SG/SM/10533-CCP/2

KOFI ANNAN SALUE LA NAISSANCE DE LA COMMISSION DE CONSOLIDATION DE LA PAIX À UN MOMENT OÙ LE MONDE VOIT UN NOMBRE « INACCEPTABLE » D’ACCORDS DE PAIX SE DÉSINTÉGRER AU BOUT DE CINQ ANS

23 juin 2006
Secrétaire généralSG/SM/10533
CCP/2
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

KOFI ANNAN SALUE LA NAISSANCE DE LA COMMISSION DE CONSOLIDATION DE LA PAIX À UN MOMENT OÙ LE MONDE VOIT UN NOMBRE « INACCEPTABLE » D’ACCORDS DE PAIX SE DÉSINTÉGRER AU BOUT DE CINQ ANS


On trouvera ci-après le texte de l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan, devant la Commission de consolidation de la paix, à New York, le 23 juin:


C’est avec beaucoup de plaisir que j’ouvre la première session de la Commission de consolidation de la paix.  Je tiens à féliciter tous ses membres d’avoir été élus à ce nouvel organe historique.


Il y a peu de questions sur lesquelles il y ait un plus large consensus, ou qui suscitent davantage d’attentes, que la responsabilité qui incombe à l’Organisation des Nations Unies d’aider les États et les sociétés qui ont été dévastés par la guerre à se relever.  Ce n’est donc pas un hasard si, lors du Sommet mondial des Nations Unies de 2005, les dirigeants mondiaux ont souligné le rôle vital qui était celui de l’Organisation dans les périodes de transition faisant suite à un conflit et ont demandé à l’Assemblée générale et au Conseil de sécurité de créer la Commission.


La communauté internationale a maintenant à sa disposition un organe intergouvernemental unique, le premier expressément chargé de la consolidation de la paix.  La nouvelle Commission s’efforcera de fournir un appui plus soutenu, mieux coordonné et mieux ciblé aux pays sortant d’un conflit.


Elle rassemblera toutes les parties prenantes.  Et, compte tenu de la création du nouveau Conseil des droits de l’homme, du renforcement du Fonds central d’intervention pour les urgences humanitaires, du Fonds pour la démocratie et des autres changements et réformes réalisés ou amorcés récemment, la Commission de consolidation de la paix représente un nouveau progrès majeur sur la voie de l’avènement d’une Organisation des Nations Unies pleinement équipée pour relever les défis de son époque.


Vous commencez vos travaux alors que le monde est confronté à un paradoxe dans les efforts qu’il déploie pour promouvoir une paix, une stabilité et un développement durables.  On a assisté à une diminution très bienvenue du nombre total des conflits, et l’Organisation des Nations Unies a fait de son mieux, au moyen de ses opérations de maintien de la paix et autres opérations d’assistance, pour contribuer à cette tendance.  Toutefois, dans le même temps, le monde a vu un nombre inacceptable d’accords de paix se désintégrer dans les cinq ans qui ont suivi la fin d’une guerre civile, les pays concernés retombant dans un conflit mortel.


Certaines des faiblesses des interventions actuelles de la communauté internationale dans les situations d’après conflit sont bien connues.  L’une est la pénurie de fonds.  L’absence de coordination internationale en est une autre.  Une troisième est la tendance qu’ont les acteurs internationaux à s’en aller trop rapidement.  Comme on vient de le voir au Timor-Leste, une hâte excessive à se désengager d’une situation de transition peut aboutir à des revers et à la nécessité d’un redéploiement, à grands frais pour tous, et en particulier pour les victimes civiles sans défense.


Toutes ces difficultés ont directement influé sur la conception et le mandat de la Commission de consolidation de la paix, ainsi que sur la création du Bureau d’appui à la consolidation de la paix et du Fonds permanent.


Mais il nous faut aussi reconnaître que l’augmentation des ressources et l’amélioration de la coordination ne suffiront pas en elles-mêmes à instaurer une paix durable.  La consolidation de la paix nécessite un engagement national, et doit naître sur place.  Aussi bien intentionnés soient-ils, ceux qui viennent de l’extérieur ne peuvent remplacer les connaissances et la volonté du peuple du pays concerné.  C’est ce dernier qui connaît le mieux son histoire, sa culture et sa situation politique.  C’est lui qui vivra avec les conséquences des décisions prises.  Et c’est lui qui doit avoir le sentiment que la consolidation de la paix est son œuvre, pour qu’elle ait une chance de durer sur le long terme.


