur consentement et sont fréquemment forcées à l’isolement ou marginalisées. Il a souligné la responsabilité de l’État à ce sujet. Il a attiré l’attention sur la Déclaration d’Istanbul sur le recours à l’isolement cellulaire et les effets de cette pratique. L’isolement est parfois utilisé pour les personnes handicapées, en particulier dans les centres psychiatriques, a noté M. Nowak. Après avoir énuméré les méfaits d’un tel isolement sur le bien-être physique et psychique d’une personne, il l’a qualifié de forme de torture et a appelé à sa réglementation par la loi.
S’agissant des invitations de pays, il a expliqué que la visite des mandats spéciaux doit constituer un point de départ pour la coopération et qu’il se rendra en Guinée équatoriale, en attendant une réponse de la Fédération de Russie. Au Danemark, où il s’est rendu en mai 2008 ainsi que dans le Groenland, il a déploré que le Code pénal danois ne comporte pas de définition du crime de torture et la persistance du recours au régime cellulaire. Il a dit son inquiétude du fait que le pays envisage de recourir aux assurances diplomatiques pour retourner des terroristes présumés dans des pays connus pour leur pratique de la torture. Il s’est, par contre, déclaré vivement impressionné par le système de détention danois inspiré du « principe de normalisation », dans lequel les détenus mènent une vie reflétant, autant que possible, la vie en dehors de la prison. Sur sa visite en Moldova, en juillet 2008, il a positivement commenté la démarche de réforme législative en cours, notamment l’intégration des droits de l’homme en tant que composante prioritaire. Il a néanmoins exprimé ses inquiétudes face à l’écart entre le cadre normatif et la réalité sur le terrain en ce qui concerne la lutte contre la torture et les conditions inhumaines dans les centres de détention, ainsi qu’en matière de lutte contre la violence à l’égard des femmes. Les infrastructures de protection des victimes sont insuffisantes, a-t-il estimé.
Dans l’échange de vues qui a suivi, le représentant de la France,s’exprimant au nom de l’Union européenne, a regretté que pas moins de 23 pays aient refusé de coopérer avec le Rapporteur spécial. Il a incité les pays cités au paragraphe 10 du rapport à coopérer pleinement avec lui. Parlant des visites du Rapporteur au Danemark et en Moldova, pays européens, il a estimé que cela montre bien qu’aucun pays n’est exclu de son mandat. Il a demandé quelles normes concrètes pourraient être appliquées aux personnes handicapées en détention et quels étaient les liens entre la peine de mort et les autres traitements inhumains, cruels et dégradants. Le représentant des États-Unis s’est déclaré choqué par les informations sur les actes commis sur les personnes handicapées. Il s’est dit en désaccord avec certains éléments figurant dans le rapport mais a été dans le sens d’une indemnisation de ces personnes.
La déléguée de l’Uruguay a apporté des révisions aux remarques figurant dans le rapport provisoire concernant son pays. Elle a jugé que ces informations n’étaient pas valables car la législation a changé depuis. Pour ce qui est de la garde policière, il faut que le personnel policier se charge du bien-être physique et mental de la personne dont il a la garde. Les droits des personnes handicapées sont protégés par la loi et en vertu des instruments internationaux en la matière auxquels l’Uruguay a adhéré. Elle a aussi fait référence aux indemnisations financières pour les dommages subis par les victimes de la torture pendant les années de régime militaire. La représentante de la Thaïlande a félicité M. Nowak pour son rapport intérimaire exhaustif qui arrive à point nommé s’agissant de personnes handicapées et alors que la Convention relative aux personnes handicapées est entrée en vigueur en mai de cette année. Elle a souligné que les fonctionnaires ont le devoir de rapporter tous les cas d’exaction à l’encontre de ces personnes. L’étude actuelle des Nations Unies sur les personnes handicapées est-elle pertinente pour traiter des droits des personnes handicapées et qu’en est-il des femmes handicapées souffrant de mauvais traitements?
