QUATRIEME COMMISSION: LES DELEGATIONS JUGENT QUE LE RETABLISSEMENT DE L’ETAT DE DROIT EST UNE COMPOSANTE ESSENTIELLE DES OPERATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX
Communiqué de presse CPSD/271 |
Quatrième Commission
10ème séance – matin
QUATRIEME COMMISSION: LES DELEGATIONS JUGENT QUE LE RETABLISSEMENT DE L’ETAT DE DROIT EST UNE COMPOSANTE ESSENTIELLE DES OPERATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX
De nouvelles mesures s’imposent pour garantir la sécurité du personnel des Nations Unies
Face à la complexité croissante des conflits, la communauté internationale est de plus en plus appelée à prendre en charge la consolidation de la paix. Autrement dit, que le succès des opérations de maintien de la paix devrait dépendre à l’avenir de la capacité de ces missions à rétablir l’état de droit et à mener à bien les programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration des anciens combattants. Tel est le concept avancé par plusieurs délégations, parmi lesquelles le Pakistan, l’Inde, le Mozambique et la Jamaïque. Témoignant de l’expérience du Kosovo, le représentant de la Serbie-et-Monténégro a affirmé que la violence, le crime organisé et la culture de l’impunité, qui prévalent toujours dans cette région, s’expliquent par l’échec du processus de désarmement et par le manque de personnel international dans le système judiciaire. Se rangeant à ce propos, le représentant des Etats-Unis a été plus spécifique en insistant sur l’importance de la mise à niveau du système judiciaire et carcéral au Libéria, condition préalable au rétablissement de l’état de droit. Compte tenu de ces activités nouvelles pour le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP), les délégations ont insisté sur l’importance d’une formation uniformisée « avant déploiement » pour le personnel de maintien de la paix.
Suite aux événements tragiques qui ont coûté la vie à 22 membres du personnel des Nations Unies en Iraq, les délégations, et surtout les pays fournisseurs de contingents, ont fait part de leurs préoccupations concernant la sécurité de ce personnel. Les représentants du Népal, de la Corée et de la Thaïlande ont demandé à ce que ces pays soient plus étroitement associés au processus de prise de décisions au sein du DOMP et que des “stratégies de sortie» soient mises en place. La nécessité pour les Nations Unies d’avoir un meilleur accès aux informations et aux renseignements sur le terrain en vue de mieux protéger le personnel de maintien de la paix a également été soulevée par le représentant des Etats-Unis.
Les délégations suivantes ont également pris la parole: Japon; Bangladesh, Guyana, République arabe syrienne, Koweït, Erythrée, Cuba, Kazakhstan, Chypre et Maroc.
La Quatrième Commission poursuivra ses travaux le lundi 20 octobre à 15 heures.
ETUDE D’ENSEMBLE DE TOUTE LA QUESTION DES OPERATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX SOUS TOUS LEURS ASPECTS
M. KOICHI HARAGUCHI (Japon) a indiqué que pour son pays il était essentiel que les opérations de maintien de la paix ne soient pas rigides. M. Haraguchi a rappelé que son pays avait fait du soutien aux opérations de maintien de la paix l’un des piliers de sa politique étrangère et il s’est interrogé sur la manière dont il pouvait encore mieux y contribuer. Il a précisé qu’un séminaire avait été organisé à cet effet en collaboration avec le DOMP, des ONG et d’autres acteurs sur le terrain. Concernant les opérations de maintien de la paix « plus énergiques, » M. Haraguchi a déclaré que sa délégation considérait, comme le Secrétaire général adjoint, M. Guéhenno, que le principe du consentement était un élément déterminant, non seulement le consentement des parties en conflit, mais aussi celui de la population. Il a estimé par ailleurs que le rôle des organisations régionales devrait aussi être soutenu, notamment en Afrique, et que le budget des opérations de maintien de la paix soit maintenu à un niveau raisonnable. En ce qui concerne le recrutement des membres du personnel du DOMP, il reste beaucoup à faire pour mettre en œuvre la résolution 57/310 sur la représentation des Etats dans les opérations de maintien de la paix, a conclu M. Haraguchi.
