LA QUATRIÈME COMMISSION ACHÈVE L’AUDITION DES PÉTITIONNAIRES SUR LE SAHARA OCCIDENTAL
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Quatrième Commission
5e séance – matin
LA QUATRIÈME COMMISSION ACHÈVE L’AUDITION DES PÉTITIONNAIRES SUR LE SAHARA OCCIDENTAL
La Quatrième Commission (questions politiques spéciales et décolonisation) a poursuivi ce matin son débat général sur la décolonisation et a achevé l’audition des pétitionnaires sur le Sahara occidental. Le représentant du Front POLISARIO, Ahmed Boukhari, a affirmé que le Front avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour faciliter le succès de la décolonisation du Sahara occidental, accusant le Maroc de ne pas appliquer le référendum d’autodétermination prévu par le Plan de règlement, plan que ce pays avait pourtant accepté. Pour sa part, le Front avait accepté le cessez-le-feu, le Plan de règlement et le Plan de paix, a souligné M. Boukhari, et avait relâché en août tous les prisonniers de guerre marocains. Pourtant, a-t-il estimé, la coopération du Front n’a pas permis la reprise du processus de paix et les violations des droits de l’homme se sont même aggravées dans les territoires occupés, avec un mépris pour la vie des prisonniers sahraouis. La question du Sahara occidental ne pourra être réglée sans le respect du droit à l’autodétermination des Sahraouis, a-t-il affirmé, aucune autre proposition n’étant acceptable, et sans l’application du Plan de règlement ou du « Plan Baker ».
Plusieurs anciens responsables du Front POLISARIO se sont inscrits en faux en affirmant que la question du Sahara occidental ne pouvait être résolue que dans le cadre de la souveraineté marocaine. La majorité de la population du Sahara n’a jamais mis les pieds à Tindouf mais vit paisiblement dans les provinces du Sud du Maroc, lequel est prêt à accorder une large autonomie au Sahara dans le cadre de sa souveraineté, a déclaré de son côté Mustapha Bouh, ancien membre du Bureau politique du Front. Il a estimé que la question du Sahara occidental était une lutte de suprématie régionale engagée par l’Algérie, qui entretenait depuis 1975 le Front POLISARIO et en avait pris les leviers de commande, puisque des purges successives avaient permis d’éliminer les opposants à la mainmise algérienne sur le Front. Plusieurs pétitionnaires ont également mis en exergue la responsabilité de l’Algérie dans les violations des droits de l’homme commises, selon eux, dans les camps de Tindouf. Ancien officier marocain ayant passé 25 ans dans les camps de prisonniers, Ali Najab a souligné que cette ville était en territoire algérien, et qu’Alger était responsable des mauvais traitements infligés aux prisonniers.
S’agissant de la Nouvelle-Calédonie, le Comité Rhébu Nuu a accusé la France de mener une politique de pillage des ressources de l’île, de laisser les dossiers liés à l’accord de Nouméa « au point mort » et de marginaliser les Kanaks tandis que les flux de migration en provenance de la Métropole augmentent pour « noyer démographiquement [la population locale] et la priver d’accéder à l’indépendance ».
La Quatrième Commission a également poursuivi son débat général, dans le cadre duquel le représentant du Venezuela a exprimé sa préoccupation face à la remise en question de la Quatrième Commission, notamment lors de la négociation du Document final du Sommet mondial. « Nous ne sommes pas d’accord pour remettre en cause son existence tant qu’elle n’aura pas achevé son mandat d’éliminer le colonialisme sous toutes ses formes », a-t-il affirmé.
Les pétitionnaires et représentants de territoires non autonomes suivants ont pris la parole: Association des ex-prisonniers de l’intégrité territoriale; Frank Ruddy, ambassadeur américain à la retraite; Conseil consultatif pour le Sahara; Euro-Mediterranean Women’s Committee; Comité pour le regroupement de la Nation unie (COREFASA); Ghallaoui Sidati, chercheur à l’Institut d’Etudes africaines et ancien représentant du POLISARIO; Paris Tempo Productions; Rabbani Mohamed Abdelkader, personnalité sahraouie et ancien Ministre du POLISARIO; Comité norvégien de soutien pour le Sahara occidental; Réseau eurafricain pour le développement intègre, les droits de l’homme et les relations interculturelles (Yaakaare-REDHRIC); Front POLISARIO; Mustapha Bouh, ancien membre du Bureau politique du Front POLISARIO; Comité Rhébu Nuu de Nouvelle-Calédonie; le Représentant des affaires étrangères du Gouvernement des Îles Vierges américaines.
