ASSEMBLEE GENERALE: LA MOBILISATION DE RESSOURCES FINANCIERES ET L’ASSISTANCE TECHNIQUE JUGEES CRUCIALES DANS LA LUTTE ANTIMINES
Communiqué de presse AG/1454 |
Assemblée générale
58 séance plénière – matin
ASSEMBLEE GENERALE: LA MOBILISATION DE RESSOURCES FINANCIERES ET L’ASSISTANCE TECHNIQUE JUGEES CRUCIALES DANS LA LUTTE ANTIMINES
La corne de l’Afrique est l’une des régions les plus affectées par le fléau des mines antipersonnel, a fait valoir ce matin le représentant de l’Erythrée au dernier jour du débat de l’Assemblée générale consacré à l’assistance à la lutte antimines. Actuellement, on évalue entre 1 500 000 et 1 650 000 le nombre de mines disséminées sur le territoire érythréen, a indiqué le représentant, notant que près du tiers du pays était affecté par ce phénomène aux conséquences dévastatrices pour les populations rurales, les éleveurs ou les personnes déplacées. Face à l’impact des mines terrestres sur les populations civiles les plus vulnérables, les délégations ont de nouveau insisté sur la nécessité de parvenir rapidement à la ratification universelle de la Convention d’Ottawa et souligné l’importance de la Stratégie d’action antimines proposée par le Secrétaire général des Nations Unies pour la période 2001-2005.
Au-delà de la ratification de la Convention d’Ottawa, la mobilisation de ressources financières et l’assistance technique internationale au déminage est toutefois essentielle, a estimé le représentant de la République démocratique du Congo qui a demandé que, dans le cadre de leur assistance à la reconstruction de son pays, les bailleurs de fonds intègrent l’action antimines et la prise en charge des victimes de ce fléau. A son tour, la Thaïlande a plaidé pour une assistance technique afin de pouvoir mener à son terme le programme de déminage d’ici à 2009 conformément aux dispositions de la Convention. Depuis le 24 avril 2003, tous nos stocks de mines antipersonnel sont détruits, a-t-il indiqué, soulignant toutefois les difficultés rencontrées en matière de déminage puisque seul 0,03% des zones infestées par les mines a été déminé à ce jour sur un total de 2556,7 km2.
Les délégations suivantes se sont également exprimées sur l’action antimines: Croatie, Zambie, Ethiopie, Soudan et République démocratique populaire lao. L’Ethiopie et l’Erythrée ont exercé leur droit de réponse.
L’Assemblée générale se réunira de nouveau le lundi 10 novembre, à 10 heures.
ASSISTANCE À LA LUTTE ANTIMINES
Déclarations
M. VLADIMIR DROBNJAK (Croatie) a estimé que les progrès accomplis dans la mise en œuvre des quatre objectifs de la Convention d’Ottawa étaient réels mais inégaux. Pour sa part, la Croatie s’est déclarée déterminée à atteindre ces objectifs ainsi qu’à promouvoir de nouvelles mesures et encourager des étapes innovatrices pour augmenter la communication directe entre les donateurs potentiels et les récipiendaires. Au niveau national, la Croatie a enregistré une baisse de 40% du nombre de victimes des mines antipersonnel, a souligné son représentant, qui a aussi mentionné la création du Centre régional d’Europe du Sud-Est pour la réhabilitation psychologique de Rovinj. La délégation croate a annoncé que grâce aux efforts conjoints de son gouvernement, du personnel de lutte antimines sur le terrain et de l’assistance internationale, son pays devrait être débarrassé des mines d’ici à 2009. En conclusion, la délégation croate, même si elle croit que la responsabilité du déminage devrait incomber aux pays qui ont déployé ces mines, accepte la solution du Protocole sur les explosifs de guerre, d’après laquelle ces pays s’associeraient étroitement avec ceux qui contrôlent le territoire à déminer.
M. PRAVIT CHAIMONGKOL (Thaïlande), commentant le rapport du Secrétaire général sur la lutte antimines, a déploré l’impact de la prolifération des mines antipersonnel sur la sécurité humaine, les mines provoquant entre 15 000 et 20 000 accidents graves chaque année dans le monde, ainsi que sur le développement économique et social. Comment surmonter dès lors le défi posé par les mines terrestres, s’est interrogé le représentant, avant de souligner l’intérêt de la Stratégie anti-mines proposée par le Secrétaire général pour 2001-2005 et de proposer une approche intégrée couvrant à la fois la sensibilisation, la destruction des mines et l’adhésion universelle à la Convention d’Ottawa. M. Chaimongkol a suggéré la mise en œuvre de partenariats entre gouvernements, société civile et secteur privé et a fait part de la détermination de son pays à prendre la direction de ces efforts, en particulier après avoir accueilli en septembre 2003 la cinquième Réunion des Etats parties à la Convention d’Ottawa. La Thaïlande a achevé le 24 avril dernier la destruction de ses stocks de mines antipersonnel, a annoncé ensuite le représentant, déplorant toutefois que seul 0,03% des zones infestées aient été déminées à ce jour. Il a encouragé par conséquent le Service d’action antimines des Nations Unies, le PNUD, l’UNICEF et certains bailleurs de fonds comme la Norvège, le Royaume-Uni ou le Japon, à poursuivre leur appui aux Etats dans la mise en œuvre de la Convention d’Ottawa.