M. KIM SAM-HOON (Corée) a rappelé que son pays avait prouvé son attachement au maintien de la paix en participant à plusieurs missions, en Somalie, en Angola, au Sahara occidental et à Timor-Leste. Il a félicité le Secrétariat pour les efforts qu’il a déployés en vue de renforcer les capacités des opérations de maintien de la paix et pour les progrès réalisés depuis les recommandations du rapport Brahimi. Il a, par ailleurs, souligné que son pays attachait une grande importance à la reconstruction de la paix après les conflits, notamment au processus de désarmement de démobilisation et de réinsertion et de réinstallation (DDRR) des ex-combattants, au respect du droit, à la mise en place d’institutions politiques stables et à la reconstruction socio-économique. Le rôle de la police civile est à ce sens essentiel, a précisé M. Sam-Hoon. Il a néanmoins ajouté qu’en se complexifiant, les opérations de maintien de la paix devenaient plus difficiles à gérer en termes de capacités et de ressources, et que la Corée était d’avis que les mandats des missions devaient être réalistes et réalisables au cours d’une période de temps donnée. M. Sam-Hoon a, par ailleurs, affirmé que le maintien de la paix ne pouvait pas être considéré comme la panacée dans tous les types de conflits et que les Casques bleus ne devraient être envoyés que dans les zones où leur présence pouvait changer quelque chose sur le terrain. Certaines situations peuvent être mieux gérées si elles font l’objet de réponses rapides par le biais de coalitions mises en place par les organisations régionales, a noté M. Sam-Hoon et, en ce sens, la Corée reconnaît le rôle vital joué par ces organisations dans les Balkans ou en Afrique. Par ailleurs, la qualité de l’équipement, de la formation et de la discipline des troupes est primordiale pour le succès des opérations de maintien de la paix, a encore indiqué M. Sam-Hoon. Enfin, en ce qui concerne les pays contributeurs aux opérations de maintien de la paix, M. Sam-Hoon a expliqué que la Corée considérait que les Etats Membres qui ne siègent pas au Conseil de sécurité mais qui assument une part importante du fardeau financier du maintien de la paix devraient être consultés avant que le Conseil de sécurité ne décide de la création d’une nouvelle mission ou de l’élargissement d’une mission existante, a-t-il conclu.
M. MURARI RAJ SHARMA (Népal) a condamné tout acte terroriste et déclaré que l’une des plus grandes difficultés rencontrées actuellement dans le cadre des opérations de maintien de la paix est la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel humanitaire. Abordant la complexité croissante des opérations de maintien de la paix, il a estimé qu’il fallait que les pays fournisseurs de contingents soient étroitement associés au processus de prise de décisions et que l’on tienne compte de leurs préoccupations en ayant des stratégies de protection, voire d’évacuation du personnel de maintien de la paix, si nécessaire. Il a également remarqué que la composante militaire des opérations de maintien de la paix, quoique très importante, ne suffit plus pour garantir le succès d’une mission. Il est désormais nécessaire de prévoir des composantes de police civile de manière à pouvoir rétablir l’état de droit dans les situations postconflit. M. Sharma a ensuite demandé au DOMP de prendre les mesures nécessaires pour pouvoir rapidement procéder au remboursement des pays contributeurs de troupes, expliquant que les pays en développement s’en trouvent souvent pénalisés.