Dans le cadre du débat général, les délégations suivantes sont intervenues: Inde, Venezuela, Botswana (au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe), Zambie, Congo et Malaisie.
Le représentant de la République démocratique du Congo a présenté une motion d’ordre et le représentant du Royaume-Uni a exercé son droit de réponse.
La Quatrième Commission reprendra ses travaux mardi matin à 10 heures.
DÉBAT GÉNÉRAL SUR TOUTES LES QUESTIONS RELATIVES À LA DÉCOLONISATION
Audition de pétitionnaires
Sahara occidental
M. ALI NAJAB, Association des ex-prisonniers de l’intégrité territoriale, a expliqué qu’en tant qu’ancien officier pilote de l’armée de l’air marocaine aujourd’hui à la retraite, il avait passé 25 ans dans un camp de prisonniers à Tindouf en Algérie. À la suite de cette détention, il est devenu Président d’une association qui s’occupe des prisonniers marocains détenus dans les camps, dont les souffrances ont provoqué des séquelles physiques et morales. Il a décrit les très difficiles conditions dans lesquelles vivaient les prisonniers marocains, qui étaient soumis aux aléas climatiques, forcés de travailler constamment, contraints de donner leur sang, obligés de faire de la propagande en lisant de fausses déclarations contre leur terre natale et empêchés de correspondre librement avec leurs familles. Il a raconté comment les prisonniers qui s’évadaient étaient rattrapés par des soldats algériens puis torturés, parfois jusqu’à la mort, par le Front POLISARIO.
Le pétitionnaire a par ailleurs dénoncé la responsabilité de l’Algérie dans ses violations de la Convention de Genève, comme cela a été mis en évidence, a-t-il déclaré, par la Fondation France Libertés. Les prisonniers marocains étaient détenus à Tindouf, sur le territoire algérien, et certains ont été déplacés au nord d’Alger, a-t-il précisé, ajoutant que l’Algérie avait échangé des prisonniers marocains contre des prisonniers algériens capturés par le Maroc en 1976 dans le Sahara. Il a déploré que certains des représentants d’ONG qui avaient parlé à la tribune au cours des jours précédents n’avaient jamais demandé la libération des prisonniers marocains, dont ils avaient pourtant constaté les souffrances lors de visites dans les camps.
M. FRANK RUDDY, ancien Ambassadeur des États-Unis, a estimé que le Maroc remplaçait maintenant l’Espagne en tant que nouveau pays colonisateur du Sahara occidental, dénonçant la formule de « Marche verte » qui dissimule à ses yeux une invasion en violation du droit international. Il a rappelé que la Cour internationale de Justice avait refusé la souveraineté du Maroc sur le territoire, ajoutant que le Conseil de sécurité avait également condamné par deux fois l’invasion du Sahara occidental. Il a affirmé que les sanctions avaient été inexistantes contre ce pays, soulignant que d’autres pays comme l’Iraq avaient été durement sanctionnés lorsqu’ils s’étaient rendus coupables d’une invasion. Il a ensuite accusé le Maroc d’avoir saboté l’organisation du référendum en veillant à ce qu’il ne puisse pas avoir lieu.
M. DOUIHI MOHAMED RACHID, Membre du Conseil consultatif pour le Sahara, a estimé que la relation entre le Maroc et le Sahara occidental était historique, affirmant que le Roi du Maroc avait décrété son contrôle sur le Sahara occidental au XVIIe siècle. Il a exprimé ses regrets de voir que la Commission continuait à évoquer ce sujet, estimant que 1975 marquait la fin de la décolonisation dans le territoire. Il a ajouté que l’Algérie continuait de se cacher derrière le POLISARIO et qu’après le retrait des autorités espagnoles, le Maroc avait été surpris de voir l’ingérence de l’Algérie et avait dû lutter pendant 16 années contre « une armée de conscription ». Il a insisté sur la grande responsabilité des organisations algériennes dans la situation actuelle du Sahara occidental, affirmant que les manœuvres du POLISARIO et de l’Algérie ont pour objet de priver le peuple sahraoui de sa participation au référendum, ce qui expliquait l’échec dans l’organisation de ce dernier.
