DES ÉNERGIES PLUS PROPRES, MOINS COÛTEUSES ET PLUS ACCESSIBLES AU SERVICE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, SELON LES EXPERTS INVITÉS AUX TABLES RONDES
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Commission du développement durable
Quatorzième session
4e et 5e séances – matin & après-midi
DES ÉNERGIES PLUS PROPRES, MOINS COÛTEUSES ET PLUS ACCESSIBLES AU SERVICE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, SELON LES EXPERTS INVITÉS AUX TABLES RONDES
Comment faciliter l’accès à une énergie sûre, abordable, viable et écologique? Comment, en améliorant les rendements énergétiques, donner à la fois une impulsion à l’économie et réduire les émissions polluantes? Au deuxième jour de la session annuelle de la Commission du développement durable, experts, représentants d’organisations non gouvernementales et d’États Membres ont tenté aujourd’hui, par leurs réponses, d’approfondir la réflexion sur les liens entre énergie et développement durable.
Quatre tables rondes ont succédé au débat général de la veille qui avait marqué l’ouverture de la quatorzième session de la Commission. Les situations énergétiques en Afrique, en Asie occidentale, en Europe etenAmérique du Nord, en Asie et dans le Pacifique ont donné lieu à deux débats sur la base des résultats de réunions régionales sur l’application du Plan de mise en œuvre du Sommet mondial pour le développement durable, qui s’était tenu à Johannesburg (Afrique du Sud) en 2002.
Les participants aux débats régionaux ont mis l’accent sur le rôle essentiel de l’accès à l’énergie pour assurer le développement durable et éliminer la pauvreté, ainsi que sur la nécessité de développer l’énergie renouvelable.
S’agissant de l’Afrique, ils ont convenu que la production et la consommation limitées d’énergie et l’extrême vulnérabilité aux changements climatiques entravaient le développement économique du continent. Les cours actuels du pétrole et du gaz naturel soulignent le besoin urgent pour les pays africains de disposer d’un meilleur accès à l’énergie, a-t-il été notamment expliqué. L’Afrique connaît une crise de l’énergie, d’où la nécessité, pour ses dirigeants, d’envisager d’autres options que le pétrole ou le gaz.
L’Asie aussi est frappée de plein fouet par la flambée des prix du baril de pétrole, l’occasion, a-t-il été dit, lors du débat régional concernant cette région, de se lancer dans une « croissance verte ». Il s’agirait de promouvoir un modèle économique viable sur le plan environnemental, faute de quoi les effets sur la pauvreté et le bien-être des hommes risqueraient d'être désastreux. La Ministre adjointe indonésienne de l’environnement, Liana Bratasida, a rappelé les conséquences très importantes sur l’environnement de la pollution et de l’intensification industrielle, citant la catastrophe naturelle du tsunami. Au-delà de la coopération entre pays, il est nécessaire d’intégrer ces questions dans les politiques nationales de développement, a-t-elle déclaré.
La hausse des cours pétroliers et la prise de conscience des effets multiplicateurs de son utilisation sur la pollution atmosphérique ont été également au cœur de la première table ronde thématique de la journée. L’équipement des pays en grandes centrales nucléaires ou hydrologiques, s’il est de plus en plus préconisé, ne tient néanmoins pas compte de l’épuisement des ressources naturelles et des effets sur l’environnement, a-t-il été notamment souligné. Un expert malaisien a ainsi jugé indispensable de développer les projets d’électrification rurale à faible coût respectant les conditions locales, programmes qui nécessitent une volonté politique des pays en développement eux-mêmes. Les difficultés de la mise en place des infrastructures dans les zones difficiles pouvaient être surmontées, en engageant les communautés à prendre part à la conception des projets d’électrification, a estimé, pour sa part, le représentant des États-Unis.
Les participants au débat thématique se sont davantage penchés sur la lutte contre le gaspillage et l’utilisation des sources d’énergie renouvelable. L’utilisation croissante des sources d’énergie renouvelable devrait être la tendance en tenant compte de la sécurité de l’approvisionnement et de la protection de l’environnement, a observé, au nom de l’Union européenne, la représentante de l’Autriche. L’Union européenne envisage ainsi d’élever la part d’énergie renouvelable à hauteur de 15%. L’efficacité énergétique est la clef de l’équilibre entre économie et écologie, a assuré son homologue du Japon, évoquant le taux élevé de pollution de son pays. La déléguée sud-africaine a, de son côté, mis l’accent sur l’efficacité des actions de sensibilisation et des campagnes d’information, notant que la consommation d’énergie dans son pays avait été, grâce à cela, réduite de 40%.
