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CIJ/608

LE MEXIQUE INTRODUIT UNE INSTANCE CONTRE LES ETATS-UNIS CONCERNANT LA CONVENTION SUR LES RELATIONS CONSULAIRES ET DEMANDE A LA COUR D'INDIQUER DES MESURES CONSERVATOIRES

10/01/03
Communiqué de presse
CIJ/608


LE MEXIQUE INTRODUIT UNE INSTANCE CONTRE LES ETATS-UNIS CONCERNANT LA CONVENTION SUR LES RELATIONS CONSULAIRES ET DEMANDE A LA COUR D'INDIQUER DES MESURES CONSERVATOIRES


LA HAYE, le 10 janvier -- Le Mexique a saisi la Cour internationale de Justice (CIJ), le 9 janvier 2003 en fin d'après-midi, d'un différend qui l'oppose aux Etats-Unis d'Amérique au sujet de prétendues violations des articles 5 et 36 de la convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963, concernant cinquante-quatre ressortissants mexicains condamnés à mort par les Etats de Californie, du Texas, de l'Illinois, de l'Arizona, de l'Arkansas, de la Floride, du Nevada, de l'Ohio, de l'Oklahoma et de l'Oregon.


L'article 5 de la convention de Vienne dresse une liste complète des fonctions consulaires, tandis que l'article 36 se lit comme suit :


«Communication avec les ressortissants de l'Etat d'envoi


1. Afin que l'exercice des fonctions consulaires relatives aux ressortissants de l'Etat d'envoi soit facilité :


a) Les fonctionnaires consulaires doivent avoir la liberté de communiquer avec les ressortissants de l'Etat d'envoi et de se rendre auprès d'eux.  Les ressortissants de l'Etat d'envoi doivent avoir la même liberté de communiquer avec les fonctionnaires consulaires et de se rendre auprès d'eux;


b) Si l'intéressé en fait la demande, les autorités compétentes de l'Etat de résidence doivent avertir sans retard le poste consulaire de l'Etat d'envoi lorsque, dans sa circonscription consulaire, un ressortissant de cet Etat est arrêté, incarcéré ou mis en état de détention préventive ou toute autre forme de détention.  Toute communication adressée au poste consulaire par la personne arrêtée, incarcérée ou mise en état de détention préventive ou toute autre forme de détention doit également être transmise sans retard par lesdites autorités.  Celles-ci doivent sans retard informer l'intéressé de ses droits aux termes du présent alinéa;


c) Les fonctionnaires consulaires ont le droit de se rendre auprès d'un ressortissant de l'Etat d'envoi qui est incarcéré, en état de détention préventive ou toute autre forme de détention, de s'entretenir et de correspondre avec lui et de pourvoir à sa


représentation en justice.  Ils ont également le droit de se rendre auprès d'un ressortissant de l'Etat d'envoi qui, dans leur circonscription, est incarcéré ou détenu en exécution d'un jugement.  Néanmoins, les fonctionnaires consulaires doivent s'abstenir d'intervenir en faveur d'un ressortissant incarcéré ou mis en état de détention préventive ou toute autre forme de détention lorsque l'intéressé s'y oppose expressément.


2. Les droits visés au paragraphe 1 du présent article doivent s'exercer dans le cadre des lois et règlements de l'Etat de résidence, étant entendu, toutefois, que ces lois et règlements doivent permettre la pleine réalisation des fins pour lesquelles les droits sont accordés en vertu du présent article.»


Dans sa requête, le Mexique soutient que ces cinquante-quatre cas illustrent le caractère systématique de la violation, par les Etats-Unis, de l'obligation qu'ils ont, aux termes de l'article 36 de la convention de Vienne, d'informer les ressortissants mexicains de leur droit à une assistance consulaire, et de veiller à réparer de façon adéquate les effets d'une telle violation.  Le Mexique affirme que, dans au moins quarante-neuf de ces cas, il n'a trouvé aucun élément prouvant que les autorités compétentes des Etats-Unis aient tenté de se conformer aux dispositions de l'article 36 avant que les ressortissants mexicains ne soient jugés, reconnus coupables et condamnés à mort.  Le Mexique relève également que, dans quatre affaires, les Etats-Unis, apparemment, ont essayé de tenir compte de l'article 36, mais que les autorités américaines ont omis de fournir «sans retard» la notification requise.  Le Mexique note aussi que, dans un cas, le ressortissant qui était détenu a bien été informé de ses droits en matière de notification consulaire et de communication entre consulats et ressortissants étrangers, mais que cela s'est produit dans le cadre d'une procédure d'immigration, et non dans le cadre d'une affaire où l'enjeu est la peine capitale.  Dans la requête, chaque cas est brièvement décrit, Etat par Etat.