« Nous essayons de promouvoir le développement économique et le progrès national » a-t-il déclaré, ajoutant que le Maroc tentait de mettre un terme à la tension dans le pays. Il a conclu en rappelant que ce dossier découlait de faits historiques et a enjoint à « ne pas glisser dans l’inconnu », avant de regretter que certains orateurs aient appuyé le représentant de l’Algérie faisant peu de cas des « centaines de personnes qui ont disparu en Algérie ou ont passé plus de 27 ans dans les geôles algériennes ».
Mme LATIFA AÏT BAALA, Euro-MediterraneanWomen’s Committee, a évoqué les conditions inhumaines et dégradantes de vie dans les camps de Tindouf en Algérie, où la population sahraouie est séquestrée. Selon elle, les Sahraouis sont devenus otages d’un conflit qui s’éternise entre le Maroc et l’Algérie, vivant dans le dénuement à l’intérieur d’un espace quadrillé par la sécurité militaire algérienne, en violation des dispositions relatives à la mission du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR). Ces populations sont livrées au libre arbitre d’une milice armée, qui a commis des atrocités ayant entraîné le dépôt d’une plainte devant la Cour pénale internationale, a-t-elle affirmé. Elles sont présentées par l’Algérie comme étant des réfugiés, alors qu’elles ne répondent pas aux critères définis par l’article 1 de la Convention sur les réfugiés puisqu’elles n’ont jamais été persécutées dans leur territoire d’origine, comme le prouve la majorité de Sahraouis qui est restée dans la mère patrie, et les anciens éléments du POLISARIO qui ont fui les camps de Tindouf. Selon la pétitionnaire, l’image des réfugiés présentée par l’Algérie est une supercherie lui permettant de procéder au détournement de l’aide humanitaire.
Elle a ensuite fait référence au rapport publié en 2003 par la Fondation France Libertés, qui a rencontré 700 prisonniers marocains à Tindouf, où ils avaient été torturés par le Front POLISARIO et par l’Algérie. Ce pays porte atteinte au droit du Maroc à défendre son intégrité territoriale conformément à la résolution 1514 (XV) des Nations Unies, a-t-elle déclaré, ajoutant que le principe d’autodétermination devenait caduc lorsqu’il constituait une menace pour l’unité d’un pays. Pourquoi l’autodétermination serait-elle valable pour le Sahara marocain et non pour le Sahara algérien? s’est interrogée la pétitionnaire, selon qui l’Algérie instrumentalise le Front POLISARIO pour diviser la nation marocaine et servir ses propres intérêts géostratégiques. Le Maroc souhaite parvenir à un règlement politique, définitif et acceptable par les différentes parties dans le cadre des Nations Unies, a-t-elle conclu, ajoutant que la région du Sahara risquait de devenir un foyer potentiel de terrorisme international.
Mme GAJMOULA EBBI, Présidente du Comité pour le regroupement de la Nation unie (COREFASA), a déclaré que depuis trois décennies se poursuivait un conflit absurde, qui entraîne l’instabilité et un profond désespoir pour le peuple sahraoui. Le bilan global est tragique en pertes humaines comme matérielles, a-t-elle expliqué, puisque les Sahraouis subsistent dans des conditions inhumaines dans les camps de Tindouf, sous l’emprise d’un groupe qui s’est autoproclamé représentant des Sahraouis, alors qu’il s’agit d’un groupuscule totalitaire qui séquestre les Sahraouis dans les camps. Huit mille Sahraouis ont pourtant réussi à fuir ces camps et la persécution psychique infligée par M. Abdelaziz, Chef du POLISARIO, et par son appareil répressif, a-t-elle affirmé, avant de dénoncer le détournement de l’aide humanitaire par ce mouvement. « J’ai vécu 16 ans dans les camps de Tindouf », a-t-elle raconté, avant de décrire le dur sort des femmes et des enfants dans les camps, ces derniers étant endoctrinés dès leur plus jeune âge.
M. GHALLOUI SIDATI, ancien représentant du Front POLISARIO, a déclaré que « le POLISARIO en tant qu’organe politique indépendant n’existe pas », ajoutant qu’il s’agit d’un instrument créé, financé et coordonné dans toutes ses structures par l’Algérie. Il a insisté sur le fait que l’Algérie avait droit de regard sur l’ensemble des opérations, y compris les opérations humanitaires vers les camps de réfugiés. Il a évoqué sa « conscience d’homme libre » qui l’aurait empêché de continuer à travailler dans ce cadre, à son avis en contradiction avec le principe d’autodétermination.
