AUDITION DE PETITIONNAIRES SUR LA QUESTION DU SAHARA OCCIDENTAL ET D’UN REPRESENTANT DES ILES VIERGES AMÉRICAINES
Communiqué de presse CPSD/241 |
Quatrième Commission CPSD/141
4ème séance - après-midi 2 octobre 2002
AUDITION DE PETITIONNAIRES SUR LA QUESTION DU SAHARA OCCIDENTAL ET D’UN REPRESENTANT DES ILES VIERGES AMÉRICAINES
La Quatrième Commission a poursuivi son débat général sur la décolonisation, avec l'audition du représentant des îles Vierges américaines et de pétitionnaires qui se sont exprimés sur la question du Sahara occidental.
M.Carlyle Corbin, représentant des Iles vierges américaines, a notamment abordé le sujet de l’aide des Nations Unies aux territoires non autonomes, et a rappelé que l’Assemblée générale et l’ECOSOC avaient adopté un certain nombre de résolutions relatives à la participation directe des territoires non autonomes aux travaux de l’ONU. A cet égard, il s'est félicité du rôle positif joué par les commissions régionales des Nations Unies, en particulier la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes et la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique, dans la mise en oeuvre pratique de ce processus de participation. Il a également remercié les institutions des Nations Unies qui ont modifié leurs règlements afin de permettre aux territoires non autonomes de prendre part à leurs travaux en tant qu’observateurs ou membres associés.
Sur la question du Sahara occidental, les pétitionnaires ont pour la plupart réaffirmé la validité du principe du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, et que le seul moyen de pouvoir parvenir à une solution pacifique du conflit consiste à réaliser le plus rapidement possible le référendum d’autodétermination du peuple sahraoui. Le représentant du Front Polisario s’est interrogé sur les raisons du retard dans l’application de ce Plan de règlement, et a expliqué que cette situation conduit le peuple sahraoui à perdre la foi qu’il avait placée dans les Nations Unies. Il a ajouté qu’il était difficile de comprendre pourquoi les Nations Unies n’ont pas encore réussi à organiser un référendum d’autodétermination au Sahara occidental basé sur un Plan de règlement accepté par les parties en 1991, alors qu’elles ont mené à bout le processus de décolonisation au Timor oriental, en Namibie, à Belize et au Surinam. Certains pétitionnaires ont insisté sur la situation humanitaire difficile qui prévaut dans les territoires sous occupation, et ont exhorté la communauté internationale à se mobiliser pour apporter une assistance adéquate au peuple sahraoui tant qu’une solution définitive n’aura pas été trouvée au conflit.
Sur la question du Sahara occidental, la Commission a entendu les pétitionnaires suivants: M. Raynal, Intergroupe du Parlement Européen; M. Rodriguez, Fédération des droits de l’homme de l’Espagne; M. Liceras, Professeur de droit public international; Mme Navarro Poblet, Juriste espagnole; M. Lopez Ortiz, Federacion Estatal de instituciones solidaria’s con el pueblo sahraoui; M. Felipe Briones Vives, Association internationale des juristes pour le Sahara occidental; Mme Claudina Morales, Sénateur (Espagne); M. Ahmed Boukhari, Frente
popular para la Liberacion de Saqui el-Hamra y de Rio de Oro (Front POLISARIO); Mme Hilt Teuwen, Oxfam Solidarity (Belgique); Mme Suzanne Scholte, Présidente de
Defense Forum Foundation; Mme Nina May, Présidente, The Renaissance Foundation; M. Dan Stanley, Pasteur, Manna Church; M. Frank Ruddy; Mme Karin Finkler au nom de M. Joseph R. Pitts, Membre du Congrès des Etats-Unis; Mme Camargo, American Association of Jurists
La Quatrième Commission poursuivra ses travaux le jeudi 3 octobre à 15 heures.