Le représentant de la Suisse a mis l’accent sur le caractère invisible de la torture. Quelles mesures concrètes pourraient être prises pour que les pratiques susmentionnées soient considérées comme des formes de mauvais traitement, a-t-il interrogé? La déléguée du Danemark a signalé que son pays n’avait pas de projet de recours aux assurances diplomatiques, bien qu’il prévoit l’extradition de personnes étrangères présentant un danger mais après avoir pris les mesures requises et dans le respect du principe de non-refoulement.
Le représentant de la Norvège s’est dit impressionné par la capacité d’analyse de M. Nowak sur un sujet si opaque. Il s’est demandé si M. Nowak avait débattu avec le Comité de la Convention contre la torture pour s’assurer qu’il n’y a pas de chevauchement. La déléguée du Nigéria a souhaité avoir des informations complémentaires sur les cellules d’isolement dans son pays afin de corriger cette situation. Elle a noté que ces cellules sont fréquemment utilisées dans le monde pour empêcher le détenu violent de se faire du mal ou d’attenter contre autrui. Elle a émis le désir de son gouvernement d’améliorer la situation dans les centres de détention sur son territoire, dans le plein respect de la protection des droits de l’homme. Elle a réaffirmé l’attachement du Nigéria à la Convention contre la torture.
Répondant aux questions, le Rapporteur spécial a recommandé que soient mis en place, par exemple, des mécanismes de prévention nationale qui prennent en compte les personnes handicapées en visitant les centres de détention. Il faut que de tels mécanismes soient véritablement dotés de ressources, qu’ils soient indépendants et que leurs membres puissent se rendre dans tous les centres de détention. Il a exhorté les gouvernements à ne pas exécuter une condamnation à mort lorsque la méthode correspond à une torture ou à des méthodes dégradantes. Il a invité l’Assemblée générale et le Conseil des droits de l’homme à se demander dans quelle mesure le maintien de la peine de mort est compatible avec les instruments internationaux relatifs aux traitements cruels inhumains et dégradants.
Il a admis que la définition de la torture à l’article 1 de la Convention est assez limitée, qu’il y a une référence claire à ces agissements dans les textes sur les situations privées comme la violence conjugale dans le domaine privé. Parlant des lois nationales et pratiques optimales sur la violence privée à l’encontre des personnes handicapées, M. Nowak a indiqué que plusieurs pays ont une législation d’une large portée, comme au Danemark où la loi sur la violence domestique protège aussi les handicapés.
Le Rapporteur a présenté ses excuses à l’Uruguay pour la confusion dans le rapport. Il ne voulait pas dire que ce pays commettait actuellement des exactions et se référait en réalité à l’ancien régime. À la Thaïlande, il a répondu que son dernier rapport au Conseil des droits de l’homme soulève le problème des femmes assujetties à la torture, y compris le viol et d’autres formes d’exactions, ceci s’applique aussi aux femmes handicapées, également au lieu de aussi victimes de violence sexuelle dans la vie privée. Il a répondu à la Suisse qu’il ne faudrait avoir recours à cette mesure que dans un ultime recours. Les suspects peuvent être isolés pour une courte période seulement. M. Nowak a compris que le Danemark avait effectivement recouru à des assurances diplomatiques lors de sa visite récente. Il a mentionné le Nigéria dans le rapport sur le cas de mineurs en isolement. Il s’est félicité de la coopération avec ce pays, y compris de la part de l’ancien Président qui s’était engagé à mettre en œuvre ses recommandations, y compris dans les cas d’handicapés dans les centres de sécurité.
La représentante de Singapour a pris la parole pour réagir à la réponse du Rapporteur spécial sur le lien entre la peine de mort et la torture. Elle a invité le Rapporteur à la prudence pour ne pas mettre en cause son mandat.