Il a rappelé par la suite la séparation créée entre ceux emmenés par la force par l’Algérie et ceux restés sur le territoire marocain. Il a affirmé que la solution ne pouvait passer que par le Maroc, en invitant la communauté internationale à faire pression sur l’Algérie pour permettre aux réfugiés de revenir librement sur le territoire marocain et affirmant que le Maroc était la « patrie d’origine des Sahraouis ».
Mme JOMARIE FECCI, Paris Tempo Productions, a affirmé qu’en tournant un documentaire sur le sujet du Sahara occidental, elle avait pu constater que les réfugiés s’efforçaient, malgré l’exil, d’assurer l’éducation de leur peuple et de construire les bases d’un État viable. Elle a estimé que ces succès s’étaient édifiés sur la base de leur foi en la communauté internationale, mais que la déception commençait à gagner du terrain. « Même très populaire, un programme humanitaire ne peut pas résoudre le problème », a t-elle déclaré, ajoutant que le refus du Maroc d’accepter le Plan de règlement et la tenue d’un référendum constituaient le principal obstacle à une solution pour les Sahraouis.
La pétitionnaire a affirmé que le Maroc laissait la situation en l’état, dans l’espoir que les réfugiés se lassent et finissent par accepter son autorité. Toutefois, a-t-elle prévenu, sans changement, « la nouvelle génération risque de ne voir d’autre solution que de se lancer dans une lutte armée ». Elle a insisté sur le fait que le peuple sahraoui était pacifique et qu’il serait « désastreux que toutes ces années de négociations et de préparatifs pour un référendum se terminent dans une grande souffrance ».
M. RABBANI MOHAMED ABDELKADER, personnalité sahraouie, ancien Ministre du POLISARIO, a estimé que le Maroc n’avait fait qu’exercer son droit en revenant sur un territoire qui était décolonisé. Il a estimé qu’en tant qu’ancien cadre du POLISARIO, le Front n’était plus un mouvement politique et ne pouvait plus être considéré comme étant une partie concernée par une recherche d’une solution, car c’était l’Algérie qui contrôlait tout. Ce pays ne croit pas sincèrement au principe d’autodétermination mais cherche à servir ses propres intérêts expansionnistes, a-t-il déclaré. Le pétitionnaire a par ailleurs accusé Alger d’empêcher le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) de recenser les Marocains réellement détenus dans les camps de Tindouf et de bloquer tous les responsables du POLISARIO qui souhaiteraient prendre des décisions indépendantes et qui auraient foi en une solution politique à un problème artificiellement monté en épingle par Alger. Il a rappelé que des habitants des camps étaient rentrés au Maroc et qu’en 1998 s’était produit un soulèvement, à la suite duquel l’Algérie avait accru son emprise sur le POLISARIO, conduisant plusieurs de ses dirigeants à fuir vers le Maroc où ils dénoncent la réflexion séparatiste.
Les Sahraouis doivent pouvoir vivre dans la dignité sur leur terre, le Maroc, où nombre d’entre eux vivent déjà dans la dignité dans les Provinces du Sud marocain, a-t-il déclaré, avant de s’indigner qu’un petit groupe de Sahraouis soit forcé de vivre dans des camps à Tindouf, en Algérie. Ancien Ministre de la justice du POLISARIO, le pétitionnaire a dénoncé la multiplication des trafics illicites autour des camps, le tout dans un désert qui est terreau du terrorisme. Il a demandé à la Quatrième Commission de contraindre l’Algérie à accepter la réalité et de trouver une solution conformément à la souveraineté du Maroc.
M. RONNY HANSEN, Comité norvégien de soutien pour le Sahara occidental, a affirmé que l’un des contacts de son association avait été arrêté et torturé par la police marocaine, uniquement parce qu’il coopérait avec une association étrangère. Il a ajouté que la délégation de son association qui se rendait au Sahara occidental pour suivre le procès de 16 Sahraouis jugés pour avoir manifesté contre « l’oppression marocaine », avait été « détenue, menacée et jetée hors du Sahara occidental ». Il a dénoncé les pratiques de la police marocaine qui se serait rendue coupable de nombreuses violations des droits de l’homme.
