LA QUATRIÈME COMMISSION ENTEND UNE INTERVENTION DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ADJOINT AUX OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX
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Quatrième Commission
13e séance – après-midi
LA QUATRIÈME COMMISSION entend une INTERVENTION du secrÉTAire gÉnÉral adjoint aux opÉrations de maintien de la paix
La Quatrième Commission (questions politiques spéciales et décolonisation) a entamé cet après-midi l’étude d’ensemble de la question des opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects. Elle a entendu une intervention du Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, Jean-Marie Guéhenno, qui a rappelé que le nombre d’opérations de maintien de la paix avait fortement augmenté en quatre ans. Au nombre de 18, ces missions concernent désormais plus de 200 millions de personnes dans le monde.
M. Guéhenno a reconnu que les réformes préconisées en 2000 par le rapport du Groupe d’études sur les opérations de paix de l’ONU*, dit « rapport Brahimi », n’avaient pas été toutes mises en œuvre. Il a souligné que le Département des opérations de maintien de la paix fonctionnait souvent à la limite de ses moyens en raison de la multiplication des opérations et de leur complexité croissante. Il a expliqué que le Département avait défini cinq priorités ambitieuses: l’amélioration de l’encadrement et de la carrière de son personnel; l’élaboration d’une doctrine du maintien de la paix, fondée sur l’expérience des Nations Unies; la constitution de partenariats, notamment au niveau régional et en Afrique; l’institutionnalisation d’une approche intégrée des opérations au sein du système des Nations Unies; et le redéploiement des ressources.
Le Rapport du Comité spécial des opérations de maintien de la paix et de son Groupe de travail (A/59/19.Rev.1) a été publié suite à la session annuelle du Comité, qui s’est tenue du 31 janvier au 25 février 2005 (voir le communiqué de presse du 25 février 2005, AG/PKO/185). Le Comité s’est en outre réuni du 4 au 8 avril 2005 pour étudier le document intitulé « Stratégie globale visant à éliminer l’exploitation et les abus sexuels dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies » (A/59/710) (voir le communiqué de presse du 4 avril 2005, AG/PKO/186).
La Quatrième Commission poursuivra son débat général consacré à la question des opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects demain, vendredi 21 octobre, à 15 heures.
* A/55/305 - S/2000/809
ÉTUDE D’ENSEMBLE DE TOUTE LA QUESTION DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX SOUS TOUS LEURS ASPECTS
Déclaration liminaire du Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix
M. JEAN-MARIE GUÉHENNO, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, a rappelé que lors de son arrivée à la tête du Département, sa première priorité a été d’intensifier les relations entre ce Département et les États Membres. Le maintien de la paix consiste à faire la transition entre le conflit armé et une paix autonome et durable, a-t-il dit. M. Guéhenno a rendu hommage aux 86 personnes qui avaient perdu la vie dans le cadre d’opérations de maintien de la paix. Il a également souligné que les consultations avec les pays contributeurs de troupes s’étaient multipliées, ce qui a abouti à des progrès, notamment dans l’application du processus de réforme globale initié par le « rapport Brahimi » il y a cinq ans. Il a rappelé que le nombre d’opérations de maintien de la paix avait fortement augmenté en quatre ans, puisque 18 opérations sont actuellement en cours, menées à bien par 83 000 personnes, soit une multiplication par cinq des effectifs depuis l’an 2000, et une augmentation de 10 000 personnes en un an. M. Guéhenno a remercié les pays contributeurs de troupes et de personnel de police, rappelant que ce type d’opération touchait plus de 200 millions de personnes. Le Département fournit une aide pour soutenir les fragiles accords de paix ainsi que les processus de transition politique, en prêtant son concours, par exemple, à l’organisation d’élections dans les situations postconflit, comme en Afghanistan, au Burundi, en Haïti, au Libéria et prochainement en République démocratique du Congo (RDC), a-t-il fait valoir. Par ailleurs, le Département met en œuvre des processus de désarmement dans des environnements instables, comme en RDC et en Haïti. Le Secrétaire général adjoint a expliqué également que l’ONU avait mené à bien son mandat en Sierra Leone et au Timor oriental, où elle soutient la transition vers une paix à long terme. Enfin, l’Organisation gère des situations politiques complexes en Côte d’ivoire et au Kosovo.
M. Guéhenno a ensuite expliqué que son Département mettait en œuvre des pratiques innovantes sur le terrain comme au Siège, citant en exemple la coopération intermissions en Afrique de l’Ouest; les critères intégrés de désarmement, de démobilisation et de réinsertion; le mécanisme révisé des stocks stratégiques pour déploiement rapide; la formulation d’une politique globale sur les opérations conjointes et les centres d’analyse conjointe de la mission; les 28 audits en cours au Siège et dans les missions. Il a souligné que la planification, la conduite et le soutien des opérations de maintien de la paix constituaient le cœur du Département, mais que celui-ci devait également prendre en charge un nombre croissant d’autres activités des Nations Unies sur le terrain, notamment en soutenant les 13 missions politiques spéciales et en fournissant des services à d’autres Départements, tels que celui des affaires politiques. Le Département des opérations de maintien de la paix a également entrepris de fournir un soutien à l’Union africaine (UA), conformément au vœu des États membres. Cette coopération est effective dans plusieurs régions africaines, notamment en ce qui concerne la mission de l’Union africaine au Darfour ou le renforcement des capacités de maintien de la paix de l’Union.
Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix a indiqué que, même sans prendre en compte ces nouvelles responsabilités, le Département continuait à se situer à la limite de ses capacités. Si deux missions sont venues à terme, l’engagement du Département dans les autres missions a été renforcé. Nous gérons l’organisation de terrain la plus économe, dont le personnel travaille souvent dans une situation de déficit, a-t-il assuré. Nous parvenons depuis longtemps à gérer cette situation grâce aux progrès accomplis à la suite du « rapport Brahimi » et grâce à l’engagement du personnel. Cependant, les lacunes de ce processus de réforme continuent à affaiblir nos opérations car toutes les réformes n’ont pas été mises en œuvre, a-t-il déclaré, citant en exemple le développement d’un système de déploiement rapide de forces de la taille d’une brigade. De même, de nouveaux défis sont apparus et la complexité des opérations a débordé le processus Brahimi. Ce rapport prévoyait de lancer une grande mission par an mais rien qu’en 2004, quatre nouvelles missions ont été créées. M. Guéhenno a ensuite observé que les tâches des opérations de maintien de la paix étaient réputées se limiter à l’observation d’accords de cessez-le-feu ou à l’appui au désarmement, mais qu’elles s’étendaient en réalité au maintien de l’ordre public, à la protection des civils et à l’administration publique. Plus notre personnel est chargé de lourdes tâches, moins nous pouvons lui demander innovation et qualité, a-t-il insisté. De plus, le manque de capacité à planifier globalement et à répondre à toute éventualité les met en danger.
Toutefois, a dit M. Guéhenno, en fonctionnant à ses limites, le Département ne peut gérer les opérations de façon efficace. Il a cité en exemple les allégations et cas prouvés d’exploitation et d’abus sexuels commis par des soldats, policiers et personnels civils de missions de maintien de la paix. Le Département a pleinement coopéré avec les États Membres sur cette question, qui ont répondu avec attention aux propositions présentées en vue d’établir une « Stratégie globale visant à éliminer l’exploitation et les abus sexuels dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies ». Le Département appliquera désormais une politique de tolérance zéro, a-t-il assuré. C’est ainsi que plus de 220 membres d’opérations ont fait l’objet d’une enquête au cours des 20 derniers mois, 10 civils ont été licenciés et plus de 88 personnels en uniforme rapatriés. Des groupes de la déontologie et de la discipline ont été créés au Siège et dans huit missions. L’élimination des abus dépend du respect par le personnel onusien des règles en vigueur. M. Guéhenno a donc demandé aux États Membres de tenir leurs chefs militaires pour responsables du respect de ces règles. De son côté, le Département rendra les chefs de mission responsables, a-t-il assuré.
M. Guéhenno a aussi déclaré que lors du Sommet mondial, les dirigeants avaient mis en valeur plusieurs éléments clefs pour les opérations de maintien de la paix. Premièrement, ils ont souligné que le maintien de la paix constituait le cœur de l’activité des Nations Unies, et que l’Organisation devait être en mesure de relever les défis dans ce domaine. Cela implique la mise sur pied d’une capacité de réserve rapidement déployable pour renforcer les missions en crise et les capacités de police. Deuxièmement, les États Membres ont réaffirmé leur engagement envers une approche globale et intégrée des pays en postconflit et au déploiement de missions intégrées dans des situations complexes. Afin de faciliter la cohérence, une commission de consolidation de la paix et un Bureau d'appui à la consolidation de la paix seront créés, a-t-il indiqué. Troisièmement, les États Membres ont réitéré l’importance des organisations régionales dans le soutien aux activités de paix, y compris le maintien de la paix, et ont proposé de renforcer les partenariats entre l’ONU et les organisations régionales, y compris en fournissant des capacités régionales au Système de forces et moyens en attente des Nations Unies. Quatrièmement, les États Membres ont exprimé leur préoccupation quant aux cas d’abus commis par du personnel des Nations Unies grâce à leur position, et ils ont donc réclamé une réforme des pratiques de gestion financière et de ressources humaines.