La Commission du développement durable reprendra ses travaux demain, mercredi 3 mai à 10 heures.
MODULE THÉMATIQUE DU CYCLE D’APPLICATION 2006/2007
- L’énergie au service du développement durable
- Développement industriel
- Pollution atmosphérique/atmosphère
- Changements climatiques
Débat thématique: « Améliorer l’accès à des services énergétiques fiables, abordables, économiquement viables, socialement acceptables et respectueux de l’environnement »
Dans le cadre de l’examen de la question de l’énergie au service du développement, la Commission du développement durable a tenu ce matin une table ronde portant sur le thème de l’électrification, notamment en milieu rural. Quatre spécialistes ont présenté leurs expériences respectives au cours de ce débat.
Mme CONNIE SMYSER, fondatrice et actionnaire de Smyser Associates, a rappelé que dans certains pays 95% des habitants des zones urbaines ont l’électricité, les 5% restants étant ceux qui vivent dans les bidonvilles. Certaines de ces personnes disposent de l’électricité, mais l’obtiennent à partir de compteurs trafiqués et de circuits dangereux. Il est nécessaire de s’occuper de ces populations pour améliorer l’hygiène de leur environnement et leur sécurité, en particulier en ce qui concerne les enfants. Le problème de ces populations, c’est qu’ayant un revenu irrégulier, elles ne sont pas habituées à payer la consommation d’un produit ou d’un service sur une base fixe et régulière. En outre, ces gens payent généralement trop cher un service de fourniture d’électricité peu fiable. Pour les différents fournisseurs d’énergie, le problème vient de la difficulté de trouver les personnes qui devraient s’acquitter du paiement des factures, et en l’absence de registres fiables, les gouvernements pour leur part ne reconnaissent pas toujours la difficulté d’opérer dans ce qui doit être considéré comme des bidonvilles. Il faut donc rétablir l’ensemble de la filière, en créant des partenariats sociaux au sein de ces communautés, et en incitant les bailleurs de fonds et les organismes de développement à s’occuper des foyers démunis, a estimé Mme Smyser, dont le point de vue a été soutenu par M. HARISH HANDE, Directeur de la gestion de la société SELCO Solar Light, basée en Inde. Pour M. Hande, il est nécessaire de rétablir l’ensemble de la filière, ce qui permettrait à toutes les populations de bénéficier d’un approvisionnement en électricité moderne et fiable.
M. VIJAY MODI, Professeur d’ingénierie mécanique à Columbia University, a soulevé pour sa part la question du financement des opérations d’électrification, faisant observer que l’on subventionnait le plus souvent les intermédiaires, alors qu’il faudrait s’occuper directement des pauvres. L’électricité est un élément porteur et un catalyseur dont la disponibilité crée des opportunités. Elle permet par exemple la réfrigération ou le stockage de produits. Nous devons réfléchir aux moyens de permettre à une plus grande partie de la population d’avoir accès à l’électricité d’ici à une dizaine d’années, a dit M. Modi. À cet égard, a-t-il poursuivi, l’électrification des régions rurales est particulièrement problématique, dans la mesure où les coûts d’acheminement sont plus élevés. Dans ces zones, bien qu’il soit difficile d’installer des réseaux, il faudrait trouver le moyen d’élaborer des systèmes pour comprimer les coûts. En outre, il faut fournir en priorité les hôpitaux, les écoles et l’ensemble des institutions de santé, d’éducation et de développement qui viennent en aide aux populations démunies, avant de fournir les ménages en électricité à des coûts plus élevés, a recommandé le panéliste.
M. LEE YEE CHEONG, membre de la Commission à l’énergie de Malaisie, a rappelé que jusqu’en 2004, les prix du pétrole étaient stables et abordables, mais que depuis l’an dernier, une prise de conscience s’était produite dans le domaine énergétique, avec la flambée du prix du baril de pétrole et la prise de conscience des effets multiplicateurs de son utilisation sur la pollution atmosphérique. S’appuyant sur le succès de la région Asie-Pacifique, l’expert a souligné la nécessité de créer des infrastructures de base pour acheminer l’énergie en recourant aux services des petites et moyennes entreprises (PME) locales. Sans un savoir-faire local, les industries du cru ne pourront pas se développer, et l’économie non plus, a-t-il relevé. Par ailleurs, a-t-il poursuivi, on préconise de plus en plus aux pays de s’équiper de grandes centrales nucléaires ou hydrologiques, mais les utilisations de ce genre d’installations ne prennent pas en compte l’épuisement des ressources naturelles et les effets sur l’environnement. Ces centrales sont reliées par des réseaux qui traversent les terres des pauvres sans leur permettre de bénéficier d’un seul kilowatt d’électricité, a fait remarquer M. Cheong. Il est indispensable de préserver le débit des eaux, et il faudrait, au contraire, développer les projets d’électrification rurale à faible coût qui tiennent compte des conditions locales. À cette fin, une volonté politique des pays en développement eux-mêmes est indispensable, a recommandé l’expert malaisien.