Il a également déclaré que l’accès aux hôpitaux était régulièrement refusé aux Sahraouis victimes de la brutalité policière, ajoutant que « le sort des défenseurs sahraouis des droits de l’homme, aujourd’hui prisonniers politiques, était crucial dans le succès des efforts des Nations Unies au Sahara occidental ». Il a affirmé que l’attitude du Maroc représentait une menace pour la stabilité dans la région et pour la crédibilité des Nations Unies, et que ces dernières devaient faire pression « de manière tangible » pour le respect des droits de l’homme et le règlement de la situation au Sahara occidental.
Mme ANJA OKSALAMPI, Réseau eurafricain pour le développement intègre, les droits de l’homme et les relations interculturelles (Yaakaare-REDHRIC), s’est félicitée de la libération des 404 plus vieux prisonniers du monde en août dernier, plus de 14 ans après le cessez-le-feu de 1991. Elle a expliqué que l’objectif principal de son association était la lutte contre l’impunité et a demandé qu’une enquête internationale soit ouverte sur le sort de tous les prisonniers de guerre marocains portés disparus afin de traduire en justice les responsables de ces actes, le Front POLISARIO et l’Algérie. Elle a également demandé l’indemnisation des prisonniers et de leurs familles, ainsi que la restitution des dépouilles des prisonniers décédés dans les camps. Elle a ensuite mentionné le sort des 200 Marocains civils et militaires encore incarcérés dans les camps de Tindouf, alertant la Commission sur le sort des « réfugiés sahraouis », tels que les qualifie la communauté internationale, vivant dans les campements de Tindouf.
La pétitionnaire a ensuite attiré l’attention sur le risque que le Front s’en prenne aux tribus minoritaires et aux négro-africains afin de les contraindre à accomplir les travaux lourds qui étaient le lot des prisonniers marocains. Rappelant qu’elle avait milité 15 ans dans une association pro POLISARIO, elle a souhaité évoquer les questions taboues du tribalisme, de l’esclavage et du racisme. Elle a notamment évoqué le sort des négro-africains présents dans les camps, indiquant que des familles sahraouies avaient emporté leurs esclaves avec elles en se rendant à Tindouf. De même, la pétitionnaire a mentionné le sort difficile des objecteurs de conscience appartenant aux tribus minoritaires, torturés et portés disparus. Elle a mis en garde les ONG qui, de bonne foi, offrent une assistance aux réfugiés mais qui pourraient être un jour considérées comme complices des exactions commises par le POLISARIO et l’Algérie.
M. AHMED BOUKHARI, représentant du Front POLISARIO, a rappelé qu’il y avait bientôt 30 ans que le Maroc avait envahi et occupé illégalement son pays. Le peuple sahraoui résistera aussi longtemps qu’il le faudra pour atteindre son objectif légitime, a-t-il affirmé, c’est-à-dire son droit d’exister en tant que nation indépendante et souveraine. Il a rappelé que le Front POLISARIO et le Maroc avaient accepté un Plan de règlement à la fin des années 80, prévoyant l’organisation d’un référendum d’autodétermination avec les Nations Unies. En dépit de l’acceptation solennelle par le Maroc de ce référendum, celui-ci n’a toujours pas été organisé. L’Envoyé personnel du Secrétaire général, James Baker, a ensuite conçu un Plan de paix pour l’autodétermination du peuple du Sahara occidental, plan accepté par le Front POLISARIO et le Conseil de sécurité dans sa résolution 1495. Or, le Maroc continue à rejeter cette opportunité et n’épargne aucun effort pour épuiser la volonté de la communauté internationale, a-t-il indiqué. M. Boukhari a déploré que certains signes, comme l’intention de l’Union européenne (UE), de signer un accord illégal avec le Maroc portant sur la pêche, soient interprétés par ce dernier comme un encouragement, et il a appelé l’UE à reconsidérer sa décision.
Après avoir déploré qu’en dépit de l’acceptation par son mouvement du cessez-le-feu et du Plan de règlement, ainsi que des accords de Houston et du « Plan Baker » la reprise du processus de paix n’ait pas eu lieu, M. Boukhari a souligné que les violations des droits de l’homme s’étaient même aggravées dans les territoires occupés et dénoncé le mépris pour la vie des prisonniers sahraouis. La question du Sahara occidental, non résolue depuis plus de 40 ans, ne pourra l’être sans le respect du droit à l’autodétermination des Sahraouis, a-t-il dit. Aucune autre proposition n’est acceptable et sans l’application du Plan de règlement ou du « Plan Baker », il ne peut y avoir que violence et chaos, a conclu le représentant du Front.
