JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA FEMME: LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL EXHORTE LE CONSEIL DE SÉCURITÉ À CRÉER UN MÉCANISME DE LUTTE CONTRE LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES
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Journée internationale de la femme
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JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA FEMME: LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL EXHORTE LE CONSEIL DE SÉCURITÉ À CRÉER UN MÉCANISME DE LUTTE CONTRE LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES
À l’occasion de la célébration de la Journée internationale de la femme, ce 8 mars, le Secrétaire général des Nations Unies, M. Ban Ki-Moon, a exhorté le Conseil de sécurité à créer un mécanisme de lutte contre la violence faite aux femmes sur la base de la résolution 1325 (2000) relative aux femmes, à la paix et à la sécurité. Prenant la parole pour la première fois à cette occasion en sa qualité de Secrétaire général des Nations Unies, il a aussi proposé que l’Assemblée générale consacre tous les ans un point de son ordre du jour à la violence faite aux femmes et aux petites filles. Commémorée tous les ans le 8 mars, la Journée internationale de la femme se tenait cette année sur le thème: « Mettre fin à l’impunité dont jouissent les auteurs de violence à l’égard des femmes et des filles ».
« Je souhaite être un allié dans la course pour l’égalité entre les sexes », a insisté ce matin Ban Ki-Moon. Le Secrétaire général a reconnu que les Nations Unies devaient être à l’avant-plan des efforts d’autonomisation et il a encouragé les États Membres à remplacer les structures actuelles par une seule entité dynamique qui devrait mobiliser les forces du changement au niveau mondial. Par une approche intégrée et holistique et des mesures de reddition de compte, nous pouvons faire en sorte que nos efforts de prévention aient les effets escomptés, a estimé M. Ban Ki-moon. Pour la Présidente de l’Assemblée générale, Sheikha Haya Rashed Al Khalifa, une action s’impose d’urgence, non seulement dans les zones et dans les périodes de conflits, mais aussi en vue de panser les blessures que les femmes subissent même en temps de paix.
Tirant cinq leçons de son expérience de Procureure du Tribunal international pour l’ex-Yougoslavie, Mme Carla Del Ponte, a estimé qu’il était important d’inscrire l’engagement à lutter contre la violence sexuelle dans les règlements et dans les mandats des Tribunaux spéciaux et des Cours. Une autre leçon à tirer des évènements qui se sont produits en ex-Yougoslavie exige que l’on fasse preuve d’innovation, afin que les processus juridiques soient sûrs, et moins traumatisants pour les femmes, a recommandé Mme Del Ponte. Le Procureur du TPIY a aussi insisté sur l’importance de la formation des juges et la nécessité de ne pas « compartimentaliser » les expériences vécues par les femmes en temps de guerre. Il ne faut pas permettre en effet que la question de la violence en obscurcisse d’autres, comme celles de la perte de leur maison et de leurs biens, et de la disparition des êtres qu’elles aiment. Enfin, a recommandé Mme Del Ponte, il faut réinterpréter les concepts juridiques existants afin de mieux y refléter l’expérience des femmes. La réalité veut que nous sommes confrontés à des systèmes de justice qui, au mieux, ne traitent que partiellement de la violence sexiste, a-t-elle déploré.
D’autres panélistes ont invité les hommes à se mobiliser également. « Le temps est venu pour les hommes de bonne volonté de se lever et de se prononcer contre le caractère obscène des discriminations et de la violence faite aux femmes » a déclaré Jacques André de Graff, qui représentait l’ONG One Hundred Black Men. Pour que ce mouvement porte ses fruits, nous devons nous comporter en véritables hommes et écouter ce que les femmes ont à dire, a-t-il prévenu. « Nous devons aller là où la violence existe, à savoir au sein des communautés locales dans la plupart des cas, et mettre au défi les attitudes traditionnelles », a déclaré M. de Graff. Pour Todd Minerson, le Directeur exécutif de la Campagne « White Ribbon », qui promeut la fin des discriminations et des violences contre les femmes, l’impunité dont bénéficient souvent les hommes s’enracine dans la persistance de stéréotypes culturels et de constructions sociales fallacieuses, qu’ils doivent dépasser pour œuvrer au changement.