Interventions des délégations
Réagissant aux déclarations des panélistes, le représentant de la Norvège s’est demandé ce que l’on pouvait faire pour améliorer l’accès global à l’électricité. « Il a été mentionné hier que les pauvres voulaient bien payer l’électricité, mais qu’il faut au préalable trouver des financements pour installer des réseaux fiables », a-t-il noté en faisant remarquer que si des banques et des institutions financières internationales accordent des microcrédits pour l’électrification, les frais de connexion restent encore trop élevés pour les populations pauvres. « Les prix devraient être plus abordables, comme c’est le cas avec la filiale du groupe norvégien RFR en Afrique du Sud, qui équipe actuellement 50 000 ménages », a souhaité le représentant. Rappelant que l’énergie était essentielle à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), le représentant du Nigéria a pour sa part indiqué qu’il fallait trouver de nouvelles sources de financement et mettre en place des infrastructures adéquates pour assurer l’acheminement de l’électricité.
Le représentant des organisations syndicales a pour sa part pointé certaines erreurs faites dans le cadre de certaines politiques publiques. Ainsi, la privatisation de certaines entreprises publiques pour réduire la dette d’État a démontré l’inefficacité de ce genre de politiques, a-t-elle estimé. « La concurrence et la logique de maximisation des profits ne sont pas à l’avantage des populations pauvres, car une fois vendus les biens publics, comment peut-on intégrer et résoudre avec succès les questions sociales et écologiques qui importent au travailleur? », a-t-elle fait observer.
Le représentant de l’Inde a rappelé que dans son pays, le lancement d’un programme d’électrification rural permettrait de fournir 125 000 hameaux et villages en électricité d’ici à l’année 2012. Mais il faudra des politiques publiques de subventions et des microcrédits pour couvrir les coûts de raccordement, renforcer les capacités, et opérer des transferts de technologies. Certaines de ces initiatives devraient être en partie financées par la communauté internationale, a-t-il recommandé. Le représentant de l’Islande a quant à lui préconisé l’exploitation des ressources géothermiques locales, connues pour leur propreté, aux fins de l’électrification. Le représentant des États-Unis a affirmé quant à lui que les difficultés de la mise en place des infrastructures dans les zones difficiles pouvaient être surmontées, en engageant les communautés à prendre part à la conception des projets d’électrification. « En Inde par exemple, le Gouvernement américain a aidé des ONG locales à surmonter les problèmes de régimes fonciers, ce qui a permis de fournir de l’énergie électrique à 115 000 ménages », a indiqué le représentant. Au Botswana, le Gouvernement a décidé de fournir aux ménages qui en ont besoin des prêts renouvelables pour une période de remboursement maximale de 15 ans, afin de leur permettre de se raccorder aux réseaux d’électrification, a dit le représentant de ce pays.
Pour sa part, le représentant de la Jamaïque a déclaré que la politique énergétique de son pays comprenait un programme d’électrification rurale, qui a même permis de freiner l’exode rural. S’agissant du problème de l’électrification urbaine, il a souligné qu’une amnistie avait été accorée aux ménages illégalement connectés au réseau de distribution. Le représentant du Brésil a annoncé l’ouverture dans son pays d’un programme pour combattre la pauvreté et la faim en utilisant l’électricité. Ce programme est destiné à 10 millions de personnes vivant en milieu rural et privées d’électricité. Le représentant du Sénégal a de son côté évoqué le cadre d’incitation mis en place par son pays pour équiper les zones rurales. Les opérateurs utilisant des technologies optimales bénéficieront ainsi d’une subvention. Par ailleurs, pour faire le lien entre l’électricité et la lutte contre la pauvreté, le Sénégal développera des activités productives parallèlement aux travaux d’électrification. Une structure intersectorielle a donc été mise en place pour assurer des synergies entre les projets d’électrification et des projets de développement, a dit le représentant sénégalais.