MME MEHNAZ RAFI (Pakistan) a estimé que le succès d’une mission de maintien de la paix est tributaire de règles d’engagement claires et uniformément applicables. De plus, le mandat de ces missions doit être clairement défini et réaliste, et il ne faut pas y mettre fin prématurément en invoquant des raisons politiques ou financières, a-t-elle poursuivi. Compte tenu de la complexité croissante des missions, la composante militaire devrait être complétée par des activités ayant trait aux aspects humanitaires au désarmement à la démobilisation et à la réinsertion (DDR), au rétablissement de l’état de droit et à l’assistance électorale. De plus, la police et le personnel civils sont appelés à jouer un rôle de plus en plus déterminant dans le cadre de ces missions, a dit Mme Rafi. Elle a également lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle ait une approche plus équilibrée de la question du maintien de la paix, faisant valoir que le Conseil de sécurité a été beaucoup plus rapide à réagir face à la crise dans les Balkans que face aux conflits en Afrique, notamment en République démocratique du Congo. Mme Rafi a également mis l’accent sur l’importance du rôle des femmes dans des situations postconflits; elle a incité les Etats Membres à accorder une attention plus particulière aux femmes et aux enfants dans les situations de conflits, et a encouragé le DOMP à renforcer la participation de femmes aux opérations de maintien de la paix.
M. IFTEKHAR AHMED CHOWDURY (Bangladesh) a expliqué que la tendance actuelle était la mise sur pied d’opérations de maintien de la paix « robustes » et a souligné l’importance du rôle que joue une force multinationale intérimaire multinationale sous commandement d’un pays donné. D’ailleurs, a-t-il ajouté, en expliquant que l’expérience récente en Sierra Léone, en République démocratique du Congo, en Côte d’Ivoire et au Libéria a prouvé l’efficacité d’une telle combinaison. Il a ensuite expliqué que dans la mesure où les conditions sur le terrain s’avéraient difficiles pour préserver un cessez-le feu dans des conditions de sécurité précaires, il a fallu rapidement déployer une force de maintien de la paix crédible avec des règles d’engagement uniformes et un mandat clair, en associant une force multinationale ou régionale aux Casques bleus. Il a également demandé aux Etats Membres de prendre exemple sur la coopération entre l’Union européenne et les Nations Unies pour ce qui est de renforcer les capacités de maintien de la paix de l’ONU. A cette fin, les Etats Membres pourraient notamment participer au réapprovisionnement des stocks de la base de soutien logistique des Nations Unies à Brindisi, voire contribuer aux formations multidimensionnelles du DOMP, renforcer la capacité de maintien de la paix de l’Afrique et financer des programmes de désarmement à la démobilisation et à la réinsertion (DDR), car le maintien de la paix est par nature universel et nécessite un effort collectif, a affirmé le délégué. Suite aux tragiques événements de Bagdad, les pays fournisseurs de contingents sont de plus en plus préoccupés par les conditions de sécurité dans lesquelles opèrent leurs troupes. Par conséquent, M. Chowdury s’est félicité de l’intérêt renouvelé du Conseil de sécurité et de la communauté internationale, pour cette question ce qui s’est notamment traduite par l’adoption de la résolution 1502. Enfin, le délégué a mis l’accent sur l’importance de la formation des forces de maintien de la paix car l’efficacité des capacités de déploiement rapide des Nations Unies dépend de troupes bien formées et adéquatement équipées.
M. SAKDA SANGSNIT (Thaïlande) a noté que les Nations Unies pouvaient être fières de leur bilan en matière de maintien de la paix dans plusieurs régions, du Timor-Leste à la Sierra Léone et a fait part de la disponibilité de son pays à envoyer des soldats aux futures opérations de maintien de la paix. Mais ces opérations doivent être temporaires et prévoir non seulement des « stratégies d’entrée », mais aussi des « stratégies de sortie », a affirmé M. Sangsnit. La Thaïlande considère que le renforcement des relations entre ceux qui planifient, ceux qui gèrent et ceux qui appliquent sur le terrain les opérations de maintien de la paix est impératif, a indiqué M. Sangsnit. Il a aussi déclaré que son pays, qui est un pays contributeur de troupes, était très préoccupé par les attaques ou actes de violence perpétrés contre les soldats du maintien de la paix. Selon lui, il est impératif que des principes directeurs clairs en matière de protection du personnel civil et militaire soient adoptés et que des formations appropriées soient offertes avant l’envoi de personnel sur le terrain. M. Sangsnit a aussi noté que plusieurs pays, pour la plupart des pays en développement, n’ont toujours pas été remboursés pour leur participation aux missions de maintien de la paix et a indiqué que son pays soutenait la mise en place d’un groupe de travail sur la question. M. Sangsnit a conclu en faisant part de l’intérêt particulier de son pays pour les projets de déminage dans les situations postconflits et pour la formation des troupes à un niveau régional.