AUDITION DES REPRESENTANTS DES TERRITOIRES NON AUTONOMES
AUDITION DE PETITIONNAIRES
Déclarations
M. CARLYLE CORBIN, représentant chargé des relations extérieures des îles Vierges américaines, a rendu hommage aux travaux du Comité des 24, notamment la mission de visite aux Tokélaou. Il considère que ce type de missions sont importantes pour les Etats Membres parce qu’elles permettent d’analyser la situation des territoires non autonomes in situ. Il faut se souvenir que le Plan d’action de la Première Décennie pour l’élimination du colonialisme préconisait une étude approfondie des implications des options possibles de décolonisation pour tous les territoires, or au début de la deuxième Décennie il n’a pas encore été donné suite à cette recommandation. Ce point a été soulevé dans la déclaration faite au nom des pays du Caricom hier, et devrait être pris en considération par le Comité spécial, car cela permettrait, d’une part, aux Etats Membres de disposer d’informations pertinentes, et d’autre part de sensibiliser les populations des territoires aux options possibles. Les séminaires régionaux sont également un moyen intéressant de collecte d’informations de première main a souligné M. Corbin. Les informations ainsi obtenues devraient être prises en compte dans les recommandations et résolutions de la Quatrième Commission. M. Corbin souhaite que l’Assemblée générale soit plus engagée dans l’application concrète des résolutions portant sur la décolonisation, car pour les habitants des territoires non autonomes l’inertie dont fait preuve l’Organisation ne sera bientôt plus supportable.
Abordant la question de l’aide des Nations Unies aux territoires non autonomes, M. Corbin a rappelé que l’Assemblée générale et l’ECOSOC avaient adopté un certain nombre de résolutions sur la participation directe des territoires aux travaux de l’ONU. A cet égard il s'est félicité du rôle positif joué par les commissions régionales des Nations Unies, notamment la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes et la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique, dans la mise en oeuvre de ce processus de participation. Il a remercié également les institutions des Nations Unies qui ont modifié leurs règlements afin de permettre aux territoires de prendre part à leurs travaux en tant qu’observateurs ou membres associés. Dans ce contexte, M. Corbin a rappelé les développements récents au sein de l’Unesco et a exprimé le souhait de son pays de devenir membre associé de cette organisation. Il est également important pour les petits Etats insulaires d’obtenir des statuts d’observateurs auprès des organisations régionales, et les Iles Vierges américaines espèrent que le Caricom donnera une suite favorable à leur demande de statut d’observateur, à l’instar de Porto Rico.
M. PATRICK LEWIS (Antigua-et-Barbuda au nom des pays du Caricom), a été surpris par la demande de statut d’observateur des îles vierges américaines auprès du Caricom et a souhaité des éclaircissements.
M. CORBIN a expliqué que cette demande avait été présentée en avril au Caricom.
M. MIGUEL MAYOI I RAYNAL, Intergroupe, Parlement Européen, a fait un rappel historique de la situation du Sahara occidental depuis 1963 et a souligné qu’en 1999, la MINURSO avait achevé le travail de préparation du référendum et établi une liste de votants sahraouis de 85.436 personnes. A ce stade, on aurait pu penser que rien ne s’opposerait plus à l’exercice du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, mais c’était sans compter sur la mauvaise foi de la puissance occupante, qui enregistrait 130 000 appels dénués de toute base juridique ou technique, a déclaré le pétitionnaire. Evoquant l’accord-cadre qui avait été proposé l’an dernier par M. Kofi Annan et son Envoyé personnel, M. James Baker, il a déclaré qu’il s’agissait en fait d’une renonciation au droit à l’autodétermination, satisfaisant ainsi les vœux de la puissance occupante. Il s’est félicité du fait qu'entre temps, le Conseil de sécurité, l’Assemblée générale et cette Commission ont écarté cette option, rappelant que la résolution 1429 du 30 juillet 2002 du Conseil de sécurité réaffirme que la solution ne peut passer que par l’exercice du droit à l’autodétermination. Il a regretté que cette résolution n’invoque jamais le caractère colonial de l’occupation marocaine et qu’elle réclame la libération de prisonniers marocains détenus par le Front Polisario sans évoquer le cas des Sahraouis détenus par le Maroc. Il a rappelé que le front a fait preuve de bonne volonté en libérant la plupart de ces détenus. Toutefois, cette résolution souligne le point essentiel, à savoir le référendum d’autodétermination. Pour le pétitionnaire, la stratégie du Maroc est claire, il s’agit de gagner du temps pour créer une situation de fait irréversible, en transformant le Sahara occidental en colonie de peuplement, et en tentant d’acheter la complicité de certains Etats Membres.