Intervenant à son tour, le représentant du Maroc a fait part d’un projet national qui a permis à ce jour d’électrifier 81% du pays, l’électricité étant produite à 80% par le secteur privé, ce qui a permis de créer des emplois en milieu rural. Dans les zones montagneuses, l’utilisation de l’énergie solaire a permis de surmonter les difficultés d’accès, a-t-il précisé. L’utilisation de ce type d’énergie a également été évoquée par le représentant de la Barbade, pays qui est un leader régional en ce domaine. Le représentant de la Barbade a fait état du développement florissant de l’industrie solaire sur l’île. Un ménage sur trois y possède par exemple des chauffe-eau solaires, ce qui permet d’économiser 15% de la production locale d’électricité.
Débat régional sur l’Afrique et l’Asie occidentale
Sur la base des résultats de réunions régionales sur l’application du Plan de mise en œuvre du Sommet mondial pour le développement durable, experts et représentants d’organisations non gouvernementales, de groupes régionaux et d’États Membres ont examiné les situations en Afrique et en Asie occidentale, mettant l’accent sur le rôle essentiel de l’accès à l’énergie pour assurer le développement durable et éliminer la pauvreté, ainsi que sur la nécessité de développer l’énergie renouvelable.
S’agissant de l’Afrique, les participants à ce débat régional ont tous convenu que la production et la consommation limitées d’énergie et l’extrême vulnérabilité aux changements climatiques entravaient le développement économique du continent.
Les cours actuels du pétrole et du gaz naturel soulignent le besoin urgent pour l’Afrique de disposer d’un meilleur accès à l’énergie. Pour le représentant du Danemark, l’augmentation du cours du pétrole sape la croissance économique de plusieurs pays africains, les empêchant notamment de réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement. L’Afrique connaît une crise de l’énergie, a-t-il dit, d’où la nécessité, pour ses dirigeants, d’envisager d’autres options que le pétrole ou le gaz. La crise est telle, a précisé le représentant de l’Union africaine, qu’il est à craindre que certains États ne puissent plus s’approvisionner dans les jours à venir et subvenir à leurs besoins économiques. Le délégué de l’Égypte a expliqué, de son côté, que l’Afrique se caractérisait par d’immenses ressources naturelles, notamment hydrauliques. Son exploitation exige malheureusement des investissements importants, de même qu’une coopération internationale et régionale. L’Afrique dispose certes d’un énorme potentiel énergétique diversifié, mais ce potentiel, malheureusement, n’est pas suffisamment utilisé, a également expliqué le représentant de la Commission de l’Union africaine. Selon lui, les États africains doivent donc renforcer les stratégies nationales visant à trouver les moyens de s’approvisionner en énergies diversifiées, notamment renouvelables.
L’Afrique ne génère que 3,1% de l’électricité mondiale, moins que toute autre région du globe, a rappelé Josue Dione, Directeur du développement durable de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), qui a plaidé en faveur de la promotion d’un environnement technologique énergétique sûr. Selon lui, l’économie des pays africains dépend largement des secteurs utilisant les ressources naturelles, tels que ceux de l’agriculture, de la forêt, de la pêche et du tourisme, autant de secteurs particulièrement vulnérables aux changements climatiques, lesquels ont des conséquences sur la sécheresse, les inondations, l’insécurité alimentaire ou la santé.
M. Dione a par ailleurs estimé que la réalisation des objectifs du développement durable dépendra de la bonne gouvernance dans chaque pays et, au niveau international, de la transparence dans les systèmes commerciaux et financiers, ainsi que du respect des engagements pris à Rio, Monterrey et à Johannesburg.
On ne combattra pas la pauvreté sans développement industriel, a assuré pour sa part Edward Clarence Smith, de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI). Le développement industriel est conditionné au développement durable, a-t-il affirmé, précisant que la contribution du secteur industriel à l’emploi demeurait faible en Afrique subsaharienne. Il faut, selon lui, améliorer la productivité au niveau agricole et encourager les entreprises à investir dans le capital humain et dans les infrastructures.
En Asie de l’Ouest, qui regroupe notamment les pays arabes producteurs de pétrole, les liens entre l’accès à l’énergie, le développement humain et la pauvreté sont également interdépendants. Le secteur énergétique arabe, qui se caractérise par un vaste secteur pétrolier et gazier et un important secteur électrique dominé par la production d’énergie thermique, a joué et continuera de jouer un rôle important aux niveaux mondial et régional. Il tient lieu de source de recettes d’exportation de pétrole et de gaz, et satisfait les besoins énergétiques aux fins du développement économique et social.
Il n’empêche, ainsi que l’a rappelé Aysar Tayeb, Conseiller du Ministre du pétrole et des ressources minérales de l’Arabie saoudite, plus de 40% de la population des zones rurales et urbaines défavorisées n’ont pas accès aux services énergétiques ou sont très mal desservies. Pour que les objectifs énergétiques aux fins du développement durable soient atteints, il faut que ces problèmes soient résolus et que le secteur continue à contribuer effectivement à l’économie régionale.