Plusieurs autres personnalités ont pris la parole au cours de cette célébration de la Journée de la femme. Parmi elles, le Représentant permanent de l’Afrique du Sud, Dumisani Kumalo, qui est également le Président du Conseil de sécurité pour le mois de mars; Mme Dillian Francisca Toro Torres, Présidente du Sénat de Colombie; M. Anero Lopez, du Département des opérations de maintien de la paix; et Mme Raghida Dergham, Correspondante auprès de l’ONU du quotidien Al Hayat. Cette réunion et la table ronde à laquelle elle a donné lieu, étaient modérées par le Secrétaire général adjoint à la communication et à l’information, Shashi Tharoor. La célébration a été dédiée à Angela King, l’ancienne Conseillère du Secrétaire général pour les questions de parité et de la promotion de la femme.
Table ronde sur le thème « Mettre fin à l’impunité dont jouissent les auteurs de violence à l’égard des femmes et des filles »
Déclarations liminaires
M. BAN KI-MOON, Secrétaire général des Nations Unies, a souligné que son allocution était la première intervention qu’il faisait en tant que Secrétaire général de l’Organisation, à l’occasion de la célébration de la Journée internationale de la femme. Je souhaite être un allié dans la course pour l’égalité entre les sexes et ajouter ma voix à l’hommage rendu à Mme Angela King, grande défenseure des droits de la femme, a dit le Secrétaire général. Cette Journée est l’occasion de défendre les femmes et les filles qui subissent ou sont menacées par les violences et le moment est venu pour nous de prendre des mesures concrètes pour y mettre un terme, a-t-il souligné. Cette Journée doit nous permettre de célébrer le courage des femmes qui, en tant qu’agents du changement, mènent la bataille contre la violence sexiste, a recommandé le Secrétaire général, tout en notant que la violence touche chaque continent et chaque pays, quels que soient les niveaux de revenus ou l’ethnie. Elle affecte les femmes, les familles et les sociétés, a noté M. Ki-moon. Ces dernières années, a-t-il ajouté, nous avons fait des progrès et des normes internationales ont été adoptées. Les gouvernements ont adopté des lois, tandis que les stratégies et les partenariats avec les groupes de femmes ont été renforcés. Mais, il reste beaucoup plus à faire pour lutter contre l’impunité qui caractérise la violence faite aux femmes, a indiqué le Secrétaire général, en notant que dans la réalité, cette violence est tolérée sous le prétexte du respect de traditions culturelles ou religieuses, et qu’elle est devenue une forme d’arme de guerre dans les conflits.
L’heure est venue de rompre le silence, a insisté le Secrétaire général, en estimant que la société, dans son ensemble, doit promouvoir les changements de mentalité et transformer les relations entre les hommes et les femmes à tous les niveaux de la société et sur plusieurs fronts. Les Nations Unies doivent être à l’avant-garde des efforts menés pour l’autonomisation des femmes par la promotion de leur éducation et par l’octroi en leur faveur de microcrédits. Ces efforts doivent permettre de combler l’écart qui existe entre les engagements pris par les gouvernements et la société, et d’édifier des stratégies efficaces englobant tous les acteurs de la société et disposant de ressources adéquates. Les Nations Unies doivent être à l’avant-plan des efforts visant à réformer l’architecture des règles concernant la sexospécificité en se basant sur les propositions faites par le Groupe de haut niveau, a souligné le Secrétaire général. « J’encourage donc les États Membres à remplacer les structures actuelles par une seule entité dynamique qui devrait mobiliser les forces du changement au niveau mondial », a-t-il déclaré. Par l’adoption d’une approche intégrée et holistique, et de mesures assurant que des comptes soient rendus, nous pouvons faire en sorte que nos efforts de prévention des actes de violence faits aux femmes portent des fruits, a estimé le Secrétaire général. Il a ensuite proposé que l’Assemblée générale consacre, chaque année, un point de son ordre du jour à la violence faite aux femmes et aux petites filles, et a exhorté le Conseil de sécurité à créer un mécanisme de lutte contre la violence faite aux femmes sur la base des termes de sa résolution 1325 (2000) concernant les femmes, la paix et la sécurité.