Le Département doit s’organiser autour de cinq priorités
Afin de répondre à ces préoccupations, le Département doit s’organiser autour de cinq priorités qui reflètent les conclusions du Sommet mondial. La première des priorités, ce sont les gens. Le personnel des opérations de maintien de la paix risque sa vie chaque jour et pourtant, les Nations Unies ne lui fournissent pas une structure de carrière. Le Département aurait besoin d’une approche systématique du recrutement et d’une préparation des chefs de mission, qui doivent être en mesure de faire face à la complexité de leur tâche. Le Département a créé un « Senior leadership induction programme » et il révise le processus de sélection du personnel senior. Son but est, à terme, d’instituer un cadre professionnel pour le personnel de terrain, soutenu par des dirigeants efficaces. Une nouvelle approche est nécessaire pour recruter, former et retenir les équipes. Le Département se propose donc d’étudier les conditions de service et de mobilité des employés à l’intérieur du système des Nations Unies. L’accent sera mis en particulier sur la formation et sur le relèvement des critères.
La doctrine constitue la deuxième priorité. L’expérience de l’Organisation doit être systématisée de façon consistante et avec un contrôle de la qualité. Il faut définir les questions centrales du maintien de la paix et instituer un cadre d’orientation pragmatique et opérationnel qui reflète l’expérience du Département et qui devienne la doctrine en matière de maintien de la paix. Cette tâche complètera le travail fourni sur la terminologie des opérations de maintien de la paix.
La troisième priorité réside dans les partenariats, l’intégration étant un sujet fréquemment débattu. Des progrès ont été réalisés et le processus intégré de planification des missions est en cours de révision afin d’être institutionnalisé. Une approche coordonnée à l’intérieur du système est nécessaire pour guider le travail en matière d’état de droit dans les pays postconflit. Le Département doit coopérer non seulement avec les autres institutions de l’ONU, mais aussi avec des partenaires extérieurs, et notamment les organisations régionales, qui jouent un rôle croissant dans le maintien de la paix, a ajouté M. Guéhenno. À son avis, chaque partenariat doit faire l’objet d’une approche au cas par cas, même si des cadres prévisibles de partenariat sont nécessaires. Le Département s’est fixé pour priorité de mettre en place ces cadres dans les cinq prochaines années, a-t-il précisé. Un dialogue ouvert et institutionnalisé sera inauguré sur la base de trois objectifs: la promotion de la capacité régionale de maintien de la paix; le renforcement de l’efficacité à travers les efforts de construction de capacités ciblés; le renforcement d’une approche collective de la sécurité. Le partenariat avec l’Union africaine constitue la première des priorités du Département, sa seconde priorité résidant dans la poursuite de la coopération sur le terrain avec les institutions financières internationales, dont la Banque mondiale, a poursuivi le Secrétaire général adjoint.
La quatrième priorité est l’organisation. La revitalisation du maintien de la paix des Nations Unies en terme de personnel, de doctrine et de partenariats nécessite une organisation capable de soutenir ses capacités et répondre aux besoins d’un Département général décentralisé. Nous devons mettre en place une structure qui fournisse au terrain une direction et un soutien clair et responsable, qui réponde aux États Membres et noue des partenariats effectifs dans les opérations de paix intégrées, a-t-il dit. Nous ne sommes pas organisés pour prendre en charge ces fonctions, a estimé M. Guéhenno, même si les États Membres ont exprimé leur fort soutien à une approche intégrée d’équipe, telle que proposée dans le « rapport Brahimi ». Nous étudions comment mettre en œuvre cette approche et nous avons conclu qu’une application systématique au sein du Département était nécessaire, a-t-il expliqué. Il a proposé d’instituer des équipes pleinement intégrées pour diriger et soutenir les opérations sur le terrain depuis le Siège. Ces équipes réuniraient le personnel militaire, civil et de police pour fournir une orientation sur le terrain. Il n’y aurait qu’un organe de soutien par mission, qui inclura les partenaires des Nations Unies. L’organigramme du Siège refléterait à son avis les efforts pour renforcer l’organisation des opérations sur le terrain. Après avoir indiqué que le Département élaborait à présent une série de directives destinées à guider la planification des missions et leur gestion, le Secrétaire général adjoint a affirmé qu’un processus d’évaluation comparative permettrait de créer des structures organisationnelles destinées à répondre aux besoins des missions.
Enfin la cinquième des priorités réside dans les ressources. M. Guéhenno n’a pas réclamé une augmentation du nombre d’employés ni un élargissement des structures de maintien de la paix, mais une amélioration qualitative de ces structures. La plupart de nos efforts porteront sur le redéploiement interne des capacités actuelles au Siège et sur le terrain, a-t-il assuré, jugeant qu’une plus grande souplesse du personnel était nécessaire. Cependant, il a jugé que des ressources supplémentaires étaient requises dans certains domaines, notamment pour soutenir le renforcement du personnel, première ressource des opérations de maintien de la paix. Il est également nécessaire de financer le lancement d’un service de formation intégrée, a-t-il expliqué.
En conclusion, M. Guéhenno a reconnu que les priorités du Département des opérations de maintien de la paix pouvaient paraître ambitieuses. Ces priorités nous permettraient toutefois de mieux servir les 200 millions de personnes qui ont besoin de nous, a-t-il déclaré, indiquant qu’après approbation des États Membres, il fournirait au Comité spécial des opérations de maintien de la paix un programme de mise en œuvre de chacune d’entre elles.
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