Selon lui, les prévisions montrent que la demande énergétique mondiale va croître de plus de 50% au cours du demi-siècle à venir, période pendant laquelle l’énergie fossile devrait toujours assurer son rôle dominant. Dans cette perspective, il convient de concentrer les efforts sur les technologies de carburant fossile plus propre.
Directrice du développement durable de la Commission économique et sociale pour l'Asie occidentale, Anhar Hegazi a souligné, de son côté, que les autorités nationales des pays arabes avaient, depuis 1992, consacré leurs efforts à rendre leur secteur énergétique plus viable, en les faisant cadrer avec la plupart des objectifs se rapportant aux principales questions énergétiques définies notamment dans Action 21 et dans le Plan de mise en œuvre de Johannesburg. Selon elle, il est essentiel d’intégrer l’énergie dans les politiques nationales. Les options de politique envisagées sont de revoir les tarifs existants, d’encourager le secteur privé à contribuer aux investissements et d’adopter des mesures pour améliorer la consommation. Il faut également améliorer l’accès à l’énergie renouvelable dans les régions rurales et urbaines.
Le délégué de la Jordanie a estimé que la région n’avait pas fait grand-chose pour l’énergie renouvelable. Il faut, a-t-il dit, des stratégies nationales pour favoriser la recherche de nouvelles technologies. Pour le Secrétaire général de l’Union des banques arabes, Fouad Shaker, il convient de renforcer la coopération avec les pays développés dans le but d’obtenir des ressources financières visant à assurer le transfert des technologies. L’Union des banques arabes va organiser prochainement une réunion en Tunisie pour tenter de déterminer le rapport des banques à l’environnement et de trouver les moyens pour celles-ci de se montrer plus ouvertes aux projets.
Débat régional sur l’Europe et l’Amérique du Nord; et l’Asie et le Pacifique
S’appuyant sur les conclusions des réunions régionales de suivi du Plan de mise en œuvre du Sommet mondial pour le développement durable, experts, ministres et représentants d’organismes gouvernementaux, d’ONG, de groupes régionaux et d’États Membres, ont examiné cet après-midi les situations en Europe et en Asie Pacifique. Ils ont tout particulièrement attiré l’attention sur la nécessité de diversifier les sources d’énergies et de mettre en place des modèles de développement économique viable sur le plan écologique.
Concernant l’Europe, M. ELIOT MORELEY, Ministre de l’environnement du Royaume-Uni, a évoqué les conclusions du Forum de mise en application qui s’est réuni en décembre dernier et au cours duquel les expériences régionales ont été évoquées. Pour la plupart des participants, il est apparu que la nécessité d’améliorer l’accès à des services énergétiques fiables en Europe ne devrait pas occulter les questions liées à l’environnement et la sécurité énergétique. Le Forum a reconnu que l’efficacité et les économies d’énergie sont des domaines qui exigent des progrès supplémentaires. Pour un développement industriel durable, il faut en outre renforcer l’application des normes et l’égalité des chances en promouvant le rôle des femmes.
La sécurité énergétique préoccupe beaucoup les pays européens, a affirmé M. J. CHRISTOPHE FUEG, Représentant spécial du Bureau fédéral suisse de l’énergie. Il a en outre rappelé qu’en Europe occidentale, où l’accès à l’énergie est certes universel, il reste coûteux pour certains pays d’Europe centrale ou orientale. C’est pourquoi, M. VIKTOR BARANCHUK, Vice-Ministre ukrainien pour le développement industriel, a rappelé que la hausse du prix du gaz et du pétrole rendait nécessaire la diversification des sources d’énergie. De l’avis de M. Fueg, les besoins en investissements pour recycler les installations existantes sont gigantesques. S’agissant de l’aspect environnemental, il a rappelé que pour lutter contre la pollution locale, notamment dans les pays en phase de transition, il faudrait encourager l’efficacité énergétique et l’amélioration du comportement des consommateurs, qui laisse parfois beaucoup à désirer.
M. MARTIN WILLIAMS, Chef de la Division de la qualité de l’air et de l’environnement du Royaume-Uni, a rappelé qu’en dépit de progrès, la présence d’azote et d’oxyde d’ammonium avaient un impact sur l’environnement et sur l’homme. Ainsi, un consensus scientifique se dégage aujourd’hui autour des dommages provoqués par le déplacement transnational de polluants aériens et ses effets sur la pollution atmosphérique. La plupart des délégations ont encouragé un dialogue régional, à l’instar de la représentante de l’Azerbaïdjan, qui a déclaré que la coopération était essentielle pour parvenir à une bonne couverture en énergie. Dans les années 70, l’Azerbaïdjan avait ainsi lancé une initiative de coopération énergétique qui a profité au développement énergétique des pays voisins.