Il est clair que si l’on veut permettre au peuple sahraoui de choisir librement son destin, il faut que les Nations Unies exercent toute leur autorité, y compris s’il y a lieu le recours à la force pour faire prévaloir les principes de la Charte fondatrice. Il s’agit d’une question de volonté politique a affirmé le pétitionnaire. Il a exprimé son souhait de voir la République arabe sahraouie démocratique siéger au Nations Unies d’ici à l’an 2010 en qualité de membre à part entière.
M. FRANCISCO JOSE ALONSO RODRIGUEZ, Ligue espagnole des droits de l’homme, a déclaré que les réfugiés sahraouis connaissent au camp de Tindouf une situation de pénurie alimentaire qui nécessite une aide urgente. L’absence d’assistance économique, aurait des conséquences très graves sur la santé des réfugiés sahraouis, notamment les enfants, a-t-il fait observer. Il a exhorté la communauté internationale à venir en aide au PAM et au HCR qui s’occupent des réfugiés des Camps de Tindouf. Nous ne pouvons en aucun cas accepter que les fonds consacrés à l'aide aux réfugiés ne soient pas à la hauteur des besoins.
De nombreux experts voient dans l’attitude militaire du Royaume du Maroc une « tentative de génocide » dirigée à l’encontre du peuple du Sahara a-t-il affirmé. La liste des violations des droits de l’homme au Sahara occidental pourrait être longue tant elle va des exécutions extra-judiciaires au bombardement au napalm, dans le cadre d’une politique de colonisation qui vise la dénaturation de la composition démographique du territoire. Le conflit du Sahara occidental a été tant condamné à l’oubli et à la fraude qu’il se trouve aujourd’hui dans l’impasse. Cette situation exige une réaction ferme des Nations Unies. La seule solution au conflit passe par un référendum juste et légal organisé par les Nations Unies. Seule une politique occidentale catégorique est à même de stopper les intentions expansionnistes du Royaume du Maroc et d’éviter un nouveau conflit armé. Pour conclure, la Ligue demande officiellement au Gouvernement espagnol l’octroi de la double nationalité au peuple sahraoui pour compenser la dette de l’Espagne envers ce peuple.
M. JUAN SOROETA LICERAS, Professeur de droit public international, de l'université del País Vasco d'Espagne a remarqué qu’il ressort du dernier rapport du Secrétaire général sur la situation au Sahara occidental que le droit international est en perte de vitesse dans le règlement du conflit. En effet, ce rapport confirme cette tendance dans la mesure où il affirme qu’il y a une absence de coopération des parties et que cela est dû à la nature des belligérants, alors même que le Front Polisario n’a cessé de faire preuve de patience et de volonté politique pour trouver une solution pacifique au problème. Toutefois, s’interroge le pétitionnaire, comment peut-on envisager de trouver une solution qui profite aux deux parties, lorsque l’une occupe et exploite un territoire alors que l’autre ne recherche qu’à satisfaire son droit à l’autodétermination. Rappelant que le rapport du Secrétaire général qualifiait le Maroc de Puissance administrante, le pétitionnaire s’est félicité du fait que le Conseiller juridique des Nations Unies ait corrigé cette affirmation.
Abordant la question de la paralysie du processus d’identification, il a affirmé que le Royaume du Maroc est seul responsable de cette situation. Par ailleurs, selon lui, les Accords de Huston auraient pour unique objectif de permettre au Maroc de poursuivre l’exploitation le plus longtemps possible du Sahara occidental et de repousser le plus loin possible la tenue du référendum pour l’autodétermination.
En ce qui concerne les problème éventuels à l’application du Plan de paix, évoqués dans le rapport du Secrétaire général, le pétitionnaire a souligné que cette application relève de l’autorité du Conseil de sécurité et, par conséquent, ce dernier devra prendre les mesures nécessaires.
En ce qui concerne les troisième et quatrième voies proposées dans le rapport pour le règlement du conflit, M. Soroeta a estimé qu’il s’agit d’une manière de rejeter le plan de paix. Il se félicite que la troisième voie ait été rejetée par les Nations Unies. A propos des arguments invoqués par le Secrétaire général pour justifier la quatrième voie, à savoir le partage du territoire, il a estimé que le traité invoqué est nul.