Mme SHEIKHA HAYA RASHED AL KHALIFA, Présidente de la soixante-et-unième session de l’Assemblée générale, a rappelé que le respect des libertés individuelles et de l’égalité entre les sexes étaient des principes consacrés par la Charte des Nations Unies et par de nombreuses constitutions nationales d’États Membres. Mais l’impunité concernant les crimes et les abus commis contre les femmes et les filles se poursuit cependant aujourd’hui, en totale violation des principes fondamentaux que nous venons de citer, a déploré Mme Al Khalifa. « Nous avons besoin d’interventions vigoureuses pour interdire immédiatement et enlever à de tels actes tout semblant de légitimité », a indiqué la Présidente de l’Assemblée, en estimant que chaque être humain devait devenir le gardien des droits fondamentaux de la personne humaine. « Nous avons un devoir moral et politique de les faire respecter », a-t-elle affirmé.
Lorsque la Charte des Nations Unies a été adoptée, Eleanor Roosevelt a déclaré que les droits universels commençaient à la maison, a rappelé Mme Al Khalifa. En effet, a-t-elle souligné, la plupart des violences perpétrées contre les femmes le sont dans les foyers. Pour changer les comportements, c’est donc à ce niveau qu’il faudrait engager la lutte à mener. C’est à ce niveau qu’il faut faire comprendre aux gens que les questions liées à la violence domestique ne relèvent en rien de la sphère dite « privée », a estimé la Présidente de l’Assemblée générale. Les ONG et la société civile ont joué un rôle important dans la désacralisation de « l’enceinte familiale » et pour faire comprendre qu’il ne suffit pas de s’y réfugier pour que soient justifiés des actes inacceptables. Invoquer l’enceinte ne peut conférer tous les droits aux auteurs de violences domestiques. À cet égard, une action s’impose d’urgence, a déclaré la Présidente. Elle a indiqué que cette urgence était nécessaire non seulement dans les zones et les périodes de conflits, mais aussi en vue d’aider les femmes et les filles à panser les blessures qu’elles subissent, même en temps de paix. La Présidente de l’Assemblée a invité chaque citoyen du monde à prendre part à un dialogue qui puisse mettre fin au silence qui entoure les violences faites aux femmes.
M. DUMISANI SHADRACK KUMALO (Afrique du Sud), Président du Conseil de sécurité, s’est félicité que le Conseil de sécurité ait adopté, hier, le texte d’une déclaration présidentielle sur le rôle des femmes dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il a ensuite lu ce texte, dans lequel le Conseil réaffirme sa volonté de voir appliquer intégralement et efficacement sa résolution 1325 (2000) sur les femmes, la paix et la sécurité. Le Conseil y réaffirme aussi « le rôle important que les femmes jouent dans la prévention et le règlement des conflits et dans la consolidation de la paix », soulignant qu’« il importe qu'elles participent sur un pied d'égalité à tous les efforts visant à maintenir et à promouvoir la paix et la sécurité et qu'elles y soient pleinement associées ». Par conséquent, les États Membres doivent « faire en sorte que les femmes soient davantage représentées à tous les niveaux de prise de décisions dans les institutions et mécanismes nationaux, régionaux et internationaux pour la prévention, la gestion et le règlement des différends », ajoute la déclaration.