S’agissant de la région Asie Pacifique, Mme LIANA BRATASIDA, Ministre adjointe de l’environnement de l’Indonésie, a évoqué les résultats de la réunion de mise en œuvre pour cette région, qui a abouti à une évaluation des progrès réalisés dans la concrétisation des engagements pris lors du Sommet mondial du développement durable. Malgré quelques avancées, près de 600 millions de personnes vivent encore avec moins d’un dollar par jour en Asie et dans le Pacifique. La pauvreté touche particulièrement les femmes, qui ont moins de possibilités d’emploi et de plus faibles qualifications. Les participants à la réunion avaient indiqué que les modes actuels de croissance économique poseraient des défis à la durabilité et à la viabilité du développement régional. La modernisation ne pourra pas se poursuivre sans une amélioration de l’efficacité énergétique. Il est donc nécessaire de garantir la sûreté énergétique dans une région en partie privée d’accès à des énergies propres et modernes. En outre, la pollution et l’intensification industrielle ont eu des conséquences très importantes sur l’environnement, notamment sous la forme de changements climatiques et des catastrophes naturelles, comme le tsunami, a souligné la Ministre. Au-delà de la coopération entre pays, il est aussi nécessaire d’intégrer ces questions dans les politiques nationales de développement. Passant ensuite à l’expérience de son pays, M. XINHUAI WANG, Directeur adjoint de la Commission du développement national et de la réforme de la Chine, a déclaré que son Gouvernement avait adopté une série de lois sur la protection de l’environnement et l’efficacité énergétique, ainsi que des mesures d’incitation et des contraintes très strictes.
Pour sa part, Mme PADMA LAL (Fidji) a déclaré que la région Asie Pacifique était caractérisée par un grand nombre de pays insulaires, distants les uns des autres. Comment atteindre ces communautés dispersées? Et comment moderniser ces sociétés traditionnelles? s’est-elle interrogée. Au mois d’octobre 2005, les dirigeants ont approuvé le Plan du Pacifique pour permettre une coopération régionale. Des subventions ont été mises à disposition pour encourager les populations à se fournir en énergies renouvelables. Mais au-delà des approches régionales, a poursuivi l’experte, il faudrait à terme adopter une approche pays par pays. Enfin, pour Mme JYOTI PARIKH, Directrice exécutive de la Recherche intégrée et de l’action au service du développement en Inde, il est urgent d’améliorer l’efficacité énergétique et de favoriser une croissance économiquement viable s’appuyant sur le respect de l’environnement.
Les délégations ont unanimement reconnu que la flambée du cours du pétrole, qui pose un problème d’accès à l’énergie, est l’occasion de se lancer dans une « croissance verte ». Il s’agirait de promouvoir un modèle économique viable sur le plan environnemental, faute de quoi les effets sur la pauvreté et le bien-être des hommes risqueraient d'être désastreux. La délégation de Fidji a ainsi encouragé à plus d’efficacité énergétique et à diversifier les sources d’énergie, comme à intégrer les femmes à l’élaboration des politiques.
Débat thématique: « Améliorer le rendement énergétique pour réduire les émissions atmosphériques et les problèmes atmosphériques; lutter contre les changements climatiques et promouvoir le développement industriel »
Au cours de cette table ronde, les participants se sont penchés sur la lutte contre le gaspillage de l’énergie disponible, qui se caractérise par une certaine négligence envers le concept et les moyens d’efficacité énergétique, et ont préconisé la promotion et l’utilisation de sources d’énergie renouvelables.
Dans ce cadre, M. Alfred Ofosu Ahenkorah, Directeur Exécutif de Energy Foundation, au Ghana, a expliqué que les obstacles à l’efficacité énergétique au Ghana et dans les pays en développement se situent au niveau de l’absence de sensibilisation à l’efficacité énergétique et du manque de sensibilisation sur les techniques impliquées. Depuis longtemps, le prix de l’énergie dans les pays en développement est élevé et non subventionné, en même temps qu’il n’y a pas de politique claire et commune sur la question de l’efficacité énergétique. La clef de la réduction de la quantité d’énergie perdue au cours du cycle de production et de distribution réside dans l’usage de technologies adéquates, celles dont disposent de nombreux pays étant malheureusement, a indiqué M. Ofosu Ahenkorah. Au niveau industriel, a-t-il ajouté, l’emploi de technologies aujourd’hui désuètes fait obstacle à toutes mesures visant l’efficacité énergétique. Sans énergie il n’y aura pas de développement ni de croissance, a-t-il noté, en faisant remarquer que quand il y a perte d’énergie, les premiers perdants sont les consommateurs.