M. Nowak a répondu que s’il s’agit de jurisprudence, cette question s’inscrit dans son mandat puisqu’il s’agit d’infliger une souffrance inhumaine à la personne humaine et que cela relève donc de la torture. Il a rappelé l’appel au moratoire sur l’abolition de la peine de mort. Il avait demandé à savoir dans quelle mesure la peine de mort infligeait des peines inhumaines, cruelles et dégradantes. Il faudrait se pencher davantage sur cette question, a-t-il conclu.
La représentante de la Mongolie, faisant référence à la partie du rapport sur le régime cellulaire, a fait remarquer que les informations concernant son pays paraissent remonter à une période passée d’il y a trois ans, à l’issue de la visite du Rapporteur spécial dans le pays. Depuis, des mesures pratiques ont été prises par la Mongolie qui est surprise de voir ces mêmes informations dans le rapport actuel.
En réponse, le Rapporteur spécial a dit avoir simplement cité des exemples de ses missions qui touchent à l’isolement cellulaire. Il n’a reçu aucune information sur les changements intervenus en Mongolie depuis son dernier rapport.
Logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant
Mme RAQUEL ROLNIK, Rapporteure spéciale sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant, qui est entrée en fonction au mois de mai dernier, a présenté le premier rapport de ce mandat jamais évoqué devant l’Assemblée générale. Elle a d’abord rappelé que plusieurs milliards de personnes vivaient dans des conditions indécentes dans le monde entier, y compris dans les pays développés et s’est attachée ensuite à résumer les conclusions contenues dans son rapport, fondées pour une bonne part sur le travail de son prédécesseur à ce poste.
Il en ressort que le manque de logements disponibles à un prix abordable, la spéculation immobilière et foncière, les migrations urbaines imprévues et forcées, les destructions et les déplacements de population consécutifs à des conflits, des catastrophes naturelles ou des projets de grande ampleur, expliquent le nombre important de personnes sans domicile fixe. La pauvreté en effet n’explique pas à elle seule la présence des sans domicile fixe dans les pays en développement comme dans les pays développés. Les bidonvilles et campements précaires qui abriteraient plus d’un milliard sur terre, selon UN-Habitat, constituent également des habitations indécentes qui ne permettent pas par exemple, un accès satisfaisant à des services sanitaires. La jouissance des droits civils, politiques, économiques et socioculturels risque également d’être entravée par ce type de logement. Ces situations sont d’autant plus importantes à prendre en compte que l’augmentation des prix immobiliers, à l’achat comme à la location d’ailleurs, ne permet plus aux habitants de ces cités précaires d’évoluer facilement vers un logement adéquat. Dans ces cas-là, le choix d’un habitat décent peut se faire au détriment du droit à l’alimentation, à l’éducation ou à la santé, a fait remarquer la Rapporteure spéciale.
Les expulsions forcées constituent une violation aux droits de l’homme et particulièrement du droit à un logement décent, a ensuite rappelé la Rapporteure spéciale. Elles continuent pourtant d’être mises à exécution partout dans le monde, conduisant des milliers de personnes, dont des femmes, des enfants et des groupes vulnérables, vers la misère. Des législations appropriées décidées dans le cadre de politiques du logement permettraient pourtant d’éviter cela, a noté la Rapporteure spéciale.
Mme Rolnik a également mis en avant le fait que souvent la discrimination sur une base ethnique, religieuse, à l’égard des populations migrantes vulnérables, ou sexiste pouvait conduire à des discriminations sur le logement. Les confiscations de terres, notamment aux peuples autochtones, le déni du droit d’héritage pour les femmes ou les expulsions forcées conduisent parfois justement à de tels abus, a-t-elle développé.
Mon mandat comporte une approche sexospécifique, a déclaré la Rapporteure spéciale car les violences contre les femmes, la discrimination culturelle et sociale dont elles sont victimes, sont quelques-uns des obstacles à leur jouissance effective du droit à un logement décent.