Le pétitionnaire a déclaré que, après avoir consacré quelque 500 millions de dollars et des années de travail au Sahara occidental, il est inacceptable que les Nations Unies puissent se retirer sans avoir réussi à y organiser le référendum d’autodétermination. On entend de plus en plus l’argument qu’il faut abandonner le plan de paix parce qu’il existe des problèmes techniques. Cet argument ne peut être accepté, car il s’agit d’un manque de volonté du Maroc de finaliser le processus d’identification afin de pouvoir organiser ce référendum a affirmé le pétitionnaire. Il a lancé un appel à la Quatrième Commission et aux Nations Unies afin qu’elles soient à la hauteur des attentes du peuple sahraoui, car si le plan de paix est abandonné ce peuple n’aurait d’autre recours possible que de revenir à la lutte armée.
Mme CRISTINA NAVARRO POBLET, juriste, qui faisait partie de la délégation des observateurs qui se sont rendu à Laayoune a déclaré que plus que jamais le Comité spécial a l’obligation de faire appliquer le Plan de règlement et de faire respecter le droit international au Sahara occidental. Depuis l’occupation de ce territoire par le Maroc en 1975, les nombreuses violations des droits de l’homme ont été systématiques, continues et elles sont restées impunies. De nombreux rapports établis par des organisations internationales confirment les pratiques suivantes: arrestations arbitraires et illégales, torture, mauvais traitements physiques et psychologiques, interdiction des libertés fondamentales, répression brutale des prisonniers sahraouis ainsi que le manque total de garantie de procès conforme au droit et l’absence de protection légale efficace.
Mme Navarro Poblet a ensuite témoigné de son expérience personnelle en tant que membre d’une mission d’observateurs juridiques pour assister à un procès criminel devant la Cour d’appel de Laayoune. Ce procès traduisait en justice 16 prisonniers sahraouis qu’il accusait d’avoir participé à des manifestations en faveur de l’indépendance du Sahara occidental dans la ville de Smara. Sur les 16 prisonniers, 9 ont été condamnés par la justice marocaine à deux ans de prison ferme, et 5 à six mois de prison avec amende. Mme Navarro Poblet a ensuite abordé en détail les nombreuses et différentes fautes, lacunes, et violations du droit au cours d’un procès qui selon la mission n’aurait pas dû avoir lieu.
M. ANTONIO LOPEZ ORTIZ, Secrétaire de la Fédération espagnole des institutions solidaires du Peuple sahraoui, a évoqué l’histoire du Sahara occidental et son occupation illégale par les armées du Maroc et de la Mauritanie en 1975, qui ont privé le Peuple sahraoui de son droit à l’autodétermination. Il a jugé incompréhensible que le référendum sur l’autodétermination ne se soit toujours pas tenu. Le conflit armé qui a duré de 1975 à 1990 n’a pas permis de résoudre le problème, a-t-il rappelé. Puis les Nations Unies ont été chargées d’organiser la consultation qui était supposée se tenir en 1992. Mais dix ans plus tard, le problème persiste et menace de dégénérer en une confrontation armée et de créer une situation réellement explosive dans la région.
Grâce aux Nations Unies, a poursuivi M. Lopez Ortiz, l’une des questions clé préalables à la tenue du référendum est enfin résolue, celle du recensement des électeurs préparé par la Commission d’identification qui en a dénombré 86000 en janvier 2000. Mais le Gouvernement du Maroc persiste à dresser des obstacles afin de retarder l’organisation du référendum. De quel respect des accords de l’ONU parle-t-on ? s’est demandé M. Lopez Ortiz, faisant observer qu’il n’y avait plus de libre accès aux territoires en cause depuis que le Gouvernement du Maroc avait exercé un droit de veto sur la question. Le Sahara Occidental est une forteresse imprenable, une violation des valeurs démocratiques du monde libre, pour M. Lopez Ortiz, qui a estimé que les Nations Unies se trouvaient aujourd’hui à la croisée des chemins: ou elles prennent les mesures économiques et politiques nécessaires pour convaincre le Gouvernement marocain de se conformer au plan de paix ou elles reconnaissent l’échec du processus avec la perte de crédit et de confiance que cela suppose.
M. FELIPE BRIONES VIVES, Association internationale des juristes pour le Sahara occidental, a déclaré que désormais il semble que le règlement passe par la négociation politique, or pour cela il est indispensable qu’il y ait des négociations directes entre les parties concernées, dans le cadre défini par le Conseil de sécurité qui prévoit de maintenir la validité du Plan de règlement et le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui. Cela signifie que la négociation politique ne remettra pas en question l’option de l’indépendance et l’identification des votants faite par la Minurso. Il a souligné que, d’un point de vue légal, le Maroc ne dispose pas de la souveraineté sur le territoire du Sahara occidental, et n’est pas non plus une puissance administrante, statut qui revient toujours à l’Espagne. Le Maroc est une Puissance occupante. De ce fait, le statut du Sahara occidental est unique dans la mesure où il est administré par le Maroc qui ne dispose d’aucun droit qui puisse justifier sa présence sur ce territoire, et où il dépend légalement de l’Espagne qui continue à ne pas s’acquitter de son devoir.