M. Mark D. Levine, Directeur de l’« Environmental Energy Technologies Division » du Lawrence Berkeley National Laboratory, a estimé que les gouvernements ne se soucient guère de l’efficacité énergétique, ce qui explique les pertes induites que l’on constate. La plus grande barrière à l’efficacité est la question des connections aux réseaux, qui font grandement défaut en Europe du Nord, a-t-il estimé. Rendant hommage à la politique énergétique de la Chine, M. Levine a expliqué qu’elle se distingue par trois caractéristiques: la fourniture et l’efficacité énergétiques sont une des principales préoccupations du Gouvernement chinois, qui se distingue dans ce domaine par un souci de compétence; les objectifs industriels que s’est fixé le pays ont mis en valeur la question de l’efficacité énergétique; enfin, la Chine se distingue par l’application de normes dans la conservation de l’énergie.
M. Zhou Dadi, Directeur général de l’« Energy Research Institute of the National Développement and Reform Commission of China », a expliqué que la plupart des pays ont adopté des politiques mettant essentiellement l’accent sur l’offre, alors qu’il faudrait mettre l’accent sur la conservation de l’énergie et sur la mise en place d’un système d’évaluation. Un indicateur important, qu’il faudrait adopter, serait de tenir compte de la consommation par habitant, qu’il convient de réduire grâce à l’amélioration des techniques de production énergétique, a-t-il recommandé. Une bonne politique fiscale; la redistribution des recettes publiques; et l’amélioration de la gestion du marché, devraient encourager la consommation énergétique, a dit M. Zhou Dadi. Le véritable défi à relever est de diminuer la consommation d’énergie par habitant en améliorant l’efficacité énergétique, a-t-il souligné.
M. Stephen Wiel, Président du Conseil d’administration du « Collaborative Labeling and Standards Program » (CLASP), a estimé que les normes en matière d’efficacité énergétique sont la première chose à examiner. L’absence d’efficacité est le résultat du jeu du marché, a-t-il estimé, en ajoutant que la meilleure façon de surmonter les obstacles à l’efficacité énergétique serait de mettre en place des politiques adéquates, comme la mise en place de normes énergétiques. L’efficacité énergétique est la seule approche permettant d’atténuer les conséquences des changements climatiques, a ensuite déclaré l’expert.
Prenant la parole après les panélistes, le représentant des États-Unis a fait part des programmes d’assistance technique mis en œuvre par son pays, notamment en Bulgarie, où les États-Unis constituaient la seule source bilatérale de prêt au secteur public avant 1998. De son côté, le représentant de la Bulgarie a expliqué que les structures financières avaient permis d’améliorer l’efficacité énergétique dans son pays. Les programmes de prêt ont permis de prouver le succès de tels dispositifs financiers sans pour autant permettre de catalyser d’autres projets au niveau national, a-t-il cependant souligné.
La représentante de l’Autriche, parlant au nom de l’Union européenne, a estimé que l’utilisation croissante des sources d’énergies renouvelables devrait être encouragée en tenant compte de la sécurité de l’approvisionnement et de la protection de l’environnement. L’Union européenne envisage d’élever la part d’énergie renouvelable à 15% de sa consommation, notamment à la lumière des changements climatiques qui ont un impact socio-économique important, a dit la représentante. Après elle, le représentant de Cubaa détaillé la politique énergétique de son pays, qui est subventionnée et qui a permis de baisser la consommation des combustibles carbonés et de distribuer l’électricité de manière plus équilibrée dans le pays. « Nous avons constaté que nous faisions une économie de plusieurs milliers de kilowatts, et avons opéré la restauration du réseau électrique qui a désormais un potentiel inégalé », a-t-il indiqué.
Le représentant des Syndicats a, pour sa part, indiqué que selon certaines études, les entreprises pouvaient économiser 20% de leur consommation en énergie en systématisant la coopération entre leurs gestionnaires et leurs ouvriers ou travailleurs. Le représentant du Brésil a déclaré que son pays avait promulgué deux textes législatifs établissant des normes minimales de performance énergétique. Il existe en ce moment au Brésil trois importants programmes en ce domaine, dont notamment un programme de normes de consommation et d’étiquetage dans l’industrie automobile.