M. MUSTAPHA BOUH, ancien membre du Bureau politique du Front POLISARIO, a expliqué avoir longtemps évolué au sein du Front POLISARIO, à différents degrés de responsabilité. Le problème du Sahara occidental, qui a été présenté devant la Quatrième Commission en termes de décolonisation, a-t-il déclaré, n’est en réalité qu’une lutte de suprématie régionale engagée par l’Algérie. Ce pays entretient depuis 1975 le Front POLISARIO et a créé les camps de Tindouf en y faisant convoyer des civils par son armée, tout comme il a poussé le POLISARIO à créer la pseudo-République sahraouie, avant de prendre les leviers de commande du Front. L’Algérie est donc responsable aux yeux du droit international de tous les crimes commis sur son territoire par la direction du POLISARIO, a-t-il soutenu, avant d’expliquer que le POLISARIO avait entrepris quatre grandes purges dans ses rangs de 1974 à 1988, touchant essentiellement les intellectuels et les opposants à la mainmise algérienne sur ce mouvement.
Le pétitionnaire a ensuite déclaré que la majorité de la population du Sahara n’avait jamais mis les pieds dans les camps de Tindouf et vivait paisiblement dans les provinces du Sud du Maroc, ayant même des élus dans les institutions marocaines. Le Maroc est disposé à accorder une large autonomie au Sahara dans le cadre de la Souveraineté nationale, a-t-il déclaré, ce qui permettrait d’avancer vers une solution définitive du dossier. Il a par ailleurs affirmé que la majorité des Sahraouis adhérait à une telle formule. Il faut régler rapidement ce conflit afin d’éviter que l’arsenal militaire mis par l’Algérie à la disposition du POLISARIO ne contribue à alimenter davantage le terrorisme dans cette zone sensible, a-t-il conclu.
Nouvelle-Calédonie
M. ROCH WAMYTAN, Comité Rhébu Nuu, a affirmé que depuis 152 ans, la France démontrait qu’elle ne souhaitait pas l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie et des territoires d’outre-mer. Il a accusé la France de mener une politique faite de manipulations et d’un pillage des ressources de l’île par des multinationales minières. Il a estimé que l’État reprenait toujours d’une main ce qu’il avait concédé de l’autre, affirmant que « l’Accord de Nouméa n’était pas un accord de paix, » mais « un acte majeur de décolonisation ». Il a ensuite exprimé son inquiétude de voir privilégiée la gestion des compétences sur la politique, ce qui risque, à ses yeux, de « faire perdre les repères de l’indépendance ».
Le pétitionnaire a déclaré que les principaux dossiers concernés par l’accord de Nouméa étaient « au point mort », dénonçant la marginalisation dont seraient encore victimes les Kanaks et l’augmentation des flux de migration en provenance de la Métropole, destinée à « noyer le Kanak démographiquement pour le priver d’accéder à l’indépendance » et financée par des aides de l’État français. Il a évoqué une déstructuration de la société kanak et les différences de traitement en matière de formation et d’emploi. « L’école reste élitiste », a-t-il affirmé, dénonçant également le manque de protection de l’emploi kanak ainsi que le manque de financement du fond d’acquisition foncière. Il s’est inquiété de l’utilisation des mines de nickel, dénonçant le pillage des ressources par la France et l’absence de réglementation environnementale.
Îles Vierges américaines
M. CARLYLE CORBIN, Représentant des affaires étrangères du Gouvernement des Îles Vierges américaines, a indiqué que la participation des territoires non autonomes au travail des Nations Unies représentait une part critique de leur processus de développement, et favorisait l’avancée de leur décolonisation. Les Iles Vierges américaines se sont impliquées dans le système des Nations Unies en devenant membre associé de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) ou en participant à des conférences internationales. Il a remercié la communauté internationale et les institutions des Nations Unies qui ont permis la participation des Îles Vierges américaines à ces travaux, leur permettant de s’informer sur les questions économiques et sociales liées au développement durable des petits États insulaires. M. Corbin a ensuite rappelé que le travail de la CEPALC visant à soutenir les territoires non autonomes était reflété dans les résolutions du Conseil économique et social et dans celles de l’Assemblée générale. Il a indiqué que le projet de résolution présenté devant la Quatrième Commission saluait l’initiative réussie de la CEPALC visant à faciliter la participation des territoires aux conférences mondiales des Nations Unies, et l’invitait à étudier les modalités de leur participation dans les travaux du Conseil économique et social. Les résolutions de la CEPALC en 1998 et 2004 appuyaient la participation des territoires aux activités du Conseil, a-t-il rappelé, avant de s’étonner que cette position ait été renversée lorsque la question est venue devant le Conseil, il y a plusieurs mois. Il a souligné que les États Membres avaient pourtant su se montrer souples lorsqu’il avait fallu fournir un statut consultatif auprès du Conseil à des centaines d’ONG.