M. Briones Vives s’est en outre indigné du fait que, alors que le Maroc continue d’exploiter de manière illégale les ressources naturelles du Sahara occidental à son profit, le peuple sahraoui souffre de conditions de vie difficiles, vit souvent en exil et ne reçoit qu’un dixième de l’aide humanitaire fournie par les organisations internationales. De même la juridiction exercée par le Maroc sur le peuple sahraoui est dramatique. En effet, il est impossible pour les représentants de la communauté internationale de traverser les frontières vers le Sahara occidental, alors même que le Maroc ne dispose d’aucun droit justifiant un tel exercice de sa souveraineté sur ce territoire. M. Briones Vives a également dénoncé le refus du Maroc de laisser des représentants politiques espagnols rencontrer le personnel des Nations Unies en poste au Sahara occidental, ainsi que les détentions arbitraires des sahraouis et les pratiques policières du Maroc dans les territoires occupés du Sahara occidental. Déclarant que la décolonisation du Sahara occidental représente le dernier processus de décolonisation de grande envergure, M. Briones Vives a demandé aux Nations Unies de prouver par les faits que la Deuxième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme ne représente pas que des bonnes intentions denuées de contenu.
Mme CLAUDINA MORALES RODRIGUEZ, Député du Parlement espagnol, s’exprimant au nom de l’Intergroupe parlementaire, a considéré que le Sahara Occidental relevait de la responsabilité historique de l’Espagne non seulement en tant qu’ancienne puissance coloniale jusqu’en 1975, mais aussi parce que son pays avait de la façon honteuse confié ce territoire au Maroc et à la Mauritanie en vertu de l’Accord tripartite de Madrid en 1975. Elle a rappelé que plus d’une centaine d’organisations non gouvernementales espagnoles soutenaient le droit à l’autodétermination du Peuple sahraoui et que plus de cinq cents municipalités espagnoles avaient passé des accords de jumelage avec le Sahara. Un Comité de solidarité a par ailleurs été créé au sein de la Fédération espagnole des provinces et municipalités, qui a rédigé un projet de motion appuyant le plan de paix approuvé par les Nations Unies et dénonçant toute tentative du Maroc de boycotter ce plan au profit d’une troisième voie présupposant l’annexion du territoire par le Maroc.
ºAu plan national, a expliqué la député, plus d’une dizaine d’initiatives en faveur du Sahara occidental ont été enregistrées en deux ans. Parmi les plus significatives, reflétant la position du Parlement espagnol, figurent une résolution du Sénat en date du 29 mars 2001 encourageant la recherche de la paix et le respect des résolutions des Nations Unies, une proposition de la chambre basse en date du 19 février 2002 soutenant le référendum et une déclaration du Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères, le 7 mars de la même année, affirmant devant les députés l’engagement de l’Espagne aux côtés des Nations Unies dans la recherche d’une solution et en faveur du plan de paix.
M. AHMED BOUKHARI, Front Polisario, a déclaré que le peuple sahraoui persiste à espérer que les Nations Unies vont mener à bout le processus de décolonisation entamé à travers l’application intégrale du Plan de règlement qui avait été accepté par les deux parties et le Conseil de sécurité en 1990, et qui permet de trouver une solution pacifique à ce conflit. Il a rappelé que l’application de ce Plan de règlement, ainsi que des Accords de Huston n’avaient pas eu lieu du fait du Maroc qui, en février 2000, a réalisé que le référendum d’autodétermination conduirait inévitablement à l’indépendance du peuple sahraoui. Le Maroc a fait obstacle aux efforts de la communauté internationale pour mener à bien le processus de décolonisation du Sahara occidental a affirmé M. Boukhari. Parallèlement, il y a eu et il persiste à y avoir des violations importantes des droits de l’homme dans les territoires occupés par le Maroc, ce qui a été reconnu par des organismes tels que Amnesty International et la Fédération internationale des droits de l’homme. M. Boukhari a notamment évoqué la situation des prisonniers politiques sahraouis détenus par le Maroc depuis l’invasion du territoire. Par ailleurs, le Maroc continue à exploiter les ressources naturelles du Sahara occidental, notamment le phosphate, les ressources de pêcherie et le pétrole. Toutes ces actions sont contraires au droit international, mais continuent d’être menées en toute impunité et en présence de la mission des Nations Unies sur place. Cette mission est littéralement à la merci de la volonté du Maroc a estimé M. Boukhari.