Reprenant la parole, M. Ahenkorah, l’expert venant du Ghana, a ajouté que le modèle d’efficacité énergétique aux États-Unis reposait sur des installations qui sont censées promouvoir les économies, et a précisé que ce modèle ne pouvait pas fonctionner dans le contexte africain. Les installations y sont en effet obsolètes et ne peuvent pas assumer ce genre de rôle, d’où l’importance de se doter d’une institution indépendante chargée de promouvoir les économies d’énergie, a dit l’expert. M. Levine, expert du Laboratoire national Lawrence, de Berkeley, a estimé que le rythme des changements actuels était trop lent, et largement insuffisant, et qu’il fallait développer des normes plus strictes de rentabilité énergétique s’appliquant au niveau international. « On peut faire davantage en mettant l’accent sur des investissements dans les infrastructures », a-t-il estimé.
Décrivant l’expérience de son pays en la matière, la représentante du Canada a expliqué que la transformation en gaz liquéfié du charbon et des schistes bitumeux est la voie à suivre pour l’avenir. C’est la voie adoptée par le Canada, a-t-elle indiqué. La représentante de la République dominicaine a plaidé pour des conditions plus justes qui favoriseraient le transfert des technologies et l’aide financière permettant le développement des infrastructures. Sans ces conditions, relever les défis de la gestion des ressources et modifier les modes de consommation seront difficiles pour les pays en développement, a-t-elle estimé. La représentante du Japon a évoqué le taux élevé de pollution que connaît son pays et la politique énergétique du Japon, en précisant que l’efficacité énergétique est un facteur clef pour l’établissement d’un équilibre entre les besoins de l’économie et la préservation de l’écologie.
Le représentant de l’Italie a dit que son pays avait adopté un système de certification qui permet de réduire la consommation de pétrole de plusieurs milliers de tonnes chaque année, conformément aux engagements du Protocole de Kyoto. « Nous prévoyons l’intégration d’outils financiers novateurs dans le domaine de l’énergie, ce qui devrait mobiliser un appui financier à une initiative caractérisée par sa complexité technologique, et nous avons aussi introduit des codes d’efficacité et des directives pour une meilleure utilisation de l’électricité », a-t-il souligné. Le représentant de la Chine a tenu à préciser que dans son pays, la consommation d’énergie est une politique d’État qui fait partie de la stratégie de développement. Dans le secteur industriel, le développement économique et le développement humain vont de pair, a-t-il dit en ajoutant qu’au niveau législatif, le Gouvernement avait rationalisé la production et la consommation d’énergie.
Le représentant de la Jordanie est intervenu pour dire que l’industrie énergétique pouvait économiser jusqu’à 51% de sa production, et que le gaspillage actuel provenait d’une absence d’intérêt de la part des responsables en ce qui concerne la rationalisation de l’usage de l’énergie. Le représentant de Maurice a indiqué que les économies d’énergie sont indispensables à la survie des petits États insulaires, ceci en raison du coût du pétrole qui constitue la plus grande part des importations de ces pays. Pour faire face à cette dépendance, Maurice a développé le biogaz. Quant à la représentante du Nigeria,elle a convenu que l’efficacité énergétique contribuera à atteindre les Objectifs du Millénaire en matière de développement. Dans l’ensemble, il y une absence de sensibilisation aux bénéfices induits par les économies d’énergie à tous les niveaux, que ce soit auprès du public ou auprès du secteur privé et public, a-t-elle dit. S’agissant des sources d’énergie renouvelable, elle a expliqué que le coût élevé de leur exploitation empêchait pour le moment leur commercialisation.
Le Groupe des agriculteurs du Brésil a indiqué que 50% du contenu d’une canne à sucre produisait de l’éthanol et que cette énergie était vendue aux entreprises et aux communautés urbaines. Le représentant de l’Australie a elle aussi expliqué que les normes sur l’étiquetage sont aussi un moyen de contrôler la consommation énergétique. La représentante de l’Afrique du Sud a expliqué que la consommation d’énergie dans son pays avait été réduite de 40% grâce à des actions de sensibilisation et des campagnes d’information. « Notre stratégie n’est pas liée à la seule production d’électricité, mais également à la réduction de la pollution de l’air en modifiant la manière dont on cuisine dans des foyers ne disposant pas d’électricité », a-t-elle précisé. La représentante de la Norvège a estimé que l’efficacité énergétique peut stimuler le développement économique d’un pays.
M. Wiel, du CLASP, a constaté que sur les 23 représentants ayant pris la parole, un seul avait abordé la question de l’assistance internationale et de la collaboration, qui pourtant est un élément indispensable de la promotion de l’efficacité énergétique.
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