M. Corbin a par ailleurs rappelé que les territoires non autonomes ne pouvaient être représentés devant les Nations Unies qu’avec le soutien de leur Puissance administrante, et qu’ils ne pouvaient pas être représentés s’il n’existait pas de dispositions précises. Cette question ne peut être résolue que par un processus de décolonisation réussi, a-t-il estimé. Il a également mis l’accent sur la nécessité de ne bénéficier pas seulement d’un appui aux principes de décolonisation, mais aussi d’un soutien tangible pour progresser.
Débat général
M. PRASANNA KUMAR PATASANI (Inde) a affirmé que le colonialisme était aussi dépassé qu’anachronique et contraire aux principes de démocratie, de liberté, de dignité de progrès et de droits de l’homme. « Il faut redoubler d’efforts », a-t-il affirmé, ajoutant qu’il fallait tenir compte des circonstances particulières de chaque territoire ainsi que des aspirations des populations de ces territoires. Il a déclaré qu’il était fondamental de mettre en place des plans d’action spécifiques pour chacun des territoires, sans céder à la tentation du « plan unique ».
Il a insisté sur la nécessité d’informer les populations des territoires non autonomes des choix dont ils disposent par une information objective et de la propager, estimant qu’il s’agissait là d’un élément important pour atteindre les objectifs de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux. Il a également évoqué le rôle très important des missions de visite des Nations Unies qui constituent, à ses yeux, un moyen efficace de collecter des informations directes et de vérifier les aspirations des peuples. « Les puissances administrantes ont offert leur coopération », s’est-il félicité, distinguant particulièrement les efforts du Royaume-Uni et de la Nouvelle-Zélande et les appelant à une implication active et une participation concrète à l’avenir. Il a enfin espéré que la décolonisation serait achevée en 2010.
M. FERMÍN TORO JIMÉNEZ (Venezuela) a exprimé la préoccupation de sa délégation face à la remise en question de la Quatrième Commission, citant notamment la négociation du « document baptisé final » lors du Sommet mondial. Nous ne sommes pas d’accord pour utiliser la revitalisation de l’Assemblée générale afin de remettre en cause l’existence de la Quatrième Commission sans que celle-ci ait achevé son mandat d’éliminer le colonialisme sous toutes ses formes, a-t-il déclaré. Le représentant a ensuite fait part de son inquiétude face à l’enlisement du processus au Sahara occidental et il a réclamé l’application des résolutions pertinentes des Nations Unies ainsi que l’organisation du référendum prévu, qui constituent à son avis la seule option pour donner au peuple sahraoui son droit à l’autodétermination. Par ailleurs, il a affirmé que les îles Malvinas (Falkland), Georgia du Sud et Sandwich faisaient partie inhérente du territoire argentin et qu’il ne s’agissait pas d’un cas d’autodétermination puisque la population avait été transférée par l’occupant. Le représentant a ensuite estimé que le peuple de Porto Rico n’avait toujours pas exercé son droit à l’autodétermination et il a assuré que le Venezuela soutenait son indépendance.
La délégation vénézuelienne a par ailleurs souhaité que le processus de décolonisation prenne fin avant le terme de la deuxième Décennie de l’élimination du colonialisme, ce qui sera difficile tant qu’on prétendra reformuler le droit international au service des grandes Puissances, a-t-il indiqué. Il a appelé les États Membres à travailler à une réforme qui mette en valeur les objectifs initiaux de l’Organisation, et non qui cherche à réformer le droit en faveur des intérêts des puissances anciennement coloniales et néocoloniales.
M. ALFRED M. DUBE (Botswana), au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), a rappelé que les pays d’Afrique australe attachaient une importance particulière à la question de la décolonisation. Il a estimé que « depuis l’indépendance du Timor oriental, aucun progrès particulier n’a été réalisé en matière de décolonisation ». « C’est un processus qui doit être mis en mouvement sans plus tarder », a-t-il ajouté. Il a estimé que la tenue de forums régionaux était une manifestation très claire de la détermination de la communauté internationale à appliquer le plan d’action.