Dans ce texte, le Conseil « demande instamment au Secrétaire général de continuer de nommer plus de femmes parmi les représentants et envoyés spéciaux chargés de missions de bons offices en son nom, et, à cet égard, demande aux États Membres de communiquer au Secrétaire général le nom de candidates pouvant être inscrites dans une liste centralisée régulièrement mise à jour ». Le Conseil reconnaît qu'« il est urgent de redoubler d'efforts pour incorporer dans les opérations de maintien de la paix une démarche soucieuse d'égalité entre les sexes ». À cet égard, le Conseil de sécurité se félicite de la politique des opérations de maintien de la paix des Nations Unies, qui vise à promouvoir et à protéger les droits des femmes et à prendre en compte une démarche soucieuse d'égalité entre les sexes, a indiqué M. Kumalo.
Profondément préoccupé par l'omniprésence de toutes les formes de violence contre les femmes et les filles dans les conflits armés, dont les meurtres, les mutilations, les violences sexuelles aggravées, les enlèvements et la traite, le représentant de l’Afrique du Sud a de nouveau condamné, au nom des membres du Conseil de sécurité, ces pratiques avec la plus grande fermeté. Il a également demandé à toutes les parties à un conflit armé de prendre des mesures spécifiques pour protéger les femmes et les filles contre de tels actes. « Il faut mettre fin à l'impunité des actes de violence sexiste dans les situations de conflit armé », et « exclure si possible ces crimes du bénéfice des mesures d'amnistie », a dit le représentant, en reprenant les termes de la déclaration présidentielle. À l’issue de la lecture de ce texte, M. Kumalo a rendu un vibrant hommage à Angela King, l’ancienne Conseillère spéciale pour la parité entre les sexes, qui aura servi l’ONU durant les mandats de M. Kofi Annan, et qui est récemment décédée.
Mme CARLA DEL PONTE, Procureure du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), a déclaré que lorsque le Tribunal fermera ses portes, l’un de ses legs sera la condamnation de la violence sexiste faite aux femmes pendant les guerres qui ont déchiré l’ex-Yougoslavie. Dans le silence historique qui caractérise les crimes sexuels commis en temps de guerre, des hommes qui ont violé et réduit à l’esclavage sexuel des femmes ont été traduits en justice et sont en prison, a-t-elle ajouté. Le rôle des autorités politiques et militaires qui ont toléré et encouragé la violence sexuelle pendant le conflit a été reconnu par le TPIY, dont le travail a également facilité celui qu’ont mené des tribunaux nationaux dans l’ex-Yougoslavie, a indiqué la Procureure. Mme Del Ponte a engagé la communauté internationale à tirer cinq leçons des cas observés en ex-Yougoslavie.
La première de ces leçons est que l’engagement à lutter contre la violence sexuelle doit être inscrit dans les règlements et les mandats des tribunaux et des cours chargés de lutter contre cette violence. Ainsi, le Statut de la Cour pénale internationale a fait du viol un crime contre l’humanité, a relevé Mme Del Ponte. Une autre leçon tirée de l’ex-Yougoslavie exige que nous fassions preuve d’innovation en vue de rendre les processus juridiques sûrs pour les femmes. « Par exemple, nous devons revoir notre approche relative à la protection des témoins, afin qu’elle soit moins invasive pour les femmes », a recommandé la Procureure du TPIY. Notre travail au Tribunal nous a appris à envisager ouvertement des approches alternatives aux traditions juridiques, qu’il s’agisse des systèmes juridiques coutumiers ou civils, a-t-elle indiqué, en notant que, par exemple, l’une des barrières les plus importantes en droit coutumier est le caractère traumatisant des contre-interrogatoires. La troisième leçon à tirer de l’ex-Yougoslavie est l’importance de la formation et de la mise en place de points focaux sur le genre, a ensuite déclaré Mme Del Ponte. La formation des juges devrait être obligatoire et holistique, a-t-elle recommandé. Passant à la quatrième leçon à tirer, elle a dit qu’il ne faut pas « compartimentaliser » les expériences vécues par les femmes en temps de guerre. Tout en étant engagés à lutter contre la violence sexuelle, nous ne devons pas permettre que cette question en obscurcisse d’autres, comme celles de la perte de leur maison, de leur biens et des êtres qui leur sont chers. La première motivation des femmes à témoigner est celle relevant du désir qu’elles ont de parler pour leurs morts. Enfin, la cinquième leçon, a indiqué Mme Del Ponte, est de réinterpréter les concepts juridiques existants afin d’y mieux refléter l’expérience des femmes. La réalité veut que nous sommes confrontés à des systèmes de justice qui, au mieux, traitent partiellement de la violence sexiste, a-t-elle déploré.