L’expérience montre aussi que la consolidation de la paix ne consiste pas seulement dans la prévention d’une reprise des combats et dans la reconstruction matérielle.  Une tâche fondamentale consiste à établir des institutions publiques efficaces, dans un cadre constitutionnel et dans le respect de l’état de droit.


Bien trop souvent, des populations touchées par la guerre qui aspirent à la mise en place d’institutions de gouvernement nouvelles et plus équitables assistent au maintien, à la perpétuation ou au renforcement involontaire de structures sociales, économiques et politiques exclusives.  Il est essentiel que les citoyens aient de nouveau confiance dans les institutions étatiques.  La consolidation de la paix peut contribuer à renforcer le contrat social par lequel les États s’acquittent de leurs obligations envers leurs citoyens, tandis que ceux-ci exercent leur droit de participer, et de prendre leur destin en main.


Il ne faut pas non plus oublier que la consolidation de la paix est intrinsèquement politique.  Il est arrivé à la communauté internationale d’envisager la consolidation de la paix comme une entreprise largement technique, faisant intervenir des connaissances et des ressources.  La communauté internationale doit non seulement comprendre le jeu des pouvoirs locaux, mais aussi admettre qu’elle est elle-même un acteur politique entrant dans un environnement politique.


Les membres de la Commission de consolidation de la paix sont bien équipés pour appuyer les pays sortant d’un conflit, puisqu’il y a parmi vous non seulement des acteurs clefs, par exemple des États fournissant des contingents et des donateurs, mais aussi des pays qui ont eux-mêmes connu la transition de la guerre à la paix.


Vous serez appelés à agir comme des appuis partageant les aspirations de la population et comme des alliés qui demeureront engagés dans le pays une fois la mission de maintien de la paix terminée.  Ceci signifie qu’il faudra gérer les attentes, car de nombreux éléments de la consolidation de la paix – comme la réconciliation – peuvent prendre des années ou des décennies, alors que les populations qui sortent épuisées d’un conflit veulent, cela est compréhensible, des résultats beaucoup plus rapides.


La Commission devra appuyer la mise au point de stratégies de consolidation de la paix, et dégager un consensus parmi les acteurs internationaux en vue de leur mise en œuvre.  Elle travaillera en collaboration étroite avec d’autres organismes des Nations Unies.  Et je note avec satisfaction que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, ainsi que des banques régionales de développement et d’autres organisations, participeront à l’entreprise.


Et, bien entendu, la participation active des autorités nationales à l’action de la Commission dans le pays sera essentielle.  Ceci donnera un poids supplémentaire au dialogue au niveau national entre les autorités concernées et la communauté internationale.  J’espère que la Commission trouvera aussi des moyens d’entrer en contact avec la société civile, le secteur privé et les autres parties qui, sur place, sont en mesure de contribuer à son action.


Le Bureau d’appui à la consolidation de la paix, pour sa part, soutiendra la Commission en lui fournissant des informations et des analyses, et en veillant à ce que les recommandations issues de ses travaux soient traduites en une action concrète au niveau des pays.


Le Fonds pour la consolidation de la paix, quant à lui, fournira des moyens supplémentaires qui viendront compléter les autres sources de financement.  J’engage vivement les États Membres à le doter généreusement et régulièrement.

Monsieur le Président,


La Commission symbolise à la fois l’espoir et la persévérance : l’espoir des millions de personnes qui, dans le monde entier, s’efforcent de maintenir leurs sociétés sur la voie précaire de la paix; et la persévérance parce que vous avez surmonté des difficultés considérables pour créer cette nouvelle instance vitale et lui permettre de commencer à fonctionner.  Je suis persuadé que vous ferez preuve d’une résolution similaire dans l’accomplissement de votre mandat; vous allez maintenant commencer vos travaux, et je vous souhaite le plus grand succès.


*   ***   *

À l’intention des organes d’information • Document non officiel
À l’intention des organes d’information. Document non officiel.