MME NADIRA MANGRAY (Guyana) a déclaré que dans un monde affligé par tant de conflits, le maintien et la consolidation de la paix sont désormais des priorités absolues. Pour pouvoir faire face à ces défis, les Nations Unies doivent pouvoir compter sur l’engagement des Etats Membres qui se traduit par la mise à disposition de ressources sûres, à la fois humaines et financières, a-t-elle poursuivi. Cela est d’autant plus important que les opérations de maintien et de consolidation de la paix ne se limitent plus à un engagement de type militaire, mais couvrent également les aspects humanitaires, politiques et civils de la reconstruction d’un Etat. Par ailleurs, Mme Mangray a mis l’accent sur le rôle potentiel des organisations régionales qui, par leur proximité, sont souvent les mieux placées pour trouver des solutions aux conflits de la région. Par conséquent, elle encourage le DOMP à renforcer sa coopération avec ce type d’organisations.
M. V. K. NAMBIAR (Inde) a fait observer que les opérations de maintien de la paix avaient évolué, au cours des dix dernières années, passant d’opérations militaires unidimensionnelles à des opérations complexes à multiples facettes. A ce titre, il a notamment donné l’exemple de l’importance croissante du rôle de la police civile dans ces opérations ou encore celui de la coopération soutenue entre les Nations Unies et les organisations régionales dans le cadre de la mise en œuvre de ce type de missions. Une « réponse collective » de la part de la communauté internationale suppose, à son sens, que le Nord et le Sud participent de la même manière aux opérations de maintien de la paix, ce qui suppose qu’il va falloir mettre un terme à la dichotomie actuelle, a poursuivi le délégué. Se ralliant à la position du Secrétariat selon laquelle le rétablissement de l’état de droit dans les zones postconflits est une condition préalable à toute paix durable, la délégation indienne encourage la coopération avec les partenaires internes et externes aux Nations Unies à cette fin. Elle se réjouit d’apprendre que le système des stocks stratégiques de déploiement rapide est désormais opérationnel, et souhaiterait que le Secrétariat fournisse des informations supplémentaires sur la possibilité d’utiliser une partie de ces stocks pour aider les pays fournisseurs de contingents qui sont confrontés à des difficultés. Se félicitant de l’importance accordée par le Secrétariat à la formation du personnel avant le déploiement, M. Nambiar souhaiterait néanmoins savoir si cet arrangement sera formalisé par un accord ou s’il s’agit d’une procédure régulière à l’avenir.
M. LOUAY FALLOUH (République arabe syrienne) a déclaré que les opérations de maintien de la paix ont prouvé leur rôle déterminant ces dernières années, par exemple à Timor-Leste ou en Bosnie. Il a indiqué que son pays espérait que ces expériences pourront se reproduire dans d’autres conflits, comme en Somalie par exemple. Les opérations de maintien de la paix doivent néanmoins se limiter au mandat dont elles disposent dans le cadre de la Charte des Nations Unies et ne doivent en aucun cas aller au-delà de ce mandat, a précisé M. Fallouh. Dans le cas du Moyen-Orient, si la mission de maintien de la paix dure depuis des décennies, la responsabilité en incombe à Israël, pays qui viole constamment le droit international, a affirmé M. Fallouh. La récente agression d’Israël contre des villes syriennes n’est pas un incident isolé, a précisé M. Fallouh…, en rappelant que le 4 janvier dernier, une autre agression d’Israël avait provoqué la mort d’un policier syrien. La dernière agression israélienne contre le territoire syrien est la preuve du comportement « agressif et terroriste » d’Israël dans la région, a encore affirmé M. Fallouh, en rappelant aussi que face à cette agression la Syrie avait fait appel à l’ONU pour éviter une escalade de la violence. M. Fallouh a conclu en indiquant que la République arabe syrienne était attachée à la sécurité de tout le personnel des Nations et souhaitait un partenariat renforcé entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat et les pays fournisseurs de contingents.