Mme Del Ponte a conclu en estimant que les développements intervenus au cours des dernières décennies au sein des systèmes de justice pénale actuels offrent une meilleure compréhension des stratégies nécessaires à l’élimination de la violence contre les femmes. Des possibilités de progrès s’ouvrent à nous simplement à travers le changement de l’appréhension que nous pouvons avoir envers le cadre existant, et dans lequel nous fonctionnons, a relevé Mme Del Ponte.
Mme DILIAN FRANCISCA TORO TORRES, Présidente du Sénat colombien, a rappelé la déclaration faite un jour par l’écrivain Gabriel Garcia Marquez, qui a affirmé que le salut de l’humanité passait par la prise du pouvoir par les femmes. Celles de Colombie incarnent justement autant le désespoir causé par le conflit qui déchire actuellement le pays, que la volonté tenace d’y mettre fin. Mais la guerre ne saurait être considérée comme la seule cause de la violence à l’encontre des femmes, a précisé la Sénatrice, qui a affirmé que dans son pays, sur 60 000 examens légistes effectués l’an dernier sur des cas de violence familiale, 38 000 étaient liés à des relations de couple et à 24 000 à des délits sexuels. Les femmes ont donc le devoir de sortir de leur inertie et de prendre leur destin en main.
Mme Torres a expliqué qu’elle avait convoqué toutes les femmes du Congrès pour se mobiliser en faveur de la défense des droits des femmes. En moins de trois mois, un groupe de 26 femmes parlementaires a été établi, surmontant les divisons régionales et partisanes afin de promouvoir les droits des femmes et veiller à ce qu’elles soient protégées de toutes les formes de discrimination. Ce groupe a rédigé un projet de loi qui vient consolider une politique d’État pour prévenir toute forme de violence à l’encontre des femmes, veiller à ce que celles-ci s’autonomisent sur le plan économique et social et à ce que les services de santé publics proposent des soins appropriés aux victimes.
Outre un régime de peines et de sanctions, nous avons interdit le harcèlement sexuel et mis en place une législation en vue de protéger les mineurs contre les actes de violence et les abus sexuels, a ajouté l’intervenante. Elle a invité en conclusion toutes les femmes parlementaires du monde à se réunir pour sensibiliser leurs compagnons et œuvrer ensemble à la réalisation de l’égalité entre les sexes.
M. ANTERO LOPES, Conseiller adjoint de police au Département des opérations de maintien de la paix (DOMP), a dressé le bilan de l’action du DOMP en la matière, en précisant que des orientations de politique générale y avaient été mises en place. Parmi les forces de police travaillant dans les opérations de maintien de la paix, qui représentent 10% des effectifs de ces opérations, le pourcentage de femmes s’élève à 7,85% des effectifs policiers. Nous voudrions arriver à 15% d’effectifs féminins dans les composantes de police, a dit M. Lopes, tout en indiquant que le Département n’était pas seulement intéressé par les chiffres, mais aussi par la qualité des services que fournissent les femmes policiers. M. Lopes a précisé que dans le cadre des opérations de paix, la police des Nations Unies ne remplace pas la police locale, mais joue plutôt un rôle consultatif et d’appui à la reconstruction du pays concerné dans le cadre d’un dialogue étroit avec les groupes de femmes. Cette pratique fonctionne bien, a-t-il estimé. Il est crucial de disposer d’une législation adéquate pour que nous puissions mettre en œuvre des initiatives axées sur la prévention et la lutte contre la violence, a recommandé M. Lopes.