Il a regretté que, malgré les efforts des Nations Unies, les habitants du Sahara occidental continuaient de se voir refusé « leur droit inaliénable à l’autodétermination ». Il a prié le Maroc d’accepter le Plan de Règlement et l’organisation d’un référendum « libre et juste », tout en notant que des initiatives positives avaient été prises de part et d’autre sur la question. Le représentant a conclu en affirmant qu’il ne saurait y avoir de paix, de développement et d’adhésion au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, tant qu’il y aurait des territoires colonisés.
M. TENS C. KAPOMA (Zambie) a affirmé que sa délégation appuyait le processus de décolonisation au Sahara occidental et réaffirmait le droit inaliénable de tous les peuples, y compris les Sahraouis, à l’autodétermination et à l’indépendance, conformément aux dispositions des Nations Unies. Le processus de décolonisation est inachevé et nous invitons donc la Communauté internationale à prendre les mesures nécessaires pour éliminer le colonialisme dans les 16 territoires non autonomes qui subsistent, a-t-il déclaré. Il a ensuite appuyé le Plan de paix de James Baker pour le Sahara occidental et jugé que les Nations Unies ne devaient pas cesser d’appuyer le peuple sahraoui.
M. ATOKI ILEKA (République démocratique du Congo) a fait une motion d’ordre. Bien que s’associant à la déclaration du Botswana faite au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), il a indiqué que sur la question du Sahara occidental, la position de son pays demeurait inchangée. Il a donc exhorté les parties à coopérer pleinement avec les Nations Unies.
M. LUC JOSEPH OKIO (Congo) a affirmé qu’il restait « beaucoup à faire pour arriver à bout de cet anachronisme qu’est le colonialisme », ajoutant que l’audition des pétitionnaires montrait que les espoirs placés en la Quatrième Commission étaient grands. Il a déclaré que sans mesures concrètes pour accélérer le progrès économique et social dans les territoires non autonomes et sans la pleine coopération des puissances administrantes, les objectifs en matière de décolonisation ne pourraient être atteints. Il a également rendu hommage à la Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni, invitant d’autres puissances administrantes « à suivre ces bons exemples ».
Le représentant a insisté sur la nécessité de poursuivre des missions de visite dans les territoires. Il a évoqué la visite du Comité spécial aux Bermudes, expliquant qu’elle avait révélé le déficit d’information des populations en matière de décolonisation ainsi que la nécessité d’améliorer les circuits de distribution de ces informations. « Ces missions devraient être plus fréquentes, comme le souhaitent les populations concernées elles-mêmes », a-t-il ajouté. Enfin, il a conclu en lançant un appel à toutes les parties impliquées au Sahara occidental pour qu’elles travaillent « dans un esprit de compromis » en vue d’une solution politique au conflit.
M. HAMIDON ALI (Malaisie) a appelé le Comité spécial à lancer une campagne de sensibilisation et d’information des peuples des territoires non autonomes, soulignant que les centres d’information des Nations Unies avaient un rôle à jouer à cet égard, tout comme les Puissances administrantes.
M. Ali a demandé au Comité spécial d’encourager les Gouvernements de l’Argentine et les Nations Unies à reprendre les négociations sur la question des îles Falkland (Malvinas) en prenant en considération les intérêts des peuples de ces îles. De même, il a exhorté les parties concernées à trouver une solution politique mutuellement acceptable à la question du Sahara occidental, dans le respect du droit à l’autodétermination de la population sahraouie. Le représentant a ensuite rappelé que Mouvement des non-alignés, présidé actuellement par la Malaisie, restait attaché à la pleine élimination de la colonisation et a réclamé une indemnisation juste des peuples anciennement ou actuellement colonisés pour les pertes humaines et matérielles subies. Les pays colonisateurs doivent acquitter leurs responsabilités, a-t-il déclaré. Enfin, il a demandé que le Comité spécial se voit attribuer les ressources financières et humaines dont il a besoin pour poursuivre sa tâche.
Droit de réponse
Exerçant son droit de réponse, le représentant du Royaume-Uni a fait savoir que sa délégation souhaitait faire usage de ce droit au cours d’une séance ultérieure pour évoquer la question des îles Falkland (Malvinas).
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