M. TARCISIO BALTHAZAR (Mozambique) a lui aussi indiqué que son pays considérait que le succès des opérations dépendait d’une coopération accrue entre les Nations Unies et les organisations régionales, qui ont une expérience du terrain et des conflits. C’est dans cet objectif que l’Union africaine dispose en son sein d’un Conseil pour la paix et la sécurité, a précisé M. Balthazar, en rappelant les remarques de M. Guéhenno concernant la nécessité d’intensifier les capacités de maintien de la paix destinées à l’Afrique. Les missions doivent aussi prendre en considération les causes des conflits, notamment en renforçant les institutions politiques du pays et en s’assurant du respect du droit pour éviter la récurrence potentielle des tensions. De la même manière, la dimension économique et sociale de la résolution des conflits ne doit pas être ignorée et le processus de désarmement de démobilisation et de réinsertion, combiné avec des programmes de formation est en ce sens déterminant, a affirmé M. Balthazar. Il a insisté sur la fait qu’aucune opération de maintien de la paix ne peut réussir sans la volonté des parties au conflit à y mettre fin.
MME JANICE MILLER (Jamaïque) a souligné que la responsabilité de la prévention et du règlement des conflits incombe à la communauté internationale dans son ensemble. Pour cela les mandats des opérations de maintien de la paix doivent être clairs, crédibles, réalistes et assortis de ressources humaines et financières adéquates. De plus, la communauté internationale doit répondre aux situations de crise dans la transparence et de manière équitable, a-t-elle poursuivi. La délégation jamaïcaine se félicite des progrès réalisés en matière de déploiement rapide et de renforcement de la capacité de maintien de la paix en Afrique. Elle met l’accent sur l’importance du désarmement de démobilisation et de réinsertion (DDR) pour le succès d’une mission, illustrant son propos par l’exemple du Libéria. Par ailleurs, la formation du personnel de maintien de la paix avec des manuels et des stratégies uniformisées est, à son avis, le meilleur moyen pour assurer que les Nations Unies soient correctement représentées sur le terrain. Abordant également la question de la sécurité du personnel de maintien de la paix, la déléguée a invité les Etats Membres à appliquer les conventions internationales et les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.
M. GERALD SCOTT (Etats-Unis) a rendu hommage aux membres des Nations Unies qui ont trouvé la mort à Bagdad, assassinés par des terroristes alors qu’ils apportaient une aide humanitaire au peuple iraquien. Il a expliqué à cette occasion l’importance pour les Nations Unies d’avoir un meilleur accès aux informations et aux renseignements pour prévenir de telles attaques et mieux protéger son personnel.