Le Plan d’action du DOMP porte sur l’élaboration d’orientations politiques, y compris celles ayant trait à la nécessité de rendre compte et celle concernant les modules de formation. Quatre-vingt-seize pays sont contributeurs en forces de police aux opérations de maintien de la paix et les femmes qui y participent font partie du personnel le plus qualifié, a fait remarquer le Conseiller adjoint. M. Lopes a aussi insisté sur les efforts de coopération engagés par le DOMP avec la société civile dans les pays où interviennent les Nations Unies. Il a aussi indiqué que l’Inde avait mis à la disposition de l’ONU un bataillon composé exclusivement de femmes. « Il nous reste encore beaucoup à faire, mais nous avons compris que ces questions ne touchent pas que les femmes, mais qu’elles affectent l’ensemble de la société », a souligné M. Lopes. Dans un avenir proche, nous espérons fournir une série de recommandations à nos partenaires et aux gouvernements pour opérationnaliser l’approche de prévention de la violence sexiste, a-t-il indiqué.
Mme RAGHIDA DERGHAM, Correspondante à New York du journal « Al Hayat », a souligné la nécessité de briser le silence qui entoure trop souvent les situations de violences ou d’abus perpétrés contre les femmes, soit parce que les victimes ne veulent pas parler, soit parce que le public ne veut pas en entendre parler. Il faut au contraire insister, persister et ne pas désespérer, a affirmé l’intervenante. Cependant, si le plus souvent le public se délecte de violences, il est rarement enthousiaste face aux vraies histoires tristes et déchirantes. C’est pourquoi les gens résistent, a regretté la correspondante, qui a fait valoir la responsabilité morale et professionnelle de raconter de telles histoires. Il faut mettre fin aux meurtres et aux mutilations génitales, a-t-elle poursuivi, ainsi qu’aux actes perpétrés contre les femmes et les filles dans les contextes d’occupation militaire ou d’opérations de maintien de la paix. Évoquant la répression d’État, Mme Dergham a déclaré qu’il était inacceptable qu’un pays interdise à une femme adulte de ne pas se déplacer sans être accompagnée d’un homme. Elle a dit non à la culture du silence et de la honte et a insisté sur l’importance de raconter ce qui se passe dans le monde comme l’ont fait tous les participants.
M. JACQUES ANDRE DE GRAFF, représentant de l’ONG One Hundred Black Men, a déclaré que cette réunion consacrait le dernier chapitre dans la lutte pour la liberté et a saisi l’occasion pour annoncer la naissance d’un mouvement aux dimensions historiques. Nous ne sommes pas animés par des considérations juridiques, a-t-il souligné, en expliquant que ce mouvement va au-delà de toutes pratiques religieuses et de tous partis politiques. Le temps est venu pour les hommes de bonne volonté de se lever et de parler contre le caractère obscène des discriminations et de la violence faite aux femmes. M. de Graff a rappelé que « One Hundred Black Men » était né d’un incident ayant opposé des forces de police new yorkaises et une femme noire. Le viol, les abus domestiques, le « femmicide », les mutilations génitales, les discriminations dans l’emploi et dans l’éducation, les crimes de guerre, le travail des enfants, la traite à des fins d’exploitation sexuelle et les meurtres de femmes et de petites filles doivent cesser, a-t-il plaidé.
M. de Graff a estimé que le Bureau de la promotion de la femme devrait avoir un rang plus élevé et bénéficier de davantage de ressources. Une base de données doit être mise en place tandis que les gouvernements doivent honorer leurs obligations redditionnelles. En bref, il est temps d’adopter une nouvelle attitude. Pour que ce mouvement porte ses fruits, nous devons nous comporter en véritables hommes et écouter ce que les femmes ont à dire, a-t-il prévenu. Nous devons aller là où la violence existe, à savoir au sein des communautés locales
dans la plupart des cas et mettre au défi les attitudes traditionnelles. Des partenariats et des coalitions doivent être formés également. Les hommes de bonne volonté ne resteront pas silencieux face à un impératif: nos enfants nous écoutent.