Compte tenu de cette situation sur le terrain, M. Boukhari s’interroge sur les raisons du retard dans l’application du Plan de règlement et du silence de la communauté internationale, ce qui conduit le peuple sahraoui à perdre la foi qu’il avait placée dans les Nations Unies. Il est difficile de comprendre pourquoi les Nations Unies n’ont pas réussi à ce jour à organiser un référendum d’autodétermination au Sahara occidental basé sur un Plan de règlement accepté par les parties, alors qu’elles ont mené à bout le processus de décolonisation au Timor oriental, en Namibie, à Belize et au Surinam.
Le peuple sahraoui a suffisamment souffert, et le moment est venu pour que les Nations Unies prennent des mesures concrètes pour garantir le respect du droit international en vue de mener à bien le processus de décolonisation au Sahara occidental. M. Boukhari a rappelé les deux développements importants de cette année, à savoir l'opinion juridique présentée par le Bureau des affaires juridiques des Nations Unies, à la demande du Conseil de sécurité, et publiée dans le document S/2002/161, et qui conclut que la présence du Maroc au Sahara occidental est contraire au droit international et qu’il s’agit d’une occupation de facto. L’autre événement est le fait que l’option de l’accord-cadre a été rejetée par le Conseil de sécurité, qui, aux termes de la résolution 1429 de juin dernier, réaffirme la validité du Plan de règlement.
M. Boukhari a réaffirmé que ce Plan de règlement reste le seul moyen de progresser vers une solution finale de ce problème. Il incombe au Maroc de coopérer avec les intérêts internationaux et de faciliter le travail des Nations Unies au Sahara occidental en vue de finaliser le processus de décolonisation.
Mme HILT TEUWEN, Oxfam Solidarity, a dressé un aperçu de la situation humanitaire des réfugiés sahraouis, qui vivent dans des campements à côté de Tindouf en Algérie, ainsi que de la population qui vit dans les territoires contrôlés par le front Polisario. Il ressort d’un communiqué de presse du HCR et du PAM daté du 29 août 2002, que 35% des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition chronique et 13% de cette même catégorie de malnutrition aiguë suite aux interruptions fréquentes dans les arrivages et à une nourriture trop peu diversifiée. En ce qui concerne la situation non alimentaire, Mme Teuwen a affirmé que les chiffres étaient également alarmants. Le budget qui était de 5.5 millions de dollars en 2001 n’est plus que de 2.6 millions de dollars et il est aussi frustrant pour les réfugiés de savoir que le HCR n’arrive même pas à dépenser ces budgets limités, bien que les besoins soient loin d’être satisfaits.
Mme Teuwen a souligné que certains donateurs, entre autres les donateurs bilatéraux, se fatiguent et se désengagent sous prétexte que le soutien aux réfugiés sahraouis dure depuis trop longtemps. Or, cette situation est dûe au fait que la communauté internationale ne s’implique pas suffisamment pour assurer le respect strict du droit international et des accords conclus pour garantir et mettre en oeuvre l’organisation de l’exécution du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui. En attendant cette solution politique, il est clair que tous les réfugiés sahraouis ont droit à la protection et à l’assistance adéquate et cela tant que la situation l’exige, à savoir tant que le conflit du Sahara occidental n’aboutit pas à une solution définitive.
Mme SUZANNE SCHOLTE, Defense Forum Foundation, a regretté que les Nations Unies n’aient pas réussi à organiser le référendum d’autodétermination du peuple sahraoui, en dépit du fait que le processus d’identification ait été mené à bout. Au lieu d’examiner les recours faits par le Maroc, les Nations Unies ont simplement décidé d’arrêter le processus. La situation a été compliquée davantage lorsque le Secrétaire général et son Envoyé personnel, M. James Baker, ont proposé quatre options de règlement au lieu de garder l’option du référendum qui était celle légitimée par toutes les parties. Elle s’est félicitée du fait que le Conseil de sécurité a rejeté le projet de l’accord-cadre, cette année.