Abordant la situation au Libéria, M. Scott a passé en revue les progrès récents enregistrés sur le terrain, notamment la bonne coopération entre les Nations Unies et la CEDEAO et le déploiement rapide de la MINUL, grâce aux stocks logistiques de la base de Brindisi. Pour leur part, les Etats-Unis contribueront à cette mission à hauteur de 75 policiers civils chargés de la formation des forces de police intérimaires au Libéria. Dans ce contexte, il a rappelé qu’il fallait également revitaliser le système judiciaire et carcéral, sans quoi il ne sera pas possible de rétablir l’état de droit au Libéria. Cette opération sera difficile et coûteuse, a poursuivi M. Scott, mais il est essentiel qu’ensemble la communauté internationale la mène à bien. M. Scott a également expliqué que les Etats-Unis avaient apporté du matériel logistique d’une valeur de 26 millions de dollars à la force de la CEDEAO qui était sur place jusqu’au 1er octobre. Ils envisagent d’y envoyer une équipe spécialisée pour faciliter la collecte des armes légères au Libéria et dans toute la région. Il a tenu à réaffirmer qu’en dépit des engagements financiers énormes pris par le Gouvernement américain pour faciliter la démocratisation en Afghanistan et en Iraq, il n’en est pas moins décidé à aider le Libéria. En effet, un Libéria démocratique pourra jouer un rôle stabilisateur dans la région, a affirmé M. Scott. Par ailleurs, la délégation américaine se félicite du niveau de compétence de la Division de Police civile du DOMP et, compte tenu de l’importance de cette division, propose qu’elle fasse partie des domaines prioritaires dans l’évaluation indépendante prévue pour 2004, des progrès du DOMP.
M. MANSOUR AYYAD AL-OTAIBI (Koweït) a indiqué que sa délégation considérait que les opérations de maintien de la paix avaient changé de visage ces dernières années, en incluant de nouvelles fonctions telles que le soutien aux institutions politiques ou la mise en place d’observateurs électoraux. Les structures de commandement de ces missions doivent être clairement définies et de nouveaux procédés doivent être trouvés pour coordonner les responsabilités de chacun, que ce soit au Secrétariat, au Conseil de sécurité ou parmi les pays fournisseurs de contingents, a affirmé M. Al-Otaibi, en ajoutant que son pays considérait que les besoins de formation en matière de maintien de la paix devaient être revus. Il a ajouté que le Koweït saluait les efforts déployés par le DOMP pour améliorer les capacités de déploiement rapide de l’organisation. M. Al-Otaibi a rappelé que le Koweït avait accueilli sur son territoire la Mission d'observation des Nations Unies pour l'Iraq et le Koweït (MONUIK), mission qui a contribué à réduire la tension aux frontières des deux pays. A partir de 1993, le Koweït s’est engagé à payer pour les deux tiers du budget de la MONUIK, et ce jusqu’à la fin de son mandat, a aussi rappelé M. Al-Otaibi, ce dont s’est félicité le Conseil de sécurité. Pour sa part, le Koweït a souhaité remercier le personnel des Nations Unies pour son travail dans le cadre de cette mission par une lettre du Ministre des affaires étrangères adressée aux membres de la MONUIK, a déclaré M. Al-Otaibi, qui a ajouté qu’après la disparition de l’ancien régime en Iraq le Koweït souhaitait que ce pays retrouve rapidement sa souveraineté et sa stabilité.
M. AMARE TEKLE (Erythrée) a indiqué que sa délégation soutenait les efforts déployés par les Nations Unies pour accélérer la solution des conflits régionaux. Cependant, a noté M. Tekle, dans bien des cas le soutien logistique et politique de l’Organisation est déterminant et la communauté internationale doit garder à l’esprit que le Conseil de sécurité est la principale structure responsable du maintien de la paix et de la sécurité dans le monde. M. Tekle a lui aussi rappelé que les opérations de maintien de la paix étaient devenues plus complexes ces dernières années et que les missions mises sur pied à cet effet entretiennent parfois la confusion sur le rôle respectif des pays hôtes et des Nations Unies. Cette question de la relation entre le pays hôte et les Nations Unies, ainsi que celle du VIH/sida sont considérées comme des priorités par la délégation érythréenne, a déclaré M. Tekle. Dans ce cadre, l’Erythrée, qui a une politique énergique en matière de lutte contre le sida, juge essentielle la formulation d’accords sur le statut des forces de maintien de la paix en faisant figurer des dispositions particulières sur le VIH/sida, a-t-il ajouté. L’Erythrée a conclu un accord de coopération avec le programme ONUSIDA et le DOMP et se félicite de la mise en place d’un groupe de travail sur le VIH/sida à l’intérieur de la Mission des Nations Unies en Éthiopie et en Érythrée (MINUEE).