M. TODD MINERSON, Directeur exécutif de la Campagne « White Ribbon », a rappelé le tragique incident survenu en 1989 à Montréal au cours duquel 14 femmes ont été assassinées à l’École polytechnique par un forcené qui les a délibérément prises pour cibles. Il a fallu un tel événement pour que la société canadienne se pose des questions essentielles concernant la sécurité des femmes, a regretté M. Minerson. En 1991, lors du second anniversaire de ce massacre, deux hommes se sont reposé ces questions. De leur conversation est ressorti un symbole, un ruban blanc, qui témoigne de l’engagement des hommes à mettre fin aux violences contre les femmes, a-t-il indiqué. À cet effet, un mouvement mondial a été créé. Il repose sur deux principes directeurs. Le premier reconnaît que les hommes ont un rôle et une responsabilité dans l’élimination de la violence contre les femmes et les filles, a précisé M. Minerson, en notant que l’impunité dont jouissent souvent les hommes s’enracine dans la persistance de stéréotypes culturels et de constructions fallacieuses. Il leur revient de les surmonter pour pouvoir œuvrer en faveur d’un changement. Pour obtenir un effet maximal dans la recherche de résultats, la Campagne du Ruban blanc opère selon un modèle décentralisé qui s’appuie surtout sur les communautés. Celles-ci sont mieux armées pour développer des stratégies appropriées de lutte contre la violence, a estimé M. Minerson. Le succès de la campagne tient surtout aux partenariats qu’elle crée avec les mouvements et les organisations de femmes, avec lesquels elle partage les ressources et les expertises disponibles, a dit le Directeur exécutif de la Campagne Ruban blanc.
Débat interactif
À une question concernant les mesures prises face aux abus et aux violences commis dans le contexte d’opérations de maintien de la paix, le représentant du Département des opérations de maintien de la paix (DOMP) a déclaré qu’une politique de tolérance zéro avait été adoptée par l’ancien Secrétaire général, Kofi Annan, et qu’un Bureau chargé de ces questions était désormais ouvert dans toutes les opérations de maintien de la paix. Les Casques bleus sont aujourd’hui encadrés par des règles extrêmement sévères et ceux d’entre eux qui ont été reconnus coupables de violences ou d’abus ont systématiquement été renvoyés dans leurs pays d’origine, où ils sont poursuivis devant des tribunaux.
Évoquant la question de la prise de parole des victimes, la Procureure du TPIY, Carla Del Ponte a déclaré qu’il y avait une distinction très nette à opérer entre la responsabilité individuelle et la responsabilité d’État. Or, la juridiction où elle siège comme Procureure, et qui est le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), ne se préoccupe que des responsabilités individuelles, a-t-elle fait remarquer. Dans ce contexte, le plus difficile est de faire venir les victimes à la barre des témoins, car elles redoutent de revivre des épisodes douloureux en répondant aux questions de la défense; voire de se faire accuser de ne pas raconter la vérité, a déploré Mme Del Ponte.
S’adressant au Président du Conseil de sécurité, une intervenante de la Côte d’Ivoire a vivement encouragé le Conseil à prendre de nouvelles dispositions pour veiller à une application plus concrète et plus rapide de la résolution 1325 (2000). Elle a aussi suggéré que chaque pays puisse créer un « tribunal de la liberté ». En conclusion de cet échange de vues, le Directeur exécutif de la Campagne Ruban blanc, M. Todd Minerson, a indiqué que les hommes devraient s’efforcer de mieux se mettre à l’écoute des femmes pour mettre fin à la complicité silencieuse dont bénéficient les auteurs de violences et d’abus contre les femmes, les filles et les petites filles.
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