Mme Scholte a estimé qu’il est essentiel que les Nations Unies poursuivent leurs efforts pour organiser le référendum dans les meilleurs délais sans quoi l’instabilité persistera dans la région et tout effort de développement au Maghreb sera compromis.
Mme NINA MAY, Fondation Renaissance a affirmé que le report continu du référendum d'autodétermination du peuple sahraoui sert les intérêts du Maroc qui peut ainsi manipuler le résultat futur d'un référendum en certifiant des personnes qui n'avaient pas vécu au Sahara occidental auparavant et en leur accordant un droit de vote. Mme May souhaiterait en outre obtenir des éclaircissements sur les origines du Sahara occidental en tant que colonie espagnole. Comment se fait-il que les Marocains n'aient revendiqué le Sahara occidental en tant que territoire marocain qu'en 1974, alors qu'ils n'avaient pas remis en question auparavant le contrôle espagnol? En qualité d'observateur, Mme May a l'impression que les Nations Unies ont été manipulées et contrôlées par un pays qui n'avait à aucun moment l'intention de respecter les résultats du référendum, ou encore de certifier les votants identifiés par la Minurso.
Evoquant l'option de l'accord-cadre qui avait été avancée l'année dernière, Mme May a affirmé qu'elle était contraire aux résolutions des Nations Unies relatives au Sahara occidental. Il lui parait que le Secrétaire général a proposé dans son dernier rapport quatre options pour le règlement sans avoir consulté les parties concernées par le conflit. Mme May a rappelé la position du Maroc qui a rejeté l'option du Plan de règlement ainsi que celle du partage du territoire, favorisant celle de l'accord-cadre qui lui accorde le contrôle sur la nation souveraine du Sahara occidental. Elle s'interroge sur la viabilité de la quatrième option, qui consiste à reconnaître l'échec des Nations Unies et entraînerait le retrait de la Minurso. Pourquoi ne peut-on pas appliquer la décision de la Cour internationale de Justice de 1975 et reconnaître le fait que le Sahara occidental est une nation souveraine, distincte de la nation souveraine du Maroc, et garantir au peuple sahraoui son droit à l'autodétermination, sans prendre en considération les dictats d'une organisation internationale qui n'a pas été en mesure de parvenir à cette solution logique.
M. DAN STANLEY, Eglise de la Fondation du Sahara occidental, Etats-Unis, a dit qu’il y a 40 ans, en 1960, la naissance de son fils a coïncidé avec l’adoption de la résolution 1514. Ce qui a nourri chez eux l’espoir de voir un jour le Sahara espagnol, son pays d’origine, libéré. Depuis, le Sahara est toujours sur la liste des pays qui ont le droit à la liberté. La première résolution adoptée au sujet du Sahara appelait à la décolonisation de ce territoire, et un an après une autre résolution nous accordait le droit à l’autodétermination. Notre rêve est devenu une réalité, a-t- il ajouté. Mais 40 années se sont écoulées au cours desquelles j’ai perdu mon père, j’ai perdu de vue mon frère, ma sœur a été brûlée au napalm et je vis sous une tente au milieu du mensonge et d’un désert. Je suis à présent une personne âgée et faible privée d’espoir et de dignité, a-t-il conclu.
M. FRANK RUDDY, ancien Ambassadeur des Etats-Unis, a jugé que la question du référendum sur le Sahara occidental avait été tellement débattue qu’il n’y avait plus rien à en dire. Il avait lui-même, en 1994, aidé à initier le recensement des électeurs pour la consultation. Il a donc vu en direct comment les Marocains avaient manipulé le processus d’enregistrement, excluant des milliers de Sahraouis et terrorisant la population du Sahara occidental. Quand les Marocains ont pris conscience de la proximité entre les Sahraouis des camps algériens et ceux des territoires sous occupation marocaine, ils ont compris que le référendum allait se retourner contre eux et ont alors entamé une campagne visant à entraver sa tenue, a-t-il estimé. Le processus d’identification a démarré le 28 août 1994 et, à cette date, la MINURSO a cessé d’être une opération dirigée par les Nations Unies pour devenir un instrument de la domination marocaine. Le Maroc, a-t-il indiqué, a mis les lignes de l’ONU sur écoute, fouillé les chambres du personnel de la MINURSO, sans que cela ne provoque la moindre réaction du représentant du Secrétaire général d’alors.