M. Tekle a indiqué que son pays considérait que le pays hôte avait aussi une responsabilité majeure dans la sécurité du personnel des Nations Unies. Il a, à ce titre, dénoncé l’attitude de certains éléments de l’armée éthiopienne et en particulier les menaces formulées par certains d’entre eux contre des patrouilles de la MINUEE et contre des appareils de la Commission frontalière Ethiopie-Erythrée. Il a aussi dénoncé le dépôt par ces soldats de nouvelles mines antipersonnel dans la zone tampon de sécurité entre les deux pays. M. Tekle a rappelé que le Secrétaire général avait présenté au Conseil de sécurité un rapport sur l’attitude des forces éthiopiennes.
MME MERCEDES DE ARMAS (Cuba) a déclaré que la délégation cubaine accorde une importance particulière au respect des principes fondamentaux qui régissent les opérations de maintien de la paix en vertu de la Charte, indépendamment de la complexité croissante de ces opérations. A ce titre, elle a estimé que les activités humanitaires et la notion nouvelle de la « culture de la protection » ne s’inscrivent pas dans ce cadre. Elle a également expliqué que les moyens dont disposent les Nations Unies pour agir en cas de conflit ne se limitent pas au Conseil de sécurité, dans la mesure où l’Assemblée générale peut également jouer un rôle important et d’autant moins biaisé que “l’hégémonie» de certains pays et le droit de veto n’y existent pas. La délégation cubaine est préoccupée par les retards concernant le remboursement des pays fournisseurs de contingents et appelle le DOMP à y remédier au plus vite. Par ailleurs, elle considère que les opérations de maintien de la paix ne sont pas un palliatif aux causes sous-jacentes des conflits, ajoutant qu’il ne peut y avoir de paix sans développement. Quant au rôle du Conseil de sécurité, elle constate à regret qu’il utilise des critères discriminatoires et qu’il pratique la politique du deux poids deux mesures dans ses décisions relatives au déploiement d’opérations de maintien de la paix dans les différentes régions du monde.
M. YERZAN KAZYKHANOV (Kazakhstan) a souligné que pour son pays les mécanismes de prévention des conflits représentaient l’un des plus grands défis pour le maintien de la paix. Les accords de paix ne sont en général que le premier pas vers le rétablissement d’une paix durable, a ajouté M. Kazykhanov, en insistant sur le fait que les crises en République démocratique du Congo, au Libéria ou en Afghanistan illustraient le besoin impératif de renforcer le rôle des Nations Unies dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales. M. Kazykhanov a déploré le fait que les pays pauvres subissent au premier chef les conséquences des conflits armés et a reconnu, comme l’avait fait le Secrétaire général avant lui, que les pays qui sortent de la guerre civile doivent trouver les moyens d’être autosuffisants dans le respect des principes démocratiques. A ce titre, les concepts de sécurité appliqués au niveau régional et de soutien à la démocratisation dans le cadre des opérations de maintien de la paix sont essentiels, a indiqué M. Kazykhanov, en ajoutant que son pays soutenait l’initiative du DOMP concernant les arrangements relatifs aux forces et moyens en attente et avait signé, il y a quelques jours, un mémorandum en ce sens avec les Nations Unies.