Pour que le plus grand nombre bénéficie d’un logement décent, certains outils ont été mis au point, consistant notamment à expliquer aux États comment procéder pour éviter les expulsions forcées et comment réagir dans le respect des droits de l’homme après une expulsion inévitable, a indiqué la Rapporteure spéciale, qui entend poursuivre dans cette voie ouverte par son prédécesseur. Considérant que trop de décideurs ignorent encore jusqu’à l’existence d’un droit à un logement décent, la Rapporteure spéciale entend diffuser plus largement les informations concernant les implications de ce droit. Elle a également cité plusieurs autres priorités de son mandat qui devraient lui permettre, entre autres, de mettre à jour les relations entre certains grands projets, notamment sportifs, et les atteintes au droit à un logement convenable, d’insister sur les reconstructions consécutives à une catastrophe naturelle ou à un conflit, ou de mettre en garde contre les conséquences des changements climatiques.
En conclusion, Mme Raquel Rolnik a souhaité que le développement urbain prenne davantage en considération le droit à un logement décent, notamment en restreignant la spéculation. Le marché ayant échoué à garantir un logement décent à tous, comme nous le montre encore largement la crise financière actuelle, les États Membres devraient inclure le droit à un logement décent à tous les niveaux de leurs politiques nationales. Il s’agit de prendre des mesures immédiates pour sauver notamment la détresse des sans-abris, a-t-elle encore dit, et a invité les États Membres à déployer sur ce dossier une énergie comparable à celle employée pour mettre les banques et les compagnies d’assurance à l’abri de la tourmente financière.
Le dialogue interactif avec Mme Rolnik a permis d’aborder les répercussions de la crise financière et des changements climatiques sur la question du logement convenable, suite à plusieurs remarques émanant de la Chine, de la Thaïlande, du Brésil, allant dans le même sens. La délégation de Cuba s’est également demandée quel rôle le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) devait jouer après une catastrophe. La représentante de la France, intervenant au nom de l’Union européenne, a cherché à connaître les contours précis du mandat de Mme Rolnik et notamment voulu savoir dans quelle mesure l’opposabilité du droit à un logement décent aurait un impact sur son mandat. Pour la Thaïlande, il est important d’agir dans ces domaines en tenant compte des situations propres à chaque pays.
En réponse, la Rapporteure spéciale a reconnu l’importance croissante des changements climatiques sur la question du logement convenable. Des vagues de migration ne sont pas à exclure, notamment dans la région des Caraïbes et il ne faudrait pas qu’elles aboutissent à des catastrophes, a-t-elle prévenu. Ce sont des efforts préalables qu’il faut consentir, a-t-elle préconisé, invitant les États Membres à se pencher sur les cas de maisons situées dans des zones vulnérables mais dont les habitants n’auront pas forcément besoin de se déplacer. C’est une politique de prévention des risques qu’il faut mettre sur pied.
Le sujet du logement est terriblement complexe dans sa globalité, a poursuivi l’intervenante. Elle entend prochainement se rendre aux Maldives pour aborder la question des changements climatiques. Une des missions qu’elle s’est assignée sera de faire passer le message du logement convenable, auprès d’un public aussi large que possible, en s’appuyant notamment sur le travail des entités spécialisées des Nations Unies et de la société civile.
Elle a également indiqué qu’il fallait de son point de vue, intégrer la question du logement convenable dans les mesures législatives nationales, car cela permet aux ressortissants de s’organiser pour revendiquer auprès des tribunaux la jouissance de ces droits. L’adoption du protocole du Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels est, à cet égard, essentielle. Consciente qu’il n’y a pas de modèle unique applicable à tous les pays dans le domaine du logement, Mme Raquel Rolnik a estimé que les États Membres devaient avant tout se rendre compte qu’il s’agit d’un domaine public et ne pas laisser ces questions au secteur privé.
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