Pour M. Ruddy, l’Envoyé personnel du Secrétaire général, M. James Baker III, a représenté un grand espoir de remettre le référendum sur les rails. Mais après des années de navettes diplomatiques, il a, lui aussi, échoué. M. Baker avait recommandé qu’une période d’autonomie de cinq ans soit suivie d’un référendum. Mais si les Nations Unies avaient été incapables d’organiser un référendum en onze ans, il était illusoire de croire qu’elles y parviendraient en cinq. Les Nations Unies ont débattu d’autodétermination et condamné le colonialisme ad nauseam. Toutefois, si une clique d’autocrates dans un coin d’Afrique est capable d’empêcher l’ONU d’organiser un référendum, cela en dit long sur l’autorité morale et légale des Nations Unies.
Mme KARIN FINKLER, au nom de M. JOSEPH ROBERT PITTS, Membre du Congrès des Etats-Unis, a soulevé les tentatives récentes d'abandonner le Plan de règlement qui avait été accepté par les parties au conflit du Sahara occidental, sous prétexte qu’il n'existe pas de mécanisme permettant de garantir l’application des résultats du référendum d’autodétermination. Le report continu du référendum reflète, selon elle, l’incapacité des Nations Unies de jouer un rôle de leadership, voire un manque de volonté de sa part d’imposer aux parties concernées le respect des engagements pris dans le cadre du Plan de règlement. Toutefois, la résolution du Conseil de sécurité de juillet 2002 est positive en ce qu’elle rejette l’option de l’accord-cadre et réaffirme la validité d’une solution basée sur le principe du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui.
Mme Finkler a rappelé qu’entre-temps le peuple sahraoui vit dans des conditions difficiles dans des camps de réfugiés, et qu’en dépit de l’aide humanitaire fournie par les Nations Unies et les ONG, les enfants souffrent de malnutrition et la population ne jouit pas des droits fondamentaux. Elle a également fait part de rapports alarmants selon lesquels le Maroc aurait signé des accords d’exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental avec des compagnies étrangères, alors même qu’il ne dispose pas de la souveraineté dans ces territoires, et que toute exploitation de ces ressources sans l’accord du peuple sahraoui constitue une violation du droit international.
La situation du Sahara occidental est très proche de celle du Timor oriental. Pourquoi le monde ne vient-il pas au secours du peuple sahraoui comme il l’a fait pour le peuple du Timor oriental, s’est interrogée la pétitionnaire. Elle a lancé un appel à la Quatrième Commission afin qu’elle assume son rôle de leadership et a rappelé au Gouvernement du Maroc les engagements qu’il a pris sous le Plan de règlement et les Accords de Huston.
Mme GILMA CAMARGO, Association des juristes américains, a souligné l’engagement de l’Association en faveur du droit à l’autodétermination et contre le colonialisme. L’Association des juristes américains défend le droit du peuple sahraoui à l’indépendance et à l’autodétermination qui est reconnu par les Nations Unies. A cet égard, elle a exprimé l’appui de l’association au référendum et le rejet des autres propositions qui s’éloignent de l’esprit du Plan de règlement qui doit aboutir à la tenue d’un référendum sur le statut du Sahara. Elle a affirmé que ce qu’il est convenu d’appeler la troisième voie ou plan d’autonomie , non seulement ne constituait pas une solution au conflit mais risquait, si appliqué, de mettre en jeu la crédibilité de l’Organisation des Nations Unies..
Le référendum, a-t-elle insisté, reste la seule voie à emprunter vers la paix.. Tout éloignement de cette solution comporte des risques graves, y compris la reprise d’un conflit armé dont les conséquences seraient néfastes aussi bien pour les Sahraouis que pour les Marocains. Elle a également déclaré que l’ONU était très tolérante envers la partie marocaine et qu’elle ne devait pas oublier son obligation de protéger également l’exploitation des ressources naturelles du Sahara. Rappelant que l’occupation du Maroc du Sahara occidental est une violation du droit international, elle a exhorté l’Organisation à procéder à la décolonisation de ce territoire. Pour conclure, elle a souligné la situation humanitaire des réfugiés sahraouis des camps de Tindouf qui vivent dans des conditions précaires.
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