M. ZULU KILO-ABI (République démocratique du Congo)a salué les progrès accomplis dans la stratégie de lutte antimines de l’ONU, soulignant que ce fléau mondial touchait toujours des populations innocentes, particulièrement dans les milieux ruraux, les empêchant de vivre normalement et de jouir de leurs terres après les conflits. Se félicitant par ailleurs que de plus en plus d’Etats soient parties à la Convention d’Ottawa et rappelant que la République démocratique du Congo était elle-même signataire, il a appelé ceux qui ne l’ont pas encore fait à la ratifier au plus vite. Le représentant a également estimé que des progrès avaient été sensibles dans la prise de conscience collective de la réalité du problème des mines. Par ailleurs, le représentant a souligné que la République démocratique du Congo sortait d’une guerre meurtrière de plus de cinq ans et était par conséquent affectée –même si moins que d’autres- par le problème des mines antipersonnel. A cet égard, il a appelé la communauté internationale à fournir à son pays l’aide nécessaire pour lutter contre ce fléau, dans le cadre de l’Assistance spéciale pour le redressement économique de la République démocratique du Congo. Il a notamment fait valoir la nécessité d’augmenter les ressources allouées à l’action antimines, de mettre en place une prise en charge des blessés affectés par les mines, d’appuyer la préparation et la mise en œuvre des opérations de déminage ainsi que de soutenir la création d’une capacité nationale de déminage à travers tout le pays.
M. AMARA TEKLE (Erythrée) a rappelé que la corne de l’Afrique était l’une des régions les plus affectées par le fléau des mines antipersonnel, précisant ensuite que le nombre de ces mines disséminées sur le territoire érythréen est évalué entre 1 500 0000 et 1 650 000 et que près du tiers du pays était affecté par ce phénomène aux conséquences dévastatrices pour les populations rurales, les éleveurs ou les personnes déplacées. Les mines ont des conséquences sérieuses sur le développement économique et social, a-t-il dit, déplorant que les maigres ressources nationales soient détournées vers l’action antimines car elle constitue le préalable à la réinstallation des personnes déplacées. La guerre déclenchée en 1998 a été encore plus meurtrière et le nombre de mines disséminées était plus important en deux ans et demie que pendant les trente années de la guerre précédente, a souligné M. Tekle, ajoutant que l’agresseur, une fois parti, n’a laissé aucune carte permettant d’identifier les champs de mines. L’action antimines est la clef du retour à la normalité, a-t-il déclaré ensuite, admettant toutefois que l’adhésion de l’Érythrée à la Convention d’Ottawa est récente. Cependant, nous avions commencé à mettre en œuvre des programmes de lutte antimines bien avant notre adhésion à cette Convention, a-t-il dit ensuite, précisant que le Centre national de déminage a été créé dès l’indépendance de 1993 alors que le programme avait commencé en 1991. Le déminage est coûteux, a-t-il dit, soulignant qu’entre 1993 et 1998, le début de l’agression éthiopienne, près de 450 000 mines avaient été neutralisées sur le terrain. Aujourd’hui, a-t-il dit, nous avons un besoin urgent dans le domaine du renforcement des capacités et il importe que la Commission du déminage, mise en place en 2002, dispose de l’appui nécessaire de la communauté internationale afin d’achever une grande partie de sa stratégie de déminage d’ici à 2007. La lutte antimines doit être menée à l’échelon régional, a-t-il dit ensuite, proposant la mise en place d’une zone exempte de mines dans la corne de l’Afrique mais déplorant à ce titre le rejet des propositions d’Asmara par l’Éthiopie.
M. BERNARD MPUNDU (Zambie) a appelé à une meilleure coopération et coordination des programmes de l’action antimines entre civils et militaires au niveau local: où il serait nécessaire d’y créer des institutions mixtes afin de renforcer la capacité d’action. Reconnaissant l’importance d’intégrer les impératifs de développement aux stratégies de lutte antimines, le Gouvernement zambien a pour sa part pris la mesure de l’impact socioéconomique des mines terrestres sur la société. Avec le soutien des Etats-Unis, le Centre zambien d’action antimines (ZAMAC) a ainsi déminé des terrains concernés par un vaste projet financé par la Banque mondiale intitulé «Projet de développement Gweembe-Tonga» situé dans la vallée Zambezi. Une fois mené à terme, le projet permettra de lutter contre la pauvreté parmi les personnes déplacées par la construction du projet Kariba en 1956. Saluant ensuite l’action de l’UNMAS, la Zambie a demandé des fonds supplémentaires pour soutenir ses efforts et indiqué par ailleurs que le ZAMAC nécessitait une assistance pour la formation de son personnel.