«En conséquence, le Gouvernement des Etats-Unis du Mexique prie la Cour

de dire et juger que :


1) en arrêtant, détenant, jugeant, déclarant coupables et condamnant les cinquante-quatre ressortissants mexicains se trouvant dans le quartier des condamnés à mort, dont les cas sont décrits dans la présente requête, les Etats-Unis d'Amérique ont violé leurs obligations juridiques internationales envers le Mexique, en son nom propre et dans l'exercice du droit qu'a cet Etat d'assurer la protection consulaire de ses ressortissants, ainsi qu'il est prévu aux articles 5 et 36, respectivement, de la convention de Vienne;


2) le Mexique a en conséquence droit à la restitutio in integrum;


3) les Etats-Unis d'Amérique ont l'obligation juridique internationale de ne pas appliquer la doctrine de la carence procédurale (procedural default), ni aucune autre doctrine de leur droit interne, d'une manière qui fasse obstacle à l'exercice des droits conférés par l'article 36 de la convention de Vienne;


4) les Etats-Unis d'Amérique ont l'obligation juridique internationale d'agir conformément aux obligations juridiques internationales susmentionnées dans le cas où, à l'avenir, ils placeraient en détention les cinquante-quatre ressortissants mexicains se trouvant dans le quartier des condamnés à mort ou tout autre ressortissant mexicain sur leur territoire ou engageraient une action pénale à leur encontre, que cet acte soit accompli par un pouvoir constitué, législatif, exécutif, judiciaire ou autre, que ce pouvoir occupe une place supérieure ou subordonnée dans l'organisation des Etats-Unis ou que les fonctions de ce pouvoir présentent un caractère international ou interne; et


5) le droit de notification consulaire garanti par la convention de Vienne est un droit de la personne humaine;


et que, conformément aux obligations juridiques internationales susmentionnées :


1) les Etats-Unis d'Amérique doivent restaurer le statu quo ante, c'est-à-dire rétablir la situation qui existait avant les actes de détention, de poursuite, de déclaration de culpabilité et de condamnation des ressortissants mexicains commis en violation des obligations juridiques internationales des Etats-Unis d'Amérique;


2) les Etats-Unis d'Amérique doivent prendre les mesures nécessaires et suffisantes pour garantir que les dispositions de leur droit interne permettent la pleine réalisation des fins pour lesquelles sont prévus les droits conférés par l'article 36;


3) les Etats-Unis d'Amérique doivent prendre les mesures nécessaires et suffisantes pour établir en droit une voie de recours efficace contre les violations des droits conférés au Mexique et à ses ressortissants par l'article 36 de la convention de Vienne, notamment en empêchant que ne soit, en droit interne, pénalisé sur le plan procédural un ressortissant n'ayant pas, en temps voulu, fait valoir une réclamation au titre de la convention de Vienne ni excipé de celle-ci dans le cadre de sa défense, lorsque des autorités compétentes des Etats-Unis d'Amérique ont violé l'obligation qui est la leur d'informer ce ressortissant des droits qu'il tire de cette convention; et


4) les Etats-Unis d'Amérique doivent, au vu du caractère récurrent et systématique des violations décrites dans la présente requête, donner au Mexique une pleine garantie que de tels actes illicites ne se reproduiront pas.


Dans sa requête, le Mexique invoque comme base de la compétence de la Cour l'article premier du protocole de signature facultative concernant le règlement obligatoire des différends qui accompagne la convention de Vienne sur les relations consulaires.  Celui-ci stipule que «[l]es différends relatifs à l'interprétation ou à l'application de la convention relèvent de la compétence obligatoire de la Cour internationale de Justice».


«Eu égard à l'extrême gravité et à l'imminence de la menace d'exécution d'un citoyen mexicain par des autorités des Etats-Unis en violation des obligations dont ceux-ci sont tenus vis-à-vis [de lui]», le Mexique a également déposé une demande urgente priant la Cour d'indiquer, en attendant l'arrêt définitif en l'instance, des mesures tendant à ce que les Etats-Unis prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu'aucun ressortissant mexicain ne soit exécuté et qu'aucune date d'exécution ne soit fixée pour aucun ressortissant mexicain; que les Etats-Unis portent à la connaissance de la Cour toutes les mesures qu'ils auront prises à cet égard; et que les Etats-Unis fassent en sorte qu'il ne soit pris aucune mesure qui puisse porter atteinte aux droits du Mexique ou de leurs ressortissants en ce qui concerne toute décision que la Cour pourrait prendre sur le fond de l'affaire.


Le texte intégral de la requête introductive d'instance et de la

demande en indication de mesures conservatoires du Mexique seront bientôt

disponibles sur le site internet de la Cour (www.icj-cij.org).


Département de l'information : M. Arthur Witteveen, premier secrétaire de la Cour (tél. : + 31 70 302 2336).  Mme Laurence Blairon et M. Boris Heim, attachés d'information (tél. : + 31 70 302 2337) Adresse électronique : information@icj-cij.org


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