M. DEJAN SAHOVIC (Serbie-et-Monténégro) a souligné que les aspects ayant trait au désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR), au rétablissement de l’état de droit et à la réforme des systèmes judiciaires et de sécurité revêtent une importance particulière pour le succès des opérations de maintien de la paix. Soulignant que ces trois domaines sont étroitement liés, il a affirmé qu’une paix durable en dépendait. A ce titre, il a mis l’accent sur les besoins des femmes et des enfants soldats dans les programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR). Se basant sur l’exemple du Kosovo, M. Sahovic a rappelé que selon des estimations récentes quelque 330 000 armes légères illégales seraient toujours en circulation, ce qui traduit clairement l’échec du processus de désarmement et permet d’expliquer la situation volatile et la violence qui y prévalent. Abordant ensuite l’aspect relatif au rétablissement de l’état de droit dans les zones postconflits, le délégué a vivement encouragé le DOMP à recruter des experts judiciaires dans le cadre des opérations de maintien de la paix. L’insuffisance du nombre de juges internationaux et de procureurs a conduit à une culture d’impunité et au crime organisé au Kosovo, a-t-il ajouté à ce propos. Par ailleurs, il a demandé au DOMP de prendre des mesures facilitant l’échange d’informations avec les pays fournisseurs de contingents, ce qui contribuerait à rendre le processus plus transparent.
M. ANDREAS MAVROYIANNIS (Chypre) a rappelé que son pays accueillait la plus vieille mission de maintien de la paix de l’histoire de l’Organisation, la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP), et qu’à ce titre il était particulièrement attaché, comme l’Union européenne, au respect du droit dans le cadre des missions de maintien de la paix ainsi qu’à la sécurité du personnel des Nations Unies. Il a néanmoins rappelé que la présence de 35 000 soldats turcs dans la partie nord de Chypre faisait de cette région la région la plus militarisée au monde. M. Mavroyiannis a aussi rappelé que cette année les restrictions à la liberté de mouvement des personnes, par la puissance occupante, dans cette zone avaient, démontré que les communautés du nord et du sud pouvaient parfaitement bien vivre ensemble, dans la paix. Il a déclaré que seules l’intransigeance du dirigeant turc chypriote et celle du Gouvernement turc empêchaient un règlement de la question. La partie grecque, a indiqué M. Mavroyiannis, a au contraire fait des efforts en ce sens en ouvrant des points de passage le long de la zone tampon. A ces mesures amicales s’est ajoutée l’annonce par le Président Papadopoulos, devant l’Assemblée générale, d’une décision unilatérale de déminage de la zone tampon par le Gouvernement chypriote grec avec l’assistance financière de l’Union européenne, une décision qui malheureusement a été ignorée par la partie turque, a regretté M. Mavroyiannis. L’attitude négative de la partie turque est responsable de la présence prolongée de l’UNFICYP sur l’île de Chypre et, sans cette attitude, Chypre serait bientôt membre de l’Union européenne en tant que pays unifié, a conclu M. Mavroyiannis.
MME SOUAD EL ALAOUI (Maroc) a rappelé combien le concept du maintien de la paix avait évolué depuis la fin de la guerre froide. Elle a ajouté que pour son pays les opérations de maintien de la paix ne devaient pas se substituer à une solution définitive des conflits et qu’elles ne devaient pas continuer à être une « spécialité des pays en développement ». Mme El Alaoui a insisté sur le fait que sa délégation était favorable, comme le Secrétaire général, à une participation de tous les Etats Membres à ces opérations, en souhaitant que la tendance actuelle, par laquelle les pays en développement fournissent l’essentiel des contingents, s’inverse. Souhaitant que le personnel des Nations Unies bénéficie de conditions adéquates de sécurité pour effectuer sa tâche, Mme El Alaoui a estimé qu’il fallait favoriser une approche intégrée allant de la prévention des conflits à la gestion des crises, à la consolidation de la paix et au renforcement de l’état de droit. Mme El Alaoui a conclu en se félicitant de l’annonce faite par M. Guéhenno sur l’amélioration de la coopération logistique entre les Nations Unies et les pays africains, rappelant la participation de son pays aux missions des Nations Unies en République démocratique du Congo et l’annonce d’une participation du Maroc aux efforts en cours au Libéria.
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