M. TERUNEH ZENNA (Ethiopie) a indiqué qu’en Afrique, son pays était parmi les plus touchés par les mines antipersonnel. Il a expliqué que des guerres, internes ou externes, l’avaient affecté successivement en 1930 puis dans les années 70 et 80, laissant de larges zones infestées par les mines antipersonnel et les engins non explosés (UXO). Ces derniers sont estimés par l’Office éthiopien d’action contre les mines (OEAM) à plus de 2 millions, a poursuivi le représentant. Elles se trouvent réparties sur de vastes étendues de terres où vivent des milliers de gens, particulièrement dans les régions du nord, de l’est et du sud-est, devenues inaccessibles aux paysans et aux éleveurs, a-t-il affirmé. Ce problème complique le retour des réfugiés et la réinsertion des personnes déplacées, et aurait fait, selon le rapport de l’OEAM, près de 637 morts et blessés. Depuis sa création en 1991, l’Office a réalisé un certain nombre de points du Plan d’action sur 20 ans pour rendre l’Ethiopie libre de mines et d’UXO. Le Gouvernement éthiopien a accordé une grande importance au renforcement des capacités de l’OEAM, à qui il a accordé un budget de près de 3 millions de dollars. Le pays mérite toutefois une attention particulière, a-t-il conclu, en remerciant la communauté internationale pour les efforts qu’elle a déjà accomplis pour l’aider à vaincre le fléau.
M. ALI SAEED (Soudan) s’est inquiété à son tour de l’impact des mines terrestres sur les populations civiles sur le continent africain. Rappelant ensuite que son pays avait adhéré à la Convention d’Ottawa, il a indiqué que son gouvernement avait mis en place des mécanismes visant à atténuer l’impact des mines sur les populations rurales et les populations déplacées. Le Commissariat national à l’aide humanitaire et les unités de génies sont en train de mettre en place une base de données sur l’impact des mines grâce à la cartographie tandis que des mesures sont prises pour sensibiliser les populations civiles aux dangers posés par les mines grâce au soutien de l’Union européenne. Le programme de déminage mis en œuvre dans la région des montagnes de Nubie, grâce à l’assistance technique des Nations Unies et de l’Union européenne, devrait nous permettre de réinstaller prochainement des populations déplacées sur leurs terres, a-t-il conclu.
M. ALOUNKEO KITTIKHOUN (République populaire démocratique lao) a affirmé que son pays continue de pâtir des conséquences des bombardements qui se sont produits pendant une très longue guerre, entre 1963 et 1972. Ces bombes sont partout au Lao, a-t-il ajouté, et pour s’attaquer au problème, la République populaire démocratique lao a créé un fonds d’affectation spéciale destiné à sensibiliser la population au danger; à déminer et débarrasser le pays de ses mines; à faire une enquête et un relevé; enfin à former le personnel nécessaire. Si 125km2 de terrains ont été déminés et qu’un million de personnes ont été sensibilisées au danger des mines, le représentant a ajouté qu’une aide humanitaire et une aide au développement restaient nécessaires. La délégation lao a donc appelé à ce titre la communauté internationale à continuer d’aider son pays à régler ce problème des mines.
Droits de réponse
le représentant de l’Ethiopie s’est étonné des accusations de l’Erythrée qui qualifiait son pays d’agresseur alors même qu’en 10 années à peine d’existence, l’Erythrée a été en crise avec la quasi-totalité de ses voisins. Rappelant le contenu des rapports de l’Organisation de l’unité africaine, il a indiqué que ces derniers soulignaient clairement la responsabilité de l’Erythrée dans le déclenchement de la guerre de 1998. Il a rejeté les accusations relatives à la dissémination par son armée de mines terrestres sur le territoire érythréen.
Intervenant à son tour, le représentant de l’Erythrée a confirmé ses allégations et déploré que l’Ethiopie ait donné une lecture mensongère des événements pour encourager la communauté internationale à renvoyer les deux pays dos à dos. Trois pays ont été identifiés dans un article de Steven Edwards en 1999 comme posant encore des mines, a-t-il poursuivi, et parmi eux, l’Ethiopie. Cet article a été confirmé dans un rapport du Secrétaire général paru sous la cote S/2002/245 qui mentionne les champs de mine dans la zone de démarcation. L’Ethiopie a refusé de nous donner les cartes des champs de mines, a-t-il rappelé, et quand elle l’a fait, elles ne servaient plus à rien. Il a mis en doute la volonté de l’Ethiopie de respecter les Accords d’Alger.
Le représentant de l’Ethiopie a insisté sur le fait que son gouvernement était lié par les Accords d’Alger tout en distinguant ce document de la décision prise par la Commission de délimitation de la frontière entre les deux pays.
L’Erythrée a jugé stupéfiant que l’Ethiopie s’autorise à séparer le mandat de la Commission de délimitation des frontières des Accords d’Alger qui ont été entérinés par le Conseil de sécurité.
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